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24/04/2013

(J-Drama) Going My Home (Going Home) : un portrait familial riche et nuancé d'une rare justesse

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Dans le cadre de cette semaine spéciale "Festival Séries Mania", ce mercredi asiatique conduisait automatiquement à revenir sur la série japonaise qui y sera projetée samedi soir : Going My Home (à la syntaxe revue - et corrigée - pour donner Going Home). Je vous ai déjà parlé de ce drama en octobre de l'année dernière, au terme de son long pilote (qui sera, découpé en deux parties, et proposé lors de la projection prévue samedi prochain). Aujourd'hui, pour l'occasion, c'est avec un billet bilan que je vous propose de revenir sur cette série au terme des 10 épisodes qu'elle compte : le pilote avait su séduire, mais comment la série a-t-elle ensuite évoluer ?

Ce drama de Hirokazu Kore-Eda reste, par son approche notamment narrative mais aussi formelle, assez unique pour le petit écran japonais, loin des canons habituels des fictions qui y sont proposées. Cela explique sans doute en partie les problèmes d'audiences qu'il a rencontrées : commencées honorablement, elles n'ont ensuite cessé de chuter jusqu'à la fin de la diffusion. Pour autant, s'il a pu dérouter l'habituel téléspectateur japonais, Going My Home reste une perle à plus d'un titre, une oeuvre qui porte la marque de son auteur et qui vous glisse avec subtilité et humanité dans les dynamiques d'une famille japonaise.

[Pour un résumé plus complet du drama, je vous invite à lire ma review rédigée après son pilote.]

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Si Going My Home relate un quotidien familial ordinaire, elle le fait avec une finesse d'écriture et un soin constant du détail qui confèrent à l'ensemble une authenticité rare. C'est un portrait de famille, touchant et attachant, à la fois unique et représentatif d'un certain mode de vie japonais, qui est proposé. D'une façon qui leur est propre, les épisodes tendent à s'affranchir des contraintes attendues liées au format d'un renzoku : ils s'enchaînent suivant un fil narratif qui s'apparente à un (très) long métrage. Le rythme y est lent, presque contemplatif par moment, chérissant chaque instant relaté, aussi anecdotique soit-il. Tout en suivant un fil rouge principal - des intéractions familiales où chacun se cherche -, le récit se ménage des pauses, prenant son temps pour souligner ces quelques moments - qu'il s'agisse de plats cuisinés, ou encore de regards échangés - qui posent une ambiance ou une émotion particulière.

Adoptant une tonalité dans laquelle on retrouve la signature de Hirokazu Kore-Eda, Going My Home privilégie avant tout la spontanéité et le naturel pour nous introduire dans le quotidien de cette famille. Cette série a l'art d'éclairer et de souligner comme peu de fictions toutes ces petites choses qui remplissent une journée. Elle ne cherche, ni à romancer, ni à rendre glamour les vies qui y sont dépeintes - alors même que les métiers exercés par le couple principal (publicitaire pour la télévision, cuisinière célèbre) rentrent totalement dans les standards du petit écran japonais. Sa préoccupation principale est d'impulser une proximité et un naturel aux dynamiques mises en scène : elle le fait si bien que ces dernières résonnent de manière universelle auprès de chaque téléspectateur, tout en sonnant aussi typiquement japonais.

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S'installer devant Going My Home, c'est prendre place devant une peinture familiale, qui se complète et évolue au fil des épisodes. On y croise un certain nombre de thèmes chers à Kore-Eda. En premier lieu, il y a évidemment la famille. Elle l'évoque en pointant toutes les subtilités et nuances propres à ces liens que le temps, l'éloignement et les choix de chacun peuvent distendre, mais ne rompent jamais totalement. La maladie du patriarche va être l'occasion indirecte d'initier des formes de retrouvailles. Par son exploration du passé et d'un pan de la vie privée de son père qu'il ignorait, le personnage principal, Ryota, ré-apprend à connaître une figure qui était devenue distante, mais à laquelle il doit bien plus qu'il ne veut bien l'admettre. Ses aller-retours dans ce village perdu où est né son père vont aussi permettre à son couple, en les sortant de leur quotidien, de retrouver du temps pour eux, et à renouer le dialogue avec leur fille qui affronte en silence une autre épreuve à laquelle son jeune âge ne l'a pas préparé, celle d'un deuil d'une amie d'école.

A l'image de cette Vie qu'elle décrit, et de tous les paradoxes qui la constituent, Going My Home adopte un ton versatile : l'équilibre y est savamment dosé, entremêlant un soupçon d'humour, une pointe de regrets, et beaucoup de chaleur humaine... Si la maladie du père sert de déclencheur, c'est un autre terrain qui va être celui de la réunion : le drama nous glisse ici dans les croyances populaires japonaises, avec le mythe des kuna. Ces créatures censées peupler les forêts sont présentées comme étant un lien entre le monde des vivants et celui des morts. Marqué par l'exode rural et une forêt qui a reculé devant son exploitation par les hommes, le village d'origine du père de Ryota est un lieu où persiste cette légende : la recherche de ces petits êtres est au coeur d'un festival dont l'organisation va servir de fil rouge au drama. Going My Home nous entraîne aux frontières d'un fantastique qui reste seulement suggéré, manié avec humour comme le montrent les rêves introductifs de Ryota mettant en scène ces fameux kuna.

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Si ce drama apparaît à part dans les productions télévisuelles japonaises du fait de son écriture et de son rythme, il se démarque également sur la forme. Going My Home bénéficie en effet d'une réalisation qui tend, elle-aussi, vers le cinématographique. Cette façon de filmer, très posée, avec une maîtrise de l'espace et de la mise en scène particulièrement aboutie, vient sublimer certains passages, apportant un cachet supplémentaire au drama. De même, la bande-son, avec des thèmes musicaux légers, non intrusifs, sied parfaitement à l'ambiance générale - jusqu'au générique qui résume tout le sens de cette quête aux kuna.

Enfin, Going My Home bénéficie d'un casting dont le jeu, jamais forcé et toujours naturel, renforce l'authenticité du récit et la force de cette fable sur la vie. Abe Hiroshi est parfait dans ce registre de père de famille, avec ses maladresses et ses incertitudes. Yamaguchi Tomoko apporte une fraîcheur précieuse, signant ici un retour remarqué dans le petit écran japonais après 16 années passées loin des dramas. Et de manière plus générale, ce sont tous les acteurs qui sont au diapason, se révélant à la hauteur du scénario et de l'approche choisie : on y retrouve YOU, Miyazaki Aoi, Yasuda Ken, Arai Hirofumi, Bakarhythm, Natsuyagi Isao, Abe Sadao, Yoshiyuki Kazuko ou encore Nishida Toshiyuki.

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Bilan : Fable sur la vie, avec les sentiments et les regrets qui lui sont inhérents, Going my home nous introduit avec une justesse et une sincérité remarquables dans les dynamiques d'une famille japonaise moderne. Son soin constant du détail et son approche contemplative posent une tonalité particulière, permettant à la série de dépeindre tout en subtilité et en nuances les relations humaines mises en scène. Touchant et attachant, avec ses pointes d'humour et sa spontanéité cultivée, c'est un human drama à la portée universelle, capable de trouver un écho en chaque téléspectateur. Le flirt avec le fantastique occasionné par le mythe des kuna n'est pa une simple immersion dans le folklore local ; il permet aussi, par-delà ce village touché par l'exode rural et la déforestation, de renouer un lien social, un lien entre les générations, qui complète ce portrait de Japon.

Le pilote (en 2 épisodes) de Going My Home sera donc projeté au Forum des images à Paris à 21h ce samedi 27 avril [pour la petite histoire, sachez que c'est moi qui en assurerai la présentation préalable]. Plus généralement, c'est vraiment une série qui mérite l'attention de tous les amateurs de dramas japonais, de ceux qui apprécient Hirokazu Kore-Eda, mais aussi de tous les téléphages curieux. Il s'agit d'une oeuvre universelle qui reste à part.


NOTE : 8,75/10

17/10/2012

(J-Drama / Pilote) Going My Home : un drama humain, sincère et décalé ne laissant pas indifférent

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Quand je vous disais la semaine passée que la saison automnale au Japon s'annonçait autrement plus enthousiasmante que l'été qui s'achevait, je n'exagérais pas. En témoigne ce premier pilote visionné ce week-end. Going My Home était le drama attendu de cet automne, aussi bien par le public japonais que par moi. La raison ? Il s'agit du premier passage au petit écran, pour un renzoku, du cinéaste Koreeda Hirokazu. Ce nom ne vous est pas inconnu si vous vous intéressez un peu au cinéma japonais : Nobody knows, Still walkting, Air Doll ou encore I wish sont des films qui méritent leur visionnage. Pour couronner le tout, Going My Home présentait également un argument de casting convaincant, avec notamment la présence de Abe Hiroshi.

Autant de bonnes raisons de découvrir un drama qui a débuté sur Fuji TV le 9 octobre 2012, par un (long) pilote de rien moins qu'1h40. Qu'importe sa longueur, puisque ce premier épisode m'a conquise. S'il donne peu d'indication sur les orientations futures de cette histoire familiale parsemée d'étrange, il installe une ambiance caractéristique savoureuse. Une entrée en matière réussie, pleine de potentiel, qui ne demande qu'à être confirmée par la suite. Mais après un tel premier épisode, on ne peut être qu'optimiste !

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Expliquer le synopsis de Going My Home est en soi presque un défi, tant, au cours de ce pilote, l'univers de la série s'installe par petites touches, sans qu'une trame narrative principale ne s'impose. Une chose est certaine, pour ceux qui s'interrogeaient sur les compromissions et aménagements à adopter pour le passage du grand au petit écran, le style caractéristique de Koreeda Hirokazu s'impose d'emblée, transposé tel qu'il nous est familier. Il sera d'ailleurs intéressant de voir comment il va se développer par la suite dans un format de renzoku.

Le drama s'intéresse au quotidien, familial et professionnel, de Tsuboi Ryota. Ce père de famille a souvent du mal à s'affirmer et à trouver son registre, confronté aux jugements incessants de ceux qui l'entourent et que son attitude et ses choix ne semblent jamais satisfaire. Au travail, sa carrière professionnelle ne suit pas l'ascension espérée. Evoluant dans le milieu souvent ingrat de la publicité, il doit gérer des clients compliqués et des collègues méfiants. A la maison, son épouse a en revanche trouvé son créneau et voit sa renommée grandir : elle est une cuisinière publiant des livres de recettes. Face à ces parents débordés, leur petite fille cherche aussi sa place. Isolée, elle s'invente tout un monde imaginaire, et attire l'attention à l'école par son comportement. Le quotidien de Ryota se complique un peu plus lorsque son père fait un malaise et se retrouve dans le coma dans un hôpital de province : il renoue avec sa soeur et sa mère, deux autres fortes personnalités qui, comme lui, ne savent trop comment gérer cette situation. Dépêché pour se renseigner sur ce père aux pans de vie parfois méconnus, Ryota attérit dans une petite ville où il découvre qu'il y animait d'étranges visites.

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Going My Home est un drama d'ambiance à la saveur très particulière. Résolument intime, profondément humain, il se nourrit d'une écriture toute en subtilité et des petites intéractions qu'elle met en scène entre les personnages. La narration n'a pas son pareil pour capturer avec justesse des dynamiques familiales au sein desquelles le naturel semble être le maître-mot. Au cours de ce pilote, c'est tout particulièrement les relations entre Ryota, sa soeur et sa mère qui sont très bien mises en valeur. Le trio partage en effet quelques scènes, dépeintes avec une sincérité émotionnelle à fleur de peau, qui résonnent d'une authenticité assez unique. En effet, l'hospitalisation du père les rassemble bon gré mal gré, et, instantanément, revient la réalité de leurs rapports, avec toutes les nuances inhérentes aux sentiments humains : la tendresse comme les piques surgissent spontanément, tout comme les anecdotes du passé, au détour des conversations de ces personnes qui se connaissent par coeur.

Si les circonstances auraient pu conduire le drama sur une pente résolument dramatique, il n'en est pourtant rien : Going My Home garde résolument une tonalité légère. Cela explique en partie la chaleur humaine qui émane de l'ensemble et réchauffe le coeur du téléspectateur. De plus, le drama n'hésite pas non plus à distiller des petites touches d'humour introduites avec ce même naturel, sans jamais forcer les situations, à l'image du savoureux running gag sur la couleur des vêtements de Ryota à l'hôpital, tellement sombres que chacun lui demande s'il n'a pas pris une avance et ne s'est pas paré des couleurs du deuil alors que son père n'est pas encore mort.

De manière générale, le pilote de Going My Home prend résolument son temps, avec une approche presque contemplative. Sa construction narrative apparaît d'ailleurs originale pour la télévision, tant ces 1h40 pourraient s'apparenter à un long métrage. Le format du renzoku n'est exploité ici que de façon minimaliste : il faut attendre la toute fin de l'épisode pour voir infléchir ce récit d'instantanés et de tranches de vies, et permettre d'assister aux prémices d'une intrigue sur le plus long terme. Cette dernière ajoute d'ailleurs à l'étrangeté ambiante, avec l'introduction de créatures mythologiques, les kuna, qui vivraient dans la région du père de Ryota. S'apprêtant à osciller entre folklore fantastique et retranscriptions de relations humaines, l'univers ainsi posé, décalé à sa façon, est déjà un vrai délice, unique en son genre, dans lequel le téléspectateur s'immerge sans voir le temps passer. 

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Faisant déjà preuve d'une vraie personnalité sur le fond, Going My Home est tout aussi abouti sur la forme. La réalisation est soignée, à la fois proche des personnages, mais aussi capable de prendre du recul pour capturer, avec des plans plus larges, les scènes d'intéractions entre chaque protagoniste. La photographie reflète une certaine authenticité de l'approche choisie. La bande-son est également très agréable, contribuant à l'ambiance, avec une chanson du générique qui se détache déjà et semble parfaitement correspondre à l'atmosphère caractéristique et unique développée.

Enfin, ultime raison de découvrir Going My Home - et non des moindres -, le drama bénéficie d'un casting, alléchant sur le papier, et parfaitement à la hauteur à l'écran. Abe Hiroshi, dans un registre de père de famille faillible, remis en cause à l'occasion, fait des merveilles. Ses scènes avec YOU, qui incarne sa soeur, sont un délice dans ce premier épisode, l'actrice - que j'aime beaucoup également - retranscrivant bien l'ambivalence de son personnage. Yamaguchi Tomoko interprète sa femme, et ses quelques scènes sont tout aussi prometteuses. C'est en résumé un vrai casting cinq étoiles qui n'aurait pas pu être mieux sélectionné pour transposer à l'écran une telle histoire. On retrouve également parmi eux Miyazaki Aoi, Yasuda Ken, Arai Hirofumi, Bakarhythm, Natsuyagi Isao, Abe Sadao, Yoshiyuki Kazuko ou encore Nishida Toshiyuki.

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Bilan : Les séries trop attendues sont souvent source de déception. Il n'en est rien dans ce pilote où Going My Home réussit le tour de force de convaincre tout en permettant à son créateur de rester en tout point fidèle à sa réputation et à son univers. Pépite d'humanité et de subtilité, l'épisode propose 1h40 d'écriture fine et nuancée, rythmée par des instantanés de vie offrant des caractérisations à la sincérité bien réelle qui font toujours mouche. La pleine réappropriation du format télévisuel feuilletonnant reste à prouver sur la longueur, tout comme l'exploration d'un registre plus folklorique et fantastique. Mais il ne faut pas bouder son plaisir : le style est certes à part (et peut-être tout le monde n'y trouvera pas son compte), mais une telle immersion représente pour moi un délice qui se savoure.

Les amateurs de dramas japonais comme les familiers de l'oeuvre de Koreeda Hirokazu ne s'y tromperont pas. Tout comme tous les téléphages curieux qui voudront voir si cet univers trouve un écho en eux. Foncez.


NOTE : 8/10


Une bande-annonce (décalée) :

25/07/2012

(J-Drama) Tsukahara Bokuden : le portrait romancé d'un maître d'armes légendaire

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Restons au Japon en ce mercredi asiatique ! Etant donné mon inclinaison naturelle pour tout ce qui touche à l'historique et aux fictions en costumes, parmi mes résolutions de début d'année, figurait celle d'essayer de caser dans mes programmes un vrai jidaigeki. Jin peut certes être rapproché de ce genre, mais cela reste une histoire de voyage dans le temps qui démarre dans le présent. La cinquantaine d'épisodes qui compose un taiga étant trop volumineuse actuellement pour me lancer dans un tel investissement au long cours (même si, dès que j'ai un peu de temps, je compte bien me lancer dans Ryomaden - c'est un de mes challenges placé tout en haut de ma liste de sériephile !), j'ai donc surveillé les dramas plus courts. Il faut dire que ce n'est pas le type pour lequel des sous-titres sortent le plus fréquemment, mais j'ai quand même pu trouver une série adéquate : Tsukahara Bokuden. Elle a été diffusé à l'automne 2011 sur NHK (BS Premium). Elle se compose d'un total de sept épisodes, d'une quarantaine de minutes chacun (sauf le premier d'une durée de 70 minutes).

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Proposant une immersion dans le Japon médiéval, ce drama propose le récit romancé (avec certaines libertés prises) de la vie d'un maître d'armes légendaire : Tsukahara Bokuden. Né vers 1489, il est resté un des sabreurs les plus célèbres de l'Histoire du Japon. S'il a eu une longue vie (il est décédé en 1571, de mort naturelle), la série ne s'intéresse en réalité qu'à ses premiers pas dans la vie d'adulte et, surtout, aux épreuves qui vont permettre sa maturation progressive, jusqu'à faire de lui la figure combattante qui s'est imposée dans la mémoire collective.

Entraîné dès le plus jeune âge, une fois l'âge adulte atteint, ShinEmon (c'est sous ce nom que nous le connaîtrons durant la majeure partie du drama) demande à être autorisé à partir voyager à travers le Japon. Son but premier est le perfectionnement de ses techniques de combat, un art qu'il entend pouvoir parfaire en croisant des combattants rompus à d'autres styles. Mais l'objectif est aussi de répandre le nom de Kashima afin de redonner son éclat au sanctuaire shinto qui s'y trouve, puisque cette maîtrise du sabre est un don de la divinité qui y est révérée.

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Tsukahara Bokuden est un récit initiatique au sens strict du terme, avec les forces, mais aussi les limites de ce genre. La construction de ce drama semi-itinérant suit une évolution linéaire régulière, avec des épisodes respectant tous une structure très proche : une épreuve se présente au héros, et il va devoir la surmonter. Le plus souvent, elle se matérialise par un combat. La première moitié du drama permet à ShinEmon de se mesurer à des adversaires disposant de forces et d'atouts auquel il doit s'adapter (stratégie, armes...), améliorant par là-même ses propres techniques. Puis, à mesure qu'il maîtrise son art, c'est logiquement en lui-même qu'une autre bataille se lève et va devoir être gagner : ne pas se laisser entraîner par cette soif de sang, ce rush d'adrénaline qui le parcourt à chaque victoire. Il lui faut lutter pour rester fidèle à ses principes et à ses valeurs, sans s'écarter de sa ligne de conduite. Si le récit est fluide, le drama apparaît cependant très didactique dans ses développements, manquant de souffle, voire de tension en raison de ses issues prévisibles.

Pour autant, Tsukahara Bokuden reste plaisant à suivre justement parce qu'il met en scène un héros que, comme dans toute histoire initiatique, on a envie de voir grandir et mûrir. De plus, je ne suis pas restée insensible à l'immersion médiévale proposée - même si la vie du maître d'armes y est relatée avec plus ou moins de libertés (Pour en savoir plus / en anglais). Sans avoir de grands moyens, la série s'efforce cependant de bien retranscrire la codification de la société féodale d'alors, avec la place des maîtres d'armes. Elle fait également un effort de contextualisation intéressant pour évoquer une période troublée qui voit s'affronter de nombreux seigneurs locaux. ShinEmon se retrouve en effet entraîné dans des affrontements autour du pouvoir, et si, encore une fois, le drama peine à matérialiser une vraie tension, les échanges et les rapports de force fluctuants enrichissent le parcours personnel raconté. Enfin, une place importante est aussi accordée à la religion, avec les croyances qui rattachent l'art du combat à la divinité : en consacrant sa vie à cet art, le héros mène en parallèle une véritable quête spirituelle (particulièrement perceptible dans les derniers épisodes) qui aboutit à faire de lui le dépositaire du message de cette dernière.

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La réalisation est traditionnelle, un peu figée par moment, mais avec une belle photographie. Dans l'ensemble, elle sait mettre en valeur la reconstitution d'époque, notamment par quelques superbes plans qui nous immerge dans ce Japon médiéval avec efficacité. Il faut préciser que Tsukahara Bokuden n'est pas un drama d'action. Toutefois les combats y occupent bien une place centrale. Leur mise en scène donne un résultat plus mitigé : la vitesse d'exécution de certains affrontements - où un seul coup de sabre achève l'adversaire - impose au réalisateur d'essayer de les dramatiser en recourant à des ralentis - ce qui n'est pas toujours du plus convaincant. L'autre élément qui m'a marqué, c'est à quel point les combats paraissent "propres", et finalement très peu graphiques en terme de violence. Non que j'aille jusqu'à conseiller le responsable des effets spéciaux d'OCN (et ses chers jets d'hémoglobine) à la NHK, mais c'est vrai que le rendu est ici assez réservé (par rapport à mes derniers sageuk sud-coréens). A noter également un long générique introductif qui semble avoir pour thème l'harmonie avec la nature que j'ai trouvé très beau visuellement (et je vous l'ai découpé spécialement, 1ère vidéo ci-dessous).

Enfin, le casting s'en sort globalement bien. Sakai Masato (Legal High) interprète ShinEmon durant tout le drama, de la sortie de l'adolescence jusqu'à la maturité avec pour seule nuance marquant l'âge et l'expérience, l'évolution dans les postures du héros. Certes il a, au début, quelques expressions forcées qui sonnent faux (surtout pour souligner l'insouciance avec un sourire figé agaçant), mais j'ai été vite soulagée en constatant qu'il trouvait ensuite un juste équilibre très intéressant entre la distance qu'acquiert rapidement le héros et une humanité qu'il ne perd jamais et qui ressort plus fortement dans certaines scènes. S'il manque donc parfois un brin d'expressivité, il est plus que correct. A ses côtés, j'ai eu le plaisir de retrouver Kuriyama Chiaki (Atami no Sousakan), qui interprète sa soeur : restée à Kashima, on la voit assez peu, mais il n'y a rien à redire à ses scènes. On croise également dans ce drama Hira Takehiro, Kyono Kotomi, Nakamura Kinnosuke, Asaka Mayumi, Honda Hirotaro ou encore Nashima Toshiyuki.

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Bilan : Récit initiatique nous plongeant dans le Japon médiéval, Tsukahara Bokuden est un drama à la construction linéaire, assez basique et prévisible dans la progression par étapes qu'il offre à son personnage principal. Manquant un peu d'ambition sur ce point, il peine à insuffler une dramatisation et une tension qui auraient rendu l'ensemble plus marquant. Cependant l'immersion historique qu'il propose n'en reste pas moins intéressante. Efficace et sans temps mort, il se laisse donc suivre sans déplaisir, tout en nourrissant quelques regrets.

A réserver pour les amateurs du genre (ou pour les curieux souhaitant regarder un
jidaigeki de longueur raisonnable).


NOTE : 6,5/10


Le générique d'ouverture du drama :

La bande-annonce de la série :