21/12/2014
[Blog] A (Very British) Christmas Sériephile
My Télé is rich! s'accorde quelques jours de repos pour les fêtes. Cela ne signifie pas que cette fin d'année ne sera pas sériephile, avec au menu, comme toujours, quelques mets télévisuels britanniques qui promettent de riches (et longues) soirées de fêtes devant son petit écran.
En guise de hors-d’œuvre, signalons que ITV a proposé un réjouissant Downton Abbey for Santa, parodie réalisée dans le cadre d'une opération caritative qui vient détourner quelques-unes des ficelles les plus classiques de la série et dans laquelle on retrouve plusieurs invités de marque, au rang desquels George Clooney. De quoi aiguiser l'appétit du téléspectateur avant l'épisode spécial diffusé pour Noël.
Du côté de la BBC, outre les épisodes de Noël traditionnels de Doctor Who, ou encore de Call the Midwife, le cœur du sériephile se serrera tout particulièrement pour les deux derniers épisodes de Miranda, qui viendront saluer Noël et le Nouvel An.
Enfin, dans un tout autre genre, il faut aussi parler de Channel 4 qui a anticipé Noël cette semaine en diffusant un épisode spécial de Black Mirror, "White Christmas", qui devrait donner aux festivités du petit écran un autre parfum. On dira que c'est idéal pour commencer les fêtes :
À noter que cette période de fin d'année sera aussi l'occasion de divers retours, de The Wrong Mans (saison 2) à Last Tango in Halifax (saison 3). La quinzaine à venir s'annonce donc, comme à chaque fois, très chargée en Angleterre. Ce ne sont pas les sériephiles qui s'en plaindront !
Je vous souhaite donc de joyeuses fêtes, qu'elles soient gourmandes et sériephiles à souhait. Quant au blog, le prochain billet devrait permettre d'ouvrir l'année 2015. À très vite.
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14/12/2014
(Mini-série UK) The Lost Honour of Christopher Jefferies : préjugés et déchaînement médiatique
Construire une œuvre évoluant sur la fine ligne entre fait réel et dramatisation est une des spécialités de Peter Morgan. De sa trilogie sur la carrière politique de Tony Blair (The Deal, The Queen et The Special Relationship) à la pièce de théâtre Frost/Nixon (qui fut ensuite portée sur grand écran), le scénariste anglais a toujours montré un intérêt pour cet exercice de scénarisation particulier. Sa dernière mini-série, The Lost Honour of Christopher Jefferies, le confirme une nouvelle fois. Comptant deux parties, d'un peu plus d'une heure chacune, elle a été diffusée cette semaine en Angleterre, les 10 et 11 décembre 2014, sur la chaîne ITV1.
Cette mini-série replonge le téléspectateur dans l'emballement médiatique qui suivit la disparition, puis la découverte du corps sans vie d'une jeune femme, près de Bristol, durant les fêtes de fin d'année 2010. L'affaire secoua le Royaume-Uni. L'attention de la police se porta d'abord sur le propriétaire de l'appartement dans lequel vivait la victime. Après son arrestation pour être interrogé, les médias et autres tabloïds se déchaînèrent contre cet homme à l'allure un peu excentrique - un aspect qui faisait de lui un coupable tout désigné. Les portraits à charge, recélant d'anecdotes gonflées, voire inventées, se succédèrent dans la presse. Lorsque, quelques jours plus tard, Christopher Jefferies fut libéré faute d'éléments probants, sa vie avait été irrémédiablement bouleversée. Ni l'arrestation, puis la condamnation du véritable meurtrier, plusieurs semaines après, ne contrebalancèrent les torts causés.
Peter Morgan relate cette histoire en plaçant le téléspectateur aux côtés de Christopher Jefferies (interprété par un magistral Jason Watkins). La première partie décrit comment la vie ordinaire d'une personne sans histoire peut basculer en un instant, sans autre raison que quelques jugements expéditifs basés sur des ressentis et sur le fait qu'elle ne rentrait pas exactement dans les cases que la société aime attribuer à chacun. En dressant le portrait précis de Christopher Jefferies et des aspects -dans sa gestuelle ou son élocution- qui ont à l'époque interpellé enquêteurs et médias, c'est en fait le public que la mini-série place face à ses propres préjugés. Elle pointe la propension qu'a chacun de juger défavorablement sur une image renvoyée qui sort des canons attendus, de mettre à l'index celui qui n'entre pas dans les codes... Cette intolérance se croise au quotidien, mais elle est décuplée dans le cadre d'une enquête criminelle. Le récit décrit ainsi comment d'"étrange", une personne devient "suspecte", même sans autre élément tangible corroborant la suspicion. Tout se déroule comme si la défiance face à cet autre - dont les gestes, la manière de s'exprimer, les remarques, le placent "à part" - empêchait toute prise de distance et paralysait la réflexion. Happant le téléspectateur, l'écriture le conduit à s'interroger sur lui-même et sur ses réactions : celles qu'il a pu avoir il y a quatre ans (pour ceux qui ont suivi l'affaire), mais aussi, de manière plus hypothétique, sur la façon dont il réagirait face à une situation similaire. C'est avec finesse et -surtout- une sobriété à saluer que la mini-série encourage ainsi une remise en cause personnelle.
En outre, par-delà les questionnements sur les préjugés de chacun, l'autre grande problématique soulevée est celle du rôle joué par la presse. Les médias ont effet été une terrible caisse de résonance, amplifiant et décuplant hors de toute proportion cette défiance instinctive qu'avait éveillé chez beaucoup de personnes leur première rencontre avec Christopher Jefferies, qu'il s'agisse, pour les policiers, de leur premier entretien, ou bien, pour le public, de la première apparition du propriétaire face aux caméras de télévision qui campaient devant sa porte. Le déchaînement médiatique qui suivit son arrestation apparaît comme un cas d'école inversé, dans lequel tous les principes déontologiques furent allègrement bafoués. C'est la seconde partie de la mini-série qui s'attarde plus spécifiquement sur ces excès, en relatant le procès en diffamation qu'intentera ultérieurement Christopher Jefferies. Le récit rejoint ici une problématique plus large qui agite le Royaume-Uni ces dernières années, interrogeant les pratiques de sa presse, suite au scandale des écoutes téléphoniques impliquant notamment le journal News of the world. Après ces révélations, une commission d'enquête fut mise en place, la Leveson Inquiry, devant laquelle, d'ailleurs, Christopher Jefferies témoignera. Dans son dernier quart, la mini-série tente donc d'élargir son propos aux intrusions médiatiques plus générales dans la vie privée des individus - comme en témoigne le bref passage de Steve Coogan qui, jouant son propre rôle, échange quelques mots avec Christopher avant son passage devant la commission. The Lost Honour of Christopher Jefferies reste ici cependant sur la réserve. La complexité de ce débat sur l'usage de la liberté de la presse et de ses abus aurait nécessité de pouvoir y consacrer plus de temps ; or, ce n'était pas l'objectif premier de cette œuvre.
Portant à l'écran une affaire qui a marqué le Royaume-Uni, The Lost Honour of Christopher Jefferies traite habilement, avec une sobriété et une sensibilité appréciables, d'un sujet très fort, qui interpelle le téléspectateur à plus d'un titre. En faisant le récit d'une trajectoire personnelle qui bascule en quelques jours, la mini-série interroge chacun sur ses propres préjugés et sur sa propension à regarder avec défiance toute personne ne correspondant pas aux canons attendus. Elle éclaire également les dérives médiatiques de ce cas particulier, lesquelles rejoignent d'autres pratiques abusives constatées ou révélées ces dernières années. Sans avoir le temps de s'approprier ce débat initié sur l'usage de la liberté de la presse, The Lost Honour of Christopher Jefferies a le mérite d'encourager à la réflexion. Récit avant tout intime, mais aux ramifications importantes dans la sphère publique, il s'agit d'une œuvre dense, soignée sur le fond comme sur la forme. À découvrir.
NOTE : 7,75/10
Un extrait de la mini-série :
[Retrouvez ce billet dans la sélection hebdomadaire Séries Mania]
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07/12/2014
(US) Madam Secretary, saison 1 - 1ère partie : jeux de pouvoir et gestion de crises internationales à Washington
Les dernières semaines de novembre sont l'occasion pour moi de faire le bilan de la rentrée des grands networks américains. Après avoir beaucoup présélectionné et jeté un œil à une poignée de pilotes en septembre, sans le moindre coup de cœur, j'accorde une chance à une ou deux nouveautés pour un éventuel rattrapage de mi-saison coïncidant avec le hiatus hivernal. C'est pourquoi je peux donc désormais écrire que How to get away with murder a confirmé toute mon incompréhension face à une écriture de tous les excès, dont il est attendu de chanter les louanges actuellement, mais dans laquelle je ne me retrouve décidément pas. Cependant, c'est un cas plus ambigu -que je n'ai pas encore tranché définitivement- qui a retenu mon attention. Celui d'une autre nouveauté, diffusée sur CBS : Madam Secretary.
Pour qui The West Wing a constitué un déclic dans sa sériephilie de jeunesse, le retour à Washington est toujours empreint d'une certaine nostalgie, entremêlée d'espoirs et d'attentes souvent mal récompensés, à l'aune desquels sont invariablement évaluées toutes les nouvelles prétendantes. Arpenter les coulisses du pouvoir -de Scandal (deux saisons visionnées) à House of Cards US (vu 2 épisodes, puis j'ai préféré regarder à nouveau House of Cards UK), en passant par la toute récente State of Affairs (non testée)- exerce toujours un attrait, en dépit du passif représenté par Commander in Chief ou encore Political Animals. Face à tous ces précédents, au terme de ces onze premiers épisodes, où Madam Secretary se place-t-elle sur l'échelle des fictions politiques américaines du XXIe siècle ?
Madam Secretary, c'est l'histoire d'Une fille à scandales (Téa Leoni) qui se retrouve propulsée au poste de secrétaire d'État suite à la disparition de son prédécesseur dans un mystérieux accident d'avion. Proposant un mélange des genres au sein duquel l'équilibre n'est pas immédiat, la série esquisse un cocktail ambitieux, se plaçant au confluent du thriller diplomatique international (un récit de gestion de crises au quotidien), du drama familial (la nomination à une fonction aussi exposée troublant quelque peu l'harmonie familiale de la nouvelle secrétaire d'État) et de la fiction conspirationniste (que cache la mort de l'ambitieux homme d'État dont elle a pris la succession ?). Les débuts n'en sont pas moins poussifs, pas seulement parce que Bess McCord doit apprendre à faire face aux contraintes de son nouvel environnement professionnel et à l'hostilité relative d'un staff qu'elle n'a pas choisi.
Sur le plan politique, le format procedural sied assez mal aux crises internationales majeures qu'il convient de régler en 40 minutes, montre en main, et à la complexité inhérente aux jeux diplomatiques. De plus, il est difficile de rejouer Treize jours toutes les semaines en y insufflant la tension dramatique qui convient. À ces problèmes de crédibilité qui entachent l'efficacité des scénarios, s'ajoute un portrait des relations internationales, cédant à bien des caricatures et autres poncifs, qui peut légitimement agacer. Autant d'aspects sur lesquels une série comme Political Animals, par exemple, s'était irrémédiablement échouée. La force de Madam Secretary va être de parvenir à asseoir et à affiner ses atouts au fil des épisodes, avec une seconde moitié de première partie de saison qui laisse peu à peu entrevoir des choses de plus en plus intéressantes.
La série gagne tout d'abord en homogénéité, notamment en prenant le temps d'exploiter la galerie des personnages qui gravitent autour de Bess. Au sein de son staff, le sens de la répartie des uns et des autres fonctionne de mieux en mieux, y compris dans le registre de l'humour où les répliques et l'impeccable timing de Blake, l'assistant de Bess, font des merveilles. Cela permet de déjouer toute tentation de drama trop pompeux qui se prendrait excessivement au sérieux. Côté familial, la caractérisation reste inégale. Les scénaristes peinent à décider quel rôle attribuer au mari de Bess, entre le professeur observateur extérieur et l'espion réactivé qu'elle entraîne dans son enquête sur la mort de son prédécesseur. Conséquence immédiate, le personnage manque de constance. Mais le couple n'en a pas moins des passages qui sonnent justes, et un potentiel certain qui ne demande qu'à être exploité.
En outre, Madam Secretary acquiert aussi plus de consistance dans son versant diplomatique. À défaut d'histoires originales (avec des sources d'inspiration transparentes), quelques gestions de storylines se révèlent assez intéressantes. Surtout, la série apprend à déjouer certaines évidences, à nuancer un peu ses vues, et plus généralement à ne pas rentrer systématiquement dans une course à la surenchère permanente par crainte de laisser filer l'attention du téléspectateur. La gestion du fil rouge conspirationniste illustre assez bien ce dosage, qui semble se faire plus assuré dans les derniers épisodes. Tout en jouant pleinement la carte d'une méfiance de plus en plus accrue vis-à-vis de la Maison Blanche, l'écriture fait ainsi le choix de ne pas tirer à outrance sur la corde. Les cartes sont abattues rapidement. L'épisode 11 se conclut sur une redistribution qui, en dépassant la piste d'un simple complot interne, ouvre des perspectives. En posant de nouvelles problématiques, la série complexifie d'autant la partie en cours et aiguise donc la curiosité pour la suite.
Transposer dans le petit écran une gestion au quotidien de crises diplomatiques, souvent complexes et qui mériteraient un traitement très nuancé, n'est certainement pas une tâche facile - d'aucuns la qualifieraient d'impossible. Sans surprise, Madam Secretary se heurte à un certain nombre d'écueils propres à cette ambition. Pour autant, en onze épisodes, la série montre une progression dans le bon sens au sein des différents registres qu'elle essaie d'investir. Les dynamiques relationnelles restent certainement l'atout le plus accessible, à préserver et à continuer d'affiner. Quant au versant politique, sans doute le plus fragile, l'écriture se montre capable d'éviter la course à la surenchère et s'offre même quelques fulgurances qui réveillent par instant le fantôme des grandes heures de la fiction politique à la télévision américaine.
Cette première partie de saison est donc inégale, mais laisse cependant entrevoir des choses intéressantes. La série parviendra-t-elle à faire mûrir et à exploiter ce potentiel entraperçu, ou retombera-t-elle dans certains travers dont il est difficile de s'affranchir ? Le reste de la saison nous le dira. Mais, pour l'instant, je compte poursuivre le visionnage malgré ces réserves. Et pour une sériephile aussi peu américano-centrée que moi, c'est déjà à saluer. À suivre.
NOTE : 6,25/10
Une bande-annonce de la série :
19:59 Publié dans (Séries américaines) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cbs, madam secretary, téa leoni, tim daly, patina miller, geoffrey arend, erich bergen, katherine herzer, evan roe, wallis currie-wood, zejiko ivanek, bebe neuwirth | Facebook |