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19/10/2011

(J-Drama / Pilote) Last Money ~Ai no Nedan~ (Price of love) : une intéressante immersion dans le milieu des assurances


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Retour au Japon en ce mercredi asiatique pour évoquer une des nouveautés de cet automne. Vous avez sans doute dû remarquer que la place occupée par le pays du Soleil Levant tend à s'accroître ces derniers temps sur My Télé is Rich!, équilibrant la répartition de ce rendez-vous hebdomadaire asiatique. Si la brièveté des dramas japonais par rapport aux sud-coréens joue sans doute en leur faveur, en raison du peu de temps libre dont je dispose actuellement, cela reflète aussi une vraie stabilisation de fond : c'est officiel, plus de cinq ans après le visionnage de mon premier j-drama, j'ai enfin trouvé mes marques devant ce petit écran japonais !

C'est pour cela que, cet automne, Last Money, diffusé depuis le 13 septembre 2011 sur NHK, ne pouvait que retenir mon attention, certitude confirmée par la première critique de LadyTeruki. Les dramas de NHK n'ont sans doute pas les synopsis les plus glamours à première vue, mais c'est dans l'éclairage qu'ils apportent de la société japonaise que réside tout leur attrait (souvenez-vous, Hagetaka). On se situe ici dans le même registre qu'un certain nombre de fictions de WOWOW, à l'image par exemple de Soratobu Taiya. Comprenant sept épisodes au total, Last Money s'achèvera mardi prochain au Japon ; cette critique portera sur les deux premiers épisodes de la série, visionné vendredi soir avec beaucoup d'enthousiasme. 

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Last Money se concentre sur le personnage de Mukojima Sakutaro. Ce dernier travaille pour une compagnie d'assurance, pour laquelle il enquête sur les demandes en paiement des clients, vérifiant si les conditions du contrat d'assurance souscrit sont bien remplies dans chaque cas et donc autorisant ou non le versement. Des hypothèses de fraude à l'assurance pour de faux soins médicaux jusqu'au versement d'assurance-vie suite à des décès dont il faut déterminer les circonstances exactes (suicide, ordre des décès dans un accident), il traite des affaires les plus diverses avec le même pointilleux sens de l'éthique qui le pousse toujours au bout de ses investigations, peu importe le résultat et les conséquences qui en découleront...

Ce professionnalisme n'est d'ailleurs pas toujours du goût de son entreprise, dont la politique commerciale se concentre plus sur son équilibre financier et la rapidité avec laquelle elle opère ses versements par rapport à la concurrence. Cela ne va donc pas sans provoquer parfois certaines tensions au sein d'une société où son obstination peut se heurter aux impératifs de chiffres fixés. Ses collègues se sont habitués à ce tempérament, et le dernier employé placé en formation à ses côtés comprend ainsi peu à peu les impératifs et les dilemmes moraux de ce métier. Mukojima Sakutaro a cependant peu de véritables amis, si ce n'est Yokomura Kazuki, avec qui il est inséparable depuis l'université. Or ce dernier a entamé une liaison extra-conjugale dans laquelle il s'investit plus que de raison ; mais sa maîtresse, mère célibataire apparemment sans histoire, semble nourrir des arrière-pensées financières qui devraient peut-être susciter la méfiance.

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Gagnant en épaisseur et en envergure au fil de son pilote, Last Money se révèle être un drama habile qui a parfaitement compris tout le potentiel de son sujet de départ. En effet, la série va décliner ce thème du milieu des assurances en s'attachant à en exploiter toutes les facettes. Se présentant sous une forme semi-procédurale, avec des enquêtes conduites à chaque épisode, elle introduit également divers fils rouges qui complètent et densifient le récit. Non seulement un enjeu dramatique est posé dès le flashforward d'ouverture, mais le drama esquisse aussi une promesse d'exploration du personnage principal à travers une affaire passée qui semble le hanter.

Doté d'une construction narrative maîtrisée, Last Money a de plus le mérite de savoir trouver le ton juste pour aborder ce sujet finalement très sensible. Il émane de cette série une impression d'authenticité et de réalisme qui renforce l'impact des histoires racontées. S'intéresser au milieu des assurances apparaît comme l'angle parfait pour tendre un miroir, parfois peu flatteur, souvent désabusé, vers la société japonaise et les rapports que ses membres entretiennent avec les sommes rondelettes que Sakutaro peut débloquer. De son entreprise jusqu'aux particuliers qu'il croise, le drama multiplie opportunément les points de vues pour offrir une vision d'ensemble guère optimiste. C'est un portrait nuancé qui est dressé, où les intérêts de chacun s'entremêlent souvent de façon conflictuelle.

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Outre cet éclairage social, c'est aussi dans un registre plus intime que Last Money retient l'attention. Faire jouer le mécanisme de l'assurance signifie généralement accident ou drame de la vie. Or la série démontre une faculté rare pour relater avec sobriété et une forme de pudeur parfaitement contenue ces tranches d'existence évoquées au cours de chaque enquête. Le choix de la première affaire traitée dans le pilote est judicieux : c'est celle d'une famille, tuée dans un accident de voiture, dont il faut retracer l'ordre des décès pour déterminer à quel héritier revient l'important montant de l'assurance-vie contractée. Tout en éclairant le rapport très différent des parents survivants face à cette somme, le drama verse logiquement dans un drame plus poignant qui ne saurait laisser le téléspectateur indifférent.

En filigrane, transparaît du propos tout en retenue de Last Money un certain pessimisme. Si quantifier la vie d'un être cher est chose impossible, le mécanisme de l'assurance semble réveiller les instincts les plus bas de notre nature humaine et vicier les relations. Non seulement la douleur s'efface parfois au profit de la préoccupation monétaire, mais c'est aussi la seule existence de ce système qui aiguise les appétits : au-delà des cas de fraude, que penser de la demande d'une maîtresse qui présente le fait d'être bénéficiaire du contrat d'assurance-vie de son amant comme une preuve d'amour véritable ? Derrière ces questions d'argent, c'est bien l'être humain qui est le coeur du sujet de cette série.

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Sur la forme, Last Money bénéficie de la sobriété caractéristique de ce type de drama, parfaitement adéquate à la tonalité d'ensemble. La réalisation opte pour une simplicité, sans le moindre effet de style, qui renforce l'impression d'authenticité du récit. Les couleurs sont globalement plutôt froides, avec quelques filtres teintés pour marquer certains changements de décor, notamment en extérieur. Pareillement, la bande-son reste minimaliste, se confondant complètement à l'histoire proposée.

Enfin, Last Money bénéficie d'un casting globalement homogène qui assure des prestations crédibles. Il est conduit par Ito Hideaki (Bengoshi no Kuzu, First Kiss), qui incarne cet agent-enquêteur d'assurances recherchant obstinément la vérité dans tous les cas qui lui sont soumis. A ses côtés, on retrouve Takashima Reiko (Bengoshi no Kuzu), Nakamaru Yuichi (membre du groupe KAT-TUN, Sushi Oji!), le toujours excellent Matsushige Yutaka (Fumo Chimai), Tabata Tomoko, Ibu Masatoas, Natsuyagi Isao ou encore Tanaka Tetsushi.

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Bilan : Le pilote de Last Money pose efficacement les bases d'un human drama consistant, dont la force réside autant dans une sobriété d'ensemble que dans les passages plus poignants inhérents aux drames de la vie croisés dans les affaires. Bénéficiant d'une solide construction narrative dans laquelle s'esquisse plusieurs fils rouges, son scénario, à tiroirs multiples, utilise habilement le prisme du monde des assurances pour éclairer toutes les problématiques de société, mais aussi plus personnelles, que ces questions d'argent peuvent soulever. En somme, Last Money apparaît comme le portrait authentique d'une société japonaise moderne. A suivre ! 


NOTE : 8/10


Quelques images de la série :