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29/09/2013

(CAN) Aveux : des retrouvailles entre secrets, recherche de vérité et quête de soi

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Dernière étape dans mes rattrapages en séries réalisés au cours de ce mois de septembre, aujourd'hui, direction le Canada, et plus précisément, le Québec. L'an dernier, la découverte d'Unité 9 avait été autant un coup de cœur qu'une révélation sur ce petit écran. J'en avais retiré l'envie d'explorer la télévision québécoise. Faute de temps, j'ai longtemps remis à plus tard cette résolution. Septembre est heureusement arrivé pour corriger cela. Parmi les recommandations les plus fréquentes, figurait notamment Apparences, une série écrite par Serge Boucher datant de 2012. Après avoir hésité, j'ai finalement opté pour une découverte plus chronologique en commençant par la première série de cet auteur : Aveux.

Il s'agit d'une fiction, comprenant 12 épisodes de 45 minutes environ, qui a été diffusée sur Radio-Canada du 8 septembre au 24 novembre 2009. En France, la série a été projetée au Festival SeriesMania en 2010. Elle a reçu le prix de la meilleure réalisation (confiée à Claude Desrosiers) au Festival de la Rochelle. Elle a enfin été diffusée sur TV5 Monde au printemps 2013. Pour tout vous dire, je blâme un peu Aveux de me gâcher la rentrée en me faisant trouver si fades tant de nouveautés parmi celles testées ces derniers jours. Cette série n'est pas un simple coup de cœur sériephile, c'est une œuvre à l'intensité et à la justesse émotionnelle aussi rares que précieuses. Le téléspectateur n'en ressort pas complètement indemne, mais qu'est-ce que c'est bon...

[Pour préserver la force du récit à toute personne n'ayant pas visionné la série - tout en essayant d'aiguiser sa curiosité -, la review qui suit est garantie sans spoilers.]

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Carl Laplante a tout quitté à 18 ans. Il a laissé derrière lui sa famille et ses amis, sans leur donner la moindre explication, ni leur transmettre de nouvelles par la suite. Ses parents l'ont d'abord recherché, puis chacun a baissé les bras, le départ de Carl restant une blessure jamais cicatrisée dans leur cœur. Quinze ans ont passé depuis. Carl s'appelle désormais Simon. Il s'est inventé un autre passé et s'est construit une nouvelle existence auprès de Brigitte dont il partage la vie depuis huit ans. Malgré les secrets et les mensonges, il a retrouvé un équilibre, aussi précaire soit-il, aux côtés de sa belle-famille et de nouveaux amis, avec un emploi tranquille de livreur.

Tout se déroule pour le mieux jusqu'au jour où son passé ressurgit soudain, malgré lui, par le hasard d'une livraison. Sonnant à une maison pour y apporter un canapé, il tombe nez-à-nez avec Olivier, un ami d'enfance, qui le reconnaît instantanément. Ces retrouvailles inattendues obligent Carl/Simon à renouer avec son passé, et tout cet entourage qu'il avait laissé derrière lui à 18 ans. Il lui faut faire face aux interrogations et aux incompréhensions. Que s'est-il passé il y a presque deux décennies ? Pour quelles raisons le jeune homme a-t-il choisi de s'enfuir et de couper tous les ponts ? Quels secrets ont été préservés pendant tout ce temps au sein de la famille Laplante ?

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Aveux est le récit de difficiles retrouvailles familiales, et des douloureux secrets qu'elles vont conduire à exposer. Elle est traversée par une tension psychologique prenante. Derrière le mystère des raisons du départ de Carl/Simon, apparaissent peu à peu des drames intimes, des incompréhensions jamais levées et des non-dits anecdotiques sur le moment, mais déterminants sur le long terme. A mesure que l'histoire progresse, des pans du passé se dévoilent, avec toute la subjectivité des regards biaisés d'alors et des éventuels quiproquos jamais balayés. Allant de révélations en confrontations, la narration fluide et cohérente happe le téléspectateur. Chaque personnage se voit contraint de faire face à des vérités qu'il aurait voulu laisser enfouies, et pour certains, aux culpabilités qui les rongent. Car si le processus est éprouvant, il est aussi nécessaire pour définitivement solder ce passé qui pèse tant et envisager un avenir. Aveux mêle ainsi habilement les ingrédients d'une solide série à suspense et l'exploration plus personnelle d'une quête de soi, identitaire, au terme de laquelle Carl/Simon peut peut-être espérer faire la paix avec lui-même. 

Outre l'habile gestion des interrogations et des révélations rythmant le récit, Aveux marque par l'authenticité et le réalisme qui caractérisent ce portrait d'une famille dont les membres se sont perdus les uns par rapport aux autres. L'écriture est très fine, d'une rare justesse. La série repose sur ses dialogues, laissant vraiment le temps à ses personnages d'échanger. Optant pour une caractérisation fouillée et nuancée, privilégiant le naturel, elle permet aux protagonistes d'avoir des réactions qui sonnent justes. Les figures mises en scène sont ordinaires, avant tout humaines, avec toutes leurs ambivalences inhérentes, leurs craintes et leurs aspirations : elles paraissent ainsi très proches au téléspectateur, l'impliquant d'autant plus à leurs côtés. Aucune n'est oubliée dans les développements que va nous conter la série, avec une cohésion d'ensemble appréciable. Le fil rouge central reste la confrontation avec son passé de Carl/Simon : il va falloir, à lui et à ses proches, aller au-delà de ses mensonges et de sa fuite en avant permanente, qui sont autant de mécanismes de défense, de survie, qu'il a mis en place en deux décennies. C'est avec prudence et une intensité émotionnelle marquante que la série réalise cela, délivrant une histoire dense qui ne peut laisser insensible.

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Formellement, Aveux est une œuvre solide et réussie. La série se construit sa propre identité visuelle, avec une caméra dynamique qui suit les personnages et des flashbacks en noir et blanc incrustés dans le récit. La réalisation est travaillée, la photographie soignée. La bande-son est pareillement bien dosée, jamais intrusive, mais accompagnant parfaitement la tonalité des scènes concernées. Le générique, avec sa musique et ses ruptures, en devient même presque entêtant, symbolisant toutes les ambiguïtés sur laquelle la série joue. 

Enfin, Aveux réunit un casting solide et homogène qui s'efforce de respecter le souci d'authenticité de la fiction. Carl/Simon Laplante est interprété par Maxime Denommée (Un monde à part). Ses parents sont joués par Guy Nadon (Musée Eden) et Danielle Proulx (Les héritiers Duval), tandis que Evelyne Brochu (Mirador, Orphan Black) est sa soeur, Joliane. Catherine Proulx-Lemay (Unité 9) incarne sa femme. Dans leur entourage proche, Marie-Ginette Guay (Chabotte et fille) est l'ancienne directrice d'école dont le mari s'est suicidé il y a presque vingt ans, Benoît McGinnis (Les hauts et les bas de Sophie Paquin, Trauma) jouant son neveu et celui par lequel les retrouvailles ont lieu puisqu'il est le premier à retrouver Carl/Simon par hasard. Interprétant le petit ami de Joliane, Steve Laplante (Mirador, Tu m'aimes-tu ?) est parfait dans un rôle de poil-à-gratter, trop curieux, voire provocateur. On retrouve également Marie-Hélène Thibault (Providence), Vincent Bilodeau (Les Bougon : C'est aussi ça la vie), Micheline Bernard (Vice caché), Pier Paquette, mais aussi René Gagnon dans le rôle de Sandrine.

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Bilan : Récit de retrouvailles qui précipitent au grand jour de terribles secrets et des non-dits sur lesquels des quiproquos se sont bâtis, Aveux nous fait revenir sur deux décennies qui ont déchiré de l'intérieur la famille Laplante. C'est une série intense émotionnellement, qui sait jouer sur ses mystères et les questions qu'ils suscitent pour capturer l'attention du téléspectateur et construire un suspense. Misant sur une authenticité travaillée, son écriture fine et nuancée permet d'aborder sans artifice des thèmes durs et des sujets très sensibles. Elle a le souci constant de les traiter avec sincérité et beaucoup de justesse, évitant ainsi bien des écueils. Capable de passer du rire aux larmes, de moments profondément bouleversants à des passages chargés de chaleur humaine, Aveux est tout simplement un magnifique moment de télévision... et certainement mon coup de cœur sériephile des visionnages de septembre. A découvrir.


NOTE : 8,25/10


Le générique de la série :

23/06/2013

(CAN) Orphan Black, saison 1 : des clones, beaucoup de questions et un charme certain

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Revenons aujourd'hui sur une série dont j'avais déjà eu l'occasion d'évoquer le pilote il y a quelques mois : Orphan Black, une nouveauté diffusée sur BBC America aux Etats-Unis et sur Space au Canada. Son premier épisode avait été une introduction avec des atouts, sans constituer pour autant une révélation. Un joli buzz printanier plus tard, qu'est donc devenue Orphan Black au cours de sa première saison, dont les seuls dix épisodes paraissaient comme une promesse de récit condensé ?

La série a certainement bénéficié, dans la réception qui l'a entourée, d'un relatif effet de surprise, allié à l'absence d'attentes particulières initiales autour du projet. Pour autant, c'est une première saison prenante qu'elle a proposée, se réappropriant pleinement thématiques de science-fiction (le clonage humain) et girl power revendiqué. En résumé, voici une série qui a su me faire tomber sous son charme.

Pour ceux qui souhaiteraient se rappeler les bases de l'histoire d'Orphan Black, je vous renvoie à mon résumé du pilote lors de ma critique de ce dernier (garantie sans spoiler intempestif) : Orphan Black, des doubles, des secrets et des échanges d'identité. Le billet du jour constitue, lui, un bilan de saison (également sans spoiler).

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Si Orphan Black a concrétisé, voire dépassé, les attentes qu'avait esquissé son pilote, c'est que la série a su miser sur des développements extrêmement addictifs. Refusant de s'enfermer dans le moindre acquis, la saison progresse au contraire à un rythme très rapide, sans jamais s'offrir le moindre ralentissement notoire. Avec son choix assumé d'aller toujours de l'avant, elle passe vite maître dans l'art de multiplier les rebondissements, redistribuant constamment les cartes et les loyautés de chacun au gré des révélations. Elle fait preuve d'une capacité assez grisante à toujours chercher à jongler avec plus de storylines et de twists qui s'enchaînent sans temps mort. Pour le téléspectateur, nul doute que le spectacle est enthousiasmant : à défaut d'être originale, la série s'avère prenante jusque dans sa façon d'assumer une narration versatile qui, si elle n'entend prendre aucune pause, se ménage des passages dramatiques mais aussi des moments plus légers.

Cette approche narrative directe permet à Orphan Black d'exploiter pleinement son format de 10 épisodes, avec une construction entièrement feuilletonnante dans laquelle le téléspectateur va s'investir. Cependant la série trouve pourtant là ce qui est aussi une de ses limites : à risquer de trop vouloir en faire, elle frôle parfois la sortie de route de la cohérence. Et même si la surenchère reste dans l'ensemble dosée, la façon dont les scénaristes calibrent les évènements et les réactions de chacun, en fonction des rebondissements vers lesquels la série tend, finit par donner un arrière-goût de simple artifice à certains passages. Au cours de la saison 1, cette dérive reste cependant assez circonscrite, et la dynamique d'ensemble la masque le plus souvent. Reste qu'en reposant tellement sur cette escalade de confrontations, de trahisons et de révélations, la série se construit sur des fondations fragiles, à surveiller.

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Pour autant le charme d'Orphan Black ne tient pas seulement à l'engrenage dans lequel la série happe le téléspectateur. La clé d'entrée dans son univers reste les personnages. Il y a tout d'abord la gestion du thème du clonage qui fonctionne très bien à l'écran. Afin de s'assurer d'avoir des individus semblables en apparence, tout en étant toujours bien identifiables, les scénaristes ont choisi de mobiliser des stéréotypes de la fiction américaine : une soccer mom des banlieues et une geek (biologiste), auxquelles s'ajoutent des figures plus ambiguës : Helena, élevée dans le fanatisme religieux, est certainement celle qui fascinera le plus, plongée dans l'instabilité, brisée aux frontières de la folie. Isolés, ces personnages auraient risqué de tourner à vide, manquant de consistance, mais c'est justement dans la mise en scène des dynamiques qui vont se créer entre les clones, avec tous les contrastes qui les accompagnent, que Orphan Black trouve sa force.

L'attrait de la série repose alors dans la manière dont on observe ces personnalités réagir aux évènements, avec leurs préconceptions, leurs caractères et leurs propres histoires. Le récit expose leurs différences, insiste et joue avec elles, pour créer des confrontations, mais aussi un lien unique entre ces jeunes femmes qui ne sont pas les simples déclinaisons d'un même génome : ce sont des personnes à part entière. La protagoniste principale restera toujours Sarah, celle par qui le téléspectateur a été introduit dans ce monde. La jeune femme a une particularité par rapport aux autres : une fille biologique qui représente sans nul doute un enjeu à elle-seule. Par son aplomb et son caractère, Sarah s'impose comme une héroïne solide auprès de laquelle il est aisé de s'investir. Mieux, elle s'humanise grâce à sa relation avec son frère adoptif, Felix, qui aura au fil du récit su apporter une touche plus décalée, voire humoristique à certains passages, tout en s'imposant comme un pendant nécessaire à Sarah.

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Au fond, le secret du charme d'Orphan Black tient à cela : une histoire de clones, de personnages en apparence semblables, mais dont les postures, les expressions et le langage n'ont rien de commun. C'est dans cet aspect que la performance de Tatiana Maslany (World without end) est déterminante. Ses interprétations de ses différents rôles sont impressionnantes justement parce qu'elle leur donne à tous une vie et une présence qui leur sont propres. Elle peut interprétér 3 ou 4 personnages différents à la suite, à aucun moment le téléspectateur n'a l'impression d'être devant le même : il sait toujours qui est qui. Mieux, lorsqu'un des clones se fait passer pour un autre, le téléspectateur a toujours conscience de celui qui ne fait que tenter de jouer un rôle qui n'est pas le sien : dans les mimiques, les quelques réflexes qu'il conserve, on perçoit toujours qu'il n'est pas celui dont il a pris la place. Il y a quelque chose de grisant à suivre ainsi cette performance d'acteur enthousiasmante sur laquelle repose les fondations mêmes de la série. Aux côtés de Tatiana Maslany, ces co-acteurs ont des rôles plus conventionnels. Jordan Gavaris (Unnatural History), qui interprète Felix, est certainement celui qui délivre l'interprétation la plus intéressante. D'autres sont plus limités, à l'image Dylan Bruce (The Bay). Mais la série peut quand même également compter sur la présence de Maria Doyle Kennedy (The Tudors, Titanic), dont le personnage a encore probablement beaucoup à révéler. 

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Bilan : Série très plaisante à suivre, Orphan Black aura signé une première saison dense qui, après des premiers épisodes d'installation, trouve un rythme de croisière extrêmement addictif et prenant, bénéficiant de ce format pas trop long de dix épisodes. La thématique du clonage n'est pas exploitée sous un angle original, mais elle a le mérite de parfaitement réussir à happer le téléspectateur dans une escalade paranoïaque de rebondissements et de révélations. De plus, l'attrait de la série de la série repose aussi sur les intéractions et dynamiques qui se créent entre ces jeunes femmes, à la fois si dissemblables à l'ADN similaire. Orphan Black est donc une intéressante fiction printanière : pas exempte de limites, mais certainement enthousiasmante. Avis aux amateurs de SF et de girl power !

La saison 2 réservera son lot de défis, à commencer par s'assurer que la série puisse maintenir un tel rythme sur un plus long terme, avec des storylines qu'il va falloir continuer de faire évoluer. Je serai en tout cas au rendez-vous pour la suite.


NOTE : 7,25/10



La bande-annonce de la série :

Le générique de la série :

31/03/2013

(Pilote CAN) Orphan Black : des doubles, des secrets et des échanges d'identités

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Week-end de Pâques riche en changements dans mes programmes sériephiles printaniers (il faut bien mettre à profit ce lundi férié). Non seulement plusieurs séries signent un retour remarqué, avec la reprise de la saison 7 de Doctor Who hier et le début de la saison 3 de Game of Thrones ce soir, mais une nouvelle série que j'attendais avec une certaine curiosité débutait également, ce samedi 30 mars 2013, en Amérique du Nord : Orphan Black.

Deuxième série originale de BBC America après Copper, co-produite avec la chaîne canadienne Space, on retrouve derrière cette fiction deux Canadiens, Graeme Manson et John Fawcett (qu'on a déjà croisé derrière la caméra pour certains épisodes de The Border, The Bridge ou encore Lost Girl). Orphan Black a pour l'instant été commandée pour une saison de 10 épisodes. Sur le papier, elle semble avoir le potentiel pour s'inscrire dans la lignée des divertissants high concept de science-fiction canadiens, à l'image de Continuum l'an passé. Une impression confirmée par un pilote qui m'a donné envie de revenir pour la suite.

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Sarah est une jeune arnaqueuse débrouillarde qui n'a pas été épargnée par la vie. Orpheline, ne sachant rien de ses origines, elle a grandi en famille d'accueil, aux côtés d'un frère adoptif dont elle est toujours proche, Felix. Elle a aussi une petite fille, Kira, qu'elle n'a pas vue depuis 10 mois lorsque débute la série. La vie de Sarah est donc déjà passablement compliquée, avec un petit ami qu'elle vient de quitter violemment, en lui volant de la drogue qu'elle espère revendre pour recommencer ailleurs une nouvelle vie. Ses projets changent quand une jeune femme inconnue, mais lui ressemblant traits pour traits, se suicide sous ses yeux en se jetant sous un train. Elle va alors mettre le doigt dans un engrenage très dangereux.

En effet, perturbée par cette ressemblance frappante, mais aussi pragmatique, Sarah vole les affaires personnelles que son double a abandonnées sur le quai. Elle parvient ainsi à s'introduire chez Beth. Découvrant des relevés de comptes avec une forte somme, Sarah décide même d'aller plus loin dans l'arnarque en prenant pour un temps l'identité de la défunte afin d'accéder à l'argent. Mais Beth avait aussi son lot de problèmes : policière, elle était suspendue pour avoir abattu une civile. Sarah se retrouve prise malgré elle dans cette vie qui lui est étrangère. Puis, très vite, leur mystérieuse ressemblance acquiert une autre dimension lorsque Sarah rencontre encore une autre femme qui lui ressemble en tout point physiquement... et manque alors de se faire abattre. C'est dans le mystère de ses origines que doit se trouver la réponse à tous ces évènements.

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Orphan Black signe un pilote efficace et divertissant. La série se réapproprie, avec une tonalité bien à elle et un style à la fois simple et direct, des thèmes familiers qui laissent entrevoir du potentiel. L'univers esquissé intrigue, entremêlant des histoires de doubles destinées à nous faire explorer et repousser les limites connues de la science (le clonage se profile en arrière-plan), des secrets des origines jalousement gardés dans lesquels perce une pointe conspirationniste et des échanges d'identités qui requièrent un jeu compliqué de poker-menteur pour faire illusion... Les enjeux et les mystères entourant Sarah sont donc bien introduits, avec de nombreuses questions soulevées. Surtout, l'épisode installe une ambiance des plus plaisantes à suivre : la tonalité y est versatile, ce qui dynamise un peu plus une narration déjà bien rythmée, avec une histoire qui progresse vite. Le pilote joue en plus sur des changements de tons globalement bien maîtrisés, se ménageant des moments sérieux versant dans le registre du thriller, et des passages autrement plus légers qui tendent vers la dramédie.

Si le téléspectateur se prend aisément au jeu de ce divertissement à suspense, c'est aussi parce que Orphan Black peut compter sur une héroïne convaincante qui, dotée d'un sens de la débrouillardise aiguisé, révèle différentes facettes d'une personnalité tout en ombres et lumières. Sarah est quelqu'un qui s'est endurci au contact d'une vie où elle n'a pas eu beaucoup d'opportunités. Mais elle a aussi fait des choix discutables, comme celui de laisser sa fille derrière elle pendant presque une année. Elle n'aspirait à rien d'autre qu'un possible nouveau départ : son objectif en devenant Beth était simple, vider le compte en banque de la défunte, sans vraiment penser aux conséquences d'un échange d'identité. Or la voilà entraînée malgré elle dans des enjeux autrement plus complexes, qui la dépassent. La série tient là une figure centrale sur laquelle elle peut se reposer. Le seul autre personnage sur lequel le pilote s'attarde un peu est son frère adoptif, Felix, qui apporte une autre perspective sur les évènements. La complicité, existant entre les deux en dépit des reproches, est l'occasion d'humaniser des relations humaines qui restent dans l'ensemble assez froides (Sarah devant donner l'illusion aux connaissances de Beth).  

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Intriguante et efficace sur le fond, la série sait tirer le meilleur parti des moyens qu'elle a à disposition. Tournée dans les environs de Toronto, elle bénéficie d'une réalisation très correcte, s'adaptant aux contraintes matérielles. Sa photographie, avec des teintes à dominante froides, correspond bien à l'ambiance qu'elle essaie de construire. Le seul bémol à lui adresser sera sans doute du côté de la bande-son : les musiques, énergiques comme tout thriller qui se respecte, sont parfois assez envahissantes, avec des passages où tout paraît éclipsé derrière elles.

Enfin, Orphan Black dispose d'un dernier atout, son casting, ou plus précisément son actrice principale, Tatiana Maslany (World without end). Elle interprète l'héroïne, et toutes les différents doubles qui peut exister d'elle. Cela nécessite d'avoir les épaules suffisamment solides pour porter la série, et c'est un challenge qu'elle relève sans mal, apportant une vraie présence à l'écran, avec une vitalité appréciable. Du fait du format de la série, l'épisode tourne logiquement quelque peu au "Tatiana Maslany show", seul Jordan Gavaris (Unnatural History) tire son épingle du jeu dans ce premier épisode, en interprétant le frère adoptif de Sarah. On retrouve également Dylan Bruce (The Bay) qui incarne le petit ami de Beth), Maria Doyle Kennedy (The Tudors, Titanic), la mère adoptive de Sarah, ou encore Kevin Hanchard, le partenaire policier de Beth.

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Bilan : Orphan Black signe des débuts intéressants. Divertissement prenant et efficace, le pilote est plaisant à suivre grâce à une narration rapide et fluide, dotée une tonalité versatile qui fait toute sa fraîcheur. Signe que la série a des ambitions, il est aussi plutôt dense, avec de nombreuses questions soulevées et des thématiques à explorer qui balaient un large champs : pour certaines très personnelles, pour d'autres autrement plus mystérieuses. A la fin de l'épisode, l'histoire est bel et bien lancée, même si le concept annoncé, celui du clonage, n'est pas encore formellement introduit. Il faudra voir si la suite parviendra à conserver le bon dosage de cette introduction, sans s'essouffler. Mais la saison ne doit compter que 10 épisodes, et le potentiel est là. A suivre.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série :

Le générique de la série :

14/10/2012

(Pilote CAN) Unité 9 : une immersion convaincante dans un milieu carcéral féminin

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En cette mi-octobre où l'heure des premiers bilans de rentrée peuvent déjà s'esquisser, il faut bien avouer que les nouveautés ne m'ont guère emballé en Amérique du Nord. Quelques concepts s'affirmeront peut-être lorsque la série en aura pris la mesure, mais l'introduction en elle-même, le fameux pilote, ne m'a que trop rarement (disons plutôt jamais) conquise. Cependant, si on élargit au-delà du cercle anglophone à l'Amérique francophone, il existe une série qui a retenu mon attention ces derniers jours : Unité 9, testée après plusieurs semaines d'échos positifs dans ma time-line de twitter qui avaient aiguisé ma curiosité (à commencer par LadyTeruki au prosélytisme souvent bien ordonné).

Le week-end dernier, je me suis donc lancée dans la télévision québécoise. Cela faisait longtemps que je tournais autour, j'ai sauté le pas avec les nouveautés de cette rentrée, et ai donc testé des fictions aussi différentes que Les Bobos, Tu m'aimes-tu et donc Unité 9. Une fois passé l'ajustement à l'accent (et reconnaître que certaines phrases m'échapperont toujours par-ci, par-là), c'est cette dernière qui m'a vraiment happé dès son premier épisode (et depuis le rattrapage s'opère avec un enthousiasme qui ne se dément pas). Écrite par Danielle Trottier, avec Geneviève Baril et Louise Danis, Unité 9 est une fiction dramatique qui a débuté sur Radio-Canada le 11 septembre 2012. Prévue pour une durée de 25 épisodes, de 42 minutes chacun, elle est diffusée tous les mardi soirs, où elle a trouvé son public.

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Unité 9 s'ouvre sur le jugement du personnage principal de la série, Marie Lamontagne, une mère de deux enfants désormais jeunes adultes, veuve et jusqu'alors sans antécédents judiciaires. Ayant avoué les faits, elle est reconnue coupable et condamnée, pour tentative de meurtre sur la personne de son père, à sept ans d'emprisonnement. En attendant son transfert, elle fait la connaissance d'une première co-détenue, Shandy, jeune femme exubérante qui connaît parfaitement les arcanes du système judiciaire, en parfait contraste avec le saut dans l'inconnu que tout cela représente pour celle qui était il y a peu une simple mère de famille sans histoires.

Marie va purger sa peine dans l'établissement carcéral pour femmes de Lietteville, où elle sera assignée à l'unité 9. On découvre, dès le premier épisode, les femmes, très différentes les unes des autres, qui vivent dans ce baraquement conçu pour six personnes. Face à des co-détenues pour certaines accueillantes, pour d'autres indifférentes, voire carrément hostiles, Marie va devoir trouver sa place et apprendre les codes de cette prison dont un nouveau responsable vient de prendre la direction. La gestion par ce dernier d'un vol anecdotique pose d'ailleurs d'emblée la rigueur qui semble devoir être sa ligne de conduite.

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L'univers carcéral est un milieu au potentiel narratif certain (sans revenir sur Oz, il faudra que je vous parle prochainement de Capadocia dont la saison 1 m'attend depuis plusieurs semaines). La vie en collectivité forcée, placée sous la surveillance constante de gardiens, sert de révélateur. Les dynamiques qui s'installent entre les personnages, qu'il s'agisse de rapports de soutien comme de pouvoir, sont capables de faire ressortir les meilleurs (telle la solidarité) comme les pires aspects de la nature humaine. L'enjeu même de la prison constitue une problématique fascinante à traiter, puisque la sentence a une dualité qui lui est inhérente, bien difficile à concilier : il s'agit de solder les comptes avec les actes commis dans le passé en punissant l'individu, mais aussi de se tourner vers le futur en ouvrant la voie à un après, à une réhabilitation, avec une vie à reconstruire une fois la peine purgée.

Pour mettre en scène son cadre particulier, Unité 9 choisit une approche dramatique, très humaine, qui privilégie avant tout ses personnages. La série n'a pas les explosions de violence à l'intensité difficilement soutenable que d'autres fictions relatant un tel sujet ont déjà mis en avant, cherchant à marquer en montrant le pire versant de l'être humain. Ces baraquements (sans barreaux) donnent même parfois la brève illusion d'oublier la prison. La série ne s'en approprie pas moins avec force les grands thèmes carcéraux. Les conditions de détention ne semblent certes en apparence pas insupportables, mais cela n'en reste pas moins une prison, aussi cliniquement régulée qu'elle puisse paraître. La privation de liberté pèse. Les quelques éclats provoqués, les expressions de mal-être ou encore les brusques rappels des limites à toute action, témoignent du poids constant, tellement pesant, que représente toutes ces exigences quotidiennes auxquelles les détenues doivent se soumettre.

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Les débuts de Unité 9 ont le grand mérite d'esquisser ses enjeux sans se précipiter. Son écriture a une sobriété naturelle qui permet de poser instantanément une proximité avec les personnages. Il y a aussi une densité émotionnelle bien présente qui frappe et suscite l'empathie. Par l'intermédiaire de Marie, qui est le repère du téléspectateur, il s'agit de suivre comment une femme ordinaire, étrangère à un milieu carcéral dans lequel elle n'avait jamais envisagé de pouvoir se retrouver, va s'adapter à ce qu'elle découvre. L'assimilation du choc de la sentence dans le pilote sonne extrêmement juste. Puis, dans le deuxième épisode, les premiers pas en prison s'inscrivent dans cette même lignée, capturant avec force le maelström d'émotions qui se forme en elle, oscillant entre la détresse d'une vie soudain privée de sens, comme suspendue, et le besoin de rationaliser ce qui lui arrive et de comprendre le fonctionnement de l'établissement. Une scène comme celle de la fouille à nue, pour le choc et l'atteinte à la dignité que cela représente pour Marie, résume bien l'intensité marquante de la série. Oui, Unité 9 saura traiter des problématiques carcérales avec authenticité et sans besoin de surenchère.

De manière générale, la grande réussite du pilote tient à sa capacité à créer des personnages auprès desquels on s'investit naturellement, sans nécessiter que l'on sache instantanément tout d'eux. De Marie, on apprend qu'elle a tenté de tuer son père, mais on ignore ses motifs. De même, ses futures co-détenues nous sont présentées par petites touches, à travers leurs relations au quotidien. Il n'y a pas d'exposition inutile, ni de surdose d'informations pour classer immédiatement chaque protagoniste dans des ses cases prédéfinies. Les quelques flashbacks de Marie, dans le pilote, servent au présent, puisqu'ils permettent de mesurer le brusque vertige qui la saisit quant la perspective de l'univers carcéral devient concret. Au final, l'écriture a cette assurance communicative qui met en confiance les téléspectateurs : il s'agit de nous donner juste ce dont nous avons besoin pour mesurer les enjeux. Cela n'empêchera pas d'accorder à la série le temps de pleinement se développer. Ce parti pris fonctionne d'autant plus que la sobriété d'ensemble pose une proximité immédiate.

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Sur la forme, Unité 9 est une série dont la réalisation est globalement de bonne facture. Visuellement, ce sont des couleurs froides, carcérales pourrait-on dire, qui dominent une photographie un peu épurée, mais résolument claire. Elle bénéficie également d'une bande-son richement pourvue en accompagnement musicaux qui pourtant ne sonnent jamais intrusifs, rythmant efficacement la narration pour ne faire qu'un avec le récit. Le générique est sobre, presque minimaliste, tout en ayant le mérite de poser immédiatement la tonalité.

Enfin si Unité 9 peut sonner si juste, elle le doit aussi aux interprétations solides et inspirées, proposées par un casting homogène. Guylaine Tremblay est le pivôt central de cette introduction : elle incarne Marie Lamontagne, capturant avec force toutes les émotions par lesquelles passe la mère de famille réalisant progressivement ce qui lui arrive et où elle va passer les prochaines années de sa vie. Pour l'accompagner dans le pilote, elle trouve un soutien dans l'énergique Suzanne Clément, qui interprète une Shandy qui a souvent tendance à faire le show plus que de raison. Les actrices sont tout aussi bien choisies à l'intérieur de la prison, avec une mention particulière à l'intense Eve Landry notamment, mais Céline Bonnier, Micheline Lanctôt, Sarah-Jeanne Labrosse et Catherine Proulx-Lemay trouvent toutes immédiatement le ton juste pour capturer leur personnage respectif. Dans le personnel, le nouveau directeur est interprété par François Papineau, tandis que Salomé Corbo et Mariloup Wolfe sont les deux gardiennes que l'on suit au grès du quotidien carcéral.

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Bilan : Unité 9 signe des débuts efficaces, posant les bases solides d'une fiction dramatique en milieu carcéral. Elle s'assure de la fidélité du téléspectateur grâce à une écriture dense, souvent juste, et plutôt habile dans sa manière d'introduire les différents personnages. L'approche est sobre, presque clinique dans la mise en scène de la prison, mais avec une intensité émotionnelle qui n'en est pas moins perceptible dans les scènes clés. Tout en entreprenant de traiter les grandes problématiques légitimement attendues du fait de son cadre, ce sont avant tout des destins de femmes que la série va nous relater. L'entrée en matière est réussie, le potentiel est là ; je serai donc au rendez-vous pour la suite de la série.

Mine de rien, Unité 9 est le premier pilote Nord-Américain de ces dernières semaines à m'avoir donné envie, sans réserves, d'enchaîner immédiatement avec l'épisode qui suit. C'est un soulagement de l'avoir trouvé. Tant mieux s'il permet de s'ouvrir à un autre petit écran, francophone cette fois.


NOTE : 7,75/10

04/06/2012

(Pilote CAN) Continuum : le futur est entre ses mains... mais quel futur ?

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Un peu de science-fiction pour ouvrir la saison estivale, ça vous tente ? En ce qui me concerne, vous le savez bien, je suis toujours partante. Ces thèmes de voyage dans le temps et de sauvetage du futur, aussi classiques soient-ils, s'ils sont bien mis en scène, restent des valeurs sûres pour m'intéresser. Côté websérie, Le Visiteur du Futur reste une des rares que je regarde avec enthousiasme. Et dans le registre des séries nord-américaines, je garde même encore une certaine tristesse en songeant à l'annulation de The Sarah Chronicles... Autant dire que je suis le public qui peut, potentiellement, apprécier Continuum.

Initialement, c'est pourtant avec plus d'appréhension et assez peu d'espoir que j'ai lancé le pilote, la faute à une bande-annonce guère convaincante et à un résumé qui, soyons franc, sonnait trop le déjà vu et revu. Mais c'est peut-être un mal pour un bien parce que, finalement, c'est un démarrage très honnête que s'est offerte cette nouvelle série canadienne qui a débuté sur la chaîne Showcase dimanche 27 mai 2012. Dix épisodes ont à ce jour été commandés. A voir si le potentiel entraperçu peut grandir  !

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En 2077, les gouvernements ont failli. Les corporations s'y sont substituées, restaurant l'ordre et mettant fin aux anciennes formes ayant échoué. Le pays n'est plus une démocratie. Cependant, la situation ne fait pas l'unanimité. Un groupe terroriste veut faire prendre conscience de la situation. La scène d'ouverture nous fait ainsi vivre un attentat, avec un gigantesque gratte-ciel s'écroulant en arrière-plan. Plusieurs conspirateurs sont arrêtés par une équipe d'agents menés par Kiera Cameron. Ils sont par la suite condamnés à mort.

C'est le jour où leur exécution est programmée que tout va changer pour Kiera. Elle est chargée de surveiller le bon déroulement des opérations. Mais au dernier moment, leur chef brandit un objet qui fait disparaître tous ceux qui se trouvaient autour, la jeune femme comprise. Ils se retrouvent au même endroit, mais à une autre époque : en 2012. Tandis que les terroristes s'échappent dans ce nouveau monde, Kiera se retrouve prisonnière de ce passé, loin de sa famille. Assez naturellement, elle va prendre place aux côtés des autorités dès que les combattants venus du futur commencent à faire parler d'eux.

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Voyage temporel impromptu, héroïne devant sauver le futur de l'action d'un groupuscule dangereux, technologie révolutionnaire seulement en voie de développement avec un concepteur encore adolescent, paradoxes temporels à venir et sans doute quelques secrets à découvrir sur le façonnement de son monde tel que Kiera le connaît... Nul doute que tous les ingrédients sonnent de manière familière au téléspectateur. Naviguant quelque part dans la filiation directe d'une franchise comme Terminator, Continuum assume ses influences. La reconstitution du futur et de ses techniques offre un visuel de science-fiction assez intéressant et bien exploité, avec des possibilités qui font de Kiera une véritable super-flic dans notre présent de 2012. Certes, l'écriture ne fait pas dans la subtilité et on n'échappe pas à certains poncifs : la jeune femme n'est pas seulement policière, c'est une mère de famille qui veut retrouver son fils. Les motivations personnelles sont là pour humaniser le personnage, mais elles tirent sur une fibre émotionnelle peut-être un peu trop facilement. De manière générale, le traitement des personnages n'est pas le point fort de ce pilote.

En revanche, son grand mérite est de savoir bien installer un univers qui a du potentiel, à commencer par la relative ambivalence qui en émane. L'idée de grandes entreprises régissant le monde, ayant remplacé le politique, trouve forcément un écho particulier. Et puis, surtout, ce futur que Kiera défend est un futur dictatorial. Dans le même temps, les prétendus combattants de la liberté sont, eux, présentés clairement comme des opposants, méchants par excellence : la scène d'ouverture de l'attentat et les fusillades du dernier quart d'heure sont sur ce point de vue univoques. Continuum propose donc d'un côté des partisans de la démocratie terroristes, de l'autre une héroïne pro-dictature, et en filigranne quelques interrogations sur la manière dont les corporations sont arrivées où elles sont (/seront). Voilà une base de départ qui n'est que promesse, mais qui aiguise la curiosité. Tout dépendra de l'orientation future de la série : Kiera va-t-elle rester dans une logique de chasse à l'homme et d'obéissance ; va-t-elle découvrir des éléments qui vont l'amener à nuancer ses vues ? Le manichéisme ambiant n'est-il qu'apparent ? Reste que le pilote remplit sa fonction : il intrigue et propose une intéressante introduction.

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Sur la forme, il faut noter une reconstitution futuriste plutôt soignée qui est plutôt convaincante, après une scène d'ouverture "choc" à laquelle on assiste à l'attentat. Sinon, Continuum propose dans l'ensemble une réalisation classique, avec une priorité donné aux plans serrés. Les scènes d'action ne dépareillent pas non plus. Bref, un ensemble très honnête, qui ne se démarque pas particulièrement mais remplit efficacement son office.

Côté casting, les habitués de science-fiction nord-américaine ne seront pas dépaysés et croiseront dans Continuum bien des têtes familières. C'est Rachel Nichols (Alias, Esprits criminels) qui incarne l'héroïne du futur ; je l'ai assez aimée dans ces quelques moments où le masque tombe en prenant conscience de la situation inextricabe dans laquelle elle se trouve. A ses côtés, c'est Victor Webster (Mutant X) qui va l'assister au sein de la police locale. Erik Knudsen (Jericho) incarne quant à lui un adolescent à la grande destinée, puisqu'il sera le concepteur de la technologie dominante du futur et directeur d'une des plus puissantes corporations. Noter que dans le futur il est interprété par William B. Davis (qui restera éternellement l'homme à la cigarette de X-Files, ce qui a tendance à vous rendre instantanément tout personnage suspicieux). Enfin, on retrouve aussi à l'affiche Roger Cross (24, The Guard), Tony Amendola (Stargate SG1), Stephen Lobo (Artic Air, Painkiller Jane, Falcon Beach), Lexa Doig (Andromeda, Stargate SG1), Brian Markinson (The Killing, Caprica) ou encore Richard Harmon (The Killing).

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Bilan : Se réappropriant la thématique du voyage temporel de manière plutôt efficace, Continuum propose un pilote honnête et intriguant qui vaut surtout pour le potentiel que son univers ainsi posé laisse entrevoir. Derrière la présentation manichéenne des protagonistes de chaque camp, en arrière-plan, le régime dictatorial du futur peut promettre des développements très intéressants si, par la suite, la série sait jouer sur l'ambivalence manifeste des causes et des moyens pour et par lesquels chacun se bat.

Au fond, il est bien trop tôt pour dire si Continuum saura exploiter véritablement les nuances de son cadre, mais pour le moment, la téléspectatrice amateur de science-fiction que je suis a envie de lui donner sa chance.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série :