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02/11/2011

(K-Drama) Gye Baek (première partie) : une fresque épique vers la chute de Baekje

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S'il y a bien un genre de séries dans lequel ma sériephile s'épanouit tout particulièrement, ce sont les sageuk (séries historiques sud-coréennes). Cette année, par manque de temps, à l'exception de Warrior Baek Dong Soo qui versait plus dans le divertissement d'action que dans le véritable épique, je me suis surtout consacrée à des sageuk relativement courts. J'en ai volontairement laissé d'autres de côté, comme The Duo ou The Princess Man, en attendant d'avoir plus de temps. Mais l'appel était devenu trop fort en cette fin de mois d'octobre ; et l'offre trop alléchante...

A la différence de Tree With Deep Roots, mélange historique de thriller et politique, qui s'adresse à un public plus large au-delà des seuls amateurs du genre, Gye Baek est un drama conçu prioritairement pour satisfaire le public friand de ces épopées classiques aux accents souvent tragiques. Diffusé sur MBC depuis le 25 juillet 2011, il comprendra 32 épisodes et s'achèvera au cours de ce mois de novembre en Corée du Sud. Il y a dix jours, lorsque j'avais décidé de progresser plus avant dans ce drama sur les conseils de Mina, j'envisageais de faire une review classique de "pilote", c'est-à-dire, pour un sageuk, après avoir visionné les 4/5 premiers épisodes. Mais Gye Baek est, avouons-le, la raison pour laquelle j'ai terminé mes quelques jours de vacances plus fatiguée que je ne les avais commencés... Et c'est pourquoi cette review, que je n'ose plus appeler "pilote", traite en fin de compte de la première partie du drama, soit 16 épisodes.

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Gye Baek se déroule au VIIe siècle, à la toute fin de la période connue sous le nom des Trois Royaumes, qui étaient composés de Silla, Baekje et Goguryeo. La péninsule coréenne s'apprête en effet à être unifiée sous la domination de Silla. Ce drama n'est pas l'histoire d'une conquête glorieuse, il apparaît au contraire comme un hommage au courage des déchus. C'est en effet la fin de Baekje qu'il entreprend de nous raconter, à travers un récit romancé de la vie du dernier grand général de ce royaume, Gye Baek. De sa naissance jusqu'à l'ultime et célèbre bataille de Hwangsanbeol, où les armées de Baekje, en sévère infériorité numérique, furent entièrement détruites, Gye Baek va nous relater les derniers soubresauts d'un royaume qui sera annihilé quelques années après cette défaite militaire capitale.

Le drama débute, avant même la naissance de son personnage principal, au milieu des troubles et de la contestation entretenue par la seconde épouse du roi contre la reine, dont le tort principal est d'être originaire de Silla. Le prince et héritier présomptif, son fils Euija, fait l'objet de tentatives d'assassinats que seule l'admirable dextérité du maître d'arme qu'est le général Mu Jin permet d'endiguer. Mais si ce n'est pas la force, cela sera le complot qui fera tomber la reine et entraînera dans sa chute son protecteur militaire et la famille de ce dernier. Au cours d'une nuit tragique de mise à exécution du plan des opposants, lesquels se cachent derrière une confrérie d'assassins du nom de Wi Je, la reine préfèrera la mort au déshonneur. Par la ruse, le prince Euija parviendra à se maintenir en vie auprès de son père, à la cour. Tandis que Mu Jin perdra sa femme, qui n'a que le temps de donner naissance à leur fils, Gye Baek.

Les inimitiés ainsi forgées dans le sang, et alors que les confrontations ultérieures provoquent d'autres drames, une quête de revanche va guider les pas de chacun... Au détriment de Baekje ?

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Le premier attrait de Gye Baek réside dans le souffle épique qui traverse et porte le récit. Le qualificatif de fresque a rarement semblé aussi approprié que face à ce drama aux accents résolument héroïques et tragiques. Mêlant aux destinées personnelles de ses protagonistes le sort plus incertain de tout un royaume, la série se révèle riche en émotions. Eprouvante et poignante par moment, jubilatoire et savoureuse à d'autres instants, elle est en plus dotée d'un sens du détail appréciable, grâce auquel rien n'est jamais anodin et tout finit par se recouper. Révélatrice de cette ambiance prenante, l'ouverture du premier épisode, sur cette dernière bataille déséquilibrée dont l'issue est connue, propose des scènes qui marquent d'emblée par leur solennité et leur intensité : le téléspectateur se retrouve ainsi instantanément happé par l'histoire et ses enjeux.

De manière plus générale, il faut saluer l'équilibre, certes fragile et parfois vascillant, dont fait preuve cette première partie de Gye Baek. La série trouve le juste dosage entre les phases d'action, chorégraphiées avec sobriété mais toujours beaucoup de conviction, et le decorum figé des intrigues de cour et autres conciliabules de palais. Les affaires royales, adoptant un schéma géopolitique classique à la période des Trois Royaumes, restent très accessibles. Comme dans tout sageuk traditionnel, le scénario se construit de manière cyclique : les éléments d'une confrontation prochaine sont d'abord introduits, jouant sur une tension de plus en plus palpable, pour enfin éclater et offrir un ou deux épisodes en apothéose. Puis, s'enchaîne une brève période de transition où le renouveau des rapports de force est enregistré, avant de recommencer ensuite un nouveau cycle qui suivra le même schéma. Cela aboutit à un ensemble homogène et rythmé, sans temps mort notable, où l'intérêt du téléspectateur ne se dément jamais.

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Outre son sens du rythme et de l'épique, Gye Baek doit également beaucoup à ce qui reste la grande force des k-dramas : sa dimension humaine. Elle bénéficie en effet d'une galerie de personnages forts, en mesure d'impliquer émotionnellement le téléspectateur. Il ne faut pas se laisser abuser par le titre qui renvoie la fausse idée d'un simple biopic sur ce général de Baekje. Gye Baek est en effet un véritable drama choral, comme le sont les sageuk les plus enthousiasmants. La série laisse une place à chacun de ses protagonistes, pour grandir, pour mûrir et pour nuancer leur personnalité, acquérant ainsi une réelle épaisseur. Loin d'offrir un simple récit manichéen, tout en prenant parti pour ses héros, le drama s'attache surtout à esquisser le reflet d'une humanité à la faillibilité troublante.

Manifestant un sincère intérêt pour chacun de ses protagonistes, Gye Baek s'assure une assise humaine solide. La série fait le choix d'offrir un traitement relativement égal à son duo principal, faisant du prince Euija un pendant parfait à l'impulsivité initiale de Gye Baek. Leur alliance, scellée par les tragédies des premiers épisodes, permet opportunément de dépasser le vague triangle amoureux pour se concentrer sur des enjeux autrement plus importants, touchant au sort même du Royaume. Avec beaucoup d'habileté, la série éclaire l'ambivalence des motivations de tous les protagonistes. Sous couvert de la notion polysémique d'"intérêt du royaume", tout et son contraire sont prônés et perpétrés : il est difficile de percevoir où s'achève la poursuite de quêtes très personnelles (de vengeance comme de pouvoir) et où débute la réelle préoccupation pour l'intérêt collectif. La figure de l'opposante, représentée par la reine Sa Taek Bi, incarne parfaitement tous ces paradoxes. Quant au roi, malméné au gré des rapports de force, il s'accroche avant tout au prestige de la couronne (il n'est pas sans rappeler par exemple le roi Kumwa dans Jumong). Au final, aucun personnage n'apparaît jamais unidimensionnel et c'est vraiment une des forces de l'histoire.

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Aussi enthousiasmant soit-il dans ses passages les plus fastes, au cours desquels je reconnais volontiers m'être laissée grisée, Gye Baek n'est pour autant pas exempt de défauts. Sageuk de 2011 qui a pris en compte la modernisation des codes narratifs subis par le genre au cours de la dernière décennie, il n'en demeure pas moins de facture classique. Il conserve ainsi un vrai sens de la théâtralisation parfois très poussé. Si le drama fait preuve d'un savoir-faire certain dans la mise en valeur de ces passages, il a aussi tendance à vouloir trop en faire. La décharge émotionnelle causée ne masque pas les raccourcis évidents (géographiques notamment), voire les facilités parfois gênantes du récit.

Il est flagrant que les scénaristes ont souvent préféré privilégier les effets et l'intensité de certaines confrontations, au détriment de la vraisemblance de plusieurs développements. Ce parti pris narratif peut diviser et donne assurément des arguments recevables aux détracteurs de la série. C'est sans doute pour cela que Gye Baek s'adresse, à mon avis, prioritairement aux amateurs du genre. Pour s'apprécier pleinement, il suppose de se laisser emporter par un récit qui laissera difficilement insensible les amoureux de fresques épiques. Tant que le rythme d'ensemble demeurera toujours aussi constant et qu'il continuera d'accorder un tel soin à ses personnages, le téléspectateur pardonnera les errances au profit de l'envolée émotionnelle suscitée par certains passages. 

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Sur la forme, Gye Baek est un beau sageuk qui allie les atours chatoyants des costumes traditionnels propres à ces dramas historiques se déroulant dans les cours royales et l'approche plus sobre liée aux destinées des gens du commun. La photographie est soignée et l'esthétique du drama reste globalement un vrai plaisir pour les yeux. De plus, la série ne manque pas d'une dose d'action appréciable, bien servie par les chorégraphies de combats. Quant aux reconstitutions de batailles, les scènes d'ouverture sont d'une intensité à saluer - de quoi plonger immédiatement le téléspectateur dans l'univers de la série.

Pour autant, Gye Baek n'atteindrait pas la dimension à laquelle elle parvient sans l'atout de choix que représente sa bande-son. Une fresque épique ne saurait exister sans ces morceaux, entraînant ou mélancolique, voire déchirant, qui vont accompagner les protagonistes tout au long de leur histoire. Le drama dispose ainsi d'une palette de musiques bien fournies qui savent parfaitement accompagner les passages clés de la série.

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Enfin, le dernier atout et argument de poids de Gye Baek est son casting. Gye Baek est en effet incarné par un des acteurs emblématiques de ce genre historique, Lee Seo Jin. Si dans certains rôles contemporains comme pour Freeze, il a pu me laisser quelques réserves, en revanche, il reste le premier acteur de sageuk à m'avoir marqué par la première série de ce genre que j'ai eu l'occasion d'apprécier, Damo. Certes, à ce jour, je ne fais pour l'instant que caresser le rêve de me lancer dans la fresque que représente Yi San et ses 77 épisodes. Mais même sans avoir eu pour le moment l'occasion de voir ce dernier drama, Lee Seo Jin est vraiment à sa place dans un sageuk et sait prendre la mesure des rôles qui lui sont confiés dans ce genre.

A ses côtés, on retrouve une distribution très solide : Jo Jae Hyun pour incarner un prince Euija qui joue sa survie au quotidien, passé maître dans l'art du subterfuge, la toujours majestueuse Oh Yun Soo ou encore la très sobre Song Ji Hyo. Parmi la galerie d'acteurs complétant la distribution, on croise Hyo Min, Jun Noh Min, Kim Yoo Suk, Jin Tae Hyun, Choi Jae Hwan, Jo Sang Ki, Kim Hyun Sung, Yoon Da Hoon, Ahn Kil Kang, Jung Sung Mo, Im Hyun Sik, Kim Dong Hee, Park Yoo Hwan, Go Yoon Hoo, Jang Hee Woong ou encore Cha In Pyo.

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Bilan : Vaste fresque aux accents irrémédiablement tragiques, Gye Baek est un drama passionnant, parcouru d'un souffle épique exaltant qui saura sublimer certaines scènes. Navigant entre deux approches, celle des destinées individuelles et celle du sort d'un royaume, le drama peut s'appuyer sur une galerie de personnages travaillés auprès desquels le téléspectateur se sent tout particulièrement impliqué. Privilégiant parfois le ressenti émotionnel à la cohérence narrative, il n'en demeure pas moins une de ces rares séries capables de susciter un enthousiasme immodéré et exaltant, que l'amateur de sageuk chérira et savourera avec un bonheur non dissimulé.

J'attends donc la seconde partie avec impatience (et prépare déjà mes mouchoirs).


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :


Le générique :


Une chanson de l'OST :

26/10/2011

(K-Drama / Pilote) Tree With Deep Roots (Deep Rooted Tree) : un thriller historique sous le règne du fascinant roi SeJong



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De retour en Corée du Sud en ce mercredi asiatique, pour se replonger dans un genre qui m'est très cher : les séries historiques. Cette semaine, j'ai mis à profit un peu de temps libre pour découvrir les sageuk actuellement diffusés au pays du Matin Calme. Si je me suis laissée emporter par le souffle épique de Gye Baek sur les conseils avisés de Mina (un drama dont on parlera sans doute prochainement), c'est d'une série qui a débuté plus récemment dont je vais vous parler aujourd'hui.

Diffusé depuis le 5 octobre 2011 sur SBS, Tree With Deep Roots devrait comprendre un total de 24 épisodes. Pour adapter ce roman de Lee Jeong Myeong, l'écriture a été confiée à l'équipe qui se trouvait derrière le succès de Queen Seon Deok, les scénaristes Kim Young Hyun et Park Sang Yun. Après des débuts inégaux, un peu poussifs mais loin d'être inintéressants, je dois dire que Tree With Deep Roots m'a progressivement conquise. Voici donc mes premières impressions sur une série où il y a beaucoup à dire, des thématiques abordées jusqu'à certaines interprétations marquantes (notamment de la part d'un Song Joong Ki qui m'a véritablement bluffé).

[La critique qui suit a été rédigée après visionnage du premier quart du drama (soit 6 épisodes).]

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Tree With Deep Roots se déroule au début de l'ère Joseon, au XVe siècle, sous le règne d'un roi qui a marqué l'Histoire de la Corée, SeJong. Cependant, s'il réalisera effectivement de grandes choses pour son royaume, faisant notamment adopter un alphabet propre, l'hangeul, qui remplacera les signes chinois préalablement utilisés, le drama s'ouvre alors qu'il n'est encore qu'un jeune homme. S'il porte la couronne, il n'a pas encore l'exercice d'une charge dont son père conserve la responsabilité avec une main de fer. Le roi TaeJong savait en effet se montrer impitoyable avec tous ceux qu'il considérait comme des menaces potentielles contre son pouvoir. Une conception du gouvernement que SeJong ne partage pas, ce qui ne fait que compliquer les rapports tendus entre le père et le fils.

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Craignant les complots, et notamment une organisation, Mil-Bon, qui prône une remise en cause de l'absolutisme et des principes pour contenir et encadrer le pouvoir du monarque au profit des nobles, TaeJong exécutera de nombreux dignitaires, dont certains parents de la reine. A l'époque, Kang Chae Yoon était un jeune esclave au service d'un de ces hommes, considérés comme traîtres, dont TaeJong ordonnera l'élimination. Dans le tournant dramatique que prirent les évènements, Chae Yoon perdra son père et tous ses amis : leur seul tort était d'appartenir au noble en question. Il s'est alors juré de se venger de celui qu'il considère comme responsable de ces morts, celui qui portait officiellement la couronne : SeJong.

Vingt ans plus tard, ce dernier gouverne désormais effectivement son royaume, son père étant décédé des années plus tôt. Il s'efforce de mettre en oeuvre une gouvernance éclairée par des préceptes néo-confucéens, rassemblant autour de lui des intellectuels. De son côté, Chae Yoon est devenu un soldat royal, assassin entraîné qui attend le bon moment pour frapper. Mais alors que l'un des plus importants projets de SeJong est en passe de se réaliser, une série de meurtres frappe ceux qui y sont associés. Par un concours de circonstances, Chae Yoon se voit confier officiellement l'enquête. Il va mettre le doigt dans l'engrenage d'une conspiration et toucher des enjeux qui dépassent de loin sa quête personnelle.

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Mêlant aux codes traditionnels de la fiction historique un parfum de thriller intrigant, la seule lecture du synopsis avait fortement aiguisé ma curiosité. Cependant Tree With Deep Roots va connaître des débuts quelque peu poussifs. Afin de bien apprécier les enjeux des meurtres sur lesquels la série se concentrera ensuite, elle s'offre, après une séquence introductive trop grandiloquente, un long flashback de présentation, nous relatant les évènements qui ont modelé les différents protagonistes, à savoir SeJong et Chae Yoon. Le récit se révèle très inégal, principalement à cause de ce dernier. La tragédie personnelle de Chae Yoon emprunte des accents mélodramatiques forcés, versant dans un excès de pathos rédhibitoire. Si le téléspectateur comprend l'utilité narrative de ce prélude, il peine à se sentir impliqué.

Pourtant, en dépit de ces maladresses, Tree With Deep Roots retient l'attention et esquisse des promesses optimistes pour le futur. En effet, parallèlement, la série va dépeindre de façon absolument magistrale et fascinante la genèse du futur grand roi que sera SeJong. La vraie réussite de ces quatre premiers épisodes réside dans leur manière d'aborder les rapports du prince et de son père. C'est l'histoire de l'affirmation d'un jeune monarque et de son émancipation vis-à-vis d'une tutelle paternelle qui l'écrase. Admirable d'ambivalence, la relation du jeune roi couronné et de celui qui demeure le gouvernant effectif est dépeinte toute en nuances. Entre la figure du mentor et celle de l'oppresseur pouvant le détruire, TaeJong forge, à dessein ou non, le caractère de son fils. Les tueries qui vont briser la vie de Chae Yoon vont être un évènement catalyseur. Pour la première fois, SeJong trouvera le courage de s'opposer formellement à son père, même s'il n'en a encore pas les moyens. Ce fascinant portrait d'un prince, écrasé et tiraillé par la culpabilité qui pèse sur lui du fait des actions de son père, si différent de son aîné par son tempérament, captive le téléspectateur. Il permet ainsi de passer outre l'inégalité de ces débuts. 

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Lorsque Tree With Deep Roots bascule dans le présent, on aurait pu un instant craindre que la flamme entretenue grâce à SeJong ne vascille. Mais c'est alors que, enfin, le drama se décide à embrasser tout son potentiel. Il gagne rapidement aussi bien en consistance qu'en homogénéité. Certes, le personnage de Chae Yoon conserve quelques-uns de ses excès, mais le passage à l'âge adulte, et puis surtout son intégration dans des enjeux plus importants face aux meurtres qui se produisent à la cour, permettent à l'ensemble de s'équilibrer. Chaque protagoniste trouve sa place. SeJong garde son caractère atypique, cette sagesse détachée et calculatrice. Chae Yoon apporte son lot de scènes d'action qui viennent opportunément compléter un drama centré sur des jeux de pouvoirs très intellectualisés. Une fois lancé, le récit adopte un rythme soutenu, sans aucun temps mort. L'histoire progresse, les scénaristes préférant concrétiser les enjeux et ne pas faire traîner inutilement les choses. Le drama gagne si bien en intensité et en suspense qu'à la fin du cinquième épisode, j'ai pour la première fois directement enchaîné sur le sixième, incapable de m'arrêter.

Tree With Deep Roots s'affirme d'autant plus qu'il conserve sa spécificité initiale et les atouts qui faisaient son intérêt dès le début. En effet, il poursuit son exploration des diverses façons de concevoir le pouvoir. Le roi SeJong veut rompre avec les méthodes de son père : il n'entend pas gouverner par la terreur, mais réussir à initier la réflexion et le dialogue pour légitimer ses décisions. Nous sommes à une époque où Joseon doit encore s'enraciner sur les ruines de Goryeo ; il faut refonder les principes de gouvernement. La série prend le temps d'éclairer la démarche suivie par SeJong. Ce dernier s'entoure d'intellectuels, au sein du Jiphyeonjeon, et provoque les discussions autour des préceptes néo-confucéens censés constituer la base du régime. Cette façon de réfléchir sur le pouvoir, en recourant non aux armes, mais à une logique et à des préceptes philosophiques, est passionnante. Il s'agit d'un aspect qui apporte une vraie valeur ajoutée par rapport à des sageuk d'action/guerrier plus classiques.
 

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Sur la forme, Tree With Deep Roots n'a pas la flambloyance de certaines fresques historiques où chaque scène est un portrait à l'esthétique marquant. Le drama reste relativement sobre, assez classique dans la mise en scène comme dans ses teintes : le contenu plutôt sombre de ce thriller historique semble ainsi se refléter sur sa photographie. Le seul reproche que j'adresserais à la réalisation concerne sa tendance aux ralentis, notamment dans les scènes d'action : c'est excessif et cela dessert la dramatisation recherchée. Du côté de la bande-son, cette dernière est globalement entraînante et, même si elle est parfois un peu envahissante, elle complète bien le récit.

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Enfin, au casting, Tree With Deep Roots rassemble quelques valeurs sûres du petit écran sud-coréen. Il faut tout d'abord s'arrêter sur ceux qui vont nous familiariser avec les personnages dans leur jeunesse. Si le jeune Chae Sang Woo est vite agaçant dans sa façon de sur-jouer chacune des humeurs et des tragédies de l'enfance de Kang Chae Yoon (mais l'écriture du drama en est sans doute en partie ressponsable), en revanche, celui que les quatre premiers épisodes auront véritablement consacré, c'est Song Joong Ki. Ce dernier délivre une performance intense et nuancée, vraiment impressionnante, qu'il convient de saluer à sa juste valeur. Je n'avais pas accroché aux débuts de Sungkyunkwan Scandal l'an dernier, mais il m'a donné envie de redonner une chance à ce drama, en attendant d'autres projets futurs.

Du côté des adultes, Kang Chae Yoon est interprété par Jang Hyuk (Tazza, Chuno, Midas). J'ai souvent un rapport très ambivalent avec cet acteur. Pour le moment, il n'est pas parvenu à me débarasser des réserves nées dès les premières minutes du drama : il a tendance à en faire trop, peinant à humaniser son personnage. Cependant, ce dernier - et donc ses réactions - mûrissent au fil de l'histoire, ce qui devrait lui permettre de trouver un juste milieu. Face à lui, Han Suk Kyu (Hotel) interprète le roi SeJong, monarque étonnant qui déroute ses conseillers tout en faisant preuve d'une sagesse et d'une retenue inhabituelles. A leurs côtés, on retrouve notamment Shin Se Kyung (High Kick through the roof), Ahn Suk Hwan, Lee Jae Yong, Jo Jing Woong, Park Hyuk Kwon, Yoon Je Moon, Kim Ki Bang ou encore Shin Seung Hwan.

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Bilan : Bénéficiant d'une histoire intrigante, dans laquelle s'entremêlent les ingrédients d'un sageuk traditionnel et ceux d'un thriller à suspense, Tree With Deep Roots est un drama qui va s'affirmer progressivement. Après des débuts inégaux, marqués par le troublant et ambivalent portrait du jeune roi SeJong, la série embrasse son plein potentiel lorsqu'elle aborde véritablement le coeur de son sujet, nous confrontant aux meurtres qui ont lieu à la cour et à des problématiques plus vastes liées au pouvoir.

Si les premiers épisodes laissaient une impression mitigée, entre moments de vraie réussite et passages dispensables, arrivée au quart de ce drama, je dois avouer que je suis désormais captivée. Tree With Deep Roots conservera sans doute une partie de ses défauts, notamment les limites du personnage de Chae Yoon, mais l'ensemble apparaît solide et surtout forme un tout consistant qui mérite l'investissement. Les scénaristes ont déjà démontré leur savoir-faire, j'ai donc envie d'être optimiste concernant la suite de la série.   


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :

Une chanson de l'OST :

19/10/2011

(J-Drama / Pilote) Last Money ~Ai no Nedan~ (Price of love) : une intéressante immersion dans le milieu des assurances


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Retour au Japon en ce mercredi asiatique pour évoquer une des nouveautés de cet automne. Vous avez sans doute dû remarquer que la place occupée par le pays du Soleil Levant tend à s'accroître ces derniers temps sur My Télé is Rich!, équilibrant la répartition de ce rendez-vous hebdomadaire asiatique. Si la brièveté des dramas japonais par rapport aux sud-coréens joue sans doute en leur faveur, en raison du peu de temps libre dont je dispose actuellement, cela reflète aussi une vraie stabilisation de fond : c'est officiel, plus de cinq ans après le visionnage de mon premier j-drama, j'ai enfin trouvé mes marques devant ce petit écran japonais !

C'est pour cela que, cet automne, Last Money, diffusé depuis le 13 septembre 2011 sur NHK, ne pouvait que retenir mon attention, certitude confirmée par la première critique de LadyTeruki. Les dramas de NHK n'ont sans doute pas les synopsis les plus glamours à première vue, mais c'est dans l'éclairage qu'ils apportent de la société japonaise que réside tout leur attrait (souvenez-vous, Hagetaka). On se situe ici dans le même registre qu'un certain nombre de fictions de WOWOW, à l'image par exemple de Soratobu Taiya. Comprenant sept épisodes au total, Last Money s'achèvera mardi prochain au Japon ; cette critique portera sur les deux premiers épisodes de la série, visionné vendredi soir avec beaucoup d'enthousiasme. 

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Last Money se concentre sur le personnage de Mukojima Sakutaro. Ce dernier travaille pour une compagnie d'assurance, pour laquelle il enquête sur les demandes en paiement des clients, vérifiant si les conditions du contrat d'assurance souscrit sont bien remplies dans chaque cas et donc autorisant ou non le versement. Des hypothèses de fraude à l'assurance pour de faux soins médicaux jusqu'au versement d'assurance-vie suite à des décès dont il faut déterminer les circonstances exactes (suicide, ordre des décès dans un accident), il traite des affaires les plus diverses avec le même pointilleux sens de l'éthique qui le pousse toujours au bout de ses investigations, peu importe le résultat et les conséquences qui en découleront...

Ce professionnalisme n'est d'ailleurs pas toujours du goût de son entreprise, dont la politique commerciale se concentre plus sur son équilibre financier et la rapidité avec laquelle elle opère ses versements par rapport à la concurrence. Cela ne va donc pas sans provoquer parfois certaines tensions au sein d'une société où son obstination peut se heurter aux impératifs de chiffres fixés. Ses collègues se sont habitués à ce tempérament, et le dernier employé placé en formation à ses côtés comprend ainsi peu à peu les impératifs et les dilemmes moraux de ce métier. Mukojima Sakutaro a cependant peu de véritables amis, si ce n'est Yokomura Kazuki, avec qui il est inséparable depuis l'université. Or ce dernier a entamé une liaison extra-conjugale dans laquelle il s'investit plus que de raison ; mais sa maîtresse, mère célibataire apparemment sans histoire, semble nourrir des arrière-pensées financières qui devraient peut-être susciter la méfiance.

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Gagnant en épaisseur et en envergure au fil de son pilote, Last Money se révèle être un drama habile qui a parfaitement compris tout le potentiel de son sujet de départ. En effet, la série va décliner ce thème du milieu des assurances en s'attachant à en exploiter toutes les facettes. Se présentant sous une forme semi-procédurale, avec des enquêtes conduites à chaque épisode, elle introduit également divers fils rouges qui complètent et densifient le récit. Non seulement un enjeu dramatique est posé dès le flashforward d'ouverture, mais le drama esquisse aussi une promesse d'exploration du personnage principal à travers une affaire passée qui semble le hanter.

Doté d'une construction narrative maîtrisée, Last Money a de plus le mérite de savoir trouver le ton juste pour aborder ce sujet finalement très sensible. Il émane de cette série une impression d'authenticité et de réalisme qui renforce l'impact des histoires racontées. S'intéresser au milieu des assurances apparaît comme l'angle parfait pour tendre un miroir, parfois peu flatteur, souvent désabusé, vers la société japonaise et les rapports que ses membres entretiennent avec les sommes rondelettes que Sakutaro peut débloquer. De son entreprise jusqu'aux particuliers qu'il croise, le drama multiplie opportunément les points de vues pour offrir une vision d'ensemble guère optimiste. C'est un portrait nuancé qui est dressé, où les intérêts de chacun s'entremêlent souvent de façon conflictuelle.

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Outre cet éclairage social, c'est aussi dans un registre plus intime que Last Money retient l'attention. Faire jouer le mécanisme de l'assurance signifie généralement accident ou drame de la vie. Or la série démontre une faculté rare pour relater avec sobriété et une forme de pudeur parfaitement contenue ces tranches d'existence évoquées au cours de chaque enquête. Le choix de la première affaire traitée dans le pilote est judicieux : c'est celle d'une famille, tuée dans un accident de voiture, dont il faut retracer l'ordre des décès pour déterminer à quel héritier revient l'important montant de l'assurance-vie contractée. Tout en éclairant le rapport très différent des parents survivants face à cette somme, le drama verse logiquement dans un drame plus poignant qui ne saurait laisser le téléspectateur indifférent.

En filigrane, transparaît du propos tout en retenue de Last Money un certain pessimisme. Si quantifier la vie d'un être cher est chose impossible, le mécanisme de l'assurance semble réveiller les instincts les plus bas de notre nature humaine et vicier les relations. Non seulement la douleur s'efface parfois au profit de la préoccupation monétaire, mais c'est aussi la seule existence de ce système qui aiguise les appétits : au-delà des cas de fraude, que penser de la demande d'une maîtresse qui présente le fait d'être bénéficiaire du contrat d'assurance-vie de son amant comme une preuve d'amour véritable ? Derrière ces questions d'argent, c'est bien l'être humain qui est le coeur du sujet de cette série.

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Sur la forme, Last Money bénéficie de la sobriété caractéristique de ce type de drama, parfaitement adéquate à la tonalité d'ensemble. La réalisation opte pour une simplicité, sans le moindre effet de style, qui renforce l'impression d'authenticité du récit. Les couleurs sont globalement plutôt froides, avec quelques filtres teintés pour marquer certains changements de décor, notamment en extérieur. Pareillement, la bande-son reste minimaliste, se confondant complètement à l'histoire proposée.

Enfin, Last Money bénéficie d'un casting globalement homogène qui assure des prestations crédibles. Il est conduit par Ito Hideaki (Bengoshi no Kuzu, First Kiss), qui incarne cet agent-enquêteur d'assurances recherchant obstinément la vérité dans tous les cas qui lui sont soumis. A ses côtés, on retrouve Takashima Reiko (Bengoshi no Kuzu), Nakamaru Yuichi (membre du groupe KAT-TUN, Sushi Oji!), le toujours excellent Matsushige Yutaka (Fumo Chimai), Tabata Tomoko, Ibu Masatoas, Natsuyagi Isao ou encore Tanaka Tetsushi.

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Bilan : Le pilote de Last Money pose efficacement les bases d'un human drama consistant, dont la force réside autant dans une sobriété d'ensemble que dans les passages plus poignants inhérents aux drames de la vie croisés dans les affaires. Bénéficiant d'une solide construction narrative dans laquelle s'esquisse plusieurs fils rouges, son scénario, à tiroirs multiples, utilise habilement le prisme du monde des assurances pour éclairer toutes les problématiques de société, mais aussi plus personnelles, que ces questions d'argent peuvent soulever. En somme, Last Money apparaît comme le portrait authentique d'une société japonaise moderne. A suivre ! 


NOTE : 8/10


Quelques images de la série :

12/10/2011

(K-Drama) Little Girl K (Killer K) : un thriller d'action impitoyable et sanglant

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Après une parenthèse japonaise, retournons en Corée du Sud pour ce mercredi asiatique. Par manque de temps libre, je n'ai pas eu l'occasion de me lancer dans les nouveautés de ces dernières semaines. C'est donc vers des dramas plus courts, du câble sud-coréen, que m'ont emmené mes explorations. C'est ainsi que j'ai attéri devant Little Girl K, dont le pitch, assez atypique pour un k-drama, n'était pas sans m'évoquer certains parallèles avec des séries occidentales comme Nikita.

Diffusée du 27 août au 10 septembre 2011, sur la chaîne câblée CGV, cette série est très courte puisqu'elle comporte seulement trois épisodes d'environ 1 heure chacun. Ambitionnant de secouer le petit écran, elle investit le registre de l'action pure auquel se superpose des codes narratifs empruntés au thriller. Si le drama réussit sans doute par intermittence dans le divertissement d'action, il échoue cependant à acquérir une réelle solidité et épaisseur sur le fond.

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Cha Yeon Jin est une adolescente au caractère bien trempé qui n'a pas l'habitude de se laisser marcher sur les pieds. Son tempérament, auquel s'ajoutent d'indéniables qualités pour les différents arts de combat que sa mère lui a fait étudier dans sa jeunesse, lui attire souvent des ennuis. Elle vient même d'être expulsée de son lycée pour ces raisons. Sans père, vivant chez sa mère qui tient un modeste petit restaurant, elle mène malgré tout une vie heureuse et tranquille jusqu'au jour où tout va basculer...

Une nuit, la curiosité de Yeon Jin et de ses amis les amènent à perturber les affaires étranges de trafiquants qu'il aurait mieux fallu éviter. Non seulement Yeon Jin attire sur elle l'intérêt d'une organisation aussi puissante que létale, mais elle réveille aussi des éléments du passé de sa mère et de son origine, dont elle ignore tout, et qui vont faire exploser le confort de sa cellule familiale. Projetée dans un monde où le remord n'a pas d'emprise, Yeon Jin va survivre grâce à un désir de vengeance inébranlable.

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Little Girl K est une série très sombre, qui s'adresse prioritairement aux amateurs d'action et de combats sanguinolents. Efficace, la construction de l'intrigue ne laisse place à aucun temps mort. Si le premier épisode verse dans un relatif mélodrama un peu poussif pour poser les enjeux de l'histoire, la suite se révèle très dynamique et musclée. Empruntant les codes des fictions d'action pure, ne lésinant ni sur l'hémoglobine, ni sur les combats, le monde de cette série se révèle surtout très binaire : tuer ou être tué ; ami ou ennemi ; celui qui exécute les ordres et celui qui les donne.

Versant peu dans une nuance estimée superflue, repoussant au maximum les frontières de l'impitoyable, Little Girl K apparaît comme une oeuvre résolument désensibilisée, imperméable à toute notion de morale. La mort y est omniprésente, presque anecdotique. Et la mise en scène des confrontations démontre un goût certain pour la théâtralisation de duels entre deux protagonistes. On retrouve dans ce drama une influence manifeste des jeux vidéos, qui se ressent tant dans la manière de filmer (division de l'écran, caméra qui suit l'arme) que dans la construction de l'histoire.

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Divertissement d'action qui met les formes pour s'imposer dans ce registre, Little Girl K laisse pourtant un double sentiment d'inachevé. Paradoxalement, c'est tout d'abord le format court qui doit être mis à l'index : composée de seulement 3 épisodes, la série donne l'impression de ne faire qu'effleurer le potentiel d'une histoire qui reste inaboutie, comprenant trop de raccourcis, de facilités, de coïncidences, qui réduisent la portée du scénario. Certaines pistes, à peine explorées, sont déjà refermées. De manière générale, le drama souffre d'un manque d'homogénéité global : les passages de Yeon Jin au lycée restent par exemple des parenthèses trop déconnectées qui n'auront jamais vraiment justifiées leur présence, si ce n'est pour un artificiel emprunt à des codes plus classiques de high school drama .

Cependant, plus que le caractère minimaliste du scénario, le plus grand reproche que j'adresserais à la série est d'avoir fait le choix de complètement déshumaniser ses protagonistes. En dehors de quelques moments plus dramatiques qui tendent à un larmoyant trop appuyé, Little Girl K passe en effet complètement sous silence les légitimes conflits moraux que son histoire aurait pu légitimement engendrer. Yeon Jin se transforme en tueuse, portée par une haine indistincte qui lui fait exécuter sans discernement tous les ordres qui lui sont donnés. Laissant complètement de côté la psychologie de ses personnages, la série préfère privilégier une dynamique action/réaction plus primaire, efficace pour le thriller, mais peut-être un peu moins pour la cohésion du récit.

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Si elle sonne parfois un peu creux sur le fond, Little Girl K s'assure cependant une réalisation solide, globalement assez nerveuse, qui tente d'insuffler du rythme et réussit surtout les scènes d'action. Les combats disposent de chorégraphies plutôt correctes, le penchant pour le sabre des différents protagonistes permettant de renforcer le côté sanguinolent des affrontements, confirmant l'idée que ce drama mise bien plus sur la théâtralisation de son action que sur son histoire. En parfait écho, la bande-son se révèle aussi très rythmée : il y a une volonté d'entraîner et de dynamiser les scènes, en ne demandant au téléspectateur que de se laisser prendre au jeu.

Cependant, une autre des limites de Little Girl K réside dans son casting, qui oscille autour de performances moyennes manquant parfois de conviction. C'est le premier drama de Han Groo, par conséquent il est sans doute normal qu'elle doive trouver ses marques. Elle est plutôt convaincante en héroïne à poigne, évoluant surtout avec une certaine grâce énergique dans les combats. Mais son jeu, un peu monoexpressif, démontre toutes ses limites dès lors qu'il s'agit d'investir différentes palettes d'émotions. Son personnage concentre toute l'attention, laissant finalement peu d'exposition aux acteurs qui l'entourent, ces derniers peinant à se sortir des figures unidimensionnelles dans lesquelles le scénario les a enfermés. On retrouve notamment Kim Jung Tae, Park Hyo Joo, Baek Do Bin, Kim Roe Ha ou encore Jun Mi Sun.

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Bilan : Investissant sans retenue et parfois jusqu'à l'excès le registre du divertissement d'action pure, résolument sanguinolent, Little Girl K a le mérite de trancher dans le paysage télévisuel, le câble permettant d'aborder frontalement ces genres où la noirceur et la violence prédominent. Cependant la série peine à être plus qu'un exercice de style un peu vain : l'histoire s'efface trop souvent au profit des effets d'action, certes efficaces, mais qui ne peuvent occulter le sentiment d'inachevé qui prédomine sur le fond au bout de ces trois épisodes.

Une curiosité pas sans défaut, mais pas déplaisante, sans doute à réserver aux amateurs du genre.


NOTE : 4,75/10


La bande-annonce de la série :


Une chanson de l'OST :

05/10/2011

(J-Drama / SP) Hei no Naka no Chuugakkou : une école derrière les barreaux

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En ce mercredi asiatique, c'est toujours au Japon que je vous propose de rester afin d'évoquer un drama special visionné dernièrement et qui m'a beaucoup intéressé : Hei no Naka no Chuugakkou. Si c'est initialement le casting qui avait attiré mon attention (vous connaissez ma manie de surveiller avec soin les filmographies de mes acteurs favoris), le sujet de cette école publique située en prison, sortant de l'ordinaire et adoptant un cadre carcéral atypique, n'avait fait qu'un peu plus aiguiser ma curiosité.

Hei no Naka no Chuugakkou est un tanpatsu d'une durée totale de 2 heures, qui a été diffusé sur TBS le 11 octobre 2010. Il a été récompensé en juin dernier au 51e Festival de Monte-Carlo, en remportant le prix du meilleur film télévisé, tandis que Ken Watanabe, un des acteurs principaux, remportait pour son rôle le prix du meilleur acteur de film télévisé.

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Dans la ville de Matsumoto (préfecture de Nagano), la prison locale accueille le seul lycée public japonais situé en milieu carcéral. Les élèves sont tous des détenus actuellement en train de purger leur peine dans une des prisons du pays et qui n'ont jamais obtenu leur diplôme de fin d'études. Un conseil sélectionne chaque année méticuleusement les requêtes émanant de toute l'île, sélectionnant minutieusement, parmi les demandeurs, cinq prisonniers qui bénéficieront pendant un an de cet aménagement de peine particulier.

Hei no Naka no Chuugakkou va nous raconter une année scolaire à Matsumoto, de leur arrivée sur les lieux jusqu'au diplôme qu'obtiendront certains des personnages. Les prisonniers mis en scène, âgés de 20 à 70 ans, ont tous des parcours très différents, malmenés par la vie, la malchance ou la fatalité. De cette cohabitation - au cours de laquelle ils ne sont normalement autorisés à ne nouer aucun liens entre eux -, naît pourtant une forme de dynamique de classe qui va se construire peu à peu bon gré, mal gré, tendant vers l'acquisition du diplôme. Cette classe reste cependant à part, et le nouvel enseignant assistant nommé pour leur faire cours a bien dû mal à cerner son rôle et ce qui est entendu de lui et de ses élèves.

Cela va être une année d'apprentissage dans tous les sens du terme, pour tout le monde. 

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Si Hei no Naka no Chuugakkou mérite le détour, c'est tout d'abord pour l'originalité et l'ambition inhérentes au sujet choisi. On dit souvent (à juste titre) que la télévision japonaise a tendance à décliner à l'excès toutes les variantes possibles d'histoires d'enseignants, mais ici, point de figure messianique extraordinaire : le cadre carcéral domine, justifiant ainsi l'exploration de thématiques éducatives rarement abordées sous cet angle. Le rapport à l'enseignement est très différent d'un high school drama par le simple fait que les élèves sont adultes. Ils ne sont pas tournés vers le futur : leurs expériences ne se sont pas conclues de manière heureuse et ils purgent des peines de prison longues leur offrant des perspectives d'avenir limitées. La fiction va prendre le temps de s'intéresser à chacun d'eux, dressant des portraits, tout en ombres et lumières, de personnages ayant des aspirations et des histoires qui leur sont personnelles. A mesure qu'une étrange et hésitante émulation collective se crée au sein d'une "vie de classe" artificielle, le drama gagne en humanité, bénéficiant d'une écriture très sobre, souvent juste, où perce une forme de dignité qui sait toucher le téléspectateur.

Même si Hei no Naka no Chuugakkou dépeint une réalité nuancée, conscient que la vie n'offre pas de cadeaux, c'est pourtant aussi par son optimisme que la fiction va se démarquer. Tous ne réussiront pas dans leur défi d'obtenir ce diplôme symbolique, mais au cours de cette année, chaque intervenant, les prisonniers comme l'enseignant, aura appris sur lui-même et sur la vie en général quelque chose qui n'est pas quantifiable. Car c'est sans doute dans ce registre que ce drama parvient à exploiter tout le potentiel de son récit. L'enjeu n'est pas une simple acquisition de connaissances, comme elle pourrait l'être dans tout drama scolaire, mais c'est en réalité une recherche bien plus fondamentale : il s'agit de retrouver sa propre estime de soi. C'est en vérité autant pour faire face au regard des autres que pour soi-même que chacun est là. Le parcours en parallèle du nouveau professeur en est une illustration révélatrice et le parfait écho : alors qu'il déchire douloureusement ses rêves d'adolescence et l'espoir de devenir photographe, ce dernier va peu à peu comprendre le rôle qui lui est échu et retrouver un sens à son métier.

La conclusion de Hei no Naka no Chuugakkou viendra confirmer que la scolarité n'est qu'une façade dans cette belle histoire de redécouverte de soi et de réapprentissage de la vie, humaine comme sociale, permettant à chacun de se retrouver.

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Sur la forme, Hei no Naka no Chuugakkou présente une réalisation classique, quasi-minmaliste par instant. Le quasi huis clos offert par le cadre de la prison renforce l'impression un peu figée et théâtrale de la mise en scène. Ces effets apparaissent recherchés : la dynamique du récit n'en souffre pas, en revanche cela permet de se concentrer sur l'essentiel dans une histoire toute entière dédiée à ses protagonistes et au long cheminement qu'ils vont suivre au cours de cette année.

Côté casting, ce drama special réunit des acteurs japonais confirmés qui vont proposer une performance d'ensemble très solide, permettant de bien faire ressortir la dimension humaine de la fiction. Si Hei no Naka no Chuugakkou avait initialement retenu mon attention, c'est en raison de la présence d'Odagiri Joe (Jikou Keisatsu, Atami no Sousakan) qui fait partie de ces quelques acteurs nippons dont je surveille tous les projets avec attention. Il joue ici le rôle de l'observateur de ce groupe de détenus, enseignant cherchant lui aussi sa place et qui va apprendre beaucoup de cette année scolaire atypique. A ses côtés, on retrouve des acteurs très convaincants : Watanabe Ken (plus connu pour ses rôles au cinéma comme dans Le Dernier Samourai), Otaki Hideji, Suma Kei, Chihara Seiji, Sometani Shota ou encore Kadono Takuzo.

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Bilan : Bénéficiant d'un sujet original qu'il va savoir traiter avec des nuances, mais aussi beaucoup d'humanité, Hei no Naka no Chuugakkou est une très intéressante histoire d'apprentissage, où le cadre pseudo-scolaire cache en vérité une inspirante reconquête d'une estime de soi perdue, ainsi qu'un effort pour renouer avec la vie en société. Sans jamais verser dans la fable moralisatrice, ce drama toujours très sobre délivre un message teinté d'un relatif optimisme qui achève de conquérir le téléspectateur. Une curiosité à découvrir.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce :