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25/02/2012

(Mini-série UK) Inside Men : trois individualités, un braquage

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En février, sur My Télé is Rich!, j'ai beaucoup parlé de télévision scandinave - un de ces cycles de téléphage monomaniaque -, au point de ne pas avoir encore consacré un seul billet au petit écran anglais. Il est grand temps d'y remédier, d'autant que ce début 2012 aura vu des fictions très intéressantes outre Manche. 

La belle surprise sera indéniablement venue de Call the Midwife, une série dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler et dont les scores d'audience (une moyenne de 8,7 millions de téléspectateurs) l'auront imposée comme le plus grand succès de ces dix dernières années (!) pour la BBC. Je n'aurais sans doute pas le temps de faire un bilan de cette première saison ; sachez donc qu'il s'agit d'un de ces period drama émotionnels et justes qui fait chaud au coeur, et que je conseille fortement ! Toujours pour les amateurs de séries historiques, notez aussi que Upstairs, Downstairs a repris dimanche dernier, pour une saison 2 que l'on espère plus maîtrisée et devant laquelle je me suis installée avec curiosité.

Parallèlement, du côté des fictions contemporaines, le bilan est un peu plus mitigé. J'émettrais des réserves à l'encontre de Prisoner's Wives qui ne m'a pas convaincue : toutes ces personnalités fortes n'auront jamais réussi à dépasser l'impression d'artificialité que j'ai éprouvée devant les trois premiers épisodes. Finalement, c'est dans le registre du thriller que BBC1 se sera démarquée, avec une mini-série composée de 4 épisodes, d'une heure chacun, diffusée du 2 au 23 février 2012 : Inside Men. Créée par Tony Basgallop, cette fiction se sera révélée très prenante et intrigante, mêlant introspection et suspense pour un cocktail détonnant.

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Inside Men entreprend de nous relater le braquage d'un centre de dépôt et de traitement de fonds. Le premier épisode s'ouvre sur l'attaque à main armée en elle-même, pour ensuite, remonter aux origines de cette idée et à la planification minutieuse qui l'a précédée. Au-delà du but poursuivi, la mini-série s'intéresse surtout aux motivations et aux préoccupations de ceux qui ont imaginé et mis cette opération en place. Car, comme le titre l'indique, la particularité de ce braquage tient au fait qu'il est commis, avec une aide extérieure, par des employés du centre, des hommes de l'intérieur sans qui rien n'aurait été possible.

Ce basculement de l'autre côté de la loi réunit, autour de ce projet, trois personnes qui n'avaient a priori rien en commun, ni vraiment de prédispositions pour organiser une telle opération. On y trouve un des responsables managers du site, connu pour son comportement rigide et effacé ; un garde de la sécurité, avec son lot de soucis familiaux ; et un agent chargé de transférer les caisses de fond, pas forcément très ambitieux et plutôt adepte des petites combines. Inside Men nous retrace une année d'hésitations et de choix, de l'idée de départ aux semaines qui suivront le braquage, pour tenter de nous expliquer tous les ressorts de l'évènement et les dérapages qui vont avoir lieu.

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La réussite de Inside Men tient qu'elle dépasse rapidement la simple série sur une attaque à main armée, pour proposer un récit centré sur ses personnages, et les choix qu'ils vont être amenés à faire. Elle se démarque donc par sa dimension humaine : chacun bénéficie d'une caractérisation travaillée, avec ses ambivalences et ses failles. Dès le départ, l'alliance de circonstances entre les trois hommes apparaît très fragile, les causes de défiance ne manquent pas. Les relations entre les futures complices ont cette volatilité extrême qui sied aux rapports humains et crédibilise l'ensemble.

La préparation du braquage se révèle être un travail de longue haleine. Or, à mesure que l'échéance se rapproche, que le plan se concrétise, chacun voit ses doutes ou ses certitudes se renforcer, et c'est l'occasion finalement d'en apprendre plus sur lui-même que ce qu'il aurait pu imaginer. Dans le souci qu'ont certains de s'affirmer, de rompre cet anonymat anecdotique qui les étouffe, dans la volonté qu'ont d'autres de s'installer et au contraire d'embrasser une normalité bienvenue, sont ainsi dépeints des portraits très humains de personnages proches, auprès desquels le téléspectateur a envie de s'impliquer.

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Si la priorité est donc donnée à l'humain sur l'opération en cours, Inside Men obéit cependant à tous les codes classiques - et efficaces - du thriller. La narration, solide, distille un suspense supplémentaire grâce aux mélanges des lignes temporelles, nous faisant d'abord vivre le braquage - et ses dérapages - pour ensuite repartir en arrière et expliquer ce qu'il s'est passé pour en arriver là. Le tableau d'ensemble se dévoile peu à peu, à mesure que l'on comprend les personnages et leurs motivations. Les loyautés changeantes des trois hommes restent toujours au coeur du récit, demeurant le fil rouge constant autour duquel la planification de l'opération se greffe.

Construite suivant un compte à rebours qui nous mène inéxorablement au jour du braquage, la mini-série rend vraiment palpable l'escalade des tensions. La gestion de l'après permettra de préciser le propos principal de la fiction : si la dernière scène peut dérouter, tant le choix de John semble a priori illogique après tout ce qui a été fait, elle s'inscrit pourtant parfaitement dans la logique d'une oeuvre qui n'était pas tant consacrée à un braquage, qu'à une véritable introspection personnelle où chacun aura beaucoup appris sur ses priorités et ses limites.

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Sur la forme, Inside Men se révèle très soignée. Son esthétique travaillée, comme son alternance de plans larges et serrés, correspondent aux standards visuels de qualité auxquels BBC1 a habitué ses téléspectateurs. A noter que les scènes plus nerveuses sont également bien réussies, capturant parfaitement l'ambiance qui règne notamment lors du déroulement du braquage : sans trop en faire, la caméra sait mettre en scène les explosions et excès de violence les plus marquants.

Enfin, la mini-série repose sur les épaules d'une galerie d'acteurs qui constituent des valeurs sûres du petit écran britannique, et qui sont - sans surprise - tous à la hauteur. Steven Mackintosh (Criminal Justice, Luther, The Jury II) retranscrit admirablement la dualité de son personnage, de patron effacé et passif, il s'affirme, dérivant progressivement en plannificateur impitoyable du braquage. J'ai aussi beaucoup aimé Ashley Walter (Five Days, Outcasts, Top Boy) et Warren Brown (Luther, Single Father), fidèles à eux-mêmes, avec un jeu tout en sobriété pour nous montrer les doutes et évolutions de leurs personnages. A leurs côtés, on retrouve aussi Kiertson Wareing (The Shadow Line, Top Boy), Paul Popplewell, Nicola Walker (Spooks ; c'est toujours un plaisir de la croiser), Hannah Merry, Ruth Gemmel, Tom Mannion, Rebekah Staton, Leila Mimmack, Irfan Hussein et Gregg Chillin (Kidnap and Ransom).

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Bilan : Construite comme un thriller tournant entièrement autour de la réalisation d'un braquage, Inside Men est une mini-série à suspense, très prenante et sans temps mort, qui sait utiliser à propos flashforward et flashback pour créer et cultiver une tension permanente. Cependant sa valeur ajoutée à ce sujet assez classique réside avant tout dans le soin apporté à sa dimension humaine, la mini-série proposant une très intéressante caractérisation des personnages, de leurs relations et (surtout) de leurs ambivalences. A découvrir.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série : 

06/06/2010

(Pilote UK) Pulse : horreur sanglante à la croisée du médical et du fantastique


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Je vous ai déjà parlé de mes divers traumatismes téléphagiques liés à des fictions estampillées horreur, arrivées on-ne-sait-comment à se frayer un chemin jusqu'au petit écran de ma télévision. La curiosité sériephile est parfois à ce prix. J'espérais cependant en avoir fini pour l'année avec l'horreur médicale après le visionnage de Coma il y a quelques mois (vrai drama d'horreur : un régal pour les amateurs du genre). Mais BBC3 ne m'a pas écouté. Elle a développé un projet se déroulant dans un hôpital (encore !), agrémenté d'effusions d'hémoglobine et même d'apparition de "dead people" : Pulse.  Cependant, la tension et ce flirt avec le gore ne nous plongent pas dans de la pure horreur d'épouvante (à la différence de Coma). La série capitalise plutôt sur une ambiance inquiétante, un peu dans la lignée de Au-delà du réel ou Kingdom Hospital. Quelques frissons, mais pas trop non plus.

Pulse s'inscrit dans la "saison des pilotes"  qu'affectionne la chaîne anglaise ; c'est-à-dire qu'elle diffuse à son antenne plusieurs pilotes (trois pour être précis), des "séries potentielles" dont elle lèvera ensuite l'option et commandera une saison entière... ou pas... avec plus ou moins de réactivité (cf. la fameuse jurisprudence Being Human), suivant les audiences, les réactions des critiques, du public. Donc, ce pilote n'est pas encore une série, mais, pris en charge par le scénariste Paul Cornell (à qui l'on doit notamment le double épisode marquant de la saison 3 de Doctor Who, Human Nature/The Family of Blood), il affiche incontestablement des idées qui, si elles restent encore à affiner, paraissent bien intéressantes. Si BBC3 venait à confirmer le projet, une première saison serait diffusée en 2011.

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Pulse se déroule au sein d'un hôpital privé, l'archétype du lieu où tous les fantasmes horrifiques sont permis. Hannah Carter, étudiante en médecine, y revient sur les traces professionnelles de sa mère, dont le décès est encore récent, en reprenant sa formation dans l'établissement hospitalier universitaire au sein duquel cette dernière officiait. La jeune femme avait pris une pause nécessaire après avoir perdu ses nerfs au cours d'une opération qui a mal tourné. Encore fragile, elle n'est pas certaine d'être prête à faire face à la pression d'un job très concurrentiel et aux implications émotionnelles qu'entraînent ses patients.

Ses craintes se confirment, se changeant en doutes sur ses capacités, lorsque, lors de sa première consultation, il lui semble voir des formes bouger sous la peau d'un patient. Elle s'inquiète, de plus en plus troublée. Souffre-t-elle d'hallucinations ? Craque-t-elle à nouveau nerveusement ? Mais sa logique la conduit à creuser d'autres pistes, un brin plus rationnelles, mais tout aussi inquiétantes. Que fait-on réellement subir à son patient ? A quoi renvoie ses opérations chirurgicales à répétition sur un cas dont on ne s'explique pas que l'homme soit encore vivant ? Et comment interpréter le comportement de son ex-petit ami, chirurgien tiitulaire dans cet hôpital ?

Il se passe des choses étranges, dans cet hôpital, qui ne sont manifestement pas seulement issues de l'imagination de Hannah. Qu'est-ce qui est réellement en cours derrière ces murs ? Quelles expériences défiant et repoussant les limites de la raison et la science y sont menées en secret ?

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Dès les premières minutes, entre plans de caméra tremblants et musique de circonstance, le ton de Pulse est donné : il s'agit d'une série d'ambiance. Nous sommes dans de l'horreur qui se bâtit sur le suggestif, manipulant et exploitant le ressenti du téléspectateur, l'invitant à se prendre au jeu en s'immergeant dans cette atmosphère nerveuse, chargée d'une insécurité diffuse. On ne sait ce qui peut surgir au détour d'un couloir ; mais l'important réside surtout dans le fait que l'on s'attend au pire, glissant subrepticement dans une sourde paranoïa, se surprenant à s'arrêter suspicieusement sur le moindre détail en apparence (et parfois réellement) anecdotique.

Ce suggestif nourrit la tension du téléspectateur, l'intriguant et le préparant au basculement véritable à venir dans des scènes d'horreur. Car le pilote va crescendo, encourageant d'abord le malaise de l'héroïne et, par ricochet, celui du téléspectateur. Puis, peu à peu, à mesure que les sujets d'inquiétude se précisent, la série s'affirme dans le créneau de l'horreur fantastique/médicale, exploitant ce riche terreau des classiques cauchemardesques rattachés à ce lieu. Une question tourne en boucle, devenant chaque minute plus oppressante : que se passe-t-il derrière les portes closes de ces couloirs d'un blanc trompeusement immaculé ?

De la même façon, à mesure que les menaces se matérialisent, l'épisode développe un autre caractère de l'horreur télévisée, versant dans un gore qui trouve parfaitement sa place dans un hôpital. La série s'offre ainsi quelques passages sanguinolents à souhait, de plus en plus marquants : après avoir débuté sur la table d'opération, ces scènes se finissent par des découpages d'assaillant mort/vivant à la scie électrique dans les couloirs de la morgue. Ce recours au registre du gore contribue à accroître l'impression de malaise du téléspectateur, mettant ses nerfs à rude épreuve.

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Si on se laisse facilement gagné par cette atmosphère nerveuse et oppressante, située à l'intersection floue de la science et du fantastique, tout n'est pas parfait. Mais une chose est sûre : les créateurs se sont investis et ont eu à coeur d'essayer de faire de Pulse une série avec son identité, sa marque de fabrique et un ton qui lui est propre. Si, sur le fond, ce pilote se réapproprie avec un certain succès, mais sans trop de prises de risque, les ficelles classiques de l'horreur en milieu médical, on perçoit également une volonté - pas toujours bien concrétisée - de bien faire sur la forme.

Le réalisateur tente ainsi beaucoup. Des initiatives qui n'apparaissent pas toujours opportunes, un peu trop artificielles parfois, mais qui ont le mérite d'exister. Des passages filmés la caméra tressautant à l'épaule jusqu'aux plans plus ou moins droits ou en retrait, ce pilote est parsemé de nombreux essais. Certes, ces expériences ont une réussite variable. Mais, en dépit de quelques maladresses, le but est atteint : jamais le téléspectateur ne se départit du sentiment de trouble qui émane à dessein du style ainsi créé. Au final, la forme permet de véritablement asseoir Pulse dans son registre horrifique aussi efficacement que les débauches d'hémoglobine.

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Côté casting, les hasards des programmations des chaînes font parfois bien les choses, puisque l'héroïne de Pulse est incarnée pas la rafraîchissante Claire Foy (Little Dorrit), avec laquelle le téléspectateur britannique a pu se re-familiariser en début de semaine, puisqu'elle jouait la figure féminine de Going Postal sur Sky One. Elle se révèle très convaincante dans un rôle somme toute très classique pour ce genre de fiction, naviguant entre une naïveté intermittente et un pragmatisme faisant ressortir le fort caractère de son personnage.

A ses côtés, et même si certains ne survivent pas au pilote, nous retrouvons notamment : Stephen Campbell Moore (Ashes to Ashes), Gregg Chillin (Being Human), Ben Miles (Lark Rise to Candleford), Matti Houghton (qui jouait récemment les guest-stars dans un des derniers épisodes de Luther), Caroline Goodall ou encore Alan Williams.

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Bilan : Se situant au croisement incertain du scientifique et du fantastique, Pulse s'inscrit dans une tradition d'horreur médicale, agrémentée d'une touche gore qui lui permet de conforter l'ambiance nerveuse et tendue qu'elle réussit à créer. L'univers hospitalier est efficacement introduit, tout comme les protagonistes. L'épisode peut se visionner seul et le twist final constitue un honnête cliffhanger qui esquisse d'intéressantes promesses pour la suite (si suite il y a). L'ensemble est porté par le dynamisme enthousiaste de ses créateurs, qui témoignent d'une envie de tenter et d'expérimenter. Ce n'est pas toujours pleinement maîtrisé, parfois un peu brouillon, mais le téléspectateur se laisse facilement prendre au jeu et gagner par l'atmosphère ainsi créée.

Au vu du potentiel que laisse entrevoir ce pilote, je serais curieuse de découvrir une saison complète de cet acabit. Les communiqués de presse de BBC3 sont à surveiller !


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce du pilote :