Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

06/10/2012

(Mini-série UK) Parade's End : la fin des parades

  paradesend0.jpg

Figurant en bonne place parmi les period dramas de la rentrée, Parade's End, diffusée sur BBC2 à partir de la fin du mois d'août (elle compte 5 épisodes), laissait entrevoir d'intéressantes promesses sur le papier. Adaptée d'une oeuvre écrite par Ford Madox Ford, scénarisée par Tom Stoppard, cette co-production BBC/HBO/VRT bénéficiait d'un sujet fort, mêlant amour et Grande Guerre, avec pour tableau de fond les mutations de la haute société anglaise. Elle rassemblait aussi un casting qui retenait l'attention, emmené par Benedict Cumberbatch. Malheureusement, après des débuts quelque peu maladroits, elle n'aura jamais su dépasser sa froideur initiale, offrant un beau visuel peinant à capturer l'intensité des émotions pourtant entrevues.

paradesendr.jpg

Parade's End disposait pourtant d'une histoire qui n'aurait pas dû pouvoir laisser indifférent. Elle met en scène le développement d'un triangle amoureux dans la haute société britannique du début du XXe siècle, en proie à bien des mutations. Sylvia Satterthwaite et Christopher Tietjens, un aristocrate, se rencontrent dans un train, au cours d'un trajet qui finit en ébats amoureux passionés. Peu de temps après, Sylvia annonce qu'elle est enceinte, même si elle ne peut être certaine que Christopher est le père. En homme de principes, respectable et responsable, ce dernier accepte cependant de l'épouser.

Leur mariage n'est pas heureux, tant leurs tempéraments diffèrent. Sylvia se montre de plus en plus provocatrice, au point de le tromper, et même de partir avec un autre homme. Campant sur ses positions vis-à-vis de sa femme, Christopher fait cependant la rencontre d'une jeune suffragette, Valentine, auprès de laquelle il semble être lui-même. S'il ressent quelque chose de fort, il ne peut concevoir d'être infidèle, ni de divorcer. Mais parallèlement, d'autres évènements plus graves s'annoncent en Europe qui vont venir remettre un peu plus cause ses certitudes : la Première Guerre Mondiale s'apprête à éclater.

paradesendt.jpg

Parade's End est, sur fond d'histoire d'amour impossible, un récit sentimental initiatique parlant de passions réprimées et de la douleur de ne pouvoir les assouvir. C'est aussi le portrait des bouleversements et des traumatismes provoqués par la Grande Guerre, notamment au sein d'une société aristocratique arrivée à un tournant. La richesse des thématiques abordées est indéniable. Mais en cherchant à relater le poids des conventions sociales sur l'autel desquelles sont sacrifiées tant d'émotions, la mini-série tombe dans le propre piège qu'elle devait raconter. Elle délivre un récit d'une froideur presque hautaine, avec des personnages enfermés dans leur rôle et peinant à susciter la moindre empathie. Parade's End a voulu relater la distance avec laquelle un certain milieu percevait le monde, elle aura appliqué cette même distance à sa tonalité ambiante. Le récit en devient peu accessible, souffrant en plus de maladresses de construction et de longueurs dommageables - particulièrement durant les premiers épisodes.

Cette histoire a pourtant une intensité sous-jacente qui se perçoit par intermittence. Elle entreprend de nous raconter comment, par quelles épreuves, Christopher va progressivement parvenir à s'affranchir de toutes ses préconceptions de classe pour accepter ses sentiments. Malheureusement l'ensemble du récit semble ployer sous une chape de plomb, figeant et ayant du mal à retranscrire avec justesse les réactions des personnages. Les seules étincelles d'humanité proviennent de Sylvia, dont les éclats et la flamboyance insolente en deviennent savoureux, correspondant aux rares moments où Parade's End s'anime et retrouve de la vie. L'ascendant pris par la jeune femme contribue à déséquilibrer le triangle amoureux esquissé, tant la fadeur de Valentine contraste, à des années-lumières des fortes individualités de la brillance - très différente - de Sylvia et de Christopher. La suffragette n'a ni la complexité, ni l'ambivalence des deux autres, et reste une figure trop unidimensionnelle, en retrait. Ces déséquilibres expliquent en partie pourquoi l'histoire peine à convaincre, peu aidée par un rythme trop lent : Parade's End est en fait une fiction inconstante, qui a ses fulgurances, mais manque d'homogénéité et de cohésion.

paradesendg.jpg

Si elle peut être critiquée sur le fond, Parade's End est en revanche une belle réussite visuelle. La réalisation est particulièrement soignée, avec une photographie travaillée qui sublime un certain nombre de larges plans nous plongeant dans la campagne aristocratique anglaise. Cette esthétique que l'on pourrait qualifier de cinématographique confère ainsi une assise bienvenue au récit de la mini-série, même si elle ne permet pas d'occulter les problèmes liés à la construction de la narration. D'ailleurs, ce period drama donne parfois presque l'impression de privilégier une superbe reconstitution et les effets de caméra au détriment du soin à apporter au fond. Au moins les yeux du téléspectateur ne s'en plaignent-ils pas.

Enfin, le casting de Parade's End souffre également d'un manque d'homogénéité qui pèse sur la crédibilité du triangle amoureux mis en scène. Au cours de ces 5 épisodes, la lumière sera venue de l'interprétation de Rebecca Hall, magnifique dans un personnage de Sylvia qui reste impossible à clairement cerner. Ennuyée des convenances, provocatrice, amoureuse, elle apporte à ses scènes une vitalité qui tranche agréablement avec la plate froideur qui domine le reste du récit. Face à elle, Benedict Cumberbatch (Sherlock) fait un travail très correct dans un registre qui lui est familier, et dans un rôle qui convient à son jeu. Malheureusement Adelaide Clemens peine, elle, à offrir un contre-poids à ces deux fortes présences. Le script ne lui donne peut-être aussi pas suffisamment de matière. A leurs côtés, on retrouve notamment Rupert Everett, Stephen Graham, Miranda Richardson, Anne-Marie Duff, Roger Allam, Janet McTeer, Freddie Fox, Jack Huston ou encore Tom Mison.

paradesendi.jpg

Bilan : Magnifique visuellement, inaboutie sur le fond tout en s'offrant quelques fulgurances et scènes marquantes, Parade's End est une oeuvre froide et distante qui laisse une impression d'inachevée. Elle s'apprécie sur la forme, mais frustre sur le fond (qui semble parfois être un prétexte pour permettre une telle mise en scène). Son histoire avait un potentiel certain, mais elle n'aura pas su l'exploiter de manière cohérente et convaincante. C'est une mini-série qui se laisse suivre mais dans laquelle le téléspectateur peine à s'investir. Apparaissant décevante par rapport aux ambitions affichées et aux moyens mis en oeuvre, elle est à réserver aux amateurs de period drama, et à ceux que son approche un peu glacée ne décontenancera pas.


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la mini-série :


21/01/2012

(Mini-série UK) The Mystery of Edwin Drood : un period drama sombre et troublant

themysteryofedwindroodg.jpg

Il y a deux siècles naissait Charles Dickens. Pour cet anniversaire, il est donc logique de voir fleurir sur le petit écran des adaptations d'oeuvres du célèbre écrivain anglais. Après une revisitation de Great Expectations (Les Grandes Espérances) sur BBC1 durant la dernièrie semaine de décembre, en ce début de mois de janvier, c'était au tour de BBC2 de proposer sa contribution, avec une transposition à l'écran du dernier livre, laissé inachevé par l'auteur, The Mystery of Edwin Drood.

Comportant deux parties d'une heure environ, cette mini-série a été diffusée sur BBC2 les 10 et 11 janvier dernier. Scénarisée jusqu'à sa fin par Gwyneth Hughes, et avec une réalisation de Diarmuid Lawrence, elle rassemblait également un casting qui méritait le détour (Matthew Rhys, Rory Kinnear, Alun Armstrong...). Au croisement du period drama et du thriller, elle s'est révélée au final intéressante à suivre.

themysteryofedwindroodi.jpg

John Jasper dirige les choeurs de la cathédrale de Cloisterham. Derrière une apparence lisse et respectable, se cache un homme bien plus tourmenté qui apaise son mal être dans l'opium. Il est le gardien légal de son jeune neveu, qui arrive à l'âge adulte, Edwin Drood. Si ce dernier voit en lui une figure paternelle en qui il peut avoir toute confiance, Jasper nourrit dans le même temps de très forts sentiments pour Rosa Bud, qui est promise à Edwin.

Cependant les deux fiancés se querellent régulièrement lors des visites d'Edwin, Rosa doutant de la nature de ses sentiments. Mais elle craint encore plus les attentions de Jasper qui lui donne des leçons de chants. L'arrivée en ville, en provenance des colonies, de Neville et Helena Landless, deux jumeaux orphelins au caractère trempé et qui n'hésitent pas à exprimer leurs vues et à bousculer certains conventions sociales, va exacerber les tensions et les passions autour de la belle Rosa.

themysteryofedwindroodl.jpg

The Mystery of Edwin Drood va pleinement tirer parti de la dimension très sombre de son histoire pour se construire une atmosphère intrigante qui retient l'attention. Dans le registre du period drama, elle propose une reconstitution historique qui repose entièrement sur ses personnages. Ces derniers représentent, chacun à leur manière, des valeurs ou des préjugés de cette Angleterre du XIXe siècle, permettant de traiter des thématiques diverses, sociales mais aussi raciales, en proposant toute une palette de points de vue. Si la mini-série se contente de survoler, parfois de manière un peu frustrante car trop superficielle, cet intéressant potentiel, cela lui permet cependant d'humaniser son récit, et d'impliquer le téléspectateur dans la destinée de chacun de ces protagonistes.

De plus, The Mystery of Edwin Drood captive aussi par le parfum inquiétant qui en émane. Efficacement construite en deux parties, la première étant celle de l'exposition, la seconde celle du mystère à résoudre, l'oeuvre emprunte au thriller ses ingrédients les plus traditionnels. Si c'est la disparition d'Edwin qui précipite les évènements, la figure centrale demeurera toujours celle de Jasper. C'est à travers lui que le récit se trouble, empruntant des chemins maladifs et malsains. Entre la mise en scène d'hallucinations suscitées par la drogue et les non-dits d'une obsession amoureuse frustrée, le téléspectateur peine à dissocier le fantasme de la réalité. C'est à l'évidence le but recherché de ce récit qui ne se concentre pas tant sur le suspense d'un éventuel coupable à trouver, que sur la résolution de cette énigme tourmentée incarnée par Jasper. Si la résolution ne tiendra pas toutes les promesses esquissées, elle reste cependant une fin logique et justifiée.

themysteryofedwindroode.jpg

La tonalité quelque peu oppressante que sait très bien entretenir The Mystery of Edwin Drood se retrouve également dans l'esthétique de la mini-série. Si sa réalisation fait d'elle un period drama soigné mais classique, c'est dans sa photographie, à dominante sombre, et dans l'ambiance globale qui se dégage de ses plans que se situe sa valeur ajoutée. Elle aime ainsi jouer avec l'esprit du téléspectateur lorsqu'elle nous fait glisser - parfois de manière un peu confuse - dans les troubles de Jasper, ou lorsqu'elle nous entraîne dans les coins obscurs des cimetières... Dans l'ensemble, c'est une immersion efficace qui est proposée dans l'Angleterre du XIXe siècle.

Enfin, le dernier atout de choix de The Mystery of Edwin Drood réside incontestablement dans l'excellent casting qu'elle rassemble. Matthew Rhys (je vous avoue qu'avec Brothers & Sisters, j'en avais oublié que l'acteur était gallois) délivre une prestation torturée et ambivalente qui capture bien les tourments intérieurs de Jasper, et son obsession pour Rosa. Tamzin Merchant (The Tudors) et Freddie Fox (The Shadow Line) versent dans une luminosité qui offre un parfait contraste par rapport à l'obscurité de Jasper. A leurs côtés, des valeurs sûres du petit écran britannique, comme Alun Armstrong (Garrow's Law) ou encore Rory Kinnear (Five Days, Black Mirror) assurent de solides seconds rôles ; et Sacha Dhawan (Five Days, The Deep, Outsourced) et Amber Rose Revah (Borgia) complètent cette galerie de personnages au coeur du mystère de la disparition d'Edwin.

themysteryofedwindroodc.jpg

Bilan : Period drama qui marque le téléspectateur par sa dimension très sombre, aussi bien dans les thématiques abordées (drogue, obsession) que dans l'histoire mise en scène, The Mystery of Edwin Drood est une fiction historique typiquement Dickensienne qui emprunte également au thriller. Sa galerie de personnages humanise et contrebalance la noirceur d'un récit qui s'égare parfois un peu dans les tourments de sa figure principale. L'ensemble demeure intéressant et mérite ces deux petites heures d'investissement.


NOTE : 7/10

19/06/2011

(Mini-série UK) The Shadow Line : un thriller à part sous haute tension

theshadowlined.jpg

Si les "thrillers" ne manquent pas dans notre petit écran, il y en a peu qui peuvent se vanter de véritablement atteindre leur but en marquant le téléspectateur. C'est d'autant plus agréable lorsque vous tombez sur une période où les thrillers réussis s'enchaînent comme c'est le cas ces derniers temps dans mes programmes. Non seulement White Christmas aura provoqué chez moi une quasi-nuit blanche pour cause de taux d'adrénaline incapable de redescendre et d'esprit tourneboulé, mais de plus, ces dernières semaines, était diffusée outre-Manche une série qui aura mis mes nerfs à rude épreuve. : The Shadow Line.

Programmée en Angleterre, sur BBC2, du 5 mai au 16 juin 2011, cette mini-série compte un total de sept épisodes d'une heure chacun. Bénéficiant d'un solide casting (de Stephen Rea à Christopher Eccleston) et d'une esthétique à part, The Shadow Line est un thriller admirablement mis en scène, qui parvient à une tension d'une intensité aussi rare qu'éprouvante. Une fiction vraiment intéressante à plus d'un titre qui mérite sans aucun doute le détour.

theshadowlineq.jpg

L'histoire de The Shadow Line s'ouvre sur la découverte d'une scène de crime. Harvey Wratten, dirigeant d'une des organisations de trafic de drogue les plus puissantes d'Angleterre, venait d'être relâché de prison à la suite d'un pardon royal accordé de manière très surprenante. Mais c'est son cadavre que la police découvre quelques heures après sa libération, abandonné dans une voiture qui semble avoir été le cadre d'une froide et brutale exécution. La liste de ceux qui pouvaient en vouloir ou avoir intérêt à voir mort ce chef de cartel est particulièrement longue, et c'est l'enquête de ce meurtre qui va servir de fil rouge à la mini-série.

Car de part et d'autre de cette frontière parfois si trouble de la légalité et de la morale, qualifiée si justement de shadow line, chacun s'active suite à ce décès. Du côté de la police, l'enquête est confiée au DI Jonah Gabriel, lequel se remet tout juste d'une fusillade dans laquelle son partenaire a été tué, tandis que la balle meurtrière est venue se ficher dans sa boîte crânienne. Conséquence de cela, il souffre d'une amnésie partielle, n'ayant pas de souvenirs des événements de la soirée fatidique, faisant face à une crise identitaire qui sape ses certitudes.

Parallèlement, l'organisation de Wratten doit également se remettre du brusque décès de sa tête pensante. C'est à un homme de l'ombre, Joseph Bede, qu'échouent les responsabilités immédiates pour poursuivre les affaires d'importation de drogue, alors même que le comptable de l'organisation, Glickman, demeure mystérieusement injoignable. Tandis que le neveu de Wratten, Jay, difficilement contrôlable, se charge de mener de son côté une enquête personnelle pour découvrir qui a abattu son oncle, un autre homme remonte les différentes pistes dans l'ombre, un mystérieux Gatehouse. 

theshadowlineg.jpg

Loin d'être une simple fiction d'enquête policière, The Shadow Line s'impose dans le registre du thriller avec une maîtrise et une efficacité à souligner. Suivant le fil rouge du meurtre de Harvey Wratten, initialement débutée comme une course contre-la-montre entre les différents camps pour découvrir ce qu'il s'est passé la nuit du crime, c'est une autre partie d'échecs autrement plus complexe qui se dévoile progressivement à travers les enjeux d'une réalité pleine de faux-semblants, où la frontière de la légalité et de la morale apparaît des plus troubles. Ce toutélié aussi intrigant que captivant, se construisant au gré des twists multiples, trahisons brutales et retournements de situation inattendus, va admirablement nourrir la paranoïa d'un téléspectateur dont les repères se brouillent peu à peu.

Parmi les protagonistes, ils sont d'ailleurs notablement peu nombreux à comprendre les réels tenants et aboutissants vers lesquels tend la mort de Wratten. Cela contribue à déstabiliser un téléspectateur complètement happé par des questions qui se bousculent. De plus, si la froideur ambiante, mais aussi la violence extrême de l'univers mis en scène, finissent par provoquer une relative dessensibilisation à mesure que les cadavres s'accumulent, la mini-série n'en néglige pas pour autant le développement d'une dimension plus personnelle aux destinées des personnages principaux, trouvant le juste équilibre entre les différents types d'intrigues.

theshadowlinef.jpg


Cependant, la vraie et grande réussite de The Shadow Line va résider dans sa capacité à générer une tension éprouvante, quasi-constante, qui atteint parfois des sommets. Si les nerfs du téléspectateur sont à fleur de peau, ce dernier n'en jubile pas moins par moment, grisé par le brusque rush d'adrénaline que certains passages provoquent. Car cette mini-série fait non seulement preuve d'une maîtrise narrative parfaitement millimétrée des scènes les plus tendues, mais elle sait aussi admirablement jouer de la lenteur calculée de son rythme. Théâtralisant des confrontations qui parviennent à des sommets de tensions, le suggestif se révèle bientôt aussi éprouvant que les brèves, mais complètement décomplexées, explosions de violence.

Capitalisant sur cette atmosphère à part, The Shadow Line finit sans doute par se laisser quelque peu emporter par la fascination que suscite l'intensité du tableau si glaçant qu'elle met en scène. L'histoire qui se cache derrière laissera un petit arrière-goût d'inachevé, les réponses ne satisfaisant pas pleinement. Cependant sa conclusion s'inscrit parfaitement dans la tonalité de la mini-série, nous laissant un peu groggi dans le bon sens du terme. The Shadow Line est essai de style ambitieux et prenant, certes pas exempt de certains reproches, mais l'investissement est assurément mérité. Le téléspectateur se laissera conquérir sans arrière-pensée.  

theshadowlinep.jpg

Si la tension constamment palpable que The Shadow Line instaure fonctionne si bien, c'est aussi en raison du soin avec lequel la forme est traitée, encourageant justement cette ambiance à la nervosité communicative. En effet, The Shadow Line dispose d'une réalisation très travaillée, flirtant parfois avec une forme quasi-théâtrale, où la lenteur et le soin accordé aux détails se conjuguent à une image extrêmement épurée qui privilégie l'essentiel. La mini-série bénéficie en plus d'une belle photographie, dotée de teintes qui lui permettent de se construire un visuel clairement identifiable, dont l'esthétique n'est pas sans rappeler les thrillers des 70s'. Une sobriété similaire se retrouve dans sa bande-son, quasiment absente, mais où le téléspectateur retiend la musique du générique qui colle parfaitement à l'ambiance générale (il s'agit de la chanson 'Pause', par Emily Barker and The Red Clay Halo).

Enfin, The Shadow Line bénéficie d'un excellent casting. Le côté théâtral que renvoie l'ensemble n'amoindrit pas du tout des performances globalement très convaincantes. Parmi ceux qui ressortent le plus, c'est sans doute Stephen Rea (Father & Son) qui m'a marqué, incarnant un personnage glaçant doté d'un sang-froid flegmatique qui l'impose comme le personnage le plus craint de la série. Même si par moment, Rafe Spall (Desperate Romantics) n'est loin de lui voler ce dernier titre, une scène de l'épisode 2 m'ayant particulièrement traumatisée. Chiwetel Ejiofor (Trust) joue avec sobriété ce policier troublé qui a perdu ses repères avec une partie de sa mémoire et qui essaie tant bien que mal de démêler les fils inextricables du cas qu'il doit résoudre. Tandis que de l'autre côté de la ligne, Christopher Eccleston (Our Friends in the North, Doctor Who) renvoie avec beaucoup de justesse le portrait d'un criminel ordinaire, qui voit ses vies personnelle et professionnelle lui échapper. A leurs côtés, on retrouve notamment l'excellent Richard Lintern que j'ai adoré en supérieur de Gabriel, Tobias Menzies (Rome) pour lequel j'ai toujours un faible dans ce genre de rôle, Kierston Wareing (Five Daughters, The Runaway), Eve Best, Lesley Sharp, Sean Gilder ou encore Freddie Fox.

theshadowlinec.jpg

Bilan : D'une efficacité souvent éprouvante, The Shadow Line est un brillant thriller à la lenteur parfaitement calculée, où la tension est mise au service d'une réelle ambition narrative. Dotée d'une histoire excessivement complexe, elle captive l'intérêt jamais pris en défaut d'un téléspectateur qui finit par se laisser gagner par la paranoïa ambiante. Si la mini-série se laissera un peu débordée par cette atmosphère si identifiable et vraiment à part qu'elle a créée, sa demeuure amoindrissant sa portée vers la fin, elle reste une expérience indéniablement marquante, à l'occasion jubilatoire, qui renoue avec la tradition la plus épurée du thriller à suspense.

The Shadow Line saura mettre vos nerfs à rude épreuve avec une intensité qu'il est rare d'atteindre : à découvrir ! 


NOTE : 8,75/10


Le générique :