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13/01/2013

(UK) Wallander, saisons 1 à 3 : Tram wires cross northern skies...

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Comme je vous le disais vendredi en évoquant la norvégienne Torpedo, il flotte sur mon début d'année comme un parfum scandinave très prononcé. La série dont je vais vous parler aujourd'hui en est une nouvelle illustration, nous transportant cette fois en Suède. Wallander est le principal protagoniste d'une suite de romans de l'écrivain Henning Mankell (disponibles en France, mais que je n'ai jamais eu l'occasion de lire jusqu'à présent). L'inspecteur avait déjà connu des adaptations sur petit et grand écran dans sa Suède natale (il est fort possible que je revienne sur cette série ultérieurement), cependant en 2008, c'est la BBC qui a, à son tour, proposé sa propre version des romans de Mankell.

Tournée en Suède, Wallander est probablement la plus nordique des séries britanniques actuelles. Chacune de ses saisons est composée de 3 épisodes de 90 minutes. Elle compte pour le moment 3 saisons, soit 9 épisodes en tout. En France, c'est Arte (ainsi que sur 13e Rue) qui s'est chargée de la diffusion. En ce qui me concerne, j'ai vraiment savouré cette belle découverte (à raison d'un épisode par soir depuis le début de l'année). Wallander est une série à l'ambiance soignée, à l'esthétique magnifique, reposant sur une écriture solide et de bons acteurs.

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La série est entièrement centrée sur le personnage de Kurt Wallander, un détective de police officiant dans la petite ville d'Ystad, en Suède. Chaque épisode est l'occasion de partager avec lui ses doutes, ses réactions horrifiés et ses intuitions en suivant une enquête particulière, durant laquelle il est assisté par une équipe qui connaîtra des changements au cours de la série, principalement lors du passage de la deuxième à la troisième saison. S'investissant de façon démesurée dans les affaires qu'il doit résoudre, faisant souvent preuve d'une empathie qui menace à tout moment de le submerger, Wallander vit par et dans son travail.

La place occupée par son métier a logiquement des conséquences sur sa vie privée. Au début de la première saison, récemment séparé de son épouse, il a du mal à tourner la page et à envisager de reconstruire sa vie. De manière générale, ses relations familiales restent compliquées, aussi bien avec sa fille, Linda, qu'avec son père, Povel, qui n'a jamais approuvé son choix de carrière et dont la maladie diagnostiquée amène Kurt à se questionner sur leurs rapports. Si les épisodes proposent des enquêtes indépendantes, en revanche, les développements privés du personnage sont un fil rouge qui rythme chaque saison.

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Wallander se déroule dans une petite ville perdue dans la campagne suédoise, coincée entre ces champs aux couleurs changeantes peuplés d'éoliennes à perte de vue, et une mer étendant son horizon bleuté. Intégrant pleinement dans le récit ce décor, entre terre et mer, à la beauté et à la tranquillité apparentes, la fiction ne cessera de souligner le contraste apporté par l'horreur des faits divers qui viennent troubler ces lieux. Wallander est une oeuvre policière d'ambiance, dans laquelle le téléspectateur s'immerge. La durée des épisodes - 90 minutes - lui permet de trouver le juste équilibre dans son rythme de narration : tout en proposant des enquêtes généralement très solides, parfois particulièrement intenses, la série prend son temps pour développer une approche plus introspective inhérente à son parti pris de se centrer sur un personnage principal aux états d'âme multiples et fréquents, qui réfléchit beaucoup sur sa vie et sur tout ce que son métier l'amène à croiser.

Les intrigues sont ancrées dans la société suédoise moderne (immigration, fanatisme), ou conduisent à s'interroger sur la nature humaine. Elles ne sont étrangères ni aux excès de violence, ni à la surenchère de sordide. Pourtant Wallander marque avant tout le téléspectateur par l'investissement que va susciter chez lui ce détective usé, physiquement et mentalement, par un métier qu'il ne peut pourtant pas envisager de quitter. La série en dresse un portrait fascinant, nuancé, dépeignant les forces mais aussi les défauts et les failles. On s'attache à lui pour son humanité, pour sa capacité à refuser de finir désensibilisé par l'habitude de côtoyer des horreurs à la différence de certains de ses collègues, pour sa faculté à être toujours en mesure de se révolter, ou encore pour l'implication sans mesure dont il fait preuve dans ses affaires. Il porte en lui comme une déchirure, à la fois désabusé mais essayant de continuer d'aller de l'avant, incapable pourtant de ne pas répéter les mêmes erreurs. Son empathie et son entêtement professionnel restent les deux caractéristiques qui le définissent.

Signe de cette priorité donnée à cette figure centrale, durant certains épisodes, les enquêtes semblent presque en retrait, la série s'intéressant avant tout à la manière dont Wallander vit l'affaire à résoudre. On a l'impression de voir vasciller sous nos yeux ses dernières certitudes sur la nature humaine. Chaque saison apporte des développements consistants pour le personnage, explorant différentes thématiques. Il y a tout d'abord celle de la famille qui demeure un fil rouge constant : la série met en scène ses rapports difficiles avec sa fille, laquelle oscille entre la volonté de soutenir son père et la frustration que provoquent son ordre des priorités. La fiction revient aussi sur l'incompréhension qui sépare Wallander de son père, avec des blessures que la maladie de ce dernier va faire ressortir. La deuxième saison introduit un arc supplémentaire en plaçant Wallander face à sa conscience, à la responsabilité d'avoir dû tuer un homme. Quelque chose semble alors définitivement brisé en lui. Inlassablement il repart pourtant, reproduisant les mêmes schémas. La construction des saisons est cependant habile, à l'image du final de la troisième et du repos relatif qu'il semble trouver à la fin.

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Si cette série britannique capture à merveille l'ambiance scandinave de son sujet, elle le doit aussi aux moyens mis dans la forme. Tout d'abord il faut saluer le fait que Wallander ait été filmée dans la région de la ville de son héros, Ystad en Suède. Et même lorsque la fiction nous entraîne dans d'autres pays, comme durant la saison 3 où un épisode permet une incursion en Lettonie, le tournage s'y déplace. Nous avons donc droit à d'authentiques décors nordiques. Surtout, la réalisation, parfaitement maîtrisée, prend le temps d'inscrire les histoires dans les paysages dans lesquels se déroule l'action. Ces derniers sont superbement mis en valeur par une photographie absolument sublime qui laissera plus d'une fois le téléspectateur rêveur. Wallander respire la Suède et nous en offre une vue des plus belles.

Par ailleurs, la série est accompagnée d'une bande-son parfaite pour l'occasion. Rien n'y est laissé au hasard pour construire avec soin cette ambiance particulière : les thèmes récurrents, notamment au piano, se confondent à merveille avec le récit. Il faut dire que le ton est posé dès le générique, au cours duquel retentit une superbe chanson, teintée d'une douce mélancolie qui correspond si bien à la figure centrale de la série. A noter qu'elle a vu ses paroles spécialement réadaptées pour l'occasion, puisque dans sa version originale, elle ne parle pas du ciel du nord, mais de celui de... Melbourne. (Je vous renvoie à deux des vidéos ci-dessous ; puisque j'ai mis en bonus la chanson d'origine.)

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Enfin, Wallander ne serait pas ce qu'elle est sans le casting solide qu'elle ressemble. Kenneth Branagh porte véritablement la série grâce à une justesse d'interprétation et de nuances, où perce une force particulièrement impressionnante. Il s'est vraiment approprié ce personnage complexe qu'est Wallander, pour en proposer au téléspectateur une version crédible et solide. Comme il est la figure la plus importante, celle qu'on suit tout au long de chaque épisode, les autres restent logiquement plus en retrait. Au sein de sa famille, Jeany Spark (A Touch of Cloth) interprète sa fille, Linda, avec laquelle il entretient des rapports difficiles. David Warner (Masada, Marco Polo, Conviction, The Secret of Crickley Hall) joue durant les deux premières saisons son père.

Du côté de la police, les officiers qui l'entourent connaissent un renouvellement progressif au fil des trois saisons. Sarah Smart (Jane Hall, Five Days, The Secret of Crickley Hall), dans le rôle de Anne-Britt, a cependant quelques occasions d'être mise en avant, tout comme Tom Hiddleston (Suburban shotout, The Hollow Crown ; présent dans les deux premières saisons, l'acteur étant ensuite parti jouer les Dieux nordiques en colère sur grand écran). On croise également Sadie Shimmin et Richard McCabe. La saison 3 voit un renouvellement plus marqué, avec l'arrivée de Rebekah Staton, Mark Hadfield ou encore Barnaby Kay. De plus, Wallander, c'est aussi un joli défilé de guest-stars de luxe, avec de solides représentants du petit écran britannique et même... danois, puisque Soren Malling (Forbrydelsen, Borgen) est de passage dans le deuxième épisode de la saison 3.

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Bilan : Nous transportant dans des paysages sudéois sublimés par une magnifique photographie, Wallander propose une version particulièrement réussie du polar scandinave. Plus que ses enquêtes, la série interpelle grâce à l'intensité de son personnage central, qui partage avec le téléspectateur tous ses doutes et ses états d'âme, marqué par les atrocités qu'il a chaque jour à résoudre. Avec son casting très convaincant au sein duquel Kenneth Branagh tient là un de ses plus beaux rôles, et une écriture solide, il s'agit d'une série chaudement recommandée aux amateurs de policiers nordiques, et au-delà.


NOTE : 8/10


Le générique de la série :

Une bande-annonce (pour la saison 3) :

BONUS - La chanson qui retentit dans le générique en intégralité ("Nostalgia", par Emily Barker) :

25/02/2012

(Mini-série UK) Inside Men : trois individualités, un braquage

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En février, sur My Télé is Rich!, j'ai beaucoup parlé de télévision scandinave - un de ces cycles de téléphage monomaniaque -, au point de ne pas avoir encore consacré un seul billet au petit écran anglais. Il est grand temps d'y remédier, d'autant que ce début 2012 aura vu des fictions très intéressantes outre Manche. 

La belle surprise sera indéniablement venue de Call the Midwife, une série dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler et dont les scores d'audience (une moyenne de 8,7 millions de téléspectateurs) l'auront imposée comme le plus grand succès de ces dix dernières années (!) pour la BBC. Je n'aurais sans doute pas le temps de faire un bilan de cette première saison ; sachez donc qu'il s'agit d'un de ces period drama émotionnels et justes qui fait chaud au coeur, et que je conseille fortement ! Toujours pour les amateurs de séries historiques, notez aussi que Upstairs, Downstairs a repris dimanche dernier, pour une saison 2 que l'on espère plus maîtrisée et devant laquelle je me suis installée avec curiosité.

Parallèlement, du côté des fictions contemporaines, le bilan est un peu plus mitigé. J'émettrais des réserves à l'encontre de Prisoner's Wives qui ne m'a pas convaincue : toutes ces personnalités fortes n'auront jamais réussi à dépasser l'impression d'artificialité que j'ai éprouvée devant les trois premiers épisodes. Finalement, c'est dans le registre du thriller que BBC1 se sera démarquée, avec une mini-série composée de 4 épisodes, d'une heure chacun, diffusée du 2 au 23 février 2012 : Inside Men. Créée par Tony Basgallop, cette fiction se sera révélée très prenante et intrigante, mêlant introspection et suspense pour un cocktail détonnant.

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Inside Men entreprend de nous relater le braquage d'un centre de dépôt et de traitement de fonds. Le premier épisode s'ouvre sur l'attaque à main armée en elle-même, pour ensuite, remonter aux origines de cette idée et à la planification minutieuse qui l'a précédée. Au-delà du but poursuivi, la mini-série s'intéresse surtout aux motivations et aux préoccupations de ceux qui ont imaginé et mis cette opération en place. Car, comme le titre l'indique, la particularité de ce braquage tient au fait qu'il est commis, avec une aide extérieure, par des employés du centre, des hommes de l'intérieur sans qui rien n'aurait été possible.

Ce basculement de l'autre côté de la loi réunit, autour de ce projet, trois personnes qui n'avaient a priori rien en commun, ni vraiment de prédispositions pour organiser une telle opération. On y trouve un des responsables managers du site, connu pour son comportement rigide et effacé ; un garde de la sécurité, avec son lot de soucis familiaux ; et un agent chargé de transférer les caisses de fond, pas forcément très ambitieux et plutôt adepte des petites combines. Inside Men nous retrace une année d'hésitations et de choix, de l'idée de départ aux semaines qui suivront le braquage, pour tenter de nous expliquer tous les ressorts de l'évènement et les dérapages qui vont avoir lieu.

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La réussite de Inside Men tient qu'elle dépasse rapidement la simple série sur une attaque à main armée, pour proposer un récit centré sur ses personnages, et les choix qu'ils vont être amenés à faire. Elle se démarque donc par sa dimension humaine : chacun bénéficie d'une caractérisation travaillée, avec ses ambivalences et ses failles. Dès le départ, l'alliance de circonstances entre les trois hommes apparaît très fragile, les causes de défiance ne manquent pas. Les relations entre les futures complices ont cette volatilité extrême qui sied aux rapports humains et crédibilise l'ensemble.

La préparation du braquage se révèle être un travail de longue haleine. Or, à mesure que l'échéance se rapproche, que le plan se concrétise, chacun voit ses doutes ou ses certitudes se renforcer, et c'est l'occasion finalement d'en apprendre plus sur lui-même que ce qu'il aurait pu imaginer. Dans le souci qu'ont certains de s'affirmer, de rompre cet anonymat anecdotique qui les étouffe, dans la volonté qu'ont d'autres de s'installer et au contraire d'embrasser une normalité bienvenue, sont ainsi dépeints des portraits très humains de personnages proches, auprès desquels le téléspectateur a envie de s'impliquer.

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Si la priorité est donc donnée à l'humain sur l'opération en cours, Inside Men obéit cependant à tous les codes classiques - et efficaces - du thriller. La narration, solide, distille un suspense supplémentaire grâce aux mélanges des lignes temporelles, nous faisant d'abord vivre le braquage - et ses dérapages - pour ensuite repartir en arrière et expliquer ce qu'il s'est passé pour en arriver là. Le tableau d'ensemble se dévoile peu à peu, à mesure que l'on comprend les personnages et leurs motivations. Les loyautés changeantes des trois hommes restent toujours au coeur du récit, demeurant le fil rouge constant autour duquel la planification de l'opération se greffe.

Construite suivant un compte à rebours qui nous mène inéxorablement au jour du braquage, la mini-série rend vraiment palpable l'escalade des tensions. La gestion de l'après permettra de préciser le propos principal de la fiction : si la dernière scène peut dérouter, tant le choix de John semble a priori illogique après tout ce qui a été fait, elle s'inscrit pourtant parfaitement dans la logique d'une oeuvre qui n'était pas tant consacrée à un braquage, qu'à une véritable introspection personnelle où chacun aura beaucoup appris sur ses priorités et ses limites.

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Sur la forme, Inside Men se révèle très soignée. Son esthétique travaillée, comme son alternance de plans larges et serrés, correspondent aux standards visuels de qualité auxquels BBC1 a habitué ses téléspectateurs. A noter que les scènes plus nerveuses sont également bien réussies, capturant parfaitement l'ambiance qui règne notamment lors du déroulement du braquage : sans trop en faire, la caméra sait mettre en scène les explosions et excès de violence les plus marquants.

Enfin, la mini-série repose sur les épaules d'une galerie d'acteurs qui constituent des valeurs sûres du petit écran britannique, et qui sont - sans surprise - tous à la hauteur. Steven Mackintosh (Criminal Justice, Luther, The Jury II) retranscrit admirablement la dualité de son personnage, de patron effacé et passif, il s'affirme, dérivant progressivement en plannificateur impitoyable du braquage. J'ai aussi beaucoup aimé Ashley Walter (Five Days, Outcasts, Top Boy) et Warren Brown (Luther, Single Father), fidèles à eux-mêmes, avec un jeu tout en sobriété pour nous montrer les doutes et évolutions de leurs personnages. A leurs côtés, on retrouve aussi Kiertson Wareing (The Shadow Line, Top Boy), Paul Popplewell, Nicola Walker (Spooks ; c'est toujours un plaisir de la croiser), Hannah Merry, Ruth Gemmel, Tom Mannion, Rebekah Staton, Leila Mimmack, Irfan Hussein et Gregg Chillin (Kidnap and Ransom).

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Bilan : Construite comme un thriller tournant entièrement autour de la réalisation d'un braquage, Inside Men est une mini-série à suspense, très prenante et sans temps mort, qui sait utiliser à propos flashforward et flashback pour créer et cultiver une tension permanente. Cependant sa valeur ajoutée à ce sujet assez classique réside avant tout dans le soin apporté à sa dimension humaine, la mini-série proposant une très intéressante caractérisation des personnages, de leurs relations et (surtout) de leurs ambivalences. A découvrir.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série :