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05/10/2014

(J-Drama / SP) Umoreru : Lanceur d'alerte... et après ?

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Le 'lanceur d'alerte' trouve un écho particulier dans l'actualité de ces dernières années. C'est par définition une figure qui interpelle et ne laisse personne indifférent. Héros pour les uns, traître pour d'autres, il a mené un combat pour exposer une vérité au grand jour et faire cesser des agissements qui, à ses yeux, compromettaient l'intérêt de tous. Action menée avec plus ou moins de succès. Les récits sur le sujet s'arrêtent souvent à ce moment-là, sur cette fin qui n'en est pas vraiment une. Mais, se demanderont les plus curieux, une fois la tempête médiatique retombée, que devient celui par qui les révélations sont arrivées ? C'est sur cette question particulière de l'après, sans s’appesantir sur les dilemmes éthiques qui ont conduit le protagoniste principal à faire ses choix, que revient Umoreru, un tanpatsu qui a été diffusé le 16 mars 2014 sur la chaîne japonaise payante WOWOW. L'occasion d'un billet dominical asiatique.

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Umoreru suit le parcours introspectif de Kitami, ancien cadre dans l'industrie agro-alimentaire, ayant informé des journalistes de pratiques illégales au sein de sa société. Le récit prend immédiatement à rebours celui qui attendrait la célébration d'un redresseur de torts et une vérité triomphante. Il est au contraire chargé d'incompréhensions, d'amertume, de regrets et d'interrogations, lesquels sont partagés avec un téléspectateur invité à la réflexion aux côtés de ce personnage principal en plein doute. Car le résultat de la mise en accusation médiatique n'a guère été probant : des dirigeants s'excusant jamais inquiétés réellement, 120 employés de la société sous-traitante sacrifiés comme boucs-émissaires, et un ami proche l'ayant aidé lui-aussi remercié... Poussé à la démission, Kitami doit faire face à des conséquences et un prix à payer qu'il n'avait jamais envisagés. Il pensait au droit du consommateur anonyme et voilà que, bien plus concrètement, sa fille est persécutée à l'école par des camarades lui reprochant l'attitude de son père. Sa famille éclate dans les mois qui suivent. C'est finalement un jeune divorcé que l'on suit, quittant Tokyo et toutes ces turbulences, pour un emploi à temps-partiel dans la mairie de sa petite ville d'origine.

Umoreru s'articule autour d'une confrontation permanente entre les valeurs (de justice, de vérité) auxquelles Kitami se veut fidèle et le poids d'un conformisme rigide prôné par une société qui encourage à se fondre dans la masse et à ne pas se détacher du groupe (au travail, comme ailleurs). La fiction interroge sur le corporatisme, sur ses limites éventuelles, mais aussi sur l'impact que l'on peut avoir en agissant de l'intérieur d'une institution... Il faut dire que l'exil de Kitami n'a pas l'effet escompté, puisque son nouveau cadre de vie soulève des dilemmes pas si différents de ceux de la capitale : le fonctionnement de la mairie dans laquelle il échoue se révèle en effet loin d'être exempt de reproches. Les deux premiers tiers du tanpatsu retranscrivent donc, avec une certaine finesse et une ambivalence bien dosée, tous les doutes qui jalonnent la trajectoire personnelle d'un personnage chez qui tous ces événements produisent une logique remise en cause. Loin de toute évidence héroïque et de toute lecture manichéenne, l'angle choisi encourage au contraire la réflexion. Cependant, Umoreru ne parvient pas à maintenir son juste dosage jusqu'à la fin. Il dévie de la problématique initialement posée quand il se rapproche de sa conclusion, réduisant soudain ses enjeux à une quête de la vérité qui s'est greffée au fil du récit dans la vie personnelle de Kitami. Les ultimes tournants amoindrissent quelque peu la portée d'un ensemble dont les nuances avaient été jusqu'alors préservées.

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Doté d'une réalisation soignée, Umoreru reste un tanpatsu intéressant à plus d'un titre, interrogeant notamment sur les arbitrages difficiles entre intérêts général, collectif et personnel. De plus, par son traitement même d'un tel sujet et les choix que le scénario fait, il apparaît aussi comme un révélateur assez marquant des mécanismes sociaux et du poids du conformisme dans ce cadre japonais qui est le sien. Cet unitaire, à sa manière, encourage également à maintenir une certaine distance critique avec l'ensemble, avec un téléspectateur impliqué au plus près des réflexions du protagoniste principal.

En résumé, une curiosité du petit écran japonais à plus d'un titre, et qui dure moins de deux heures. Avis aux amateurs.


NOTE : 7/10

16/01/2013

(J-Drama) Hitori Shizuka : un intriguant et fascinant drama

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Je poursuis mes rattrapages de séries de la saison automnale au Japon, alors même que les premiers épisodes des j-dramas de l'hiver 201 3 nous parviennent déjà et qu'il sera bientôt temps de s'y pencher. Après Double Face mercredi dernier, je ne change pas de chaîne et reste sur WOWOW (avouons que si elle n'existait pas, ma consommation de séries japonaises serait bien moindre !) pour cette fois-ci revenir sur un autre des dramas prenants de la saison dernière, Hitori Shizuka.

Adaptation d'un roman du même titre de Honda Tetsuya, il s'agit d'un renzoku comptant 6 épisodes d'une cinquantaine de minutes chacun. Il a été diffusé les dimanche soirs du 21 octobre au 25 novembre 2012. Bénéficiant d'une écriture solide, c'est une fiction extrêmement intriguante et mystérieuse qui aura subtilement et habilement exploité une histoire qu'il n'était pourtant pas si facile que cela de transposer à l'écran.

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Il est difficile de proposer un résumé de ce drama sans gâcher la saveur qu'acquiert progressivement cet enchaînement d'histoires qui, peu à peu, apparaissent de plus en plus liées les unes aux autres. Hitori Shizuka relate en effet successivement, au fil de ses différents épisodes, plusieurs meurtres, en apparence sans connexion entre eux. Mais derrière lesquels se cache une seule présence, celle d'une jeune portée disparue, Ito Shizuka, belle-fille d'un haut gradé de la police. Ce sont les actions, la vie et les motivations mystérieuses de cette fille que ce drama va entreprendre de nous raconter.

Le premier épisode s'ouvre en 1996. Un gangster est alors abattu dans un appartement d'un quartier résidentiel. Règlement de comptes, vengeance, les mobiles possibles ne manquent pas étant donné la victime... Un des officiers patrouilleurs, Kizaki, arrivé parmi les premiers sur les lieux, est adjoint à l'équipe menant l'enquête. Il s'interroge sur la non-prise en compte d'un rapport d'autopsie et les non-dits de son supérieur qui en sait peut-être plus qu'il ne veut bien le dire. Un suspect est cependant arrêté. Or il affirme que la victime n'était pas seule dans l'appartement et qu'une jeune fille, en tenue de lycéenne, s'y trouvait également.

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Hitori Shizuka est tout d'abord un drama qui marque par la construction maîtrisée de son histoire, laquelle acquiert peu à peu toute son ampleur. Il se dégage de l'ensemble une solidité et une cohérence jamais prises en défaut. La première partie de la série est avant tout très intriguante, aiguisant la curiosité du téléspectateur devant le mystère, pour l'instant seulement effleuré, que représente Ito Shizuka et toutes les questions que suscitent les actes qu'elle commet ou provoque. Se réappropriant avec une efficacité redoutable les codes classiques des fictions policières, les premiers épisodes ont l'apparence d'enquêtes déconnectées entre elles, derrière lesquelles plane l'ombre inquiétante et déroutante de la jeune femme. La série se révèle extrêmement convaincante dans sa manière de capturer, avec beaucoup de rigueur, le fonctionnement des unités d'investigation au sein de la police japonaise. Capable d'introduire à chaque fois de nouveaux protagonistes policiers avec une aisance qu'il faut saluer, l'approche narrative est ambitieuse : c'est d'abord d'un point de vue extérieur, et de manière incidente, que la série amène le téléspectateur à s'interroger sur Ito Shizuka.

Puis, un recentrage s'opère progressivement sur la jeune femme : de façon particulièrement glaçante, est alors véritablement mise en lumière la dangerosité machiavélique dont elle est capable de faire preuve. Ce personnage inclassable fascine d'autant plus que l'écriture, habilement, fait le choix de ne jamais trop en dire. Le drama fait toujours preuve de beaucoup de retenu, disséminant les indices et les informations, mais évitant tout long discours explicatif ou autres scènes de pure exposition. Le scénariste suggère, mais fait confiance au téléspectateur pour déduire et apprécier les situations comme il se doit. Tout en se montrant parfois très forte et dense, la narration adopte un style presque minimaliste, où prévaut une grande sobriété. Il s'agit d'un des grands atouts du drama, même si cela sera aussi source d'un léger flottement lors de sa conclusion : cette dernière se voit en effet précédée d'un saut temporel de plus d'une décennie qui nous ramène dans le présent, sans qu'aucune indication ne soit donnée à l'écran. Il faut quelques minutes au téléspectateur pour retrouver ses marques et comprendre qui et à quelle époque sont les protagonistes mis en scène. Il est possible que le roman soit ici en cause, le texte d'origine ayant peut-être voulu entretenir un temps la confusion. Reste que la chute de la série n'en demeure pas moins d'une logique et d'une légitimité parfaites par rapport à la tonalité de l'histoire, refermant parfaitement la boucle de vie qui aura été relatée.

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La sobriété bien huilée de Hitori Shizuka se retrouve sur la forme. Sa réalisation est globalement soignée et maîtrisée, accompagnée d'une bande-son uniquement composée de thèmes musicaux instrumentaux qui est opportunément choisie et qui accompagne très bien le récit. Si, comme je l'ai dit, la gestion des sauts temporels aurait mérité d'être un peu plus soulignée (juste indiquer l'année à l'écran !), je retiendrais surtout de ce drama sa mise en scène des fusillades. Il faut dire que ces dernières semblent tout d'abord vouloir poser une vérité : personne ne sait manifestement tirer au pistolet quand il s'agit d'abattre froidement quelqu'un ! Surtout, elles traduisent une certaine surenchère avec un sur-jeu qui décontenance, au point que la première scène du drama déstabilise vraiment. Ce n'est que lorsqu'est venue la grande fusillade de l'épisode 4 que j'ai véritablement compris ce que le réalisateur essayait de faire. Car si la première prend trop au dépourvu pour fonctionner, la seconde d'une ampleur toute autre est assez jubilatoire par la distance qu'elle introduit.

Enfin Hitori Shizuka bénéficie d'un solide casting choral, puisque nombre d'acteurs occupent le devant de la scène le temps d'un épisode seulement. Le rôle d'Ito Shikuza est confié à Kaho (Diplomat Kuroda Kousaku), autour de laquelle tout le récit tourne, mais qui n'a cependant pas une présence aussi importante que l'affiche du drama aurait pu le laisser supposer. Interprétant un personnage froid, peu expressif, ou se contentant de préserver sobrement les apparences, l'actrice s'en sort très bien dans ce registre. Autour d'elle, vont graviter plusieurs têtes plus ou moins familières du petit écran japonais, tel Murakami Jun, Arai Hirofumi (Shokuzai, Going my Home), Nagatsuka Keishi, Takahashi Issei, Matsushige Yutaka (Shinya Shokudou, Unmei no Hito, Kodoku no Gurume) (que j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir !), Tokiwa Takako (Tenchijin), Takito Kenichi, Nukumizu Yoichi (BOSS), Ikeda Narushi, Kurosawa Asuka, Nikado Satoshi, Midori Mako ou encore Kishibe Ittoku.

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Bilan : Tour à tour mystérieux, puis inquiétant, voire glaçant, Hitori Shizuka est un intriguant drama dont l'histoire se déploit peu à peu pour se révéler extrêmement solide. Sa construction, avec une progressive mise en pleine lumière de la jeune femme et ses secrets, est très bien gérée. Le style d'écriture retient l'attention en raison de l'assurance avec laquelle le drama choisit de faire confiance au téléspectateur pour déduire certains faits, comprendre les silences et les liens à opérer, évitant les passages d'exposition et les longs discours pesants qui peuplent trop souvent ce genre de fiction. En résumé, Hitori Shizuka est un drama habile, subtile, qui relate de façon ordinaire une histoire qui ne l'est pas, chargée de non-dits dans lesquels se trouve toute sa force. Seule la mise en scène de la conclusion suscitera quelques réserves, mais qui ne remettent pas en cause les qualités de l'ensemble. A voir.


NOTE : 8/10