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04/03/2012

(Téléphagie) Le feuilleton et la série : et toi, qu'attends-tu d'un épisode ?

Il y a quelques semaines, Ryan McGee a jeté un pavé dans la marre de la construction narrative des séries américaines avec un article qui amenait logiquement au débat : Did the Sopranos do more harm than good ? HBO and the decline of the episode (je vous en conseille fortement la lecture si cela n'est pas déjà fait). Il écrit notamment que : "HBO isn’t in the business of producing episodes in the traditional manner. Rather, it airs equal slices of an overall story over a fixed series of weeks. If I may put words into his mouth: HBO doesn’t air episodes of television, it airs installments. Calling The Sopranos a novelistic approach to the medium means praising both its new approach to television and its long-form storytelling."

En filigrane, transparaît la classification classique différenciant les séries d'une part, des feuilletons d'autre part, catégorisation utile même si elle ne reflète pas la réalité plus nuancée des fictions télévisées. En effet, ces dernières mêlent généralement les deux approches, ce qui leur permet d'exploiter tant leur format épisodique, que de s'assurer la fidélité du téléspectateur la semaine suivante. Le dosage tendra plutôt vers l'un ou l'autre des genres. Et à l'extrême du feuilletonnant, j'aurais plutôt désigné The Wire sur HBO dont les arcs de chaque saison s'affranchissent de la limite des épisodes, dépassant justement certains des codes du petit écran.

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Cet article, que l'on partage l'opinion de l'auteur ou non, a le mérite de faire rappeler et faire réfléchir sur les recettes de storytelling suivies actuellement. Elles demeurent plus ou moins toutes représentées, avec parfois des équilibres très réussis entre feuilleton et série, comme l'illustre actuellement une oeuvre comme Justified. Cependant, au-delà des techniques de scénaristes, cet article renseigne aussi sur un autre aspect : l'importance jouée par les attentes du téléspectateur devant un épisode de série. Comment perçoit-il cette heure de rendez-vous hebdomadaire ? Et que représente pour lui ce rendez-vous ?

Distinguer entre le feuilleton et la série (aussi perméables que soient ces catégories), ce n'est pas remettre en cause la légendaire addiction du sériephile, ni la fidélité que l'on peut éprouver pour telle ou telle fiction. Les différences vont tenir à d'autres aspects, très variables. Plus que l'anticipation par le téléspectateur de la fin de l'arc narratif, qu'il s'agisse d'un climax ou d'une grande révélation, je vois avant tout dans les feuilletons la possibilité de construire un (ou des) arc(s) homogène(s), pour une oeuvre comportant un début, un développement et une vraie fin. La structure du feuilleton tend ici à se confondre avec celle du roman, les épisodes devenant un découpage en chapitres d'une seule oeuvre.

Par rapport à cette structure narrative, ma consommation de séries a beaucoup évolué ces dernières années. Autant (ou même peut-être plus) que la "sériephilie sans frontières" dont je vous parle régulièrement, c'est peut-être là une des clés de ma sériephilie actuelle : ma conception de la fiction télévisuelle et les raisons pour lesquelles je la regarde.

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Au début d'une série, tout sériephile veut y croire...


Durant mes premières années de visionnage des séries, j'étais une téléspectatrice fidèle et assidue. J'ai expérimenté tous les genres imaginables diffusés sur les chaînes hertziennes : des séries purement procédurales, des dramas chroniques de vie, des soaps, des séries "hybrides" où le fil rouge tendait à la rapprocher du feuilleton, etc. Ce faisant, j'ai vécu d'intenses moments de satisfaction, mais aussi de la déception. Pas celle qui accompagne un trop rapide dérapage qualitatif (Invasion Planète Terre), mais celle qui suit la dilution progressive d'une oeuvre incapable de se renouveler dont on exploite jusqu'au bout et au-delà son concept (d'innombrables cop shows) ; ou alors quand la série finit défigurée, sans rapport avec l'esprit d'origine (New York 911). Et puis, il y aussi eu ces fameuses oeuvres dans lesquelles la mythologie patiemment construite a finalement déçue (X-Files). Des années d'investissement, et une impression de frustration qui reste (sans effacer cependant le plaisir d'avoir vécu les premières saisons et leurs interrogations)...

Durant la décennie des années 2000, un décrochage s'est opéré dans mon approche des séries. L'investissement sur le long terme est devenu plus difficile ; démarrer des nouveautés, moins naturel. Je me suis mis à rechercher des oeuvres où le contrat d'engagement était pré-écrit : je savais dans quoi je m'engageais et pour combien de temps. C'est à ce moment-là que j'ai vraiment commencé à m'investir dans les "mini-séries" ; et c'est précisément au cours de cette crise que ma consommation anglaise a explosé. Plus que mon anglophilie, voilà bien une des raisons premières qui m'a fait me tourner vers le petit écran d'outre-Manche. Le nombre d'épisodes est connu, le récit construit comme un vaste arc avec une fin. Et si déception il y a, je n'aurais pas d'arrière-goût amer à la pensée d'avoir investi 100 heures pour me sentir flouée. Immédiatement, la découverte se fait alors plus spontanément.

C'est ensuite que j'ai découvert le petit écran asiatique, ou plus précisément japonais. Le format classique du renzoku tourne autour d'une dizaine d'épisodes d'une quarantaine de minutes (je laisse de côté les taïga et asadora). Le renouvellement du drama, loin d'être systématique, est plutôt rare ; si bien que l'histoire se construit généralement sur une seule saison. La série pourra indifféremment adopter le modèle du feuilletonant ou au contraire enchaîner les épisodes quasi-indépendants, cela dépend simplement des genres. Je m'y suis cependant facilement laissée prendre parce que j'y ai retrouvé des assurances proches du format de la mini-série, en terme de durée, mais aussi en terme d'écriture.

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J'aurais pu finir par croire que mon rapport aux séries se résumait à une question de longueur, mais j'ai alors commencé à suivre les séries sud-coréennes. Concernant le format de ces dramas, la structure narrative suivie par les trois chaînes principales de Corée du Sud (je laisse volontairement de côté le câble qui a introduit récemment quelques variantes) se rapproche de ses voisins chinois, taïwanais, ou encore de Hong Kong, mais aussi des télénovélas d'Amérique du Sud. Un début, une vraie fin, un renouvellement pour une saison 2 exceptionnel, et un nombre d'épisodes plus long, avec 20, 36 ou pouvant dépasser allègrement la cinquantaine d'épisodes pour les home dramas ou encore les sageuk.

Pourtant, dans le petit écran sud-coréen, le fonctionnement de l'industrie de l'entertainment fait qu'on n'y trouve pas les mêmes garanties que j'ai précédemment évoquées. La cadence imposée par le tournage "live", avec des épisodes écrits et tournés à flux tendus par rapport à la diffusion télévisée (il arrive de boucler la post-production d'un épisode la veille même de sa diffusion), peut amoindrir l'écriture ; il n'est pas rare que le passage des épisodes pré-écrits, à ceux ajustés et finalisés en cours de diffusion, entraîne des sautes qualitatives. De même, un drama à succès (ou en cas de retard de celui dont la diffusion doit suivre) peut bénéficier d'une extension de quelques épisodes. Cela accentue d'autant les risques de dilution de la série.

Seulement, en dépit de ces risques, c'est le plaisir du feuilleton (lorsqu'il est réussi) qui l'emporte. C'est ainsi que j'ai pu arriver au bout des 81 épisodes de Jumong en éprouvant un vrai plaisir sériephile rare. Comme beaucoup de sageuk traditionnels, il se présente comme un biopic d'un personnage célèbre, partant des évènements précédant la naissance (souvent des tragédies forgeant les oppositions) puis relatant l'accomplissement de ses grands actes, pour s'achever proche de la fin. La force de ce récit, c'est justement sa construction comme un grand roman, découpés en chapitre, et des épisodes qui ne sauraient se visionner indépendamment.

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Au final, au-delà des deux catégories que sont le feuilleton et la série (et de ma préférence pour la première), la construction narrative qui a mes faveur est désormais celle-ci : un début, une fin, si possible un nombre d'épisodes clairement défini. Ma fiction idéale s'apparente à un livre, et j'entretiens avec elle des rapports très semblables avec ces derniers (Forbrydelsen l'a bien illustré l'an dernier). Sans être une vérité systématique, c'est ce qui décrit le mieux l'état actuel de ma sériephilie. Le procedural show n'a plus mes faveurs ; pas plus que la série au concept potentiellement fleuve qui empêche de savoir pour combien de temps et jusqu'où on s'embarque. Cela explique d'ailleurs en partie mes réserves face aux fictions des grands networks américains.

De façon plus problématique, la fidélité sur le long terme que j'ai pu nourrir par le passé pour certaines oeuvres me semble aujourd'hui presque incompréhensible. Prenons par exemple House MD qui va s'achever à la fin de la saison. Je l'ai sincèrement appréciée à ses débuts ; je m'installe aujourd'hui devant un épisode sans trop rechigner, mais j'ai tourné la page depuis plusieurs saisons. Sans regret. J'admire la persévérance des sériephiles qui accompagnent leurs fictions saison après saison. Cela m'est devenu presque étranger. Ma passion sériephile est cependant intacte ; elle se manifeste juste différemment désormais.


Et vous, quel rapport entretenez-vous avec les épisodes d'une fiction télévisée ?

26/09/2011

(Pilote US) Revenge : pourquoi la série aurait pu être écrite pour la télévision sud-coréenne (et la raison qui la fait échouer)


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[Ceci est un exercice de review un peu particulier, mais Revenge s'y prêtait. A noter que l'article a été conçu de manière à pouvoir être lu par tous les lecteurs, familiers ou non des petits écrans auxquels il est fait référence.]


On a souvent l'habitude d'écrire des critiques de séries à travers un prisme de références américaines... Et si on changeait l'angle d'approche ?


Ce billet est né à la suite d'échanges sur twitter après le visionnage du pilote de Revenge. En cours d'épisode, j'avais parlé des grandes similitudes de recettes avec une série sud-coréenne "type" de vengeance. Par curiosité, je suis allée ensuite vérifier ce qu'en avaient pensé d'autres blogueurs disposant de bases similaires sur ces deux cultures télévisuelles. Vérification faite chez Lady, où c'est la thématique même de la vengeance qui est associée au petit écran sud-coréen. Tandis que chez Eclair, s'il concentre sa critique sur l'épisode en lui-même, il ne peut cependant pas s'empêcher de le comparer aux références du genre et finit donc par citer... un k-drama. Le réflexe est naturel.

En effet, si le téléspectateur pense instinctivement "série sud-coréenne" devant le pilote de Revenge, c'est tout d'abord en raison du thème. Certes, il existe des séries occidentales sur la notion de vengeance, mais c'est une thématique qui ne s'est pas systématisée dans le petit écran américain, à l'exception peut-être des soap. Or le paysage est très différent en Corée du Sud, pour diverses raisons aussi bien culturelles qu'historiques (Lecture complémentaire : The Korean Quest for revenge). Dans son cinéma, la vengeance est ainsi un sujet particulièrement exploré - le dernier film sud-coréen sorti en France cet été, J'ai rencontré le diable, l'illustre bien, au-delà de tous les classiques que l'on pourrait citer (la trilogie de Park Chan Wook en étant sans doute l'exemple le connu). A la télévision, le thème de la vengeance est moins influent dans un petit écran qui demeure le terrain privilégié des mélodramas et autres RomComs où l'amour apparaît comme la dynamique centrale. Pour autant, la vengeance reste là-aussi une constante récurrente, bien plus qu'ailleurs. Chaque année, on retrouve en Corée du Sud des dramas qui explorent et déclinent à leur manière le revenge thriller, suivant des approches très différentes. Parmi les plus récents, on peut citer de manière non exhaustive, des séries comme : Sorry I love you (2004), A love to kill (2005), Time between Dog and Wolf (2007), Story of a man / The Slingshot (2009), Bad Guy (2010), et en 2011, City Hunter sur les grandes chaînes, Little Girl K pour le câble. Et ce, sans mentionner les (nombreuses) séries où le sujet est plus incident, mais néanmoins bien présent (aussi bien dans les séries contemporaines que dans les sageuk - séries historiques).

Par conséquent, c'est sans surprise que l'idée à la base de Revenge peut être associée naturellement dans l'esprit du téléspectateur à des références sud-coréennes. Cependant, ce qui m'a interpellé sur le moment, c'est que le pilote va plus loin qu'un simple partage du thème principal : on y retrouve aussi une construction narrative et une présentation qui pourraient avoir été écrites pour la télévision sud-coréenne. Mais, et c'est sans doute sur ce point que la comparaison trouve son intérêt, Revenge a aussi des spécificités qui la distingue fondamentalement d'un k-drama. De manière assez révélatrice, c'est précisément l'aspect par lequel elle se démarque qui va sceller l'échec de cette introduction.

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I. Pourquoi Revenge aurait pu être écrite par un scénariste sud-coréen (et respecte tous les codes du cahier des charges classiques des k-dramas) :

Commençons par le premier parallèle proposé par ce pilote, qui constitue un emprunt culturel évident : le choix d'ouvrir l'épisode sur une phrase, pleine de sagesse, posant d'emblée la tonalité de la série. La citation qui s'affiche est de Confucius. Si les écrits du philosophe chinois et tous les courants de pensée qui s'en sont réclamés par la suite sont deux choses différentes, l'influence des valeurs (néo)confucéennes est historiquement importante dans la société sud-coréenne, et demeure une réalité.

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Poursuivons plus avant dans ce pilote, en étudiant la construction-même du récit. L'épisode débute par un flashforward, évoquant une situation irréversible : la mort d'un des personnages principaux, sans que ces quelques minutes ne lèvent le mystère sur ce qui a abouti à cette situation. Puis, c'est le retour dans le présent, quelques mois plus tôt au début de l'été. L'héroïne retrouve la maison de son passé et va faire ses première rencontres avec les différents protagonistes. Pour nous expliquer la situation, le pilote a recours à de multiples flashbacks qui viennent idéaliser les souvenirs de l'enfance perdue de la jeune femme, avant que sa vie familiale ne soit brisée. Utiliser toute la palette des fils temporels à leur disposition pour introduire les enjeux de l'histoire - les emmêlant parfois excessivement - demeure un mécanisme scénaristique qui vient naturellement au scénariste sud-coréen. Parmi les séries citées plus haut, Bad Guy par exemple adopte la même approche.

Outre la construction de l'histoire, il y a les thèmes qui conduisent à faire des parallèles. L'objectif est le suivant : Emily veut se venger de la destruction de la vie et de la réputation de son père, et donc par ricochet avoir brisé sa propre vie. Contre qui agit-elle ? Il y a différents responsables, mais plus particulièrement une famille riche et influente (dans une série sud-coréenne, ce serait une famille de chaebol) qu'elle entend donc faire payer. Cela permet de nous immerger dans le milieu de ces gens aisés, si clinquant et brillant en apparence, mais tellement grangréné en réalité, les manipulations et les trahisons y étant un quotidien normal. Le tout se déroule dans les Hamptons, offrant donc un décor luxueux toujours prisé dans les k-dramas.

De quels moyens dispose Emily pour parvenir à ses fins ? Se glisse ici une dimension sentimentale. Au cours du pilote, l'héroïne croise en effet deux prétendants potentiels manifestes. D'une part, il y a l'héritier de la famille à détruire, lequel a tous les attributs du jeune riche (lourd passif d'arrogance, abus). D'autre part, il y a un jeune homme de milieu plus modeste qui, cerise sur le gâteau, l'a connue enfant. Les deux étaient proches (à ce moment-là, le voyant *premier amour d'enfance, flamme éternelle* clignoterait dans tout drama sud-coréen normalement constitué, puisque c'est ici un ressort narratif qui transcende tous les genres de séries), la vie les a séparées, il ne la reconnaît pas mais n'y est pas insensible, elle le reconnaît et préfère l'éviter... S'esquisse donc un triangle amoureux possible (fondation nécessaire de nombre de séries sud-coréennes), avec les sentiments et l'amour comme arme de vengeance au long cours pour réussir à atteindre l'objectif suprême. Le flashforward du début ne faisant qu'insister sur l'importance de ces trois-là.

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Si tous ces éléments expliquent ma réaction devant le pilote, pour autant Revenge est aussi très éloignée d'une série sud-coréenne.

 

II. Pourquoi Revenge se différencie irrémédiablement d'une production sud-coréenne (et rate son introduction) :

Au cours de ce premier épisode, alors même que tous les ingrédients sont bien là, la recette universelle et calibrée du revenge thriller dérape. Le pilote échoue dans sa mission de proposer une introduction intrigante, car Revenge reste en effet une enveloppe vide, un papier glacé dénué d'émotions. Une partie du problème vient sans doute d'un casting qui reste en retrait, Emily VanCamp n'ayant peut-être pas la carrure du personnage qui lui est confiée, mais une grosse part de responsabilité pèse sur l'écriture. Car s'il est souvent possible de reprocher un certain manque de rigueur narrative dans la gestion des k-dramas, en revanche, le point fort de ces productions réside dans l'empathie que vont savoir susciter les personnages. La recette miracle qui fidélise le téléspectateur, l'implique dans le sort des protagonistes et l'amène à s'investir dans la série, c'est un ressenti particulier qui va recouper une dimension émotionnelle, difficilement quantifiable. Or, dans le pilote de Revenge, on ne ressent rien. Nulle compassion face au récit de l'enfance d'Emily. Aucun lien ne se crée avec elle.

On touche ici à la limite du sur-calibrage de ces recettes scénaristiques millimétrées : on ne reprochera pas à une série d'employer des ingrédients éprouvés, simplement parce qu'ils sont excessivement classiques. En revanche, on le lui reprochera si elle devient un ensemble mécanisé et déshumanisé, d'où rien n'émane si ce n'est l'impression de visualiser des rouages savamment huilés, sans parvenir à s'intéresser à l'ensemble en tant que création. Si les k-dramas se permettent une sur-exploitation de certaines ficelles narratives, c'est parce que, jusqu'à présent, ils ont globalement su généralement conserver leur lien avec le public, en se rappelant leur force : savoir toucher une fibre émotionnelle. Mais le jour où la réutilisation des mêmes pots et le poids du cahier des charges feront oublier l'âme que doit avoir toute création, le système s'effondrera. C'est pourquoi le pilote de Revenge est un échec : il a des recettes qui pourraient indéniablement marcher, peu importe qu'elles paraissent surannées, mais le cahier des charges prend le pas sur l'histoire, et ce pilote reste une enveloppe policée, mais creuse et sans identité propre.

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Conclusion :

Sur bien des aspects, le pilote de Revenge, à partir du genre particulier que sont les séries de vengeance, semble surtout être le parachèvement et le produit d'une forme de standardisation et de mondialisation culturelles plus globale, dont le processus tend à s'accentuer en raison des nouvelles technologies, de l'abolition des frontières de la création. C'est un phénomène qui joue sur les créateurs, mais aussi sur le public - le simple téléspectateur lambda - qui a désormais un accès beaucoup plus large à tous ces contenus. Au-delà des origines et influences de Revenge (de la littérature classique aux soap américains), il reste le constat amusant et indéniable d'un parallèle évident, d'une promiscuité certaine, entre cette série et des recettes qu'on pourrait qualifier de "canoniques" au sein la production télévisuelle sud-coréenne. Une belle illustration de cette fameuse culture mainstream mondialisée.

Dommage que l'essai soit ici un échec.


Pour conclure sur une note de prosélytisme bien ordonné : si une série de vengeance vous tente vraiment, jetez un oeil à celle qui reste un modèle du genre et une des plus abouties de ces dernières années : Story of a man / The Slingshot.

06/08/2011

(Téléphagie) Petit état des lieux d'une passion sériephile ordinaire en 2011

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Il y a quelques années, un de mes profs m'avait dit, "peu importe le domaine dans lequel vous vous spécialiserez ; un spécialiste, ce n'est pas tant quelqu'un qui maîtrise sur les bouts des doigts un sujet, que quelqu'un qui a avant tout conscience de ses limites et de l'étendue de son ignorance". Il n'avait pas tort ; mais surtout, cette vérité peut facilement s'appliquer à la sériephilie. Il y a quelques semaines, Fabien expliquait dans un article intéressant, l'impossibilité qu'il y a aujourd'hui d'être "well-read", c'est-à-dire d'avoir vu tout ce qu'il fallait avoir vu au cours de la saison.

Il y a autant de façons différentes et tout aussi légitimes de vivre sa passion pour les séries, qu'il existe de sériephiles. C'est quelque chose de personnel, où il n'y a aucune "vérité". A une époque de sur-consommation, comment arbitrer ? Les critères sont multiples, leur prise en compte varie suivant les personnes : certains regardent les noms des créateurs, des acteur, des chaînes de diffusion, d'autres lisent les synopsis, ou bien testent tous les pilotes qui leur tombent sous la main. Chacun s'organise en fonction de son temps libre, de ses affinités et de ses préconceptions du petit écran. L'important, ce n'est pas tant d'essayer de dépasser ses préjugés que d'en avoir conscience : il faut savoir faire preuve d'humilité. L'essentiel est d'aimer ce qu'on regarde et de prendre du plaisir, peu importe la reconnaissance populaire et/ou critique de ce qu'on apprécie et autre "qu'en dira-t-on". C'est d'ailleurs ce que j'aime le plus sur ce blog : une ligne éditoriale dégagée de toute contrainte, et de considérations de statistiques et/ou d'image.

La saison 2010-2011 a été pour moi une saison de changement, mais aussi très satisfaisante à bien des niveaux. A l'heure du bilan estival, aujourd'hui, je me suis posée la question de l'état actuel de ma sériephilie. Quelles sont les affinités et les préjugés qui s'expriment ? Comment est-ce que j'arbitre et vis ma passion ? Pour essayer d'y voir plus clair, j'ai structuré mon article par continent : l'Europe, l'Amérique du Nord, l'Océanie, l'Asie... pour terminer sur une question : et la France ?

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Forbrydelsen (DR1)


1) L'Europe : la révolution révélation venue du Nord

Je ne vais pas déclamer à nouveau tout mon amour pour la télévision anglaise, dont la reconnaissance est un acquis ancien. Mon intérêt pour ces fictions ne se dément pas et le retour que j'attends le plus dans les mois qui viennent est sans conteste la saison 2 de Downton Abbey.

Cependant, 2011 aura bel et bien été l'année d'une révolution européenne : la découverte du petit écran non anglophone, et plus précisément, la révélation venu du froid des pays nordiques. C'est le Danemark qui aura été le pays marquant de cette première moitié d'année : la saison 1 Forbrydelsen m'aura captivé ; et, surtout, actuellement, je savoure dévore la saison 1 de Borgen avec un enthousiasme et une jubilation rares. Dans cette continuité, j'ai envie d'aller plus loin explorer la télévision suédoise et norvégienne. Mais, dernière surprise en date, cette semaine, c'est l'Islande qui se sera démarquée avec Pressa. Comme un pied de nez à bien des idées reçues : non, des moyens moindres ne sont pas des obstacles insurmontables à la créativité et à la qualité, et la non-anglophonie ne rend pas impossible la découverte. Il y aura forcément moins de productions (en nombre) que dans des pays plus importants ; mais toutes ces séries prouvent bien qu'un petit écran de qualité peut grandir en Europe.

A côté, j'ai cependant conscience de l'existence d'une autre Europe, inexplorée, à commencer par nos autres voisins immédiats : Italie, Espagne, Allemagne. De ce que je vois et lis de l'Italie (l'italien étant la seule autre langue dans laquelle j'ai quelques compétences), j'ai un peu le sentiment que le pays en est au même point que la France. Pour sa télévision publique, par exemple, la série bio-pic Corleone, diffusée sur la Rai, sortie en France en DVD en mai, présentait certaines insuffisances assez caractéristiques. Il y a un dynamisme de la part des chaînes payantes, en l'occurence Sky (Romanzo Criminale), mais est-ce que ça va au-delà, vu de l'extérieur, je n'en ai pas l'impression. Pour l'Espagne et l'Allemagne, c'est différent, pas seulement pour la barrière linguistique. A la différence de l'Italie, je n'ai pas de familiarité culturelle avec ces pays et j'avoue ma complète méconnaissance de leurs produtions (films, livres, musiques). L'Espagne a une tradition de séries historiques d'action qui ne serait sans doute pas étrangère à mes goûts. Pour l'Allemagne, je n'ai aucune certitude face aux rares fictions que j'ai pu voir et qui sont celles qui sont arrivées jusqu'à nous. Le problème reste donc entier pour ces pays.

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Treme (HBO)


2) L'Amérique du Nord : l'hégémonie du câble

La saison 2010-2011 n'aura pas été une saison américaine. Ou plutôt elle se sera inscrite dans la directe continuité de la lassitude passée. Cette année, le manque de temps libre fait que l'arbitrage a été drastique : je ne suis allée au bout d'aucune saison des séries des grands networks US. Abandonnées en rase campagne pour des raisons diverses, de qualité, de désintérêt, de longueur, ou un mélange d'un peu tout. Pourtant, j'ai aimé des nouveautés : Game of Thrones, Boardwalk Empire ; j'ai pleuré Rubicon ; j'ai applaudi Justified ; je n'ai pas encore osé finir le coeur serré Friday Night Lights ou Big Love ; je me suis gardée la saison 2 de Treme de côté. Bref des "chaînes payantes" me direz-vous. Pour être honnête, il n'y a qu'une seule chaîne américaine qui peut me faire tenter une nouveauté juste parce qu'elle la diffuse : HBO. Ce n'est pas un label de qualité systématique, mais le ratio satisfaction/déception fait que j'ai construit en une décennie une relation particulière avec cette chaîne. Tout n'est pas forcément toujours au beau fixe, mais ma confiance a été rétribuée. Et rien n'est venu perturbé cet équilibre. Outre HBO, la seconde chaîne américaine que je retiens est USA Network (Suits), pour des raisons très différentes, mais finalement complémentaires. Je suis loin de regarder tout ce que diffuse USA Network, mais j'ai mes habitudes sur cette chaîne, équivalant à l'été dans mon esprit, qui remontent à Monk et aux 4400. Désormais avec le type de divertissements qu'elle a su développer depuis Psych, j'ai naturellement envie de voir ses nouveautés. 

A côté des Etats-Unis, existe un autre pays souvent oublié avec un regard européen : le Canada. C'est en lisant l'article de Ladyteruki sur les préjugés d'une télélambda franchissant la frontière que je me suis rendue compte à quel point dans mon esprit, c'était l'extrême inverse qui se produisait. C'est probablement tout aussi critiquable, mais du fait de la multiplicité des co-productions, de la question des lieux de tournage, etc., j'ai une tendance naturelle à assimiler les deux pays, et à confondre ma façon d'aborder et d'arbitrer au sein de leur production. Je n'ai rien contre les Flashpoint, The Bridge et autre Listener, mais je pourrais leur adresser le même reproche que je fais à beaucoup de séries des grands networks américains, en terme d'identité notamment. C'est bien simple, elles ne me parlent plus actuellement. Il y a quelques années, j'avais pris le temps d'explorer le Canada, j'en suis ressortie avec un schéma, forcément caricatural, mais comme dans toute consommation culturelle il faut faire des arbitrages : The Movie Network = à tenter ; CBC/CTV = à ses risques et périls. Pour The Movie Network, c'était Slings & Arrows, ReGenesis, et Durham County à un degré moindre. A contrario, la dernière série de CBC qui m'a vraiment marqué, c'est Intelligence. Deux saisons, en 2006 et 2007, une réelle ambition narrative, des controverses sur sa noirceur ; pas parfait, mais que je conseille à tout le monde. Et, cette année, The Yard, sur HBO Canada, n'aura pas bousculé le schéma du Canada anglophone.

Par contre, j'ai aussi conscience qu'il y a un autre versant inexploré : le francophone québécois. J'ai bien envie un jour de prendre le temps de regarder Malenfant, mais pour le reste, tous les articles que j'ai pu lire sur ces séries, notamment leur sujet, n'ont pas éveillé mon intérêt jusqu'à présent. 

 

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This is not my life (TV1)


3) L'Océanie : une histoire de kiwi

Les productions venues d'Océanie sont bien anglophones ; mais le trajet vers ce continent est moins naturel. Les séries arrivent plus difficilement jusqu'aux chaînes françaises ; et, dans l'alternative, suivre une série australienne ou néo-zélandaise implique souvent de maîtriser suffisamment l'anglais pour ne pas avoir besoin de sous-titres. De l'autre côté de l'hémisphère, comme je le disais dans ma critique de Nothing Trivial, une certitude : j'aime la Nouvelle-Zélande. Pourquoi ? Je ne sais pas (nous voilà bien avancé). Je pense qu'il y a une question d'ambiance d'une part, et une affinité culturelle inconsciente sans doute de l'autre. Cette année, l'Australie a pourtant proposé des fictions plaisantes à suivre, plus calibrées : du legal drama (Crownies) à l'historique de luxe (Cloudstreet). Mais l'impression néo-zélandaise de proximité et de mélange d'influences l'emporte dans mon coeur. Ainsi, si je suis prête à tester toutes les nouveautés venues du pays des All Blacks ; en revanche, l'Australie me laisse indifférente et ce sera la lecture du synopsis qui sera déterminante pour me donner envie de regarder.

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Fumou Chitai (Fuji TV)


4) L'Asie : une fidélité sud-coréenne

En Asie, 2011 n'aura pas fait bouger les lignes établies. Je suis naturellement portée vers la Corée du Sud. Je pourrais prendre pour exemple la claque téléphagique qu'a été White Christmas en début d'année, ce drama est cependant tellement atypique, qu'il serait faux d'en faire le représentant de la production télévisée sud-coréenne. Au pays du Matin Calme, la dimension sentimentale et esthétique présente dans les dramas demeure l'attrait principal, mais elle est couplée avec un facteur culturel déterminant (mon inclinaison pour les séries historiques le montre bien). Si les k-dramas sont ceux qui retiennent le plus mon attention en Asie, c'est tout simplement parce que la Corée du Sud est un pays qui m'intéresse de manière globale, au-delà du seul petit écran ; et il profite d'un cycle vertueux "dramas=>culture générale=>dramas"... La plupart du temps, je suis surtout frustrée de ne pouvoir avoir suffisamment de temps à leur consacrer, tant ils s'apprécient dans la durée.

Parmi ses voisins, l'autre grand pays sériephile est bien évidemment le Japon. Mes rapports avec son petit écran sont plus compliqués. Des révélations comme Fumou Chitai ou Karei Naru Ichizoku m'ont fait prendre conscience qu'en terme de portrait industriel et économique, que ce soit de l'historique ou non (Soratobu Tayia), les dramas japonais ont un vrai savoir-faire à part pour retranscrire ce type de réalité. Ils maitrisent ici des sujets qu'on croise finalement moins dans les petits écrans des autres pays. En dehors des questions économico-industriel-sociales évoquées, pour me lancer dans une série japonaise, il me faut deux choses : un synopsis qui éveille mon intérêt et une critique positive de la part de quelqu'un qui a vu le drama. Je ne sais pas spontanément regarder une série japonaise.

Enfin, dernier territoire asiatique que j'ai pu un peu explorer, les trois Chine. D'expérience, je dirais que la tradition télévisée de Hong Kong, c'est souvent du divertissement, parfois très plaisant, mais "vite vu, vite oublié". J'ai regardé des hk-dramas, mais je n'ai jamais eu de coup de coeur, ni vu quoique ce soit qui m'a marqué. Du côté de la Chine, je n'ai jamais vu de séries contemporaines, donc j'ai une vision très partielle de la production et sans doute trop peu de recul pour émettre un jugement. Le genre historique semble très apprécié. J'aime le Wuxia, mais c'est à destination d'un public de niche (bon, j'avoue que j'ai quand même très très envie de me lancer dans Three Kingdoms !). Enfin, à Taiwan, les comédies colorées ne m'intéressent pas, en revanche les histoires sombres d'adolescence sont peut-être les seuls "high school dramas" que je peux visionner (Gloomy Salad Days). Ces pays sont des territoires que j'explore de loin ; je n'ai pas encore trouvé la motivation pour aller au-delà de cette surface.

 

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5) Après cette esquisse de semi-tour du monde, une dernière question se pose naturellement : Et la France ?

Ma découverte de 2011 est un rattrapage : il s'agit d'un Village Français qui m'a progressivement entièrement gagné à sa cause. J'apprécie vraiment la maturation de l'écriture au fil des saisons et la façon dont est abordé ce sujet sur la Seconde Guerre Mondiale. Mais même si elle se déroule au XXe siècle, elle reste une série historique, par conséquent, elle va naturellement me parler. J'aurais aimé écrire qu'une série contemporaine française m'a plu en 2011, mais encore une fois, au-delà de l'absence de réflexe pour allumer spontanément mon téléviseur, Les Beaux Mecs ou Xanadu ne m'auront pas entrainé plus loin que leur pilote. J'ai un peu l'impression d'avoir perdu et de ne pas retrouver l'habitude (si je l'ai jamais eue) de m'installer spontanément devant la télévision française : elle ne fait pas naître en moi de curiosité. Et je m'en veux. Le visionnage de la saison 1 de Pressa m'a cependant redonné envie de tenter Reporters. Pour le futur, les derniers développement autour de Pigalle la nuit n'incitent pas l'optimisme, sans aller jusqu'au constat sombre de Sullivan qui estimait dans son édito du mois dernier que la télévision française risquait de mourir. Quand on voit le dynamisme européen qui existe chez certains de nos voisins, je me dis qu'on a forcément les moyens d'une révolution télévisuelle comme DR au Danemark, mais peut-être pas la volonté politique de la part des dirigeants ? Je ne sais pas. Je suis tout cela de très loin, de trop loin sans doute... 

 

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Si elle s'est restructurée, ma sériephilie reste construite sur des tas de préjugés et de décisions arbitraires ; elle est aussi pleine de limites (pas d'Afrique, ni d'Amérique du Sud). La saison 2010-2011 a été celle des retrouvailles avec un équilibre perdu. Cette consommation demeure très liée à des motivations culturelles : mon amour démesuré, le seul qui transcende toutes les nationalités, au profit de l'historique l'illustre sans doute en partie. Le degré d'intérêt pour un pays joue aussi : je peux tenter une nouveauté anglaise, sud-coréenne ou néo-zélandaise juste en raison de sa nationalité ; ce qui ne sera jamais un argument suffisant pour me faire commencer une série américaine, canadienne, australienne ou japonaise. Ce type de raisonnement est assez nouveau. Et j'avoue observer la diminution constante de la part des séries américaines dans mes programmes avec un peu d'inquiétude (c'est la première année où je ne regarde aucune série des grands networks) ; mais je pense que ce n'est qu'une passade qui devrait se dissiper à terme. Peut-être une réaction à une overdose.


Bref, on est loin d'une sériephilie sans frontière débarrassée de tous préjugés. L'important, c'est sans doute d'en avoir conscience, et l'essentiel reste de prendre du plaisir devant ses séries, peu importe la manière dont on vit sa passion. Même si, en terme de ligne éditoriale du blog, ça veut dire vous parler de séries islandaises qui intéresseront 2,1 personnes parmi vous. Je sais que vous êtes des lecteurs indulgents et compréhensifs face aux lubies téléphagiques de la blogueuse que je suis, n'est-ce pas ?

24/02/2011

(Humeur) La sériephilie sans frontières peut-elle exister ?

Quand Livia met les pieds dans une cinémathèque et se prend à rêver...

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Je ne suis pas cinéphile. Cependant, je reste une grande consommatrice de culture. J'essaye de parfaire un peu mes explorations au-delà de mon obsession télévisuelle, de crainte de devenir trop exclusive. C'est ainsi qu'hier soir, je me suis retrouvée à la cinémathèque où le ciné-club local organisait une projection du magistral Château de l'araignée de Kurosawa (et pouvoir apprécier ce film sur grand écran, c'est classe). Dans les discussions qui suivirent, certains intervenants expliquant que le film avait mis de nombreuses années avant de parvenir jusqu'en France par le biais de festivals, la discussion a rapidement porté sur l'étanchéité des frontières à l'époque et les trésors qui pouvaient rester inaccessibles... Pourquoi est-ce que je vous parle de la cinéphilie de la fin des années 50 me direz-vous ? Outre que le fait que cet échange ne m'a pas paru sans faire écho à d'autres discussions sur cet autre média qu'est la télévision, mon cerveau a logiquement dérivé sur, justement, la sériephilie.

Parce que hier soir, j'ai mis les pieds au sein d'une communauté que je connais peu et j'ai pu assister - presque surprise et fascinée - à un quart d'heure d'échanges de vrais passionés comparant les différentes adaptations du MacBeth shakespearien, citant tour à tour Orson Welles, Kurosawa, puis dérivant sur les adaptations soviétiques (!) de Shakespeare. Chacun évoquait les influences qu'il y percevait, les spécificités culturelles, le classicisme de l'un, le théâtralisme de l'autre... Aucune des productions n'était dépréciée. Un vrai dialogue où chaque film était considéré comme recevable. Une fois rentrée chez moi, je n'ai pu m'empêcher de me demander... Et s'il me prenait l'envie de disserter et de réfléchir sur la perception de l'adolescence à travers le petit écran et les cultures, en comparant quelques-unes des séries emblématiques de ces dernières années, par exemple : Life Unexpected (Etats-Unis), The Secret Life of the American Teenager (Etats-Unis), Skins (Angleterre), Life (Japon), Jungle Fish (Corée du Sud), Gloomy Salad Days (Taiwan), pourquoi ai-je le sentiment que c'est avec une polie réserve que l'idée serait accueillie ? Pourquoi le premier débat est-il possible et, surtout, considéré comme normal et parfaitement légitime entre cinéphiles, tandis que le second paraîtrait impensable et sans pertinence ? Est-ce que je me suis trompée de passion ?

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 Entre défendre les frontières acquises ou explorer, il faut choisir.

Le premier contre-argument que l'on pourrait m'opposer serait sans doute celui-ci : comment parler de séries qui n'arrivent pas jusqu'à nous ? Vous aurez beau étudié vos programmes avec attention, vous ne croiserez pas un j-drama dans les grilles de vos chaînes. Notons cependant que l'alternative légale se développe peu à peu : il existe des services permettant de faire découvrir légalement au téléspectateur européen ces séries d'horizons si lointains, en témoigne le site dramapassion avec les séries sud-coréennes. Reste que, cessons la naïveté un instant, il n'y a aucune différence dans le mode opératoire du sériephile qui regarde sa série américaine le lendemain de la diffusion aux Etats-Unis et celui qui va visionner une série taiwanaise.

Serait-ce alors un problème linguistique ? Encore une fois, c'est un faux argument, tous les passionnés ne sont pas anglophones et le travail des fansubbers existe indifféremment dans tous ces domaines. D'autant qu'en France, la programmation des chaînes ne permet pas de vivre sa sériephilie par leur seul biais (le dernier massacre en date, avec The Good Wife, en étant une énième illustration) ; au minimum, le sériephile se rabat sur les DVD. Or les DVD édités ne sont pas cantonnés aux seules séries américaines, le net ouvrant la voie à des achats à l'autre bout du monde.

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Aujourd'hui, la magie des technologies fait que ces frontières longtemps rédhibitoires ont depuis des années été virtuellement abolies, alors pourquoi est-ce si difficile de s'éloigner du seul giron anglo-saxon pour découvrir - émerveillé - qu'il existe des productions dans des contrées lointaines dont on aurait presque fini par se demander s'ils possédaient bien la télévision ? Aujourd'hui, la question se pose avec d'autant plus d'acuité face à tous ces pays qui deviennent de nouveaux acteurs sur la scène internationale (économique, etc.) : avec le développement d'une industrie télévisée ayant plus de moyens et la perfection de leur savoir-faire, ces petits écrans ne vont-ils pas gagner en légitimité et en qualité ? 

J'ai tendance à voir, dans le réflexe anglo-saxon de mon entourage, en premier lieu un problème de nouveauté : chronologiquement, cet accès facilité est récent. Il n'a été consacré véritablement qu'au cours de la dernière décennie. Les sériephiles adultes actuels ont grandi à un moment où tous ces moyens n'existaient pas et donc devant une culture télévisée dépendante et façonnée par les programmations des chaînes, donnant une perception du petit écran sans doute amplifiée par la qualité des fictions proposées alors. Sauf que si les réflexes de curiosité ne naissent pas forcément spontanément, rien n'empêche de les encourager.

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Certains se réfugieront peut-être derrière une question de représentativité. Après tout, les personnes susceptibles d'être intéressées par ce brassage des cultures téléphagiques représenteraient seulement une minorité : un public de niche au sein d'un public lui-même de niche, donc trop infime pour être pris en compte ? Si je veux bien croire que les supposées démocratisation et popularisation de la mode "séries" ressemblent parfois plus à des illusions d'optique qu'à une réalité, je pense (naïvement?) que c'est une erreur d'imaginer immuable le monopole culturel existant. L'exemple fera sans doute sourire, mais récemment, je lisais un article sur la déferlante des séries sud-coréennes en... Roumanie, où elles dominent désormais les anciens programmes préalablement installés.

Parmi les causes pour rechercher les raisons de ce succès, un argument en particulier a retenu mon attention : la volonté des téléspectateurs de voir de nouvelles choses. Certes le petit écran roumain (que je ne connais pas) n'a sans doute pas le dynamisme américain, mais il reste cet appel à l'exotisme qu'offrent des séries ouvrant les portes d'une autre culture plus lointaine et avec laquelle on est moins familier. Quiconque s'est déjà lancé dans ce type de drama a forcément ressenti ce petit frisson d'excitation quand on saute le pas. Je ne dis pas que les k-dramas pourront un jour être diffusés sur une grande chaîne, mais seulement que le paysage sériephile n'est pas une fatalité et une donnée irréductible qui ne peut évoluer. Je pense même qu'il est vital, à un moment ou à un autre, d'y introduire des variations, au risque sinon de finir par'épuiser le schéma que l'on reproduit.

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Cependant, parler de sériephilie sans frontière, c'est se heurter à d'autres obstacles plus pernicieux. Il faut aussi dépasser d'autres idées préconcues sur la télévision, celles-là mêmes qui sont entretenues par ceux qui, paradoxalement, prétendent défendre ce medium. Si on peut admettre que le téléspectateur ne va pas de lui-même s'ouvrir vers cet "au-delà" téléphagique, pourquoi est-ce que ceux qui sont supposés lui fournir les clés d'entrée dans cet univers ne se posent pas, eux, cette question de la télévision existant au-delà du pré carré confortable dans lequel ils ont pris leur quartier ? Si on veut vraiment construire la sériephilie, il est nécessaire et même vital de cesser cette compartimentalisation d'un autre âge qui ne peut, à terme, que s'essoufler. C'est dans la diversité que se trouvent le fondement et la réalité de tout art, et la pérennité de toute passion.

On ne peut pas en même temps défendre les fictions qui sont issues de la télévision - en décochant des accusations de snobisme à ceux qui médisent de ces "téléfilms" - et parallèlement déprécier par ignorance ou désintérêt toute une partie, importante quantitativement comme qualitativement, de ces productions. Certains journalistes, dont les articles ont pu me faire réagir ces dernières semaines, affirment promouvoir une télévision de qualité. Je ne doute pas qu'ils le pensent sincèrement. Mais en encourageant implicitement ou explicitement cette absence d'ouverture, ont-ils conscience du caractère improductif de la démarche ? C'est nuire au medium même qu'ils cherchent maladroitement à défendre que de se limiter ainsi.

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J'ai la naïveté de croire qu'à la manière de tous les arts, cette notion encore jeune et si fragile qu'est la sériephilie devra apprendre à s'ouvrir pour grandir et acquérir sa pleine dimension, ainsi que des lettres de noblesse méritées. Il ne s'agit pas de renier les penchants naturels de tel ou tel téléspectateur pour telle ou telle télévision, mais seulement d'être prêt à envisager l'idée et à reconnaître le fait que l'on effleure seulement la richesse et la diversité du petit écran. Parce que parfois, devant certains articles pourtant rédigés probablement sans arrière-pensée, j'éprouve le sentiment désagréable que cette fameuse échelle de valeurs tant décriée, née des rapports oedipiens de la télévision et du cinéma, ce mépris sur lequel tant de sériephiles formulent tant de plaintes (légitimes), nous le reproduisons tout aussi naturellement et arbitrairement dans la hiérarchie subliminale que l'on pose entre les Etats-Unis et le reste du monde.


Peut-être suis-je naïve ou/et trop ambitieuse. Peut-être est-ce que je place dans cette passion des espoirs démesurés qui n'ont pas lieu d'être. Ne voyez dans ce billet qu'un exutoire désordonné de frustrations qui ont beaucoup grandi dernièrement. Je devrais sans doute cesser ces réflexions vaines sur mon rapport au petit écran. Je n'ai pas de perspective suffisante pour problématiser et prendre du recul sur toutes ces questions... Mais j'ai quand même le droit de rêver tout haut du jour où je pourrais vraiment et en toute légitimité avoir cette discussion sur l'adolescence dans les séries télé dont j'ai parlé plus haut. Est-ce utopique ?

31/12/2010

(Téléphagie) Bilan 2010 : une sériephilie sans frontières et des certitudes retrouvées

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La fin d'une année, ce n'est pas seulement l'heure des tops divers et variés de toutes les productions du petit écran, c'est aussi l'heure de faire son bilan personnel de ses propres programmations. Après 2009 et une téléphagie quelque peu moribonde ou "en crise", je termine 2010 avec plus de certitudes. Ces derniers mois auront été à la fois l'occasion d'une renaissance grisante, riche en nouvelles découvertes, et une confirmation que certains cycles se sont bel et bien achevés et sont désormais derrière moi. 

La téléphagie est ainsi faite avec ses passades, ses coups de coeur, ses illusions et ses déceptions... Pour ce 31 décembre, voici donc une réflexion plus personnelle et introspective, dans la lignée des précédents billets du genre, de la crise de foi téléphagique de fin 2009 à la question existentielle une crise, quelle crise ? de la mi-saison 2010. Dans cette optique, les captures d'écran du générique d'Episodes m'ont semblé on ne peut plus appropriées. Sauf que mon esprit de contradiction aidant, elles vont logiquement défiler à l'envers (et on va passer par l'océan Pacifique !).

Les balades téléphagiques de l'année 2010 : entre rupture, surprise et confirmation

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La rupture : La téléphagie, c'est un peu une nouvelle frontière permanente...

En fait, je crois que la vraie rupture de 2010, cela aura été le fait que, contrairement aux deux années précédentes, j'ai cessé de m'entêter dans mes schémas traditionnels à écumer vainement les productions d'outre-Atlantique. J'ai préféré consacrer mon temps à d'autres petits écrans. J'ai bien tenté d'identifier les causes de ce désamour, mais aucun argument ne me paraît vraiment convaincant : les problèmes qualitatifs, les thématiques traitées, le format marathon interminable... Certes, il y a sans doute une part de lassitude dans tout cela. La conséquence d'une téléphagie compulsive depuis plus d'une décennie se perçoit lorsque le carcan d'une seule culture télévisuelle devient étouffant, où la reproduction des mêmes recettes, des mêmes schémas, finit par perdre tout charme pour adopter un parfum mécanique. Mais les raisons de cette fin de cycle sont à mon avis ailleurs.

Non, la télévision américaine n'a pas perdu en quelques années tout son attrait. Certes la rentrée de septembre n'a pas tenu ses promesses. Les grilles des grands networks US peuvent nourrir certaines insatisfactions. Mais le problème, ce n'est pas ce serpent de mer de la supposée fin de "l'âge d'or des séries US". Ce qui a changé, ce n'est pas le petit écran américain, c'est tout simplement moi. J'ai continué de grandir et mes goûts d'évoluer.

Non, je n'ai pas découvert de Graal téléphagique ailleurs. Je n'ai même pas effectué le tri qualitatif tant espéré au sein de mes séries dans une passion toujours trop chronophage. Je n'ai pas trouvé de télévision plus intéressante dans l'absolu. Ce n'est pas non plus une simple question de curiosité désintéressée qui me conduirait à vouloir multiplier les expériences sériephiles à travers le monde. Soyons franc, la curiosité internationale, c'est un moteur qui joue seulement à la marge dans mes programmes. Elle offre une mise en perspective salvatrice et rafraîchissante, mais elle n'est jamais une fin en soi. Elle intervient quand j'entrouvre les frontières de la Nouvelle-Zélande, de Hong Kong ou de Taïwan. Elle est aussi instigatrice : c'est sans doute elle qui m'a conduite un jour en Corée du Sud, ou qui m'a permis d'avoir des coups de coeur pour les pilotes de séries 30 ans après leur diffusion d'origine.

Seulement, je reste aussi une passionnée naturellement casanière, qui aime savoir et comprendre l'univers téléphagique dont je pousse la porte. Le tout est de trouver le bon équilibre. Ma téléphagie en 2010 est à l'image de la ligne éditoriale de ce blog. Les instruments et ressorts pour vivre cette passion sont toujours là, mais l'équation d'ensemble a considérablement évolué. Aujourd'hui, j'ai d'autres attentes. Je recherche quelque chose de différent par rapport à la manière dont j'ai pu nourrir cette passion au cours de la décennie précédente. Ne réduisez pas cela à un simple "besoin d'exotisme". Il y a quelque chose de plus structurel derrière, un désir de grille de lecture différente, de constructions narratives qui ne vont pas engendrer les mêmes ressentis, les mêmes saveurs. Ca n'a pas de sens de les placer en confrontation tout simplement parce que derrière ces termes génériques de "séries" ou de "divertissement", ce sont des codes différents qui sont à l'oeuvre. Les grilles de lecture de chacune de ces productions ne peuvent se superposer.

2010 aura donc été internationale, pleine de voyages téléphagiques. Pour autant, la téléphage casanière que je suis aura trouvé plus particulièrement ses marques dans deux pays. Sur ce point, s'il y a du classique prévisible, j'avoue que mes goûts conservent encore une bonne part de mystère. Même pour moi.

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La surprise : La téléphagie, ça évolue quand même sur des voies bien impénétrables...

Si on peut admettre facilement le désintérêt relatif pour la production américaine, ou encore le renforcement logique d'une anglophilie qui n'a fait que croître depuis 2002 (date de mon dernier été anglais), en revanche, il reste une bien étrange énigme : comment ai-je fait pour atterrir en Corée du Sud ? Quels atomes crochus pouvais-je avoir avec cette production particulière ?

Honnêtement, a priori, nous n'étions pas faits pour nous rencontrer. Parmi mes récurrentes allergies téléphagiques déclarées, on trouve tout d'abord une détestation traditionnelle toute particulière des histoires d'amour. Je n'aime pas non plus vraiment les comédies. Et le mélange des deux genres me fait normalement fuir le petit comme le grand écran. De plus, je raffole de dialogues écrits à 100 à l'heure et de pitch minutieusement finalisés. Bref, des affinités qui seraient plutôt à l'opposé des principales caractéristiques des k-dramas. Je dis toujours pour caricaturer que ces derniers m'ont permis de découvrir que j'avais un coeur, et même des instincts "fleur bleue" qu'aucune série américaine n'avait jamais réveillés. Ce n'est pas si éloigné de la réalité. Les séries sud-coréennes que je chéris touchent en moi une sensibilité qui n'avait jamais jusqu'à présent été sollicitée.

Pour tout vous dire, la première fois que j'ai découvert la télévision sud-coréenne, c'était lors de mon cycle japonais. Un été, il y a quelques années. Le premier k-drama que j'ai lancé, je m'en souviens comme si c'était hier, il venait de sortir, il s'agissait de A love to kill. Et vous savez quoi ? J'ai détesté. Comme rarement. Je ne vous parle pas seulement de la qualité de la vidéo très médiocre des épisodes sur lesquels j'avais mis la main. Il y avait la langue aux sonorités beaucoup plus confuses pour mes oreilles que le japonais, conséquence de quoi le courant ne passait pas vraiment avec les acteurs... Mais surtout, il y eut le coeur du problème : le scénario et sa construction complètement illogique pour mon cerveau de téléphage occidentale. Avec le recul, ça me fait sourire, mais c'est bien simple, je n'ai absolument rien compris aux trois premiers épisodes que j'ai eu la patience de regarder. Le synopsis que j'avais sous les yeux était le seul élément tangible me permettant d'appréhender l'histoire. Et honnêtement, on aurait pu me raconter n'importe quoi, le rapport entre le résumé et le premier épisode semblait relever d'une dimension ésotérique. Un jour, il faudra sans doute que j'y rejette un oeil, juste pour voir comment ma perception a évolué. Je crois qu'on y trouvait pourtant un certain nombre d'élément narratifs classiques : cette habitude de commencer par une navigation entre flashforward et/ou flashback, l'amour impossible, le drame, une façon particulièrement alambiquée de poser les enjeux, etc.

Il n'y eut donc pas ce vertige de la nouveauté face à un nouvel horizon téléphagique. Si je m'offris quelques incursions dans la péninsule du Matin Calme dans les années qui suivirent, si je savais que les k-dramas existaient à portée de clic, cela ne dépassa jamais le stade de la découverte "le temps d'une parenthèse". Et puis... Peut-être ai-je moi-même changé au fil des années. Est arrivée la fin de l'année 2009, et ce blog a été le témoin privilégié de cet étrange bouleversement. Objectivement, j'attribue la responsabilité de tout cela à The Legend et Story of a Man. A un degré moindre, peut-être aussi IRIS et Beethoven Virus. Reste que j'ai alors mis le doigt sur un engrenage inattendu. Cela aurait pu être une lubie passagère, c'est devenu une sorte de coup de foudre à retardement pour une télévision qui semble désormais naturellement installé dans mes moeurs télévisuelles.

Comme tout dans la téléphagie, cela obéit à un cycle. Mais le simple fait que cette année, j'ai suivi naturellement des k-dramas que je jugeais objectivement juste moyens, alors que dans le même temps, je n'éprouvais aucune envie d'attaquer la saison 3 des Sons of Anarchy ou la dernière de Friday Night Lights résume à mon sens parfaitement l'inversion qui s'est opéré dans mon ordre des priorités. 

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La confirmation : Les voyages, c'est bien. Les voisins, aussi.

Certes, j'ai passé du temps en Corée du Sud. J'ai exploré plus avant le Japon avec des découvertes qui m'ont vraiment très très enthousiasmé (Hagetaka reste pour moi LA révélation de l'année). Je me suis baladée en Asie, en Océanie. Mais le pays où j'ai le plus naturellement pris mes quartiers n'est pas à l'autre bout du monde. Il n'est même pas sur un autre continent. Car si son cousin américain m'a lassé, le petit écran anglais continue, lui, d'exercer sur moi une fascination non démentie. En ayant de mettre en retrait les séries venues d'Outre-Atlantique, 2010 aura été une année de consécration pour la télévision britannique : j'ai enfin pu la placer tout en haut de mes priorités, après avoir passé les 5/6 dernières années à tergiverser.

Et elle aura été à la hauteur. Pensez que c'est une télévision qui vous propose des nouveautés brillantes comme Downton Abbey et Sherlock, une dose de science-fiction avec Doctor Who, du fantastique prenant et diversifié avec Going Postal ou Misfits, des comédies sympatiques comme Rev ou Whites, des polars stylés comme Luther, des legal dramas historiques comme Garrow's Law, des fictions chaleureuses et inclassables comme The Indian Doctor, le tout saupoudré de mini-séries plus ou moins abouties, mais qui réservent parfois de plaisantes surprises et dans lesquelles on s'investit facilement pour une poignée d'épisodes... Et bien, voilà bien le petit écran occidental que j'ai envie de suivre !

Les séries britanniques ont un style qui leur est propre. Je ne saurais trop précisément le caractériser. Il est difficile de généraliser, mais on y croise souvent une écriture plus directe, un style plus brut. L'exercice de comparaison que permet le simple visionnage de la bande-annonce du remake de Shameless, qui débute dans quelques jours sur Showtime, est suffisamment représentatif : il y a quelque chose de moins alambiqué, moins consensuel, de plus vrai et déglingué dans l'original. Au final, c'est sur une impression diffuse de proximité mêlée d'authenticité que nous laisse cette télévision.

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Ainsi, après avoir un peu déserté mon petit écran - notamment un semestre de 2009 de quasi-sevrage -, j'ai retrouvé cette année un équilibre téléphagique. J'ai non seulement de longues listes de programmes que j'ai envie de découvrir, mais j'ai aussi désormais la certitude que je n'ai plus "besoin" des Etats-Unis pour continuer à vivre ma sériephilie pleinement... Par sa dimension internationale, par sa diversité, mais aussi par les rencontres et les échanges qu'elle aura permis au sein de cette vaste et si diversifiée communauté de passionnés sériephiles, c'est plus de perspective et de recul face au petit écran que 2010 m'aura apporté.

En résumé, je termine l'année sur une note d'optimisme... En espérant que 2011 poursuive sur cette voie !

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