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13/11/2013

(J-Drama / Pilote) Henshin Interviewer no Yuutsu : un mélange improbable de mystère et de comédie

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En ce mercredi asiatique, je vous propose de prendre la direction du Japon et de commencer cette nouvelle saison d'automne par un instant de détente. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre en m'installant devant Henshin Interviewer no Yuutsu, mais j'espérais cependant y retrouver cet humour décalé caractéristique des dramas de Miki Satoshi que j'ai déjà eu l'occasion d'apprécier : en effet, Jikou Keisatsu, ou plus encore, Atami no Sousakan (qui reste un de mes grands coups de cœur japonais de ces dernières années), m'ont laissé de bons souvenirs.

Débuté le 21 octobre 2013 sur la chaîne TBS, Henshin Interviewer no Yuutsu promettait un mélange de mystère et de comédie. Ses deux premiers épisodes sonnent indéniablement sympathiques, en dépit de quelques excès. De plus, la durée relativement brève des épisodes (30 minutes seulement) permet à l'ensemble de conserver un rythme soutenu. Si bien que, même s'il est trop tôt pour savoir précisément jusqu'où nous entraînera ce drama qui surfe sur une diffuse excentricité, je pense pouvoir m'y laisser prendre sans difficulté.

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Shirakawa Jiro est un écrivain prolifique qui a publié, depuis ses débuts, 99 romans à mystère. Il doit désormais s'atteler à ce qui sera rien moins que son centième livre. Seulement, en dépit des pressions de sa maison d'édition, l'auteur est frappé par le syndrome de la page blanche. Il a déjà plus de trois mois de retard dans les délais qui lui étaient fixés, et pas le moindre début d'intrigue à coucher sur le papier. En quête d'inspiration, il surfe sur le net en recherchant quelques mystères irrésolus qui pourraient éveiller son imagination.

Jiro tombe alors sur une étrange affaire : un double meurtre, ayant eu lieu dans une petite ville, dont la mise en scène interpelle, et qui n'a jamais été élucidé. Il décide de se rendre sur place pour en apprendre plus, et peut-être trouver là une base pour son nouveau roman. Il entraîne dans cette excursion la jeune Kahima Rika, son éditrice. Pour interagir avec de potentiels témoins, Jiro est cependant contraint de se déguiser, son accoutrement habituel provoquant plus la fuite que les confidences de ceux qu'il croise. Sous un pseudonyme, il entreprend donc de percer le mystère de cet étrange meurtre... dans une bien étrange ville.

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Extravagants et décalés à souhait, les débuts de Henshin Interviewer no Yuutsu sont sympathiques. Le drama manie avec versatilité un humour oscillant entre absurdités et excès, répétitions se changeant en running gag et chutes improbables. Il en fait souvent trop, mais sait entraîner le téléspectateur dans la dynamique d'ensemble du récit et sa diffuse graine de folie. Le duo principal, une association détonante, tient pour l'instant ses promesses. Shirakawa Jiro a tout du prodige spécialisé dans les mystères, mais insortable en société. Poussant ce concept à son maximum, le scénariste ajoute à cela l'idée de lui faire jouer un rôle déguisé pour mener l'enquête : la mise en scène de la métamorphose de Jiro est certainement la plus improbable qui soit. Mais l'épisode 2 démontre que la série pourra avoir une carte supplémentaire à jouer grâce à la dualité du personnage : de quoi nourrir quelques ressorts humoristiques à défaut de convaincre de sa crédibilité.

Afin de s'assurer la fidélité du téléspectateur, Henshin Interviewer no Yuutsu met tout ce versant comique au service d'un fil rouge mystérieux qui rapproche l'histoire d'une fiction d'enquête. Cette dernière prend vite des accents pour le moins surréalistes. Au double meurtre initial, se greffent d'étranges coïncidences et des récits qui laissent songeurs. Pour construire son ambiance, le drama a recourt au cadre le plus classique qui soit, une recette immuable qui fonctionne : celle de la petite ville isolée, avec ses secrets, ses particularités et son omerta face aux étrangers. Intrigante, voire inquiétante à ses heures, l'histoire regorge de figures secondaires décalées, exploitées à la fois dans le registre de l'humour mais aussi pour apporter à l'enquête. Il est difficile pour l'instant d'apprécier vers quoi nos deux héros nous emmènent, mais la curiosité du téléspectateur est piquée.
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Sur la forme, Henshin Interviewer no Yuutsu compose sans budget. Cela donne une réalisation minimaliste, très dynamique et souvent brouillonne, avec une caméra énergique qui frôle l'effet mal de mer par moment. La bande-son est assez passe-partout, et la chanson du générique de fin (par KAT-TUN - l'acteur principal faisant partie de ce groupe) ne restera pas dans les annales même si elle a ce petit côté entraînant qui sied à la série.

Côté casting, les excentricités des uns, le sur-jeu des autres, correspondent à l'atmosphère de comédie recherchée dans le drama. Nakamaru Yuichi (Machigawarechatta Otoko) s'en sort à peu près honorablement dans ce rôle central de l'écrivain/interviewer autour duquel se construit l'histoire. Son assistante/éditrice est interprétée par Kimura Fumino (Kumo No Kaidan). Les deux trouvent assez bien leurs marques ensemble. Les habitués des dramas de Miki Satoshi retrouveront en personnages secondaires quelques figures familières, comme Fuse Eri (Jikou Keisatsu, Atami no Sousakan) ou encore Matsuo Suzuki (Atami no Sousakan). On croise également Mashima Hiekazu, Mitsuishi Ken, Murasugi Seminosuke ou encore Morishita Yoshiyuki.
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Bilan : Comédie d'enquête cultivant ses décalages,  Henshin Interviewer no Yuutsu entremêle excentricité et mystère dans un style assez caractéristique des œuvres de Miki Satoshi. Une partie du charme du drama, par-delà ses excès qui rebuteront sans doute certains publics, repose sur son art de la chute et sur sa façon de multiplier les détails détonnants. Sans se prendre au sérieux, la série pique la curiosité du téléspectateur et, surtout, l'amuse. Le défi sera de parvenir à obtenir une résolution à peu près cohérente de l'intrigue, mais ce parcours humoristique reste l'objet véritable du drama. A tester, pour les amateurs de j-drama qui recherchent une comédie divertissante.


NOTE : 6,5/10


Une bande-annonce du drama :


10/11/2013

(US) Tour of Duty (L'Enfer du Devoir) : chronique de la guerre du Vietnam

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Aujourd'hui, c'est une plongée dans mes archives sériephiles que je vous propose. Le mois dernier, en pleine phase de rangement, j'ai mis la main sur un vieux disque dur externe sur lequel figurait l'intégrale de Tour of Duty (L'Enfer du devoir en VF). Diffusée de 1987 à 1990 sur CBS, cette série américaine compte trois saisons, soit 58 épisodes au total. L'époque était alors propice au traitement d'un tel sujet, puisque, dans la lignée de Platoon, la télévision américaine lancera plusieurs séries sur ce thème à l'image, par exemple, de China Beach sur ABC. C'est à l'occasion d'un revisionnage intégral il y a quelques années que j'en étais venue à vraiment apprécier Tour of Duty. Car, si les années 2000 ont redéfini le genre des séries de guerre, avec des approches très différentes, de Band of Brothers à Generation Kill, cette série des années 80 demeure un solide classique du petit écran qui mérite de ne pas être oublié.

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Tour of Duty relate le quotidien d'une unité de combat durant la guerre du Vietnam, évoquant tout ce qui rythme la vie des soldats sur le terrain, des opérations dans la jungle jusqu'aux journées de repos et autres permissions. La série se construit en premier lieu autour de la dynamique qui s'installe entre les deux officiers supérieurs de l'unité : elle emprunte ici une recette familière, mais qu'elle sait parfaitement exploiter, en associant un jeune officier tout droit sorti de l'école, le lieutenant Goldman, et un sergent vétéran qui a déjà fait plusieurs tours au Vietnam, Anderson. Cela n'ira pas sans friction, mais ces deux fortes personnalités vont progressivement apprendre à travailler ensemble, établissant un rapport de confiance qui sera une des fondations de l'unité (même s'il faudra pour cela, beaucoup de patience à Anderson). Tour of Duty ne se limite cependant pas aux seuls responsables : multipliant les points de vue, c'est toute une troupe de soldats qui est mise en scène et va ainsi peu à peu devenir familière au téléspectateur.

Véritable fiction chorale, cette série est entièrement dédiée à des personnages dont on va suivre les évolutions et les épreuves traversées en trois saisons. Si le récit privilégie l'aspect humain, il ne néglige pas pour autant une reconstitution historique travaillée. En effet, l'unité de combat est un microcosme reflétant la société américaine de la fin des années 60. Faisant cohabiter des soldats de toutes origines, elle apparaît comme un miroir des tensions raciales et politiques qui traversent alors les Etats-Unis. Elle leur fait apprendre à vivre ensemble loin de leur pays, tout en abordant aussi la réception de certains évènements marquants qui s'y déroulent comme l'assassinat de Martin Luther King. Concernant la situation sur le terrain, le souci de réalisme est particulièrement perceptible durant la première saison, où chaque épisode permet d'illustrer un thème et une réalité à laquelle sont confrontés les combattants américains. Tout cela confère à la série une impression d'authenticité, renforcée par le regard général qui est porté sur cette guerre, ni manichéen, ni patriotique.

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Au fil des saisons, Tour of Duty se recentre progressivement sur les vies personnelles et les épreuves de quelques personnages, avec une mise en scène moins rigoureuse du versant militaire. L'attrait demeure pourtant, notamment parce que l'écriture conserve toujours une richesse de tonalités et une multiplicité d'approches appréciables. En effet, la série joue sur plusieurs registres. Elle est capable d'être une solide fiction de guerre, un drame dur éclairant toutes les horreurs et tous les traumatismes que subiront ses protagonistes. Mais elle sait aussi proposer des interludes, n'ayant pas son pareil pour délivrer des dialogues ironiques et complices qui font mouche. La détresse, l'amertume, mais aussi le désir de continuer à vivre, s'entremêlent et cohabitent constamment. La fiction glisse également parfois vers du sentimental, avec quelques histoires d'amour (qui finiront généralement mal). Tour of Duty fait ainsi preuve de beaucoup d'habileté dans sa gestion des tons. Elle est extrêmement vivante, engageante pour un téléspectateur qui n'a aucune peine à s'impliquer aux côtés des différents personnages.

Le point sur lequel elle a le plus vieilli est certainement la forme, avec des combats qu'on peut juger, vingt-cinq ans plus tard, perfectibles dans leur mise en scène. L'ensemble reste cependant correct. Il est surtout un point sur lequel sa saveur demeure intacte : sa bande-son (elle lui a d'ailleurs fait gagner un Emmy Award). Tour of Duty est un vrai bijou d'incursion musicale dans les 60s', une compilation riche et bien utilisée. On y retrouve, rythmant les épisodes, des chansons emblématiques d'une époque, à commencer par celle qui figure au générique, la fameuse Paint it, Black des Rolling Stones à laquelle mon esprit l'associe toujours (cf. la vidéo ci-dessous). Enfin, la série bénéficie d'un casting homogène. Terence Knox interprète le sergent Anderson, tandis que Stephen Caffrey joue le lieutenant Goldman. On croise également Tony Becker, Ramon Franco, Miguel A. Nunez Jr, Stan Foster, mais aussi Kim Delaney, Steve Akahoshi, Eric Bruskotter, John Dye ou encore Dan Gauthier.

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Bilan : Chronique de guerre du Vietnam proposant une reconstitution historique travaillée, Tour of Duty relate le quotidien d'une unité sous forme de récit choral offrant différents points de vue. Capturant les tensions qui traversent la société américaine de la fin des années 60, la série ne néglige aucun des grands thèmes sociaux et politiques que son sujet permet d'aborder, tout en délivrant, sans manichéisme, un récit de guerre souvent dur et dramatique. C'est une œuvre profondément humaine qui met en avant les liens qui se tissent entre ses personnages. Elle sait aussi exploiter une tonalité changeante, où le désespoir côtoie la féroce envie de survivre, avec l'ironie pour seule arme. L'immersion dans les 60s' est parachevée par une bande-son géniale qui vient rythmer l'ensemble, soulignant un peu plus cette recherche d'authenticité et de reflet d'une époque.

Vingt-cinq ans après, Tour of Duty demeure donc une série très solide dont les ingrédients fonctionnent toujours, qu'importe si elle n'a pas la mise en scène d'une des fictions de guerre de HBO. Elle mérite assurément un revisionnage, ou même une découverte pour tout sériephile qui s'intéresse à un tel genre ou sujet.


NOTE : 7,5/10


Le générique (tellement marquant) de la série :

06/11/2013

[Blog] Modification du rythme du mercredi asiatique

Comme je l'avais annoncé lors du billet fêtant les quatre années du blog, My Télé is rich! entre en ce mois de novembre dans une période de fortes turbulences (qui ont même pris un peu d'avance sur ce qui était prévu). Plus concrètement, je dois faire face à un mois extrêmement chargé et le blog se retrouve placé en second plan. Conséquence de ce "code rouge", le rythme des mercredis asiatiques se ralentit : ils auront lieu seulement une fois tous les quinze jours.

Rendez-vous donc la semaine prochaine, sans doute pour une première incursion dans la saison automnale actuelle au Japon. De votre côté, avez-vous déjà fait quelques intéressantes découvertes dans ces nouveautés du pays du Soleil Levant ?

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02/11/2013

(UK) Ambassadors : fiction à la tonalité duale dans les coulisses d'une ambassade

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Aujourd'hui, c'est une nouveauté britannique qui nous offre l'occasion de voyager : direction l'Asie centrale (même si, en fait, la série a été tournée en Turquie). Actuellement diffusée sur BBC2, du 23 octobre au 6 novembre 2013, Ambassadors retient d'abord l'attention parce qu'elle réunit devant la caméra un duo bien connu, Mitchell et Webb, du Peep Show [Pour ceux qui les apprécient, je vous conseille la lecture de leur double interview réalisée pour l'occasion sur Radiotimes]. Cependant, il faut se garder des raccourcis hâtifs : Ambassadors n'est pas une simple sitcom. Il s'agit plutôt d'un hybride, une comédie au parfum de drama.

Cette dualité s'explique en partie par le duo de scénaristes que l'on retrouve à l'écriture de la série : James Wood, le co-créateur de cette chouette dramédie douce-amère qu'est Rev, et Rupert Walters, qui a notamment écrit quelques épisodes de Spooks. Pour troubler un peu plus les lignes, Ambassadors emprunte un format propre au drama, avec des épisodes d'une durée d'1 heure là où, par exemple, The Wrong Mans, sur la même chaîne, se contentait de 30 minutes. La série avait donc un challenge important à relever pour trouver sa juste tonalité. Elle n'y parvient pas toujours, mais sait délivrer des épisodes plaisants.

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Ambassadors suit le quotidien de l'ambassade britannique au Tazbekistan, une ancienne république socialiste soviétique fictive, créée en entremêlant des références au Tajikistan et au Turkmenistan. Après l'irrésolue disparition de son prédécesseur, Keith Davis se voit confier le poste d'ambassadeur. Il découvre dès le pilote les responsabilités parfois éprouvantes qui y sont attachées, avec une sortie de chasse présidentielle mémorable. Pour comprendre rapidement le pays et la famille qui le dirige, afin de pouvoir promouvoir au mieux les intérêts des entreprises britanniques, il peut notamment compter sur les conseils de Neil Tilly, le dirigeant du staff diplomatique, qui connaît parfaitement les us et coutumes locales.

Entre dîners officiels, organisations de manifestations culturelles et négociations industrielles très concurrentielles face à d'autres puissances occidentales (notamment les États-Unis et la France), les services de l'ambassade doivent aussi composer avec certains invités guère commodes - pouvant aller jusqu'à la réception de membres de la famille royale - et également avec des imprévus diplomatiques qui nécessitent de se montrer pragmatiques pour ne pas fâcher le régime autoritaire en place. Un jeu d'équilibriste pas toujours aisé à mettre en pratique, le tout sous la surveillance de Londres et d'un supérieur surnommé POD, le "Prince of Darkness".

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Ambassadors oscille entre deux tonalités. La série emprunte à la comédie son sens de la rupture et quelques chutes, tour à tour absurdes ou inattendues. Elle ne cherche cependant pas à forcer les gags, préférant jouer sur un comique de situation et sur des échanges faussement sérieux pour faire sourire le téléspectateur. La fiction laisse dans le même temps entrevoir une ambition narrative qui la rapproche du drama, puisque son fil rouge repose sur l'arbitrage complexe à trouver entre promotion des droits de l'homme et des valeurs démocratiques, et préservation des intérêts économiques de la Grande-Bretagne. Pour réaliser cela, son portrait de l'ex-république soviétique et de son gouvernement dictatorial ne fait guère dans la nuance, s'appropriant tous les poncifs du genre, tout en rejouant la partition familière du choc des cultures. Cependant, si elle fait siens de nombreux clichés, elle a l'art de savoir le faire sans jamais les prendre au sérieux, en s'en amusant, voire en les détournant à l'occasion. C'est par exemple le cas pour le versant espionnage, à l'image de "l'enlèvement" orchestré dans le deuxième épisode, ou bien encore pour l'évolution du chantage subi par Neil de la part de la police secrète.

Il ne faut pas aborder Ambassadors en espérant y trouver ce qu'elle n'est pas : un récit des coulisses diplomatiques où la comédie permettrait l'irrévérence. La série offre au final une vision assez proprette de la diplomatie britannique, ou du moins des représentants principaux qu'elle met en scène. Au cours des deux premiers épisodes, ni l'ambassadeur, ni le chef du staff diplomatique, ne se révèlent prêts à sacrifier certains principes sur l'autel financier des intérêts industriels du pays, arbitrant comme ils peuvent au grand désespoir de leur hiérarchie. Nous sommes loin du corrosif satirique de The Thick of it, que seules les interludes skypés de POD évoquent avec une pointe de noirceur cynique caractéristique particulièrement savoureuse. Les scénaristes se réclament d'une autre référence, celle de Yes Minister, dont le reboot initié l'an dernier a pu justement se voir reprocher de sonner trop lisse dans un pays où The Thick of it est désormais passé. Ambassadors fait le choix de ne jamais s'évader d'une certaine zone de confort, ce qui, dans la télévision britannique de 2013, peut lui être reproché. Pour autant, l'ensemble reste plaisant à suivre.

En effet, la série cultive une dynamique sympathique. Le tandem Keith/Neil a du potentiel, avec d'un côté un ambassadeur anxieux de réussir son intégration et de se faire bien voir de sa hiérarchie, et de l'autre, un bureaucrate pragmatique sachant prendre les évènements avec un flegme et un détachement tout britanniques, mais qui s'investit toujours à un niveau très personnel dans certains dossiers sensibles. Le duo fonctionne spontanément à l'écran. Pour l'accompagner, Ambassadors a le mérite de pouvoir s'appuyer sur une galerie de personnages secondaires hauts en couleurs qui viennent apporter un contraste et une touche comique plus prononcée. C'est par exemple le cas de la gouvernante et de ses affinités culinaires, de ces deux chargés d'écoute qui espionnent l'ambassade et commentent les discussions de chacun avec un premier degré souvent drôle, ou encore de la jeune employée en charge de la promotion de la culture britannique dont l'enthousiasme ne trouve guère d'écho auprès du reste de l'équipe. Les guest-stars apportent aussi un décalage plus marqué, le prince Mark faisant ainsi une visite remarquée dans le second épisode. Le mélange donne une écriture un peu inégale, mais qui sait jouer sur sa capacité à accélérer et à proposer quelques savoureuses fulgurances.

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Ambassadors est en revanche une franche réussite au plan formel. La réalisation a été confiée à Jeremy Webb. Elle maîtrise parfaitement les codes classiques d'un drama, avec une photographie soignée parfois sombre. Si beaucoup de scènes se déroulent en intérieur, la série s'assure d'entrée de jeu, dans son pilote, un passage dépaysant au sein d'une forêt enneigée qui pose efficacement le cadre. L'autre bonne idée est la bande-son utilisée, ou plus précisément, le recours récurrent à un thème instrumental parfaitement choisi : vite entêtant, un brin exotique, il est doté d'un dynamisme comique contagieux. On le retrouve aussi dans le générique d'ouverture : animé et travaillé, ce dernier embarque le téléspectateur dans un voyage jusqu'au Tazbekistan (voir la première vidéo ci-dessous).

Enfin, Ambassadors réunit un casting auquel il est aisé de s'attacher. Au sein du duo principal, c'est sans doute Robert Webb (Peep Show) qui tire en premier son épingle du jeu, dans un registre dual, à la fois bureaucrate détaché et pragmatique, mais aussi parfois très impliqué. David Mitchell (Peep Show) joue quant à lui l'ambassadeur britannique nouveau venu. Keeley Hawes (Spooks, Ashes to Ashes, Upstairs Downstairs) incarne son épouse, qui s'efforce également de s'acclimater au pays (et à leur gouvernante). Pour compléter la Spooks-connection, Matthew Macfadyen (Warriors, Perfect Strangers, Little Dorrit, Any Human Heart, Ripper Street) joue le supérieur londonien des diplomates, apparaissant au cours d'échanges en visioconférence mémorables. Au sein de l'ambassade, on retrouve parmi le staff Shivani Ghai (Five Days), Susan Lynch (Monroe) et Amara Karan (Kidnap and Ransom). Côté Tazbek, Yigal Naor (House of Saddam) interprète le président, tandis que Natalia Tena (Game of Thrones) joue la petite amie de Neil Tilly. En guest, on saluera dans le deuxième épisode la présence de Tom Hollander (Cambridge Spies, The Company, Desperate Romantics, Any Human Heart, Rev) qui s'en donne à coeur joie en tant que membre de la famille royale, pour une visite qui marquera durablement les esprits.

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Bilan : Ambassadors est une comédie qui s'entoure d'un parfum de drama, mêlant ainsi les deux ambiances au risque de ne pas toujours trouver les parfaits réglages. Dotée d'un style d'écriture à la sobriété bienvenue, elle assume pleinement les stéréotypes associés à la mise en scène d'un service diplomatique au sein d'une ex-république soviétique, ne cherchant pas à faire dans la nuance. Loin de vouloir être une immersion satirique dans les coulisses d'une ambassade, elle renvoie une image plutôt lisse et consensuelle, sans surprise, de son milieu. Si elle reste dans une zone narrative de confort, elle sait cependant décliner les codes du genre sans les prendre au sérieux, s'en amusant ou même les détournant. Cela donne une dynamique d'ensemble plaisante à suivre, avec, aux côtés du duo principal, quelques rôles secondaires hauts en couleurs. Formellement solide, s'appuyant sur un casting convaincant, cette série est donc sympathique, distillant ses pointes d'humour à petites doses.

Ce sont, pour l'instant, trois épisodes d'une heure qui ont été commandés. Je serai devant mon petit écran pour le dernier diffusé mercredi prochain.


NOTE : 6,75/10


Le générique de la série :

La bande-annonce de la série :

30/10/2013

(K-Drama / Pilote) Answer Me 1994 (Reply 1994) : le portrait d'une génération (ils avaient 20 ans en 1994)


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Les suites, leurs attentes et leurs malédictions... Il était difficile de ne pas y penser en lançant ce drama qui a débuté le 18 octobre 2013 sur tvN en Corée du Sud. Answer me 1994 reprend le concept si bien initié, l'année dernière, par son prédécesseur, Answer me 1997, en s'intéressant à une génération étudiante précédente, trois ans plus tôt, en 1994. On retrouve à l'écriture et derrière la caméra la même équipe que pour la "première saison". La grande réussite de Answer me 1997 avait été sa sincérité diffuse et la magie avec laquelle il avait su capturer une époque et une galerie de personnages attachants. La suite allait-elle être en mesure de retrouver la saveur inattendue du premier essai, c'était toute la question. En effet, Answer me 1997 a été un coup de cœur, il est toujours difficile de leur succéder.

Au vu des trois premiers épisodes, il est manifeste que les ingrédients qui avaient fait le succès du premier opus ont été repris. Certains schémas ont même été consciencieusement transposés, pour ne pas dire recopiés. Cependant, parmi les changements, il en est un notable : le format s'est allongé, avec un nombre plus important d'épisodes (20 contre 16), lesquels sont aussi désormais plus longs, dépassant allègrement 1 heure chacun. Cela n'est pas sans incidence sur le rythme. Au final, ces débuts n'ont pas la même saveur que ceux de Answer me 1997 et il y a des réglages à trouver. Cependant ce qui m'avait fait aimer la première version est aussi à l’œuvre : je me suis facilement laissée prendre au jeu. C'est typiquement le genre de série qui me donne envie de m'investir et que je souhaite voir grandir... en espérant pour le meilleur.

[La review qui suit a été rédigée après le visionnage des trois premiers épisodes.]

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Answer me 1997 nous contait les vies d'adolescents à Busan, Answer me 1994 change, lui, complètement de cadre et met le cap sur la capitale sud-coréenne. L'héroïne de l'histoire est la jeune Na Jung. A 20 ans, elle tente de concilier les études et une passion dévorante pour le basketball universitaire, qui la transforme en groupie-supporter à chaque match de l'équipe qu'elle soutient. Installée à Séoul, sa famille a ouvert une grande maison dans laquelle ils louent des chambres à plusieurs étudiants venus de la province pour faire, eux-aussi, leur première rentrée dans des établissements de la ville. L'adaptation à la vie citadine, mais aussi à la promiscuité, se fait parfois difficilement pour ces jeunes gens qui doivent encore trouver leurs marques et leur voie.

Dans cette maisonnée où chacun se côtoie, notamment le matin au cours d'un petit déjeuner toujours partagé en famille, les liens se nouent pourtant entre chacun. Vont ainsi peu à peu être posées les bases d'une solide amitié, puisque, à la manière de Answer me 1997, le drama utilise une rencontre dans le présent pour introduire un fil rouge relationnel et sentimental. Au cours du premier épisode, le téléspectateur apprend en effet que Na Jung a finalement épousé, en 2002, un de ces garçons qu'elle côtoyait à l'époque de ses études. Answer me 1994 a donc 20 épisodes pour nous raconter tous les évènements qui ont marqué leur groupe, de 1994 à aujourd'hui et nous révéler le nom de l'(heureux) élu.

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La lecture de ce bref synopsis vous renseigne sur le premier point qui frappe en s'installant devant les débuts de Answer me 1994 : le soin avec lequel ses auteurs ont souhaité reprendre tout ce qui avait pu faire le succès de l'original. On ne change pas, ni ne renouvelle, une recette qui fonctionne. La reconstitution d'époque est toujours travaillée, mille et un détails s'ajoutant, des magazines traînant nonchalamment sur la table jusqu'aux émissions télévisées et aux jeux vidéos, en passant par la bande-son, pour faire revivre sous les yeux du téléspectateur l'année 1994. Tout est fait pour faire vibrer la fibre nostalgique. La clé d'introduction est également très proche : il s'agit de partir de la situation de l'héroïne dans le présent, pour s'en servir comme d'un prétexte à remonter le temps et à découvrir le groupe d'amis qui s'est peu à peu formé.

Le fil rouge "mystère" sera à nouveau sentimental, mais il faut noter qu'il prend ici une tournure plus artificielle : le drama met cette fois en scène un vrai "bal des prétendants" avec cinq candidats potentiels clairement désignés autour de Na Jung. Les quelques orientations de ces premiers épisodes conduisent même à se demander si les scénaristes ne remprunteront une voie très proche de celle de la première saison pour la conclusion. Sur ce point, la réserve reste de mise et j'espère que Answer me 1994 saura s'en démarquer. Par contre, le fait que la maison de l'héroïne soit un lieu d'accueil d'étudiants légitime opportunément une action qui y est centrée. Il faudra cependant que le drama prouve sa capacité à exister également en dehors pour densifier les vies de chacun.

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De manière générale, Answer me 1994 a le ton et l'apparence de Answer me 1997, mais sans la spontanéité un peu débridée qui caractérisait les débuts de son prédécesseur. Il ne trouve pas immédiatement ses marques, les storylines manquant d'homogénéité, avec des personnages introduits à la suite sans la cohésion qui permettrait d'esquisser un esprit de groupe. La durée allongée des épisodes est en plus source de quelques longueurs, avec des inégalités de rythme à corriger. Pour autant, par-delà ces reproches, une partie du charme de l'original est bel et bien là. La recette qui a si bien marché une première fois démontre à nouveau une redoutable efficacité, avec un réel potentiel qui ne demande qu'à prendre son envol.

Il est donc difficile de ne pas se laisser prendre au jeu de ces relations dépeintes avec une fraîcheur bienvenue, le tout parsemé d'excès comiques atypiques qui prêtent fréquemment à sourire. Les gags ne sont pas toujours fins, mais ils ont l'aplomb et le sens de la chute narrative qui conviennent. Les personnages restent pour beaucoup encore à définir, et certains sont pour l'instant très imparfaitement exploités, cependant ces débuts réussissent le principal : le téléspectateur a envie de s'investir à leurs côtés et de voir leurs rapports mûrir en amitié (ou plus). Il est d'ores et déjà probable que le drama ne réitèrera pas le "miracle" d'équilibre des deux premiers tiers de Answer me 1997, lesquels avaient su porter une vraie vie de groupe à l'écran, mais l'ersatz proposé a malgré tout un attrait auquel il est difficile de résister.

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Sur la forme, Answer me 1994 reprend également les mêmes ingrédients que l'original, notamment son sens du détail pour reconstituer une époque. L'ensemble est soigné, et la réalisation a le mérite de transmettre un peu de son dynamisme à certaines scènes qui auraient gagné à être raccourcies. On retrouve aussi quelques effets de style, notamment le fameux bêlement, bruitage décalé venant accompagner une chute comique : si quelques-uns sonnent un brin forcés, ce petit procédé fonctionne et sait facilement dérider le téléspectateur. Concernant la bande-son, l'épisode est à nouveau parsemé de musiques d'époque, plus ou moins marquantes, même si la place des chansons apparaît réduite en raison de la passion différente de l'héroïne, désormais fan de basketball, et non plus d'un boys band.

Enfin, côté casting, le mimétisme suivi conduit à reprendre les deux acteurs qui incarnaient déjà les parents dans la première saison. Avec une dynamique et des personnalités semblables, Sung Dong Il (Fugitive : Plan B, Can't Lose) et Lee Il Hwa sont donc en charge de cette maison d'accueil d'étudiants et retrouvent sans peine leur alchimie. Leur fille, Na Jung, est interprétée par Go Ah Ra (Heading to the Ground). Jung Woo (Dandelion Family) vit à leurs côtés, considéré comme son frère (le deuxième épisode donne des précisions sur sa situation exacte). Quant aux autres étudiants, ils sont joués par Yoo Yun Suk (Gu Family Book), Kim Sung Kyun, Son Ho Joon, Min Do Hee et Baro. L'ensemble ne forme pas un casting très expérimenté, et ils ont leurs limites, mais encore une fois, Answer me 1997 a prouvé que la dynamique de groupe était celle qui comptait avant tout dans ce type de drama qui mise sur l'authenticité.

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Bilan : Copie appliquée, mais imparfaite, Answer me 1994 signe donc des débuts perfectibles, avec un rythme et une homogénéité d'écriture à travailler. Cependant, à défaut d'avoir l'effet de surprise de l'original, le drama a su préserver le charme caractéristique qui avait fait la réussite du premier opus. Présentant un portrait générationnel empreint de nostalgie, il joue sur des ressorts humains et comiques, tout en introduisant une riche galerie de personnages dont les relations ne demandent qu'à être explorées. Le traitement des protagonistes est inégal, mais le concept consistant à les suivre à travers deux décennies de vie, en partant des bases de leur amitié, est une belle promesse en soi. Le téléspectateur se laisse globalement attendrir et émouvoir par l'effort d'authenticité qui perce de l'ensemble. Si bien que ces premiers épisodes, certes pas sans défauts, assurent l'essentiel : obtenir la fidélité du public. A Answer me 1994 de savoir grandir à partir de cette fondation.


NOTE : 6,75/10


Une chanson de l'OST :