22/06/2011
(K-Drama / Special) Wonderful Coffee : un portrait de femme touchant et naturel
Cette semaine a été un peu plus calme dans mes programmations asiatiques. Il faut dire qu'après le choc White Christmas (dont je n'arrive toujours pas à arrêter de parler), il est bien difficile de revenir au quotidien "normal" des dramas en cours. Pour me changer les idées, j'ai fait quelques excursions du côté de Taïwan et de Hong Kong ce week-end, et je me suis aussi lancée dans un projet que j'envisageais depuis quelques mois déjà en Corée du Sud : jeter un oeil aux dramas special de KBS. Comme mon été s'annonce très chargé côté professionnel, j'avoue y voir aussi un moyen de garder la saveur du petit écran sud-coréen sans avoir à prendre trop d'engagement auprès de longs dramas (et disons que je n'ai pas non plus toujours le temps de consacrer autant d'heures à la rédaction d'une review comme le bilan de la semaine dernière).
J'ai déjà eu l'occasion de vous parler de ces cycles qui se rapprochent plutôt d'anthologies, avec des dramas special series, comme Rock Rock Rock ou, justement White Christmas. Mais on y trouve aussi des dramas special qui eux ne comporte qu'un seul épisode. Ce sont les articles d'Eclair et de Minalapinou qui avaient attiré mon attention sur ces derniers. Si je ne les reviewerai pas tous avec exhaustivité, j'ai quand même envie d'évoquer ceux qui auront retenu mon attention, d'une façon ou d'une autre.
C'est sur le troisième épisode de ce cycle que je vais m'arrêter aujourd'hui : Wonderful Coffee a été diffusé le 29 mai 2010 sur KBS2. S'il y aurait sans doute tout un article analytique à écrire sur les rapports fusionnels des dramas sud-coréens et de leur obsession l'art de faire du café, reste que ce simple mot inclus dans un titre résonnera toujours d'une façon particulière et chaleureuse aux oreilles du téléspectateur. La bonne nouvelle, c'est que Wonderful Coffee va savoir perpétuer cette diffuse magie de la boisson cafféiné.
Oh Jong est une mère de famille célibataire qui élève, seule, ses trois filles, chacun de ses enfants étant issus de différents pères. Si elle a l'habitude de cumuler les petits boulots, elle répond un jour à l'annonce d'un petit café. La grande amatrice de cette boisson qu'elle est se révèle vite des plus douées pour apprendre à concevoir les mélanges les plus rafinés. Oh Jong, d'un naturel enjoué et très social, prend également beaucoup de plaisir à intéragir avec ses clients. Elle parvient même peu à peu à faire s'ouvrir son si renfrogné patron, un ancien camarade d'école perdu de vue, Choi Chang, qui ne comprend pas grand chose aux relations humaines. Mais le parcours et les choix de vie d'Oh Jong demeurent une source d'exclusion sociale irréductible.
Wonderful Coffee est un drama special d'un classicisme assumé dans le bon sens du terme, qui va s'avérer étonnamment rafraîchissant rafraîchissant. Si son histoire ne présente pas de prise de risque particulière, il émane de l'ensemble une douce authenticité, pleine de chaleur humaine, caractéristique d'une fiction qui parvient à retranscrire sans artifice un émotionnel auquel le téléspectateur ne va pas demeurer insensible. Le charme de l'épisode réside essentiellement dans le portrait de son personnage principal : son naturel sociable et optimiste s'entremêle avec les préoccupations plus poignantes d'une mère de famille célibataire qui partage pourtant les préoccupations des femmes de son âge sur sa vie future et amoureuse. On s'attache instinctivement à cette femme volontariste dont on va suivre, avec implication, l'évolution.
Touchante histoire humaine, Wonderful Coffee n'en demeure pas moins éprouvant à l'occasion. Ne se cantonnant pas à une simple déclinaison des ingrédients de la romance, elle n'hésite pas à aborder de manière directe des thématiques sociales parfois dures. Car Oh Jong n'est pas une énième trentenaire rêvant de prince charmant. Elle sait ce qu'est la vie. Elle a déjà connu trois mariages et est aussi une mère de famille qui doit être présente pour ses trois filles. Si le drama special effleure avec tact cette problématique plus intime de savoir si elle peut encore envisager une vie amoureuse et avoir le droit d'espérer un futur avec quelqu'un, c'est par son autre grande thématique qu'il va surtout marquer : la mise en scène de l'opprobre social sous lequel Oh Jong ploie sans rompre, lorsque sa situation personnelle est connue. Les petites humiliations quotidiennes sont autant de coups de poignard invisibles, une forme de violence sociale toute aussi dure à endurer.
Si le personnage incarnant l'intérêt romantique de l'épisode correspond aux canons millimétrés du genre, c'est plus globalement l'atmosphère générale de ce drama special qui permet d'adhérer à l'histoire. Le café offre aussi quelques parenthèses traditionnelles, sur l'art de concevoir ces boissons arômatisées, à finalité folklorique - même si en l'occurence, le folklore étant français, cela donne surtout l'impression de renvoyer à un second degré involontaire qui prête à sourire (mais entendre prononcer quelques mots de français dans un drama est toujours sympathique). De plus, ce lieu est aussi un endroit de socialisation, où la volonté d'aller vers les autres d'Oh Jong trouve pleinement à s'exprimer.
Enfin, côté casting, Wonderful Coffee doit beaucoup à Yoon Hae Young (The Tale of Janghwa and Hongryeon) qui incarne, avec une spontanéité et un naturel rafraîchissants, le caractère enjoué et sociable de l'héroïne. A ses côtés, logiquement plus en retrait, on retrouve notamment Jo Yeon Woo (The Scarlet Letter) en patron forcément arrogant et peu versé dans le relationnel, Moon Hee Kyung (Harvest Villa, Giant) et Lee Han Na (Tazza).
Bilan : Derrière la partition classique que joue Wonderful Coffee, le charme opère grâce à l'authenticité et à la fraîcheur qui se dégagent de l'ensemble. Plus qu'une simple romance potentielle, c'est un portrait touchant et authentique d'une femme qui demeure, en dépit des petites brimades quotidiennes, inébranlablement fidèle à ses principes et ses certitudes de vie. Une jolie histoire simple et sans ambition particulière qui se suit sans déplaisir.
NOTE : 6,25/10
11:47 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : kbs, kbs drama special, yoon hae young, jo yeon woo, moon hee kyung, lee han na | Facebook |
19/06/2011
(Mini-série UK) The Shadow Line : un thriller à part sous haute tension
Si les "thrillers" ne manquent pas dans notre petit écran, il y en a peu qui peuvent se vanter de véritablement atteindre leur but en marquant le téléspectateur. C'est d'autant plus agréable lorsque vous tombez sur une période où les thrillers réussis s'enchaînent comme c'est le cas ces derniers temps dans mes programmes. Non seulement White Christmas aura provoqué chez moi une quasi-nuit blanche pour cause de taux d'adrénaline incapable de redescendre et d'esprit tourneboulé, mais de plus, ces dernières semaines, était diffusée outre-Manche une série qui aura mis mes nerfs à rude épreuve. : The Shadow Line.
Programmée en Angleterre, sur BBC2, du 5 mai au 16 juin 2011, cette mini-série compte un total de sept épisodes d'une heure chacun. Bénéficiant d'un solide casting (de Stephen Rea à Christopher Eccleston) et d'une esthétique à part, The Shadow Line est un thriller admirablement mis en scène, qui parvient à une tension d'une intensité aussi rare qu'éprouvante. Une fiction vraiment intéressante à plus d'un titre qui mérite sans aucun doute le détour.
L'histoire de The Shadow Line s'ouvre sur la découverte d'une scène de crime. Harvey Wratten, dirigeant d'une des organisations de trafic de drogue les plus puissantes d'Angleterre, venait d'être relâché de prison à la suite d'un pardon royal accordé de manière très surprenante. Mais c'est son cadavre que la police découvre quelques heures après sa libération, abandonné dans une voiture qui semble avoir été le cadre d'une froide et brutale exécution. La liste de ceux qui pouvaient en vouloir ou avoir intérêt à voir mort ce chef de cartel est particulièrement longue, et c'est l'enquête de ce meurtre qui va servir de fil rouge à la mini-série.
Car de part et d'autre de cette frontière parfois si trouble de la légalité et de la morale, qualifiée si justement de shadow line, chacun s'active suite à ce décès. Du côté de la police, l'enquête est confiée au DI Jonah Gabriel, lequel se remet tout juste d'une fusillade dans laquelle son partenaire a été tué, tandis que la balle meurtrière est venue se ficher dans sa boîte crânienne. Conséquence de cela, il souffre d'une amnésie partielle, n'ayant pas de souvenirs des événements de la soirée fatidique, faisant face à une crise identitaire qui sape ses certitudes.
Parallèlement, l'organisation de Wratten doit également se remettre du brusque décès de sa tête pensante. C'est à un homme de l'ombre, Joseph Bede, qu'échouent les responsabilités immédiates pour poursuivre les affaires d'importation de drogue, alors même que le comptable de l'organisation, Glickman, demeure mystérieusement injoignable. Tandis que le neveu de Wratten, Jay, difficilement contrôlable, se charge de mener de son côté une enquête personnelle pour découvrir qui a abattu son oncle, un autre homme remonte les différentes pistes dans l'ombre, un mystérieux Gatehouse.
Loin d'être une simple fiction d'enquête policière, The Shadow Line s'impose dans le registre du thriller avec une maîtrise et une efficacité à souligner. Suivant le fil rouge du meurtre de Harvey Wratten, initialement débutée comme une course contre-la-montre entre les différents camps pour découvrir ce qu'il s'est passé la nuit du crime, c'est une autre partie d'échecs autrement plus complexe qui se dévoile progressivement à travers les enjeux d'une réalité pleine de faux-semblants, où la frontière de la légalité et de la morale apparaît des plus troubles. Ce toutélié aussi intrigant que captivant, se construisant au gré des twists multiples, trahisons brutales et retournements de situation inattendus, va admirablement nourrir la paranoïa d'un téléspectateur dont les repères se brouillent peu à peu.
Parmi les protagonistes, ils sont d'ailleurs notablement peu nombreux à comprendre les réels tenants et aboutissants vers lesquels tend la mort de Wratten. Cela contribue à déstabiliser un téléspectateur complètement happé par des questions qui se bousculent. De plus, si la froideur ambiante, mais aussi la violence extrême de l'univers mis en scène, finissent par provoquer une relative dessensibilisation à mesure que les cadavres s'accumulent, la mini-série n'en néglige pas pour autant le développement d'une dimension plus personnelle aux destinées des personnages principaux, trouvant le juste équilibre entre les différents types d'intrigues.
Cependant, la vraie et grande réussite de The Shadow Line va résider dans sa capacité à générer une tension éprouvante, quasi-constante, qui atteint parfois des sommets. Si les nerfs du téléspectateur sont à fleur de peau, ce dernier n'en jubile pas moins par moment, grisé par le brusque rush d'adrénaline que certains passages provoquent. Car cette mini-série fait non seulement preuve d'une maîtrise narrative parfaitement millimétrée des scènes les plus tendues, mais elle sait aussi admirablement jouer de la lenteur calculée de son rythme. Théâtralisant des confrontations qui parviennent à des sommets de tensions, le suggestif se révèle bientôt aussi éprouvant que les brèves, mais complètement décomplexées, explosions de violence.
Capitalisant sur cette atmosphère à part, The Shadow Line finit sans doute par se laisser quelque peu emporter par la fascination que suscite l'intensité du tableau si glaçant qu'elle met en scène. L'histoire qui se cache derrière laissera un petit arrière-goût d'inachevé, les réponses ne satisfaisant pas pleinement. Cependant sa conclusion s'inscrit parfaitement dans la tonalité de la mini-série, nous laissant un peu groggi dans le bon sens du terme. The Shadow Line est essai de style ambitieux et prenant, certes pas exempt de certains reproches, mais l'investissement est assurément mérité. Le téléspectateur se laissera conquérir sans arrière-pensée.
Si la tension constamment palpable que The Shadow Line instaure fonctionne si bien, c'est aussi en raison du soin avec lequel la forme est traitée, encourageant justement cette ambiance à la nervosité communicative. En effet, The Shadow Line dispose d'une réalisation très travaillée, flirtant parfois avec une forme quasi-théâtrale, où la lenteur et le soin accordé aux détails se conjuguent à une image extrêmement épurée qui privilégie l'essentiel. La mini-série bénéficie en plus d'une belle photographie, dotée de teintes qui lui permettent de se construire un visuel clairement identifiable, dont l'esthétique n'est pas sans rappeler les thrillers des 70s'. Une sobriété similaire se retrouve dans sa bande-son, quasiment absente, mais où le téléspectateur retiend la musique du générique qui colle parfaitement à l'ambiance générale (il s'agit de la chanson 'Pause', par Emily Barker and The Red Clay Halo).
Enfin, The Shadow Line bénéficie d'un excellent casting. Le côté théâtral que renvoie l'ensemble n'amoindrit pas du tout des performances globalement très convaincantes. Parmi ceux qui ressortent le plus, c'est sans doute Stephen Rea (Father & Son) qui m'a marqué, incarnant un personnage glaçant doté d'un sang-froid flegmatique qui l'impose comme le personnage le plus craint de la série. Même si par moment, Rafe Spall (Desperate Romantics) n'est loin de lui voler ce dernier titre, une scène de l'épisode 2 m'ayant particulièrement traumatisée. Chiwetel Ejiofor (Trust) joue avec sobriété ce policier troublé qui a perdu ses repères avec une partie de sa mémoire et qui essaie tant bien que mal de démêler les fils inextricables du cas qu'il doit résoudre. Tandis que de l'autre côté de la ligne, Christopher Eccleston (Our Friends in the North, Doctor Who) renvoie avec beaucoup de justesse le portrait d'un criminel ordinaire, qui voit ses vies personnelle et professionnelle lui échapper. A leurs côtés, on retrouve notamment l'excellent Richard Lintern que j'ai adoré en supérieur de Gabriel, Tobias Menzies (Rome) pour lequel j'ai toujours un faible dans ce genre de rôle, Kierston Wareing (Five Daughters, The Runaway), Eve Best, Lesley Sharp, Sean Gilder ou encore Freddie Fox.
Bilan : D'une efficacité souvent éprouvante, The Shadow Line est un brillant thriller à la lenteur parfaitement calculée, où la tension est mise au service d'une réelle ambition narrative. Dotée d'une histoire excessivement complexe, elle captive l'intérêt jamais pris en défaut d'un téléspectateur qui finit par se laisser gagner par la paranoïa ambiante. Si la mini-série se laissera un peu débordée par cette atmosphère si identifiable et vraiment à part qu'elle a créée, sa demeuure amoindrissant sa portée vers la fin, elle reste une expérience indéniablement marquante, à l'occasion jubilatoire, qui renoue avec la tradition la plus épurée du thriller à suspense.
The Shadow Line saura mettre vos nerfs à rude épreuve avec une intensité qu'il est rare d'atteindre : à découvrir !
NOTE : 8,75/10
Le générique :
11:47 Publié dans (Mini-séries UK) | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : bbc, the shadow line, stephen rea, rafe spall, chiwetel ejiofor, christopher eccleston, richard lintern, tobias menzies, kierston wareing, eve best, lesley sharp, sean gilder, freddie fox | Facebook |
16/06/2011
(Blog) Kreativ Blogger Award Tag
Aujourd'hui, un billet un peu particulier, puisqu'il s'agit d'une réponse à un tag. Lecteurs curieux, amateurs de révélations croustillantes (ou pas), voici donc l'occasion qu'il m'est donné de dévoiler sept vérités sur la blogueuse téléphagique que je suis. Merci beaucoup Dav', Gégé et Xiaoshuo pour m'avoir sollicitée.
1. La version originale a été pour moi une révélation tardive (même si c'est normal au vu des limites technologiques d'alors). La première série dont j'ai pu découvrir un épisode en VOSTFR fut The Practice. Un effort pas seulement consenti pour les beaux yeux bleus de Bobby Donnell, mais la conséquence d'une âpre négociation avec une amie qui recevait Série Club (ou Jimmy?) et qui avait eu la gentillesse de m'enregistrer un épisode. Un peu plus tard, j'ai commis la folie d'acheter la saison 1 des Sopranos en VOSTFR. Pourquoi j'insiste sur ce dernier point ? Parce qu'il s'agissait alors de VHS (!)...
2. Ma découverte du petit écran anglais a eu lieu durant des étés passés dans le Sussex au tout début des années 2000. La première série anglaise dans laquelle j'ai eu l'occasion de m'investir quotidiennement a été... Coronation Street. J'étais tombée dans une famille d'accueil où la mère était une grande fan et chaque épisode marquait le rendez-vous télévisuel immanquable du jour. Notons en plus que nos conversations sur ce soap institutionnel en Grande-Bretagne contribuèrent grandement à l'amélioration de mon niveau linguistique.
3. J'ai une fibre sentimentale et nostalgique très prononcée. J'ai la fâcheuse tendance à avoir beaucoup de mal à finir mes séries préférées. Je peux mettre des semaines, des mois, parfois même des années, avant de me résoudre à regarder le dernier épisode d'une série qui a compté pour moi. J'ai une capacité étonnante à me bercer longtemps dans une forme de déni de réalité illusoire, refusant de conclure ce que j'ai pu tant aimer. J'ai ainsi mis plus de deux ans avant de parvenir à lancer le dernier épisode de Deadwood, et je n'ai toujours pas lancé la fin de Big Love cette année.
4. Sériephile un peu sérievore sur les bords, j'ai connu dans ma "jeunesse" des marathons interminables qui me clouaient devant le petit écran au point d'en oublier l'heure, me faisant enchaîner les épisodes sans pouvoir m'arrêter. La liberté des premières années à la fac permet à certains d'enchaîner les soirées étudiantes, moi je me programmais des orgies de DVD dans mon studio. Mon record du nombre maximum d'épisodes regardés d'affilée appartient à Babylon 5, avec huit épisodes. Juste derrière on retrouve A la Maison Blanche et The Legend, avec 7 épisodes.
5. J'a-do-re les séries historiques (au cas où cela ne s'était pas vu). Passionnée d'Histoire, demie-historienne à mes heures perdues, c'est bien simple, je fonds devant mon petit écran dès que le moindre costume ou l'esquisse d'une reconstitution pointe le bout de son nez. Je les dévore et les recherche peu importe leur genre ou leur provenance : des period dramas de la Beeb jusqu'aux sageuk sud-coréens, en passant par les fictions françaises... Toute série historique est par définition conçue pour aiguiser mon intérêt. Car il faut savoir qu'avec moi, les choses ne s'arrêtent pas au simple visionnage. Une fois ma curiosité piquée pour telle époque transposée à l'écran, l'envie d'en savoir plus, d'apprendre à quoi peut bien ressembler l'Histoire derrière la version romancée qui nous est proposée, s'impose d'elle-même. Par exemple, ce printemps, je me suis ruinée en bouquins sur la Renaissance italienne à cause des Borgias. De manière générale, je m'intéresse de plus en plus aux rapports du petit écran et de l'Histoire ; j'aime bien lire des travaux en histoire et sociologie des médias sur le sujet.
6. Les séries ne sont que la partie émergée de l'iceberg. Je conçois les productions télévisuelles comme un vecteur déterminant qui m'ouvre à la culture d'un pays, une sorte de fil d'Ariane qui sera ma boussole pour me lancer à la découverte non seulement de sa production culturelle (musique, cinéma, littérature), mais aussi de son Histoire et de sa culture au sens large. Je fonctionne par cycle, et actuellement, c'est tout particulièrement la Corée du Sud qui retient mon attention. Un pays dont je ne savais strictement rien avant que je n'y parvienne via les dramas. Depuis je me suis lancée à sa découverte sous toutes ses coutures enchaînant les lectures sur le sujet.
7. Je n'ai aucun sens de l'humour. Je suis peu versée dans les comédies qui généralement ne parviennent, ni à me fidéliser, ni à me marquer téléphagiquement. Si bien que ma DVDthèque ne compte en tout et pour tout que quatre séries comiques. Elles partagent deux points communs : leur nationalité et, pour trois d'entre elles, le fait de ne pas appartenir au XXIe siècle. Il s'agit de Yes Minister, Blackadder (La Vipère Noire) et Jeeves & Wooster... Quant à la plus récente, c'est The Thick of It.
Et voilà...
Je ne fais suivre le tag vers aucun blog, mais si jamais l'envie vous prend d'y répondre, n'hésitez pas.
16:36 Publié dans (Blog) | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : tag, kreativ blogger award tag | Facebook |
15/06/2011
(K-Drama) White Christmas : un magistral thriller psychologique hautement déstabilisant
Evil rolled itself in the snow and came after us.
Are monsters born? Or are they made?
Il y a des reviews qui s'écrivent toutes seules parce que nous sommes en territoire si bien connu que notre grille de lecture est déjà rôdée ; il y en a d'autres qui se construisent spontanément dans la frustration d'une déception... Mais il existe enfin des séries qui laissent le critique presque démuni devant son écran. Celles qui marquent, interpellent, laissent sans voix. Celles pour lesquelles, encore sous le choc, on voudrait simplement pouvoir s'emparer du premier dictionnaire des synonymes venu afin de coucher sur le papier tous les superlatifs qu'on pourrait y croiser. Comment, aujourd'hui, réussir à rédiger ma critique de White Christmas ? Comment rationaliser et tenter maladroitement de mettre des mots sur ce ressenti si intense, à la fois si perturbant et si personnel, que m'a laissé cette série ? Je n'ai sans doute pas le recul nécessaire, mais je vais quand même relever le défi.
White Christmas est un drama spécial, comportant 8 épisodes, qui a été diffusé sur KBS2 du 30 janvier au 20 mars 2011. Scénarisé par une valeur sûre du petit écran sud-coréen, Park Yun Sun (à qui l'on doit notamment Alone in Love), il n'est pas arrivé par hasard dans ma télévision ; et je remercie très fort Waxius et Xiaoshuo pour avoir su aiguiser ma curiosité. Perturbant, fascinant, glaçant, déroutant, c'est un thriller psychologique qui pousse les recettes du genre à leur paroxysme, et qui nous entraîne à ses côtés dans une expérimentation des bas instincts de la nature humaine dont on ne ressort pas complètement indemne. Bref, un drama qui tranche dans le paysage téléphagique du pays du Matin Calme. Un must-seen incontournable.
White Christmas se déroule dans le cadre déshumanisé d'un établissement perdu dans un désert blanc enneigé. Le lycée privé de Susin High est une institution extrêmement élitiste, qui n'accueille que les plus brillants élèves de Corée du Sud. Elle est entièrement consacrée à un seul objectif : les faire rentrer dans une des plus prestigieuses universités du pays, portés par un rythme scolaire vertigineux et une compétition constante entre eux. Isolé dans les montagnes, construit suivant les plans d'un architecte dont la démesure reflète bien le projet éducatif que représente ce pensionnat, Susin High est aussi un bâtiment ultra-moderne où la surveillance se rapproche plus de celle d'une prison que d'un lieu d'apprentissage. C'est dans ce cadre très froid, dans tous les sens du terme, que vont prendre corps les événements de cette série.
L'histoire débute la veille de Noël. Les seules vacances de l'année : huit jours autorisés loin d'un lieu qui se vide de quasiment tous ses occupants à cette période. Seuls restent généralement une poignée d'élèves ne pouvant rentrer en famille ou préférant étudier (même si cela porterait malheur). Ils sont sept en ce réveillon de 2010 à avoir choisi de ne pas quitter le lycée, un de leurs professeurs restant en tant qu'adulte responsable. Mais s'ils sont si nombreux par rapport à l'année précédente où ils n'étaient que deux, c'est qu'ils ont reçu une bien glaçante lettre, accusatrice, annonçant qu'un décès interviendra prochainement... La tension monte peu à peu dans ce huis clos où d'autres acteurs inattendus vont entrer en jeu. Car dans l'ombre où se dissimulent d'autres monstres, notamment un serial killer s'étant échappé non loin de là.
Un fil rouge, question lancinante presque réthorique, va accompagner cette descente aux enfers à la découverte de soi, pleine de faux semblants, alors que soupçons et trahisons plongent chacun dans une sourde paranoïa : "naît-on monstre ou nous fait-on devenir ainsi ?"
Thriller psychologique d'une intensité aussi constante qu'éprouvante, White Christmas façonne progressivement ses enjeux dans une atmosphère pesante, vite oppressante, dans laquelle la tension ne va cesser de croître tout au long des huit épisodes. Ce drama s'impose tout d'abord au téléspectateur par la consistance de son scénario habilement huilé, lequel nous plonge sans retenue dans les abîmes les plus sombres de l'âme humaine, dans les recoins les plus troublés et inexplorés d'une nature que l'on finit par craindre. Se construisant par le biais de rebondissements fréquents et un recours à de multiples twists, la série exploite pleinement son format relativement court pour ne jamais subir de baisse de rythme, parvenant à constamment se renouveler, redéfinissant ses enjeux et dévoilant sous une autre perspective les événements en cours.
Drama d'ambiance stylé et soigné, sa faculté à éprouver les nerfs du téléspectateur ne repose pas tant sur un suspense qu'il distille avec parcimonie, que sur sa manière d'installer une tension psychologique particulièrement éprouvante. S'il y aura des morts, l'enjeu premier n'est pas simplement la survie. Alors que l'on aurait pu un instant imaginer le récit suivre les pas d'un simple slasher movie ou autre film d'horreur, White Christmas s'approprie certains des codes narratifs propres à ce genre, tout en les dépassant rapidement. Quelque part au milieu de ces dîners tout droit sortis d'un roman d'Agatha Christie, la série fait sienne un thème bien plus ambitieux, autrement plus déstabilisant : celui d'une expérimentation sur la nature humaine, menée de manière quasi-scientifique, qui va repousser les limites jusqu'à la rupture recherchée des certitudes et fondations psychologiques des personnages.
White Christmas n'usurpe pas en effet son qualificatif de "thriller psychologique". Car c'est autant leur intégrité mentale que physique que les élèves vont avoir à défendre. Le projet de celui qui, d'abord tapi dans l'ombre, ensuite en pleine lumière, orchestre ce cauchemar est simple, trouver la réponse à une question obsessionnelle : naît-on monstre ou peut-on nous faire devenir ainsi ? Psychologue fasciné par le fonctionnement du cerveau humain, il est aussi un serial killer qui, ayant déjà nombre de victimes à son actif, sait composer avec la mort. En plaçant ces lycéens dans un environnement particulier, propice à des jeux de laboratoire, le drama traite habilement de thématiques qui nous conduisent aux confins des sciences de l'esprit et de la criminologie, anéantissant la frontière ténue entre déterminisme et libre arbitre. C'est à la naissance d'un monstre que Kim Yo Han, le serial killer, veut assister face à des adolescents censés représentés la future élite du pays. Et c'est en sapant tant de repères qu'il va conduire chacun à se redéfinir et à s'interroger sur lui-même.
Derrière son apparence si froide de prime abord, White Christmas n'est pas un drama détaché de ses personnages. Au contraire, c'est une série profondément humaine, dont la seconde force réside justement dans l'empathie qu'elle va être en mesure de faire naître à l'égard de ses protagonistes. Car dans leur prison éducative aussi glacée qu'élitiste, ces jeunes gens sont avant tout le reflet d'une société ultra-concurrentielle, où le lien social semble rompu et où l'individualisme forcené prime sur toute autre considération. Le drame que cache la lettre morbide que chacun a reçue en est la parfaite illustration : derrière une telle base de départ, se trouve une critique aussi amère que désillusionnée de cette indifférence à l'égard d'autrui qui apparaît érigée en règle de vie. A partir de là, l'expérimentation conduite va amener à une réflexion sur leurs priorités, mais aussi sur leur identité, pour le meilleur comme pour le pire... au nom de la survie.
Il faut dire que White Christmas va vraiment soigner la psychologie de ses personnages, explorant la genèse de ces adolescents devenus sujets d'étude à leur corps défendant. Car derrière des apparences faussement lisses ou unidimensionnelles, ils se révèlent peu à peu dans leurs ambiguïtés et leurs failles, dévoilant souvent des malaises ou blessures autrement plus profonds qui les déterminent et définissent dans leurs comportements presque malgré eux. Le téléspectateur s'attache à toutes ces personnalités si différentes, mais aussi si semblables dans leurs insécurités. Chacun a en lui un ressort qui, quelque part, semble brisé. On s'investit d'autant plus à leurs côtés que la situation de crise, exceptionnelle, à laquelle ils sont confrontés va les voir évoluer et faire prendre conscience de bien des choses, tant sur un plan individuel que collectif. L'artificielle union dans l'adversité de ces jeunes gens, qui se côtoient habituellement comme des étrangers, pose aussi bien les bases d'une incertaine confiance que les germes de la trahison. La notion de sacrifice pour la survie du groupe restera également un des thèmes récurrents les plus troublants et fascinants.
Au-delà de l'expérimentation déstabilisante à laquelle le serial killer se livre, ces quelques jours vont constituer une véritable - et traumatisante - thérapie de choc, dont tous ne sortiront pas indemnes psychologiquement. Celui qui s'impose naturellement comme le leader du groupe, Park Moo Yul, illustre bien cette progressive complexification au fil du drama. Etiqueté élève modèle, toujours prompt consciemment ou non à assumer les responsabilités, au point de voir jusqu'à l'enseignant lui accorder sa confiance pour gérer les situations de conflit pouvant éventuellement naître, il voit peu à peu son contrôle sur lui-même se fissurer à mesure que les événements dégénèrent. Le passage au révélateur des failles les plus intimes de chacun conduit à une forme de déconstruction psychologique, appuyant sur des peurs anciennes ou des blessures mal cicatrisées qui demeurent encore très vivaces. En suivant des codes de narration qui empruntent à la psychanalyse, White Christmas parvient à donner une dimension presque tragique à des personnages qui auraient pu dans n'importe quelle autres circonstances paraître banals ou anodins et qui, par leur fragilité, finissent par nous toucher au coeur. C'est ce qui permet au drama d'obtenir du téléspectateur un investissement émotionnel très important qui, couplé à la tension ambiante, rend le visionnage très éprouvant.
En plus d'être extrêmement solide sur le fond, White Christmas est également un drama particulièrement soigné sur la forme. Le réalisateur, Kim Yong Soo, est un habitué des fictions d'horreur comme Hometown Legends, et il n'hésite pas à emprunter certaines mises en scène à ce genre, contribuant ainsi à appuyer l'atmosphère inquiétante et oppressante qui se dégage dès les premières scènes pourtant anodines. Dotée d'une photographie épurée mettant en exergue le cadre déshumanisé de ce désert blanc dans lequel est perdu ce trop vaste établissement, la série bénéficie d'une réalisation aboutie, avec des plans vraiment travaillés, jouant sur une esthétique et une symbolique derrière lesquelles on devine l'intention d'accentuer la dimension froide investie par la fiction.
De plus la bande-son ne laisse, elle non plus, rien au hasard. Offrant un mélange des styles réfléchi et parfaitement au diapason du récit, sa diversité lui permet de participer pleinement à l'installation de l'ambiance atypique de la série. Elle propose non seulement des ballades pop sud-coréenne et des chansons anglo-saxonnes, mais également des morceaux de musique classique dont le thème hantera longtemps les nuits d'un téléspectateur envoûté (pour vérifier par vous-même, allez écouter la troisième vidéo en fin d'article, qui présente des images du premier épisode en utilisant une des musiques - du Vivaldi - qui va s'imposer comme une des plus emblématiques du drama, donnant des frissons à chaque fois qu'elle retentit).
Enfin, pour porter cette histoire si intense à l'écran, le casting, s'il est globalement inexpérimenté, se révèle à la hauteur des attentes. Au sein du groupe d'étudiants, je ne connaissais vraiment que Baek Sung Hyun (That Fool), que j'avais trouvé très attachant l'an dernier dans Running Gu. C'est un jeune acteur avec lequel j'arrive à ressentir spontanément une forme d'empathie et mon impression d'alors ne s'est pas démentie ici, dans ce rôle pourtant plus difficile qu'il tient, leader responsable dont le vernis d'"élève modèle" va peu à peu se craqueler. A ses côtés, Kim Young Kwan (More charming by the day) est très convaincant en personnage prompt à exploser, dont l'agressivité masque mal ses faiblesses et incertitudes. Lee Soo Hyuk est un "Angel" perturbé que j'attendrais avec curiosité de découvrir dans d'autres rôles (si What's up est un jour diffusé peut-être). Sung Joon (Lie to me) fait un étudiant détaché de toute émotion des plus parfaits, tandis que Hong Jong Hyun (Jungle Fish 2) incarne un adolescent effacé perdu au milieu de ces fortes personnalités. Kwak Jong Wook (Queen Seon Duk) joue un personnage resté marqué par un handicap, sa surdité. Kim Hyun Joong et ses cheveux rouges seront aussi à surveiller à l'avenir. Quant à la seule fille de la bande, Esom, elle personnifie le côté aussi défiant que mélancolique de l'adolescente.
Face à eux, on retrouve un Kim Sang Kyung pondéré, qui se cale avec beaucoup de sobriété dans ce rôle de serial killer au sang froid, presque curieux, conduisant de manière imperturbable l'expérimentation qu'il entend mener sur les étudiants. C'est un acteur que l'on a pu croiser dans des dramas tels que Lawyers ou Call of the country, mais que personnellement je connais surtout via le cinéma : il était dans le dernier film sud-coréen que je suis allée voir dans les salles obscures en mars, Hahaha, et Memories of Murder est resté gravé dans ma mémoire d'apprentie cinéphile.
I arrived at a private high school in Gangwon-do.
There, I discovered a letter left by an angry deceased boy.
And 7 kids who didn't know what sins they had committed.
Jealousy and hatred over something that could never be theirs.
Hatred and yearning in many different colored layers.
The continuing snowstorm.
I was excited by all these things that seemed destined to suit me.
I want to know through these children.
The answer to an old question.
Is a monster born as one,
or made into one ?
Bilan : Thriller psychologique aussi prenant que déstabilisant, White Christmas est un drama à part dans le petit écran sud-coréen. Original dans le bon sens du terme, il impose son identité bien loin des canons classiques. Au cours des huit épisodes qui le composent, il construit une réflexion à la fois sombre et éprouvante nous plongeant dans les abysses les plus noirs de la nature humaine. Sa consistance sur le fond s'allie à une étonnante empathie à l'égard de cette galerie bigarrée de personnages, ce qui rend le visionnage encore plus intense, dans ce huis clos étouffant mettant les nerfs à rude épreuve. On ressort de White Christmas un peu étourdi, presque choqué, indubitablement perturbé, voire bouleversé. C'est un de ces dramas inattendus qui marquent durablement. Un incontournable.
Peut-être aurais-je dû attendre un peu plus avant d'écrire cette review sans avoir forcément pris le temps du recul, l'ayant terminé il y a seulement trois jours. Ce visionnage m'a laissé sur un sentiment d'une intensité difficile à décrire, et j'espère malgré tout avoir su à peu près le retranscrire.
NOTE : 9/10
Le générique de la série :
La bande-annonce de la série :
Un MV avec un des morceaux de musique classique de l'OST :
07:14 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (28) | Tags : k-drama, kbs, white christmas, kim sang kyung, baek sung hyun, kim young kwang, lee oo hyuk, kwak jung wook, hong jong hyun, esom, kim hyun joong, sung joon, jung suk won | Facebook |
12/06/2011
(Mini-série UK) Injustice : quand la notion de justice devient trop floue
La semaine dernière, ITV1 mettait les petits plats dans les grands pour proposer, cinq soirs d'affilée, une mini-série construite sur un format similaire à celui de Collision l'an passé. Une telle programmation, ambitieuse et exceptionnelle, implique une fiction solide qui doit s'assurer de la fidélité du téléspectateur tous les soirs de la semaine du lundi au vendredi. Injustice avait en outre pour elle un casting sympathique qui avait suffi à briser mes dernières résistances, de James Purefoy à Charlie Creed-Miles.
Au final, si ITV1 s'en est plutôt bien sortie en terme d'audiences (son premier épisode a d'ailleurs battu à mon plus grand regret une autre série sur laquelle j'aurais l'occasion de revenir, Case Histories), la mini-série ne m'a pas précisément enthousiasmé. Entremêlant des problématiques flirtant avec les frontières de la notion de justice, morale comme juridique, Injustice est un thriller qui se laisse suivre, mais ne décollera jamais véritablement, se refermant sur un arrière-goût d'inachevé.
Injustice va s'attacher à nous rappeler la faillibilité d'un système judiciaire dont les acteurs sont avant tout des êtres humains avec leurs failles, nous plongeant dans des storylines personnelles et professionnelles qui s'enchevêtrent.
La mini-série débute dans la campagne anglaise (Suffolk), où William Travers exerce désormais son métier d'avocat loin du barreau londonien qui lui a pourtant si bien réussi. S'il renvoie l'image d'un juriste ayant réussi, il se remet cependant tout juste d'une affaire, celle d'un activiste pour la cause animale, Philip Spaull, qui l'a profondément ébranlé mentalement, mais aussi dans ses convictions sur la justice. C'est toute sa conception de sa profession qui a été remise en cause. Il a depuis déménagé loin de Londres, avec sa famille, et refuse tous les cas de meurtre qui lui sont proposés.
Cependant, le voilà contacté par un ancien ami de fac, accusé d'avoir tué sa maîtresse et clamant son innocence. En dépit de la dette que William Travers a l'impression de devoir à celui qui le sollicite, l'affaire réveille fatalement de vieux démons. Or dans le même temps, le corps de Philip Spaull a été retrouvé dans une vieille caravane, à l'extérieur de la ville, abattu à bout portant avec une arme à feu... Cet assassinat ne peut-il faire office de délivrance pour Travers ? Sa femme espère qu'il est enfin temps de repartir de l'avant. Cependant, le DS Wenborn enquête sur le meurtre de Spaull, avec un acharnement tout personnel. Il prend conscience que les éléments circonstantiels semblent toujours pointer vers William Travers.
Si Injustice se présente comme un de ces thrillers compliqués où les fils des histoires personnelles et professionnelles finissent par se confondre, on n'hésite longtemps sur la manière d'appréhender cette mini-série. Jusqu'à l'ultime retournement final, elle est un ersatz mal fixé, qui emprunte différents ingrédients à tous les genres du policier et du thriller (allant même jusqu'à flirter avec le conspirationnisme) sans jamais vraiment faire de choix.
Cette impression de superficialité qu'occasionne une dispersion un peu vaine en thématiques multiples, jamais exploitées jusqu'au bout, est renforcée par des maladresses d'écriture qui finissent pas s'accumuler et une densité inégale dans la narration. A mesure que l'histoire progresse, la fragibilité de ses fondations n'en transparaît que plus clairement. Au final, le scénariste donne le sentiment frustrant de ne jamais avoir su faire de choix dans l'orientation des thématiques, s'essayant un peu à tout, et finissant par se perdre dans le tourbillon qu'elle a généré et qu'elle concluera par une chute finale téléphonée peu satisfaisante.
Il faut reconnaître à Injustice qu'elle avait su a priori identifier une problématique centrale, sensée lui servir de fil rouge pour lier tous les destins et histoires qu'elle va faire se croiser. Le slogan de l'affiche ne trompe pas : il s'agit bien - en théorie - de s'interroger sur le sens de la notion de justice et sur la faillibilité du système judiciaire. Seulement cette idée bien ambitieuse aurait nécessité une autre approche que ces ficelles scénaristiques mal dégrossies et ces clichés vers lesquels la fiction revient trop facilement. Incarnation de cette réflexion présente mais non abouties, le personnage de William Travers résume bien tous les paradoxes de cette oeuvre.
Cet homme est un brillant avocat pénaliste, pouvant obtenir des acquittements dans des homicides qui apparaissent comme les plus désespérés pour la défense. Mais - et là se trouve le twist fatal, dans tous les sens du terme - qui ne veut défendre que des innocents. Il conçoit sa participation à l'accomplissement de la justice comme l'amenant à obtenir la libération des personnes qui n'ont pas commis les crimes dont elles sont accusées. Seulement prenez un seul accusé, client qu'il fera acquitter, mais qui se révèlera en fait coupable, et toute la machine s'enraye, voire déraille.
En résumé, de manière assez déroutante, on constate que Injustice combine deux approches complètement antinomiques qui ne peuvent fonctionner ensemble : d'une part, elle propose une vision extrêmement cynique du système judiciaire et, d'autre part, elle impose en son centre un personnage tellement manichéen que l'idée même qu'il puisse fonctionner ainsi, dans un tel milieu, ne peut être admise par le téléspectateur.
Sur la forme, il y a relativement peu à dire ou à trouver à redire sur cette mini-série. Elle est classique dans sa mise en scène, ne cherchant pas particulièrement à mettre en valeur le décor de la campagne anglaise, mais y parvenant presque à l'occasion. En somme, la réalisation reste donc d'une neutralité prudente où aucune réelle valeur ajoutée n'est proposée, mais l'enjeu se situe ailleurs.
Enfin, Injustice bénéfice d'un casting solide qui sera peut-être la raison pour laquelle le téléspectateur pourra persister jusqu'au bout. Les acteurs y délivrent des prestations correspondant parfaitement aux attentes, même si certains ne sont sans doute pas sollicités à leur juste valeur. Toujours est-il que James Purefoy (Rome, The Philanthropist) est parfait en avocat brillant qui derrière ses apparences respectables cache des démons bien plus sombres. C'est d'ailleurs au cours des quelques scènes d'audience qu'il trouve pleinement à s'exprimer. Dervla Kirwan (55 Degrees North, The Silence) incarne son épouse, mais reste sous-exploitée dans un rôle entre faire-valoir et parenthèses inutiles dans les intrigues principales. En revanche, face à l'avocat, Charlie Creed-Miles (Five Days) s'impose avec brio et énergie en officier de police borderline, à l'instinct juste mais aux méthodes et excès de violence discutables. Il est sans doute le seul personnage qui échappe au voile de prévisibilité qui recouvre la mini-série. A leurs côtés, on croise notamment Robert Whitelock (The Brief), Lisa Diveney (The Green Green Grass), Nathaniel Parker (Land Girls, Meurtres à l'anglaise) ou encore Obi Abili (Moses Jones, The Nativity).
Bilan : Mini-série qui cherchera vainement rythme et consistance, Injustice est un thriller dont les thèmes intéressants a priori vont faire un temps illusion. En dépit de ses maladresses, elle distille d'ailleurs, tout au long de ces premiers épisodes, un certain nombre d'ingrédients qui aiguisent la curiosité et s'assurent de la fidélité du téléspectateur. Mais à la fin, l'attente non récompensée n'en frustre que plus : il ne reste malheureusement qu'une copie inachevée de promesses esquissées non tenues. Injustice s'avère être une mini-série qui n'aura jamais su vraiment où elle allait et qui nous laisse nous égarer à ses côtés.
NOTE : 4,5/10
La bande-annonce de la série :
21:51 Publié dans (Mini-séries UK) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : itv, injustice, james purefoy, dervla kirwan, charlie creed-miles, robert whitelock, lisa diveney, nathaniel parker, obi abili | Facebook |