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05/10/2011

(J-Drama / SP) Hei no Naka no Chuugakkou : une école derrière les barreaux

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En ce mercredi asiatique, c'est toujours au Japon que je vous propose de rester afin d'évoquer un drama special visionné dernièrement et qui m'a beaucoup intéressé : Hei no Naka no Chuugakkou. Si c'est initialement le casting qui avait attiré mon attention (vous connaissez ma manie de surveiller avec soin les filmographies de mes acteurs favoris), le sujet de cette école publique située en prison, sortant de l'ordinaire et adoptant un cadre carcéral atypique, n'avait fait qu'un peu plus aiguiser ma curiosité.

Hei no Naka no Chuugakkou est un tanpatsu d'une durée totale de 2 heures, qui a été diffusé sur TBS le 11 octobre 2010. Il a été récompensé en juin dernier au 51e Festival de Monte-Carlo, en remportant le prix du meilleur film télévisé, tandis que Ken Watanabe, un des acteurs principaux, remportait pour son rôle le prix du meilleur acteur de film télévisé.

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Dans la ville de Matsumoto (préfecture de Nagano), la prison locale accueille le seul lycée public japonais situé en milieu carcéral. Les élèves sont tous des détenus actuellement en train de purger leur peine dans une des prisons du pays et qui n'ont jamais obtenu leur diplôme de fin d'études. Un conseil sélectionne chaque année méticuleusement les requêtes émanant de toute l'île, sélectionnant minutieusement, parmi les demandeurs, cinq prisonniers qui bénéficieront pendant un an de cet aménagement de peine particulier.

Hei no Naka no Chuugakkou va nous raconter une année scolaire à Matsumoto, de leur arrivée sur les lieux jusqu'au diplôme qu'obtiendront certains des personnages. Les prisonniers mis en scène, âgés de 20 à 70 ans, ont tous des parcours très différents, malmenés par la vie, la malchance ou la fatalité. De cette cohabitation - au cours de laquelle ils ne sont normalement autorisés à ne nouer aucun liens entre eux -, naît pourtant une forme de dynamique de classe qui va se construire peu à peu bon gré, mal gré, tendant vers l'acquisition du diplôme. Cette classe reste cependant à part, et le nouvel enseignant assistant nommé pour leur faire cours a bien dû mal à cerner son rôle et ce qui est entendu de lui et de ses élèves.

Cela va être une année d'apprentissage dans tous les sens du terme, pour tout le monde. 

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Si Hei no Naka no Chuugakkou mérite le détour, c'est tout d'abord pour l'originalité et l'ambition inhérentes au sujet choisi. On dit souvent (à juste titre) que la télévision japonaise a tendance à décliner à l'excès toutes les variantes possibles d'histoires d'enseignants, mais ici, point de figure messianique extraordinaire : le cadre carcéral domine, justifiant ainsi l'exploration de thématiques éducatives rarement abordées sous cet angle. Le rapport à l'enseignement est très différent d'un high school drama par le simple fait que les élèves sont adultes. Ils ne sont pas tournés vers le futur : leurs expériences ne se sont pas conclues de manière heureuse et ils purgent des peines de prison longues leur offrant des perspectives d'avenir limitées. La fiction va prendre le temps de s'intéresser à chacun d'eux, dressant des portraits, tout en ombres et lumières, de personnages ayant des aspirations et des histoires qui leur sont personnelles. A mesure qu'une étrange et hésitante émulation collective se crée au sein d'une "vie de classe" artificielle, le drama gagne en humanité, bénéficiant d'une écriture très sobre, souvent juste, où perce une forme de dignité qui sait toucher le téléspectateur.

Même si Hei no Naka no Chuugakkou dépeint une réalité nuancée, conscient que la vie n'offre pas de cadeaux, c'est pourtant aussi par son optimisme que la fiction va se démarquer. Tous ne réussiront pas dans leur défi d'obtenir ce diplôme symbolique, mais au cours de cette année, chaque intervenant, les prisonniers comme l'enseignant, aura appris sur lui-même et sur la vie en général quelque chose qui n'est pas quantifiable. Car c'est sans doute dans ce registre que ce drama parvient à exploiter tout le potentiel de son récit. L'enjeu n'est pas une simple acquisition de connaissances, comme elle pourrait l'être dans tout drama scolaire, mais c'est en réalité une recherche bien plus fondamentale : il s'agit de retrouver sa propre estime de soi. C'est en vérité autant pour faire face au regard des autres que pour soi-même que chacun est là. Le parcours en parallèle du nouveau professeur en est une illustration révélatrice et le parfait écho : alors qu'il déchire douloureusement ses rêves d'adolescence et l'espoir de devenir photographe, ce dernier va peu à peu comprendre le rôle qui lui est échu et retrouver un sens à son métier.

La conclusion de Hei no Naka no Chuugakkou viendra confirmer que la scolarité n'est qu'une façade dans cette belle histoire de redécouverte de soi et de réapprentissage de la vie, humaine comme sociale, permettant à chacun de se retrouver.

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Sur la forme, Hei no Naka no Chuugakkou présente une réalisation classique, quasi-minmaliste par instant. Le quasi huis clos offert par le cadre de la prison renforce l'impression un peu figée et théâtrale de la mise en scène. Ces effets apparaissent recherchés : la dynamique du récit n'en souffre pas, en revanche cela permet de se concentrer sur l'essentiel dans une histoire toute entière dédiée à ses protagonistes et au long cheminement qu'ils vont suivre au cours de cette année.

Côté casting, ce drama special réunit des acteurs japonais confirmés qui vont proposer une performance d'ensemble très solide, permettant de bien faire ressortir la dimension humaine de la fiction. Si Hei no Naka no Chuugakkou avait initialement retenu mon attention, c'est en raison de la présence d'Odagiri Joe (Jikou Keisatsu, Atami no Sousakan) qui fait partie de ces quelques acteurs nippons dont je surveille tous les projets avec attention. Il joue ici le rôle de l'observateur de ce groupe de détenus, enseignant cherchant lui aussi sa place et qui va apprendre beaucoup de cette année scolaire atypique. A ses côtés, on retrouve des acteurs très convaincants : Watanabe Ken (plus connu pour ses rôles au cinéma comme dans Le Dernier Samourai), Otaki Hideji, Suma Kei, Chihara Seiji, Sometani Shota ou encore Kadono Takuzo.

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Bilan : Bénéficiant d'un sujet original qu'il va savoir traiter avec des nuances, mais aussi beaucoup d'humanité, Hei no Naka no Chuugakkou est une très intéressante histoire d'apprentissage, où le cadre pseudo-scolaire cache en vérité une inspirante reconquête d'une estime de soi perdue, ainsi qu'un effort pour renouer avec la vie en société. Sans jamais verser dans la fable moralisatrice, ce drama toujours très sobre délivre un message teinté d'un relatif optimisme qui achève de conquérir le téléspectateur. Une curiosité à découvrir.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce :