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20/05/2011

(UK) Doctor Who, season 6, episode 4 : The Doctor's Wife

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Basé sur un scénario signé de l'écrivain britannique Neil Gaiman, ce quatrième épisode avait beaucoup fait couler d'encre, et c'est peu dire qu'il était attendu après la parenthèse à thématique pirate de la semaine dernière. L'équilibre entre aventure et mythologie allait-il être cette fois véritablement au rendez-vous ? Et bien, le téléspectateur peut être pleinement satisfait de The Doctor's Wife : il trouve le juste équilibre entre une exploration mythologique touchant à l'âme de la série et une aventure sombre et débridée qui donne du rythme à l'ensemble. De quoi réconcilier tous les publics devant le petit écran, et moi la première.

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Alors que le Tardis est en plein vol dans le vide de l'espace, notre trio voit arriver une bien étrange boîte, qui s'avère être en réalité un message de détresse émanant de rien moins qu'un... Time Lord. Elle fait soudain naître comme un espoir fou, déraisonnable : et si, quelque part, un Time Lord avait survécu ? Il n'en faut évidemment pas plus pour que le Docteur mette le cap sur l'origine du signal, laquelle se trouve au-delà et par-delà l'univers connu, qu'une métaphore savonneuse ne permettra pas vraiment d'expliciter à l'esprit rationnel du téléspectateur, mais au sujet de laquelle on se formalisera peu.

Ils atterrissent sur un gros rocher du bout de l'existence, astéroïde-planétoïde non identifié, dont le décor, semblable à une décharge inter-galactique correspond parfaitement à la façon dont notre imaginaire pourrait concevoir de tels endroits. A leur arrivée, le Tardis semble soudain se vider de son énergie, toute lumière éteinte, comme privé de vie. Coincé sur place pour quelques heures au moins, notre trio rencontre les quelques habitants, tous aussi improbables, de cet astéroïde... vivant. C'est en particulier une jeune femme délurée, sautant littéralement sur le Docteur, qui retient leur attention un tantînet perplexe. D'où vient donc le message ? Est-ce un piège ou peut-on vraiment espérer trouver un Time Lord perdu dans ce cadre post-civilisationnel ?

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La réussite et tout le charme de The Doctor's Wife tiennent autant à son ambition mythologique qui sert de base à son histoire, qu'à l'émotionnel finissant par l'emporter sur une aventure presque éclipsée, en intérêt comme en intensité. Le titre est d'ailleurs parfaitement révélateur. En effet, l'épisode va explorer un des fondements de la série, à la fois central, incontournable, mais pourtant à peine effleuré dans l'univers Who-ien (du moins depuis 2005) : les mystères du Tardis. Forcément, la thématique est chère au téléspectateur, sujet à la fois familier et pourtant inconnu. Si on mesure bien cette faculté qu'a le vaisseau de toujours conduire le Docteur là où ses services sont requis, mais pas forcément là où il l'aurait souhaité a priori, quelle est la dynamique qui sous-tend cette relation sans doute la plus particulière qui soit, même pour un Time Lord ?

La bonne idée de l'épisode va être de choisir la voie de la personnification de ce seul "voyageur" à avoir accompagné notre Time Lord favori depuis le départ. Le seul élément toujours stable. Le seul à avoir tout partagé, les joies comme les peines. Le seul, à la croisée du continuum espace-temps, à sans doute en savoir plus que lui, plongé dans toutes ces timelines et ces possibilités. En lui offrant un corps pour s'exprimer, une femme - hello, Sexy ! -, c'est l'occasion d'explorer plus avant les rapports qu'entretiennent le Time Lord et sa chère Tardis. C'est la possibilité, enfin, de mettre des mots sur un lien indéfinissable. Les deux peuvent échanger. Logiquement, leur complémentarité s'impose naturellement. Rarement la phrase "ils étaient faits l'un pour l'autre" aura eu autant de sens et de justesse que de voir ainsi les deux intéragir dans la situation de crise du jour.

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Episode mythologique au sens noble du terme, parce qu'en évoquant le Tardis, c'est à l'âme même de la série qu'il touche, cette intrigue place logiquement le reste en retrait. Les multiples péripéties du jour resteront une toile de fond divertissante, impulsant un certain punch à l'ensemble, mais ne focalisant jamais l'attention d'un téléspectateur tout entier fasciné par cette invitée inattendue mais qu'on a pourtant déjà l'impression de connaître. Cela explique que le Docteur soit séparé de Rory et Amy. Ces derniers s'en tireront avec leur lot habituel d'émotions et d'épreuves, crapahutant plus que de raison dans les couloirs d'un Tardis hijacké, frôlant, vivant, la mort au plus près. Si l'alchimie des deux jeunes gens fonctionne toujours à merveille, disons que, pour une fois, l'enjeu demeure ailleurs.

Au fond, il y a comme une volonté grisante d'un petit retour aux sources, ou aux fondements, dans The Doctor's Wife. On y retrouve tous les ingrédients de cette magie diffuse qui fait Doctor Who - un Ood, les références au passé du Docteur. Ce cocktail prend ici parfaitement, pour satisfaire petits et grands. Et encore une fois, j'ai été impressionnée par Matt Smith, avec son entrain communicatif, son sang-froid à toute épreuve et ses maniérismes inimitables. L'acteur n'est jamais aussi étincellant que lorsque le scénario lui propose un vis-à-vis à la hauteur de son personnage, avec lequel il peut férailler en réparties piquantes. Jubilatoire.    

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Bilan : Trouvant le juste équilibre entre mythologie et aventure, The Doctor's Wife propose un de ces cocktails réjouissants et fascinants dont la série a le secret et qui fait toute sa magie. Par la personnification du Tardis qu'il permet, par cette découverte de motivations informulées mais que l'on a toujours perçues inconsciemment, c'est l'occasion d'éclairer des dynamiques inexplorées - mais pourtant centrales - de la série. Désormais, il ne sera plus possible de regarder un épisode sans repenser à cette rencontre, sans songer à ce qui se cache et nous échappe derrière les commandes clignotantes du tableau de bord du Docteur. Superbe !

Et puis, n'oublions pas : "The only water in the forest is a river."


NOTE : 8,5/10


La bande-annonce de l'épisode :

08/05/2011

(UK) Doctor Who, season 6, episode 3 : The Curse of the Black Spot

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Après la densité d'un retour placé sous le signe d'une mythologie omniprésente, Doctor Who retrouve dans ce troisième épisode de la saison un registre plus traditionnel : celui d'un thème central (le folklore apporté par l'univers des pirates) qui donne le ton de ces quarante minutes. Pour l'occasion, la série accueille une autre guest-star de luxe, puisqu'elle a cette fois recours aux services de Hugh Bonneville, tout en barbe, avec le tricorne fièrement vissé sur la tête.

Si l'épisode se révèle très calibré, doté d'une construction linéaire plus accessible que le précédent, ce qui apporte aussi une prévisibilité supplémentaire au déroulement l'aventure du jour, l'épisode n'en demeure pas moins grandement divertissant. En résumé, il propose une parenthèse et un moment de détente assumé dans un registre beaucoup moins ambitieux que l'ouverture de la saison.

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Comme nombre des aventures de Doctor Who, celle-ci est initiée par les aléas techniques du Tardis dont les instruments détectent un signal de détresse émanant d'un navire particulier. En effet, il atterrit, avec ses occupants, en plein XVIIe siècle terrien, dans la soute du bâteau d'un célèbre pirate anglais, John Avery. Si l'accueil réservé à nos trois explorateurs n'est assurément pas des plus chaleureux, les quelques membres de l'équipage encore restant ont des préoccupations autrement plus pressantes et dramatiques.

En effet, le bâteau semble poursuivi par une malédiction qui s'empare un à un de tous les marins. A la moindre blessure d'une personne se trouvant sur le navire, une créature chantante surgit de l'eau et l'attire à elle pour l'éliminer en le faisant disparaître dans un nuage de fumée. Attirée par le sang des plus petites blessures, personne ne semble en mesure de lui résister. Avec le sentiment confus qu'il manque quelque chose à l'équation, le Docteur échafaude théorie sur théorie... mais la situation se complique de plus en plus pour nos trois amis qui risquent bien de partager le sort des infortunés pirates.

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Steve Thompson permet ici à la série de renouer avec les épisodes à thème. En l'occurence, c'est sous le signe des pirates que se place cette aventure maritime mouvementée. Aucune image d'Epinal ne nous est épargnée, enchaînant avec un enthousiasme évident, tous les clichés et autres scènes clés du genre, du supplice de la planche aux trésors dorés et autres pierres brillantes qui constituent la raison d'être de l'équipage, et plus particulièrement du capitaine... Rien ne manque au tableau, pas même une sirène, tandis qu'Amy aura même le privilège d'endosser un costume folklorique qui lui sied si bien. C'est un évident hommage aux fictions de genre, à commencer par Pirates des Caraïbes dont la référence pointe jusque dans le titre de l'épisode.

Si cet univers ainsi mis en scène exerce un attrait dépaysant certain, l'ensemble demeure peut-être un peu trop calibré ; tous les ingrédients étaient légitimement attendus a priori, et finalement il y a assez peu de place à une touche d'improvisation. D'ailleurs, dans sa construction même, l'épisode suit un développement assez prévisible. Le rythme nous permet certes de s'attacher aux divers rebondissements, mais on ne peut pas le cataloguer comme aventure à suspense. Même le cadre de ce bâteau sombre assailli par cette créature étrange suscite simplement une tension minimale. Juste ce qu'il faut en somme, mais loin des pics de la semaine passée.

Par conséquent, tout en poursuivant l'idée d'offrir une parenthèse plus légère, l'épisode se révèle à la fois plutôt optimiste et aussi assez simpliste dans son traitement, comme l'illustre ce happy end éclatant pour nos pirates, ou bien également l'approche de la question de la paternité pour John Avery.

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Pour ce qui est de nos personnages principaux, la dynamique est cependant très bien huilée et fonctionne, avec quelques réparties parfaitement ajustées et surtout une dose de second degré, notamment pour accueillir l'enchaînement des théories éronnées du Docteur, qui est la bienvenue. Le trio a trouvé son équilibre et on prend beaucoup de plaisir à les suivre. Certes, certains ressorts narratifs semblent avoir la prédilection de tous les scénaristes qui se succèdent, la mise en danger mortel de Rory (souvent) ou d'Amy provoque des réactions toujours un peu semblable au sein du couple, mais c'est inhérent au fait de voyager à trois et l'alchimie des personnages prend aisément le pas sur le reste.

Quant au Docteur, ce début de saison 6 me conforte dans mon appréciation d'Eleven. Il y a en lui un dualisme autrement plus marqué que chez ses prédécesseurs immédiats : derrière sa jovialité apparente mise en scène, il y a une autre facette plus secrète qui donne au personnage une dimension supplémentaire. Ses excès théâtraux enjoués ne masquent plus complètement l'ambivalence du personnage ; et c'est très intrigant.

Enfin, sur le plan mythologique, aucune avancée significative n'a lieu. Le fil rouge nous est rappelé à travers quelques petites scènes qui renvoient aux grandes lignes des questions soulevées par le double épisode d'introduction : de l'hallucination d'Amy, à sa (non?)grossesse, voire, bien entendu, cette épée de Damoclès qui pèse sur le Docteur avec sa mort "future" et le secret que Rory et Amy doivent conserver, tout y est pour assurer une minimum de continuité... en attendant donc la suite.

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Bilan : Distrayant dans le bon sens du terme, ce troisième épisode renoue avec le divertissement familial, moins ambitieux et plus classique, loin de l'ambition mythologique de l'entrée en matière de la saison. L'ensemble est plaisant à suivre avec une thématique des pirates traitée de manière assez calibrée, mais dont l'ambiance est bien exploitée. A défaut de réel suspense, la dynamique entre les personnages continue d'être explorée et fonctionne parfaitement. De quoi reprendre un peu son souffle après la semaine dernière !


NOTE : 7/10


La bande-annonce de l'épisode :


06/05/2011

(Mini-série UK) Exile : un thriller plongeant dans un passé aux souvenirs égarés par la maladie


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En cette première semaine du mois de mai, le petit écran britannique s'est rempli de nouveautés. Outre une cohorte de fictions policières en provenance d'ITV, de Vera à Case Sensitive (comment ça "trop de séries policières à la télévision british ?"), le tout parachevé hier soir par le lancement sur BBC2 de The Shadow Line sur laquelle j'aurais l'occasion de revenir, c'est une mini-série diffusée chaque soir de dimanche à mardi sur BBC1 qui avait tout particulièrement retenu mon attention : Exile

Ceux qui me connaissent un peu le savent : parmi les quelques commandements téléphagiques que je suis religieusement depuis presque une décennie, figure la règle qui consiste à ne rien rater de la filmographie de John Simm (c'est ce que j'appelle le syndrome State of Play). Au-delà de son casting, naviguant entre thriller et drame familial, le synopsis de cette fiction, imaginée par Paul Abbott et écrite par Danny Brocklehurst qui ont notamment collaboré sur Shameless, avait assurément éveillé ma curiosité. Et je n'ai pas été déçue de la découverte.

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Exile nous raconte le retour dans sa ville natale d'un journaliste londonien, Tom Ronstadt, dont la vie aussi bien personnelle que professionnelle n'est plus que ruines, ayant subi de plein fouet les conséquences de son comportement autodestructeur. Loin de la capitale, Tom retrouve une maison familiale qui a bien changé et dont les occupants ne lui réservent pas le plus chaleureux des accueils. Sa soeur, Nancy, se dévoue entièrement à s'occuper de leur père, Sam, qui souffre de la maladie d'Alzheimer. Mais cela fait près de deux décennies que Tom s'est brouillé avec ce dernier, à la suite d'éclats de violence contre l'adolescent qu'il était alors, qui sont toujours demeurés inexpliqués.

Le retour de Tom ramène à la surface des souvenirs qui auraient sans doute dû restés enfouis. En pleine crise existentielle, le journaliste éprouve ce besoin irrépressible de comprendre un père dont il a fini par faire son contre-modèle. Cherchant à déterminer ce qui a pu se passer et briser ainsi l'homme que son père était (avant que la maladie ne le gagne), Tom se replonge dans un passé oublié et fuyant, au risque de réveiller les mêmes forces auxquels Sam s'était heurté des années auparavant. D'autant que si Tom perçoit rapidement qu'un scandale se cache derrière des indices troublants, il est loin d'imaginer la vérité qui s'est peu à peu diluée dans les souvenirs confus et effilochés de son père.

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Exile est une mini-série prenante qui mêle avec habileté les ingrédients du drame familial et du thriller psychologique. Elle commence sur un parfum de retrouvailles, vascillant entre flottement gêné et instant de complicité, qui confère à ce portrait une authenticité qui va être une des forces de cette fiction. En effet, il émane de l'ensemble une forme de sensibilité touchante, permettant au téléspectateur de ressentir une empathie immédiate pour ces différents protagonistes. Les rapports humains sont particulièrement bien traités. Qu'il s'agisse des relations frère/soeur sonnant très juste, ou bien la manière dont est présenté ce père, autrefois figure d'autorité, à l'esprit désormais rongé par la maladie. L'inversion des rôles entre le parent et les enfants, le poids que cela fait peser sur Nancy, puis sur Tom, toutes ces thématiques sont abordées sont détour, mais non sans pudeur.

C'est par son approche de la maladie d'Alzheimer que la mini-série va acquérir toute sa dimension, glissant progressivement dans la tonalité d'un thriller psychologique troublant. En effet, cette quête tardive qu'entreprend Tom pour essayer de comprendre son père se heurte justement aux souvenirs désormais égarés de ce dernier, dont l'esprit n'est là que par éclipse. De façon originale, dans cette histoire, il ne s'agit pas de mettre à jour un mystère extérieur, mais bien d'une enquête finalement très intime. Car démêler les zones d'ombre du passé, c'est reconstituer les bribes d'une mémoire que Sam a toujours, mais qui n'est plus accessible que par intermittence. Si l'intensité d'Exile vous prend à la gorge, elle reste uniquement psychologique : à mesure que l'intrigue progresse, ce passé au contenu inavouable déstabilise, les révélations sapent une à une bien des certitudes. On vit et ressent la violence des interrogations de Tom. Sans débauche d'action, avec une sobriété opportune, la mini-série trouve sa pleine mesure dans ce suspense particulier très efficace.

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Sur la forme, Exile bénéficie d'une réalisation soignée, classique de BBC1 si j'ose dire, mêlant fixité avec des cadres larges où ses personnages se perdent parfois sur l'écran et passages plus nerveux, sachant également jouer sur le suggestif pour orienter la perspective du téléspectateur. De plus, elle s'accompagne également d'une bande-son intéressante, ou plus précisément d'un thème instrumental nerveux qui va savoir refléter et encourager une atmosphère de tension qui capte l'attention du téléspectateur.

Enfin, Exile bénéficie d'un casting très solide, emmené par un John Simm (State of Play, Life on Mars, Mad Dogs) inspiré, juste parfait pour mettre en scène ce personnage aussi autodestructeur qu'obstiné, aux certitudes remises en causes. On éprouve une empathie instinctive pour lui, et l'interprétation aussi intense que nuancée de l'acteur y contribue grandement. Il est parfaitement épaulé par Jim Broadbent (Any human heart) qui trouve le ton juste pour interpréter ce père dont la rationnalité glisse dans les méandres de la maladie d'Alzheimer. Olivia Colman (Rev, Twenty Twelve) joue une soeur qui offre un contre-poid crédible, tout autant qu'une belle complicité avec le personnage de Tom. A leurs côtés, on retrouve également John Paul Hurley, Claire Goose, Timothy West, Shaun Dooley ou encore Daryl Fishwick.

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Bilan : Exile est une mini-série à la fois troublante et prenante. Derrière ses atours de drame familial marqué par la maladie dont l'écriture est pleine d'authenticité, se dessine peu à peu un thriller psychologique intense, d'une violence émotionnelle qui sonne juste. Le passé est à la fois le trait d'union et de division de cette fiction, sur fond de dillution de la conscience et des souvenirs dans la maladie. Une oeuvre poignante. A découvrir.


NOTE : 7,75/10


Des bande-annonces de la mini-série :



01/05/2011

(UK) Doctor Who, season 6, episodes 1 & 2 : The Impossible Astronaut & Day of the Moon

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Si lors de mon périple londonien, j'ai bien réussi à dénicher un Tardis à côté de notre hôtel à Earl's Court, c'est évidemment le retour du Docteur qu'il convient de célébrer aujourd'hui. Pas n'importe quel retour, puisque c'était la direction des Etats-Unis qu'avait pris notre Time Lord favori. Steven Moffat ayant désormais le contrôle d'une narration sans avoir à gérer l'héritage de son prédécesseur, c'est l'opportunité de se réapproprier l'ensemble en remettant en cause certaines habitudes du téléspectateur.

C'est donc une entrée en matière à la fois surprenante, mais aussi extrêmement calibrée dans un style propre au scénariste, qui nous est proposée. Quelques échanges rythmés par des réparties dont la série a le secret, des passages mythologiques qui raviront les fans et promettent bien des casse-têtes, et globalement une richesse de la narration assez vertigineuse qui n'est cependant pas sans soulever quelques questions sur l'accessibilié de la série

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Ce qui frappe devant ce début de saison 6, c'est à quel point il est placé sous le signe d'une ambition affichée et assumée. Il y a tout d'abord une ambition narrative indéniable, avec une entrée en matière qui n'hésite pas à prendre des risques. Non seulement, elle débute par une introduction atypique qui prend à rebours les attentes du téléspectateur et bouleverse les fondations mêmes de la série (et dont on se demande bien comment ce paradoxe pourra trouver une résolution crédible, sans se perdre dans les timelines), mais en plus la suite poursuit dans un registre similaire, multipliant les retournements de situation et autres twists destinés à marquer un téléspectateur invité à bien s'accrocher pour suivre  pouvoir ne serait-ce que prendre la mesure de tout ce qui se passe. Le scénario joue à merveille avec les attentes mais aussi les nerfs de l'observateur extérieur que nous sommes. La construction narrative interpelle ; et c'est déjà en soi une première réussite.

Par ailleurs, on retrouve également dans ce double épisode une véritable ambition mythologique assez vertigineuse. Les questions laissées en suspens s'enchaînent, voire se complexifient à l'extrême. On peut finalement dire que les premières minutes, qui laissent sous le choc et quelque peu sans voix, donnent parfaitement le ton. Les indices distillés, surabondants, sont prétextes à toutes les extrapolations. C'est le genre d'épisode où un revisionnage immédiat serait sans doute le bienvenu, ne serait-ce que pour bien disséquer chaque remarque faussement anodine ou chacune des symboliques utilisées. De River à Amy, en passant par la petite fille qui appelait le président Nixon à l'aide, le tout avec l'épée de Damoclès que font peser les évènements des premières minutes, le téléspectateur se laisse emporter par un tourbillon mythologique aussi déstabilisant qu'excitant.

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Mais paradoxalement, c'est dans cette richesse que se situe le point fort, mais aussi sans doute le point faible de ce double épisode. En effet, si certains passages sont tout particulièrement galvanisants, voire assez grisants pour un téléspectateur à la curiosité piquée, dont l'imagination en ébullition est prompte à se perdre en conjectures les plus folles, le scénario n'évite cependant pas l'écueil d'une surenchère pas toujours bien maîtrisée qui s'avère par moment contre-productive. A force de vouloir beaucoup en faire, dans un scénario dont les tiroirs multiples semblent tous mériter notre attention, le récit pèche en essayant de trop offrir, donnant parfois l'impression d'en perdre le sens des priorités et peut-être une certaine lisibilité.

J'avoue que c'est l'accessibilité même du propos de la série qui m'a semblé remise en cause dans ce double épisode. A mes yeux, Doctor Who est et doit demeurer un divertissement familial grand public, pas uniquement une fiction de geeks débattant du moindre détail sur internet. Il y a un juste dosage à trouver, entre les attentes d'un public de fans qui vont s'extasier sur chaque symbolique cachée et éplucher et confronter avec le décodeur du net toutes les théories, et celles d'un public plus généraliste si j'ose dire, moins impliqué "passionnément", qui va rechercher un divertissement d'aventure teinté de science-fiction. Les deux publics ne sont pas incompatibles ; les satisfaire n'a rien d'antinomique, mais il ne faut pas sacrifier l'un au profit de l'autre. J'ai eu le sentiment que cet épisode, par l'extrême condensation qu'il proposait, perdait quelque peu le second.

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En ce qui me concerne, mon bilan de ce double épisode de rentrée se rapprochera de la plupart des aventures du Docteur ainsi découpées en deux parties. La première, à vocation plus introductive en dépit de ses si nombreux effets narratifs, enchaînant les twists et révélations, m'avait laissée l'impression un peu frustrante de toute juste démarrer lorsqu'avait retenti le générique de fin. La seconde a apporté l'équilibre attendu. La contre-attaque du Docteur, avec sa part d'action, de répliques pimentées et de dramatisation autrement plus poignante, m'a permis de retrouver la magie qui fait l'identité de la série, me touchant beaucoup plus que le stade des promesses et des questions du premier épisode. Ce sentiment de déséquilibre s'explique - et se justifie en quelque sorte - par le choix de la construction narrative (voilà pourquoi je n'ai fait qu'une seule review d'ensemble).

L'histoire en elle-même est prenante, même si dans la manière dont est présentée la menace extraterrestre, j'ai parfois un peu l'impression que le style de Steven Moffat, aussi savoureux qu'il soit, se renouvelle trop peu. Il ne s'agit pas de renier certains thèmes qui lui sont apparemment chers, mais il y a des caractéristiques qui reviennent presque invariablement, renvoyant volontairement ou non à d'autres aventures passées écrites par le scénariste. Même si la recette continue de fonctionner, attention cependant à ce que la répétition n'amoindrisse pas trop l'effet suscité : pour préserver la magie, il faut aussi savoir rafraîchir les ressorts narratifs. 

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Au-delà de l'efficacité de la construction narrative, ce sont les personnages qui demeurent l'âme de la série, permettant d'exploiter une dimension plus émotionnelle dans laquelle réside ce secret diffus et imperceptible qui fonde toute la magie de Doctor Who. Ce double épisode est également très riche dans ce domaine. Plus les rencontres passent, et plus j'apprécie le personnage de River Song. Sa relation avec le Docteur, dans cette aventure américaine, alterne habilement le flirt joyeusement grisant ,qui sait parfaitement jouer sur l'alchimie évidente entre Alex Kingston et Matt Smith, et un aspect plus tragique, les lignes temporelles personnelles de chacun poursuivant inéluctablement leur évolution dans des directions opposées. Toute leur relation est placée sous ce signe : la première rencontre du Docteur fut la dernière de River. Le baiser final venant conclure l'épisode contient ce même arrière-goût un peu confus : le premier du Docteur... le dernier de River ?

Parallèlement, pour Amy et Rory, le mariage n'aura pas tout résolu. Usant et presque abusant de qui pro quo réels ou supposés qui laissent simplement songeurs, le double épisode sème autant le trouble qu'il ne raffermit les liens existant entre les deux. Alternant le chaud et le froid, il y a quelque chose de très touchant dans la manière dont ces personnages sont mis en scène. Les troubles sonnent souvent juste et on retrouve un parfum d'authenticité sentimentale que j'apprécie tout particulièrement. Le traitement de la question de la grossesse - ou non - d'Amy est sans doute ce qui laissera le plus de questions en suspens, tant sur un plan mythologique, que sur les rapports d'Amy avec le Docteur et Rory.

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Bilan : Ce double épisode au parfum américain n'a pas entendu pas lésiner sur les moyens pour offrir au Docteur une introduction en forme de feux d'artifices émotionnels et mythologiques, condensant sans doute à l'excès tous les ingrédients légitimement attendus d'une aventure qui a vocation, non pas à se suivre comme un stand-alone, mais bien à poser les bases et à conforter les grands arcs à venir dans la série. Son extrême richesse ravira plus d'un fan, cependant elle s'accompagne d'une surenchère pas toujours pleinement maîtrisée. Si l'ambition affichée galvanise et récompense la fidélité du téléspectateur, il faut savoir aussii trouver le juste dosage et se modérer pour ne pas trop en faire.

Doctor Who signe donc un retour marquant. Vivement la suite.


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de l'épisode :


24/03/2011

(Pilote UK) Twenty Twelve : dans les coulisses de l'organisation des Jeux Olympiques

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Les résolutions sont faites pour ne pas être respectéees : les comédies ont à nouveau disparu de mes programmes. C'est un peu frustrant de constater qu'en dépit de mes efforts, le problème reste entier : à la différence d'un drame ou une dramédie qui saura me faire réagir, positivement ou négativement, face à sa qualité, la comédie me laisse généralement indifférente. Sitôt vue, sitôt oubliée. Et mes essais de 2011 ne se sont pas révélés décisifs pour le moment, même si, peut-être...

Prenons Friday Night Diner : c'était potentiellement sympathique, mais dès la fin du pilote, son concept seul m'ennuyait déjà. Puis, la semaine dernière, c'était au tour de Twenty Twelve de passer l'épreuve du premier visionnage. Après ma curieuse perplexité initiale, hier soir, je me suis finalement installée devant le deuxième épisode... Le ressenti diffus du premier s'est confirmé et même accentué : cette série m'intrigue. Et une comédie qui retient suffisamment mon attention pour me faire envisager... (soyons ambitieux...) le troisième épisode, cela mérite que l'on s'y arrête.

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Diffusée sur BBC4 depuis le 14 mars 2011, son lancement coïncidant avec le décompte de 500 jours nous séparant de la cérémonie d'ouverture des prochains Jeux Olympiques de Londres, Twenty Twelve a commencé sur fond de polémique avec les créateurs d'une série au concept de départ très proche : The Games, imaginée pour la télévision australienne à la veille des JO de Sidney en 2000. Si vous voulez vous faire une opinion sur la controverse, des extraits d'épisodes de sa consoeur australienne sont disponibles sur YouTube, par exemple : The 100 Metres Track.

Derrière ses allures de faux documentaire aux accents satiriques, Twenty Twelve nous plonge dans les coulisses de la préparation des Jeux Olympiques prévus à Londres en 2012, au sein du comité chargé de cette - forcément complexe et propice aux crises de nerf - organisation. Dirigé par Ian Fletcher, il rassemble des personnes plus ou moins compétentes aux fonctions très spécifiques, qui occupent tous les postes à enjeu du projet : de la communication à la gestion des infrastructures, en passant par la pérennité et le sort ultérieur des infrastructures construites pour l'occasion.

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Twenty Twelve est un mockumentary dans la plus pure tradition du genre. Avec sa mise en scène minimale, guidée par une voix off qui fait le lien entre des scènes parfois anecdotiques, la série va naturellement rechercher à créer une proximité avec la réalité. A partir de ce parfum d'authenticité, elle va ensuite distendre ce portrait, pour exploiter toute l'absurdité potentielle des situations dépeintes, portée par des personnages stéréotypés. Et à ce jeu de la mise en image d'un rafraîchissant ridicule flegmatique, à la sobriété déroutante, la série saura provoquer plus d'un sourire. C'est en effet lorsque ce style s'accompagne d'un comique de situation efficace que son potentiel se dévoile vraiment (l'horloge dans le premier épisode ; la gestion du retard et notamment la "crevaison" dans le deuxième épisode).

Si le pilote peinait à trouver son rythme, ne s'équilibrant que dans le dernier tiers, cela s'explique en partie par la nécessaire introduction de tous les personnages. L'épisode 2 est plus consistant, mais il confirme aussi cependant la première impression : Twenty Twelve ne parvient pas à fonctionner en roue libre, par elle-même. En effet, le temps que le problème du jour surgisse, ses dialogues manquent de punch, ou du moins de lignes corrosives qui feraient mouche et troubleraient une narration trop linéaire (on est loin de la dynamique autrement plus tranchante d'un The Thick of It par exemple). En revanche, et cela s'apprécie encore plus dans le second épisode, une fois que l'histoire est vraiment lancée, la sobriété excessive du style adopté s'avère pleinement justifiée.

Au final, même si la série gagnerait à trouver une meilleure homogénéité, elle n'en demeure pas moins non seulement plaisante, mais aussi assez jubilatoire lorsque la crise à gérer est à son apogée. Rien que pour voir la réaction des Brésiliens face à la fausse nouvelle de la crevaison (j'en souris encore), je crois que la série mérite un petit détour.

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Sur la forme, Twenty Twelve respecte tous les codes du mockumentary classique. Caméra à l'épaule, la réalisation est nerveuse, le cadre changeant, donnant l'impression d'être aux côtés des différents protagonistes. Cela permet de renforcer à moindre frais cette fausse impression de réalisme. Par ailleurs, il faut aussi signaler - c'est suffisamment rare pour être souligné - l'existence d'un petit générique introductif, qui est même accompagné d'une chanson pas forcément en adéquation stricte avec le thème de la série, mais l'ensemble constitue une introduction décalée pas déplaisante.

Enfin, Twenty Twelve dispose d'un casting attrayant et solide, qui se glisse sans difficulté dans l'ambiance particulière que la série cultive. Il est emmené par un Hugh Bonneville (Lost in Austen, Downton Abbey) impeccable, aux côtés duquel on retrouve Amelia Bullmore (State of Play, Ashes to Ashes), Olivia Colman (Rev., Peep Show), Vincent Franklin (The Thick of It), Jessica Hynes (Spaced, The Royle Family) et Karl Theobald (Primeval). Enfin, c'est David Tennant (Doctor Who) qui se charge de la voix du narrateur, accentuant ainsi l'aspect documentaire de la série et servant à guider le téléspectateur.

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Bilan : Mockumentary bénéficiant d'un cadre original (dans la limite de la question liée à The Games), forcément intéressant au vu des thématiques pouvant être exploitées, Twenty Twelve doit certes encore gagner en constance. Mais dans ses meilleurs moments, la série impose son style par le biais de sa mise en scène flegmatique d'un ridicule aux limites constamment repoussées. L'ensemble se révèle assez jubilatoire. En somme, si la tonalité et la sobriété peuvent dans un premier temps dérouter, on retrouve aussi dans cette série des passages où les fondamentaux du mockumentary sont à la hauteur des attentes. Un résultat qui mérite peut-être un coup d'oeil !


NOTE : 6/10


La bande-annonce de la série :