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20/07/2013

(Tag) Liebster Award : anecdotes de la sériephilie d'antan et d'aujourd'hui

Aujourd'hui, un billet un peu particulier, puisqu'il s'agit d'une réponse à un tag. Ce sont Mina et Kaa qui m'ont invité à y participer il y a déjà plusieurs semaines. Je les en remercie et je m'excuse auprès d'elles pour le délai. Comme le Kreativ Blogger Award il y a deux ans, c'est l'occasion de dévoiler quelques anecdotes (notamment passées) sur ma passion pour les séries (I), tout en répondant aussi aux questions complémentaires concoctées pour l'occasion (II). Je ne vais pas faire suivre ce tag au-delà, ni faire de nouvelles questions, mais ce fut un plaisir de répondre à celui-ci.

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I. Onze informations (téléphagiques)

1- J'ai vécu mon adolescence d'apprentie téléphage à une époque où le haut débit (et même internet pendant une bonne partie) n'existait pas. Toute ma culture sériephile reposait donc sur les programmes des cinq chaînes hertziennes (quand le mistral ne mettait pas à mal la réception de certaines). Cela ne m'empêchait pas d'être déjà très (trop) organisée. Mes parents se sont vite lassés de me voir examiner et surligner de tous côtés leur Télérama. Ils se sont résolus à m'acheter un TéléZ que je fluotais dans tous les sens, repérant chaque nouvelle série, chaque épisode inédit, mettant de côté les rediffusions. Une fois cela fait, j'avais un cahier spécial et j'y établissais mon programme télé rêvé des 7 prochains jours. Une sorte de bêta-séries avant l'heure en somme !

2. Autre conséquence d'avoir grandi à une époque où la télévision était le seul medium pour accéder aux séries, j'ai connu les âpres négociations pour le choix des programmes et la maîtrise de la télécommande. La seule série que j'ai jamais réussie à faire regarder à mes parents à cette époque fut Urgences. Quand je vois combien leur consommation de séries étrangères a augmenté aujourd'hui par rapport au passé, je me dis que tout mon prosélytisme n'a pas été complètement vain. Parce que rentrer le week-end de Noël, et voir mon père s'installer spontanément devant l'épisode de Noël de Doctor Who sur France 4, ce fut un sacré choc !

3. N'ayant pas toujours accès directement à la télévision, j'ai passé une bonne partie de mes années collège et lycée à vénérer le magnétoscope. Et à enregistrer, enregistrer, enregistrer... Initialement, c'étaient les séries que je ne pouvais pas voir. Puis, m'est venue l'idée de me constituer des intégrales personnalisées de mes fictions préférées, enregistrant de façon méticuleuse en évitant toute pub, en attendant la fin du générique... Les vestiges de cette activité, dans laquelle j'ai englouti un budget cassettes assez déraisonnable, existent toujours dans quelques cartons dans un coin de grenier.

4. Croire qu'avec les seules chaînes hertziennes, il était impossible de se constituer les bases d'une riche sériephilie est erroné. Être sériephile signifiait surtout être insomniaque. Il y avait notamment une case bénie, le jeudi soir (enfin, le vendredi matin très tôt), sur France 2, dont tous les sériephiles ayant connu cette époque se souviennent sans doute. On y trouva notamment Millenium, The Sopranos (après une programmation le dimanche soir en deuxième partie de soirée) ou encore Six Feet Under. C'était une case pleine de suspense et d'émotions : elle était en effet programmée après le Journal de la Nuit, à une heure variant entre 0h30 et 2h du matin. La veille, vous placiez votre cassette dans le magnétoscope, programmiez l'enregistrement en prévoyant large, allumiez un petit cierge dans l'autel d'à côté dédié au Dieu de la Téléphagie, puis vous alliez au lit en croisant les doigts. Le lendemain, le grand suspense était de savoir si l'épisode était en intégralité, ou si les 5 premières ou dernières minutes avaient disparu dans les aléas des retards ou avances des programmes nocturnes.

5. Le téléspectateur (et son sommeil) dépendait alors intégralement des chaînes. Internet, débarqué avec un simple modem 56k, ne révolutionna pas cet aspect. Malgré tout, le sériephile n'était soudain plus isolé face à son écran : il découvrait d'autres passionnés, capables de s'organiser. C'était alors le bon vieux temps des pétitions, et du FLT (le Front de Libération Télévisuelle).

6. Les chaînes hertziennes ne proposaient rien en version originale. La première fois que j'ai pu voir une série en VOST, c'était The Practice, chez une amie du lycée qui disposait des chaînes du câble. Je pense que j'aurais été moins réfractaires à la langue anglaise si j'avais pu entendre cette langue en dehors des seules horaires de classe. Il aura fallu attendre des étés anglais en séjour linguistique pour me guérir de cette aversion.

7. Ce sont toutes ces épreuves qui ont façonné la débrouillardise légendaire du sériephile. Les montagnes que j'ai soulevées pour The West Wing (Vous savez combien cette série a été déterminante pour moi) l'illustrent bien. Alors que la diffusion de la saison 1 était presque achevée durant l'été 2001, le 11 septembre a eu lieu. Les éditions spéciales et le bouleversement des programmes qui suivirent me firent rater un épisode (il me semble que c'était Minimums obligatoires, le 1.20), que j'avais cru à tort déprogrammé, mais qui avait seulement été décalé plus tardivement le vendredi soir. Après quelques mois de tergiversation, j'ai finalement trouvé un internaute l'ayant enregistré, et acceptant de me dupliquer sa VHS et de me l'envoyer par la Poste. J'ai reçu ce colis comme un trésor.

8. Assez logiquement, la série qui m'a fait franchir pour la première fois le Rubicon de la légalité est aussi The West Wing. La première saison se termine en effet en cliffhanger sur une fusillade. Si France 2 n'avait eu aucune difficulté pour diffuser le spécial Isaac et Ismaël quelques semaines après le 11 septembre, la saison 2 en revanche passa à la trappe pendant plusieurs années. Une connaissance internaute belge, également fan de la série, me fit parvenir sur des CD gravés ces fameux épisodes précieux de la saison 2, récupérés je-ne-sais-où et sous-titrés en suédois (!) ou quelqu'autre langue nordique. L'essentiel était sauf.

9- Une autre première de cette époque : le premier article que j'ai rédigé sur une série. C'était une brève présentant... CSI. Quant on voit mes rapports compliqués aux cop show procedural aujourd'hui, cela prête à sourire ! Tout ça est très anecdotique, c'était une brève de quelques lignes. Si j'en garde le souvenir, cela tient au magazine de publication : Génération Séries. C'est le seul billet que j'ai jamais rédigé pour eux. Mais ce magazine a façonné les bases de ma passion pour les séries, me donnant accès à une culture sériephile dont je rêvais alors plus que je ne pouvais pleinement l'apprécier : j'ai donc gardé le numéro (et bien d'autres, d'ailleurs) précieusement !

10. En 2004-2005, le haut débit est arrivé jusqu'à chez moi. J'ai débranché ma télévision et commencé à regarder des séries par d'autres moyens. 

11. Après des années passées devant mon ordinateur portable, aujourd'hui, je suis revenue à la télévision pour son grand écran (mais pas aux chaînes de télévision elles-mêmes, sauf quelques rares exceptions, notamment pour les séries françaises). Sinon, je regarde aussi de plus en plus d'épisodes sur tablette depuis la fin de l'année dernière. Les modes de visionnage continuent d'évoluer... Le plaisir du visionnage reste lui inchangé.

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II. Les cinq questions élaborées par Mina et Kaa :

1. Y a-t-il une différence flagrante entre vos débuts sur votre blog et aujourd’hui (dans votre manière d’écrire et/ou d’appréhender des dramas, par exemple) ?

Les différences sont notables. Initialement, ce blog était conçu pour partager quelques billets au fil de mes visionnages, oscillant entre nostalgie et nouveauté. Mais je suis cependant retombée très rapidement sur un schéma plus classique, et surtout, en presque quatre ans, les choses ont évolué, sur la forme comme sur le fond. Sans doute parce que je me suis plus investie que prévu dans My Télé is rich!.

Sur la forme, il y a deux points sur lesquels je suis devenue, pourrait-on dire, maniaque. C'est une déformation professionnelle (comme ma manie de mettre en italique les mots étrangers), mais la forme est pour moi aussi importante que le fond : qu'importe la pertinence éventuelle de l'idée développée, si le véhicule qu'elle emprunte n'est pas soigné. Ainsi, en quelques mois, s'est imposée une struture figée des billets, invariablement composés comme suit : introduction/résumé/critique sur le fond/la forme/acteurs/bilan. C'est un canevas clair et fixe qui permet d'assurer la lisibilité des articles. Je suis incapable de publier un billet où les idées seraient simplement jetées sur le papier au fur et à mesure qu'elles viennent. Cela peut donner une allure quelque peu répétitive pour les lecteurs réguliers du blog, mais cela me semble une nécessité de l'exercice. Par ailleurs, l'autre point qui retient le plus mon attention est le style écrit. Si certains s'écoutent parler, j'ai malheureusement tendance à "m'écouter écrire". Je me laisse facilement embarquer par ma plume, ce qui donne un résultat vite indigeste : phrases de dix lignes, multiples négations qui complexifient d'autant de simples affirmations, multiplications des adverbes... J'ai conscience de ces défauts, et une partie de ma relecture consiste généralement à simplifier et à couper le premier jet. Toujours est-il que la fluidité du style est pour moi déterminante - quitte à sacrifier un temps disproportionné sur certains billets... -, même si je laisse encore passer trop de coquilles et de fautes d'orthographe.

Sur le fond, les évolutions sont aussi importantes : c'est l'expérience qui joue. Plus on regarde de séries, plus on est familier avec l'histoire d'une télévision, le fonctionnement de son industrie, la culture de son pays, plus le regard s'affine et plus ce qu'on pourra écrire pourra être intéressant. Sur les 4 ans d'existence du blog, cela ne se ressent pas vraiment pour ce qui est des fictions américaines ou anglaises, avec lesquelles mon histoire est déjà ancienne. Pour les séries asiatiques, l'évolution est en revanche flagrante. J'ai regardé ma première série asiatique -japonaise- en 2006-2007, mais j'ai mis longtemps à aller au-delà du seul visionnage passif de divertissement. C'est la tenue de ce blog qui a véritablement fait office de déclic, vers la Corée du Sud tout d'abord, puis vers le Japon. Rédiger une review, même des premiers épisodes, oblige à regarder une fiction d'une autre manière : il s'agit de faire preuve d'esprit critique, mais aussi d'analyse. Cela conduit à chercher à en savoir plus sur les origines de la production. On retient alors les noms des scénaristes, des réalisateurs, au-delà des seuls acteurs ou du logo des chaînes qui apparaissent à l'écran. On acquiert peu à peu une vision d'ensemble. Je suis encore bien loin de maîtriser tous ces facteurs, mais mon avis s'est désormais débarrassé de bien des préconceptions. Au point que certaines critiques des débuts me paraissent avec le recul très perfectibles (*euphémisme*)...

Ce qui est vrai pour l'Asie l'est aussi, dans une moindre mesure car le choc culturel était plus relatif, pour d'autres paysages audiovisuels, européens par exemple. C'est grâce à ce blog que j'ai construit mon approche mondialisée des séries, et que j'ai dépassé nombre de mes préjugés tenaces sur tel ou tel petit écran du globe. Pénétrer dans un nouveau pays, c'est souvent commencer par une lune de miel, où toutes les fictions ont une saveur particulière grâce au dépaysement proposé. Puis, à mesure que l'on se familiarise avec ce petit écran, on bâtit progressivement une grille de lecture adaptée. Les articles deviennent alors mieux dosés et plus équilibrés. En résumé, plus on regarde, plus on écrit... mieux on regarde, mieux on écrit !

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2. Écrivez-vous sous votre nom réel ou derrière un pseudo? Si c’est un pseudo, d’où vient-il?

J'écris sous pseudonyme, principalement pour ne pas risquer de voir mêlés ma vie professionnelle et cette passion qui reste un hobbie. "Livia" est un choix décalé, volontairement à rebours. C'est d'abord une forme de plaisanterie, mais c'est aussi un clin d'oeil volontaire à une série qui fait partie des fondatrices de ma passion. "Livia" fait en effet référence au personnage de Livia Soprano, la matriarche acariâtre de la famille mafieuse, dans The Sopranos. Quant au nom de famille (Segret) sous lequel je signe certains de mes articles quand le seul prénom ne suffit pas, c'est plus simplement, et plus proche de moi, le nom de jeune fille de ma mère.

3. En quel personnage de drama aimeriez-vous vous cosplayer/déguiser s’il existait une convention sur les dramas de la même échelle que Japan Expo ?

N'y allons pas par quatre chemins : le cosplay n'est pas vraiment ma tasse de thé ! J'ai toujours été très réfractaire à l'idée de me déguiser, y compris quand, à l'école primaire, sur l'insistance des institutrices, il convenait de fêter Mardi Gras. Vingt ans plus tard, il est encore moins probable que je prenne moi-même l'initiative. A la limite, le seul déguisement que je pourrais envisager, ce serait de revêtir un de ces beaux costumes colorés traditionnels portés dans les sageuks.

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4. Selon vous, qu’est-ce qui fait qu’un drama/une série est bon(ne) ou mauvais(e)?

C'est une question extrêmement vaste et complexe, où les sensibilités, l'histoire et le parcours culturels du téléspectateur sont déterminants. Tenir ce blog m'a forcé à aller plus loin que le seul ressenti et à construire - notamment pour noter sur 10 - des grilles de lecture que j'applique à chaque fiction. J'ai établi une sorte de barême, dans lequel je prends en compte : la rigueur et la fluidité du scénario, l'ambition et/ou l'originalité du concept, le soin formel (qualité de la réalisation, ambiance musicale) et, enfin, les performances du casting. L'importance de chaque élément varie suivant la nationalité de la fiction regardée. Par exemple, la forme est un facteur non négligeable pour une série américaine, elle sera en revanche anecdotique pour une série taiwanaise... Et puis, d'autres facteurs extérieurs sont pris en considération, comme le budget ou encore la chaîne et le public visé. Plus généralement, j'ai tendance à évaluer une série en fonction de son cahier des charges préalable et des objectifs qu'elle s'était fixés. Cela donne donc des grilles de lecture fluctuantes, différentes suivant les pays. Un autre point auquel je suis sensible, c'est la dimension culturelle et dépaysante d'une fiction : il y a certaines contrées dans lesquelles j'aime par-dessus tout m'évader, certaines périodes de l'Histoire qui me parlent tout particulièrement... Ce sont autant d'éléments qui peuvent aiguiser mon intérêt, et me faire apprécier une série.

Une fois tous ces éléments en tête, à la question de savoir qu'est-ce qui fait qu'un drama ou une série est bon(ne) ou mauvais(e), j'ai envie de répondre : ce sont tous ces facteurs qui jouent. Plus que tout, une série doit être capable de provoquer un investissement émotionnel, de susciter une vraie implication dans la durée, car c'est sur cela que reposent la force et la particularité d'une fiction télévisée que l'on accompagne pendant plusieurs semaines, mois ou années. L'écriture doit être sérieuse et cohérente. La série doit savoir se construire une identité qui lui est propre, même si son concept n'a rien d'original : il s'agit de se réapproprier une idée, un espace... Si toute ambition mérite d'être saluée, il n'y a rien qui me rebrousse plus qu'une fiction présomptueuse : je préfère une simplicité assumée à des débauches de promesses non tenues. Après, je ne regarde pas une série sud-coréenne avec les mêmes envies et les mêmes attentes qu'une série anglaise, ni qu'une série japonaise, ni qu'une série américaine... Je vais chercher dans la première, une certaine intelligence émotionnelle, dans la deuxième, une proximité et une authenticité... Je vais aussi en quête d'une immersion culturelle, d'un dépaysement dans les décors et dans les moeurs. J'aime par-dessus tout éteindre mon petit écran en ayant l'impression que l'épisode visionné m'a apporté quelque chose, enrichi d'une certaine manière...  

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5. Comment jugez-vous la manière dont est abordée la pop-culture Sud-Coréenne (ou Japonaise, au choix) dans les médias Français ?

Ces dernières années (avant même le phénomène Psy), en France, la pop-culture sud-coréenne a connu une exposition sans précédent, par l'intermédiaire de la k-pop. Cependant, en parcourant les articles ou quelques extraits d'émissions, j'ai l'impression qu'il y avait principalement deux angles d'attaque pour traiter du sujet. Dans un premier type de médias, on analyse le phénomène pour expliquer son exploitation pratique : c'est l'angle du soft-power, avec une approche économique/diplomatique. Dans un second type de médias, on s'intéresse à l'industrie, au marketing et au public, avec plus ou moins de condescendance suivant la nature du reportage (si certaines émissions ont été sous le feu des critiques du fait de leur course aux raccourcis et préjugés, vu leur qualité générale en dehors de ce sujet, il n'y avait rien à attendre d'autre... donc je ne pense pas qu'il faille se formaliser). Toujours est-il que le point commun de toutes ces approches est de ne jamais avoir cherché à prendre en compte l'éventuel attrait musical de ladite musique, sans doute aussi parce que cela nécessite en amont un minimum de connaissances et de curiosité de cette scène particulière. C'est là où le bât blesse : on reste dans un "phénomène exotique/folklorique" qui prête plus à sourire qu'autre chose pour l'observateur extérieur. Conséquence supplémentaire, la prise en compte des productions musicales au-delà de cette seule façade apparaît également inconcevable pour un public non averti (aller jusqu'à la k-indie, ou partir du côté du Japon, ou de Taiwan). Par conséquent, le traitement de la musique asiatique dans les grands médias Français ne me semble pas encourager une ouverture. Cette dernière a pourtant lieu, presque malgré eux, tout simplement parce qu'internet a aboli les frontières et permet aux plus curieux de se faire leurs propres opinions, et d'aller au-delà de toutes les généralités paresseuses véhiculées.

Côté dramas, il y a eu des progrès encourageants. En ce qui concerne les k-dramas, l'institutionnalisation d'une offre légale - Dramapassion (quel que soit les critiques qui peuvent être formuler contre le service) - est un premier pas, tout comme la commercialisation de coffrets DVD. Pour ce qui est des j-dramas, 2013 a été un année intéressante. Ici le phénomène s'opère différemment, avec une ouverture vers un autre public : en effet, ce sont les ponts avec le cinéma qui sont utilisés. Fin avril, le drama Going Home a été projeté au Festival Séries Mania. Il a bénéficié dans la presse culturelle généraliste d'un bon accueil, à l'image de cette critique publiée dans Les Inrocks (signée d'un journaliste spécialiste des séries - occidentales). A Séries Mania, c'est moi qui ai présenté la série au public lors de la projection, et je suis ensuite restée pour les deux épisodes (je tenais à les savourer un peu sur grand écran !). La série a été globalement bien reçue parmi les spectateurs : beaucoup de rires ont accompagné la séance, et ceux à qui j'ai parlé après avaient plutôt apprécié (et j'ai passé les jours suivants à expliquer comment voir la suite aux plus curieux). Puis, le mois dernier, le drama Shokuzai a bénéficié d'une sortie au cinéma, sous la forme de deux films à la place des 5 épisodes originaux. Les Festivals, le cinéma... Ce sont autant de premiers pas ! Après, ne me faîtes pas dire ce que je n'ai pas dit : si ces fictions n'étaient pas signées Hirokazu Koreeda et Kiyoshi Kurosawa, deux cinéastes japonais à la réputation établie en France, elles ne nous seraient jamais parvenues. La réticence envers le petit écran demeure forte, comme le montre le refus que Shokuzai soit présentée pour ce qu'elle est, une série avant tout. Seulement, cela montre l'existence d'un autre vecteur d'ouverture intéressant. Il ne s'agit plus seulement de s'appuyer sur un public de niche pré-conquis, mais d'essayer de faire emprunter à ces fictions les mêmes voies d'internationalisation qu'ont déjà connu d'autres productions culturelles acceptées (cinéma, littérature). Et c'est peut-être par ce biais que l'ouverture peut-être la plus durable.

 

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Mine de rien, il y aurait encore beaucoup à ajouter sur les questions 4 et 5. Mais je crois que mon billet est déjà suffisamment long. Encore merci à Mina et Kaa pour m'avoir donné l'occasion de réaliser ce tag. Que tous les blogueurs, lisant cet article et qui seraient intéressés par y répondre à leur tour, n'hésitent pas. En espérant que ces quelques anecdotes d'un autre temps et ces interrogations sur la manière de concevoir les séries vous aient intéressé.

22:45 Publié dans (Blog), (Téléphagie) | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : tag |  Facebook |

29/04/2013

Mon Festival Séries Mania

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La saison 4 du Festival Séries Mania s'est achevée hier soir. Pour la première fois, j'ai eu l'occasion de me prendre au jeu des découvertes, des projections et des tables rondes organisées au Forum des images à Paris. J'ai passé un très chouette week-end. Trois jours dans une bonne ambiance, avec beaucoup d'explorations sériephiles mais aussi des échanges permis entre passionnés (et l'occasion de mettre un visage sur quelques personnes avec qui l'on discute virtuellement le reste de l'année). Je vais tâcher de revenir un peu sur mes visionnages dans le courant de cette semaine, avec quelques billets déjà rédigés (mais que, vu le rush parisien, je n'ai pas pu mettre en forme sur le blog) et d'autres à venir.

Tout d'abord laissez-moi vous raconter combien j'ai pu voyager téléphagiquement tout au long de ces quelques jours. Vendredi, à peine arrivée, ce fut une après-midi 100% israélienne. Il faut dire que si le dynamisme de ce petit écran n'est plus à prouver, ce n'est pas tous les jours que l'on a l'occasion de découvrir ces séries (Hatufim arrive cependant très prochainement sur Arte). J'ai commencé par me plonger dans Ananda, série fraîche et enthousiasmante qui entraîne ses téléspectateurs en Inde, puis ce fut la projection de 6 dollars per hour, une fiction autrement plus dure. Dans la soirée, j'ai assisté à l'avant-première d'Odysseus, la nouvelle série d'Arte prévue pour juin. Ensuite, samedi, ce fut une après-midi résolument nordique : j'ai enfin découvert la série suédoise 30 grader i februari (30 degrees in february) qui nous entraîne en Thaïlande. Puis j'ai voulu voir à quoi ressemblait la série norvégienne (à succès) Halvbroren que j'évoquais notamment dans le dossier de la semaine dernière sur les séries nordiques. Le soir, ce fut re-visionnage de Going Home sur grand écran : toujours aussi enthousiasmant à revoir (et la salle semble avoir partagé cette bonne impression si on en juge notamment par les rires nombreux qui retentirent). Enfin, dimanche, j'ai conclu mon Festival sur la projection de l'intéressante Hořící Keř (Burning Bush) qui nous fait revivre l'Histoire tchèque de la fin des années 60.

Ce fut donc une chouette expérience (très sériephile) pour un Festival où il y en a pour tous les goûts, et où c'est la curiosité qui prime. Pour couronner le tout, c'est la mini-série suédoise Torka aldrig tårar utan handskar (Don't ever wipe tears without gloves) qui a remporté hier le Prix du public de Series Mania 2013 : une récompense méritée qui, j'espère, permettra à cette fiction de trouver un diffuseur en France !

04/03/2012

(Téléphagie) Le feuilleton et la série : et toi, qu'attends-tu d'un épisode ?

Il y a quelques semaines, Ryan McGee a jeté un pavé dans la marre de la construction narrative des séries américaines avec un article qui amenait logiquement au débat : Did the Sopranos do more harm than good ? HBO and the decline of the episode (je vous en conseille fortement la lecture si cela n'est pas déjà fait). Il écrit notamment que : "HBO isn’t in the business of producing episodes in the traditional manner. Rather, it airs equal slices of an overall story over a fixed series of weeks. If I may put words into his mouth: HBO doesn’t air episodes of television, it airs installments. Calling The Sopranos a novelistic approach to the medium means praising both its new approach to television and its long-form storytelling."

En filigrane, transparaît la classification classique différenciant les séries d'une part, des feuilletons d'autre part, catégorisation utile même si elle ne reflète pas la réalité plus nuancée des fictions télévisées. En effet, ces dernières mêlent généralement les deux approches, ce qui leur permet d'exploiter tant leur format épisodique, que de s'assurer la fidélité du téléspectateur la semaine suivante. Le dosage tendra plutôt vers l'un ou l'autre des genres. Et à l'extrême du feuilletonnant, j'aurais plutôt désigné The Wire sur HBO dont les arcs de chaque saison s'affranchissent de la limite des épisodes, dépassant justement certains des codes du petit écran.

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Cet article, que l'on partage l'opinion de l'auteur ou non, a le mérite de faire rappeler et faire réfléchir sur les recettes de storytelling suivies actuellement. Elles demeurent plus ou moins toutes représentées, avec parfois des équilibres très réussis entre feuilleton et série, comme l'illustre actuellement une oeuvre comme Justified. Cependant, au-delà des techniques de scénaristes, cet article renseigne aussi sur un autre aspect : l'importance jouée par les attentes du téléspectateur devant un épisode de série. Comment perçoit-il cette heure de rendez-vous hebdomadaire ? Et que représente pour lui ce rendez-vous ?

Distinguer entre le feuilleton et la série (aussi perméables que soient ces catégories), ce n'est pas remettre en cause la légendaire addiction du sériephile, ni la fidélité que l'on peut éprouver pour telle ou telle fiction. Les différences vont tenir à d'autres aspects, très variables. Plus que l'anticipation par le téléspectateur de la fin de l'arc narratif, qu'il s'agisse d'un climax ou d'une grande révélation, je vois avant tout dans les feuilletons la possibilité de construire un (ou des) arc(s) homogène(s), pour une oeuvre comportant un début, un développement et une vraie fin. La structure du feuilleton tend ici à se confondre avec celle du roman, les épisodes devenant un découpage en chapitres d'une seule oeuvre.

Par rapport à cette structure narrative, ma consommation de séries a beaucoup évolué ces dernières années. Autant (ou même peut-être plus) que la "sériephilie sans frontières" dont je vous parle régulièrement, c'est peut-être là une des clés de ma sériephilie actuelle : ma conception de la fiction télévisuelle et les raisons pour lesquelles je la regarde.

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Au début d'une série, tout sériephile veut y croire...


Durant mes premières années de visionnage des séries, j'étais une téléspectatrice fidèle et assidue. J'ai expérimenté tous les genres imaginables diffusés sur les chaînes hertziennes : des séries purement procédurales, des dramas chroniques de vie, des soaps, des séries "hybrides" où le fil rouge tendait à la rapprocher du feuilleton, etc. Ce faisant, j'ai vécu d'intenses moments de satisfaction, mais aussi de la déception. Pas celle qui accompagne un trop rapide dérapage qualitatif (Invasion Planète Terre), mais celle qui suit la dilution progressive d'une oeuvre incapable de se renouveler dont on exploite jusqu'au bout et au-delà son concept (d'innombrables cop shows) ; ou alors quand la série finit défigurée, sans rapport avec l'esprit d'origine (New York 911). Et puis, il y aussi eu ces fameuses oeuvres dans lesquelles la mythologie patiemment construite a finalement déçue (X-Files). Des années d'investissement, et une impression de frustration qui reste (sans effacer cependant le plaisir d'avoir vécu les premières saisons et leurs interrogations)...

Durant la décennie des années 2000, un décrochage s'est opéré dans mon approche des séries. L'investissement sur le long terme est devenu plus difficile ; démarrer des nouveautés, moins naturel. Je me suis mis à rechercher des oeuvres où le contrat d'engagement était pré-écrit : je savais dans quoi je m'engageais et pour combien de temps. C'est à ce moment-là que j'ai vraiment commencé à m'investir dans les "mini-séries" ; et c'est précisément au cours de cette crise que ma consommation anglaise a explosé. Plus que mon anglophilie, voilà bien une des raisons premières qui m'a fait me tourner vers le petit écran d'outre-Manche. Le nombre d'épisodes est connu, le récit construit comme un vaste arc avec une fin. Et si déception il y a, je n'aurais pas d'arrière-goût amer à la pensée d'avoir investi 100 heures pour me sentir flouée. Immédiatement, la découverte se fait alors plus spontanément.

C'est ensuite que j'ai découvert le petit écran asiatique, ou plus précisément japonais. Le format classique du renzoku tourne autour d'une dizaine d'épisodes d'une quarantaine de minutes (je laisse de côté les taïga et asadora). Le renouvellement du drama, loin d'être systématique, est plutôt rare ; si bien que l'histoire se construit généralement sur une seule saison. La série pourra indifféremment adopter le modèle du feuilletonant ou au contraire enchaîner les épisodes quasi-indépendants, cela dépend simplement des genres. Je m'y suis cependant facilement laissée prendre parce que j'y ai retrouvé des assurances proches du format de la mini-série, en terme de durée, mais aussi en terme d'écriture.

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J'aurais pu finir par croire que mon rapport aux séries se résumait à une question de longueur, mais j'ai alors commencé à suivre les séries sud-coréennes. Concernant le format de ces dramas, la structure narrative suivie par les trois chaînes principales de Corée du Sud (je laisse volontairement de côté le câble qui a introduit récemment quelques variantes) se rapproche de ses voisins chinois, taïwanais, ou encore de Hong Kong, mais aussi des télénovélas d'Amérique du Sud. Un début, une vraie fin, un renouvellement pour une saison 2 exceptionnel, et un nombre d'épisodes plus long, avec 20, 36 ou pouvant dépasser allègrement la cinquantaine d'épisodes pour les home dramas ou encore les sageuk.

Pourtant, dans le petit écran sud-coréen, le fonctionnement de l'industrie de l'entertainment fait qu'on n'y trouve pas les mêmes garanties que j'ai précédemment évoquées. La cadence imposée par le tournage "live", avec des épisodes écrits et tournés à flux tendus par rapport à la diffusion télévisée (il arrive de boucler la post-production d'un épisode la veille même de sa diffusion), peut amoindrir l'écriture ; il n'est pas rare que le passage des épisodes pré-écrits, à ceux ajustés et finalisés en cours de diffusion, entraîne des sautes qualitatives. De même, un drama à succès (ou en cas de retard de celui dont la diffusion doit suivre) peut bénéficier d'une extension de quelques épisodes. Cela accentue d'autant les risques de dilution de la série.

Seulement, en dépit de ces risques, c'est le plaisir du feuilleton (lorsqu'il est réussi) qui l'emporte. C'est ainsi que j'ai pu arriver au bout des 81 épisodes de Jumong en éprouvant un vrai plaisir sériephile rare. Comme beaucoup de sageuk traditionnels, il se présente comme un biopic d'un personnage célèbre, partant des évènements précédant la naissance (souvent des tragédies forgeant les oppositions) puis relatant l'accomplissement de ses grands actes, pour s'achever proche de la fin. La force de ce récit, c'est justement sa construction comme un grand roman, découpés en chapitre, et des épisodes qui ne sauraient se visionner indépendamment.

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Au final, au-delà des deux catégories que sont le feuilleton et la série (et de ma préférence pour la première), la construction narrative qui a mes faveur est désormais celle-ci : un début, une fin, si possible un nombre d'épisodes clairement défini. Ma fiction idéale s'apparente à un livre, et j'entretiens avec elle des rapports très semblables avec ces derniers (Forbrydelsen l'a bien illustré l'an dernier). Sans être une vérité systématique, c'est ce qui décrit le mieux l'état actuel de ma sériephilie. Le procedural show n'a plus mes faveurs ; pas plus que la série au concept potentiellement fleuve qui empêche de savoir pour combien de temps et jusqu'où on s'embarque. Cela explique d'ailleurs en partie mes réserves face aux fictions des grands networks américains.

De façon plus problématique, la fidélité sur le long terme que j'ai pu nourrir par le passé pour certaines oeuvres me semble aujourd'hui presque incompréhensible. Prenons par exemple House MD qui va s'achever à la fin de la saison. Je l'ai sincèrement appréciée à ses débuts ; je m'installe aujourd'hui devant un épisode sans trop rechigner, mais j'ai tourné la page depuis plusieurs saisons. Sans regret. J'admire la persévérance des sériephiles qui accompagnent leurs fictions saison après saison. Cela m'est devenu presque étranger. Ma passion sériephile est cependant intacte ; elle se manifeste juste différemment désormais.


Et vous, quel rapport entretenez-vous avec les épisodes d'une fiction télévisée ?

06/08/2011

(Téléphagie) Petit état des lieux d'une passion sériephile ordinaire en 2011

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Il y a quelques années, un de mes profs m'avait dit, "peu importe le domaine dans lequel vous vous spécialiserez ; un spécialiste, ce n'est pas tant quelqu'un qui maîtrise sur les bouts des doigts un sujet, que quelqu'un qui a avant tout conscience de ses limites et de l'étendue de son ignorance". Il n'avait pas tort ; mais surtout, cette vérité peut facilement s'appliquer à la sériephilie. Il y a quelques semaines, Fabien expliquait dans un article intéressant, l'impossibilité qu'il y a aujourd'hui d'être "well-read", c'est-à-dire d'avoir vu tout ce qu'il fallait avoir vu au cours de la saison.

Il y a autant de façons différentes et tout aussi légitimes de vivre sa passion pour les séries, qu'il existe de sériephiles. C'est quelque chose de personnel, où il n'y a aucune "vérité". A une époque de sur-consommation, comment arbitrer ? Les critères sont multiples, leur prise en compte varie suivant les personnes : certains regardent les noms des créateurs, des acteur, des chaînes de diffusion, d'autres lisent les synopsis, ou bien testent tous les pilotes qui leur tombent sous la main. Chacun s'organise en fonction de son temps libre, de ses affinités et de ses préconceptions du petit écran. L'important, ce n'est pas tant d'essayer de dépasser ses préjugés que d'en avoir conscience : il faut savoir faire preuve d'humilité. L'essentiel est d'aimer ce qu'on regarde et de prendre du plaisir, peu importe la reconnaissance populaire et/ou critique de ce qu'on apprécie et autre "qu'en dira-t-on". C'est d'ailleurs ce que j'aime le plus sur ce blog : une ligne éditoriale dégagée de toute contrainte, et de considérations de statistiques et/ou d'image.

La saison 2010-2011 a été pour moi une saison de changement, mais aussi très satisfaisante à bien des niveaux. A l'heure du bilan estival, aujourd'hui, je me suis posée la question de l'état actuel de ma sériephilie. Quelles sont les affinités et les préjugés qui s'expriment ? Comment est-ce que j'arbitre et vis ma passion ? Pour essayer d'y voir plus clair, j'ai structuré mon article par continent : l'Europe, l'Amérique du Nord, l'Océanie, l'Asie... pour terminer sur une question : et la France ?

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Forbrydelsen (DR1)


1) L'Europe : la révolution révélation venue du Nord

Je ne vais pas déclamer à nouveau tout mon amour pour la télévision anglaise, dont la reconnaissance est un acquis ancien. Mon intérêt pour ces fictions ne se dément pas et le retour que j'attends le plus dans les mois qui viennent est sans conteste la saison 2 de Downton Abbey.

Cependant, 2011 aura bel et bien été l'année d'une révolution européenne : la découverte du petit écran non anglophone, et plus précisément, la révélation venu du froid des pays nordiques. C'est le Danemark qui aura été le pays marquant de cette première moitié d'année : la saison 1 Forbrydelsen m'aura captivé ; et, surtout, actuellement, je savoure dévore la saison 1 de Borgen avec un enthousiasme et une jubilation rares. Dans cette continuité, j'ai envie d'aller plus loin explorer la télévision suédoise et norvégienne. Mais, dernière surprise en date, cette semaine, c'est l'Islande qui se sera démarquée avec Pressa. Comme un pied de nez à bien des idées reçues : non, des moyens moindres ne sont pas des obstacles insurmontables à la créativité et à la qualité, et la non-anglophonie ne rend pas impossible la découverte. Il y aura forcément moins de productions (en nombre) que dans des pays plus importants ; mais toutes ces séries prouvent bien qu'un petit écran de qualité peut grandir en Europe.

A côté, j'ai cependant conscience de l'existence d'une autre Europe, inexplorée, à commencer par nos autres voisins immédiats : Italie, Espagne, Allemagne. De ce que je vois et lis de l'Italie (l'italien étant la seule autre langue dans laquelle j'ai quelques compétences), j'ai un peu le sentiment que le pays en est au même point que la France. Pour sa télévision publique, par exemple, la série bio-pic Corleone, diffusée sur la Rai, sortie en France en DVD en mai, présentait certaines insuffisances assez caractéristiques. Il y a un dynamisme de la part des chaînes payantes, en l'occurence Sky (Romanzo Criminale), mais est-ce que ça va au-delà, vu de l'extérieur, je n'en ai pas l'impression. Pour l'Espagne et l'Allemagne, c'est différent, pas seulement pour la barrière linguistique. A la différence de l'Italie, je n'ai pas de familiarité culturelle avec ces pays et j'avoue ma complète méconnaissance de leurs produtions (films, livres, musiques). L'Espagne a une tradition de séries historiques d'action qui ne serait sans doute pas étrangère à mes goûts. Pour l'Allemagne, je n'ai aucune certitude face aux rares fictions que j'ai pu voir et qui sont celles qui sont arrivées jusqu'à nous. Le problème reste donc entier pour ces pays.

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Treme (HBO)


2) L'Amérique du Nord : l'hégémonie du câble

La saison 2010-2011 n'aura pas été une saison américaine. Ou plutôt elle se sera inscrite dans la directe continuité de la lassitude passée. Cette année, le manque de temps libre fait que l'arbitrage a été drastique : je ne suis allée au bout d'aucune saison des séries des grands networks US. Abandonnées en rase campagne pour des raisons diverses, de qualité, de désintérêt, de longueur, ou un mélange d'un peu tout. Pourtant, j'ai aimé des nouveautés : Game of Thrones, Boardwalk Empire ; j'ai pleuré Rubicon ; j'ai applaudi Justified ; je n'ai pas encore osé finir le coeur serré Friday Night Lights ou Big Love ; je me suis gardée la saison 2 de Treme de côté. Bref des "chaînes payantes" me direz-vous. Pour être honnête, il n'y a qu'une seule chaîne américaine qui peut me faire tenter une nouveauté juste parce qu'elle la diffuse : HBO. Ce n'est pas un label de qualité systématique, mais le ratio satisfaction/déception fait que j'ai construit en une décennie une relation particulière avec cette chaîne. Tout n'est pas forcément toujours au beau fixe, mais ma confiance a été rétribuée. Et rien n'est venu perturbé cet équilibre. Outre HBO, la seconde chaîne américaine que je retiens est USA Network (Suits), pour des raisons très différentes, mais finalement complémentaires. Je suis loin de regarder tout ce que diffuse USA Network, mais j'ai mes habitudes sur cette chaîne, équivalant à l'été dans mon esprit, qui remontent à Monk et aux 4400. Désormais avec le type de divertissements qu'elle a su développer depuis Psych, j'ai naturellement envie de voir ses nouveautés. 

A côté des Etats-Unis, existe un autre pays souvent oublié avec un regard européen : le Canada. C'est en lisant l'article de Ladyteruki sur les préjugés d'une télélambda franchissant la frontière que je me suis rendue compte à quel point dans mon esprit, c'était l'extrême inverse qui se produisait. C'est probablement tout aussi critiquable, mais du fait de la multiplicité des co-productions, de la question des lieux de tournage, etc., j'ai une tendance naturelle à assimiler les deux pays, et à confondre ma façon d'aborder et d'arbitrer au sein de leur production. Je n'ai rien contre les Flashpoint, The Bridge et autre Listener, mais je pourrais leur adresser le même reproche que je fais à beaucoup de séries des grands networks américains, en terme d'identité notamment. C'est bien simple, elles ne me parlent plus actuellement. Il y a quelques années, j'avais pris le temps d'explorer le Canada, j'en suis ressortie avec un schéma, forcément caricatural, mais comme dans toute consommation culturelle il faut faire des arbitrages : The Movie Network = à tenter ; CBC/CTV = à ses risques et périls. Pour The Movie Network, c'était Slings & Arrows, ReGenesis, et Durham County à un degré moindre. A contrario, la dernière série de CBC qui m'a vraiment marqué, c'est Intelligence. Deux saisons, en 2006 et 2007, une réelle ambition narrative, des controverses sur sa noirceur ; pas parfait, mais que je conseille à tout le monde. Et, cette année, The Yard, sur HBO Canada, n'aura pas bousculé le schéma du Canada anglophone.

Par contre, j'ai aussi conscience qu'il y a un autre versant inexploré : le francophone québécois. J'ai bien envie un jour de prendre le temps de regarder Malenfant, mais pour le reste, tous les articles que j'ai pu lire sur ces séries, notamment leur sujet, n'ont pas éveillé mon intérêt jusqu'à présent. 

 

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This is not my life (TV1)


3) L'Océanie : une histoire de kiwi

Les productions venues d'Océanie sont bien anglophones ; mais le trajet vers ce continent est moins naturel. Les séries arrivent plus difficilement jusqu'aux chaînes françaises ; et, dans l'alternative, suivre une série australienne ou néo-zélandaise implique souvent de maîtriser suffisamment l'anglais pour ne pas avoir besoin de sous-titres. De l'autre côté de l'hémisphère, comme je le disais dans ma critique de Nothing Trivial, une certitude : j'aime la Nouvelle-Zélande. Pourquoi ? Je ne sais pas (nous voilà bien avancé). Je pense qu'il y a une question d'ambiance d'une part, et une affinité culturelle inconsciente sans doute de l'autre. Cette année, l'Australie a pourtant proposé des fictions plaisantes à suivre, plus calibrées : du legal drama (Crownies) à l'historique de luxe (Cloudstreet). Mais l'impression néo-zélandaise de proximité et de mélange d'influences l'emporte dans mon coeur. Ainsi, si je suis prête à tester toutes les nouveautés venues du pays des All Blacks ; en revanche, l'Australie me laisse indifférente et ce sera la lecture du synopsis qui sera déterminante pour me donner envie de regarder.

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Fumou Chitai (Fuji TV)


4) L'Asie : une fidélité sud-coréenne

En Asie, 2011 n'aura pas fait bouger les lignes établies. Je suis naturellement portée vers la Corée du Sud. Je pourrais prendre pour exemple la claque téléphagique qu'a été White Christmas en début d'année, ce drama est cependant tellement atypique, qu'il serait faux d'en faire le représentant de la production télévisée sud-coréenne. Au pays du Matin Calme, la dimension sentimentale et esthétique présente dans les dramas demeure l'attrait principal, mais elle est couplée avec un facteur culturel déterminant (mon inclinaison pour les séries historiques le montre bien). Si les k-dramas sont ceux qui retiennent le plus mon attention en Asie, c'est tout simplement parce que la Corée du Sud est un pays qui m'intéresse de manière globale, au-delà du seul petit écran ; et il profite d'un cycle vertueux "dramas=>culture générale=>dramas"... La plupart du temps, je suis surtout frustrée de ne pouvoir avoir suffisamment de temps à leur consacrer, tant ils s'apprécient dans la durée.

Parmi ses voisins, l'autre grand pays sériephile est bien évidemment le Japon. Mes rapports avec son petit écran sont plus compliqués. Des révélations comme Fumou Chitai ou Karei Naru Ichizoku m'ont fait prendre conscience qu'en terme de portrait industriel et économique, que ce soit de l'historique ou non (Soratobu Tayia), les dramas japonais ont un vrai savoir-faire à part pour retranscrire ce type de réalité. Ils maitrisent ici des sujets qu'on croise finalement moins dans les petits écrans des autres pays. En dehors des questions économico-industriel-sociales évoquées, pour me lancer dans une série japonaise, il me faut deux choses : un synopsis qui éveille mon intérêt et une critique positive de la part de quelqu'un qui a vu le drama. Je ne sais pas spontanément regarder une série japonaise.

Enfin, dernier territoire asiatique que j'ai pu un peu explorer, les trois Chine. D'expérience, je dirais que la tradition télévisée de Hong Kong, c'est souvent du divertissement, parfois très plaisant, mais "vite vu, vite oublié". J'ai regardé des hk-dramas, mais je n'ai jamais eu de coup de coeur, ni vu quoique ce soit qui m'a marqué. Du côté de la Chine, je n'ai jamais vu de séries contemporaines, donc j'ai une vision très partielle de la production et sans doute trop peu de recul pour émettre un jugement. Le genre historique semble très apprécié. J'aime le Wuxia, mais c'est à destination d'un public de niche (bon, j'avoue que j'ai quand même très très envie de me lancer dans Three Kingdoms !). Enfin, à Taiwan, les comédies colorées ne m'intéressent pas, en revanche les histoires sombres d'adolescence sont peut-être les seuls "high school dramas" que je peux visionner (Gloomy Salad Days). Ces pays sont des territoires que j'explore de loin ; je n'ai pas encore trouvé la motivation pour aller au-delà de cette surface.

 

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5) Après cette esquisse de semi-tour du monde, une dernière question se pose naturellement : Et la France ?

Ma découverte de 2011 est un rattrapage : il s'agit d'un Village Français qui m'a progressivement entièrement gagné à sa cause. J'apprécie vraiment la maturation de l'écriture au fil des saisons et la façon dont est abordé ce sujet sur la Seconde Guerre Mondiale. Mais même si elle se déroule au XXe siècle, elle reste une série historique, par conséquent, elle va naturellement me parler. J'aurais aimé écrire qu'une série contemporaine française m'a plu en 2011, mais encore une fois, au-delà de l'absence de réflexe pour allumer spontanément mon téléviseur, Les Beaux Mecs ou Xanadu ne m'auront pas entrainé plus loin que leur pilote. J'ai un peu l'impression d'avoir perdu et de ne pas retrouver l'habitude (si je l'ai jamais eue) de m'installer spontanément devant la télévision française : elle ne fait pas naître en moi de curiosité. Et je m'en veux. Le visionnage de la saison 1 de Pressa m'a cependant redonné envie de tenter Reporters. Pour le futur, les derniers développement autour de Pigalle la nuit n'incitent pas l'optimisme, sans aller jusqu'au constat sombre de Sullivan qui estimait dans son édito du mois dernier que la télévision française risquait de mourir. Quand on voit le dynamisme européen qui existe chez certains de nos voisins, je me dis qu'on a forcément les moyens d'une révolution télévisuelle comme DR au Danemark, mais peut-être pas la volonté politique de la part des dirigeants ? Je ne sais pas. Je suis tout cela de très loin, de trop loin sans doute... 

 

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Si elle s'est restructurée, ma sériephilie reste construite sur des tas de préjugés et de décisions arbitraires ; elle est aussi pleine de limites (pas d'Afrique, ni d'Amérique du Sud). La saison 2010-2011 a été celle des retrouvailles avec un équilibre perdu. Cette consommation demeure très liée à des motivations culturelles : mon amour démesuré, le seul qui transcende toutes les nationalités, au profit de l'historique l'illustre sans doute en partie. Le degré d'intérêt pour un pays joue aussi : je peux tenter une nouveauté anglaise, sud-coréenne ou néo-zélandaise juste en raison de sa nationalité ; ce qui ne sera jamais un argument suffisant pour me faire commencer une série américaine, canadienne, australienne ou japonaise. Ce type de raisonnement est assez nouveau. Et j'avoue observer la diminution constante de la part des séries américaines dans mes programmes avec un peu d'inquiétude (c'est la première année où je ne regarde aucune série des grands networks) ; mais je pense que ce n'est qu'une passade qui devrait se dissiper à terme. Peut-être une réaction à une overdose.


Bref, on est loin d'une sériephilie sans frontière débarrassée de tous préjugés. L'important, c'est sans doute d'en avoir conscience, et l'essentiel reste de prendre du plaisir devant ses séries, peu importe la manière dont on vit sa passion. Même si, en terme de ligne éditoriale du blog, ça veut dire vous parler de séries islandaises qui intéresseront 2,1 personnes parmi vous. Je sais que vous êtes des lecteurs indulgents et compréhensifs face aux lubies téléphagiques de la blogueuse que je suis, n'est-ce pas ?

24/02/2011

(Humeur) La sériephilie sans frontières peut-elle exister ?

Quand Livia met les pieds dans une cinémathèque et se prend à rêver...

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Je ne suis pas cinéphile. Cependant, je reste une grande consommatrice de culture. J'essaye de parfaire un peu mes explorations au-delà de mon obsession télévisuelle, de crainte de devenir trop exclusive. C'est ainsi qu'hier soir, je me suis retrouvée à la cinémathèque où le ciné-club local organisait une projection du magistral Château de l'araignée de Kurosawa (et pouvoir apprécier ce film sur grand écran, c'est classe). Dans les discussions qui suivirent, certains intervenants expliquant que le film avait mis de nombreuses années avant de parvenir jusqu'en France par le biais de festivals, la discussion a rapidement porté sur l'étanchéité des frontières à l'époque et les trésors qui pouvaient rester inaccessibles... Pourquoi est-ce que je vous parle de la cinéphilie de la fin des années 50 me direz-vous ? Outre que le fait que cet échange ne m'a pas paru sans faire écho à d'autres discussions sur cet autre média qu'est la télévision, mon cerveau a logiquement dérivé sur, justement, la sériephilie.

Parce que hier soir, j'ai mis les pieds au sein d'une communauté que je connais peu et j'ai pu assister - presque surprise et fascinée - à un quart d'heure d'échanges de vrais passionés comparant les différentes adaptations du MacBeth shakespearien, citant tour à tour Orson Welles, Kurosawa, puis dérivant sur les adaptations soviétiques (!) de Shakespeare. Chacun évoquait les influences qu'il y percevait, les spécificités culturelles, le classicisme de l'un, le théâtralisme de l'autre... Aucune des productions n'était dépréciée. Un vrai dialogue où chaque film était considéré comme recevable. Une fois rentrée chez moi, je n'ai pu m'empêcher de me demander... Et s'il me prenait l'envie de disserter et de réfléchir sur la perception de l'adolescence à travers le petit écran et les cultures, en comparant quelques-unes des séries emblématiques de ces dernières années, par exemple : Life Unexpected (Etats-Unis), The Secret Life of the American Teenager (Etats-Unis), Skins (Angleterre), Life (Japon), Jungle Fish (Corée du Sud), Gloomy Salad Days (Taiwan), pourquoi ai-je le sentiment que c'est avec une polie réserve que l'idée serait accueillie ? Pourquoi le premier débat est-il possible et, surtout, considéré comme normal et parfaitement légitime entre cinéphiles, tandis que le second paraîtrait impensable et sans pertinence ? Est-ce que je me suis trompée de passion ?

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 Entre défendre les frontières acquises ou explorer, il faut choisir.

Le premier contre-argument que l'on pourrait m'opposer serait sans doute celui-ci : comment parler de séries qui n'arrivent pas jusqu'à nous ? Vous aurez beau étudié vos programmes avec attention, vous ne croiserez pas un j-drama dans les grilles de vos chaînes. Notons cependant que l'alternative légale se développe peu à peu : il existe des services permettant de faire découvrir légalement au téléspectateur européen ces séries d'horizons si lointains, en témoigne le site dramapassion avec les séries sud-coréennes. Reste que, cessons la naïveté un instant, il n'y a aucune différence dans le mode opératoire du sériephile qui regarde sa série américaine le lendemain de la diffusion aux Etats-Unis et celui qui va visionner une série taiwanaise.

Serait-ce alors un problème linguistique ? Encore une fois, c'est un faux argument, tous les passionnés ne sont pas anglophones et le travail des fansubbers existe indifféremment dans tous ces domaines. D'autant qu'en France, la programmation des chaînes ne permet pas de vivre sa sériephilie par leur seul biais (le dernier massacre en date, avec The Good Wife, en étant une énième illustration) ; au minimum, le sériephile se rabat sur les DVD. Or les DVD édités ne sont pas cantonnés aux seules séries américaines, le net ouvrant la voie à des achats à l'autre bout du monde.

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Aujourd'hui, la magie des technologies fait que ces frontières longtemps rédhibitoires ont depuis des années été virtuellement abolies, alors pourquoi est-ce si difficile de s'éloigner du seul giron anglo-saxon pour découvrir - émerveillé - qu'il existe des productions dans des contrées lointaines dont on aurait presque fini par se demander s'ils possédaient bien la télévision ? Aujourd'hui, la question se pose avec d'autant plus d'acuité face à tous ces pays qui deviennent de nouveaux acteurs sur la scène internationale (économique, etc.) : avec le développement d'une industrie télévisée ayant plus de moyens et la perfection de leur savoir-faire, ces petits écrans ne vont-ils pas gagner en légitimité et en qualité ? 

J'ai tendance à voir, dans le réflexe anglo-saxon de mon entourage, en premier lieu un problème de nouveauté : chronologiquement, cet accès facilité est récent. Il n'a été consacré véritablement qu'au cours de la dernière décennie. Les sériephiles adultes actuels ont grandi à un moment où tous ces moyens n'existaient pas et donc devant une culture télévisée dépendante et façonnée par les programmations des chaînes, donnant une perception du petit écran sans doute amplifiée par la qualité des fictions proposées alors. Sauf que si les réflexes de curiosité ne naissent pas forcément spontanément, rien n'empêche de les encourager.

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Certains se réfugieront peut-être derrière une question de représentativité. Après tout, les personnes susceptibles d'être intéressées par ce brassage des cultures téléphagiques représenteraient seulement une minorité : un public de niche au sein d'un public lui-même de niche, donc trop infime pour être pris en compte ? Si je veux bien croire que les supposées démocratisation et popularisation de la mode "séries" ressemblent parfois plus à des illusions d'optique qu'à une réalité, je pense (naïvement?) que c'est une erreur d'imaginer immuable le monopole culturel existant. L'exemple fera sans doute sourire, mais récemment, je lisais un article sur la déferlante des séries sud-coréennes en... Roumanie, où elles dominent désormais les anciens programmes préalablement installés.

Parmi les causes pour rechercher les raisons de ce succès, un argument en particulier a retenu mon attention : la volonté des téléspectateurs de voir de nouvelles choses. Certes le petit écran roumain (que je ne connais pas) n'a sans doute pas le dynamisme américain, mais il reste cet appel à l'exotisme qu'offrent des séries ouvrant les portes d'une autre culture plus lointaine et avec laquelle on est moins familier. Quiconque s'est déjà lancé dans ce type de drama a forcément ressenti ce petit frisson d'excitation quand on saute le pas. Je ne dis pas que les k-dramas pourront un jour être diffusés sur une grande chaîne, mais seulement que le paysage sériephile n'est pas une fatalité et une donnée irréductible qui ne peut évoluer. Je pense même qu'il est vital, à un moment ou à un autre, d'y introduire des variations, au risque sinon de finir par'épuiser le schéma que l'on reproduit.

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Cependant, parler de sériephilie sans frontière, c'est se heurter à d'autres obstacles plus pernicieux. Il faut aussi dépasser d'autres idées préconcues sur la télévision, celles-là mêmes qui sont entretenues par ceux qui, paradoxalement, prétendent défendre ce medium. Si on peut admettre que le téléspectateur ne va pas de lui-même s'ouvrir vers cet "au-delà" téléphagique, pourquoi est-ce que ceux qui sont supposés lui fournir les clés d'entrée dans cet univers ne se posent pas, eux, cette question de la télévision existant au-delà du pré carré confortable dans lequel ils ont pris leur quartier ? Si on veut vraiment construire la sériephilie, il est nécessaire et même vital de cesser cette compartimentalisation d'un autre âge qui ne peut, à terme, que s'essoufler. C'est dans la diversité que se trouvent le fondement et la réalité de tout art, et la pérennité de toute passion.

On ne peut pas en même temps défendre les fictions qui sont issues de la télévision - en décochant des accusations de snobisme à ceux qui médisent de ces "téléfilms" - et parallèlement déprécier par ignorance ou désintérêt toute une partie, importante quantitativement comme qualitativement, de ces productions. Certains journalistes, dont les articles ont pu me faire réagir ces dernières semaines, affirment promouvoir une télévision de qualité. Je ne doute pas qu'ils le pensent sincèrement. Mais en encourageant implicitement ou explicitement cette absence d'ouverture, ont-ils conscience du caractère improductif de la démarche ? C'est nuire au medium même qu'ils cherchent maladroitement à défendre que de se limiter ainsi.

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J'ai la naïveté de croire qu'à la manière de tous les arts, cette notion encore jeune et si fragile qu'est la sériephilie devra apprendre à s'ouvrir pour grandir et acquérir sa pleine dimension, ainsi que des lettres de noblesse méritées. Il ne s'agit pas de renier les penchants naturels de tel ou tel téléspectateur pour telle ou telle télévision, mais seulement d'être prêt à envisager l'idée et à reconnaître le fait que l'on effleure seulement la richesse et la diversité du petit écran. Parce que parfois, devant certains articles pourtant rédigés probablement sans arrière-pensée, j'éprouve le sentiment désagréable que cette fameuse échelle de valeurs tant décriée, née des rapports oedipiens de la télévision et du cinéma, ce mépris sur lequel tant de sériephiles formulent tant de plaintes (légitimes), nous le reproduisons tout aussi naturellement et arbitrairement dans la hiérarchie subliminale que l'on pose entre les Etats-Unis et le reste du monde.


Peut-être suis-je naïve ou/et trop ambitieuse. Peut-être est-ce que je place dans cette passion des espoirs démesurés qui n'ont pas lieu d'être. Ne voyez dans ce billet qu'un exutoire désordonné de frustrations qui ont beaucoup grandi dernièrement. Je devrais sans doute cesser ces réflexions vaines sur mon rapport au petit écran. Je n'ai pas de perspective suffisante pour problématiser et prendre du recul sur toutes ces questions... Mais j'ai quand même le droit de rêver tout haut du jour où je pourrais vraiment et en toute légitimité avoir cette discussion sur l'adolescence dans les séries télé dont j'ai parlé plus haut. Est-ce utopique ?