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23/11/2014

(NOR) Dag, saison 1 : un conseiller conjugal atypique pour une comédie acerbe

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"Listen. I don't despise you, or find you to be loathsome specimens. This isn't personal to me in any way. But I've heard everything you say from a hundred other couples. So please allow me to repeat : compatible personalities do not exist. When living together for an extended period, you end up repressing the other person's personality. Do yourself a favour : get divorced. End this misery. It'll be a mercy killing." (Dag, S01E01)


Imaginez un conseiller conjugal dont la philosophie de vie repose sur l'idée que chacun devrait vivre en solitaire. Cette certitude, Dag n'hésite pas à la partager avec les clients les plus divers qui osent pousser la porte de son cabinet. En guise de consultation, son écoute se conclut invariablement par un laïus déconstruisant minutieusement la notion de couple et, plus généralement, le soi-disant besoin de socialiser présenté comme inhérent à l'être humain. Ses thérapies ont donc l'avantage d'être courtes... et le taux de divorce, vertigineux, y défie toutes les statistiques.

Ce synopsis constitue le point de départ de Dag, une comédie norvégienne qui a rencontré un joli succès aussi bien critique que public dans son pays. Elle compte à ce jour trois saisons diffusées entre 2010 et 2013 sur la chaîne TV2. Après l'expérience concluante qu'avait été le visionnage de l'inclassable -et jubilatoire- Hellfjord l'an dernier, j'étais très curieuse de poursuivre l'exploration du petit écran norvégien, ainsi que la découverte de cet humour typiquement scandinave que l'on peut y croiser. Dag était la série parfaite pour cela. C'est en une petite semaine que j'ai terminé les 10 épisodes de la première saison - d'une durée d'environ 25 minutes chacun. En attendant la suite, aujourd'hui, poussons ensemble la porte du cabinet de ce thérapeute atypique.

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Dag est une comédie noire, à l'humour caustique, parfois féroce, souvent absurde. Centrée sur son personnage principal, la série fonctionne cependant comme un ensemble au sein duquel les figures secondaires contribuent tout autant à la tonalité corrosive ambiante. Tandis que Dag a toute latitude pour développer amplement ses théories sur l'asociabilité de l'être humain et l'incompatibilité naturelle entre deux individus auxquelles se heurte fatalement tout projet de vie commune, les autres protagonistes ne sont pas en reste. Chaque épisode est ainsi le témoin des derniers désastreux choix relationnels de Benedict, le -seul- ami de Dag, qui démarre la saison en abandonnant sa compagne, sur le point d'accoucher, à la maternité, se retrouvant poursuivi par les parents bouchers serbes de celle-ci pendant une bonne partie des épisodes. Au cabinet, les remarques de Malin, secrétaire intrusive pour qui la confidentialité est une notion inconnue, et les brèves sessions avec des clients, réguliers ou nouveaux venus, toujours hauts en couleurs, parachèvent de poser l'ambiance. La série se construit par petites touches souvent mordantes et sombres sur la nature humaine en général et les relations portées à l'écran en particulier. Agrémentée de tirades désillusionnées qui font mouche, elle cultive une tonalité résolument corrosive, rafraîchissante à sa manière dans cette façon atypique et décalée d'aborder ces grands thèmes classiques que sont la vie, la mort, la solitude... et l'amour.

Pour autant, derrière ces apparences aussi désenchantées qu'acérées, la série n'en est pas moins pourvue d'une certaine sensibilité. Car, au fil de la saison, le portrait de Dag se nuance à mesure qu'il se précise. Si le conseiller conjugal tient farouchement à son indépendance, faisant tout pour que rien ne puisse ni l'atteindre, ni le toucher (en témoigne le véritable sas qu'il s'est aménagé dans son appartement entre l'extérieur et les pièces dans lesquelles il vit), des informations sur son passé et sur sa famille, dévoilées progressivement, viennent nous donner une meilleure compréhension du personnage. Mieux encore, sa carapace se fissure face à l'obstination de sa sœur, puis d'Eva rencontrée justement par son intermédiaire. En effet, Eva s'immisce dans la vie minutieusement réglée de Dag, perturbant son quotidien et faisant dérailler quelques-uns de ses principes cardinaux, sans qu'il puisse vraiment refuser quoique ce soit à cette jeune femme qui brouille les défenses qu'il a érigées autour de lui. La mort de son père vient aussi le questionner. En filigrane, une interrogation se dessine : cela vaut-il la peine de tenter de s'ouvrir au monde, ou du moins à quelqu'un d'autre ? Sa philosophie de vie solitaire, aussi rationalisée qu'elle paraisse, ne dissimule-t-elle pas surtout la peur du rejet, de l'échec, de l'aléa tout simplement inhérent à toute relation ? Construire quelque chose à deux, c'est accepter de prendre un risque. De donner et de recevoir. Dag en est-il capable ? Sans rien brusquer, cette saison 1 est ainsi une histoire d'évolutions, sans que nul ne sache vraiment où elles conduisent...

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Dotée d'un humour acerbe et mordant, Dag est une comédie noire chargée de désillusions sur la nature humaine, qui excelle dans un registre à la fois provocateur et absurde. Sa tonalité à part repose en partie sur les épaules de sa figure centrale, conseiller conjugal atypique à la philosophie de vie solitaire revendiquée, mais aussi sur une galerie de personnages secondaires qui contribuent pleinement au décalage ambiant. Souvent féroce, délicieusement corrosive, mais non dépourvue d'une humanité qui pointe derrière son désenchantement, Dag est une série qui peut faire office d'introduction parfaite dans le registre comique venu du Nord. Avis aux amateurs (et aux sériephiles curieux) !


NOTE : 7,5/10


Pour conclure, laissons le mot de la fin à Malin, la secrétaire de Dag, qui explique les raisons qui l'ont conduite à choisir son métier :

"I love human disappointment. Or, not disappointment, exactly. But suffering. People who obliterate their sense of dignity. People banging their head against the wall, their heart on their sleeve... I just love it. It's just my cup of tea." (S01E03)


Les premières minutes du pilote (sous-titrées en anglais) :


[Retrouvez ce billet dans la sélection hebdomadaire Séries Mania]

02/11/2014

(ITA) Gomorra, saison 1 : luttes de pouvoir dans l'empire de la Camorra

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Pour qui s'intéresse aux fictions de gangsters, la télévision italienne est un petit écran à surveiller. Depuis La Piovra dans les années 80 jusqu'à des biopics historiques récents comme Il Capo dei Capi (Corleone en VF) retraçant, à travers le parcours de Salvatore Rinaa, un demi-siècle de mafia sicilienne, les séries, mini-séries ou téléfilms ne manquent pas, qu'il s'agisse de porter à l'écran des faits réels ou des versions romancées de ces organisations criminelles. Et dans ce genre, c'est tout particulièrement le bouquet payant Sky Italia qui s'est fait remarquer ces dernières années avec l'adaptation du livre de Giancarlo De Cataldo, Romanzo Criminale : comptant deux saisons, et diffusée de 2008 à 2010, elle est certainement l'une des meilleures séries italiennes de ces dernières années.

Sky Atlantic a récidivé cette année avec Gomorra. Le livre de Roberto Saviano, publié en 2006, avait déjà connu une adaptation cinématographique (comme Romanzo Criminale), saluée à Cannes en 2008. C'est cette fois à destination du petit écran qu'est esquissé le portrait du système de criminalité organisée de la Camorra prospérant à Naples. Le parallèle avec Romanzo Criminale ne s'arrête pas là puisque, derrière la caméra, à côté de Francesca Comencini et de Claudio Cupellini, on retrouve Stefano Sollima, qui avait déjà œuvré sur la première. Comprenant 12 épisodes, Gomorra a été diffusée en Italie du 6 mai au 10 juin 2014. Une seconde saison a d'ores et déjà été commandée. En France, après une avant-première au Festival Séries Mania en avril dernier, elle sera proposée par Canal +, puis par Arte. Et pour les plus impatients, notez que la série vient de se terminer en Angleterre, où elle est désormais disponible en DVD (avec sous-titres anglais).

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L’œuvre de Roberto Saviano se voulait une immersion complète et rigoureuse dans l'empire de la Camorra. En plongeant le téléspectateur dans un quotidien marqué par les rivalités de clans et des tensions permanentes, la série reprend à son compte l'ambition de dresser un portrait sonnant le plus authentique possible de ce système criminel. Pour ce faire, Gomorra met à profit son format long (12 épisodes) afin de prendre le temps d'explorer diverses facettes de l'organisation qu'elle dépeint. Par-delà le fil rouge central que constituent les turbulences traversées par le clan Savastano, la saison va être l'occasion de proposer des épisodes centrés sur différents thèmes, en s'intéressant également à des acteurs se situant à la périphérie du système. Elle évoquera ainsi le blanchiment d'argent organisé par certains financiers, le contrôle mafieux sur la démocratie locale pour faire main basse sur les projets immobiliers, ou encore le rayonnement international de la Camorra, de ses liens avec l'Amérique du Sud jusqu'aux implantations espagnoles de certains clans. C'est donc une présentation de ce système criminel sous toutes ses facettes qui est recherchée.

Ce parti pris explique que l'histoire reste toujours relatée du point de vue mafieux. La série ne s'attarde pas sur les réactions des autorités, ni sur l'impact sur la population napolitaine des actes commis. Seul un passage en prison et quelques extraits de journaux télévisés laissent entrevoir un angle extérieur. En optant pour une immersion sans prise de distance, Gomorra fonctionne comme une fiction coup de poing, qui cherche à interpeller par le réalisme - parfois suffocant - avec lequel elle décrit l'univers de cette criminalité organisée. La série s'attache tout particulièrement à souligner la volatilité des rapports entre les membres de l'organisation. Elle éclaire la violence constante et mal contenue qui y règne, exacerbée par un sentiment d'impunité et une désensibilisation aux tueries glorifiée et même érigée en rite initiatique. Seule la quête d'une maximisation des profits semble capable de contrebalancer ces tendances et limiter les explosions, la guerre interne n'étant jamais une période propice aux affaires. Mais c'est un équilibre fragile, impossible... Car c'est bel et bien dans un engrenage sanglant que nous entraîne cette première saison.

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Tout en expliquant le fonctionnement du système criminel napolitain, Gomorra se réapproprie également des partitions narratives traditionnelles pour une fiction mafieuse. En effet, la série met en scène l'évolution des rapports de force au sein d'un des clans les plus puissants de Naples, le clan Savastano. C'est une lutte létale pour le pouvoir, en plusieurs actes, qui se joue. Ses protagonistes apparaîtront familiers à tout amateur de ce genre d'histoires : un patriarche sous pression policière dont le parcours touche à sa fin, une épouse au sens des affaires trop acéré, un fils héritier présomptif qui a encore tout à prouver, un lieutenant ambitieux qui n'entend pas être laissé de côté lors de la redistribution des responsabilités, ou encore un chef de clan rival avec qui les relations sont extrêmement tendues... Partant de là, Gomorra signe une histoire au classicisme assumé, parfaitement huilée et efficace. C'est un récit implacable de déchéances et d'ascensions au sein d'une organisation en quête d'un chef. Tout conduit à une confrontation finale, inévitable, dont le cadre -une école- témoigne combien la situation aura fini par échapper à tout contrôle et à toute retenue.

Gomorra est donc une série ambitieuse qui mêle deux agendas différents : d'une part, rester fidèle à l’œuvre de Roberto Saviano en ce sens qu'il s'agit d'exposer l'empire de la Camorra et son fonctionnement, d'autre part, s'adapter au format sériel en construisant une trame dramatique correspondant à une fiction. Or ces deux ambitions ne se recoupent pas forcément. Si bien qu'elles ne coïncident pas toujours à l'écran, et cela va nuire parfois un peu à l'homogénéité de la narration. Cependant la rapidité d'exécution de l'ensemble lui permet de ne jamais perdre le fil des enjeux. La recherche d'authenticité explique aussi la froideur globale du récit : il adopte une sobriété un peu distante qui s'inscrit dans la continuité des fictions de gangsters dites "réalistes", ne souhaitant pas donner la moindre prise à une vision romancée des actes commis à l'écran. Tout cela renforce l'aspect "exposé d'un système criminel", lequel est particulièrement mis en avant dans le premier épisode d'exposition. Cela peut dérouter un téléspectateur qui attendrait une priorité plus importante accordée au versant fiction. Mais il faut laisser à Gomorra le temps de s'installer et de trouver un équilibre narratif. En effet, les épisodes s'enchaînent par la suite avec une redoutable efficacité.

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Enfin, il faut noter que la forme joue également un rôle non négligeable dans la réussite de cette plongée au sein de l'empire de la Camorra. Outre une réalisation nerveuse à souhait, c'est surtout sa bande-son qui confère à la série un cachet particulier. Les chansons, notamment du rap napolitain, sont toujours choisies avec soin pour accompagner la tonalité d'une scène. Mieux encore, Gomorra bénéficie de toute une ambiance musicale instrumentale qui sait parfaitement souligner la montée des tensions, les confrontations et les explosions auxquelles le récit mène - le dernier tiers de la saison est particulièrement convaincant sur ce plan. Il y a un travail vraiment intéressant qui a été réalisé, donnant une dimension supplémentaire à l'histoire relatée, en faisant notamment ressortir un côté tragique.

Quant au casting, il est au diapason du ton donné par la fiction. Parmi les acteurs principaux, Marco D'Amore se signale notamment par une prestation assez intense et implacable dans le rôle de Ciro, lieutenant trop ambitieux pour le bien de son clan. Face à lui, Salvatore Esposito interprète Genny Savastano, l'héritier qui s'affirme progressivement au fil de la saison, suivant une trajectoire personnelle qui l'amène à s'émanciper de tous ceux qui souhaitent le contrôler. Fortunato Cerlino incarne le patriarche du clan Savastano, lequel suit un parcours inverse qui le conduit à être éclipsé de la scène. Maria Pia Calzone, à la fois épouse et mère, tire les ficelles du clan en s'impliquant dans un jeu de pouvoir bien dangereux. Enfin, Marco Palvetti incarne Salvatore Conte, chef d'un clan rival avec lequel les relations ne vont jamais vraiment s'apaiser.

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Cherchant à dresser un portrait authentique et complet de la mafia napolitaine, Gomorra propose une immersion dans les luttes qui agitent l'empire de la Camorra, aussi bien entre les différents clans concurrents qu'au sein même de la famille Savastano que l'on suit. Partagée entre la volonté de décrire le fonctionnement du système criminel mis en scène et la dramatisation des jeux de pouvoir sur lesquels repose la fiction, la série ne manque pas d'ambitions. Si elle ne réussit pas toujours à remplir de front ces deux objectifs, le premier desservant parfois le second en terme d'homogénéité de la narration, elle n'en délivre pas moins un récit efficace, de plus en plus prenant au fil des épisodes, la tension allant crescendo vers une confrontation annoncée.

Avis donc aux amateurs de séries de gangsters, aussi bien que de fictions italiennes. Une confirmation aussi que Sky Italia est décidément à surveiller. A suivre !

NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de la série :

03/05/2014

(BE) Cordon : crise sanitaire à Anvers

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Parmi les grands thèmes de la cinquième saison du Festival Séries Mania, représentatifs de certaines tendances du petit écran mondial, figuraient les fictions pandémiques. Hypocondriaques s'abstenir ! Aux côtés de l'américaine Helix, la Corée du Sud et la Belgique ont proposé chacune deux approches très différentes de ce sujet. Tandis que l'asiatique The End of the World se démarque par son refus de toute surenchère, soignant une authenticité savamment travaillée pour exposer la gestion de la crise, l'européenne Cordon happe le téléspectateur dans un engrenage épidémique où les solutions envisagées, ainsi que l'origine de l'épidémie, soulèvent d'importantes interrogations.

Les deux premiers épisodes de Cordon ont été projetés mardi dernier à Séries Mania. Cependant il faut signaler que sa diffusion s'achèvera très prochainement en Belgique : débutée le 10 mars 2014 sur VTM, elle se terminera en effet le 12 mai prochain, au terme de 10 épisodes de 50 minutes chacun. Créée par Carl Joos et réalisée par Tim Mielants, cette série flamande trouve son inspiration dans les diverses alertes sanitaires de ces dernières années et les critiques que leur gestion a pu soulever. Le coffret DVD qui sortira en Belgique à la fin du mois est a priori annoncé avec des sous-titres français et anglais, de quoi conforter une curiosité piquée par des débuts efficaces.

[La review qui suit a été rédigée après le visionnage des deux premiers épisodes.]

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Cordon débute de la plus classique des façons pour une fiction pandémique : à Anvers, le NIZA identifie un virus, d'origine inconnue, dont le taux de mortalité se révèle très élevé. Face au risque de propagation, le gouvernement est contraint de prendre dans la précipitation une décision drastique : est ordonné la mise en quarantaine, derrière un cordon sanitaire, du quartier dans lequel se trouve la source présumée de l'épidémie. La série fait alors vivre au téléspectateur la crise par l'intermédiaire de plusieurs protagonistes, situés de part et d'ordre de ce cordon. Comment chacun va-t-il être affecté par la situation ? Comment va-t-on s'organiser à l'intérieur et à l'extérieur de ce quartier ? En arrière-plan, la menace et le danger représentés par le virus se précisent...

Pour traiter son sujet, Cordon opte pour une approche chorale : dotée d'une narration éclatée, elle suit une dizaine de personnages, de tout âge et de toutes professions. Cela lui permet de multiplier les angles d'approche, en éclairant avant tout l'impact humain de la crise sanitaire en cours. La série cherche à créer une proximité avec le téléspectateur -les sphères dirigeantes du pays sont ainsi volontairement laissées de côté, seulement entraperçues pour annoncer les mesures de lutte prises. De même, le point de vue des scientifiques, certes incontournable, reste également secondaire. Le récit se concentre sur la population, au plus près de ceux qui vont subir l'épidémie et/ou devoir gérer les conséquences de la mise en quarantaine. Le ressort est familier : il s'agit de mettre en scène des êtres ordinaires, soudain confrontés à une situation extraordinaire, dont nul ne peut connaît l'issue. Si les personnages manquent un peu d'épaisseur, chacun étant pour l'instant cantonné dans son rôle, ils paraissent bel et bien représentatifs de cette population diversifiée frappée par la quarantaine et les dilemmes qu'elle pose. Glissant progressivement vers la crise, parcourue par une tension sourde, Cordon happe ainsi le téléspectateur.

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Mais Cordon, ce n'est pas juste un thriller pandémique. Son atout tient à la richesse des thèmes abordés : ils soulèvent des enjeux scientifiques, policiers, mais aussi moraux, sociaux ou encore politiques. A défaut d'être original, le traitement d'ensemble est efficace, la série s'appropriant avec aplomb son concept. L'image de ce bloc d'immeubles, enfermé derrière des barrières improvisées de containers et autour duquel sont déployées des forces de l'ordre, marque. Ses occupants sont-ils d'ores et déjà condamnés ? Comment la situation va-t-elle évoluer dans un lieu désormais isolé, déserté par des autorités massées en dehors du périmètre ? Quels arbitrages entre intérêts individuel et collectif attendent chacun ? Les deux premiers épisodes montrent une série souhaitant aborder toutes les facettes de la crise : qu'il s'agisse d'évoquer la réaction de la population, ou de s'interroger sur l'origine du virus, voire sur les mesures prises par les autorités (jusqu'où ira-t-on pour maintenir la quarantaine ?). Cela donne un ensemble foisonnant, certes pas toujours complètement fluide, ni maîtrisé, et pas exempt non plus de certaines maladresses, mais qui reste prenant et -surtout- donne envie de s'investir.

Formellement, la série se révèle également solide. L'esthétique est soignée, la réalisation laisse transparaître dans la nervosité de la caméra une tension propre au thriller. Un important travail sonore a également été réalisé, avec une ambiance travaillée qui favorise l'immersion du téléspectateur. Enfin, Cordon rassemble un casting large et homogène, au sein duquel on retrouve notamment Wouter Hendrickx (Zuidflank), Liesa Van der Aa (Zingaburia), Tom Dewispelaere (Van Vlees en Bloed), Veerle Baetens (Code 37), Mieke De Groote (Van Vlees en Bloed, Code 37), Johan van Assche (Het goddelijke monster), Koen De Sutter (Zuidflank), Zoë Thielemans, Ricko Otto, Hugo Van Den Berghe (Flikken), Robbie Cleiren (Clan, Deadline 14/10, Marsman), Sven De Ridder (Deadline 14/10, Met Man en Macht), Steve Geerts (Clan, Met Man en Macht), Inge Paulussen (Clan, Zuidflank, Deadline 25/5), Mathijs Scheepers (Dag & nacht, Clan, Zuidflank) ou encore Greet Verstraete (Deadline 14/10, Deadline 25/5).

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Bilan : Les deux premiers épisodes de Cordon réussissent l'essentiel, posant avec aplomb les bases d'un récit à suspense qui happe le téléspectateur dans les destins croisés de personnages ordinaires confrontés à une situation de crise sanitaire imprévisible. Fiction chorale, abordant des thèmes extrêmement divers, la série se réapproprie le registre du thriller pandémique. Si elle n'évite pas quelques écueils ou maladresses, elle s'appuie sur un concept fort, l'isolement d'un quartier, face auquel le téléspectateur ne peut que s'interroger : jusqu'où la logique de quarantaine conduira-t-elle les autorités et tous les protagonistes ? En résumé, une œuvre qui, sans révolutionner le genre, en propose une déclinaison efficace, donnant envie de découvrir la suite.

Cordon, c'est donc l'occasion d'une piqûre de rappel (c'est le cas de le dire) téléphagique en provenance de Belgique, pays voisin, si proche, mais dont les fictions non francophones nous restent encore bien trop souvent inaccessibles.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :

16/02/2014

(Pilote EST) ENSV: Eesti Nõukogude Sotsialistlik Vabariik (RSSE) : une comédie familiale en république soviétique


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Aujourd'hui, reprenons nos excursions sériephiles (européennes) : direction l'Estonie ! Les plus anciens lecteurs parmi vous s'en souviennent, ce n'est pas la première fois que My Télé is rich! pose ses valises dans ce pays d'Europe du Nord. En effet, il y a deux ans, le visionnage de Klass - Elu pärast avait été une véritable claque téléphagique ; il s'agit d'une de ces séries dont on ne ressort pas tout à fait indemne, mais à l'égard de laquelle on reste admiratif et marqué. C'était déjà Eurochannel qui avait permis cette découverte, et c'est à nouveau cette même chaîne qui nous entraîne en Estonie en ce début d'année, cette fois pour ENSV: Eesti Nõukogude Sotsialistlik Vabariik (RSSE en version française).

Avec ENSV, nous nous situons dans un registre très différent, celui de la comédie. Et même de la comédie dite "historique" pourrait-on dire, puisque la série entreprend de nous ramener trois décennies en arrière au temps d'une Estonie soviétique et du quotidien que connaissait le pays au début des années 80. A partir du thème soviétique, c'est donc pour une fois l'occasion de quitter l'espionnage exploré avec The Americans ou Seventeen Moments of Spring pour découvrir un nouveau genre. Réalisée par Ain Mäeots et Marko Piirsoo, la série a trouvé son public en Estonie, puisque, diffusée depuis 2010, elle compte à ce jour déjà quatre saisons. C'est la première qui débutera le dimanche 23 février prochain sur Eurochannel. Les épisodes sont courts : ils durent une petite demi-heure. C'est le moment d'être curieux...

[La review qui suit a été écrite après le visionnage des deux premiers épisodes.]

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ENSV renvoie le téléspectateur au temps de la RSSE (la République Socialiste Soviétique d’Estonie). La série s'ouvre en effet en novembre 1982. Elle se propose de nous faire suivre le quotidien d'une famille estonienne ordinaire. Ainsi, chez les Kadak, il y a tout d'abord la mère, membre du parti communiste. Elle a installé chez elle son nouveau compagnon, tandis que son mari, absent, vogue en mer. Elle a aussi deux enfants, désormais grands adolescents ; la passion de l'un d'eux pour tout ce qui vient de l'Ouest et notamment de Finlande ne manque jamais de causer quelques problèmes. Il faut dire que le grand-père non plus ne souscrit guère au régime, et ne rate plus généralement jamais une occasion de s'élever contre tout ce qui est russe... Or la famille doit partager son appartement avec une vraie communiste intransigeante, dont le fils fait partie de la militsia. Face à de tels protagonistes, les petites tranches de vie promettent donc d'être animées.

Assez logiquement, c'est sur la dimension historique de son récit que ENSV se démarque en premier lieu. L'objet de la fiction est clairement une œuvre de reconstitution de la société estonienne des années 80. Il s'agit de jeter un éclairage -avec une touche d'humour décalé, fonctionnant souvent à froid- sur tout ce qui caractérisait la vie d'alors, sous ce régime autoritaire. Chaque épisode est donc rempli de références, voire de petits clins d’œil à des spécificités d'époque. Il est important de signaler que ces derniers ne sont jamais perdus pour le téléspectateur étranger car, par souci d'accessibilité aux plus jeunes générations estoniennes qui n'ont pas vécu cette période, se glissent dans le récit de petites parenthèses explicatives qui présentent en accéléré, avec des schémas, certains aspects du quotidien, tels, par exemple, les programmes télévisés. De même, le premier épisode choisit un point de démarrage emblématique : il s'ouvre le 11 novembre 1982, avec l'annonce de la mort de Brejnev. Entre réaction endeuillée officielle et préoccupations toutes personnelles bien éloignées, l'épisode se construit sur cette dualité sur laquelle il va pleinement jouer.

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L'originalité de ENSV tient toute entière dans ce cadre soviétique et les problématiques particulières, voire les anecdotes d'époque, qu'il permet d'évoquer. Sinon, la série emprunte les ficelles narratives les plus traditionnelles de la comédie familiale, revenant ici sur un terrain connu du téléspectateur : l'ensemble est assez prévisible, mais sympathique. L'inspiration des codes des sitcoms occidentales est d'ailleurs perceptible. La série est quasiment entièrement tournée en intérieur. Au cours des deux premiers épisodes, l'action se concentre sur un espace limité : l'appartement partagé, pouvant exceptionnellement nous entraîner jusqu'au bureau où travaille la mère, voire au pied de l'immeuble. La promiscuité causée par le partage du lieu de vie entre deux familles multiplie les sources de tension potentielles, en plus de celles liées à une famille Kadak "recomposée", les enfants n'acceptant qu'avec réticence le nouveau compagnon de leur mère. Cette dernière est d'ailleurs le personnage qui s'impose avec le plus de force au cours de ces deux premiers épisodes ; elle régit en effet sa vie et sa carrière avec poigne.

Sur la forme, la réalisation prend assez peu d'initiative notable, tout au plus s'efforce-t-elle de retranscrire le dynamisme impulsé par un rythme de narration toujours vif. Quelques images d'archives se glissent également dans le montage, renforçant cette volonté d'une reconstitution authentique. Le générique, très simple, est d'ailleurs à cette image (pour un aperçu, je vous renvoie au premier épisode en ligne sur YouTube, disponible par là). Côté casting, au sein de la famille dont les représentants sont les protagonistes principaux, on retrouve Laine Mägi (déjà croisée dans Klass - Elu pärast), Mait Malmsten (Kelgukoerad), Tiit Sukk, Liisa Pulk, Feliks Kark et Indrek Taalmaa (Tuulepealne maa). Dans le rôle des voisins envahissants avec qui les Kadak partagent leur appartement, on retrouve Argo Aadli (Nurjatud tüdrukud) et Helene Vannari (Wikmani poisid). Tandis que Paul Laasik (Kelgukoerad) interprète un membre du parti, collègue de travail de la mère.

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Bilan : Comédie familiale calibrée et sympathique, ENSV se démarque au sein de ce genre assez balisé par le décor soviétique qu'elle plante en arrière-plan. En effet, à travers le quotidien d'une famille estonienne du début des années 80, c'est la reconstitution d'une époque que vise la série, le récit multipliant les références et les anecdotes sur ce qui parsemait alors la vie en régime soviétique. Cette dimension culturelle et historique particulière est ce qui fait la spécificité de la fiction. La brièveté des épisodes, et le rythme narratif rapide avec lequel les épisodes sont menés, rendent l'ensemble très accessible.

En somme, c'est une curiosité, de tonalité légère, qui jette un éclairage intéressant sur l'Europe soviétique et la vision que peut en cultiver, aujourd'hui, un pays balte comme l'Estonie.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série (en VOSTF) :

04/01/2014

(SE/DAN) Bron/Broen (The Bridge), saison 2 : une lutte intime vers un échec inéluctable

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Pour ouvrir de la meilleure des façons cette année 2014, je vous propose de prendre la direction de la Scandinavie, entre Danemark et Suède, pour revenir sur une des séries les plus marquantes que j'ai eu l'occasion de visionner ces derniers mois. En 2013, Bron/Broen a surtout fait parler d'elle par l'exportation de son format : un premier remake américain (The Bridge) a été proposé au cours de l'été sur la chaîne FX, déplaçant l'intrigue à la frontière des Etats-Unis et du Mexique. Puis un second, franco-anglais, cette fois, (The Tunnel) a été diffusé cet automne en transposant l'action dans le tunnel sous la Manche.

De quoi presque occulter le fait qu'arrivait cet automne, en Suède et au Danemark, deux ans après, la seconde saison de la série originale. Ce serait pourtant passer à côté de dix bien belles heures de télévision que de négliger cette version scandinave. En effet, cette saison 2 est une confirmation, une consécration même, par l'aboutissement narratif auquel la série parvient. Si une saison 3 est en cours d'écriture, Bron/Broen s'est offert une magnifique suite -pouvant également faire office de conclusion.

En ce qui concerne la diffusion internationale, notez que cette saison 2 débute justement ce soir (samedi 4 janvier 2014) sur BBC4 en Angleterre (avec une sortie DVD prévue pour février 2014). En France, c'est la saison 1 qui arrive sur Canal+Séries à partir du 6 janvier prochain. N'hésitez donc pas.

[La review qui suit contient des spoilers concernant les saisons 1 & 2 : ne pas lire si vous ne les avez pas visionnées.]

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Bron/Broen reprend le fil de son histoire plus d'un an après la fin de la première saison. Si elle a tout de la digne représentante du genre policier, cette seconde saison souligne combien il serait réducteur de la présenter sous ce seul versant. C'est, certes, un polar scandinave à la narration feuilletonnante éclatée qui orchestre différentes destinées autour d'un fil rouge criminel, au sein duquel se retrouve une dimension politique - environnementale - semblable au schéma suivi lors de la première saison. Cette trame est une nouvelle fois rondement menée, avec des changements de perspectives bien introduits : face à une maîtrise narrative rarement prise en défaut, on peut tout au plus discuter le point d'interrogation que laisse au téléspectateur l'ultime scène qui conclut l'épopée criminelle du dernier responsable connu des événements relatés. Mais par-delà l'efficacité dont elle fait preuve dans ce registre, Bron/Broen est bien plus qu'une fiction d'enquête.

En effet, la série est entièrement portée et dédiée à la dynamique qui lie son duo principal. La saison 1 avait fait le choix d'explorer, avec réussite, une recette très familière, celle de l'association professionnelle de deux personnages très différentes qui, peu à peu, trouvent un terrain d'entente et entre lesquelles une complémentarité et même une amitié naissent. Lorsque la nouvelle saison débute, Saga et Martin ne se sont pas revus depuis l'enterrement d'August. Saga a poursuivi sa vie, tandis que Martin tente comme il peut de retrouver la sienne et de se remettre de la mort de son fils. Malgré le drame passé, les deux policiers retrouvent quasi-instantanément les rapports construits entre eux l'année précédente. Leur caractérisation et la mise en scène subtile de leurs rapports restent une des grandes forces de la série. En marge de l'investigation, ils se conseillent, s'influencent, tentent de se protéger, capables d'échanger et de se parler sans tabou : Martin doit faire face au deuil, à sa vie de famille qu'il peut peut-être encore sauver ; Saga expérimente la vie de couple et sa faculté à construire plus avant une relation amoureuse. C'est l'occasion pour la série d'explorer différentes facettes de ces personnages, laissant entrevoir toute la vulnérabilité qui sommeille derrière la surface policière endurcie.

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S'inscrivant dans la directe continuité des événements passés, cette saison 2 est en fait une histoire d'échecs apparaissant inéluctables. En dix épisodes, c'est une tragédie à laquelle on assiste, dont la dimension poignante et déchirante n'est que plus mise en valeur par l'extrême sobriété dont fait preuve l'écriture de Bron/Broen. Il y a un réalisme brut, une authenticité dans les réactions de chacun, qui n'en marque que plus le téléspectateur. Tout au long de la saison, en parallèle du fil rouge criminel à résoudre, une lutte autrement plus intime prend place : Saga et Martin se débattent, tentent d'évoluer... Sans succès. Ainsi, Saga assimile-t-elle des livres sur la gestion d'une cohabitation, sans parvenir à comprendre ces codes de socialisation qui lui échappent ; elle ne peut modifier qui elle est, n'y échapper au besoin de se préserver un espace. Cela anéantira son couple. De son côté, pour dépasser sa douleur, Martin fait le choix de la confrontation avec celui qui a brisé sa vie ; mais l'illusion de l'avoir touché sera balayée par la réalisation que le cocon familial qu'il espérait retrouver n'est plus.

Le dernier épisode de la saison, le plus éprouvant -une nouvelle fois-, n'est pas seulement la conclusion d'une saison, il vient refermer un arc qui couvre les deux saisons. Il entérine un retour au point de départ de la série, venant constater que ni Saga, ni Martin n'ont réussi à progresser. Leurs tentatives ont été vaines. Martin cède à la vengeance qu'il n'avait pas commise à la fin de la saison dernière : il tue le meurtrier de son fils. Or Saga comprend, seule, comment il s'y est pris. Elle aurait pu ne rien dire, personne ne se préoccupant vraiment du sort de cet homme. Seulement la jeune femme est fidèle à elle-même, retrouvant cette intransigeance qui reste une de ses caractéristiques. Elle collecte les preuves et fait son rapport, comme elle l'avait fait lors du pilote de la série pour un incident autrement plus anecdotique. C'est ainsi qu'elle dénonce aux autorités celui qu'elle reconnaît être son seul ami, détruisant par là-même l'unique relation humaine -si précieuse donc!- qu'elle avait réussi à nouer. Sans ciller, les scénaristes sont allés au bout de leur exploration de ce duo, en optant pour l'issue la plus implacable et la moins artificielle : celle qui semblait finalement inéluctable...

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La noirceur des développements de cette saison 2 -fidèle à la tonalité posée dans la première- se retrouve dans la photographie de la série, laquelle paraît comme décliner à l'infini des tons de gris aux nuances insoupçonnées. La réalisation est impeccable, sachant parfaitement user de plans larges et mettre en valeur un paysage frontalier, entre Suède et Danemark, qui fait partie intégrante de l'atmosphère du récit. Bron/Broen confirme être une oeuvre esthétiquement très aboutie dont le visionnage constitue une véritable expérience visuelle. Cet aspect se combine avec une bande-son où la sobriété prédomine, superbement incarné par un générique toujours aussi marquant, avec une chanson qui hante durablement le téléspectateur et représente si bien l'identité de la série (cf. la première vidéo ci-dessous).

Si la justesse de Bron/Broen trouve sa source dans les qualités de son écriture, ce sont aussi les performances d'acteurs qui parachèvent cet équilibre de ton. Dans des registres très différents, Sofia Helin et Kim Bodnia sont tous deux impressionnants. Magnifiques même. Tout en suscitant l'investissement émotionnel du téléspectateur, ils vont, chacun à leur manière, avec une retenue remarquable et sans jamais céder à la tentation d'en faire trop, nous faire partager leurs épreuves personnelles. Bouleverser le téléspectateur ne sera d'ailleurs pas leur monopole, notamment dans l'ultime épisode où Vickie Bak Laursen délivrera quelques scènes extrêmement poignantes avec son personnage de Pernille, une policière. A leurs côtés, on peut citer les retours de Sarah Boberg, Lars Simonsen, Puk Scharbau et Rafael Petterson, mais aussi les arrivées de Henrik Lundström, Tova Magnusson, Sven Ahlström ou encore Camilla Bendix.

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Bilan : Si Bron/Broen confirme être une solide série policière, polar scandinave à l'intrigue éclatée réunie en un toutélié maîtrisé, le coeur et la grandeur de la série reposent sur son exploration d'un duo principal, dont les rapports et les destins croisés confèrent une dimension supplémentaire au récit. Derrière la collaboration professionnelle difficile devenue une amitié, c'est une histoire de luttes intimes, de changements personnels impossibles. La dimension tragique de la saison ressort particulièrement par la construction narrative suivie : malgré les tergiversations et les efforts de Saga et de Martin, tout semble inéluctablement les conduire aux ultimes prises de décision dont nous serons témoins, retour à un point de départ aussi déchirant qu'inexorable. En lien direct avec les événements de la première saison, on assiste donc à une vraie conclusion d'ensemble de l'arc narratif ouvert vingt épisodes plus tôt.

L'éventualité d'une saison 3 soulève par conséquent bien des questions, dans la mesure où la dynamique qui fondait la série jusqu'à présent n'est plus. Cependant les scénaristes ont pour le moment si bien su maîtriser leur sujet, qu'il est impossible de ne pas leur faire confiance pour envisager une suite. Surtout, il est bien difficile d'envisager de refermer définitivement ce magnifique chapitre sériephile qu'est Bron/Broen. A suivre donc...


NOTE : 8,75/10


Le générique de cette saison 2 :


Une bande-annonce de la série :