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14/07/2013

(Pilote AFRQ SUD) Room 9 : une unité de police sud-africaine face au surnaturel

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Nouveau pays, et même nouveau continent en ce dimanche estival ! Aujourd'hui, je vous propose de traverser la Méditerranée, direction l'Afrique. Jusqu'à présent, mes incursions sur ce continent ont été le plus souvent indirectes (une série étrangère y entraînait ses personnages, telle Kidnap and Ransom). J'ai cependant eu deux principales expériences, belles et dépaysantes, sur ce continent. D'une part, la superbe The No. 1 Ladies' Detective Agency grâce à laquelle la BBC et HBO nous glissaient aux côtés d'une détective au Botswana. Et d'autre part, celle qui était ma seule série sud-africaine, la déroutante Charlie Jade, une co-production avec le Canada, qui exploitait très habilement sa thématique de mondes parallèles.

C'est avec ces seules bases que je me suis lancée dans Room 9. Cette série a été diffusée sur une chaîne de la télévision publique, SABC1, du 12 novembre 2012 au 30 janvier 2013 (Pour un aperçu de la télévision sud-africaine, je vous invite à lire cet article très instructif : Saga afrikaans : la télévision sud-africaine pour les nuls). Si je peux vous en parler aujourd'hui, c'est qu'une chaîne du câble britannique, The Africa Channel, a entamé sa diffusion depuis le 8 juillet 2013. Room 9 est d'autant plus intéressante qu'elle tranche dans un paysage audiovisuel sud-africain dominé par les soaps : c'est en effet une série qui relève de la science-fiction et du fantastique. Comme l'expliquent ses créateurs, le précédent Charlie Jade a joué, en plus de toutes les influences de séries étrangères du genre. Room 9 est donc une initiative intéressante... même si son pilote ne manque pas de problèmes.

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Room 9 se déroule dans un monde alternatif ou dans un futur proche, au sein d'une mégalopole nommée New Azania, laquelle évoque au téléspectateur de grandes villes comme Johannesburg ou Nairobi. L'Afrique du Sud est désormais divisée en plusieurs grands "secteurs". Dans ce contexte, la série met en scène une unité de police spécialisée dans l'occulte. Surnommés ironiquement par leurs collègues les "Zombie Cops", ses membres sont sollicités dès que les forces de l'ordre se retrouvent face à un crime touchant au sacrilège, à l'inexplicable... en résumé, impliquant peut-être le surnaturel. En fait, ce sont toutes les affaires que nul service ne veut, celles qui semblent impossible à résoudre, qui leur échouent.

Au cours du pilote, une nouvelle détective, Alice Kunene, est affectée à l'unité. Pour son premier poste, elle est pleine d'ambitions, ne se doutant pas un seul instant de la réalité du service dans lequel elle débarque. Elle doit immédiatement s'adapter aux méthodes de son collègue, un vétéran du nom de Gabriel Harkness. Alors que ce dernier a tendance à voir le surnaturel à l'oeuvre derrière bien des cas, la jeune femme lui oppose vite un scepticisme rationnel et rigide. Parmi les autres membres de l'unité, Alice doit aussi apprendre à travailler avec Ruby Prins, une jeune medium aveugle employée comme documentaliste, et Solomon Onyegu, un Nigérian adepte du Voodoo, expert dans le domaine du paranormal.

Dès son premier jour en tant que détective, Alice se retrouve introduite malgré elle dans une lutte létale face aux créatures de ses pires cauchemars.

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Du point de vue du téléspectateur européen, l'originalité de Room 9 tient évidemment à son cadre. De la même façon que s'installer devant une anthologie comme Hometown Legends était une porte d'entrée intéressante pour plonger dans le folklore surnaturel sud-coréen, visionner Room 9 permet à l'amateur de fantastique de découvrir des créatures propres aux légendes sud-africaines. Ainsi, face au meurtre horrible qui constitue l'enquête du pilote, c'est l'occasion d'apprendre ce qu'est un tokoloshe, une créature crainte de la mythologie Zoulou. Pour la suite, la série promet des figures plus familières peuplant toutes les histoires horrifiques : dans la présentation faite par Harkness, c'est toute la palette du surnaturel qui est mobilisée pour l'occasion, allant des poltergeist aux cultes sataniques, en passant par des vampires... Sur le papier, cette réappropriation sud-africaine pouvait donc aiguiser la curiosité. Le résultat laisse une impression plus mitigée : l'exploitation de la spécificité du background ne semble pas une priorité. De même, les particularités et tensions propres à la société sud-africaine (le fait d'associer à Harkness, Alice, qui est une personne de couleur, est pourtant d'importance) sont tout juste mentionnées. Le pilote se contente du minimum, posant vaguement quelques jalons mais sans réussir l'immersion attendue.

En fait, Room 9 est une transposition, sans valeur ajoutée, de tous les plus classiques ressorts narratifs - d'aucuns qualifieraient de "clichés" - que l'on croise dans trop de fictions mettant en scène des enquêteurs du surnaturel. La série cède à de nombreux stéréotypes, à commencer par la composition de son duo principal, avec le croyant et la sceptique, lesquels sont destinés à s'opposer pour découvrir à terme qu'ils forment une paire complémentaire. Plus problématique, l'écriture manque cruellement de subtilité, ayant tendance à surligner les points clés comme les petits clins d'oeil, sans laisser une seule fois l'initiative à l'imagination et à la réflexion du téléspectateur. Par exemple, nommer un personnage principal "Alice" et vouloir lui faire découvrir un monde inconnu, le symbole est bien vu en théorie. Mais était-il nécessaire de faire énoncer à voix haute par son collègue, dès son introduction, ce clin d'oeil à Lewis Carroll logiquement déduit par le téléspectateur ? La suite du pilote confirme cette tendance à ne laisser aucun non-dit, ni même d'inconnu sur ses personnages. Recourrant à des dialogues (proches du monologue parfois) dont les lignes apparaissent comme une exposition extrêmement artificielle, l'épisode donne clé en main toutes leurs motivations et les raisons pour lesquels ils réagissent de telle manière face au surnaturel. Il s'agit donc d'une première approche démystificatrice et peu habile qui peine à retenir l'attention.

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Sur la forme, Room 9 a d'évidentes limites notamment budgétaires, ce qui peut poser problème lorsque l'on souhaite proposer une incursion dans le fantastique (avec ses effets spéciaux). Seulement le reproche à adresser au réalisateur sera surtout le fait qu'il s'enferme dans une forme très académique, ne faisant preuve d'aucune réelle initiative pour tenter de dépasser ces contraintes et de glisser le téléspectateur dans le genre horrifique. Ce pilote ne se construit pas d'identité visuelle particulière, se limitant seulement à quelques effets d'ambiance. C'est tout l'inverse de ce qu'avait été capable de réaliser Charlie Jade sans requérir la moindre débauche de moyens. Un point positif cependant, la série dispose d'un (long) générique : cf. la première vidéo ci-dessous.

Côté casting, enfin, Room 9 souffre sans doute d'une direction d'acteurs assez en retrait, mais également peut-être de leur inexpérience. Alice Kunene est interprétée par Zethu Dolmo, et son nouveau collègue policier qui l'initie à l'univers de cette unité policière particulière par David Butler (Rhodes, Life is Wild). Anthony Oseyemi (aperçu dans la saison 3 de Strike Back), Angela Ludek et Elné Pretorius complètent la distribution principale. Notez que si Room 9 reste une série assez générique, il est un point sur lequel elle ne fait pas l'impasse, c'est la langue. Elle mélange constamment anglais et d'autres langues locales (que je ne saurais pas identifier). Les passages qui ne sont pas parlés en anglais sont sous-titrés (The Africa Channel est une chaîne anglaise), mais il y a des échanges où les langues se mélangent, et quelques expressions échappent au téléspectateur. Reste que cette immersion linguistique est la bienvenue : à défaut de voir développer le décor, elle est l'occasion de rappeler dans quel pays la série se situe. Un véritable dépaysement linguistique est ainsi permis.

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Bilan : Room 9 a certes pour elle, du point de vue d'un téléspectateur européen, un intérêt culturel, grâce au survol de quelques créatures du folklore mythologique sud-africain, ainsi que grâce à une immersion linguistique aboutissant à un mélange de langues qui reste une garantie de dépaysement. Malheureusement, son pilote souffre de trop de maladresses d'écriture et de limites de mise en scène pour être convaincant. Cependant l'initative d'une telle fiction de fantastique/science-fiction, au sein d'un paysage audiovisuel sud-africain peu porté sur ce genre, reste intéressante à noter en terme de créativité.

En résumé, pour une première incursion sud-africaine dans le fantastique, je vous recommanderai plutôt de vous intéresser à Charlie Jade [La bande-annonce], d'autant plus que cette dernière est disponible en DVD en France. Dotée d'une histoire complexe et ambitieuse, elle bénéficie d'une ambiance vraiment à part qui plaira aux amateurs.

Reste que cet article sur Room 9 m'aura permis d'inaugurer une nouvelle catégorie sur My Télé is Rich! : les séries africaines. Une catégorie qui n'attend que ma curiosité (et des accès à ces fictions) pour s'enrichir de nouveaux billets ! L'été, c'est aussi l'occasion d'expérimenter et de voyager vers de nouvelles terres sériephiles.


NOTE : 4,5/10


Le générique de la série :


La bande-annonce de la série :

30/12/2009

(Ma DVDthèque idéale) Cinq dramas canadiens des années 2000


Les séries canadiennes ont longtemps souffert en France d'une exposition relativement confidentielle. Si on a pu constater des progrès importants, notamment initiés avec la diffusion en prime-time de ReGenesis par Arte, il reste encore beaucoup à faire.

Si je ne connais malheureusement que de trop loin les productions de ce pays, voici cinq séries canadiennes de cette dernière décennie que j'accueillerais volontiers dans ma DVDthèque idéale.

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Charlie Jade (co-production avec l'Afrique du Sud) (Space, 2005)

Cette série, qui ne comporte qu'une seule saison, est un petit OVNI télévisuel qui mérite vraiment le détour. S'inscrivant dans le genre fantastique, elle met en place un univers sombre, exploitant habilement la thématique des mondes parallèles. Le héros, Charlie Jade, est un détective privé, vivant dans une vaste mégalopole industrielle, Cape City. A la suite d'une rencontre avec une jeune femme perdue, il va découvrir l'existence d'un univers où coexistent trois réalités (l'Alphaverse, le Betaverse et le Gammaverse), dont l'équilibre est sur le point d'être rompu par les actions d'une puissante entreprise de son monde, Vexcor Technologies. Charle Jade est une série déroutante et intrigante à plus d'un titre. A partir d'un budget minimal, elle parvient à créer une atmosphère inhabituelle, impossible à catégoriser, sur la forme comme sur le fond. En effet, la réalisation verse déjà dans l'originalité, exploitant filtres de couleur et cadrages étranges pour créer une impression diffuse de mystère, laquelle est renforcée par un style de narration relâché, qui donne à l'ensemble un ton presque poétique.
Avec quelques effets de style et une histoire complexe, la série réussit la surprise de parvenir à exercer une véritable fascination sur le téléspectateur, qui suit ces aventures avec curiosité, très intrigué. En somme, un OVNI télévisuel très particulier, à découvrir.

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Durham County (The Movie Network, 2007-..)

Durham County est une série policière atypique. Bien loin des formula show classiques, les enquêtes ne s'y succèdent pas au rythme saccadé d'une par épisode, mais, au contraire, les intrigues s'étalent, se complexifient et prennent progressivement toutes leurs dimensions. Dans l'atmosphère presque oppressante, voire étouffante, de Durham, sous ces poteaux électriques à perte de vue, nous suivons Mike Sweeney, un policier, qui emménage dans cette nouvelle ville au début de la série, accompagné d'une famille déjà très éprouvée par le cancer de sa femme, et avec l'espoir de repartir à zéro. A partir de cette base, Durham County va à merveille exploiter de solides scénarios, d'où ressort une ambiance pesante. Elle fascine également par l'esthétique de ses images, dominées par des couleurs froides, qui colle parfaitement au ton de la série.
La saison 3 de cette série trop méconnue est actuellement en préparation : une expérience téléphagique à tenter !

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Intelligence (CBC, 2006-2007)

Série sombre, elle nous plonge dans les rouages du crime organisé de la région de Vancouver, en s'intéressant tout particulièrement aux rapports étroits et parfois flous qu'entretiennent les autorités et les mafieux. Au milieu de ce champ de bataille urbain, où manipulation et infiltration règnent au sein même de chacun des camps, où tout se monnaye et où la clé du pouvoir réside dans la détention de parcelles d'information, Jimmy Reardon occupe une position prééminente au sein du crime organisé de Vancouver. A la suite d'un concours de circonstances, il va être amené à collaborer avec celle qui dirige la lutte contre le grand banditisme. Intelligence parvient à générer un microcosme complexe, où domine une étrange consanguinité. A la croisée des genres, policier, gangster et espionnage, cette série constitue une des belles réussites canadiennes de ces dernières années. Parmi les nombreuses têtes connues du casting, figure notamment Ian Tracey (Coroner DaVinci).

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ReGenesis (The Movie Network, 2004-2008)

"The future is here. Bioterrorism. Designer babies. Frankenfoods. Suddenly Humanity possesses the ability to play god. But is it progress-or madness? Will cutting-edge science be our salvation? Or our demise? The Pandora's box of biotech is wide open. Have we gone too far ?"

Cette série, qui se présente sous la forme d'un thriller scientifique, nous introduit au sein du Norbac, un organisme nord-américain créé pour étudier et faire face aux menaces biologiques et sanitaires que l'avancée des sciences, ou encore les attaques terroristes, font peser sur les sociétés occidentales. Tout en sensibilisant à divers enjeux actuels, la série amène à s'interroger sur les limites et l'utilisation des sciences. Son attrait réside dans le fait qu'elle parvient à conserver un équilibre entre les enquêtes scientifiques, menées par les membres d'une équipe bigarée et soudée, et leur vie personnelle. Progressivement, ReGenesis va d'ailleurs, au fil des saisons, de plus en plus s'intéresser à ses personnages, auxquels le téléspectateur s'est attaché. Tandis que la première saison avait constitué un vaste "toutélié" conspirationniste où tout s'emboîtait à la fin. Même si la qualité fluctue, l'intérêt du téléspectateur ne se dément pas pour cette série très intéressante, qui traite avec beaucoup de sérieux et de rigueur d'une thématique scientifique, insuffisamment exploitée à bon escient dans le petit écran.

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Slings & Arrows (The Movie Network, 2003-2006)

"To be, or not to be: that is the question : Whether 'tis nobler in the mind to suffer the slings and arrows of outrageous fortune, or to take arms against a sea of troubles, and by opposing end them?" (Hamlet, Acte III, Scène I)

Ce petit bijou méconnu nous plonge dans un milieu peu exploré par les fictions télévisées : le théâtre. Elle se propose de nous faire vivre le quotidien tumultueux, souvent rocambolesque, mais toujours intense, d'une troupe de théâtre. Chacune des trois saisons qu'elle comporte va être consacrée à la mise en scène d'une pièce particulière de Shakespeare : Hamlet (dont elle tire son titre, en saison 1), Macbeth (saison 2) et enfin Le roi Lear (saison 3).
Slings & Arrows
se révèle très vivante et attachante. Elle nous narre, sur un rythme dynamique, la vie de cette troupe, dirigée par une personnalité haute en couleur,
Geoffrey Tennant (incarné par l'excellent Paul Gross (Un tandem de choc)), un acteur talentueux mais quelque peu instable mentalement, dont le caractère et les lubies créent souvent plus de soucis qu'il n'en résoud. Tour à tour sarcastique, drôle, émouvante, voire parfois cynique, cette dramédie alterne habilement les genres, pouvant passer avec subtilité du rire aux larmes en un clin d'oeil.
C'est une série originale qui rappelle encore une fois toute la richesse du petit écran : à découvrir sans hésitation !