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15/02/2012

(J-Drama / Pilote) Seinaru Kaibutsutachi : entre drama médical et thriller ambivalent

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Après trois semaines passées à s'intéresser à la saison actuelle en Corée du Sud, il est temps de repartir pour le Japon en ce mercredi asiatique. Je dois dire que cet hiver 2012 n'offre pas la programmation la plus enthousiasmante qui soit. A priori, peu de projets avaient retenu mon attention à la seule lecture des pitchs. Certains ne sont pas déplaisants, à l'image du pilote de Hungry, mais au-delà du concept de restaurant français, l'histoire est trop classique pour me convaincre de poursuivre plus avant. S'il faudra que je jette un oeil sur la comédie 13 say no hello work, je mise beaucoup sur Shokuzai, dont j'aurais sans doute l'occasion de vous parler la semaine prochaine. En attendant, je me suis permise une expérimentation, en tentant Seinaru Kaibutsutachi.

Il s'agit d'une expérience car, vous le savez,  je suis assez peu portée sur les séries médicales. Occidental ou asiatique, c'est un sujet que j'ai plutôt tendance à éviter. Mais ce drama semblait cependant avoir plus à offrir, avec un fil rouge assez sombre et quelques accents de thriller, qui ont aiguisé ma curiosité. Diffusé le jeudi soir sur TV Asahi depuis le mois de janvier 2012, Seinaru Kaibutsutachi est l'adaptation d'un roman de Len Kawahara. J'avoue rester pour le moment plutôt mitigée, mais j'ai quand même regardé sans trop de difficulté les trois premiers épisodes de la série.

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Seinaru Kaibutsutachi débute par le flashforward d'une tragédie se déroulant durant une nuit pluvieuse. Une jeune femme enceinte est laissée devant l'hôpital Okubo. Les médecins, parmi eux Shiba Kengo, interviennent rapidement, mais si l'enfant peut être sauvé, la mère s'enfonce inéxorablement. La voix off de Shiba Kengo nous explique alors que les évènements de ce soir-là ne doivent rien au hasard, et qu'ils font partie d'un plan... Le jeune chirurgien va alors nous ramèner un an plus tôt, pour nous expliquer les circonstances qui ont conduit à cette nuit-là.

A l'époque, il est un interne prometteur dans un hôpital universitaire prestigieux. Mais trop droit et n'arrivant pas à se faire une place dans ce milieu ambitieux et concurrentiel, il est "exilé" dans un hôpital excentré, celui d'Okubo, qui doit alors faire face à d'importantes difficultés financières. S'il y découvre un supérieur tyrannique, c'est l'infirmière en chef, Kasugai Yuka, qui retient son attention. La jeune femme, sur laquelle on sait très peu de choses à l'hôpital, fait preuve d'un sang froid et d'une détermination exemplaires. 

Dans le même temps, la soeur de cette dernière, Keiko, se marie avec Fuga Toshio, un responsable d'établissements scolaires issu d'une famille très aisée. Mais au cours de la cérémonie, la jeune femme, alors enceinte, fait une fausse couche. Pour sauver sa vie, elle doit subir une intervention chirurgicale qui la prive à jamais d'avoir un enfant. Profondément marquée, au contact permanent des enfants de par son travail, Keiko ne peut admettre d'oublier ses rêves de maternité. Elle se tourne vers sa soeur aînée pour lui demander de faire office de mère porteuse, une pratique interdite par la loi japonaise. Si Yuka refuse, les deux jeunes femmes vont finalement se tourner vers une connaissance de Keiko qui, elle, accepte. Mais les réelles motivations de chacun ne sont pas toujours celles que les apparences renvoient... 

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Seinaru Kaibutsutachi emprunte à plusieurs genres très différents : le thriller, le drama avec un héros redresseur de torts (ici dans le domaine médical), ou encore la tentative de portrait social en s'intéressant à toutes les classes, des plus aisées jusqu'aux plus pauvres qui viennent se faire soigner à l'hôpital. Sur le papier, l'ensemble s'annonce ambitieux, mais c'est peut-être là où se situe le premier problème de la série. A trop vouloir jouer sur tous les tableaux à la fois, elle finit par ne réussir à n'être totalement convaincante dans aucun de ses domaines.

En effet, au cours des premiers épisodes, on a un peu l'impression d'assister à plusieurs dramas construits en parallèle, passant de l'un à l'autre sans transition, mais dont la finalité et la tonalité sont presque sans rapport. Face à cette dispersion qui brouille la portée de l'histoire, une storyline parvient cependant à tirer son épingle du jeu : celle du suspense, introduit grâce au fil rouge central qui doit nous conduire à la nuit fatale. C'est elle qui peut permettre au drama de s'imposer à terme, et surtout de fidéliser le téléspectateur.

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Cependant, en attendant, le déséquilibre au sein des histoires des premiers épisodes se répercute également sur les personnages. Le versant le plus classiquement médical est exploré par Shiba Kengo, que l'on suit au sein de ce nouvel hôpital où il vient d'être affecté. Le jeune chirurgien conçoit son métier comme un quasi-sacerdoce. Appliqué, pleinement investi dans le sort de ses patients, il apparaît dans ce début de drama trop lisse par rapport à tout ce qui se joue autour de lui. Etant le narrateur de l'histoire, il nous annonce donc les dérapages/tragédies à venir, mais il souffre un peu du syndrome de l'observateur extérieur, trop fade par contraste avec les protagonistes de la trame principale. 

Ces derniers, par leurs ambivalences, certains non-dits ou incertitudes qui les entourent, interpellent et impliquent le téléspectateur. Car au-delà de l'enjeu représenté par la maternité, traitée comme un besoin tour à tour psychologique et social, Seinaru Kaibutsutachi semble s'orienter sur l'exploration de motivations plus sombres, sur ce que l'on peut être prêt à faire pour parvenir à ses fins. Dans ce registre, Kasugai Yuka, par le mystère qui l'entoure, s'impose progressivement comme la figure la plus intrigante, voire inquiétante. Et c'est grâce à eux que l'on finit par se laisser prendre à ce jeu des faux-semblants/fuyants, où chacun se cache et poursuit ses objectifs. 

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Sur la forme, Seinaru Kaibutsutachi  bénéficie d'une réalisation correcte, sans prendre de risque, ni faire preuve d'une réelle ambition. Le principal reproche que je lui adresserais serait lié à sa bande-son, qui, en se rappelant qu'il s'agit d'un thriller potentiellement tragique, dramatise certains passages à outrance, de manière grandiloquente et disproportionnée par rapport au reste de la tonalité du drama. Les Ave Maria de Schubert et autres morceaux de musique classique peuvent constituer une solide OST s'ils sont utilisés avec justesse, mais leur emploi dans Seinaru Kaibutsutachi  sonne souvent trop artificiel. Peut-être qu'au fur et à mesure que la tension s'accentuera, elles paraîtront plus opportunes.

Côté casting, enfin, chacun investit plutôt efficacement le registre dans lequel évolue son personnage. C'est sans doute Nakatani Miki (Keizoku, JIN) qui m'a fait la plus forte impression, mais elle dispose des atouts d'un rôle ambivalent à multiples facettes. Okada Masaki (Otomen) reste pour le moment dans un registre de jeune docteur entièrement dédié à son métier qui, sans surprise, lui va bien. Kato Ai (Best Friend) met un peu de temps à trouver ses marques, mais elle sait retranscrire la détresse et les illusions suite à la fausse couche. Sinon, ne levez pas les yeux au ciel, je vous promets que je n'avais pas fait attention au fait que Hasegawa Hiroki (Second Virgin, Suzuki Sensei, Kaseifu no Mita) figurait encore à l'affiche de ce drama ; à croire que le petit écran japonais est devenu trop petit (ou alors, il est vraiment partout). Parmi les autres rôles secondaires, on croise notamment Suzuki Anne, Omasa Aya, Katsumura Masanobu, Hirata Mitsuru, Kohinata Fumiyo ou encore Watanabe Ikkei. 

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Bilan : Seinaru Kaibutsutachi est un drama qui joue sur de multiples registres, de l'initatique au médical, en passant par le thriller. Le problème est que l'on passe les trois premiers épisodes à attendre impatiemment de voir se rejoindre l'ensemble, et à espérer que la tension monte d'un cran lorsque le récit sera devenu plus homogène. Car au-delà de son décor médical, du drame central qui l'occupe autour de la maternité, c'est avant tout pour ses accents de fiction à suspense qu'il retient l'attention. Il reste à espérer qu'au fil de la progression de l'intrigue, les différentes parties disjointes de Seinaru Kaibutsutachi ne formeront plus qu'une histoire. C'est qu'en dépit de ces inégalités - et d'un certain manque de subtilité dans l'écriture qui pénalise certains propos -, j'ai envie de connaître le fin mot de l'histoire !  


NOTE : 5,75/10 

18/01/2012

(J-Drama) Second Virgin : un drama troublant sur la confrontation des sentiments aux conventions sociales


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Avant de repartir, mercredi prochain, vers le petit écran sud-coréen de ces dernières semaines, je vous propose aujourd'hui un bilan de ma première série japonaise visionnée en 2012. Second Virgin s'était récemment invitée sur ma liste des dramas à voir suite à mon exploration de la filmographie de Hasegawa Hiroki (l'acteur n'ayant pas joué dans tant de séries que ça, l'objectif était pour une fois réalisable). Je ne pensais pas a priori la regarder de si tôt, mais un commentaire de Katzina, ainsi que la critique de Lynda l'an dernier, ont quelque peu précipité mon planning. Ce que je ne regrette absolument pas.

Comportant 10 épisodes de 45 minutes environ chacun, Second Virgin a été diffusé sur NHK, du 12 octobre au 14 décembre 2010. S'il a commencé avec de faibles audiences, le drama a peu à peu conquis un certain public, en dépit ou grâce (suivant les points de vue) aux controverses qu'ont pu susciter certaines scènes plutôt osées pour une série japonaise diffusée en prime-time. Un film a même été commandé et est sorti en septembre 2011 au Japon : il se déroule cinq ans après les faits relatés dans la série.

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Après s'être ouvert sur un flashforward assez dramatique qui laisse le sort d'un des personnages principaux en suspens, Second Virgin repart quelques années en arrière pour nous expliquer l'engrenage des évènements qui ont conduit à cette scène. Nakamura Rui est alors une femme d'affaires à succès qui fait partie de la direction d'une maison d'édition. Si sa vie professionnelle est une réussite, faisant preuve d'un sixième sens pour découvrir de nouveaux talents et publier les futurs best-stellers, sa vie personnelle est en revanche en ruine. Depuis son divorce, il y a des années, elle n'a plus connu de relation amoureuse, se consacrant entièrement à son métier, au point de faire élever son fils, désormais adulte, loin d'elle.

Par ses relations, elle rencontre un jour un jeune homme spécialisé dans la finance, Suzuki Kou. Ce dernier est animé d'une passion et d'une ambition qui retiennent son attention : il rêve de réformer les règles qui encadrent - et entravent à ses yeux - le marché japonais, pour en faire un concurrent direct aux pays voisins comme la Chine. Rui entreprend de lui faire écrire un livre que sa compagnie publiera. Au fil de leurs rencontres, quelque chose naît entre eux. Kou est pourtant marié, et a 17 ans de mois que Rui. Mais les conventions sociales s'effacent derrière la force des sentiments...

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S'intéressant à la nature et aux limites des relations humaines, le thème central de Second Virgin est celui de la confrontation des sentiments aux convenances imposées par la société. De manière récurrente, il éclaire et célèbre l'impuissance de chacun face à l'attachement et à l'amour qui peuvent naître sans crier gare d'une rencontre inattendue. Si la question de l'adultère restera la storyline principale, le drama dispose en plus de toute une galerie de personnages secondaires qui vont illustrer chacun à leur manière cette thématique relationnelle : les rapports du fils de Riu avec sa petite amie qui a quasiment l'âge de sa mère, ou encore le patron de Riu, gay, qui décide finalement de vivre avec celui qu'il aime, participent ainsi à l'exploration de ce sujet.

Pour autant, c'est bien la tonalité particulière conférée par le rapprochement de Riu et de Kou qui va faire l'originalité de ce drama. Une part de l'attrait de Second Virgin tient au frisson de l'interdit et au parfum sulfureux qui l'entourent, auxquels se mêle une constante ambivalence. Il surprend en effet par sa capacité à capturer l'intensité des émotions de chacun avec une retenue caractéristique des séries japonaises. Tout en mettant en scène la rigidité avec laquelle s'articulent des rapports sociaux très codifiés, a fortiori dans la sphère professionnelle, le drama joue habilement sur les contrastes, introduisant par intermittence des failles dans ce tableau trop policé : ce sont les scènes plutôt osées comme la première nuit ensemble de Rui et Kou, ou encore les soudaines confrontations durant lesquelles les masques tombent. Toutes ces brusques explosions de passion troublent justement du fait de leur caractère exceptionnel qui leur donne une amplitude et une portée supplémentaires.

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Si, derrière une apparence presque glacée, les étincelles de Second Virgin sont capables de toucher le téléspectateur, c'est aussi parce que l'autre thème sous-jacent de ce drama est celui de la recherche de soi, avec des personnages qui se découvrent eux-mêmes face à ces situations qu'ils n'avaient jamais envisagées. Ils doutent, tâtonnent, revoient leurs priorités. Cela permet de susciter une réelle empathie, qui n'est, une nouvelle fois, pas dénuée d'ambiguïté. Chaque personnage a ses failles, et il est impossible d'avoir une lecture manichéenne de la situation. Certes il est assez facile d'accompagner Nakamura Rui à la découverte des voies insoupçonnées par lesquelles son coeur s'exprime, mais cela reste un mariage qu'elle va briser. Quant à celui qui conquiert son amour, son égocentrisme et son ambition teintée d'arrogance sont à peine contrebalancées par cette énergie passionnée qui l'anime. C'est par les vulnérabilités que l'histoire fait naître en eux qu'ils s'humanisent. A leurs côtés, le personnage de Suzuki Marie restera le moins abouti et intéressant, longtemps trop binaire et sans nuance pour susciter la moindre compassion.

Au-delà de son exploration des relations humaines et sociales, la construction de Second Virgin n'est pas sans emprunter certains ingrédients plus proches d'un thriller. Si l'univers financier dans lequel évolue Kou restera toujours très abstrait, le flashforward ouvrant le premier épisode fait que l'on a conscience d'assister à un compte à rebours. Peu importe que les différents protagonistes semblent côtoyer un temps les sommets de leur domaine respectif et allier vie professionnelle et personnelle, le téléspectateur garde toujours à l'esprit que ce bonheur est éphémère. L'histoire n'est pas un aller-simple vers un happy end. Pour relater cet engrenage, le drama n'hésitera pas à jouer sur certains effets narratifs parfois assez grossiers, entre raccourcis et coïncidences directement inspirés du soap. Mais on pardonne au scénario ces défauts car l'enjeu est ailleurs. Éclairant les incertitude et volatilité amoureuses, Second Virgin nous plonge une mélancolie lancinante : son histoire n'est pas triste, c'est juste la vie et les limites qui lui sont inhérentes.

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Sur la forme, Second Virgin est un drama classique, avec une photographie typique du petit écran japonais - une alternance de teintes aux couleurs claires (bleuté, beige...). Si on retrouve une certaine tendance à la mise en scène un peu figée et théâtrale, il faut cependant noter que la série offrira aussi quelques passages intimistes qui, par contraste, marqueront encore plus le téléspectateur. Par ailleurs, le drama est accompagné d'une bande-son travaillée et plutôt originale, comme en témoigne l'utilisation de ce "bip-bip" qui en devient presque glaçant lorsque les personnages sont à la croisée des chemins et doivent faire des choix déterminants. Retentissent également des morceaux instrumentaux plus dynamiques qui suivent finalement parfaitement les hauts et les bas de chacun des protagonistes. Il s'agit par conséquent d'une série soignée qui, tout en restant classique, sait se construire une identité esthétique propre.

Enfin, Second Virgin bénéficie d'un intéressant casting, même si les performances du trio principal sont inégales. Suzuki Kyoka (Karei naru Ichizoku) est parfaite en femme d'affaires qui découvre soudainement la vulnérabilité que peuvent provoquer les sentiments. Hasegawa Hiroki (Suzuki Sensei, Kaseifu no Mita) est excellent dans ce registre ambigü de l'ambitieux qui réussit, mais qui se retrouve emporté par ses passions presque autodestructrices et finit par voir tout lui échapper. Je serais en revanche plus mitigée sur Fukada Kyoko (Karei naru Spy) : censé dépeindre un personnage rigide à l'évolution narrativement assez chaotique, elle peine à susciter la moindre empathie pour Marie, à la fois trop inexpressive et trop dans le sur-jeu quand il s'agit de manifester des émotions. A leurs côtés, on retrouve une galerie de seconds rôles très convaincants, parmi lesquels on croise Danta Yasunori ou encore Kusabue Mitsuko.

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Bilan : Drama intrigant et original sur le relationnel, Second Virgin fascine par son ambivalence. Si son scénario cède parfois à des facilités discutables, il réussit admirablement à capturer l'intensité et le trouble des sentiments qui l'animent. Sa dimension sulfureuse n'a rien de racôleur, mais permet au contraire de mieux souligner le contraste entre des individus guidés par leurs émotions et la rigidité d'une société codifiée qui préfèrerait les étouffer. S'il y a parfois comme un arrière-goût un peu désespéré dans ce drama, on y trouve aussi une force surprenante : il faut saisir la vie et les opportunités qu'elle procure. Second Virgin est en ce sens une vraie tranche de vie, avec ses contradictions et ses souffrances, mais aussi ses instants de bonheur à chérir.


NOTE : 7,75/10


Un teaser (du film) :

04/01/2012

(Bilan) Mon année sériephile 2011 au Japon

Double post en ce premier mercredi asiatique de 2012 ! Après un bilan de mon année 2011 devant le petit écran sud-coréen, j'ai envie de revenir sur un autre pays asiatique phare en terme de productions télévisées, le Japon. Car cette année aura été celle d'une redécouverte et réconciliation avec les j-dramas. Je n'en avais jamais regardé autant qu'en 2011. Il y a certes l'avantage d'un format plus court que les séries sud-coréennes ; mais surtout, ils sont un certain nombre à m'avoir vraiment marqué. Si j'ai toujours des difficultés avec plusieurs genres (notamment l'humour), je commence à mieux cerner ce qui peut me plaire (ou non) à la télévision japonaise et à trouver mes repères.

Par conséquent, même si le bilan qui suit est très incomplet (pour vous faire une meilleure idée sur ce sujet, je vous invite à consulter les références en la matière que sont les blogs respectifs de Katzina et de Kerydwen), il s'agit surtout de marquer le coup : en Asie, mon année 2011 aura quand même donné une part belle au Japon. Et c'est une très bonne nouvelle !

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Ils ont marqué 2011 : le top 3 des incontournables

Il faudra un jour que je prenne le temps de lui rédiger la review pleine de superlatifs qu'il mérite, mais JIN reste vraiment le grand drama de l'année. Par la richesse des thématiques abordées, la reconstitution historique d'une époque qu'il a permis, la solidité de ses intrigues et la consistance de son écriture, il s'impose avec cette deuxième saison une des séries incontournables de 2011.

Le second drama que je retiendrai a battu des records d'audience cet automne au Japon, franchissant la barre des 40% de part de marché pour son final. Kaseifu no Mita est une série qui m'a beaucoup surprise. En ouvrant la voie à une réflexion sur la famille, elle aura su habilement saupoudrer l'ensemble d'une pointe de mystère grâce à un personnage central très troublant. Un mélange des genres qui lui aura permis de se démarquer de manière très convaincante.

Enfin, le troisième drama qui mérite d'être cité, dans un genre encore une fois très différent, sera Shinya Shokudou. Plus qu'un simple food-drama, c'est une série qui relate avec justesse et sobriété, tout en laissant parfois place à beaucoup d'émotion, des tranches de vie ordinaires. Il s'adresse aux papilles gustatives, mais aussi à l'affectif d'un téléspectateur qui adopte vraiment ce restaurant de minuit dont il souhaiterait lui aussi pousser la porte.

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Les chaînes qui me parlent : NHK et WOWOW

S'il faut toujours se garder de faire des généralités dans les grilles des programmes, je me rends compte que malgré tout, si le synopsis compte, la chaîne de diffusion aussi. J'ai tendance à aller plus naturellement vers une série de NHK ou de WOWOW. Pour la première, c'est Gaiji Keisatsu, puis Hagetaka qui avaient initié ce mouvement l'an passé. Cette année, Kurumi no Heya ou encore Last Money ~ Ai no Nedan n'ont fait que confirmer que cet éclairage toujours très sobre du Japon, avec une dimension souvent sociale, était ce que je recherchais. Sur le câble, c'est ce chef d'oeuvre qu'est Soratobu Taiya, rattrapé en mai, qui aura été sans doute le j-drama contemporain le plus marquant visionné en 2011 (il date de 2008). Puis Marks no Yama m'aura pareillement prouvé que WOWOW maîtrise les codes du thriller, avec toujours une volonté de dépeindre un certain versant de la société japonaise. Mais je vous rassure : j'ai bien conscience que l'on trouve des oeuvres tout aussi intéressantes sur les autres chaînes, un tanpatsu comme Hei no Naka no Chuugakkou, sur l'enseignement en milieu carcéral l'a bien prouvé.

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Les genres avec lesquels j'entretiens des rapports ambivalents : les high school dramas et les comédies

La télévision japonaise s'intéresse toujours beaucoup au lycée, et n'aime rien tant que d'y parachuter des enseignants, à la profession parfois sans rapport, et aux méthodes plus ou moins expérimentales. Après avoir été initiée aux séries asiatiques avec les high school dramas japonais, j'ai longtemps été allergique à ce genre, refusant de remettre un pied dans un établissement scolaire. Et puis, cette année, c'est l'affiche d'un drama qui a retenu mon attention : celle de Suzuki Sensei. En me renseignant, j'ai vu que le scénariste était celui de Gaiji Keisatsu. Il ne m'en a pas fallu plus pour me lancer. Je me suis retrouvée devant un j-drama intéressant, très peu fantaisiste ou idéaliste, avec une volonté de réalisme tant du côté des enseignants que des élèves. Les sous-titres ne semblent malheureusement pas vouloir sortir au-delà du cinquième épisode, mais gardons foi !

Un autre genre qui ne manque pas à la télévision japonaise et avec lequel j'ai souvent des difficultés, ce sont les comédies. Mon incapacité à adhérer à Don Quixote l'aura encore une fois prouvé. Mais cette année, j'ai eu aussi une bien belle surprise devant Yuusha Yushihiko to Maou no Shiro : il s'agit d'une parodie délirante dans l'univers des jeux de rôle qui m'aura fait rire comme rarement. Et puis, dans un autre registre, les comédies policières auront également su faire mouche : BOSS a été un divertissement dynamique et sympathique que j'ai beaucoup aimé, tandis que Meitantei no Okite et son approche décalée du genre policier a aussi été une bien belle découverte.

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Le genre que j'aime toujours, peu importe le pays : l'historique

Les dramas historiques japonais restent pour moi une terre inexplorée. A l'exception notable de JIN, c'est surtout au XXe siècle que je me suis intéressée en 2011. Fumou Chitai, qui dépeint le redressement du Japon et de son héros après la Seconde Guerre Mondiale, aura été, par sa richesse et sa qualité, une vraie claque téléphagique. Une révélation. Des tanpatsu comme Hotaru no Haka (Le tombeau des lucioles) ou encore Ryuuten no Ouchi - Saigo no Koutei (Princess Hiro) auront permis de compléter cette plongée dans le milieu du XXe siècle.

La prochaine étape, logique, serait de remonter encore le temps : je caresse le projet depuis longtemps de me lancer dans un taïga, Ryomaden étant tout indiqué, mais le nombre d'épisodes, pour l'instant, me fait toujours hésiter.

 

***


QUELQUES INSTANTANES CHOISIS

Les effets spéciaux les plus marquants de l'année :

Quand vous ne disposez d'aucun budget et que vous devez faire une série de fantasy, il y a plusieurs solutions. Soit vous bricolez malgré tout des FX chancelants, soit vous prenez parti de votre manque de moyens et décider de l'exploiter... C'est ce qu'a réussi Yuusha Yushihiko to Maou no Shiro.

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Il y a de nombreuses raisons qui expliquent pourquoi ce drama a su me faire littéralement pleurer de rire devant mon petit écran.


Le drama le plus goûteux :

Vous avez déjà senti vos papilles frétiller devant un plat montré à l'écran, presque pu sentir l'odeur embaumant la pièce où cette viande et ces légumes cuisent, ressenti une irrésistible envie de vous mettre au fourneau pour exécuter la recette de cuisine sur laquelle l'épisode se conclut ? Et bien Shinya Shokudou, c'est tout ça, et beaucoup plus encore !

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Le drama avec les plus beaux paysages :

On peut sans doute adresser un certain nombre de reproches à Nankyoku Tairiku (je n'ai vu que le pilote à ce jour, donc je me garderai de tout jugement définitif), mais certainement pas le dépaysement occasionné dans cet espace enneigé qu'est l'Antarctique.

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Le professeur de l'année :

Il est une des raisons pour laquelle Suzuki Sensei a retenu mon attention. Certes, vous allez objecter qu'Akira Suzuki développe quand même des fantasmes très suggestifs sur une de ses élèves, qu'il soigne si bien sa popularité auprès des lycéens qu'il écoeure certains de ses collègues qui ne peuvent rivaliser... Mais malgré tout, il reste un prof sincèrement attentionné. Peut-être est-ce d'ailleurs son humanité, et la faillibilité qu'on perçoit, qui font justement sa force.

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Jusqu'au mois d'octobre, je n'avais jamais entendu parler de Hasegawa Hiroki (aussi à l'affiche de Kaseifu no Mita). A l'avenir, je surveillerai d'un oeil plus attentif sa filmographie.


La guest-star sud-coréenne de l'année :

Parce que je ne changerais quand même jamais complètement...

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Lee Byung Hun, dans Gaikoukan Kuroda Kousaku


MON TOP 3 des meilleures chansons utilisées en ending :

Si je suis longtemps restée assez réservée face aux OST des j-dramas, disons-le sans détour, 2011 aura été l'année des révélations ! C'est donc l'heure de faire amende honorable pour leur rendre hommage. En terme de composition uniquement instrumentale, des dramas comme Kurumi no Heya se sont révélés très originaux. Mais, surtout, les coups de coeur se sont vraiment enchaînés sur les chansons utilisées en générique d'ouverture ou de clôture. Les dramas ont toujours été mon vecteur principal de découvertures musicales, mais, cette année, dans mon lecteur mp3, les artistes nouvellement découverts furent principalement issus de séries japonaises.

En fait, assez logiquement si on suit mes goûts musicaux généraux, ce que j'ai exploré, c'est le j-rock. Les albums de Superfly auront tourné en boucle grâce aux deux saisons de BOSS, ceux de ROCK'A'TRENCH grâce au générique d'ouverture de Suzuki Sensei... C'est donc avec beaucoup de difficultés que j'ai sélectionné 3 chansons parmi toutes celles qui ont marqué 2011.

3. "Beautiful Days", par SpyAir (Don Quixote)


2. "Ginga no Hoshikuzu", par Keisuke Kuwata (Control ~ Hanzai Shinri Sousa)


1. "Yasashiku Naritai", par Kazuyoshi Saito (Kaseifu no Mita)

 
 
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Les perspectives pour 2012 :

La bonne nouvelle, c'est que je n'ai jamais eu autant envie de m'investir dans des j-dramas qu'en 2011, et 2012 semble destinée à s'inscrire dans cette continuité. S'il est certain que je n'aurais jamais la même fascination que je peux éprouver pour la Corée du Sud et ses productions culturelles au sens large, sur un plan strictement télévisuel (et même un peu musical apparemment), le petit écran japonais propose des fictions qui peuvent me correspondre, dans des genres très différents. Donc au programme de 2012, j'ai envie de poursuivre ces découvertes, aussi bien de fictions récentes que de dramas plus anciens. En espérant y trouver le même bonheur qu'a été pour moi cette année 2011 au Japon !

07/12/2011

(J-Drama / SP) Hotaru no Haka (Le tombeau des lucioles) : une tragédie de guerre bouleversante

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Hotaru no Haka, ou Le tombeau des lucioles en version française, est à l'origine un roman semi-autobiographique de l'écrivain japonais, Nosaka Akiyuki, qui a été publié en 1967. C'est la magistrale adaptation proposée par les studios Ghibli en 1988 qui l'a popularisé et fait connaître à travers le monde. Au XXIe siècle, ce sont des adaptations live qui ont, par la suite, été réalisées. Il y a eu un film sorti au cinéma en 2008, et puis, à la télévision, le tanpatsu dont je vais vous parler aujourd'hui. Cette version de Hotaru no Haka a été diffusée le 1er novembre 2005 sur la chaîne NTV, dans le cadre des commémorations pour les 60 ans de la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Elle dure 2h30.

Cela faisait longtemps que ce drama figurait dans mon dossier à voir. Le chef d'oeuvre qu'est le film d'animation m'a, comme tout un chacun, profondément marqué. Seulement aussi indispensable que soit son visionnage, c'est aussi une oeuvre dont on ne ressort pas indemne ; c'est le DVD qu'il faut avoir dans sa DVDthèque, mais que l'on osera regarder qu'une seule fois. Seulement, un samedi soir, la curiosité l'a finalement emporté. Je ne vous surprendrais donc pas en vous disant en préambule que Hotaru no Haka est sans conteste le drama le plus éprouvant qu'il m'ait été donné de voir. Se réappropriant pleinement l'histoire originelle, il y apporte en plus une perspective supplémentaire qui va constituer une vraie valeur ajoutée par rapport au film d'animation.

[Si la critique ci-dessous se concentre sur le tanpatsu, quelques parallèles sont faits avec le film d'animation.]

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De nos jours, au Japon, une vieille dame retrouve en rangeant les affaires de sa mère une ancienne boîte rouge de bonbons, à moitié rouillée. Face à sa petite-fille qui la questionne, elle entrouvre pour la première fois ses douloureuses mémoires de la Seconde Guerre Mondiale, entreprenant de raconter comment elle et sa famille ont survécu... et l'histoire de cette petite boîte métalisée.

Hotaru no Haka nous replonge alors dans les dernières années de la guerre, débutant en 1943, dans la ville de Kobe. Enfants d'un colonel de la marine, Seita, jeune adolescent, et Setsuko, encore petite fille, ont jusqu'à présent peu souffert des restrictions de la guerre. Mais le Japon perd du terrain face aux Etats-Unis et les bombardements se font de plus en plus fréquents. Leur père parti en mer, Seita s'efforce d'assumer les responsabilités de chef de famille, prenant notamment soin de leur mère qui souffre du coeur. Cette dernière renoue par hasard avec une cousine, Sawano Hizako, déplacée de Tokyo, et dont le mari est lui-même parti pour l'armée. Les deux femmes se promettent de s'entraider, pour assurer l'avenir de leurs enfants respectifs, si quelque chose devait arriver.

Or durant le printemps 1945, Kobe subit d'importantes frappes des B-29 américains qui larguent sur la ville des bombes à incendie. Au cours d'un de ces raids, le quartier où vivaient Seita et sa famille est entièrement détruit par le feu. Leur mère est mortellement brûlée durant cette même attaque. Se retrouvant soudain sans endroit où aller, ni figure tutélaire vers laquelle se tourner, les deux enfants sont recueillis par leur tante Hizako, celle-ci respectant ainsi la promesse faite à leur mère. Mais à mesure que la situation du pays empire, la nourriture, rationnée, se fait de plus en plus rare... Bientôt la présence de Seita et de Setsuko devient indésirable.

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Il est des récits dont le téléspectateur ne ressort pas indemne. Des récits qui vous hantent longtemps après avoir éteint votre téléviseur. Hotaru no Haka est assurément de ceux-là. C'est l'histoire d'une, ou plutôt de plusieurs, tragédies de guerre qui dévoilent un pan sombre de la nature humaine qu'il est toujours difficile de voir exposé au grand jour. Fidèle à l'esprit de l'histoire originelle, ce tanpatsu en restitue toute l'intensité dramatique, avec une force et une intensité auxquelles peu de fictions parviennent. La sobriété et la retenue admirables de la mise en scène font ressortir une émotion la plus brute qui soit. Disposant d'une écriture remarquable de nuances et de sobriété, le drama va ainsi prendre la pleine mesure de la tragédie poignante qu'il relate. 

Car Hotaru no Haka, c'est tout d'abord l'histoire de deux enfants rattrapés puis isolés par la guerre, se retrouvant soudain face à un univers hostile où ils n'ont plus leur place. Trahis par la collectivité à laquelle ils sont censés appartenir, ils vont être livrés à eux-mêmes en des temps difficiles où seule la solidarité aurait pu leur permettre de s'en sortir. Perdus par les circonstances, les personnages de Seita et de Setsuko reflètent une double symbolique. Non seulement ils représentent la vulnérabilité des plus jeunes en ces périodes troublées, premières victimes de conflits dans lesquels ils n'ont aucune part, mais ils illustrent aussi combien se fragilise le lien social en des temps de repli instinctif sur soi.

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S'il a pour fil rouge les destinées de Seita et de Setsuko, l'intérêt de Hotaru no Haka ne se limite pas à ce seul récit. Le drama dresse en effet un portrait soigné du Japon des dernières années - et mois - de la guerre, se concentrant tout particulièrement sur l'été 1945, du bombardement fatal sur Kobe de juin jusqu'au discours de reddition de l'Empereur en août. Nous racontant la guerre du point de vue des civils, ce tanpatsu explore toutes les facettes de son sujet de façon plus développée que le film d'animation, prenant le temps de s'arrêter sur l'environnement dans lequel évoluent ses personnages principaux. Est ainsi proposé un instantané très riche du Japon de cette époque.

Parfaitement maîtrisée, la narration de Hotaru no Haka lui permet de dire beaucoup de choses en peu de mots. Parmi les thèmes abordés, on retrouve logiquement des sujets qui sont communs aux fictions de guerre, comme les difficultés liées au rationnement, ou encore la peur constante de la lettre qui viendrait annoncer la mort au combat de l'être cher parti au-delà des mers. Mais il y a aussi des éléments propres au pays du Soleil Levant qui permettent d'en apprendre plus sur le Japon de cette époque, telle la question de la place de l'armée au sein de la société ou encore le statut de l'Empereur. Sans trop s'attarder, le drama donne cependant des clés de compréhension très intéressantes, qui confère au récit une solide consistance.

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Cependant, la réelle valeur ajoutée de Hotaru no Haka, par rapport au film d'animation des studios Ghibli, réside dans l'ajout d'une perspective supplémentaire pour raconter l'histoire de Seita et de Setsuko : celle de la tante, et indirectement celle de sa fille, adolescente de l'âge de Seita à l'époque, et qui est la narratrice du drama. Cela permet au récit de dépasser le simple drame personnel des deux enfants, aussi déchirant qu'il soit, pour éclairer une autre problématique centrale : ce que l'on est prêt à faire pour survivre et des sacrifices parfois nécessaires pour y parvenir. Le tanpatsu montre ainsi de façon particulièrement glaciale à quel point la guerre et les circonstances peuvent endurcir progressivement quelqu'un.

Hisako est en effet une femme, initialement généreuse, qui se retrouve face à un choix impossible imposé par les circonstances. Elle n'a pas les moyens de nourrir deux bouches supplémentaires. Tenter d'accueillir plus longtemps Seita et Setsuko pourrait les perdre tous, à commencer par ses plus fragiles enfants. La réussite du drama tient ici dans le portrait nuancé qui est fait de la tante. On perçoit cette part d'humanité qu'elle abandonne progressivement, en conscience, en décidant de revoir l'ordre de ses priorités et de ses principes. La mort de son mari sera l'évènement déclencheur la décidant à tout mettre en oeuvre pour sauver le reste de sa famille. A ce titre, le fait que le récit soit rapporté du point de vue de sa fille, soixante ans après, donne à l'ensemble une dimension encore plus forte ; comme cette dernière le dit en fin de drama, cette boîte de bonbons qui contient les cendres de Setsuko - et que Hisako avait, elle-même, offerte en d'autres temps à la petite fille - représente le rappel - douloureux et nécessaire - du prix de la survie. Hisako l'avait conservée pour ne pas oublier. 

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Solide et aboutie sur le fond, c'est la forme qui va être le point le plus perfectible de Hotaru no Haka. Sa principale limite est d'ordre budgétaire : la reconstitution des bombardements, de Kobe incendié et des ruines laissées détonnent à plusieurs reprises dans l'ambiance générale (surtout une des premières scènes, où l'incrustation sur fond vert bloque un instant le téléspectateur). Cependant ces quelques éléments ne doivent pas occulter les efforts faits par une caméra qui sait habilement capturer les émotions et non-dits des situations dont elle est le témoin. Le drama va aussi particulièrement bien réussir à retranscrire cette ambiance si particulière conférée par les lucioles aux environs du lac. Par ailleurs, Hotaru no Haka dispose également d'une bande-son souvent émouvante, où le piano, instrument prédominant, respecte parfaitement la tonalité de l'histoire. La justesse d'utilisation de ces musiques se retrouve jusque dans l'utilisation des silences, passages où la sobriété l'emporte opportunément.

Enfin, Hotaru no Haka bénéficie d'un excellent casting. La jeune Sasaki Mao incarne une Setsuko admirable de fraîcheur et de spontanéité qui correspond parfaitement à son personnage ; elle n'en brisera que plus douloureusement le coeur du téléspectateur. Ishida Hoshi joue son frère, essayant désespérant d'agir en homme responsable, mais qui reste un adolescent trop fier ne connaissant encore rien à la vie. Leur tante est superbement jouée par Matsushima Nanako, actuellement à l'affiche du drama de cet automne 2011 au Japon, l'excellent Kaseifu no Mita. L'actrice retranscrit ici une perte d'humanité à la fois glaçante et poignante. A leurs côtés, on retrouve également une galerie de seconds rôles convaincants, tels Ihara Tsuyoshi, Inoue Mao, Kaname Jun, Fukuda Mayuko, Iihara Narumi, Horie Shota ou encore Namase Katsuhisa.

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Bilan : Parfaitement maîtrisé sur le plan narratif, Hotaru no Haka est tanpatsu très riche, mais aussi très éprouvant, dont on ne ressort pas indemne. Drame bouleversant et intense qui marque émotionnellement le téléspectateur, c'est également un récit de guerre intéressant qui évoque la situation des civils et s'attarde plus particulièrement sur le prix - parfois si lourd - de la survie individuelle. Oeuvre pesante, teintée d'une amertume parfois difficilement soutenable, elle reste aussi un rappel important que les victimes des conflits ne sont pas seulement celles qui trouveront la mort au front. Admirable de sobriété et de retenue, ce drama réussit parfaitement à prendre la mesure de son sujet si difficile, les évidentes limites formelles ne venant pas remettre en cause l'appréciation globale.

En raison de sa qualité d'ensemble, Hotaru no Haka est incontestablement une adaptation à découvrir. Elle devrait logiquement plaire aux personnes ayant apprécié le film d'animation, puisqu'elle dispose d'une valeur ajoutée non négligeable. Cependant il s'agit d'un visionnage difficile, dont il faut avoir conscience avant de lancer le drama.


NOTE : 9/10


Un MV (avec la chanson de clôture et des images de l'ensemble du tanpatsu) :

30/11/2011

(J-Drama) Kurumi no Heya : questionnements existentiels sur l'ambivalence des relations humaines

 
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L'alternance Corée du Sud/Japon se poursuit en ce mercredi asiatique, avec un retour au pays du Soleil Levant pour dresser le bilan d'une série estivale de cette année. Si actuellement, un drama comme Kaseifu no Mita replace au centre du petit écran japonais une thématique familiale en évolution, exposant questionnements et doutes, Kurumi no Heya aborde ce même sujet avec une approche plus classique - la série se déroule dans les années 80 -, mais en réussissant cependant à trouver sa propre identité dans ce genre.

Diffusée sur NHK du 26 juillet au 30 août 2011, dans la case horaire du mardi soir à 22 heures, Kurumi no Heya comporte 6 épisodes d'une cinquantaine de minutes chacun. L'histoire est basée sur un roman de Mukuda Kuniko. Présentant un récit solide, la série va s'attacher à explorer méthodiquement toutes les approches d'une thématique familiale souvent douloureuse, mais qui demeure cependant une fondation au coeur des relations humaines.

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Kurumi no Heya se déroule à Tokyo dans les années 80. Tout bascule dans la famille Mitamura lorsque le père de famille, Tadashi, disparaît du jour au lendemain sans laisser ni trace, ni adresse. Cadre jusqu'alors sans histoire, il venait d'être renvoyé de son travail et avait préféré taire sa situation professionnelle à ses proches. Les semaines passent, l'inquiétude se change en pessimisme et en fatalisme chez la mère et les quatre enfants, tous jeunes adultes. Cependant, à force de persuasion, la cadette des filles, Momoko, parvient à obtenir d'un ancien collègue de son père la vérité : ayant comme tourné la page de sa vie de famille, son père vit désormais avec une autre femme.

Plus que la disparition, c'est le choc de la révélation sur la nouvelle vie de leur père qui va faire vaciller la famille. Tandis que leur mère peine à faire face, se questionnant sur ses erreurs, Momoko s'impose de nouvelles responsabilités, prenant la place de son père pour subvenir financièrement aux besoins de la maisonnée, mais aussi pour assumer les tâches domestiques avec une mère en retrait. Seulement quelque chose paraît désormais irrémédiablement cassé, comme si toutes les certitudes que chacun pouvait avoir sur la vie avaient soudain volé en éclat. L'aînée, Sakura, doute sur la viabilité de son mariage, Yoko s'invente une famille idéale auprès de son prétendant, tandis que le plus jeune fils, en réaction contre son père, abandonne ses projets d'études, souhaitant marquer sa différence.

Kurumi no Heya va ainsi nous faire vivre ces quelques mois de crise existentielle qui vont forcer la famille Mitamura à remettre en ordre ses priorités. Entre voies du coeur et responsabilités, chacun se retrouve alors à un tournant décisif pour son avenir...

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Derrière ses allures de drame familial, c'est plus généralement sur les relations humaines et leurs ambivalences que Kurumi no Heya nous interroge. S'appliquant à éclairer toutes les facettes de ce thème central qu'est la famille, la série s'intéresse à ce qui la fonde mais aussi à ses contradictions. Elle peut en effet aussi bien apparaître comme un soutien inconditionnel indispensable, que comme un poids étouffant qu'il faut fuir. A travers une galerie de portraits qui gagnent en consistance et en nuances au fil des épisodes, le drama souligne les tensions permanentes, parfois opposées, qui parcourent ces rapports humains. Si les problèmes des couples resteront au coeur de l'histoire, leur traitement diverge selon les personnes concernées. Dévoilant les dynamiques à l'oeuvre au-delà des apparences faussement policées, la série montre des protagonistes confrontés à des arbitrages constants : entre affection et habitude, dépendance et responsabilité... C'est un entremêlement ambigu, souvent touchant, des voies du coeur et de la raison qui est mis en scène.

Pour enrichir sa réflexion, Kurumi no Heya a également un autre atout : elle se déroule dans les années 80. En mettant habilement à profit son cadre, elle propose un éclairage sur la société japonaise d'alors et ses mutations en cours. Nous nous situons avant la bulle spéculative et la crise économique qui marquera la fin du XXe siècle. La série apparaît placée sous le signe de la stabilité, ou du moins de son illusion. C'est le cas non seulement sur le plan familial, où le modèle traditionnel est encore profondément ancré, mais aussi sur le plan économique, avec le rôle du père se définissant par son travail. Cependant les fissures sont déjà là. Ce n'est pas un hasard si le renvoi du mari est l'évènement déclencheur. Brusquement, la figure patriarchale faisant défaut, c'est tout l'équilibre familial qui est remis en cause. S'ensuit l'expression des doutes de chacun, soulevant des problématiques existentielles.

Kurumi no Heya restera cependant jusqu'au bout fidèle au parfum nostalgique qui en émane. Si elle pointe les limites du modèle familial exposé et de ses exigences, elle ne le brisera pourtant pas. Le propos n'est pas neutre : en 2011, utiliser ce cadre des 80s' est aussi une façon de rappeler les fondements des liens sociaux et familiaux, sans pour autant verser dans une quelconque idéalisation, ou moralisation.

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Si Kurumi no Heya traite habilement de ces problématiques humaines, l'attrait que la série exerce sur le téléspectateur tient également beaucoup au souffle qui la parcourt. Non seulement elle bénéficie d'une construction narrative très bien maîtrisée, jusqu'à ses fins d'épisodes en forme de cliffhanger qui aiguisent la curiosité, mais en plus, elle trouve une justesse de ton à saluer. La lecture du synopsis ne laissait guère de doute sur le genre dramatique qui allait être investi : l'implosion d'une famille n'est pas un sujet gai. Pourtant une des grandes réussites du drama va être de savoir éviter l'écueil d'un pathos trop pesant où la part de mélodrama aurait déstabilisé ou éclipsé la consistance de l'histoire. Au contraire, il surprend par la dynamique irrésistible qui le traverse, incarnée par un personnage principal fort, Momoko, auquel le téléspectateur s'attache instinctivement. Au-delà des sacrifices que la jeune femme est prête à faire pour sa famille, ce qui marquera surtout, c'est sa capacité à toujours aller de l'avant, envers et contre tout. Il émane d'elle une vitalité constante qui restera le trait d'union le plus certain entre tous les membres de sa famille.

Cette force sous-jacente se perçoit aussi dans la dimension plus émotionnelle que développe la série. Certes le téléspectateur ne peut rester insensible à ce récit souvent poignant. Si le drama fait toujours preuve de beaucoup de sobriété et d'une retenue assumée, le visionnage reste éprouvant devant la force de certaines scènes de confrontation. Pour autant, comme un écho à l'ambiguïté des relations dépeintes, la tonalité conserve une part de légèreté. Car les difficultés ont un apport majeur : elles révèlent la valeur et l'importance de choses que l'on considérait jusqu'alors comme des acquis. Les personnages vont alors chérir plus précieusement encore les quelques moments de répit, savourant ces instants où l'avenir semble soudain s'éclaircir et où les sentiments renaissent. C'est pourquoi l'histoire n'est pas triste ; c'est un récit de vie qui, au gré des épreuves, fortifie ses protagonistes, leur permettant de s'interroger sur leurs priorités. C'est sans doute pour cela que le téléspectateur sort du visionnage de Kurumi no Heya tout aussi rasséréné.

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Solide sur le fond, Kurumi no Heya va en plus se construire une ambiance très soignée sur la forme. Si la reconstitution des années 80 reste minimaliste, surtout identifiable grâce à la technologie d'époque, en revanche, c'est par sa bande-son que ce drama se démarque. Non pas qu'il reprenne des morceaux d'époque, mais il va bâtir un parfum relativement intemporel en recourant à des musiques plutôt traditionnelles. De manière ainsi originale, renforçant sans doute la fibre nostalgique qu'elle peut réveiller chez le téléspectateur, toute la série est rythmée par des instrumentaux, qui accompagnent la narration et soulignent les passages les plus intenses. C'est un parti pris recherchant volontairement la simplicité, accentué par le choix de la chanson douce et mélancolique qui referme les épisodes. Tout cela contribue à construire l'atmosphère de ce drama et à lui donner une identité propre.

Enfin, Kurumi no Heya bénéficie d'un casting appréciable. C'est sur les épaules de Matsushita Nao que repose une partie de la dynamique de la série, la jeune femme étant celle qui prend les rênes de la famille lorsque son père fait défaut. J'aime bien cette actrice qui fait toujours preuve de beaucoup d'énergie et que j'avais appréciée en début d'année dans Control ~Hanzai Shinri Sousa. A ses côtés, on retrouve une distribution homogène, au sein de laquelle on croise notamment Takeshita Keiko (Saka no Ue no Kumo), Kanie Keizo (Ryomaden), Igawa Haruka (Freeter), Seto Koji (Otomen), Harada Taizo (Atsu-Hime), Usuda Asami (Tokyo DOGS), Nishida Naomi ou encore Equchi Noriko.

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Bilan : Histoire familiale aux thématiques classiques mais consistantes, Kurumi no Heya est un drama intéressant qui marque par sa capacité à éclairer toute l'ambivalence des relations humaines, en essayant de réfléchir à ce qui fonde une famille. Poignante et touchante à l'occasion, mais jamais larmoyante, la série trouve le juste équilibre grâce à la dynamique inébranlable qui la traverse, admirablement portée par le personnage de Momoko. L'immersion dans les années 80 apporte en plus une distance par rapport au portrait proposé, permettant l'introduction d'une touche de nostalgie qui est renforcée par la bande-son originale et très travaillée qui accompagne la série. A découvrir.


NOTE : 7,5/10