19/10/2014
(UK) Marvellous : sincérité et humanité pour un biopic inspirant
Malcolm: How'd you wangle that?
Neil : I just asked.
Malcolm : You can't just get things by asking.
Neil : Can't you? I can.
On parle souvent du petit écran anglais pour ses séries, ses mini-séries... Sachez qu'il existe un autre format à ne pas négliger : les téléfilms. Et dans l'art des unitaires percutants qui savent se démarquer, BBC2 fait partie des chaînes à surveiller, à l'image, l'année dernière, du génial The Wiper Times ou encore de la genèse de Doctor Who retracée dans An Adventure in Space and Time. Cet automne, c'est une fiction également à part qui a été proposée aux téléspectateurs anglais le 25 septembre 2014.
Écrit par Peter Howker (à qui l'on doit notamment un autre OTNI du petit écran anglais, Blackpool), Marvellous s'inspire d'une histoire vraie, la vie de Neil Baldwin (lequel effectue d'ailleurs plusieurs apparitions). Souffrant de troubles d'apprentissage, exclu très tôt du système scolaire, il est malgré tout toujours allé de l'avant, déjouant et dépassant les attentes pour réaliser ses rêves et vivre de ce qu'il aimait. On suit donc son parcours bigarré, d'une carrière de clown dans un cirque jusqu'à l'université de Keele, en passant par le club de football de Stoke City.
La séquence d'ouverture du téléfilm pose immédiatement le ton particulier que va adopter Marvellous. Rythmée par une chanson entraînante qu'entonne et joue un chœur, la jeunesse de Neil défile à travers quelques instantanés fondateurs, mêlant fiction tournée en noir et blanc et brèves images d'archive, de son exclusion de l'école à sa découverte du cirque ou à la naissance de sa passion pour le football grâce à sa mère qui l'emmenait voir les matchs. Durant l'heure et demie qui suit, l'unitaire va cultiver une sincérité d'écriture rare, aussi imperturbable que désarmante, qui résonnera durablement au plus profond du téléspectateur. Optant pour une sobriété bienvenue, sans excès de bons sentiments, ni approche manichéenne, c'est un récit parfaitement ciselé qui se déploie. L'impression d'authenticité demeure, notamment grâce à une tonalité non dénuée d'ambivalence, dans laquelle les limites et les difficultés auxquelles se heurte Neil ne sont jamais passées sous silence. Marquée par des passages dramatiques émouvants, mais aussi des moments drôles et légers, se dévoile avant tout une humanité qui touche en plein cœur et fait la force de cette œuvre.
Marvellous apparaît en fait comme une bulle d'air frais au sein du petit écran. Il y règne une sorte de dynamisme communicatif : l'espace d'un instant passé aux côtés de Neil (un Toby Jones magistral), tout semble possible. Du fait de sa condition, Neil aurait pu être destiné à une vie isolée, guère épanouissante, loin de ce qu'il aimait. Mais, avec un aplomb indéfectible, il a su aborder le quotidien d'une manière qui lui a permis de s'affranchir de tous les cadres dans lesquels il aurait dû se trouver limité et enfermé. Multipliant les contacts, il a réussi à nouer des liens bien au-delà de son seul entourage proche. Il a su faire confiance, compter sur les autres qui, même si beaucoup ont d'abord été perplexes, le lui ont souvent rendu. Il est aussi resté fidèle à lui-même, à sa franchise rafraîchissante comme à son art de faire rire les autres. Son attitude lui a ouvert des portes inattendues, lui permettant de dépasser toutes les attentes et de réaliser ses rêves. C'est sans doute aussi là que réside la clé de la magie de Marvellous : en nous entraînant dans le sillage de Neil, le téléfilm nous transmet une partie de l'état d'esprit qui le caractérise. L'impossible paraît soudain réalisable, les barrières se troublent... et c'est avec une énergie comme renouvelée que le téléspectateur ressort de cette heure et demie.
Toby Jones et... le vrai Neil Baldwin
Dotée d'une écriture sincère et authentique, Marvellous propose un récit d'accomplissement, à l'humanité sobre et touchante, qui ne laisse pas le téléspectateur insensible. En ces temps où le cynisme et la noirceur paraissent plus porteurs dans le petit écran, voilà une œuvre qui cherche à inspirer et distille cette idée folle, aussi vertigineuse qu'entêtante, que les projets qui semblent les plus inaccessibles peuvent parfois se réaliser. Véritable antidote à tout blues d'automne, ce téléfilm a l'art de réchauffer les cœurs. Il est parfait pour accompagner une soirée qui s'annonçait morose : à découvrir !
NOTE : 7,75/10
La bande-annonce de cet unitaire :
19:15 Publié dans (Mini-séries UK), (Séries britanniques) | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : unitaire, bbc, marvellous, toby jones, tony curran, gemma jones, greg mchugh, nicholas gleaves | Facebook |
12/10/2014
(Mini-série UK) The Driver : Another midlife crisis
En 1983, David Morrissey signait ses débuts à la télévision britannique dans une mini-série estivale intitulée One Summer. À ses côtés, on retrouvait notamment un autre jeune acteur en devenir, Ian Hart [pour les curieux : jetez un œil à cette vidéo entrecoupée d'interviews rétrospectives]. Trois décennies plus tard, toujours dans le petit écran anglais, l'année 2014 aura été, pour David Morrissey, synonyme de 'midlife crisis'. En janvier, c'était une romance inattendue, sur un train de banlieue, qui ébranlait son personnage. Cet automne, c'est plus qu'une simple crise conjugale qu'il traverse dans The Driver, également sur BBC1. Il y incarne un père de famille impuissant, assistant à l'implosion progressive de sa famille. Frustré face à cette situation qui lui échappe, il se laisse embarquer dans un engrenage dangereux par une vieille connaissance tout juste sortie de prison, interprétée par... Ian Hart. The Driver, c'est une miflife crisis, mais aussi une vraie boucle télévisuelle en clin d’œil.
The Driver s'ouvre sur une course-poursuite qui donne le ton et vise à distiller une tension sourde dans le récit. Jusqu'alors conducteur de taxi traité avec peu de considération par ses clients, Vince McKee décide de mettre ses talents au service d'un employeur d'un autre genre, un criminel avec qui il est mis en relation. Cette opportunité est non seulement pour lui une façon d'arrondir des fins de mois parfois difficiles, ayant notamment à la maison une adolescente exigeante, elle est surtout un moyen de rompre avec un quotidien à la morosité étouffante, donnant à Vince l'illusion de retrouver un semblant contrôle, de reprendre sa vie en main en décidant brusquement d'une nouvelle direction. Évidemment, il déchante vite. Être un simple conducteur ne fait pas moins de lui le complice des crimes perpétrés par la bande qu'il est censée accompagner. Rapidement, le voilà confronté à lui-même, à tous les principes qui l'ont défini jusqu'alors, lorsque la vie d'un homme se retrouve en jeu. Il lui faut faire des choix difficiles. Et les enjeux se compliquent un peu plus lorsque la police s'en mêle... Loin d'avoir renoué avec cette famille qu'il sentait lui échapper un peu plus chaque jour, il l'a en fait peut-être définitivement perdue.
La mini-série suit ainsi une construction relativement prévisible, de l'engrenage au brusque retour à une réalité qui se révèle encore plus douloureuse que la situation que Vince voulait laisser derrière lui. À la crise existentielle personnelle, se mêle également une crise familiale, plus latente, dont le scénario ne dévoile l'ampleur que progressivement. Tout cela donne un récit plutôt riche en thèmes à explorer, mais qui pèche en étant souvent trop brouillon. La direction narrative, hésitante, peine à trouver l'équilibre et le bon dosage entre les différents éléments de l'histoire relatée. La dynamique familiale, par exemple, aurait sans doute gagné à être plus explorée. Centrée sur son protagoniste principal, The Driver repose en grande partie sur la performance d'un David Morrissey impeccable. L'acteur se situe ici dans un de ses registres de prédilection, n'ayant pas son pareil pour incarner ces rôles un peu écorchés et impliquer le téléspectateur dans le sillage des errances et des dilemmes de son personnage. Il parvient d'ailleurs tout au long des trois épisodes à maintenir ce lien. Mais, en dépit du casting qui reste indéniablement le point fort de la mini-série, l'ensemble laisse l'impression d'un potentiel qui n'est pleinement exploité, à l'image d'une fin expédiée s'inscrivant en porte-à-faux de la tonalité ambiante...
Au final, The Driver peut mériter un détour pour ses jeux d'acteurs. Mais, malgré quelques bonnes idées et une ambiance sombre qui ressort bien par moment, la mini-série n'aura pas réussi à mener à bien, d'une manière complètement convaincante, la 'crise de la quarantaine' qu'elle ambitionnait de mettre en scène. Ce qu'avait su réaliser The 7.39, dans un tout autre style.
NOTE : 6,25/10
La bande-annonce de la mini-série :
18:59 Publié dans (Mini-séries UK) | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : bbc, the driver, david morrissey, ian hart, claudie blakley, sacha parkinson | Facebook |
05/10/2014
(J-Drama / SP) Umoreru : Lanceur d'alerte... et après ?
Le 'lanceur d'alerte' trouve un écho particulier dans l'actualité de ces dernières années. C'est par définition une figure qui interpelle et ne laisse personne indifférent. Héros pour les uns, traître pour d'autres, il a mené un combat pour exposer une vérité au grand jour et faire cesser des agissements qui, à ses yeux, compromettaient l'intérêt de tous. Action menée avec plus ou moins de succès. Les récits sur le sujet s'arrêtent souvent à ce moment-là, sur cette fin qui n'en est pas vraiment une. Mais, se demanderont les plus curieux, une fois la tempête médiatique retombée, que devient celui par qui les révélations sont arrivées ? C'est sur cette question particulière de l'après, sans s’appesantir sur les dilemmes éthiques qui ont conduit le protagoniste principal à faire ses choix, que revient Umoreru, un tanpatsu qui a été diffusé le 16 mars 2014 sur la chaîne japonaise payante WOWOW. L'occasion d'un billet dominical asiatique.
Umoreru suit le parcours introspectif de Kitami, ancien cadre dans l'industrie agro-alimentaire, ayant informé des journalistes de pratiques illégales au sein de sa société. Le récit prend immédiatement à rebours celui qui attendrait la célébration d'un redresseur de torts et une vérité triomphante. Il est au contraire chargé d'incompréhensions, d'amertume, de regrets et d'interrogations, lesquels sont partagés avec un téléspectateur invité à la réflexion aux côtés de ce personnage principal en plein doute. Car le résultat de la mise en accusation médiatique n'a guère été probant : des dirigeants s'excusant jamais inquiétés réellement, 120 employés de la société sous-traitante sacrifiés comme boucs-émissaires, et un ami proche l'ayant aidé lui-aussi remercié... Poussé à la démission, Kitami doit faire face à des conséquences et un prix à payer qu'il n'avait jamais envisagés. Il pensait au droit du consommateur anonyme et voilà que, bien plus concrètement, sa fille est persécutée à l'école par des camarades lui reprochant l'attitude de son père. Sa famille éclate dans les mois qui suivent. C'est finalement un jeune divorcé que l'on suit, quittant Tokyo et toutes ces turbulences, pour un emploi à temps-partiel dans la mairie de sa petite ville d'origine.
Umoreru s'articule autour d'une confrontation permanente entre les valeurs (de justice, de vérité) auxquelles Kitami se veut fidèle et le poids d'un conformisme rigide prôné par une société qui encourage à se fondre dans la masse et à ne pas se détacher du groupe (au travail, comme ailleurs). La fiction interroge sur le corporatisme, sur ses limites éventuelles, mais aussi sur l'impact que l'on peut avoir en agissant de l'intérieur d'une institution... Il faut dire que l'exil de Kitami n'a pas l'effet escompté, puisque son nouveau cadre de vie soulève des dilemmes pas si différents de ceux de la capitale : le fonctionnement de la mairie dans laquelle il échoue se révèle en effet loin d'être exempt de reproches. Les deux premiers tiers du tanpatsu retranscrivent donc, avec une certaine finesse et une ambivalence bien dosée, tous les doutes qui jalonnent la trajectoire personnelle d'un personnage chez qui tous ces événements produisent une logique remise en cause. Loin de toute évidence héroïque et de toute lecture manichéenne, l'angle choisi encourage au contraire la réflexion. Cependant, Umoreru ne parvient pas à maintenir son juste dosage jusqu'à la fin. Il dévie de la problématique initialement posée quand il se rapproche de sa conclusion, réduisant soudain ses enjeux à une quête de la vérité qui s'est greffée au fil du récit dans la vie personnelle de Kitami. Les ultimes tournants amoindrissent quelque peu la portée d'un ensemble dont les nuances avaient été jusqu'alors préservées.
Doté d'une réalisation soignée, Umoreru reste un tanpatsu intéressant à plus d'un titre, interrogeant notamment sur les arbitrages difficiles entre intérêts général, collectif et personnel. De plus, par son traitement même d'un tel sujet et les choix que le scénario fait, il apparaît aussi comme un révélateur assez marquant des mécanismes sociaux et du poids du conformisme dans ce cadre japonais qui est le sien. Cet unitaire, à sa manière, encourage également à maintenir une certaine distance critique avec l'ensemble, avec un téléspectateur impliqué au plus près des réflexions du protagoniste principal.
En résumé, une curiosité du petit écran japonais à plus d'un titre, et qui dure moins de deux heures. Avis aux amateurs.
NOTE : 7/10
18:44 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : j-drama, wowow, umoreru, kiritani kenta, kuninaka ryoko, mizuhashi kenji, ochiai motoki, ito ayumi, otomo kohei, saiki shigeru, midori mako, kataoka reiko, kanai yuta, hyuga joe, yashiba toshihiro, kinoshita houka, hino yojin | Facebook |
28/09/2014
(US) Manhattan, saison 1 : 'What about the next war ?'
"What about the next war ? What happens when Stalin's got one ? China ? The Shah of Iran ? You know the story of the golem ? A rabbi wanted to protect the Jews of Prague, so he built an automaton out of mud, brought it to life. First the golem kills the enemies of the Jews. Then it turns on Jews themselves. See, he couldn't control it. He'd built Frankenstein's monster."
(Charlie Isaacs)
L'un des thèmes à la mode, en ce moment dans les fictions, ce sont les scientifiques et leurs rôles durant la Seconde Guerre Mondiale. En attendant la sortie d'un film comme The Imitation Game, présenté au festival de Toronto ce mois-ci, on peut citer par exemple le téléfilm unitaire proposé par BBC2 début septembre, Castles in the sky, consacré à la mise au point du radar par les Britanniques dans les années 30. De l'autre côté de l'Atlantique, les États-Unis ne sont pas en reste, puisque c'est la chaîne WGN - continuant ainsi à se positionner dans le domaine des séries après Salem - qui s'est appropriée ce sujet depuis le mois de juillet avec Manhattan. Neuf épisodes ont été diffusés à ce jour, sur les treize que comptera la première saison. Si elle est l'objet de ce billet dominical, c'est que cette série est certainement ma nouveauté américaine préférée de l'été.
La première image de Manhattan lance un décompte : le récit débute 766 jours avant Hiroshima. Nous sommes en pleine Seconde Guerre Mondiale, mais la série éclaire un front particulier, celui d'une course contre-la-montre scientifique entre les grandes puissances engagées dans le conflit, en quête d'une arme nucléaire dont la mise au point sera décisive pour le pays qui la possèdera. L'issue de ces recherches est connue du téléspectateur. L'enjeu de la série n'est donc pas de savoir si les équipes réunies au sein du projet américain réussiront, mais la manière dont elles vont y parvenir, avec toutes les difficultés, mais aussi les questionnements, qui marqueront ce long parcours. Partant de là, ce qui frappe immédiatement le téléspectateur s'installant devant Manhattan, c'est à quel point le récit, servi par un rythme de narration rapide, est parcouru de tensions contradictoires permanentes. La série tout entière se construit sur des confrontations personnelles et des interrogations éthiques qui foisonnent à tous les niveaux. Cette approche lui permet de prendre pleinement la mesure de la richesse thématique qu'offrent ces événements se déroulant dans un coin reclus du Nouveau-Mexique.
Réunir dans un huis clos les plus grands cerveaux du pays pour travailler à l'élaboration d'une bombe ne pouvait que donner des relations de travail compliquées. L'humilité et le relationnel sont loin d'être les qualités premières de ces scientifiques toujours prompts à se concurrencer. Manhattan met donc en scène des rapports de force constants, où chacun avance ses pions et tente de peser sur les orientations du projet, sans pour autant négliger forcément son propre agenda de recherches. Tout se décline en rivalités. Les répliques y sont cinglantes et les réparties mordantes, apportant un piment appréciable à des dialogues souvent vifs. À ces tensions internes à une communauté universitaire délocalisée et reconstituée en plein désert, s'ajoutent des rapports difficiles avec l'armée et le contre-espionnage. La sécurité est en effet censée tout primer, légitimant la multiplication de mesures intrusives dans la vie quotidienne et l'intransigeance avec laquelle est accueillie la moindre infraction aux règles établies. Ce cadre aux accents kafkaïens contribue à cultiver une paranoïa vite pesante, presque oppressante, incessant rappel de cette guerre qui se déroule à des milliers de kilomètres de là.
Un autre des grands atouts de Manhattan est de ne jamais oublier où conduit ce projet et les questionnements légitimes soulevés. L'objectif de mettre fin à la guerre peut-il vraiment justifier la mise au point d'une telle arme ? Remettre cette bombe, capable d'une telle destruction, entre les mains des militaires peut-il être source de paix ? Quel avenir s'ouvre avec une ère où les grandes puissances disposeront d'une telle force de frappe ? Autant d'interrogations qui résonnent avec une acuité particulière auprès d'un téléspectateur qui sait très bien où tout cela mène. La situation est d'autant plus compliquée pour ces scientifiques qu'ils ont emmené avec eux leurs familles. Ces dernières subissent non seulement un dépaysement désertique loin de tout, mais aussi les prises de distance d'époux contraints de compartimenter leurs journées pour préserver la sécurité. Derrière les dynamiques de couples qui s'enraillent face aux secrets, se ressent en permanence le poids d'un projet qui hante les consciences de chacun de ses participants.
Servie par un casting solide et une écriture dynamique qui rend le visionnage agréable, Manhattan est une série qui traite de thèmes qui ont toujours une résonance particulière aujourd'hui. Au fil des épisodes, s'esquisse en effet un portrait qui ne peut qu'interpeller : est mise en scène une course aux armements avec tous les moyens d'un État moderne, lequel rationalise à l'extrême le processus et sacrifie, en conscience, un certain nombre de principes et de droits élémentaires au nom d'un intérêt supérieur. Face aux problématiques soulevées, chaque personnage permet d'apporter un éclairage personnel, fruit de ses origines et/ou de sa propre expérience. C'est donc une série aux propos riches, qui sait happer le téléspectateur. Espérons qu'elle poursuive sur cette voie, notamment en continuant à doser sans déséquilibre les deux versants professionnel et personnel des protagonistes. À suivre.
NOTE : 7,5/10
La bande-annonce de la série :
Le générique de la série :
20:02 Publié dans (Séries américaines) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : wgn, manhattan, john benjamin hickey, olivia williams, ashley zukerman, rachel brosnahan, daniel stern, katja herbers, harry lloyd, alexia fast, christopher denham, michael chernus | Facebook |
21/09/2014
(US) E.R. (Urgences) : petit hommage à une série fondatrice
Si ce dimanche marque le véritable coup d'envoi de la rentrée des networks américains, la semaine écoulée a été marquée par un autre type de célébration. Une rentrée plus ancienne occupait l'esprit du sériephile enclin à la nostalgie, celle de 1994. Il y a déjà vingt ans (et deux jours), NBC lançait en effet une série qui n'a pas usurpé le qualificatif souvent galvaudé de "générationnelle". Un style, une durée et des personnages qui en ont marqué plus d'un : c'était E.R. (Urgences). Débutée en 1994, elle n'a débarqué qu'à l'été 1996 en France. Elle allait pourtant créer un rituel télévisuel automnal incontournable, allégeant d'autant le retour sur les bancs du collège ou du lycée (pour les premières saisons en ce qui me concerne). Installés devant France 2, nous terminions immanquablement le week-end dans les couloirs du Cook County. Suivant ainsi le chemin défriché par X-Files sur M6, Urgences a contribué à asseoir les séries américaines en prime-time, familiarisant le téléspectateur, dans cette ère sans haut débit, à la temporalité sériephile.
Urgences est un des monuments fondateurs de ma passion pour le petit écran. Elle est sans doute arrivée un peu tôt pour produire le déclic que provoquera cinq ans plus tard A la Maison Blanche, mais elle a construit, avec quelques autres séries de sa décennie, mon éducation sériephile et des réflexes toujours bien présents. Cette série populaire réunit les ingrédients qui représentent encore aujourd'hui, à mes yeux, l'essence même de ce que doit être une œuvre télévisée. Au sein de ce service des urgences de Chicago, ce sont autant d'importants enjeux liés aux services de santé, et de manière générale de grands thèmes de société, qui faisaient irruption dans le sillage des patients se succédant à l'hôpital. Le cadre se prêtait parfaitement à une fiction, permettant de jouer sur une dimension théâtrale et un rythme incertain et changeant, capable de s'emballer comme peu de récits. Pour reprendre l'expression chère à Martin Winckler, Urgences était un véritable "miroir de la vie", reflet réaliste, esquissé sans complaisance, d'une grande ville américaine, de sa population et des problématiques auxquelles elle était confrontée.
Vingt ans après, demeure le souvenir d'une longue chronique de société, seulement achevée en 2009, au terme de 15 saisons. Le parcours n'a pas été homogène, avec des accidents et une qualité devenue en dents de scie. Par-delà l'importance du discours tenu et des thèmes traités, la force d'Urgences a aussi été de savoir reposer sur un facteur humain déterminant pour l'engagement du téléspectateur. Certes, avec le recul, il me faut constater que c'est l'équipe des premières saisons qui est restée inchangée dans ma mémoire. Les autres personnages, condamnés à n'être que d'éternels nouveaux venus, ont été les greffes d'un renouvellement nécessaire qui, inconsciemment ou non, n'a jamais été totalement enregistré. Pour autant, le lien humain ne fut pas rompu. Une des règles classiques du scénariste, pour immerger le téléspectateur dans les codes d'un univers particulier, est d'utiliser comme clé d'entrée narrative un nouveau. Urgences est de celles qui ont réussi cet exercice au-delà de toutes espérances. Débarqué durant le pilote avec sa blouse blanche immaculée trop bien taillée, Carter a été l'âme de la série. Il a mûri devant nous et est resté notre fil rouge. Je reconnais n'avoir jamais pu regarder que par intermittence les saisons où il a été absent.
Enfin, si Urgences a été une fiction capitale à plus d'un titre, elle n'est pas seulement une œuvre à analyser et à intellectualiser pour y trouver une radiographie de la société américaine d'alors. Elle a légué au téléspectateur bien plus que cela, avec quelques flashbacks à jamais profondément ancrés dans le panthéon du sériephile. Ce sont des scènes qui pincent encore le cœur et humidifient les yeux comme au premier visionnage lorsqu'elles se rejouent dans nos têtes, ou lorsqu'on les recroise au détour d'une rediffusion. Parce que personne n'oubliera jamais Lucy, agonisant dans cette salle des urgences tandis que le service fait la fête à côté, inconscient du drame qui se noue. Parce que la chanson Over the rainbow, à la légèreté entêtante, est restée celle d'un adieu. Urgences a laissé à son téléspectateur une suite de souvenirs empreints d'émotions brutes, intacts après toutes ces années, et que l'on chérit toujours comme autant de parts de ce monument télévisuel protéiforme.
En résumé, Urgences a posé sa marque indélébile, dans des registres bien différents, sur l'univers des séries télévisées. Il faut donc me pardonner cet élan nostalgique, mais ces 20 ans d'anniversaire méritaient bien un billet dominical, un hommage forcément trop court mais une petite célébration nécessaire... le tout avant de se lancer dans la nouvelle saison des networks US.
♫ Somewhere over the rainbow... ♫
20:22 Publié dans (Séries américaines) | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : urgences, er, nbc, noah wyle, anthony edwards, sherry stringfield, julianna margulies, eriq la salle, george clooney, laura innes, alex kingston, goran visnjic, maura tierney | Facebook |