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17/04/2013

(J-Drama / SP) Lupin no Shousoku : exhumation du passé en quête de la vérité sur un meurtre quasiment prescrit

 

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Retour au Japon en ce mercredi asiatique ! Si j'insiste sur cette destination, c'est parce que, pour une fois, je parviens à respecter plusieurs semaines d'affilée une vraie alternance entre la Corée du Sud et le Japon. Cette semaine, j'ai quelque peu délaissé les nouveautés pour me plonger dans mes dossiers sans fond de séries à rattraper. Comme mon inclinaison du moment m'oriente plutôt vers le genre policier, j'ai finalement exhumé un intéressant tanpatsu (c'est-à-dire un drama court) sur lequel Kerydwen avait attiré mon attention en janvier dernier.

Téléfilm unitaire d'une durée de 2 heures, Lupin no Shousoku a été diffusé le 21 septembre 2008 sur WOWOW. Si le nom de cette chaîne câblée revient souvent dans ces colonnes lorsqu'il s'agit de partir au pays du soleil levant, il faut reconnaître que la confiance accordée est souvent méritée. Lupin no Shousoku ne déroge pas à cette règle. Cette adaptation d'un roman éponyme de Yokoyama Hideo (un spécialiste du suspense) a été confiée à Mizutani Toshiyuki, dont j'ai déjà visionné plusieurs autres collaborations avec WOWOW. Les résultats avaient jusqu'à présent été variables : si Marks no Yama s'était révélé être un intéressant drama policier (déjà), Prisoner m'avait laissé beaucoup plus réservée et mitigée. Heureusement Lupin no Shousoku s'inscrit dans la lignée des qualités du premier (on y retrouve d'ailleurs le même acteur principal), proposant une quête de la vérité prenante et riche en rebondissements.

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Officier n'ayant jamais gravi les échelons de la hiérarchie policière, Mizorogi Yoshihito est resté marqué par ce qui demeure le plus grand échec de la police japonaise de la seconde moitié du XXe siècle : ne pas être parvenu à arrêter le coupable d'un vol de 300 millions de yens qui, bien qu'identifié, bénéficia de la prescription pour s'échapper entre les mailles du filet judiciaire. En charge de l'affaire, Mizorogi détenait le principal suspect le jour où ce délai légal expira. Il a été contraint de le voir ressortir libre du commissariat sans pouvoir espérer jamais mener des poursuites pénales contre lui. Sur le moment, c'est sa démission qu'il remit - et qui fut refusée ; depuis il prend très personnellement chaque cas approchant de la date de prescription.

L'affaire qui va occuper ce tanpatsu tombe justement dans cette catégorie. La police reçoit en effet des informations - que le supérieur de Mizorogi juge fiables - selon lesquelles la mort d'une enseignante, classée comme suicide quinze ans auparavant, était en réalité un meurtre déguisé. Une nouvelle équipe d'investigation est aussitôt réunie, sous la direction de Mizorogi, alors que le délai de prescription s'apprête à expirer. Les renseignements transmis à la police pointent vers trois lycéens turbulents d'alors et une mystérieuse "opération Lupin" qu'ils auraient organisée et qui serait la cause de la mort de la professeure.

L'enquête qui s'ouvre va se révéler bien plus complexe qu'anticipée, ramenant aussi de manière inattendue Mizorogi sur l'affaire des 300 millions de yens volés...

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Le grand mérite de Lupin no Shousoku est de proposer une enquête policière solide, dotée d'une intrigue à tiroirs qui recelle de suffisamment de rebondissements et de twists pour former un récit dense qui va retenir l'attention du téléspectateur jusqu'à l'ultime révélation. La particularité de l'investigation tient au fait qu'elle se déroule 15 ans après les faits : la reconstitution des évènements repose donc entièrement sur la confrontation des témoignages que vont apporter les différents protagonistes mêlés de prés ou de loin à la mort de Mine Maiko. Chacun délivre une part de vérité, éclairant de manière subjective un pan de l'histoire. C'est ensuite aux policiers de rassembler ces pièces éparses d'un même puzzle criminel pour tendre vers la résolution finale. Afin d'éviter un huis clos qui aurait risqué de manquer de rythme, le tanpatsu est entrecoupé de flashbacks, opérant de fréquents aller-retours entre le passé et le présent. Au fil des précisions des témoins, l'intrigue parvient à se renouveler constamment, prenant plus d'un tournant inattendu et dévoilant une réalité bien plus complexe que les premières déductions ne le laissaient entrevoir.

En plus de l'enquête policière, si Lupin no Shousoku suscite l'implication du téléspectateur, c'est aussi parce qu'il place au centre de l'intrigue un facteur humain. Les faits étants très anciens, c'est avec pour seul matériel exploitable des témoignages que les policiers vont devoir naviguer à vue dans ces semi-vérités admises du bout des lèvres, ces souvenirs trop subjectifs à moitié effacés ou encore des regrets manifestes qui pèsent sur certains protagonistes à tort ou à raison. Entre interrogatoires et flashbacks, l'investigation repose sur la compréhension par les policiers des différents suspects, et donc sur une dimension psychologique déterminante. Car chaque personnage est présenté comme façonné par son passé, qu'il s'agisse du policier principal qui voit resurgir ce cas des 300 millions de yens qu'il a perdu face à la prescription, ou des anciens lycéens, aujourd'hui adultes, qui, même s'ils se sont perdus de vue, continuent de vivre marqués par les évènements qui se sont produits il y a 15 ans. Ce tanpatsu insiste sur le poids des secrets et des non-dits que chacun a gardé, sur ces abcès jamais crevés qui ont trop pesé. Exhumant des regrets et des séquelles de la vie, Lupin no Shousoku se dirige vers une conclusion cohérente, assez prévisible, mais qui a le mérite de venir conclure de façon satisfaisante cette journée où le passé est soudain remonté à la surface.

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Sur la forme, Lupin no Shousoku est un drama au petit budget qui opte opportunement pour une réalisation sobre. On peut juste lui reprocher parfois un certain manque de subtilité, les plans choisis donnant des indications sur l'orientation à venir de l'intrigue. S'efforçant de refléter l'atmosphère d'une histoire chargée de lourds secrets, les filtres sont assez sombres, surtout dans le présent des années 90. L'ambiance musicale recréée respecte également ces mêmes exigences de tonalité. Si bien qu'avec un minimum d'effets, tout en jouant le jeu d'un quasi huis clos au sein du commissariat, le tanpatsu parvient à trouver une identité visuelle cohérente et bien à lui.

Côté casting, en dépit de ce que pouvait suggérer l'affiche, Lupin no Shousoku est un drama relativement choral, du fait d'une construction où ce sont les témoignages confrontés qui peu à peu conduisent à l'établissement de la vérité. Mizorogi sert cependant de repère au téléspectateur, et apparaît donc comme le pivot narratif. Il est interprété avec aplomb par Kamikawa Takaya qu'on retrouvera deux ans plus tard aussi en policier dans Marks no Yama. A ses côtés, le casting est relativement solide ; sa principale limite tient aux flashbacks et au fait qu'il est difficile de jouer à la fois un lycéen et un trentenaire. On y croise notamment Nagatsuka Kyozo (Magma), en responsable policier qui conserve sa confiance en Mizorogi, Fukikoshi Mitsuru (Himitsu), Tsuda Kanji (Prisoner, Magma), Sato Megumi (Harukanaru Kizuna, Machigawarechatta Otoko), Endo Kenichi (Fumou Chitai, Gaiji Keisatsu, Soratobu Taiya, Strawberry Night), Hada Michiko (Dai Ni Gakusho), Okada Yoshinori (Nankyoku Tairiku), Arai Hirofumi (Hitori Shizuka, Going my Home) ou encore Kashiwabara Shuji (M no Higeki).

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Bilan : Bénéficiant d'une tonalité à la sobriété opportune, aussi bien dans l'écriture que dans le jeu des acteurs, Lupin no Shousoku signe une intrigue policière dense et efficace. La construction narrative reposant sur une confrontation permanente des différents témoignages permet une histoire riche en rebondissements, capable de renouveler les enjeux et de prendre plus d'une fois une tournure inattendue, à mesure que se dévoile peu à peu une vérité complexe. La fiction remplit donc son office : intéresser et aiguiser jusqu'au bout la curiosité du téléspectateur. Une histoire policière classique et solidement exécutée qui devrait satisfaire les amateurs.


NOTE : 7,5/10

08/08/2012

(J-Drama) Magma : destinées croisées sur fond d'enjeux énergétiques dans le Japon post-11 mars

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Restons encore un peu au Japon en ce mercredi asiatique pour revenir sur un drama récent, diffusé du 10 juin au 10 juillet 2012 sur WOWOW. Comptant 5 épisodes de 45 minutes environ (le dernier approchant plutôt l'heure), Magma suit le format classique des séries de cette chaîne câblée. Il avait initialement éveillé ma curiosité en raison de son sujet : évoquer les questions énergétiques dans un Japon post-11 mars, avec les enjeux posés par la recherche d'éventuelles alternatives au nucléaire. Mais s'il a démarré de façon très solide, il a ensuite pêché en voulant trop en faire : se dispersant, il n'a pas exploité tout le potentiel entraperçu dans son pilote. Malgré cet arrière-goût d'inabouti, son visionnage demeure cependant intéressant du fait des thèmes abordés.

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Nogami Taeko travaille pour un fonds d'investissement étranger. Elle se voit confier la mission de restructurer une entreprise en faillite financière, spécialisée dans la recherche et le développement de l'énergie géothermique. Taeko prend alors la direction d'une petite ville éloignée de Tokyo en se demandant si une telle affectation n'est pas un coup d'arrêt pour sa carrière. Elle entend cependant faire retrouver à la société le chemin de la rentabilité en restructurant son activité et en fermant les services chroniquement déficitaires. Parmi eux figure le département de recherche énergétique, dont les travaux n'ont pour l'instant pas conduit au système d'exploitation promis.

Dans ses projets, Taeko se heurte vite au personnel d'une entreprise entièrement vouée à cette mission de mise au point qui permettrait à cette énergie de devenir une alternative possible, ou du moins un complément qui laisserait au Japon un choix dans sa production d'électricité. Tous sont mobilisés : du directeur de l'entreprise, Ando Koji, aux scientifiques travaillant sur le projet parmi lesquels l'expert national de la question géothermique, Omuro Kojiro, qui y a investi toute sa vie. Le raisonnement binaire en pertes et profits de Taeko n'a rien de commun avec les idéaux d'employés qui croient fermement en leur projet. Mais alors que l'état d'esprit de la jeune femme évolue peu à peu en découvrant les motivations qui les animent, d'autres personnes semblent décider à s'assurer que les recherches menées n'aboutissent jamais et à achever la compagnie.

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L'histoire de Magma avait de quoi retenir l'attention à plus d'un titre. Tout d'abord l'idée d'évoquer un fonds d'investissement uniquement intéressé par les profits me faisait forcément penser à Hagetaka, et à sa mise en scène du capitalisme sauvage qui avait donné lieu à un bijou de série d'une qualité rare. La problématique dans Magma est cependant légèrement différente. Si elle parle bien de la poursuite du profit sans prise en considération, voire parfois en dépit, de l'aspect humain, le premier épisode ajoute à ces bases un autre enjeu : les questions énergétiques. C'est ici, non pas des destinées privées, mais l'intérêt public qui est en cause. L'énergie géothermique évoquée est encore loin de présenter un substitut crédible aux autres sources existantes, cependant elle peut être une voie envisageable pour le futur. Magma parle donc des réticences à investir à perte aujourd'hui dans un projet qui tient plus de la recherche fondamentale, mais dont les résultats peuvent être déterminants pour les décennies futures. De plus, le tableau apparaît d'autant plus complexe que le drama fait intervenir d'autres acteurs logiques qui ne peuvent rester inactifs : le politique qui ne peut pas ignorer l'impact du 11 mars au moins à court terme, mais aussi l'industrie du nucléaire qui observe avec méfiance ces développements.

Seulement à partir de cette fondation au potentiel indéniable, Magma laisse un regret : celui de ne pas aller au bout de son idée de départ. Après deux épisodes, le drama semble bifurquer et surtout s'étioler dans diverses directions désordonnées, replaçant (souvent maladroitement) la dimension humaine - et donc les personnages impliqués - au coeur du récit. Il tente de greffer au concept initial de nouveaux thèmes : la vengeance, la maladie, ajoutant de nouveaux motifs aux personnages... En soi, ce recentrage aurait pu être intéressant, malheureusement, le drama souffre des excès (parfois assez mélodramatiques) d'une écriture qui manque de subtilité, pesant sur le bon déroulement de l'intrigue. L'histoire perd sa direction et s'éparpille sans donner l'impression d'être bien maîtrisée. Finalement, on retient surtout de Magma un message : celui de l'apprentissage d'une héroïne qui remet en cause ses priorités et prend conscience qu'au-delà du raisonnement comptable à court terme, il est nécessaire de penser à un avenir plus lointain et de s'interroger sur les responsabilités qui pèsent sur chacun pour la construction de ce futur. C'est une idée louable, mais l'exécution aurait mérité plus de nuances.

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Sur la forme, Magma bénéficie d'une réalisation traditionnelle, calibrée et sans prise de risque particulière. Le plus notable reste sans doute sa bande-son, très fournie. Ces différents morceaux, uniquement instrumentaux, s'efforcent de distiller une relative tension et de souligner les passages importants, notamment les confrontations. Mais ses efforts manifestes ne sont pas toujours récompensés. En fait, tout dépend de la scène ainsi accompagnée : certaines sont réussies et leur impact bénéficie vraiment de la musique, mais d'autres tombent à plat et on a alors l'impression d'une musique artificielle qui essaye vainement de se substituer au rythme faisant défaut.

Enfin, le drama dispose d'un casting globalement homogène et solide. C'est Ono Machiko (Soratobu Taiya, Mother) qui interprète l'héroïne sur laquelle est finalement centré ce drama : je gardais d'elle un bon souvenir dans Gaiji Keisatsu, elle délivre dans ce rôle très évolutif et plus émotionnel qu'attendu une prestation convaincante. A ses côtés, on retrouve Tanihara Shosuke (Love Shuffle, Tempest), Nagatsuka Kyozo (Atsu-Hime), Ishiquro Ken (Honjitsu wa Taian Nari), Tsuda Kanji (Izumo no Okuni), Komoto Masahiro (Marks no Yama), Shaku Yumiko (LOVE GAME), Watanabe Ikkei (Seinaru Kaibutsutachi) et encore Osugi Ren (Marks no Yama, TROUBLEMAN).

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Bilan : Magma est un drama dont l'intérêt principal repose sur son sujet, l'évocation d'une problématique énergétique - et plus précisément le cas de l'énergie géothermique - dans un Japon post-11 mars qui s'interroge sur les orientations de sa politique énergétique. Mais en dépit d'un potentiel bien réel, Magma ne sera pas à la hauteur de ses ambitions initiales, souffrant d'un manque de direction et multipliant des storylines anecdotiques qui viennent nuire et desservir son sujet principal. Après des débuts très prometteurs, la suite laisse une impression d'inachevée. C'est une série qui mérite un visionnage pour son thème et les intentions qui la sous-tendent, mais qui n'aura pas exploité le potentiel entrevu.


NOTE : 6,75/10