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21/03/2012

(K-Drama / Pilote) Special Affairs Team TEN : une intéressante série policière

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Restons en Corée du Sud en ce mercredi asiatique ! J'écris souvent que je n'aime plus guère les séries purement procédurales. Comme toutes les affinités téléphagiques, cela n'a rien de bien figé, et je ne demande qu'à croiser justement des séries qui bousculent mes préconceptions. C'est ce qu'il s'est passé samedi soir lorsque je me suis installée devant le (long !) pilote de Special Affairs Team TEN. Initialement, je l'avoue, j'avais laissé mes préjugés l'emporter à la fin de l'année dernière (du procedural policier? non merci...), mais quelques échos plus récents ont fini par éveiller ma curiosité.

Special Affairs Team TEN a été diffusé sur la chaîne du câble OCN, du 18 novembre 2011 au 13 janvier 2012. Elle occupait un créneau tardif, puisque programmée le vendredi à minuit. De quoi permettre au gestionnaire du stock d'hémoglobine de la chaîne de laisser libre cours à son âme d'artiste pour reconstituer les crimes les plus sanguinolants. La série compte un pilote, qui est un douple épisode de 2 heures, et 8 épisodes ensuite d'1 heure (comptabilisés comme un total de 10). Après quatre épisodes vus (sur 10), la série a vraiment su me fidéliser. J'irai jusqu'à son terme !   

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La Special Affairs Team TEN est une unité spéciale de la police criminelle qui va être formée au terme du pilote. Elle a pour but de s'occuper des plus violents crimes qui ont été commis dans le pays ; ceux qui sont les plus complexes et restent souvent non résolus. Sa direction a été confiée à Yeo Ji Hoon. Ce professeur est un ex-détective de renom, à la réputation trouble, qui avait quitté son poste au sein de la police pour des raisons qui restent floues au début de la série. La première affaire, à laquelle se consacre le pilote, va permettre à Ji Hoon de rassembler autour de lui une équipe aux talents complémentaires. 

C'est en effet un trio efficace qui se constitue sous ses ordres. On y retrouve de jeunes recrues : Park Min Ho, un nouveau policier qui ne demande qu'à apprendre, et Nam Ye Ri, une jeune détective qui se morfondait jusqu'à alors dans des tâches subalternes, mais dont les qualités pour comprendre les gens et dresser leur profil lui ouvrent la voie vers cette unité. A l'opposé, le dernier membre, Baek Do-Sik, est un vétéran expérimenté, très obstiné et qui sait faire confiance à son instinct. La série nous propose donc de suivre ce quatuor dans leurs investigations, tandis que peu à peu, ils deviennent une "équipe".

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La première force de Special Affairs Team TEN tient à la tonalité choisie par le drama. Proposant un mélange des styles assez bien dosé, il alterne en effet entre drame pur et comédie avec un naturel qui rend le visionnage très agréable. Ainsi, lorsque l'épisode se focalise sur l'intrigue du jour, les passages sont généralement pesants, mettant en scène des crimes violents et/ou poignants. En revanche, lorsqu'il s'arrête sur les actions des personnages eux-mêmes, il est fréquent qu'il se permette des scènes soudain plus légères, voire même qui prêtent vraiment à sourire. Ces parenthèses ne remettent jamais en cause le liant du scénario, si bien que ce curieux cocktail fonctionne étonnamment bien à l'écran. Il rompt tout risque de monotonie et permet au téléspectateur de s'investir non seulement dans l'histoire du jour, mais plus globalement dans l'atmosphère de la série.

Le deuxième aspect qui permet à Special Affairs Team TEN de s'imposer dans son registre tient plus simplement à ses enquêtes. Celle du pilote, particulièrement complexe (d'aucuns diraient alambiquée), est d'une intensité psychologique qui ne saurait laisser le téléspectateur insensible. Le deuxième épisode est plus quelconque, mais à nouveau le troisième renoue avec ce jeu constant des fausses pistes multiples, face à une affaire compliquée dont on ne sait trop par quel bout la prendre. Dans l'ensemble, le scénario apparaît donc toujours bien travaillé. Et non seulement l'ensemble offre un lot de rebondissements suffisant pour ne pas s'ennuyer, mais le téléspectateur se laisse aussi surprendre par certaines issues ; la première enquête est un modèle du genre en terme de complexité ! Sans être brillante, la série soigne de façon très correcte son assise policière.

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Si le curieux mélange entre noirceur et détente adopté par Special Affairs Team TEN constitue sans doute sa valeur ajoutée la plus attractive, il convient également de ne pas négliger l'importance des personnages. Le drama semble porter un intérêt sincère à ses quatre protagonistes principaux. Il réussit à éviter l'écueil majeur où viennent s'échouer tant de cop shows de ce genre, celui de présenter un chef quasi-omniscient dont les subordonnés ne seraient réduits qu'à de simples faire-valoirs. Ici, au contraire, chacun a son rôle et trouve généralement sa place au cours de l'enquête menée. Cette complémentarité soulignée permet une réelle homogénéité, et le mot "équipe" prend finalement tout son sens.

Pour autant, cela ne signifie pas que Special Affairs Team TEN se démarque totalement de la structure classique à ce type de fiction. A la fois arrogant (parfois aux limites de l'antipathique) mais aussi brillant dans son genre, Ji Hoon a souvent un temps d'avance sur ses subordonnés, auxquels il communique rarement ses dernières intuitions. Dès le départ, la série insiste sur certains des traits les plus ambivalents de sa personnalité. Ses méthodes de travail discutables, sa façon de se placer dans la tête du tueur, en allant parfois jusqu'à des reconstitutions musclées, sont autant d'éléments qui indiquent qu'il y a sans doute quelque chose de sombre à explorer en lui. Les quelques indices donnés sur son passé ne font que renforcer cette impression.

Ji Hoon remplit donc parfaitement son rôle pour aiguiser la curiosité du téléspectateur, mais c'est tout à l'honneur de la série - et c'est sans doute ce qui fait sa force - de ne pas réduire l'intérêt humain de Special Affairs Team TEN à ce seul personnage principal, mais d'aménager un espace à chacun. Cela explique que l'on puisse, sans s'en rendre compte, s'attacher très vite à ce quatuor !

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Globalement solide sur le fond, Special Affairs Team TEN est également intéressante sur la forme. La réalisation est vraiment bien maîtrisée, avec un travail perceptible aussi bien au niveau de certains plans, que du montage global des épisodes découpés en chapitre. La photographie est belle : les teintes aux couleurs saturées soulignent la versatilité d'une atmosphère, tour à tour oppressante, puis légère. Quant à la bande-son, elle constitue un réel atout pour le drama. Non seulement elle utilise des musiques qui empruntent au rock ses morceaux les plus classiques, mais elle glisse également quelques morceaux originaux, souvent assez déchirants, qui contribuent grandement à construire la tonalité de la série. Cela faisait quelques temps que je n'avais pas eu de vrais coups de coeur en écoutant une OST : Breath, de Mad Soul Child aura été une belle découverte (cf. seconde vidéo après le billet) !

Enfin, Special Affairs Team TEN bénéficie d'un casting homogène, où les quatre acteurs principaux se révèlent convaincants dans le registre qui est attendu d'eux. Joo Sang Wook (That Fool, Giant, actuellement dans Feast of the Gods) joue parfaitement sur la froideur et la distance de ce professeur aux méthodes particulières. Jo An (Three Sisters) a la fraîcheur, mais aussi la nuance qu'il convient, pour interpréter cette jeune détective qui sait instinctivement comprendre ses interlocuteurs. Choi Woo Sik (à venir dans Rooftop Princess) se glisse aisément dans un rôle d'apprenti qui va beaucoup observer, mais aussi démontrer qu'il sait se débrouiller (même s'il s'agit dans un premier temps de courcircuiter les délais d'attente en allant draguer les secrétaires des autres services). Mais celui qui m'a le plus convaincu reste sans doute Kim Sang Ho (Prosecutor Princess, City Hunter) qui a une sacrée présence à l'écran : il joue un personnage de vétéran haut en couleur, laissant la part belle, mais sans pour autant en faire trop, à ses excès de théâtralisme comme à son pragmatisme. 

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Bilan : Série policière solide et intéressante, Special Affairs Team TEN doit beaucoup à son ambiance qui entremêle habilement les tonalités : à la fois très dure et sombre par moments, le drama est aussi capable de passages de détente bienvenue. Il trouve ainsi son style propre au sein de ce genre sur-exploité du cop show. Ne négligeant pas non plus ses personnages qui bénéficient d'une vraie épaisseur dans leur caractérisation, elle devrait séduire non seulement les amateurs de formula show policier, mais peut-être aussi au-delà, j'en suis l'exemple même. A surveiller !


NOTE : 7/10


Une bande-annonce :


Une chanson de l'OST (Breath, de Mad Soul Child) :
 

14/03/2012

(K-Drama) Korean Peninsula (Hanbando) (première partie) : un thriller de politique-fiction, vers la réunification des deux Corées ?


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Après plusieurs semaines passées au Japon, il est grand temps de repartir en Corée du Sud en ce mercredi asiatique ! Disons-le franchement, sur les grandes chaînes, cette saison hivernale n'est pas des plus enthousiasmantes, à l'exception notable de l'excellent History of the salaryman qui tranche agréablement dans cette torpeur (si vous ne deviez en retenir qu'un seul cette saison...!). Du côté des chaînes du câble, la morosité vient aussi des audiences et de cette barre fatidique des 1% au-dessus de laquelle leurs dramas n'arrivent pas à se maintenir. Cependant, parmi leurs nouveautés de février, j'avais notamment retenu une série dont le pitch m'avait intrigué : Hanbando (Korean Peninsula).

Diffusé sur CSTV depuis le 6 février 2012, les lundi et mardi soirs, ce drama s'achèvera normalement à la fin du mois d'avril, au terme de 24 épisodes [EDIT : Finalement réduit à 18 épisodes]. Cette sorte d'essai de politique fiction se proposant de nous conduire vers une Corée réunifiée aiguisait autant ma curiosité qu'il éveillait aussi une certaine méfiance. Au fond, Korean Peninsula, c'est sur le papier - et dans les faits également - une sorte de rencontre entre IRIS -ou Athena- et President, le tout saupoudré d'un parfum qui rappelle un film comme Joint Security Area. Le potentiel est clairement là ; les difficultés aussi. 

Pour rédiger cette review, je me suis quasiment mise à jour de la diffusion sud-coréenne et j'ai donc vu les 10 premiers épisodes (de quoi me forger une opnion éclairée). Vous vous en doutez, si j'ai pu effectuer un tel rattrapage, c'est que Korean Peninsula m'a intéressé. Sans être exempt de reproches, il m'a même agréablement surprise après certains échos négatifs que j'avais pu croiser. 

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Dans un futur proche (ou dans une réalité alternative), la Corée du Sud et la Corée du Nord se sont rapprochées grâce à des intérêts énergétiques communs. L'amélioration des relations s'est traduite, dans les symboles, par une équipe de football unifiée pour représenter la péninsule coréenne dans les compétitions internationales. Mais surtout, tous les espoirs reposent sur un projet de forage industriel, développé en coopération entre les deux pays, au large de l'océan. La station rassemble des personnels, techniques et de sécurité, du Nord comme du Sud, tout en étant dirigée par un scientifique sud-coréen réputé, Seo Myung Joon. 

Alors que l'exploitation est sur le point d'être officiellement lancée, pour marquer cette coopération incontournable, le président sud-coréen accueille le leader de la Corée du Nord, Kim Tae Sung, dans une vaste mise en scène diplomatique. Mais au sein du régime communiste, la frange militaire la plus dure ne voit pas d'un bon oeil ce premier pas vers la réconciliation. La station énergétique censée devenir un symbole de paix et d'union se transforme alors en objet de discorde : des troupes nord-coréennes la prennent d'assaut, avec pour objectif de s'emparer de la technologie au coeur du projet, dont seul le Sud a la maîtrise pour le moment. C'est le début d'une escalade des tensions entre les deux Corées, tandis qu'au Nord le coup d'Etat militaire a finalement lieu. 

Les rêves de réunification de Myung Joon, sous une bannière scientifique revendiquée, se retrouvent brisés par les évènements ; de même que ses projets d'avenir avec Lim Jin Jae, une scientifique nord-coréenne rencontrée lors de leurs études en Russie. Alors que de part et d'autre de la frontière, nombre d'officiels au pouvoir ont intérêt à préserver le statu quo de tension, Myung Joon est contacté par le secrétaire général de la Maison Bleue : roublard de la politique, celui-ci cherche une cause à défendre et un vrai projet pour les prochaines élections présidentielles. Pourquoi pas les rêves de paix et d'unité de ce scientifique, propulsé en héros de tout un pays par son attitude lors de la crise de la station énergétique ? 

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Présenté comme un blockbuster ayant les moyens de ses ambitions, Korean Peninsula est un essai de politique-fiction très classique en dépit de son sujet, dont le principal attrait va justement reposer sur cette perspective -utopique ou non- d'une possible réunification des deux Corées. Le concept est complexe, forcément politisé. Pour autant au-delà de certains stéréotypes, notamment du côté nord-coréen, entre les intrigeants et ceux qui ne demandent qu'à embrasser le capitalisme et ses douceurs, les débuts du drama sont plutôt bien pensés. S'ouvrant sur une période de "détente" et de collaboration au sein de la station énergétique, la série fait le choix de s'intéresser d'abord aux individus, et aux relations humaines qui se nouent entre eux (avec des scènes qui sont comme un écho à Joint Security Area), avant d'envisager les enjeux sur un plan strictement géopolitique. Tout en restant très calibré, sans surprendre, le drama balaie en somme toutes les thématiques légitimement attendues sur cet épineux sujet.

Reflet de son ambition initiale, la série refuse de se cantonner à un seul genre, essayant de jouer sur plusieurs tableaux à la fois. En effet, très vite, Korean Peninsula s'affirme dans un triple registre. Elle entreprend d'accorder et entremêler trois genres très différents au sein de son récit : de l'action qui l'oriente vers le thriller musclé, de la politique qui lui donne sa consistance et sa raison d'être, et enfin une romance, lien indéfectible qui transcende l'ensemble et permet le développement d'une dimension plus émotionnelle. Les dix premiers épisodes constituent ainsi une suite d'arcs narratifs au cours desquels un genre domine tour à tour, le temps d'un ou deux épisodes. Pour le moment, en dépit de quelques longueurs, il faut reconnaître qu'une des réussites du drama a été de parvenir à maintenir un relatif équilibre dans sa narration. Reste à savoir s'il sera capable de préserver cette homogénéité, que l'on sent parfois un peu précaire, tout au long de la série.

koreanpeninsulap.jpg Relativement fluide dans cette alternance des genres, Korean Peninsula s'impose d'abord comme un thriller efficace. La série réussit à bien orchestrer l'escalade des tensions entre les deux pays. Si elle ne recule devant aucune dramatisation, certains passages ressortent, comme la froide mise en scène du coup d'Etat militaire en Corée du Nord, avec une scène d'exécution à la descente d'avion assez glaciale. De plus, si je ne m'attendais pas forcément à autant d'aventures mouvementées ayant une consonnance proche des fictions d'espionnage, puisque les personnages sont des scientifiques, non des agents de sécurité, il faut reconnaître que les scènes d'action sont globalement bien exécutées. Le plus souvent sans en faire trop. Certes, le drama n'échappe pas à la tentation de certaines mises en scène un peu grandiloquentes - c'est le côté blockbuster -, mais il a le mérite de ne jamais perdre de vue la finalité de ces scènes. Si bien que, dans l'ambiance du moment, le téléspectateur se laisse prendre au jeu. 

Parallèlement, les quelques incursions politiques sont convaincantes : les rapports de force et la course au pouvoir ne sont pas sans rappeler les dynamiques qui fonctionnaient bien dans President, tout en conservant la particularité d'un drama orienté sur les rapports Nord-Sud. Korean Peninsula met l'accent sur une approche très pragmatique et sans concession de la politique. Myung Joon n'est pas un homme providentiel qui peut tout emporter, il est d'abord un scientifique avec un rêve et un intérêt très personnel, concrétiser cet amour impossible qu'il éprouve pour Jin Jae. A ce titre, il faut saluer l'effort fait par les scénaristes pour donner une crédibilité à leur relation. Leur passé commun renforce leur histoire, et lui donne un sens : il y a quelque chose qui sonne juste entre eux, et l'exploration permise par les flashbacks russes de leurs études est bien utilisée. Si le duo principal s'avère donc assez nuancé, la distribution des rôles qui s'opère au niveau des personnages secondaires est plus stéréotypée. Tout dépendra ici de l'évolution ultérieure : le drama sera-t-il capable de dépasser les archétypes en apparence préprogrammés ? 

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Si le fond peut soulever quelques critiques, en revanche, sur la forme, Korean Peninsula est indéniablement une belle réussite. La réalisation est parfaitement maîtrisée, avec une belle photographie quasi-cinématographique. La mise en scène n'est pas avare en utilisation de symboles, et parvient très bien à soutenir et accompagner le récit. La série n'a pas manqué de moyens budgétaires, et elle va ainsi pouvoir exploiter divers décors (le grand large dans l'océan, en Corée du Sud, Corée du Nord, mais aussi en Russie). L'insertion d'images d'archives "officielles" (pour les navires de guerre, ou les défilés militaires nord-coréens) se fait assez naturellement. 

Cependant, c'est sans doute sur le plan musical que le savoir-faire formel est le plus perceptible. En effet, le drama alterne entre trois approches dont le mélange est globalement bien équilibré et assez juste : on y croise des balades plus déchirantes pour les moments dramatiques, une petite musique instrumentale sacrément rythmée pour les phases d'action, mais qui sert aussi de transition entre certaines scènes, et enfin des chansons folk russes lorsque le passé rattrape les personnages. Tout cela renvoie l'impression d'un réel travail sur le background musical, et cela contribue de manière non négligeable à l'atmosphère de la série.

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Enfin Korean Peninsula dispose d'un casting globalement homogène et efficace. Au sein du duo principal, c'est Hwang Jung Min (That fool) qui s'en sort de la manière la plus convaincante ; son style sobre, axé sur la normalité de son personnage, offre le contraste recherché par rapport aux projets et aux idées, ambitions peut-être démesurées, qu'il porte. Face à lui, Kim Jung Eun (Lovers, I am Legend) met un peu de temps à être vraiment impliquée ; au début notamment, il y a quelques scènes où l'actrice manque de présence. Cependant, le basculement vers plus de dramatisation corrige ensuite cette inégalité, et à mesure que son personnage se développe et que l'on en apprend plus sur elle, elle va trouver progressivement sa place.

A leurs côtés, on retrouve une galerie d'acteurs, plus ou moins expérimentés, qui, s'ils jouent des personnages aux rôles clairement distribués, s'en sortent assez bien chacun dans leur registre. Kwak Hee Sung est le prototype parfait de l'agent d'action entièrement dévoué (qui de la cause ou de la femme l'emportera, l'avenir nous le dira). Jo Yi Jin apporte une fraîcheur et une énergie à son personnage de journaliste ambitieuse ; en dépit d'une tendance à sur-jouer, il est difficile de ne pas la trouver sympathique. Jo Sung Ha (Flames of Ambition) a cette impassibilité maîtrisée qui permet de rendre crédible ce secrétaire d'Etat qui se cherche une cause, et surtout un candidat à porter au pouvoir. On retrouve également Ji Hoo, Jung Sung Mo, Lee Soon Jae, Jung Dong Hwan ou encore Suh Tae Hwa.

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Bilan : Essai de politique fiction, ambitieuse ou hasardeuse suivant les opinions, Korean Peninsula s'avère être une fiction prenante. Elle reste cependant tributaire de l'équilibre précaire établi entre les différents genres vers lesquels elle tend : le thriller d'action, la politique utopique et la romance impossible. Animée d'un souffle narratif indéniable, la série n'est pas sans céder parfois à une mise en scène un peu excessive. Pourtant, forte d'un sujet qui lui apporte une consistance certaine et aiguise la curiosité du téléspectateur, son visionnage demeure intéressant. 

Pour la suite, tout dépendra de sa faculté à négocier les obstacles à venir, mais je serais en tout cas au rendez-vous !  


NOTE : 6,75/10


Une bande-annonce de la série :

Le générique : 

Une chanson de l'OST :

07/03/2012

(J-Drama / SP) Hoshi Hitotsu no Yoru : une simple histoire d'amitié

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Un mercredi asiatique japonais, une nouvelle fois, sur My Télé is Rich!. Pour tout vous dire, je profite des quelques semaines actuelles surchargées professionnellement pour éviter d'entamer de nouvelles séries et plutôt regarder (enfin) différents tanpatsus que j'avais mis de côté depuis l'automne dernier. D'autant que je découvre sous ce format plus bref d'autres terrains à explorer dans le petit écran japonais, et quelques jolies oeuvres qui méritent un détour, même si elles ne sont pas sérialisées. 

Hoshi Hitotsu no Yoru est un tanpatsu qui a été diffusé sur Fuji Tv, le 25 mai 2007. Il dure 1h30. Ce qui avait initialement retenu mon attention, c'était la présence de deux acteurs que j'apprécie beaucoup : Watanabe Ken et Tamaki Hiroshi. Mais la lecture de son synopsis avait également aiguisé ma curiosité : en effet, Hoshi Hitotsu no Yoru appartient à ce genre des human dramas qui, s'ils sont réussis, savent réchauffer le coeur du téléspectateur. Et je ne vais pas faire durer le suspense : j'ai passé une très bonne soirée devant ce drama !

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Hoshi Hitotsu no Yoru, c'est l'histoire d'une rencontre, puis d'une amitié qui va se forger entre deux personnes qui appartiennent à deux mondes très différents et n'ont a priori rien de commun, si ce n'est leur propre isolement. Nonoyama Hiroji est un homme récemment sorti de prison après y avoir purgé une longue peine. Il travaille comme agent d'entretien et de nettoyage dans une salle de spectacle. Lors de son service, un soir, après une représentation, il trouve un manteau oublié sur un siège. Une des poches contient une liasse de billets d'un total de 500.000 yen.

Troublé devant cette petite fortune, il imagine que cela doit beaucoup compter pour le propriétaire de la veste. Une enveloppe le renseigne sur le nom de ce dernier, un certain Iwasaki Daiki, et sur son adresse. Hiroji décide de lui rapporter le soir-même l'habit, avec la somme intacte. Il découvre un jeune homme solitaire, un peu maladroit socialement, qui, vivant dans une luxueuse résidence, ne semble avoir aucune conscience de la valeur de l'argent. Daiki insiste pour le remercier financièrement, ce que Hiroji refuse. Intrigués chacun par l'autre, c'est à partir de là qu'une amitié va peu à peu naître entre ces deux hommes en porte-à-faux par rapport au reste de la société... 

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Le charme de Hoshi Hitotsu no Yoru tient à un mélange savamment dosé d'humanité et de simplicité. Avec une authenticité rafraîchissante, il nous raconte la naissance d'une amitié sincère et sans arrière-pensée, telle qu'elle peut s'esquisser dans la réalité : avec sa part de maladresses initiales, son lot d'hésitations, mais aussi et surtout cette progressive ouverture sur l'autre qui l'accompagne, véritable petit miracle des relations sociales. Ce drama joue admirablement dans un registre assez minimaliste, lié à l'intime des personnages, qui lui permet de toucher le téléspectateur lui-même. Centré sur les rapports entre Hiroji et Daiki, c'est une oeuvre entièrement dédiée au relationnel qui fait preuve d'une justesse d'écriture rare. Ses scènes les plus convaincantes seront ainsi celles des tête-à-tête entre les deux personnages principaux, où les silences et les flottements en disent aussi longs que les mots.   

Si elle fait sien le thème de l'amitié, Hoshi Hitotsu no Yoru séduit aussi par une tonalité où pointe un optimisme diffus. En effet, c'est à une forme de double renaissance à laquelle on assiste au fil du tanpatsu. Hiroji et Daiki ont chacun besoin, à leur manière, d'un soutien pour aller de l'avant. Les rapports à l'argent de Daiki, sa quasi-dépendance à un mode de vie qui lui permet de gagner des fortunes sans voir personne, l'ont coupé du reste du monde. Hiroji est celui qui va l'inciter à se réouvrir aux autres, et notamment à son amie, en dépit de ses mauvaises expériences passées. Quant à l'ancien prisonnier, il a lui perdu une décennie de sa vie derrière les barreaux ; ces quelques mois dehors ne lui ont rien rendu de sa vie antérieure. Les initiatives de Daiki le prendront au dépourvu, mais elles vont lui permettre de commencer à bâtir de nouvelles fondations, pour se tourner vers l'avenir et imaginer un futur Et, si chacun apprend au contact de l'autre, la sincérité du traitement de ce relationnel en reste la constante et l'atout principal.  

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Maîtrisé sur un plan narratif, Hoshi Hitotsu no Yoru l'est aussi sur la forme. Il s'agit dans l'ensemble d'un drama soigné. Si la caméra propose une réalisation classique, elle apporte aussi quelques plans inspirés, et la mise en scène du duo principal est généralement très convaincante. La photographie, qui alterne différentes teintes plutôt pâles, correspond bien à l'atmosphère de la fiction. Quant à la bande-son, relativement minimaliste, ses instrumentaux savent bien faire ressortir les passages importants, sans rompre l'équilibre ambiant. 

Enfin si Hoshi Hitotsu no Yoru mérite un coup d'oeil, c'est aussi pour son casting, ou plus précisément pour les deux acteurs qui partagent la tête d'affiche. Concernant Watanabe Ken, je crois qu'il faut que je commence à surveiller ses tanpatsus, tant le visionnage de Hei no Naka no Chuugakkou s'était déjà révélé, à l'automne dernier, très intéressant. Quant à Tamaki Hiroshi (Love Shuffle, Guilty Akuma to Keiyakushita Onna), s'il a parcouru du chemin depuis, je garderai toujours une affection particulière pour cet acteur, puisque Nodame Cantabile fut un de mes deux premiers j-dramas visionnés. Les deux acteurs délivrent une performance nuancée et solide, très crédibles pour mettre en avant les failles et doutes de leurs personnages respectifs. Leurs échanges fonctionnent vraiment bien à l'écran ; et ce fut un vrai plaisir de les accompagner. A leurs côtés, on retrouve notamment Kuninaka Ryoko, Sasano TakashiIshida Ayumi, Fukuda Saki ou encore Akaya Miyoko.

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Bilan : Tanpatsu profondément humain, bénéficiant d'une écriture sincère et authentique qui ne saurait laisser insensible, Hoshi Hitotsu no Yoru est une belle et simple histoire d'amitié. Elle est le récit d'un rapprochement presque providentiel entre deux individus aux expériences de vie sans aucun rapport, et qui réapprennent grâce à l'autre à s'ouvrir et à accorder leur confiance. C'est touchant, avec un certain optimisme qui fait chaud au coeur : en résumé, un joli drama plein d'humanité ! A découvrir. 


NOTE : 7,5/10

29/02/2012

(J-Drama / SP) Shikei Kijun : la peine de mort au coeur d'un drame humain

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Du rattrapage de tanpatsu au programme de ce mercredi asiatique, qui nous fait donc rester une semaine encore au Japon. C'est Kerydwen qu'il faut remercier pour avoir attiré, le mois dernier, mon attention sur le drama dont je vais vous parler aujourd'hui : Shikei Kijun. Ce dernier a été diffusé sur la chaîne WOWOW (oui, toujours elle !), le 25 septembre 2011. Il s'agit d'un tanpatsu comportant une seule partie d'une durée totale de 2 heures, inspiré d'un roman de Kamo Takayasu

Shikei Kijun se démarque par le thème qu'elle aborde, un sujet sensible qui retiendrait mon attention peu importe le pays, celui de la peine de mort. Cette dernière existe toujours au Japon. Un sondage réalisé en 2010, mentionné dans le drama, montrait une opinion publique majoritairement favorable à son maintien. Sur un tel thème, j'avais déjà lu des synopsis de dramas comme Mori no Asagao, mais l'absence de sous-titres en avait toujours rendu le visionnage irréalisable.

Ce tanpatsu a donc été ma première vraie incursion dans le système judiciaire japonais. Si le résultat n'a pas répondu à toutes mes attentes, il s'agit cependant d'un legal drama solide et efficace. 

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Otomo Kojiro est un avocat à qui tout semble avoir réussi. Homme médiatique, il s'est rapidement imposé comme une des figures de proue du mouvement en faveur de l'abolition de la peine de mort au Japon. Un de ses proches amis, Mito Yusuke, avec qui il a fait ses études de droit, le suit dans ces procès particuliers où la sentence encourrue peut être la mort. Car si ce dernier ne s'est jamais lancé dans une carrière de praticien, il enseigne à l'université et étudie les critères dégagés par la jurisprudence pour fonder le prononcé d'une telle peine. Sur les bancs de la fac, ils s'étaient également noués d'amitié avec Nagase Mariko qui, elle, a choisi une autre voie : celle du ministère public.

Ces trois amis vont voir leurs liens et leurs certitudes vasciller lorsqu'une tragédie les frappe de près. La femme de Kojiro est retrouvée morte, assassinée, chez elle. Un suspect est très arrêté. Son procès s'annonce. Face au tourbillon personnel, médiatique et judiciaire qui menace d'emporter nos trois protagonistes, comment chacun va-t-il se positionner face à ce cas qui les touche personnellement ? Que restera-t-il de leurs convictions antérieures face à ces épreuves ? 

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Shikei Kijun est un tanpatsu ambitieux qui, s'il a conscience d'évoluer sur un terrain sensible, ne va cependant pas hésiter à aborder toutes les facettes de cette problématique complexe qu'est la peine de mort. Dotée d'une approche très didactique, il a le mérite de s'intéresser à tous les points de vue, donnant la parole aussi bien aux proches de victimes, à l'accusé, mais aussi aux différents acteurs de la justice - la police, la défense, le ministère public, et même le juge, avec la responsabilité qu'il prend en prononçant la sentence. Le fait que les personnages vont tour à tour occuper différents rôles, avocat ou victime, théoricien ou praticien, permet aussi de souligner les contrastes des positionnements de chacun.

C'est dans cet effort d'offrir une large photographie du système judiciaire, et de tous les intervenants d'une procédure pénale, que se trouve la réussite principale du drama. Manquant parfois de subtilité, mais en conservant toujours cette volonté d'aborder le sujet de la façon la plus large possible, il va en effet éclairer les limites humaines inhérentes à la Justice, et les tensions qui la parcourent, arbitrage subtil entre ambitions personnelles, ordre public et intérêt de la société. On a donc un solide et consistant legal drama qui devrait retenir l'attention de tout téléspectateur s'intéressant à ces thèmes. 

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Cependant, si Shikei Kijun affiche de hautes ambitions en multipliant les angles d'attaque, il va laisser un arrière-goût d'inachevé. Paradoxalement, à trop vouloir tout s'approprier, il finit par en dire trop peu. Manquant de lisibilité, les esquisses de réflexion et les raisonnements restent trop souvent dans de l'informulé. Ils ont tendance à s'effacer derrière les émotions des différents protagonistes. La volonté de s'attacher uniquement aux destins personnels, en soulignant le contraste entre principes théoriques et réalité de la douleur lorsque le drame touche personnellement, était une idée intéressante ; mais elle brouille son propos et finit par faire perdre au drama sa ligne directrice. 

Certes, certains argumentaires sont un peu plus approfondis. D'un côté, il y a notamment la question de la place de la victime et de ses proches au sein de la procédure pénale : est-ce qu'une sentence doit être prononcée au nom de la société, ou au nom des proches pour apaiser leur douleur ? C'est un débat récurrent du droit pénal moderne, et ce drama a le mérite de (brièvement) l'esquisser. A l'opposé, l'autre versant est plus classique : contre la peine de mort, c'est le risque d'erreur judiciaire, amenant la justice à prendre la vie d'un innocent, qui s'impose. De manière générale, Shikei Kijun donne l'impression de vouloir tout couvrir, mais manque de direction et de structure pour mener à bien et jusqu'au bout ses questionnements. La conclusion, faisant le choix d'une relative facilité, est d'ailleurs révélatrice des limites du drama : une fiction judiciaire intéressante, mais non une réflexion aboutie sur son sujet central, celui de la peine de mort.  

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Sur la forme, Shikei Kijun est un drama classique et réussi. La réalisation est sobre, parfaitement maîtrisée, même si le décor principalement intérieur - notamment au tribunal - n'offre logiquement que peu d'occasions de mettre en valeur le cadre. La bande-son reste aussi utilisée avec parcimonie, ne venant jamais empiéter sur le propos même du drama, ni amoindrir l'intensité des échanges.

Enfin, un dernier atout de Shikei Kijun est son casting. On y croise un certain nombre de têtes familières du petit écran japonais, et chacun délivre des prestations homogènes qui conviennent à la tonalité du tanpatsu. Se partagent la tête d'affiche, Yamamoto Koji (Karei Naru Ichizoku, Mother, Pandora), Ozawa Yukiyoshi et Toda Naho (Marks no Yama). A leurs côtés, on retrouve également Kashiwabara Takashi, Kyono Kotomi, Mitsuishi Ken, Yajima Kenichi, Sato Jiro, Kaneda Akio, Emoto Akira, Yamamoto Kei, Hirooka Yuriko et Kondo Yoshimasa. 

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Bilan : A défaut de réellement s'approprier les clés d'une réflexion seulement esquissée autour de la peine de mort, Shikei Kijun se révèle cependant être un drame judiciaire solide et efficace, reposant entièrement sur ses personnages et leurs émotions, derrière lesquelles s'effacent les enjeux plus théoriques. Peut-être victime de ses ambitions, en voulant offrir une photographie trop large d'un sujet complexe qui dépasse le seul cas d'espèce évoqué, cela reste une fiction riche et intéressante qui mérite un visionnage.


NOTE : 7/10

22/02/2012

(J-Drama) Shokuzai : l'expiation impossible

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Restons au Japon en ce mercredi asiatique pour poursuivre l'exploration de la saison hivernale 2012. Comme annoncé la semaine dernière, je me suis donc lancée dans le j-drama dont j'attendais le plus en ce début d'année : Shokuzai. Il y a quelque chose de très rassurant et de réellement réconfortant quand une série ne déçoit pas les espoirs que vous aviez placés préalablement en elle... et j'ai le plaisir d'écrire que ça a été le cas cette semaine.

Diffusée du 8 janvier au 5 février 2012 au Japon, Shokuzai est une adaptation, scénarisée par Kurosawa Kiyoshi, d'un roman de Minato Kanae. Elle avait a priori sur le papier tout pour retenir mon attention : elle était proposée par la chaîne câblée WOWOW qui, si elle a aussi connu ses ratés (Prisoner...), reste une des plus fiables qui soient (et correspondant à mes goûts) ; elle disposait d'une longueur qui promettait une histoire condensée et peu de risque de s'égarer (5 épisodes) ; et son synopsis était intriguant. Construite autour d'une thématique dramatique troublante, celle de l'expiation, Shokuzai se sera révélée être une solide (et sombre) série. 

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La tragédie qui conditionne tous les destins personnels que va nous relater Shokuzai s'est produite il y a 15 ans. Alors que ses parents viennent d'emménager en provenance de Tokyo, la petite Emiri découvre l'école élémentaire locale. Sae, Maki, Akiko et Yuka deviennent rapidement ses compagnes de jeu. Mais un jour qu'elles s'amusent dans la cour de l'école, un homme vient demander de l'aide pour fixer un problème de ventilation qu'il ne peut atteindre. Emiri accepte de le suivre, seule. Un peu plus tard, se rendant compte que leur amie n'est toujours pas revenue, les quatre écolières rentrent à leur tour dans le gymnase où elles l'ont vue partir. Elles y découvrent, effarées, le corps sans vie d'Emiri.

Quelques mois plus tard, alors que la vie reprend difficilement son cours, les quatre jeunes filles sont invitées par la mère d'Emiri, Asako, en l'honneur de leur amie disparue. Il faut dire que, malheureusement, leurs témoignages n'ont guère été utiles à la police, aucune n'ayant été en mesure de décrire le suspect qui les avaient approchées. Asako se montre particulièrement dure à leur encontre, les considérant responsables de la non-arrestation du coupable. Elle leur promet solennellement que si le meurtrier n'est pas retrouvé, elles devront expier cette faute impardonnable. Les filles quittent ensuite secouées et marquées la maisonnée.

Quinze ans plus tard, jeunes adultes ayant chacune grandies de leur côté, sans plus aucun contact entre elles, ce drame du passé hante pourtant toujours leur vie, et conditionne leurs choix et leurs réactions. Le temps de l'expiation est-il venu ?

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Shokuzai porte parfaitement son titre, puisque son thème central, autour duquel elle va proposer diverses variations, est celui de l'expiation. La mort d'Emiri, le fait de l'avoir  laissée partir seule, mais aussi de n'avoir pu aider la police ensuite, s'apparentent à un lent poison qui, d'une façon ou d'une autre, ronge chacune des protagonistes. Portés par la voix accusatrice d'Asako, ils conduisent sur une voie létale. La série met ainsi en scène un véritable effet domino aux conséquences destructrices glaçantes.  En suivant une narration atypique, chaque épisode étant consacré à un personnage, elle va nous montrer combien le premier drame a influé, parfois bloqué, voire détruit, cinq vies, celles des quatre amies d'Emiri, mais aussi celle de mère qui, prostrée de douleur, n'en est pas moins aussi une victime.  

Prenant pleinement la mesure de son sujet, Shokuzai est logiquement un drama particulièrement sombre et troublant. Il expose des ressorts psychologiques qu'il est plus confortable de laisser inexplorés : ceux qui actionnent consciemment ou non une culpabilité pesante, et les manières dont celle-ci va se manifester. Chacune des filles a intégré le drame, et ce qu'il représente pour elle, suivant sa personnalité et son vécu d'alors. Si elles le vivent de façon très personnelle, elles partagent une même faille, nourrie de la détresse émotionnelle dans laquelle elles ont été submergées il y a 15 ans, mais aussi de ressentiments qu'elles éprouvent envers elles-mêmes. Ces éléments font d'elles de véritables bombes à retardement. 

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Au fil du drama, l'expiation réclamée par Asako apparaît comme ce moment où, confrontées à une situation qui menace leur équilibre psychologique, quelque chose se rompt dans chacune de ces désormais jeunes femmes. Le plus perturbant - et réussi - dans cette mise en scène tient à la narration subjective choisie : l'histoire nous est en effet racontée du point de vue du personnage central de l'épisode, offrant donc une vue biaisée de tout ce qui l'entoure. Entraîné aux confins de la subjectivité, percevant les scènes et les dialogues à travers les yeux de l'héroïne de l'heure, le téléspectateur est amené plus d'une fois à s'interroger sur l'éventuelle distance pouvant exister entre la réalité et la perception des personnages, abusés qu'ils sont par leurs préconceptions forgées dans le drame passé.

Si les épisodes ne sont pas tous égaux en terme de qualité narrative, leur réussite est de parvenir à proposer à chaque fois un récit émotionnellement fort, qui ne laisse pas indifférent le téléspectateur. Si chaque fille a tenté de préserver, à sa façon, sa santé mentale, les épisodes s'apparentent à un compte à rebours inquiétant qu'on devine sans happy end. C'est le premier, parce qu'il donne le ton, qui restera pour moi le plus dérangeant : il met en scène une jeune fille qui a cessé de grandir, souhaitant se couper du monde. Acceptant une non-vie dans laquelle c'est elle-même qu'elle perd, sa tentative de fuite et les sacrifices occasionnés seront pourtant inutile. La prise de conscience de cela lui sera insupportable, et conduira à un drame. Enfin, notons que le dernier épisode referme opportunément la boucle en tendant à Asako un miroir pour lui faire vivre, à son tour, ce que les quatre autres ont traversé. 

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Ce qui contribue également beaucoup à la réussite de Shokuzai, c'est le fait que la série paraissent particulièrement aboutie sur le plan formel. La réalisation est impeccable, bénéficiant d'une mise en scène millimétrée à l'esthétique superbe. La photographie est très travaillée, s'adaptant à l'ambiance de chaque passage : elle glisse des teintes colorées du début à une image tendant vers le noir et blanc, d'où toute couleur semble avoir été drainée, à mesure que chaque personnage voit sa vie s'étioler. La bande-son est pareillement maîtrisée : avec une sobriété caractéristique, on trouve dans ce drama avant tout tout beaucoup de silences, mais également quelques instrumentaux utilisés à propos.

Enfin, Shokuzai dispose d'une galerie d'actrices très convaincantes qui prennent bien la mesure de leur rôle et des ambivalences de chaque personnages. Koizumi Kyoko (Manhattan Love Story) incarne cette mère meurtrie qui pleure son enfant tout en espérant que justice soit rendue, sans qu'on sache précisément dans quelle mesure elle a vraiment conscience que c'est la vie des quatre autres jeunes filles qu'elle a peut-être détruit lors de cette discussion sur l'expiation, quinze ans auparavant. Ces dernières sont interprétées respectivement par Aoi Yu (Camouflage), Koike Eiko (Smile), Ando Sakura (Kaze no Hate) et Ikewaki Chizuru (Fuurin Kazan, Keiji no Genba).

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Bilan : Shokuzai est un drama troublant, expliquant comme des vies peuvent être détruites par un passé qui influence toutes les réactions et perceptions de ses protagonistes. La thématique de l'expiation entraîne inexorablement les différents personnages sur un chemin autodestructeur où la logique et la fatalité empêchent de déterminer s'ils ont conscience de ce qui est réellement en jeu. En dépit de la surenchère dans laquelle versent certains développements, j'ai aimé l'ambiance sombre et le fait que le drama laisse souvent la place à l'interprétation du téléspectateur. Dotée d'une mise en scène sobre, avec un sens parfois presque contemplatif du drame propre à ce petit écran japonais, Shokuzai a donc été un série qui m'a beaucoup intrigué et fasciné. Mon j-drama de l'hiver 2012.  


NOTE : 8,25/10