24/04/2013
(J-Drama) Going My Home (Going Home) : un portrait familial riche et nuancé d'une rare justesse
Dans le cadre de cette semaine spéciale "Festival Séries Mania", ce mercredi asiatique conduisait automatiquement à revenir sur la série japonaise qui y sera projetée samedi soir : Going My Home (à la syntaxe revue - et corrigée - pour donner Going Home). Je vous ai déjà parlé de ce drama en octobre de l'année dernière, au terme de son long pilote (qui sera, découpé en deux parties, et proposé lors de la projection prévue samedi prochain). Aujourd'hui, pour l'occasion, c'est avec un billet bilan que je vous propose de revenir sur cette série au terme des 10 épisodes qu'elle compte : le pilote avait su séduire, mais comment la série a-t-elle ensuite évoluer ?
Ce drama de Hirokazu Kore-Eda reste, par son approche notamment narrative mais aussi formelle, assez unique pour le petit écran japonais, loin des canons habituels des fictions qui y sont proposées. Cela explique sans doute en partie les problèmes d'audiences qu'il a rencontrées : commencées honorablement, elles n'ont ensuite cessé de chuter jusqu'à la fin de la diffusion. Pour autant, s'il a pu dérouter l'habituel téléspectateur japonais, Going My Home reste une perle à plus d'un titre, une oeuvre qui porte la marque de son auteur et qui vous glisse avec subtilité et humanité dans les dynamiques d'une famille japonaise.
[Pour un résumé plus complet du drama, je vous invite à lire ma review rédigée après son pilote.]
Si Going My Home relate un quotidien familial ordinaire, elle le fait avec une finesse d'écriture et un soin constant du détail qui confèrent à l'ensemble une authenticité rare. C'est un portrait de famille, touchant et attachant, à la fois unique et représentatif d'un certain mode de vie japonais, qui est proposé. D'une façon qui leur est propre, les épisodes tendent à s'affranchir des contraintes attendues liées au format d'un renzoku : ils s'enchaînent suivant un fil narratif qui s'apparente à un (très) long métrage. Le rythme y est lent, presque contemplatif par moment, chérissant chaque instant relaté, aussi anecdotique soit-il. Tout en suivant un fil rouge principal - des intéractions familiales où chacun se cherche -, le récit se ménage des pauses, prenant son temps pour souligner ces quelques moments - qu'il s'agisse de plats cuisinés, ou encore de regards échangés - qui posent une ambiance ou une émotion particulière.
Adoptant une tonalité dans laquelle on retrouve la signature de Hirokazu Kore-Eda, Going My Home privilégie avant tout la spontanéité et le naturel pour nous introduire dans le quotidien de cette famille. Cette série a l'art d'éclairer et de souligner comme peu de fictions toutes ces petites choses qui remplissent une journée. Elle ne cherche, ni à romancer, ni à rendre glamour les vies qui y sont dépeintes - alors même que les métiers exercés par le couple principal (publicitaire pour la télévision, cuisinière célèbre) rentrent totalement dans les standards du petit écran japonais. Sa préoccupation principale est d'impulser une proximité et un naturel aux dynamiques mises en scène : elle le fait si bien que ces dernières résonnent de manière universelle auprès de chaque téléspectateur, tout en sonnant aussi typiquement japonais.
S'installer devant Going My Home, c'est prendre place devant une peinture familiale, qui se complète et évolue au fil des épisodes. On y croise un certain nombre de thèmes chers à Kore-Eda. En premier lieu, il y a évidemment la famille. Elle l'évoque en pointant toutes les subtilités et nuances propres à ces liens que le temps, l'éloignement et les choix de chacun peuvent distendre, mais ne rompent jamais totalement. La maladie du patriarche va être l'occasion indirecte d'initier des formes de retrouvailles. Par son exploration du passé et d'un pan de la vie privée de son père qu'il ignorait, le personnage principal, Ryota, ré-apprend à connaître une figure qui était devenue distante, mais à laquelle il doit bien plus qu'il ne veut bien l'admettre. Ses aller-retours dans ce village perdu où est né son père vont aussi permettre à son couple, en les sortant de leur quotidien, de retrouver du temps pour eux, et à renouer le dialogue avec leur fille qui affronte en silence une autre épreuve à laquelle son jeune âge ne l'a pas préparé, celle d'un deuil d'une amie d'école.
A l'image de cette Vie qu'elle décrit, et de tous les paradoxes qui la constituent, Going My Home adopte un ton versatile : l'équilibre y est savamment dosé, entremêlant un soupçon d'humour, une pointe de regrets, et beaucoup de chaleur humaine... Si la maladie du père sert de déclencheur, c'est un autre terrain qui va être celui de la réunion : le drama nous glisse ici dans les croyances populaires japonaises, avec le mythe des kuna. Ces créatures censées peupler les forêts sont présentées comme étant un lien entre le monde des vivants et celui des morts. Marqué par l'exode rural et une forêt qui a reculé devant son exploitation par les hommes, le village d'origine du père de Ryota est un lieu où persiste cette légende : la recherche de ces petits êtres est au coeur d'un festival dont l'organisation va servir de fil rouge au drama. Going My Home nous entraîne aux frontières d'un fantastique qui reste seulement suggéré, manié avec humour comme le montrent les rêves introductifs de Ryota mettant en scène ces fameux kuna.
Si ce drama apparaît à part dans les productions télévisuelles japonaises du fait de son écriture et de son rythme, il se démarque également sur la forme. Going My Home bénéficie en effet d'une réalisation qui tend, elle-aussi, vers le cinématographique. Cette façon de filmer, très posée, avec une maîtrise de l'espace et de la mise en scène particulièrement aboutie, vient sublimer certains passages, apportant un cachet supplémentaire au drama. De même, la bande-son, avec des thèmes musicaux légers, non intrusifs, sied parfaitement à l'ambiance générale - jusqu'au générique qui résume tout le sens de cette quête aux kuna.
Enfin, Going My Home bénéficie d'un casting dont le jeu, jamais forcé et toujours naturel, renforce l'authenticité du récit et la force de cette fable sur la vie. Abe Hiroshi est parfait dans ce registre de père de famille, avec ses maladresses et ses incertitudes. Yamaguchi Tomoko apporte une fraîcheur précieuse, signant ici un retour remarqué dans le petit écran japonais après 16 années passées loin des dramas. Et de manière plus générale, ce sont tous les acteurs qui sont au diapason, se révélant à la hauteur du scénario et de l'approche choisie : on y retrouve YOU, Miyazaki Aoi, Yasuda Ken, Arai Hirofumi, Bakarhythm, Natsuyagi Isao, Abe Sadao, Yoshiyuki Kazuko ou encore Nishida Toshiyuki..
Bilan : Fable sur la vie, avec les sentiments et les regrets qui lui sont inhérents, Going my home nous introduit avec une justesse et une sincérité remarquables dans les dynamiques d'une famille japonaise moderne. Son soin constant du détail et son approche contemplative posent une tonalité particulière, permettant à la série de dépeindre tout en subtilité et en nuances les relations humaines mises en scène. Touchant et attachant, avec ses pointes d'humour et sa spontanéité cultivée, c'est un human drama à la portée universelle, capable de trouver un écho en chaque téléspectateur. Le flirt avec le fantastique occasionné par le mythe des kuna n'est pa une simple immersion dans le folklore local ; il permet aussi, par-delà ce village touché par l'exode rural et la déforestation, de renouer un lien social, un lien entre les générations, qui complète ce portrait de Japon.
Le pilote (en 2 épisodes) de Going My Home sera donc projeté au Forum des images à Paris à 21h ce samedi 27 avril [pour la petite histoire, sachez que c'est moi qui en assurerai la présentation préalable]. Plus généralement, c'est vraiment une série qui mérite l'attention de tous les amateurs de dramas japonais, de ceux qui apprécient Hirokazu Kore-Eda, mais aussi de tous les téléphages curieux. Il s'agit d'une oeuvre universelle qui reste à part.
NOTE : 8,75/10
19:14 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : j-drama, fuji tv, going my home, going home, koreeda hirokazu, abe hiroshi, yamaguchi tomoko, miyazaki aoi, you, yasuda ken, arai hirofumi, bakarhythm, natsuyagi isao, abe sadao, yoshiyuki kazuko, nishida toshiyuki | Facebook |
17/04/2013
(J-Drama / SP) Lupin no Shousoku : exhumation du passé en quête de la vérité sur un meurtre quasiment prescrit
Retour au Japon en ce mercredi asiatique ! Si j'insiste sur cette destination, c'est parce que, pour une fois, je parviens à respecter plusieurs semaines d'affilée une vraie alternance entre la Corée du Sud et le Japon. Cette semaine, j'ai quelque peu délaissé les nouveautés pour me plonger dans mes dossiers sans fond de séries à rattraper. Comme mon inclinaison du moment m'oriente plutôt vers le genre policier, j'ai finalement exhumé un intéressant tanpatsu (c'est-à-dire un drama court) sur lequel Kerydwen avait attiré mon attention en janvier dernier.
Téléfilm unitaire d'une durée de 2 heures, Lupin no Shousoku a été diffusé le 21 septembre 2008 sur WOWOW. Si le nom de cette chaîne câblée revient souvent dans ces colonnes lorsqu'il s'agit de partir au pays du soleil levant, il faut reconnaître que la confiance accordée est souvent méritée. Lupin no Shousoku ne déroge pas à cette règle. Cette adaptation d'un roman éponyme de Yokoyama Hideo (un spécialiste du suspense) a été confiée à Mizutani Toshiyuki, dont j'ai déjà visionné plusieurs autres collaborations avec WOWOW. Les résultats avaient jusqu'à présent été variables : si Marks no Yama s'était révélé être un intéressant drama policier (déjà), Prisoner m'avait laissé beaucoup plus réservée et mitigée. Heureusement Lupin no Shousoku s'inscrit dans la lignée des qualités du premier (on y retrouve d'ailleurs le même acteur principal), proposant une quête de la vérité prenante et riche en rebondissements.
Officier n'ayant jamais gravi les échelons de la hiérarchie policière, Mizorogi Yoshihito est resté marqué par ce qui demeure le plus grand échec de la police japonaise de la seconde moitié du XXe siècle : ne pas être parvenu à arrêter le coupable d'un vol de 300 millions de yens qui, bien qu'identifié, bénéficia de la prescription pour s'échapper entre les mailles du filet judiciaire. En charge de l'affaire, Mizorogi détenait le principal suspect le jour où ce délai légal expira. Il a été contraint de le voir ressortir libre du commissariat sans pouvoir espérer jamais mener des poursuites pénales contre lui. Sur le moment, c'est sa démission qu'il remit - et qui fut refusée ; depuis il prend très personnellement chaque cas approchant de la date de prescription.
L'affaire qui va occuper ce tanpatsu tombe justement dans cette catégorie. La police reçoit en effet des informations - que le supérieur de Mizorogi juge fiables - selon lesquelles la mort d'une enseignante, classée comme suicide quinze ans auparavant, était en réalité un meurtre déguisé. Une nouvelle équipe d'investigation est aussitôt réunie, sous la direction de Mizorogi, alors que le délai de prescription s'apprête à expirer. Les renseignements transmis à la police pointent vers trois lycéens turbulents d'alors et une mystérieuse "opération Lupin" qu'ils auraient organisée et qui serait la cause de la mort de la professeure.
L'enquête qui s'ouvre va se révéler bien plus complexe qu'anticipée, ramenant aussi de manière inattendue Mizorogi sur l'affaire des 300 millions de yens volés...
Le grand mérite de Lupin no Shousoku est de proposer une enquête policière solide, dotée d'une intrigue à tiroirs qui recelle de suffisamment de rebondissements et de twists pour former un récit dense qui va retenir l'attention du téléspectateur jusqu'à l'ultime révélation. La particularité de l'investigation tient au fait qu'elle se déroule 15 ans après les faits : la reconstitution des évènements repose donc entièrement sur la confrontation des témoignages que vont apporter les différents protagonistes mêlés de prés ou de loin à la mort de Mine Maiko. Chacun délivre une part de vérité, éclairant de manière subjective un pan de l'histoire. C'est ensuite aux policiers de rassembler ces pièces éparses d'un même puzzle criminel pour tendre vers la résolution finale. Afin d'éviter un huis clos qui aurait risqué de manquer de rythme, le tanpatsu est entrecoupé de flashbacks, opérant de fréquents aller-retours entre le passé et le présent. Au fil des précisions des témoins, l'intrigue parvient à se renouveler constamment, prenant plus d'un tournant inattendu et dévoilant une réalité bien plus complexe que les premières déductions ne le laissaient entrevoir.
En plus de l'enquête policière, si Lupin no Shousoku suscite l'implication du téléspectateur, c'est aussi parce qu'il place au centre de l'intrigue un facteur humain. Les faits étants très anciens, c'est avec pour seul matériel exploitable des témoignages que les policiers vont devoir naviguer à vue dans ces semi-vérités admises du bout des lèvres, ces souvenirs trop subjectifs à moitié effacés ou encore des regrets manifestes qui pèsent sur certains protagonistes à tort ou à raison. Entre interrogatoires et flashbacks, l'investigation repose sur la compréhension par les policiers des différents suspects, et donc sur une dimension psychologique déterminante. Car chaque personnage est présenté comme façonné par son passé, qu'il s'agisse du policier principal qui voit resurgir ce cas des 300 millions de yens qu'il a perdu face à la prescription, ou des anciens lycéens, aujourd'hui adultes, qui, même s'ils se sont perdus de vue, continuent de vivre marqués par les évènements qui se sont produits il y a 15 ans. Ce tanpatsu insiste sur le poids des secrets et des non-dits que chacun a gardé, sur ces abcès jamais crevés qui ont trop pesé. Exhumant des regrets et des séquelles de la vie, Lupin no Shousoku se dirige vers une conclusion cohérente, assez prévisible, mais qui a le mérite de venir conclure de façon satisfaisante cette journée où le passé est soudain remonté à la surface.
Sur la forme, Lupin no Shousoku est un drama au petit budget qui opte opportunement pour une réalisation sobre. On peut juste lui reprocher parfois un certain manque de subtilité, les plans choisis donnant des indications sur l'orientation à venir de l'intrigue. S'efforçant de refléter l'atmosphère d'une histoire chargée de lourds secrets, les filtres sont assez sombres, surtout dans le présent des années 90. L'ambiance musicale recréée respecte également ces mêmes exigences de tonalité. Si bien qu'avec un minimum d'effets, tout en jouant le jeu d'un quasi huis clos au sein du commissariat, le tanpatsu parvient à trouver une identité visuelle cohérente et bien à lui.
Côté casting, en dépit de ce que pouvait suggérer l'affiche, Lupin no Shousoku est un drama relativement choral, du fait d'une construction où ce sont les témoignages confrontés qui peu à peu conduisent à l'établissement de la vérité. Mizorogi sert cependant de repère au téléspectateur, et apparaît donc comme le pivot narratif. Il est interprété avec aplomb par Kamikawa Takaya qu'on retrouvera deux ans plus tard aussi en policier dans Marks no Yama. A ses côtés, le casting est relativement solide ; sa principale limite tient aux flashbacks et au fait qu'il est difficile de jouer à la fois un lycéen et un trentenaire. On y croise notamment Nagatsuka Kyozo (Magma), en responsable policier qui conserve sa confiance en Mizorogi, Fukikoshi Mitsuru (Himitsu), Tsuda Kanji (Prisoner, Magma), Sato Megumi (Harukanaru Kizuna, Machigawarechatta Otoko), Endo Kenichi (Fumou Chitai, Gaiji Keisatsu, Soratobu Taiya, Strawberry Night), Hada Michiko (Dai Ni Gakusho), Okada Yoshinori (Nankyoku Tairiku), Arai Hirofumi (Hitori Shizuka, Going my Home) ou encore Kashiwabara Shuji (M no Higeki).
Bilan : Bénéficiant d'une tonalité à la sobriété opportune, aussi bien dans l'écriture que dans le jeu des acteurs, Lupin no Shousoku signe une intrigue policière dense et efficace. La construction narrative reposant sur une confrontation permanente des différents témoignages permet une histoire riche en rebondissements, capable de renouveler les enjeux et de prendre plus d'une fois une tournure inattendue, à mesure que se dévoile peu à peu une vérité complexe. La fiction remplit donc son office : intéresser et aiguiser jusqu'au bout la curiosité du téléspectateur. Une histoire policière classique et solidement exécutée qui devrait satisfaire les amateurs.
NOTE : 7,5/10
09:37 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : j-drama, lupin no shousoku, wowow, kamikawa takaya, nagatsuka kyozo, fukiyoshi mitsuru, tsuda kanji, sato megumi, endo kenichi, hada michiko, okada yoshinori, arai hirofumi, kashiwabara shuji | Facebook |
03/04/2013
(J-Drama) Made in Japan : le déclin du modèle industriel japonais
"TV Show Mirrors a Japanese Battery Maker’s Bind" (The New York Times), "TV drama captures public angst at "Made in Japan" decline" (Reuters). Il est plutôt rare que des dramas japonais en cours de diffusion trouvent un écho jusque dans les médias anglo-saxons. Les articles qui ont été consacrés à Made in Japan démontrent combien les problématiques soulevées par cette récente mini-série de la NHK ont une résonnance particulière, qui interpelle dans la situation économique actuelle. Ce thème du déclin ou de la fin d'un modèle industriel revient d'ailleurs régulièrement jusque dans nos médias. C'est par une mini-série que la NHK a décidé de l'évoquer cet hiver.
Diffusé les samedi soirs sur NHK BS Premium du 26 janvier au 9 février 2013, Made in Japan est un drama qui compte 3 épisodes d'1h15 environ chacun. Sur le papier, les thèmes industriels et financiers peuvent paraître un peu arides pour servir de base à une fiction. Mais la télévision japonaise a démontré par le passé sa capacité à aborder, avec une qualité et une justesse à saluer, de tels sujets. On se souvient du magistral Hagetaka, ou encore de la perspective historique apportée par Fumou Chitai. Si Made in Japan s'inscrit dans une continuité thématique, autant vous prévenir : il n'atteint cependant pas la qualité de ses aînés. Ce qui ne signifie pas pour autant qu'il ne soit pas digne d'intérêt.
Made in Japan met en scène les difficultés rencontrées par un des géants industriels nippons, Takumi Electronics (groupe fictif derrière lequel on peut deviner des groupes comme Sony). Confronté à un yen qui reste fort, à la crise économique, mais aussi à la montée d'autres puissances en Asie comme la Chine ou la Corée du Sud, le groupe est au bord de la faillite. Les banques songent à retirer leurs soutiens financiers, ce qui serait le début de la fin. Face à cette situation, le chairman de la société sollicite un de ses managers, Yagahi Atsushi, pour mettre en place une équipe de la dernière chance : il s'agit de concevoir un plan de restructuration d'urgence. La tâche a tout d'une mission impossible : ils ont en effet seulement trois mois pour proposer un projet viable.
Le futur de Takumi est notamment lié à la conclusion de contrats avec d'autres sociétés portant sur une batterie à lithium dernier cri, développée depuis des années au sein de son département de recherche. Mais une société chinoise, Laisheng, lance également la commercialisation d'une batterie similaire, qu'elle propose à un prix bien inférieur au constructeur japonais. Or Takumi découvre que les caractéristiques techniques du produit de Laisheng sont extrêmement proches du leur. Trop proches pour qu'il s'agisse d'un produit indépendant. En se rendant à Shangai pour y rencontrer le dirigeant chinois, Yahagi et ses collègues apprennent que l'ingénieur en charge du développement de la batterie chez Laisheng est un ancien responsable de la même mission chez Takumi...
Les tensions entre les deux compagnies s'exacerbent. Ce sont sa survie, le sort de dizaines de milliers d'employés, mais aussi une certaine conception de l'industrie japonaise, que Takumi joue sur ce dossier.
L'intérêt de Made in Japan tient au thème traité : il est un miroir tendu vers une industrie japonaise, oscillant entre un certain volontarisme afin de continuer à aller de l'avant en quête d'un nouveau souffle, et une amertume diffuse qui se matérialise par le rappel, répétitif mais tellement vain, des années glorieuses où le modèle Takumi était à son zénith. A travers le portrait dressé, c'est le constat de conceptions industrielles désormais dépassées et prises de vitesse qui transparaît, avec des responsables qui s'illusionnent et se raccrochent à leurs anciens repères. Le drama fait le choix d'évoquer la concurrence chinoise, soulignant les oppositions de style et de culture des hommes qui font ces entreprises. Si la série s'adresse à un public avant tout japonais, elle ne sur-joue pas la fibre nationaliste. Le modèle auquel se réfère toujours Yagahi a, certes, fait sa fierté, mais tout dans le drama indique aussi qu'il appartient au passé, durement rattrapé par la réalité. Soulignant les impasses dans lesquelles s'enferme l'équipe de restructuration, mettant en exergue les décalages et incompréhensions entre les vieux réflexes et la situation concrète existante au niveau mondial, le drama décrit des réactions face à ce déclin acté. Cette mini-série dresse donc un portrait très intéressant du Japon actuel et de son milieu industriel.
Mais Made in Japan n'est pas juste un écho aux préoccupations japonaises, c'est aussi un drama. Or, dans ce registre de la fiction, tout en suivant une construction plutôt efficace, il révèle certaines limites. Le premier problème tient à l'approche choisie par les scénaristes : par crainte que les thèmes industriels et financiers ne soient trop abrasifs, ils n'ont pas hésité à verser dans le mélodrame. Cela s'est traduit par certains twists ou rebondissements personnels qui sonnent soit forcés, soit excessifs. Ne bénéficiant que de 3 épisodes, il y a peu de place pour installer de façon satisfaisante des personnages souvent juste esquissés. Il aurait mieux fallu que la fiction opte pour la sobriété et ne joue que sur le seul tableau industriel. L'autre limite tient au message trop apparent que Made in Japan entend faire passer : en filigrane, il s'agit de remobiliser, de redonner un espoir, pour retrouver, si ce n'est l'éclat d'antan, du moins une place de choix. Cela se ressent tout particulièrement dans la conclusion, où se concrétisent de nouveaux partenariats, de nouvelles ouvertures, notamment avec la Chine. Le passé est révolu, et cette redistribution des cartes s'accompagne de discours teintés d'un idéalisme presque moralisateur pour ce se tourner vers l'avenir. Il y a donc un certain manque de subtilité dans la thèse promue ici qui amoindrit la fiction.
Sur la forme, Made in Japan s'appuie sur une réalisation sobre et très classique. Entre filtres de couleur et quelques plans en extérieur symboliques, le drama reprend les recettes les plus traditionnelles du petit écran japonais. Il se montre un peu plus entreprenant concernant sa bande-son, sans pour autant que ces choix soient toujours bien dosés ou convaincants. Un effort est cependant fait : comme un écho à l'histoire relatée et surtout à la diffuse amertume qui s'en dégage, on y croise des thèmes musicaux assez grinçants, et d'autres, plus solennels, comme en quête d'un nouveau souffle et d'un dynamisme perdu.
Les limites formelles de Made in Japan sont contrebalancées par la présence d'un très solide casting sur lequel le drama peut compter. Le personnage central, Yagahi Atsushi, est interprété par Karasawa Toshiaki (Fumou Chitai, Guilty Akuma to Keiyakushita Onna) qui a cette faculté - déjà soulignée dans Fumou Chitai - à interpréter des personnages à la fois très rigides et très expressifs (sans sur-jeu), source d'une ambivalence qui sied parfaitement au rôle qu'il tient ici. Il est entouré par quelques valeurs sûres du petit écran japonais, tels que Takahashi Katsumi (Koshonin, Ryomaden, Don Quixote) (qui incarne l'ancien employé de Takumi), Yoshioka Hidetaka (Dr. Koto Shinryojo) (le spécialiste financier) et Kunimura Jun (Soratobu Taiya, Saka no Ue no Kumo, Suitei Yuuzai) (l'ingénieur en chef). Plus en arrière-plan, on retrouve également Otsuka Nene, Sakai Miki, Kanai Yuta, Oikawa Mitsuhiro ou encore Kishibe Ittoku.
Bilan : Traitant, avec beaucoup d'acuité, d'un sujet - le déclin du modèle industriel japonais - qui trouve un écho particulier dans l'actualité, Made in Japan est un drama très intéressant par ce qu'il révèle du Japon (et de la façon dont les Japonais conçoivent cette crise). Il oscille en permanence entre l'amertume d'un éclat passé définitivement révolu et la volonté d'aller de l'avant pour retrouver un dynamisme. Mais si son thème retient l'attention, le récit souffre de plusieurs limites qui amoindrissent cette mini-série : d'une part, un penchant au mélodrame pas toujours bien géré, d'autre part, un message en arrière-plan guère subtile pour re-mobiliser autour du "Made in Japan" et qui aboutit à une fin de compromis et d'espoir sonnant trop forcée et idéalisée.
En résumé, Made in Japan est un drama qui mérite d'être vu pour le portrait qu'il propose du Japon, mais qui est loin de la qualité et de la force dramatique d'un Hagetaka (si vous ne l'avez pas encore vu, permettez-moi de jouer les prosélytes : foncez !). Made in Japan reste cependant à conseiller à tous ceux qui s'intéressent au pays du Soleil Levant.
NOTE : 6,5/10
17:20 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : j-drama, nhk, made in japan, karasawa toshiaki, takahashi katsumi, yoshioka hidetaka, kunimura jun, otsuka nene, sakai miki, kanai yuta, oikawa mitsuhiro, kishibe ittoku | Facebook |
20/03/2013
(J-Drama / Pilote) Saikou no Rikon : une comédie nuancée et authentique sur la fin d'une relation
Restons au Japon en ce mercredi asiatique pour revenir sur une autre intéressante série de cet hiver : Saikou no Rikon. Diffusé sur Fuji TV dans son créneau du jeudi soir à 22h depuis le 10 janvier 2013, ce drama s'achèvera justement demain au terme de 11 épisodes. Ce week-end, je me suis plongée dans les premiers épisodes avec curiosité. Saikou no Rikon se présentait comme une comédie romantique relationnelle ; cependant elle avait plusieurs atouts pour retenir l'attention. D'une part, évidemment, son casting solide donnait envie de lui donner une chance. D'autre part, son scénario était signé Sakamoto Yuji, scénariste à qui l'on doit notamment un drama marquant comme Mother. Dès le pilote, Saikou no Rikon prouve être capable d'investir un registre bien à elle, maniant une tonalité légère et des pointes plus sérieuses, voire poignantes, autour de la problématique du mariage et des relations amoureuses arrivant à leur fin.
Saikou no Rikon s'ouvre sur le quotidien d'un couple qui bat de l'aile. Comme désaccordés, Mitsuo et Yuka mènent deux vies en parallèle : chaque action de l'un n'engendre que frustrations et incompréhensions chez l'autre. Réunis par les évènements du 11 mars, ils se sont ensuite mariés rapidement ; mais ils semblent s'être tout aussi vite éloignés, ayant dérivé loin l'un de l'autre. Les traits de caractère de chacun ressortent, exacerbant une fatigue et une forme d'exaspération générales. Si Mitsuo est un mari avec ses exigences en matière d'ordre et d'organisation, et un sens des priorités assez particulier (comme s'inquiéter plus pour son bonsaï que pour sa femme après un tremblement de terre). Yuka est, elle, plus spontanée humainement, mais aussi désordonnée. Après avoir adopté le point de vue du mari et présenté ses récriminations répétées, l'épisode se conclut par une décision de divorce prise par Yuka : elle aura finalement été remettre les papiers qu'ils avaient remplis lors d'une énième soirée d'agacement de Mitsuo.
Seulement le divorce ne se résume pas seulement à soumettre des papiers à l'administration. Comment annoncer la nouvelle de la rupture à leurs familles respectives ? A partir de quand peuvent-ils envisager de refaire leur vie amoureuse ; et surtout, comment ? La situation est d'autant plus troublée par le fait que Mitsuo et Yuka continuent pour le moment de vivre ensemble, Yuka ayant dû renoncer à rentrer vivre chez ses parents qui n'ont pas la place de l'accueillir. Cet échec les amène aussi à s'interroger sur l'amour et sur ce qu'ils peuvent attendre d'une relation ; par-delà les griefs qu'ils adressent à l'autre, c'est aussi sur eux-mêmes qu'ils s'interrogent. En cette période trouble, leur route croise celle d'un autre couple : la femme est une ex-petite amie d'université de Mitsuo pour laquelle il a toujours des sentiments. Si en apparence, ce duo semble avoir trouvé un équilibre qui lui est propre, ce dernier apparaît aussi très précaire... Dans les tergiversations amoureuses qu'elle se propose de raconter, la série va aussi être un véritable apprentissage de soi.
Si on pouvait craindre le genre des comédies romantiques définitivement saturé, Saikou no Rikon prouve qu'il est toujours possible de proposer une fiction très rafraîchissante dans ce registre. Sa légèreté ambiante est parfaitement utilisée comme un moyen narratif permettant d'explorer, de façon très directe, des thématiques relationnelles diverses. La sobriété de son approche comique est à saluer : le drama ne cherche jamais à forcer sur la corde de l'humour, ne tentant ni d'enchaîner les gags, ni de provoquer coûte que coûte des éclats de rire. C'est par petites touches qu'il fait régulièrement sourire, grâce aux décalages et aux réactions de ses personnages. Signe de sa maîtrise narrative, il est aussi capable d'une versatilité de tons appréciables, gérant avec habilité des passages plus poignants émotionnellement.
La particularité de Saikou no Rikon tient aussi à son angle d'attaque : le drama met en scène des couples en train de se défaire, évoquant donc d'abord ces moments où l'amour vascille et où bien des certitudes s'effondrent. Pour capturer les spécificités de ces périodes difficiles, le drama a la chance de pouvoir s'appuyer sur de riches dialogues, souvent savoureux, étonnamment justes, portés par une écriture ciselée très solide. Il s'agit d'une série qui laisse une large place à l'expression de chacun : il y a la volonté de permettre aux personnages de dévoiler leurs états d'âme et d'expliquer leurs attentes. Ces multiples échanges rapides, mais aussi ces longues tirades tendant vers le monologue, apparaissent comme autant de fenêtres grandes ouvertes vers le coeur de chacun. Derrière la difficulté des uns et des autres de traduire en mots leurs ressentis, voire leurs sentiments, se perçoit aussi plus simplement la difficulté que chacun a de se connaître et de se comprendre.
Dans cette optique, Saikou no Rikon accorde un soin tout particulier à ses personnages, détaillant leurs réactions mais aussi leurs points de vue face aux situations mises en scène. S'esquissent des portraits complexes, éloignés de toutes caricatures unidimensionnelles. Les différents protagonistes sont présentés avec leurs qualités et leur défauts : ils forment des personnes entières, complexes, armées de leurs certitudes et amoindries par leurs points faibles. Tour à tour agaçants, touchants, déconcertants, et même désarmants, ils constituent un quatuor très dissemblable. La diffuse impression de proximité et de normalité qui les entoure séduit un téléspectateur justement prêt à s'investir dans des personnages qui, eux-mêmes, se perdent et sont en quête de nouveaux repères dans les intrigues relationnelles éprouvantes qu'ils traversent. Il y a, dans cet ensemble terriblement humain et si riche en contradictions, une forme d'authenticité et d'émotions à fleur de peau qui permettent à la série de trouver son identité propre dans un genre pourtant sur-exploité.
La forme s'adapte parfaitement à la maîtrise narrative que l'on retrouve sur le fond et aux évolutions des tonalités. La réalisation est relativement classique ; cependant, elle sait jouer sur tous les ressorts du genre, capable d'évoquer la comédie burlesque comme de relater des scènes solitaires déprimantes. Mais c'est surtout toute l'ambiance musicale du drama qui impulse un dynamisme des plus appréciables. Les instrumentaux sont bien choisis, tout en ayant cette retenue constante qui évite tout excès. Symbole de cet intéressant dosage, on retrouve en guise de générique de fin une belle chanson de Kuwata Keisuke (intitulée Yin Yang - mais le seul fait de confier une chanson de fin à ce chanteur est généralement gage de qualité ; souvenez-vous de Control ~ Hanzai Shinri Sousa). Durant ce générique, les personnages suivent une chorégraphie qui évolue à chaque épisode, en fonction des évènements qui se sont déroulés. Une parfaite façon, bien dans le ton de la série, pour conclure ces 45 minutes !
Enfin, le dernier argument en faveur de Saikou no Rikon tient à son casting. Prometteur sur le papier, il s'impose d'emblée comme une belle réussite. Dès le pilote, c'est tout d'abord Eita (Last Friends, Soredemo Ikite Yuku) qui se démarque, avec un personnage qu'il aurait été facile de trouver vite agaçant s'il n'y avait pas eu ce jeu riche en nuances de l'acteur, qui maîtrise les longues tirades, comme les éléments un peu plus burlesques, de façon extrêmement convaincante. Ono Machiko (Gaiji Keisatsu, Mother, Magma) interprète, avec beaucoup de naturel, sa très vite ex-femme, qui se dévoile progressivement au cours de ces premiers épisodes. Quant au couple qui rentre dans leurs vies tandis que le quotidien de Mitsuo et Yuka éclate, ils sont joués respectivement par Maki Yoko (Unmei no Hito) et Ayano Go (Cleopatra na Onnatachi).
Bilan : Doté d'une écriture dense, accordant un soin particulier aux détails pour caractériser et comprendre les différents personnages, ainsi que les situations dans lesquelles ils se trouvent, Saikou no Rikon signe des débuts très solides. Sa tonalité légère, mais capable de versatilité, apporte une fraîcheur appréciable. Bénéficiant d'un casting convaincant, avec des acteurs qui vont trouver ici des rôles dans lesquels ils peuvent pleinement s'exprimer, ce drama très parlant choisit de plus un angle d'approche intéressant, celui de la fin d'une relation, conscient qu'un amour vascillant révèle toujours bien des choses sur chacun d'entre nous. C'est donc une fiction toute en nuances, pleine d'humanité, qui démarre sur de bonnes bases. Les amateurs devraient apprécier. A suivre !
NOTE : 7,5/10
Le générique de fin du 1er épisode (la mise en scène évolue d'un épisode à l'autre) :
Une bande-annonce du drama :
BONUS - Le clip de la chanson de fin en entier :
17:49 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : j-drama, fuji tv, saikou no rikon, eita, ono machiko, maki yoko, ayano yoko, ichikawa miwako, matsuo satoru, ono yuriko, serina, yachiqusa kaoru | Facebook |
13/03/2013
(J-Drama / Pilote) xxxHOLiC : celui qui voyait les esprits et celle qui exauçait les voeux
Restons au Japon en ce mercredi asiatique pour s'intéresser à la saison hivernale en cours. C'est l'occasion de se pencher sur un genre que j'ai assez peu exploré ces dernières années dans le petit écran japonais : le fantastique. Parmi les projets notables de l'hiver, figurait en effet l'adaptation live d'un célèbre manga de Clamp, xxxHOLiC. Je ne connais ce dernier que de nom (suivant la fameuse règle qui me fait débuter par une série pour finir dans la version papier d'origine), mais le thème de l'histoire, ainsi que la beauté des images que les premières previews avaient laissée entrevoir, suffisaient à ma curiosité.
Proposé par la chaîne câblée WOWOW, xxxHOLiC sera composé de 8 épisodes, d'une demi-heure chacun. Sa diffusion a débuté le 24 février 2013. Derrière ce travail d'adaptation à destination du petit écran, nous retrouvons au scénario et à la réalisation Tsugita Jun et Toyoshima Keisuke. Après deux épisodes regardés, mes premières impressions sont positives : j'ai apprécié l'incursion proposée, mais aussi l'univers construit (même si je n'ai pas d'autres références avec lesquelles le comparer). Reste au développement mythologique à tenir ses promesses !
Watanuki Kimihiro est un jeune lycéen qui a toujours eu une faculté particulière : il est capable de voir les esprits et autres fantômes, qu'il semble attirer. Son quotidien est constamment perturbé par ces apparitions impromptues et souvent inquiétantes. Un jour, il découvre par hasard la maison de Ichihara Yuko. Cette dernière est une sorcière tenant une bien étrange boutique, ouverte à tous : elle se propose d'exaucer les voeux de ses clients, en échange d'un paiement équivalent à la valeur que son client accorde au voeu accompli.
Kimihiro voit dans cette rencontre l'opportunité dont il rêvait : la possiblité de se débarasser enfin de ce don qui pèse tant sur sa vie. Yuko accepte sur le principe sa requête, mais elle demande en échange qu'il vienne travailler à mi-temps dans son magasin. Simple aide-ménager, Kimihiro se retrouve ainsi au plus près du commerce très particulier qui s'y déroule. Il va vivre et assister à différentes affaires conclues par Yuko. Or ces dernières sont loin de trouver des résolutions toujours heureuses.
Le pilote de xxxHOLiC remplit parfaitement son office : il nous glisse efficacement dans un univers fantastique qui a ses codes propres. S'esquisse une mythologie dense où se perçoit un potentiel certain pour grandir et se développer au fur et à mesure que l'histoire progressera. Du fait de la durée relativement courte de ses épisodes, le drama opte pour une narration très directe, qui se contente de l'essentiel sans tergiversation inutile. Il en résulte une construction du récit relativement simple et linéaire, qui retient sans difficulté l'attention. Chaque épisode semble destiné à proposer un double niveau de lecture : d'une part, Kimihiro est le témoin d'une affaire particulière conclue par Yuko dans le cadre de son commerce de voeux (xxxHOLic suit donc une approche procedural) ; d'autre part, le fil rouge repose sur l'exploration plus avant, du point de vue de Kimihiro, des mystères mythologiques introduits dans la série, qu'il s'agisse de ceux propres à sa condition ou bien de ses rapports avec la sorcière.
La limite du format adopté tient à la simplicité d'exécution des affaires que le commerce de Yuko va nous faire suivre. Dans ces deux épisodes, leur déroulement est très calibré et prévisible. La première histoire, extrêmement réduite étant donné que le pilote sert à relater la rencontre entre Kimihiro et Yuko, est une fable moralisatrice sur le mensonge. La seconde, plus développée, suit un schéma identique, traitant cette fois de l'avidité démesurée d'un personnage. Pourtant xxxHOLiC fonctionne bien à l'écran, car le drama repose sur des enjeux qui dépassent ces seuls "cases-of-the-week". Plus que la morale à retenir, c'est la manière dont ces affaires affectent les personnages principaux qui importe. Surtout, le concept permet de voir se dessiner un univers très riche, extrêmement intriguant, dont les mystères font plus qu'aiguiser la curiosité du téléspectateur. A ce titre, la gestion de la dimension fantastique se révèle d'ailleurs convaincante : misant beaucoup sur des effets d'ambiance et sur du suggestif, la série n'a pas besoin d'une débauche d'effets spéciaux pour conférer aux images et à son histoire une tonalité très particulière qui s'assure de notre fidélité pour la suite.
Si xxxHOLiC réussit l'installation de son cadre, le drama le doit beaucoup au soin apporté à sa forme. La réalisation, appliquée, insuffle une atmosphère fantastique à part, sorte d'énigmatique surnaturel aux passages parfois un peu inquiétants. Elle dose suffisamment bien ses effets, ne donnant jamais l'impression de vouloir trop en faire. De nombreux plans jouent sur des symboliques dans les mises en scène, qui sont riches en détails. Les images ont aussi une teinte travaillée particulière, alternant des dominantes, rouge, verte, très sombre ou encore blanche, suivant les lieux et l'ambiance recherchée. De plus, la bande-son n'est pas en reste pour introduire une pointe de mystérieux. Quant au générique (cf. 1ère vidéo ci-dessous), il se révèle non seulement assez réussi esthétiquement, mais la chanson (Aitai, par Shikao Suga) est également très plaisante à l'écoute. xxxHOLic frôle ainsi le sans-faute au niveau visuel.
Quant au casting, s'il semble un peu s'effacer par moment devant une caméra qui privilégie en premier lieu la construction de son atmosphère, il apparaît dans l'ensemble solide, chacun trouvant assez vite ses marques dans le rôle qui lui est confié. Watanuki Kimihiro est interprété par Sometani Shota (Hei no Naka no Chuugakkou, Gou, Tsumi to Batsu), tandis que Ichihara Yuka l'est par (Watanabe) Anne (JOKER Yurusarezaru Sosakan, Yokai Ningen Bem). Autour de ce duo central autour desquels tout gravite, on croise notamment Higashide Masahiro (Kekkon Shinai) et Miyazaki Karen (Kazoku Hotei).
Bilan : Doté d'une narration simple et directe, xxxHOLiC propose une introduction efficace dans son univers bien particulier. Fable moralisatrice par sa mise en scène des affaires conclues par Yuko, suivant ainsi un format semi-procedural, le drama se démarque avant tout par l'atmosphère mystérieuse dans laquelle il plonge le téléspectateur, réussissant admirablement à cultiver un surnaturel énigmatique superbement mis en valeur visuellement. L'ensemble intrigue et aiguise ainsi la curiosité. xxxHOLiC est donc une oeuvre soignée qui s'apprécie sur la forme, et interroge sur le fond, le tout bénéficiant d'un concept prometteur.
J'ai conscience que le fait de ne pas connaître le manga est peut-être un atout pour apprécier pleinement cette série. En plus de ne pas avoir la tentation de comparer et d'évaluer le travail d'adaptation, je l'aborde sans a priori, ni certitudes sur l'orientation à venir de l'histoire. Mais en ce qui me concerne, une chose est sûre : je serai au rendez-vous pour la suite.
NOTE : 7/10
Le générique du drama :
Les bande-annonces (en VOSTFR) du drama :
13:40 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : j-drama, xxxholic, wowow, watanabe anne, sometani shota, higashide masahiro, miyazaki karen, adachi hiromi, takenaka naoto | Facebook |