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12/06/2011

(Mini-série UK) Injustice : quand la notion de justice devient trop floue

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La semaine dernière, ITV1 mettait les petits plats dans les grands pour proposer, cinq soirs d'affilée, une mini-série construite sur un format similaire à celui de Collision l'an passé. Une telle programmation, ambitieuse et exceptionnelle, implique une fiction solide qui doit s'assurer de la fidélité du téléspectateur tous les soirs de la semaine du lundi au vendredi. Injustice avait en outre pour elle un casting sympathique qui avait suffi à briser mes dernières résistances, de James Purefoy à Charlie Creed-Miles.

Au final, si ITV1 s'en est plutôt bien sortie en terme d'audiences (son premier épisode a d'ailleurs battu à mon plus grand regret une autre série sur laquelle j'aurais l'occasion de revenir, Case Histories), la mini-série ne m'a pas précisément enthousiasmé. Entremêlant des problématiques flirtant avec les frontières de la notion de justice, morale comme juridique, Injustice est un thriller qui se laisse suivre, mais ne décollera jamais véritablement, se refermant sur un arrière-goût d'inachevé.

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Injustice va s'attacher à nous rappeler la faillibilité d'un système judiciaire dont les acteurs sont avant tout des êtres humains avec leurs failles, nous plongeant dans des storylines personnelles et professionnelles qui s'enchevêtrent.

La mini-série débute dans la campagne anglaise (Suffolk), où William Travers exerce désormais son métier d'avocat loin du barreau londonien qui lui a pourtant si bien réussi. S'il renvoie l'image d'un juriste ayant réussi, il se remet cependant tout juste d'une affaire, celle d'un activiste pour la cause animale, Philip Spaull, qui l'a profondément ébranlé mentalement, mais aussi dans ses convictions sur la justice. C'est toute sa conception de sa profession qui a été remise en cause. Il a depuis déménagé loin de Londres, avec sa famille, et refuse tous les cas de meurtre qui lui sont proposés.

Cependant, le voilà contacté par un ancien ami de fac, accusé d'avoir tué sa maîtresse et clamant son innocence. En dépit de la dette que William Travers a l'impression de devoir à celui qui le sollicite, l'affaire réveille fatalement de vieux démons. Or dans le même temps, le corps de Philip Spaull a été retrouvé dans une vieille caravane, à l'extérieur de la ville, abattu à bout portant avec une arme à feu... Cet assassinat ne peut-il faire office de délivrance pour Travers ? Sa femme espère qu'il est enfin temps de repartir de l'avant.  Cependant, le DS Wenborn enquête sur le meurtre de Spaull, avec un acharnement tout personnel. Il prend conscience que les éléments circonstantiels semblent toujours pointer vers William Travers.

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Si Injustice se présente comme un de ces thrillers compliqués où les fils des histoires personnelles et professionnelles finissent par se confondre, on n'hésite longtemps sur la manière d'appréhender cette mini-série. Jusqu'à l'ultime retournement final, elle est un ersatz mal fixé, qui emprunte différents ingrédients à tous les genres du policier et du thriller (allant même jusqu'à flirter avec le conspirationnisme) sans jamais vraiment faire de choix.

Cette impression de superficialité qu'occasionne une dispersion un peu vaine en thématiques multiples, jamais exploitées jusqu'au bout, est renforcée par des maladresses d'écriture qui finissent pas s'accumuler et une densité inégale dans la narration. A mesure que l'histoire progresse, la fragibilité de ses fondations n'en transparaît que plus clairement. Au final, le scénariste donne le sentiment frustrant de ne jamais avoir su faire de choix dans l'orientation des thématiques, s'essayant un peu à tout, et finissant par se perdre dans le tourbillon qu'elle a généré et qu'elle concluera par une chute finale téléphonée peu satisfaisante.

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Il faut reconnaître à Injustice qu'elle avait su a priori identifier une problématique centrale, sensée lui servir de fil rouge pour lier tous les destins et histoires qu'elle va faire se croiser. Le slogan de l'affiche ne trompe pas : il s'agit bien - en théorie - de s'interroger sur le sens de la notion de justice et sur la faillibilité du système judiciaire. Seulement cette idée bien ambitieuse aurait nécessité une autre approche que ces ficelles scénaristiques mal dégrossies et ces clichés vers lesquels la fiction revient trop facilement. Incarnation de cette réflexion présente mais non abouties, le personnage de William Travers résume bien tous les paradoxes de cette oeuvre.

Cet homme est un brillant avocat pénaliste, pouvant obtenir des acquittements dans des homicides qui apparaissent comme les plus désespérés pour la défense. Mais - et là se trouve le twist fatal, dans tous les sens du terme - qui ne veut défendre que des innocents. Il conçoit sa participation à l'accomplissement de la justice comme l'amenant à obtenir la libération des personnes qui n'ont pas commis les crimes dont elles sont accusées. Seulement prenez un seul accusé, client qu'il fera acquitter, mais qui se révèlera en fait coupable, et toute la machine s'enraye, voire déraille.

En résumé, de manière assez déroutante, on constate que Injustice combine deux approches complètement antinomiques qui ne peuvent fonctionner ensemble : d'une part, elle propose une vision extrêmement cynique du système judiciaire et, d'autre part, elle impose en son centre un personnage tellement manichéen que l'idée même qu'il puisse fonctionner ainsi, dans un tel milieu, ne peut être admise par le téléspectateur.

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Sur la forme, il y a relativement peu à dire ou à trouver à redire sur cette mini-série. Elle est classique dans sa mise en scène, ne cherchant pas particulièrement à mettre en valeur le décor de la campagne anglaise, mais y parvenant presque à l'occasion. En somme, la réalisation reste donc d'une neutralité prudente où aucune réelle valeur ajoutée n'est proposée, mais l'enjeu se situe ailleurs.

Enfin, Injustice bénéfice d'un casting solide qui sera peut-être la raison pour laquelle le téléspectateur pourra persister jusqu'au bout. Les acteurs y délivrent des prestations correspondant parfaitement aux attentes, même si certains ne sont sans doute pas sollicités à leur juste valeur. Toujours est-il que James Purefoy (Rome, The Philanthropist) est parfait en avocat brillant qui derrière ses apparences respectables cache des démons bien plus sombres. C'est d'ailleurs au cours des quelques scènes d'audience qu'il trouve pleinement à s'exprimer. Dervla Kirwan (55 Degrees North, The Silence) incarne son épouse, mais reste sous-exploitée dans un rôle entre faire-valoir et parenthèses inutiles dans les intrigues principales. En revanche, face à l'avocat, Charlie Creed-Miles (Five Days) s'impose avec brio et énergie en officier de police borderline, à l'instinct juste mais aux méthodes et excès de violence discutables. Il est sans doute le seul personnage qui échappe au voile de prévisibilité qui recouvre la mini-série. A leurs côtés, on croise notamment Robert Whitelock (The Brief), Lisa Diveney (The Green Green Grass), Nathaniel Parker (Land Girls, Meurtres à l'anglaise) ou encore Obi Abili (Moses Jones, The Nativity).

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Bilan : Mini-série qui cherchera vainement rythme et consistance, Injustice est un thriller dont les thèmes intéressants a priori vont faire un temps illusion. En dépit de ses maladresses, elle distille d'ailleurs, tout au long de ces premiers épisodes, un certain nombre d'ingrédients qui aiguisent la curiosité et s'assurent de la fidélité du téléspectateur. Mais à la fin, l'attente non récompensée n'en frustre que plus : il ne reste malheureusement qu'une copie inachevée de promesses esquissées non tenues. Injustice s'avère être une mini-série qui n'aura jamais su vraiment où elle allait et qui nous laisse nous égarer à ses côtés.


NOTE : 4,5/10


La bande-annonce de la série :

20/07/2010

(Mini-série UK) The Silence : à la frontière du thriller et du drame familial, la figure fragile d'une héroïne poignante

 

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Il n'y a pas que des fictions légères, chaudes et ensoleillées, à la télévision, durant l'été. Ainsi, la semaine passée, BBC1 consacrait quatre de ses soirées (du 12 au 15 juillet 2010) à la diffusion d'une mini-série intitulée The Silence. Construite autour de thématiques classiques, cette fiction nous a proposé un mélange des genres assez atypique, mêlant à son format efficacement calibré de thriller policier à suspense, un drame familial plus subtile et intimiste.

Sans se démarquer des productions britanniques du genre de ces dernières années, The Silence a gagné progressivement en intensité et en maîtrise des éléments de son scénario, allant crescendo, pour se conclure de façon très abrupte sur un choix narratif, peut-être discutable, en tout cas un brin frustrant, de ses scénaristes.

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Au-delà de son histoire de départ, c'est à travers le choix de son personnage principal que The Silence impose d'emblée sa part d'originalité. Amelia a jusqu'alors mené une vie sur-protégée par des parents omni-présents ; car cette jeune fille de 18 ans est sourde, une vulnérabilité particulière qui explique la façon dont son entourage s'occupe d'elle. Cependant sa vie dans le silence s'est terminée récemment, à la suite d'une intervention chirurgicale où elle s'est vue aposée un implant qui lui permet d'entendre, pour la première fois, des sons. L'adaptation à la cacophonie ambiante, ainsi que l'attention dont elle doit soudain faire preuve à son environnement, est aussi difficile qu'épuisant. Pour ce faire, elle suit une thérapie afin d'apprendre à maîtriser ce nouveau sens qui s'ouvre à elle.

Les séances chez sa spécialiste étant fréquentes, elle passe une partie de la semaine auprès de ses cousins, chez son oncle Jim, un policier dont le domicile est plus proche du cabinet médical que celui de ses parents. Mais un soir, le quotidien d'Amelia va être complètement boueversé. Alors qu'elle est sortie promener le chien dans le parc en bas de la rue, elle assiste, tétanisée, à la scène d'un meurtre dans les allées. Une joggeuse est renversée, volontairement, par une voiture, occupée par deux individus. Tapie dans la pénombre, Amelia distingue les traits d'un d'entre eux.

Profondément choquée, elle commence par se taire, effrayée. Puis, alors que son oncle est chargé de l'affaire, la victime étant une policière, elle finit par se confier à lui. Craignant pour sa nièce qu'il considère particulièrement vulnérable en raison de son état, Jim va devoir arbitrer ses priorités entre impératifs familiaux et vie professionnelle. Malheureusement, l'aide d'Amelia expose peu à peu une situation dont la complexité, mais aussi la dangerosité, entraîne toute la famille dans le tourbillon des moeurs peu recommandables de l'unité anti-drogue de la police de la ville.

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Par la richesse et la diversité des thèmes abordés, The Silence surprend. Si sa structure narrative s'apparente à celle d'un thriller, dont la tension se construit, montant au fil des épisodes, tandis que les pièces du puzzle se découvrent progressivement, la mini-série n'hésite pas à s'appesantir et développer des aspects plus personnels aux personnages, nous intéressant aux dynamiques internes à la famille d'Amelia, ainsi qu'à la situation particulière de cette dernière. Ce dernier aspect, plus psychologique, confère une très forte dimension humaine à une fiction dont il s'agit sans doute du principal élément d'originalité.

The Silence fait donc preuve de réelles ambitions, allant au-delà du simple thriller, en visant une double exploitation parallèle de ces deux volets. La difficulté inhérente à ce choix n'est pas pleinement surmontée : jouer sur les deux tableaux entraîne en effet quelques ruptures du rythme narratif soulignant la maîtrise parfois approximative de la structure d'ensemble. Plus que dans le récit lui-même, c'est le contraste entre les tonalités qui place certains passages en porte-à-faux, dichotomie déséquilibrée reflétant l'hésitation de scénaristes qui peinent, durant la première partie de la mini-série, à trouver un liant d'ensemble. Dans la seconde partie, le suspense aidant, les deux derniers épisodes sont plus homogènes, permettant une alternance beaucoup plus naturelle entre le thriller et le drame familial, qui en deviennent même complémentaires.

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Si ce fragile équilibre des tonalités met un peu de temps à s'établir, c'est sans doute aussi en partie parce que le volet thriller peine à s'affirmer immédiatement, restant quelque peu en retrait. L'univers policier de Jim est d'abord cantonné en arrière-plan. Puis, à mesure que l'enquête prend de l'importance et gagne en complexité, le téléspectateur finit par se prendre au jeu de la tension ambiante. Cependant, le fait que l'affaire progresse par saccades irrégulières n'aide pas, dans un premier temps, à renvoyer une apparence de maîtrise du scénario. Cependant, à mesure que les enjeux prennent corps, l'intrigue se révèle de plus en plus convaincante. La rafraîchissante sobriété dont la mini-série use lui confère au final une légitimité supplémentaire.

Reste que, plus que dans cet aspect thriller, c'est dans un créneau, plus personnel et psychologique, que The Silence se démarque et impose son style. Le volet familial, s'il n'échappe pas à certains poncifs du genre, est plus abouti, bénéficiant d'une écriture assez subtile, où l'émotionnel transparaît à fleur de peau, permettant à la mini-série de s'inscrire dans une tradition de drame où la dimension humaine, centrale, surprend agréablement le téléspectateur. Dans ce registre, la retenue avec laquelle est présenté le traumatisme d'Amelia est particulièrement appréciable. Le meurtre dont elle est témoin s'ajoute à toutes les difficultés personnelles qui la troublent depuis la pose de son implant auditif. Tous ces ajustements nécessaires se cumulent, expliquant et justifiant des états d'âme poignants, sur lesquels la mini-série choisit opportunément de se concentrer.

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The Silence est-il un thriller flirtant avec le drama familial ? Ou bien l'inverse ? La question n'a sans doute pas vraiment lieu d'être, dans la mesure où la réponse relève du domaine du ressenti propre à chaque téléspectateur. Cette capacité à mêler les deux genres est, il faut le préciser, une voie relativement classique à la télévision britannique. Cependant, la particularité de The Silence réside peut-être dans le fait que le drame familial est l'élément qui s'en détache le plus.

Pour illustrer cette affirmation, le premier élément qui me vient à l'esprit est sans doute la conclusion de The Silence qu'il me semble difficile de ne pas évoquer. En effet, la mini-série se termine de la plus abrupte des manières, un choix narratif assumé, mais qui peut décontenancer. En se concentrant sur Amelia, et sur le chemin que la jeune fille a parcouru depuis le début de cette aventure, pour parvenir à faire la paix avec elle-même et accepter les bouleversements (auditifs) récents de sa vie, The Silence délaisse ses accents de thriller, relégant cet aspect au second plan. La fin consacre - presque a posteriori - le choix du drame familial.

C'est comme si cette plongée mouvementée dans les arcanes corrompues de la police locale n'avait constitué qu'un prétexte, un parcours initiatique pour Amelia, lui permettant de s'ajuster à son nouveau rapport à ce qui l'entoure, à ses parents, mais aussi au monde des entendants dans sa globalité. Si bien que derrière cette symbolique de l'épreuve, unissant dans l'adversité les membres d'une même famille, le thriller va finalement se résoudre en simple toile de fond quasiment anecdotique. The Silence laissera ainsi le soin au téléspectateur d'extrapoler, à partir des dernières indications qui lui sont données, sur la conclusion de l'affaire, préférant se désintéresser de toutes ses ramifications qu'elle a pourtant savamment construit, pour consacrer le rôle de pivôt central du personnage d'Amelia.

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Sur la forme, The Silence est une mini-série soignée, dont la réalisation classique n'hésite pas à jouer sur les teintes et les cadres. Sans se démarquer, elle s'avère en tout cas efficace.

Enfin, le casting, très solide, permet d'asseoir le scénario. Genevieve Barr y tient, avec une certaine naïveté et beaucoup d'assurance non dépourvue d'une touche de nuance, un premier rôle-titre très convaincant ; et il convient de saluer sa performance. Douglas Henshall (Primeval, Collision) en fait parfois un peu trop dans l'émotionnel, mais il impose une présence forte à l'écran, qui contre-balance celle d'Amelia. A leurs côtés, on retrouve également Gina McKee, Hugh Bonneville (Lost in Austen), Dervla Kirwan (55 Degrees North, Material Girl), Harry Ferrier, Tom Kane, Rebecca Oldfield ou encore Richie Campbell (The Bill).

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Bilan : A si bien vouloir mêler les genres, The Silence se révèle au final plus difficile à catégoriser que son synopsis ne le laissait penser. Derrière son apparence de thriller savamment orchestré, le téléspectateur garde surtout l'impression qu'il assiste à la quête de soi d'une héroïne qui voit son rapport à l'extérieur bouleverser par son implant auditif. Si le suspense de l'affaire principale rythme les péripéties de la mini-série, c'est le drame familial qui se joue sous nos yeux qui finit par l'emporter, la conclusion paraissant symboliser le choix des scénaristes de privilégier cette dimension humaine, plus personnelle et intimiste.

S'inscrivant dans la lignée de divers thrillers proposés en mini-séries à la télévision britannique ces dernières années, The Silence ne révolutionne pas ce genre. Cependant, il contient quelques éléments qui lui sont propres, à commencer par son héroïne, admirable, qui mérite qu'on prenne le temps de s'intéresser à cette fiction.


NOTE : 6,75/10

15/01/2010

(Pilote UK) Material Girl : plongée dans les coulisses clichées de la mode


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Lenora Crichlow (Sugar Rush) est décidément une actrice très occupée ces derniers temps. Apparue dans la mini-série d'ITV, Collision, cet automne, actuellement à l'affiche de la saison 2 de Being Human, diffusée sur BBC3 depuis dimanche, elle tient également le rôle titre dans une nouvelle série (initialement prévue pour la fin de l'année dernière, mais finalement reportée à ce début 2010) lancée sur BBC1 ce jeudi soir : Material Girl. Pour le moment, six épisodes d'une heure chacun ont été commandés.

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A priori, l'univers de la mode n'est pas forcément ma tasse de thé, même si j'ai suivi Ugly Betty durant presque deux saisons. La filiation de Material Girl avec toutes les fictions traitant de ce sujet se révèle d'ailleurs immédiatement évidente. Si la série bénéficie sans doute d'un peu moins de moyens que sa consoeur américaine pour faire étalage des dernières tenues vestimentaires affriolantes, elle investit cependant de façon très classique -et complète- les coulisses de la mode, en nous proposant de suivre le parcours d'Ali Redcliffe, jeune créatrice, designer en devenir. Jusqu'alors assistante auprès d'une patronne tyrannique, elle quitte brusquement sa position, sur un coup de tête, en comprenant que cette dernière ne lui donnera jamais sa chance. Va-t-elle réussir à rebondir ? Aux côtés de Lenora Crichlow, on retrouve notamment l'expérimentée Dervla Kirwan (55 Degrees North, Hearts and Bones), mais aussi Michael Landes (Lois & Clark : les nouvelles aventures de Superman, Special Unit 2). Un casting a priori  donc relativement solide et qui ne va pas démériter.

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Opèrant une redistribution des cartes entre les différents protagonistes, ce pilote sert à exposer les futurs enjeux de la série. Ali a claqué la porte du label de Davina Bailey (Dervla Kirwan), créatrice qui gère d'une main de fer son petit empire. Obstinée, la jeune femme refuse toute compromission (et avances) pour percer et préfère se mettre en quête d'un nouveau travail dans la création vestimentaire. Mais sa réputation la précède désormais, s'étant aliénée trop de personnes influentes, si bien que toutes les portes se referment une à une. Seule réelle opportunité concrète : une proposition de la part de Marco Keriliak (Michael Landes), un businessman qui dispose des connexions nécessaires pour permettre à Ali de lancer sa propre ligne de vêtements, mais dont la fiabilité en affaires ne vaut presque rien. La confrontation avec Davina devenant plus personnelle, notre jeune héroïne finit par se rallier à l'offre de Marco, en dépit des craintes formulées par ses amis.

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Remplissant pleinement le rôle d'installation qui lui est dévolu, l'épisode nous fait suivre les débuts de la nouvelle entreprise. On assiste donc aux premières passes d'armes avec Davina, mais aussi entre Ali et Marco, chacun ayant une conception très différente des affaires, entre naïve utopie et requin attiré par l'argent et les paillettes. La première bataille contre Davina étant gagnée, tout est bien qui finit bien. Pour le moment. Car désormais "It's war". De quoi s'attendre à de nouvelles péripéties pour Ali et sa toute jeune ligne de vêtements, d'autant que Marco ne restera le partenaire idéal que dans le succès. En cas de difficultés, les choses pourront rapidement devenir plus compliquées.

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Résumée ainsi, vous devinez déjà quel écueil majeur Material Girl ne peut éviter : celui de l'accumulation des clichés. Proposer une fiction dans le cadre de la mode ne signifie pas souscrire jusqu'au moindre détail, au vaste fantasme imagé qui y est désormais associé. Il n'est pas nécessaire de reprendre à son compte tous les stéréotypes véhiculés sur le sujet. Car, devant ce pilote, le téléspectateur finit par penser qu'il assiste à un défilé des clauses contenues dans le cahier des charges d'une série sur la mode : de la tyrannique patronne étouffant la concurrence, jusqu'au meilleur ami gay, colocataire, travaillant également pour Davina, en passant par la proposition indécente (parachutée) pour percer, tout y est. Avoir vu ou lu une histoire sur ce milieu signifierait-il que l'on en a fait le tour et qu'il n'aurait plus rien (d'autre) à offrir ? Ce manque flagrant d'imagination et d'initiative des scénaristes laisse un sentiment mitigé : tout est parfaitement en place, trop bien en place même, trop huilé pour attirer l'attention d'un téléspectateur finalement blasé.

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Pourtant, l'histoire en elle-même, d'un classicisme extrême que l'on pourrait qualifier de "traditionnelle", n'est pas déplaisante à suivre. L'introduction d'une petite storyline amoureuse pour Ali s'inscrit d'ailleurs dans cette même perspective. Simplement, elle ne ressemble qu'à une énième copie d'un récit déjà bien trop souvent croisé.

A cette réserve, s'y ajoutent des remarques plus formelles. Si la réalisation est correcte, alternant quelques plans inspirés et d'autres plus douteux, mais dans l'ensemble relativement soignés, la bande-son, offrant de nombreuses chansons pop/rock, se révèle en revanche bien trop présente, transformant certaines scènes "de transition" en faux extraits de clips musicaux. Ce qui n'est jamais une bonne chose pour la cohésion de la construction globale d'un épisode.

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Bilan : Cumulant les stéréotypes sous des atours chatoyants relativement divertissants, le pilote de Material Girl sonne quelque peu creux. Le ton vacille, incapable de choisir, hésitant entre légèreté et touches plus sérieuses, ne sachant trop comment se positionner. Dans cet univers "impitoyable" de la mode, démystifié tant de fois au cours de ces dernières années, Material Girl ne semble a priori rien proposer de neuf. Trop bien calibré, trop rangé, pour apporter un soupçon d'originalité salvateur, elle reste cantonnée sur des sentiers si souvent empruntés. Au final, ce pilote d'exposition se révèle trop linéaire, manquant cruellement de mordant pour accrocher le téléspectateur. Non pas que ce show ne soit pas sympathique aux premiers abords, mais il faudra sans doute faire preuve de plus de dynamisme et d'audace pour le faire vivre au-delà de cette phase d'installation.


NOTE : 4,5/10


L'ouverture de la série (à Paris) :


Une preview :