03/03/2012
(US) White Collar, saison 3 : le temps des choix
Ce mercredi s'est achevée aux Etats-Unis la saison 3 de White Collar (connue sous le titre horrible de FBI Duo très spécial en VF). Je l'avais débutée en juin dernier quelque peu à reculons. Les inégalités et limites affichées par la saison 2 me faisaient envisager l'abandon (d'autant que j'avais déjà abandonné une première fois en cours de saison, avant de finalement rattraper). Mais, mine de rien, devant le season premiere, j'ai dû convenir que la série m'avait sincèrement manqué. Et je me suis donc laissée à nouveau prendre au jeu cet été, puis à partir de janvier pour la deuxième partie de la saison.
Pour être honnête, j'ai du mal à classer White Collar dans mes programmes. Ma consommation de séries américaines n'a jamais été aussi basse (deux seulement suivies en direct sans discontinuités depuis janvier), mais en plus elle en est déjà à sa troisième saison (mon seuil de lassitude fatidique). En fait, j'ai l'impression que je la regarde un peu de la façon que je regardais les séries il y a une dizaine d'années : du temps où certaines fictions divertissantes avaient su nouer un lien de fidélité qui me faisait persévérer par-delà toutes les frustrations occasionnées. White Collar c'est exactement ça : une série à laquelle je suis très attachée, dont j'aime l'atmosphère et dont j'ai la certitude qu'elle me fera passer un moment sympathique.
Placée sous le signe de la division des loyautés et de la nécessité de choisir son camp, cette saison 3 aura été plus réussie que la précédente. Si sa construction narrative a souffert de l'habitude de USA Network de couper en deux les saisons de ses séries, avec un mi-cliffhanger souvent mieux amené que le réel final (il y a eu quelques épisodes un peu poussifs à la reprise de janvier), dans l'ensemble, la série a parfaitement su capitaliser sur ce dynamisme charmeur qui fait sa force. Sa caractéristique majeure tient à sa capacité à faire toujours passer des moments rafraîchissants et divertissants, franchement plaisants devant son petit écran, parfois malgré des enquêtes du jour tellement anecdotiques qu'il m'arrive de ressortir d'un épisode en étant bien incapable d'expliquer quelle était cette intrigue.
En réalité, l'intérêt de White Collar est bien éloigné de l'ombre des formula shows policiers dont on aurait l'impression fausse qu'elle s'inspire à la seule lecture du synopsis (ou du titre français). Résoudre un crime ou attraper un coupable n'est qu'un enjeu secondaire. Mieux encore, le personnage de Neal fait glisser la série vers une zone grise où les points de repère du téléspectateur fluctuent de part et d'autre de la loi, et où la division trop manichéenne FBI d'un côté, criminel de l'autre, se trouble. Derrière des dialogues énergiques qui ne manquent jamais de réparties, White Collar se construit sur un jeu nuancé de faux-semblants. Les points de vue de Neal et de Peter offrent deux visions a priori diamétralement opposées dont la série exploite le contraste. Mais c'est pour mieux ensuite les faire se rejoindre dans ces quelques rares moments de franchise qui remettent les cartes à plat et redistribuent un nouveau jeu.
Car au-delà de son ambiance qui mêle policier et escroc, White Collar mise avant tout sur les dynamiques qui lient ses personnages, principaux, mais aussi plus secondaires (comme le reste de l'équipe du FBI). Un des attraits de cette saison 3 est d'avoir su bien homogénéiser l'ensemble, tout en prenant le temps de s'interroger sur l'ambiguïté des rapports entre Peter et Neal. Outre les questions de confiance soulevées par la fin de la saison 2, il est désormais acquis que, en dépit de tout, le respect réciproque qui existait entre eux s'est peu à peu mué en amitié. Seulement, tiraillé entre deux loyautés, Neal va devoir choisir un camp : Mozzie, le trésor et son style de vie antérieure ; ou Peter, ce job et cette ville de New York où il a retrouvé ses repères. Les deux cliffhanger qui rythment la saison déclinent de façon différente une thématique proche : tout en obligeant Neal à faire, le premier, un choix, ils réduisent ensuite à néant cette faculté.
Non seulement le season finale représente très bien l'esprit de la série (jusque dans sa dimension de carte postale new yorkaise parfois un peu improbable), mais sa réussite tient au fait que, plus que le bouleversement provoqué par la fuite de Neal contraint de partir avec un toujours ô combien loyal Mozzie, l'épisode renverse la problématique initiale de la série. Neal n'est plus maître de sa destinée. Cette fois, c'est Peter - et même Sarah et, à un degré moindre, Diana - qui franchissent l'autre ligne pour l'aider et vont à plusieurs reprises lui sauver la mise au cours de l'épisode. Mettant à profit et justifiant l'importance prise, au sein de la série, par ces relations humaines complexes, loin du formula show policier classique, c'est donc sur une conclusion riche en symboles que White Collar referme sa saison 3.
Bilan : Divertissement d'enquêtes sympathique et rafraîchissant, où viennent se greffer des passages plus aventuriers dans lesquels la série tend vers les fictions d'escroquerie, White Collar n'est jamais aussi plaisante à suivre que lorsqu'elle entreprend de mettre à l'épreuve les dynamiques relationnelles unissant ses personnages. Dotée d'un casting impeccable (Matt Bomer et Tim Dekay sont géniaux), c'est une série au charme communicatif à laquelle on s'attache, tout en en reconnaissant les limites : aussi bien du côté des intrigues de certains épisodes, que du schéma immuable entre Peter et Neal dans lequel elle s'était toujours (jusqu'au final du moins) cantonnée.
NOTE : 6,75/10
Une bande-annonce de la saison :
13:36 Publié dans (Séries américaines) | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : usa network, white collar, matt bomer, tim dekay, willie garson, tiffany thiessen, marsha thomason, sharif atkins | Facebook |
29/02/2012
(J-Drama / SP) Shikei Kijun : la peine de mort au coeur d'un drame humain
Du rattrapage de tanpatsu au programme de ce mercredi asiatique, qui nous fait donc rester une semaine encore au Japon. C'est Kerydwen qu'il faut remercier pour avoir attiré, le mois dernier, mon attention sur le drama dont je vais vous parler aujourd'hui : Shikei Kijun. Ce dernier a été diffusé sur la chaîne WOWOW (oui, toujours elle !), le 25 septembre 2011. Il s'agit d'un tanpatsu comportant une seule partie d'une durée totale de 2 heures, inspiré d'un roman de Kamo Takayasu.
Shikei Kijun se démarque par le thème qu'elle aborde, un sujet sensible qui retiendrait mon attention peu importe le pays, celui de la peine de mort. Cette dernière existe toujours au Japon. Un sondage réalisé en 2010, mentionné dans le drama, montrait une opinion publique majoritairement favorable à son maintien. Sur un tel thème, j'avais déjà lu des synopsis de dramas comme Mori no Asagao, mais l'absence de sous-titres en avait toujours rendu le visionnage irréalisable.
Ce tanpatsu a donc été ma première vraie incursion dans le système judiciaire japonais. Si le résultat n'a pas répondu à toutes mes attentes, il s'agit cependant d'un legal drama solide et efficace.
Otomo Kojiro est un avocat à qui tout semble avoir réussi. Homme médiatique, il s'est rapidement imposé comme une des figures de proue du mouvement en faveur de l'abolition de la peine de mort au Japon. Un de ses proches amis, Mito Yusuke, avec qui il a fait ses études de droit, le suit dans ces procès particuliers où la sentence encourrue peut être la mort. Car si ce dernier ne s'est jamais lancé dans une carrière de praticien, il enseigne à l'université et étudie les critères dégagés par la jurisprudence pour fonder le prononcé d'une telle peine. Sur les bancs de la fac, ils s'étaient également noués d'amitié avec Nagase Mariko qui, elle, a choisi une autre voie : celle du ministère public.
Ces trois amis vont voir leurs liens et leurs certitudes vasciller lorsqu'une tragédie les frappe de près. La femme de Kojiro est retrouvée morte, assassinée, chez elle. Un suspect est très arrêté. Son procès s'annonce. Face au tourbillon personnel, médiatique et judiciaire qui menace d'emporter nos trois protagonistes, comment chacun va-t-il se positionner face à ce cas qui les touche personnellement ? Que restera-t-il de leurs convictions antérieures face à ces épreuves ?
Shikei Kijun est un tanpatsu ambitieux qui, s'il a conscience d'évoluer sur un terrain sensible, ne va cependant pas hésiter à aborder toutes les facettes de cette problématique complexe qu'est la peine de mort. Dotée d'une approche très didactique, il a le mérite de s'intéresser à tous les points de vue, donnant la parole aussi bien aux proches de victimes, à l'accusé, mais aussi aux différents acteurs de la justice - la police, la défense, le ministère public, et même le juge, avec la responsabilité qu'il prend en prononçant la sentence. Le fait que les personnages vont tour à tour occuper différents rôles, avocat ou victime, théoricien ou praticien, permet aussi de souligner les contrastes des positionnements de chacun.
C'est dans cet effort d'offrir une large photographie du système judiciaire, et de tous les intervenants d'une procédure pénale, que se trouve la réussite principale du drama. Manquant parfois de subtilité, mais en conservant toujours cette volonté d'aborder le sujet de la façon la plus large possible, il va en effet éclairer les limites humaines inhérentes à la Justice, et les tensions qui la parcourent, arbitrage subtil entre ambitions personnelles, ordre public et intérêt de la société. On a donc un solide et consistant legal drama qui devrait retenir l'attention de tout téléspectateur s'intéressant à ces thèmes.
Cependant, si Shikei Kijun affiche de hautes ambitions en multipliant les angles d'attaque, il va laisser un arrière-goût d'inachevé. Paradoxalement, à trop vouloir tout s'approprier, il finit par en dire trop peu. Manquant de lisibilité, les esquisses de réflexion et les raisonnements restent trop souvent dans de l'informulé. Ils ont tendance à s'effacer derrière les émotions des différents protagonistes. La volonté de s'attacher uniquement aux destins personnels, en soulignant le contraste entre principes théoriques et réalité de la douleur lorsque le drame touche personnellement, était une idée intéressante ; mais elle brouille son propos et finit par faire perdre au drama sa ligne directrice.
Certes, certains argumentaires sont un peu plus approfondis. D'un côté, il y a notamment la question de la place de la victime et de ses proches au sein de la procédure pénale : est-ce qu'une sentence doit être prononcée au nom de la société, ou au nom des proches pour apaiser leur douleur ? C'est un débat récurrent du droit pénal moderne, et ce drama a le mérite de (brièvement) l'esquisser. A l'opposé, l'autre versant est plus classique : contre la peine de mort, c'est le risque d'erreur judiciaire, amenant la justice à prendre la vie d'un innocent, qui s'impose. De manière générale, Shikei Kijun donne l'impression de vouloir tout couvrir, mais manque de direction et de structure pour mener à bien et jusqu'au bout ses questionnements. La conclusion, faisant le choix d'une relative facilité, est d'ailleurs révélatrice des limites du drama : une fiction judiciaire intéressante, mais non une réflexion aboutie sur son sujet central, celui de la peine de mort.
Sur la forme, Shikei Kijun est un drama classique et réussi. La réalisation est sobre, parfaitement maîtrisée, même si le décor principalement intérieur - notamment au tribunal - n'offre logiquement que peu d'occasions de mettre en valeur le cadre. La bande-son reste aussi utilisée avec parcimonie, ne venant jamais empiéter sur le propos même du drama, ni amoindrir l'intensité des échanges.
Enfin, un dernier atout de Shikei Kijun est son casting. On y croise un certain nombre de têtes familières du petit écran japonais, et chacun délivre des prestations homogènes qui conviennent à la tonalité du tanpatsu. Se partagent la tête d'affiche, Yamamoto Koji (Karei Naru Ichizoku, Mother, Pandora), Ozawa Yukiyoshi et Toda Naho (Marks no Yama). A leurs côtés, on retrouve également Kashiwabara Takashi, Kyono Kotomi, Mitsuishi Ken, Yajima Kenichi, Sato Jiro, Kaneda Akio, Emoto Akira, Yamamoto Kei, Hirooka Yuriko et Kondo Yoshimasa.
Bilan : A défaut de réellement s'approprier les clés d'une réflexion seulement esquissée autour de la peine de mort, Shikei Kijun se révèle cependant être un drame judiciaire solide et efficace, reposant entièrement sur ses personnages et leurs émotions, derrière lesquelles s'effacent les enjeux plus théoriques. Peut-être victime de ses ambitions, en voulant offrir une photographie trop large d'un sujet complexe qui dépasse le seul cas d'espèce évoqué, cela reste une fiction riche et intéressante qui mérite un visionnage.
NOTE : 7/10
17:46 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : j-drama, wowow, shikei kijun, yamamoto koji, ozawa yukiyoshi, toda naho, kashiwabara takashi, kyono kotomi, mitsuishi ken, yajima kenichi, sato jiro, kaneda akio, emoto akira, yamamoto kei, hirooka yurika, kondo yoshimasa | Facebook |
26/02/2012
(Pilote AUS) Miss Fisher's Murder Mysteries : une détective de caractère et de charme dans l'Australie des années 20
La fiction australienne est décidément dynamique en ce début d'année ! Ou plus précisément, la chaîne ABC1 aborde 2012 avec pas mal d'ambitions et d'espérances dans le domaine des séries. C'est tant mieux pour le téléphage, car elle ne laisse de côté aucun genre, offrant aussi bien des comédies (Outland, Woodley) que des dramas (The Straits, dont je vous ai parlé dimanche dernier - qui, je le maintiens, mérite un coup d'oeil). Et c'est ainsi que ce vendredi soir, le 24 février, débutait une série sur laquelle la chaîne australienne misait beaucoup, la très attendue Miss Fisher's Murder Mysteries.
Il s'agit de l'adaptation d'une série de romans policiers de Kerry Greenwood, de quoi doter la chaîne de sa propre fiction historico-policière (13 épisodes d'une heure ont été commandés), avec, dans l'ambiance des années 20, une héroïne de caractère et de charme, la pétillante Phryne Fisher. Et la série a été bien accueillie par les téléspectateurs australiens : à la différence de The Straits qui, malheureusement, peine à atteindre le demi-million de téléspectateurs, les jeudi soirs, le lancement de Miss Fisher's Murder Mysteries a permis à la série de partir sur de très bonnes bases, atteignant presque le million de téléspectateurs en moyenne pour son pilote.
Miss Fisher's Murder Mysteries se déroule en Australie dans les années 20. Au début du premier épisode, Phryne Fisher débarque à Melbourne, en provenance de Londres. Si elle a passé dans ce pays une partie de son enfance, entâchée par un drame, celui de la mort de sa soeur, Phryne a depuis parcouru le monde, les bouleversements de la Première Guerre Mondiale ayant donné à sa famille un titre et une fortune conséquente. Dotée d'un esprit vif, un brin provocatrice à ses heures, c'est une jeune femme qui aime plus que tout son indépendance.
Mais elle trouve à son arrivée la bourgeoisie locale perturbée par la mort d'un homme d'affaires, le mari d'une connaissance qui l'avait invitée justement à prendre part aux festivités qu'elle organisait le soir-même. Avec ce sens de l'initiative qui la caractérise, Phryne entame sa propre enquête sur ce décès suspect. Cette première investigation va être l'occasion de trouver une nouvelle servante, Dot, une catholique pratiquante fâchée avec l'électricité, ou encore de rencontrer l'inspecteur de police en charge du dossier, Jack Robinson, qui ne voit pas ses interventions d'un très bon oeil. Aidée par une amie médecin et encadrée par une tante pour qui les convenances importent, Phryne est bien décidée à connaître le fin mot de ces intrigues.
Investissant un registre historico-policier léger et dynamique, Miss Fisher's Murder Mysteries est une série qui repose en grande partie sur la présence, le charme et l'aplomb sans faille de son héroïne. Dès ce premier épisode, la jeune femme trouve immédiatement ses marques, se glissant l'air de rien dans tous les mystères non résolus qu'elle croise dans Melbourne. Il faut noter que cet instinct du détective ne va pas sans une certaine ambivalence (un aspect que j'espère voir plus approfondi par la suite). En effet, la jeune femme renvoie une double image, à la fois un versant plus dramatique et intime lié aux blessures du passé - la mort de sa soeur, et un meurtrier qui n'a jamais avoué -, et un côté plus aventurier, où c'est une oisiveté bourgeoise un peu insouciante qui prend le dessus et se manifeste à travers le sens de l'initiative dont elle fait preuve. Les autres personnages, aux profils vite définis, forment une galerie de figures parfaitement complémentaires, dont les intéractions avec Phryne devraient bien fonctionner.
Au-delà de l'introduction de ses protagonistes, le pilote de Miss Fisher's Murder Mysteries exploite aussi efficacement, même si de façon sans doute trop académique - et presque convenu -, le double genre qu'il se propose de retranscrire à l'écran. Du côté de l'historique, l'épisode s'attache à bien dépeindre l'ambiance de l'entre-deux-guerres : outre une bourgeoisie festive, il mêle ainsi divers thèmes attendus, entre questions de moeurs (émancipation féminine) et tensions politiques et sociales (communisme). Le côté policier use quant à lui de ficelles excessivement classiques. La première enquête ne brille, ni par son originalité, ni par la manière dont elle est conduite. Sa principale particularité tient à la tonalité volontairement légère, et assez enjouée, que la série suit tout au long de l'intrigue. Ce n'est pas tant l'histoire en elle-même que les rencontres et les échanges qu'elle occasionne qui retiennent l'attention du téléspectateur. Les réparties de Phryne donnent du piment à un récit qui se laisse ainsi suivre avec plaisir ; et plus généralement, le fait que les protagonistes soient le point fort de ces débuts incitent à l'optimisme, puisqu'ils seront l'élément constant de la série.
L'atmosphère de Miss Fisher's Murder Mysteries se retrouve bien retranscrite dans la forme. Si la réalisation est très classique, la photographie opte opportunément pour des teintes claires et offre son lot de couleurs chatoyantes, bien aidée par les costumes et robes d'époque. C'est agréable à l'oeil, et sans donner l'impression d'être une reconstitution historique rigoureuse, le téléspectateur se laisse facilement entraîner par ce cadre. A noter également que l'épisode s'ouvre sur un générique swingant à souhait (que Jeeves & Wooster n'aurait pas renié), joli esthétiquement, et qui souligne la volonté d'impulser une réelle dynamique à l'épisode (même si certains passages de ce dernier perdront parfois ce rythme).
Enfin Miss Fisher's Murder Mysteries bénéficie d'un casting sympathique. Une bonne partie du charme et de l'attrait de la série tient évidemment à la performance d'Essie Davis (Cloudstreet, The Slap) qui, même si elle a tendance à parfois un peu trop en faire pour pleinement habiter son rôle, n'en demeure pas moins pétillante et énergique à souhait. A ses côtés, on retrouve notamment Nathan Page (Underbelly, All Saints), Miriam Margolyes, Ashleigh Cummings ou encore Hugo Johnstone-Burt (Cloudstreet).
Bilan : Cocktail coloré et assez léger, mêlant insouciance des années 20 et intrigue policière classique, le pilote de Miss Fisher's Murder Mysteries se regarde avec plaisir. En dépit d'une écriture un peu trop académique et de quelques flottements ou raccourcis discutables, le téléspectateur se laisse emporter dans le sillage de Phryne, aventurière futée et charmante au sens de la répartie certain. Si on peut sans doute reprocher à cette entrée en matière un certain manque d'ambition, les amateurs de divertissement historico-policier devraient apprécier cette fiction. Espérons que, par la suite, les scénaristes sauront se montrer plus mordants et entreprenants ; me voilà en tout cas prête à faire un bout de chemin avec cette nouvelle héroïne !
NOTE : 6,75/10
Une bande-annonce de la série :
22:43 Publié dans (Séries Océanie) | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : australie, abc1, miss fisher's murder mysteries, essie davis, nathan page, miriam margolyes, hugo johnstone-burt, ashleigh cummings | Facebook |
25/02/2012
(Mini-série UK) Inside Men : trois individualités, un braquage
En février, sur My Télé is Rich!, j'ai beaucoup parlé de télévision scandinave - un de ces cycles de téléphage monomaniaque -, au point de ne pas avoir encore consacré un seul billet au petit écran anglais. Il est grand temps d'y remédier, d'autant que ce début 2012 aura vu des fictions très intéressantes outre Manche.
La belle surprise sera indéniablement venue de Call the Midwife, une série dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler et dont les scores d'audience (une moyenne de 8,7 millions de téléspectateurs) l'auront imposée comme le plus grand succès de ces dix dernières années (!) pour la BBC. Je n'aurais sans doute pas le temps de faire un bilan de cette première saison ; sachez donc qu'il s'agit d'un de ces period drama émotionnels et justes qui fait chaud au coeur, et que je conseille fortement ! Toujours pour les amateurs de séries historiques, notez aussi que Upstairs, Downstairs a repris dimanche dernier, pour une saison 2 que l'on espère plus maîtrisée et devant laquelle je me suis installée avec curiosité.
Parallèlement, du côté des fictions contemporaines, le bilan est un peu plus mitigé. J'émettrais des réserves à l'encontre de Prisoner's Wives qui ne m'a pas convaincue : toutes ces personnalités fortes n'auront jamais réussi à dépasser l'impression d'artificialité que j'ai éprouvée devant les trois premiers épisodes. Finalement, c'est dans le registre du thriller que BBC1 se sera démarquée, avec une mini-série composée de 4 épisodes, d'une heure chacun, diffusée du 2 au 23 février 2012 : Inside Men. Créée par Tony Basgallop, cette fiction se sera révélée très prenante et intrigante, mêlant introspection et suspense pour un cocktail détonnant.
Inside Men entreprend de nous relater le braquage d'un centre de dépôt et de traitement de fonds. Le premier épisode s'ouvre sur l'attaque à main armée en elle-même, pour ensuite, remonter aux origines de cette idée et à la planification minutieuse qui l'a précédée. Au-delà du but poursuivi, la mini-série s'intéresse surtout aux motivations et aux préoccupations de ceux qui ont imaginé et mis cette opération en place. Car, comme le titre l'indique, la particularité de ce braquage tient au fait qu'il est commis, avec une aide extérieure, par des employés du centre, des hommes de l'intérieur sans qui rien n'aurait été possible.
Ce basculement de l'autre côté de la loi réunit, autour de ce projet, trois personnes qui n'avaient a priori rien en commun, ni vraiment de prédispositions pour organiser une telle opération. On y trouve un des responsables managers du site, connu pour son comportement rigide et effacé ; un garde de la sécurité, avec son lot de soucis familiaux ; et un agent chargé de transférer les caisses de fond, pas forcément très ambitieux et plutôt adepte des petites combines. Inside Men nous retrace une année d'hésitations et de choix, de l'idée de départ aux semaines qui suivront le braquage, pour tenter de nous expliquer tous les ressorts de l'évènement et les dérapages qui vont avoir lieu.
La réussite de Inside Men tient qu'elle dépasse rapidement la simple série sur une attaque à main armée, pour proposer un récit centré sur ses personnages, et les choix qu'ils vont être amenés à faire. Elle se démarque donc par sa dimension humaine : chacun bénéficie d'une caractérisation travaillée, avec ses ambivalences et ses failles. Dès le départ, l'alliance de circonstances entre les trois hommes apparaît très fragile, les causes de défiance ne manquent pas. Les relations entre les futures complices ont cette volatilité extrême qui sied aux rapports humains et crédibilise l'ensemble.
La préparation du braquage se révèle être un travail de longue haleine. Or, à mesure que l'échéance se rapproche, que le plan se concrétise, chacun voit ses doutes ou ses certitudes se renforcer, et c'est l'occasion finalement d'en apprendre plus sur lui-même que ce qu'il aurait pu imaginer. Dans le souci qu'ont certains de s'affirmer, de rompre cet anonymat anecdotique qui les étouffe, dans la volonté qu'ont d'autres de s'installer et au contraire d'embrasser une normalité bienvenue, sont ainsi dépeints des portraits très humains de personnages proches, auprès desquels le téléspectateur a envie de s'impliquer.
Si la priorité est donc donnée à l'humain sur l'opération en cours, Inside Men obéit cependant à tous les codes classiques - et efficaces - du thriller. La narration, solide, distille un suspense supplémentaire grâce aux mélanges des lignes temporelles, nous faisant d'abord vivre le braquage - et ses dérapages - pour ensuite repartir en arrière et expliquer ce qu'il s'est passé pour en arriver là. Le tableau d'ensemble se dévoile peu à peu, à mesure que l'on comprend les personnages et leurs motivations. Les loyautés changeantes des trois hommes restent toujours au coeur du récit, demeurant le fil rouge constant autour duquel la planification de l'opération se greffe.
Construite suivant un compte à rebours qui nous mène inéxorablement au jour du braquage, la mini-série rend vraiment palpable l'escalade des tensions. La gestion de l'après permettra de préciser le propos principal de la fiction : si la dernière scène peut dérouter, tant le choix de John semble a priori illogique après tout ce qui a été fait, elle s'inscrit pourtant parfaitement dans la logique d'une oeuvre qui n'était pas tant consacrée à un braquage, qu'à une véritable introspection personnelle où chacun aura beaucoup appris sur ses priorités et ses limites.
Sur la forme, Inside Men se révèle très soignée. Son esthétique travaillée, comme son alternance de plans larges et serrés, correspondent aux standards visuels de qualité auxquels BBC1 a habitué ses téléspectateurs. A noter que les scènes plus nerveuses sont également bien réussies, capturant parfaitement l'ambiance qui règne notamment lors du déroulement du braquage : sans trop en faire, la caméra sait mettre en scène les explosions et excès de violence les plus marquants.
Enfin, la mini-série repose sur les épaules d'une galerie d'acteurs qui constituent des valeurs sûres du petit écran britannique, et qui sont - sans surprise - tous à la hauteur. Steven Mackintosh (Criminal Justice, Luther, The Jury II) retranscrit admirablement la dualité de son personnage, de patron effacé et passif, il s'affirme, dérivant progressivement en plannificateur impitoyable du braquage. J'ai aussi beaucoup aimé Ashley Walter (Five Days, Outcasts, Top Boy) et Warren Brown (Luther, Single Father), fidèles à eux-mêmes, avec un jeu tout en sobriété pour nous montrer les doutes et évolutions de leurs personnages. A leurs côtés, on retrouve aussi Kiertson Wareing (The Shadow Line, Top Boy), Paul Popplewell, Nicola Walker (Spooks ; c'est toujours un plaisir de la croiser), Hannah Merry, Ruth Gemmel, Tom Mannion, Rebekah Staton, Leila Mimmack, Irfan Hussein et Gregg Chillin (Kidnap and Ransom).
Bilan : Construite comme un thriller tournant entièrement autour de la réalisation d'un braquage, Inside Men est une mini-série à suspense, très prenante et sans temps mort, qui sait utiliser à propos flashforward et flashback pour créer et cultiver une tension permanente. Cependant sa valeur ajoutée à ce sujet assez classique réside avant tout dans le soin apporté à sa dimension humaine, la mini-série proposant une très intéressante caractérisation des personnages, de leurs relations et (surtout) de leurs ambivalences. A découvrir.
NOTE : 7,75/10
La bande-annonce de la série :
13:18 Publié dans (Mini-séries UK) | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : bbc, inside men, steven mackintosh, ashley walters, warren brown, kierston wareing, paul popplewell, nicola walker, hannah merry, ruth gemmel, tom mannion, rebekah staton, leila mimmack, irfan hussein, gregg chillin | Facebook |
22/02/2012
(J-Drama) Shokuzai : l'expiation impossible
Restons au Japon en ce mercredi asiatique pour poursuivre l'exploration de la saison hivernale 2012. Comme annoncé la semaine dernière, je me suis donc lancée dans le j-drama dont j'attendais le plus en ce début d'année : Shokuzai. Il y a quelque chose de très rassurant et de réellement réconfortant quand une série ne déçoit pas les espoirs que vous aviez placés préalablement en elle... et j'ai le plaisir d'écrire que ça a été le cas cette semaine.
Diffusée du 8 janvier au 5 février 2012 au Japon, Shokuzai est une adaptation, scénarisée par Kurosawa Kiyoshi, d'un roman de Minato Kanae. Elle avait a priori sur le papier tout pour retenir mon attention : elle était proposée par la chaîne câblée WOWOW qui, si elle a aussi connu ses ratés (Prisoner...), reste une des plus fiables qui soient (et correspondant à mes goûts) ; elle disposait d'une longueur qui promettait une histoire condensée et peu de risque de s'égarer (5 épisodes) ; et son synopsis était intriguant. Construite autour d'une thématique dramatique troublante, celle de l'expiation, Shokuzai se sera révélée être une solide (et sombre) série.
La tragédie qui conditionne tous les destins personnels que va nous relater Shokuzai s'est produite il y a 15 ans. Alors que ses parents viennent d'emménager en provenance de Tokyo, la petite Emiri découvre l'école élémentaire locale. Sae, Maki, Akiko et Yuka deviennent rapidement ses compagnes de jeu. Mais un jour qu'elles s'amusent dans la cour de l'école, un homme vient demander de l'aide pour fixer un problème de ventilation qu'il ne peut atteindre. Emiri accepte de le suivre, seule. Un peu plus tard, se rendant compte que leur amie n'est toujours pas revenue, les quatre écolières rentrent à leur tour dans le gymnase où elles l'ont vue partir. Elles y découvrent, effarées, le corps sans vie d'Emiri.
Quelques mois plus tard, alors que la vie reprend difficilement son cours, les quatre jeunes filles sont invitées par la mère d'Emiri, Asako, en l'honneur de leur amie disparue. Il faut dire que, malheureusement, leurs témoignages n'ont guère été utiles à la police, aucune n'ayant été en mesure de décrire le suspect qui les avaient approchées. Asako se montre particulièrement dure à leur encontre, les considérant responsables de la non-arrestation du coupable. Elle leur promet solennellement que si le meurtrier n'est pas retrouvé, elles devront expier cette faute impardonnable. Les filles quittent ensuite secouées et marquées la maisonnée.
Quinze ans plus tard, jeunes adultes ayant chacune grandies de leur côté, sans plus aucun contact entre elles, ce drame du passé hante pourtant toujours leur vie, et conditionne leurs choix et leurs réactions. Le temps de l'expiation est-il venu ?
Shokuzai porte parfaitement son titre, puisque son thème central, autour duquel elle va proposer diverses variations, est celui de l'expiation. La mort d'Emiri, le fait de l'avoir laissée partir seule, mais aussi de n'avoir pu aider la police ensuite, s'apparentent à un lent poison qui, d'une façon ou d'une autre, ronge chacune des protagonistes. Portés par la voix accusatrice d'Asako, ils conduisent sur une voie létale. La série met ainsi en scène un véritable effet domino aux conséquences destructrices glaçantes. En suivant une narration atypique, chaque épisode étant consacré à un personnage, elle va nous montrer combien le premier drame a influé, parfois bloqué, voire détruit, cinq vies, celles des quatre amies d'Emiri, mais aussi celle de mère qui, prostrée de douleur, n'en est pas moins aussi une victime.
Prenant pleinement la mesure de son sujet, Shokuzai est logiquement un drama particulièrement sombre et troublant. Il expose des ressorts psychologiques qu'il est plus confortable de laisser inexplorés : ceux qui actionnent consciemment ou non une culpabilité pesante, et les manières dont celle-ci va se manifester. Chacune des filles a intégré le drame, et ce qu'il représente pour elle, suivant sa personnalité et son vécu d'alors. Si elles le vivent de façon très personnelle, elles partagent une même faille, nourrie de la détresse émotionnelle dans laquelle elles ont été submergées il y a 15 ans, mais aussi de ressentiments qu'elles éprouvent envers elles-mêmes. Ces éléments font d'elles de véritables bombes à retardement.
Au fil du drama, l'expiation réclamée par Asako apparaît comme ce moment où, confrontées à une situation qui menace leur équilibre psychologique, quelque chose se rompt dans chacune de ces désormais jeunes femmes. Le plus perturbant - et réussi - dans cette mise en scène tient à la narration subjective choisie : l'histoire nous est en effet racontée du point de vue du personnage central de l'épisode, offrant donc une vue biaisée de tout ce qui l'entoure. Entraîné aux confins de la subjectivité, percevant les scènes et les dialogues à travers les yeux de l'héroïne de l'heure, le téléspectateur est amené plus d'une fois à s'interroger sur l'éventuelle distance pouvant exister entre la réalité et la perception des personnages, abusés qu'ils sont par leurs préconceptions forgées dans le drame passé.
Si les épisodes ne sont pas tous égaux en terme de qualité narrative, leur réussite est de parvenir à proposer à chaque fois un récit émotionnellement fort, qui ne laisse pas indifférent le téléspectateur. Si chaque fille a tenté de préserver, à sa façon, sa santé mentale, les épisodes s'apparentent à un compte à rebours inquiétant qu'on devine sans happy end. C'est le premier, parce qu'il donne le ton, qui restera pour moi le plus dérangeant : il met en scène une jeune fille qui a cessé de grandir, souhaitant se couper du monde. Acceptant une non-vie dans laquelle c'est elle-même qu'elle perd, sa tentative de fuite et les sacrifices occasionnés seront pourtant inutile. La prise de conscience de cela lui sera insupportable, et conduira à un drame. Enfin, notons que le dernier épisode referme opportunément la boucle en tendant à Asako un miroir pour lui faire vivre, à son tour, ce que les quatre autres ont traversé.
Ce qui contribue également beaucoup à la réussite de Shokuzai, c'est le fait que la série paraissent particulièrement aboutie sur le plan formel. La réalisation est impeccable, bénéficiant d'une mise en scène millimétrée à l'esthétique superbe. La photographie est très travaillée, s'adaptant à l'ambiance de chaque passage : elle glisse des teintes colorées du début à une image tendant vers le noir et blanc, d'où toute couleur semble avoir été drainée, à mesure que chaque personnage voit sa vie s'étioler. La bande-son est pareillement maîtrisée : avec une sobriété caractéristique, on trouve dans ce drama avant tout tout beaucoup de silences, mais également quelques instrumentaux utilisés à propos.
Enfin, Shokuzai dispose d'une galerie d'actrices très convaincantes qui prennent bien la mesure de leur rôle et des ambivalences de chaque personnages. Koizumi Kyoko (Manhattan Love Story) incarne cette mère meurtrie qui pleure son enfant tout en espérant que justice soit rendue, sans qu'on sache précisément dans quelle mesure elle a vraiment conscience que c'est la vie des quatre autres jeunes filles qu'elle a peut-être détruit lors de cette discussion sur l'expiation, quinze ans auparavant. Ces dernières sont interprétées respectivement par Aoi Yu (Camouflage), Koike Eiko (Smile), Ando Sakura (Kaze no Hate) et Ikewaki Chizuru (Fuurin Kazan, Keiji no Genba).
Bilan : Shokuzai est un drama troublant, expliquant comme des vies peuvent être détruites par un passé qui influence toutes les réactions et perceptions de ses protagonistes. La thématique de l'expiation entraîne inexorablement les différents personnages sur un chemin autodestructeur où la logique et la fatalité empêchent de déterminer s'ils ont conscience de ce qui est réellement en jeu. En dépit de la surenchère dans laquelle versent certains développements, j'ai aimé l'ambiance sombre et le fait que le drama laisse souvent la place à l'interprétation du téléspectateur. Dotée d'une mise en scène sobre, avec un sens parfois presque contemplatif du drame propre à ce petit écran japonais, Shokuzai a donc été un série qui m'a beaucoup intrigué et fasciné. Mon j-drama de l'hiver 2012.
NOTE : 8,25/10
17:57 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : j-drama, shokuzai, wowow, koizumi kyoko, aoi yu, koike eiko, ando sakura, ikewaki chizuru | Facebook |