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01/05/2011

(UK) Doctor Who, season 6, episodes 1 & 2 : The Impossible Astronaut & Day of the Moon

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Si lors de mon périple londonien, j'ai bien réussi à dénicher un Tardis à côté de notre hôtel à Earl's Court, c'est évidemment le retour du Docteur qu'il convient de célébrer aujourd'hui. Pas n'importe quel retour, puisque c'était la direction des Etats-Unis qu'avait pris notre Time Lord favori. Steven Moffat ayant désormais le contrôle d'une narration sans avoir à gérer l'héritage de son prédécesseur, c'est l'opportunité de se réapproprier l'ensemble en remettant en cause certaines habitudes du téléspectateur.

C'est donc une entrée en matière à la fois surprenante, mais aussi extrêmement calibrée dans un style propre au scénariste, qui nous est proposée. Quelques échanges rythmés par des réparties dont la série a le secret, des passages mythologiques qui raviront les fans et promettent bien des casse-têtes, et globalement une richesse de la narration assez vertigineuse qui n'est cependant pas sans soulever quelques questions sur l'accessibilié de la série

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Ce qui frappe devant ce début de saison 6, c'est à quel point il est placé sous le signe d'une ambition affichée et assumée. Il y a tout d'abord une ambition narrative indéniable, avec une entrée en matière qui n'hésite pas à prendre des risques. Non seulement, elle débute par une introduction atypique qui prend à rebours les attentes du téléspectateur et bouleverse les fondations mêmes de la série (et dont on se demande bien comment ce paradoxe pourra trouver une résolution crédible, sans se perdre dans les timelines), mais en plus la suite poursuit dans un registre similaire, multipliant les retournements de situation et autres twists destinés à marquer un téléspectateur invité à bien s'accrocher pour suivre  pouvoir ne serait-ce que prendre la mesure de tout ce qui se passe. Le scénario joue à merveille avec les attentes mais aussi les nerfs de l'observateur extérieur que nous sommes. La construction narrative interpelle ; et c'est déjà en soi une première réussite.

Par ailleurs, on retrouve également dans ce double épisode une véritable ambition mythologique assez vertigineuse. Les questions laissées en suspens s'enchaînent, voire se complexifient à l'extrême. On peut finalement dire que les premières minutes, qui laissent sous le choc et quelque peu sans voix, donnent parfaitement le ton. Les indices distillés, surabondants, sont prétextes à toutes les extrapolations. C'est le genre d'épisode où un revisionnage immédiat serait sans doute le bienvenu, ne serait-ce que pour bien disséquer chaque remarque faussement anodine ou chacune des symboliques utilisées. De River à Amy, en passant par la petite fille qui appelait le président Nixon à l'aide, le tout avec l'épée de Damoclès que font peser les évènements des premières minutes, le téléspectateur se laisse emporter par un tourbillon mythologique aussi déstabilisant qu'excitant.

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Mais paradoxalement, c'est dans cette richesse que se situe le point fort, mais aussi sans doute le point faible de ce double épisode. En effet, si certains passages sont tout particulièrement galvanisants, voire assez grisants pour un téléspectateur à la curiosité piquée, dont l'imagination en ébullition est prompte à se perdre en conjectures les plus folles, le scénario n'évite cependant pas l'écueil d'une surenchère pas toujours bien maîtrisée qui s'avère par moment contre-productive. A force de vouloir beaucoup en faire, dans un scénario dont les tiroirs multiples semblent tous mériter notre attention, le récit pèche en essayant de trop offrir, donnant parfois l'impression d'en perdre le sens des priorités et peut-être une certaine lisibilité.

J'avoue que c'est l'accessibilité même du propos de la série qui m'a semblé remise en cause dans ce double épisode. A mes yeux, Doctor Who est et doit demeurer un divertissement familial grand public, pas uniquement une fiction de geeks débattant du moindre détail sur internet. Il y a un juste dosage à trouver, entre les attentes d'un public de fans qui vont s'extasier sur chaque symbolique cachée et éplucher et confronter avec le décodeur du net toutes les théories, et celles d'un public plus généraliste si j'ose dire, moins impliqué "passionnément", qui va rechercher un divertissement d'aventure teinté de science-fiction. Les deux publics ne sont pas incompatibles ; les satisfaire n'a rien d'antinomique, mais il ne faut pas sacrifier l'un au profit de l'autre. J'ai eu le sentiment que cet épisode, par l'extrême condensation qu'il proposait, perdait quelque peu le second.

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En ce qui me concerne, mon bilan de ce double épisode de rentrée se rapprochera de la plupart des aventures du Docteur ainsi découpées en deux parties. La première, à vocation plus introductive en dépit de ses si nombreux effets narratifs, enchaînant les twists et révélations, m'avait laissée l'impression un peu frustrante de toute juste démarrer lorsqu'avait retenti le générique de fin. La seconde a apporté l'équilibre attendu. La contre-attaque du Docteur, avec sa part d'action, de répliques pimentées et de dramatisation autrement plus poignante, m'a permis de retrouver la magie qui fait l'identité de la série, me touchant beaucoup plus que le stade des promesses et des questions du premier épisode. Ce sentiment de déséquilibre s'explique - et se justifie en quelque sorte - par le choix de la construction narrative (voilà pourquoi je n'ai fait qu'une seule review d'ensemble).

L'histoire en elle-même est prenante, même si dans la manière dont est présentée la menace extraterrestre, j'ai parfois un peu l'impression que le style de Steven Moffat, aussi savoureux qu'il soit, se renouvelle trop peu. Il ne s'agit pas de renier certains thèmes qui lui sont apparemment chers, mais il y a des caractéristiques qui reviennent presque invariablement, renvoyant volontairement ou non à d'autres aventures passées écrites par le scénariste. Même si la recette continue de fonctionner, attention cependant à ce que la répétition n'amoindrisse pas trop l'effet suscité : pour préserver la magie, il faut aussi savoir rafraîchir les ressorts narratifs. 

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Au-delà de l'efficacité de la construction narrative, ce sont les personnages qui demeurent l'âme de la série, permettant d'exploiter une dimension plus émotionnelle dans laquelle réside ce secret diffus et imperceptible qui fonde toute la magie de Doctor Who. Ce double épisode est également très riche dans ce domaine. Plus les rencontres passent, et plus j'apprécie le personnage de River Song. Sa relation avec le Docteur, dans cette aventure américaine, alterne habilement le flirt joyeusement grisant ,qui sait parfaitement jouer sur l'alchimie évidente entre Alex Kingston et Matt Smith, et un aspect plus tragique, les lignes temporelles personnelles de chacun poursuivant inéluctablement leur évolution dans des directions opposées. Toute leur relation est placée sous ce signe : la première rencontre du Docteur fut la dernière de River. Le baiser final venant conclure l'épisode contient ce même arrière-goût un peu confus : le premier du Docteur... le dernier de River ?

Parallèlement, pour Amy et Rory, le mariage n'aura pas tout résolu. Usant et presque abusant de qui pro quo réels ou supposés qui laissent simplement songeurs, le double épisode sème autant le trouble qu'il ne raffermit les liens existant entre les deux. Alternant le chaud et le froid, il y a quelque chose de très touchant dans la manière dont ces personnages sont mis en scène. Les troubles sonnent souvent juste et on retrouve un parfum d'authenticité sentimentale que j'apprécie tout particulièrement. Le traitement de la question de la grossesse - ou non - d'Amy est sans doute ce qui laissera le plus de questions en suspens, tant sur un plan mythologique, que sur les rapports d'Amy avec le Docteur et Rory.

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Bilan : Ce double épisode au parfum américain n'a pas entendu pas lésiner sur les moyens pour offrir au Docteur une introduction en forme de feux d'artifices émotionnels et mythologiques, condensant sans doute à l'excès tous les ingrédients légitimement attendus d'une aventure qui a vocation, non pas à se suivre comme un stand-alone, mais bien à poser les bases et à conforter les grands arcs à venir dans la série. Son extrême richesse ravira plus d'un fan, cependant elle s'accompagne d'une surenchère pas toujours pleinement maîtrisée. Si l'ambition affichée galvanise et récompense la fidélité du téléspectateur, il faut savoir aussii trouver le juste dosage et se modérer pour ne pas trop en faire.

Doctor Who signe donc un retour marquant. Vivement la suite.


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de l'épisode :


Commentaires

Très bonne critique.
J'ai aussi un peu peur de ce manque d'accessibilité, mais à en croire les trailers, le reste redevient plus de stand alone, avec toujours une trame commune.

Enfin, pour rebondir sur "Le baiser final venant conclure l'épisode contient ce même arrière-goût un peu confus : le premier du Docteur... le dernier de River ?"
Ce n'est pas si confus que ça. C'est même très très triste en fait. La première fois que Doctor rencontre River dans la Bibliothèque, c'est la dernière fois pour River. Donc, si ici, c'est la première fois qu'il embrasse River, c'est la dernière fois pour elle. Le premier de l'un est le dernier de l'autre. Ce qui donne un côté bien plus dramatique au précédente apparition de River en Saison 4 et saison 5, car elle voit cette relation se dégrader à ne plus exister vraiment pour le Doctor. J'imagine bien qu'il y aura ce même chemin dans le sens du Doctor.

Écrit par : Drianis_A | 01/05/2011

j'ai trouvé qu'entre les interrogations restantes de la saison précédente et les mystères posées dans ce double épisode, ça fait beaucoup et ça me fait chauffer la tête! heureusement, j'adore toujours autant les personnages et l'humour est toujours présent; j'ai hate de voir la suite et de voir des épisodes plus farfelus et moins complexe, même si j'aime aussi beaucoup me poser des questions!

Écrit par : trillian | 01/05/2011

bon double épisode pour ce début de saison. Toutefois, j'ai trouvé qu'il était confus par moments avec toutes ces questions soulevées. Je me doute qu'elles seront résolues par la suite, mais était-ce la peine d'en mettre autant dans deux seuls épisodes ?

Écrit par : Eirian | 01/05/2011

Excellente xritique argumentée, même si je te trouve un peu dure avec cette première histoire !
Moffat expliquait dans le DWM qu'à présent, il y avait moins besoin de conquérir le public (même si la série pourrait toujours se prendre en marche), qu'ils avaient énormément de succès et qu'ils pouvaient donc plus se permettre de faire de la mythologie et du feuilletonnant !

Pour les enfants, même s'ils ne comprennent pas tout aux histoires temporelles, il y a quand même de superbes moments d'émotion et d'humour entre les personnages, des moments d'anthologie avec le Docteur et les Silent...je pense que ça leur plaira même s'ils ne comprennent pas absolument tout, non ?

Mais bon, je ne suis pas très objective, je le reconnais : j'adore la série et j'adore les séries à mythologie maîtrisée (d'où mon amour pour Babylon 5 !), donc plus de mythologie toput au long de la saison (surtout en jouant avec le temps), ça ne peut que me plaire !

Écrit par : jainaxf | 01/05/2011

@ Drianis_A : Effectivement, c'est un brise-coeur cette relation Docteur/River ; je n'avais encore jamais trop réfléchi au chemin sur lequel cela nous conduirait, mais ces lignes temporelles croisées sont extrêmement poignantes.

@ tous : Pour la densité mythologique, c'est quelque chose qui nous a tous marqué.
Avec un peu plus de recul par rapport à ma critique, en ayant lu depuis plusieurs autres reviews et articles, je comprends un peu mieux l'objectif de ce début intense et complexe. J'y adhèrerai sans doute encore mieux lors du second visionnage de ces épisodes (après une remise à niveau mythologique personnelle, car je crois que je me suis égarée au milieu d'un croisement de lignes temporelles). J'espère juste que DW ne va pas se couper d'une partie de son public, mais c'est peut-être une crainte sans fondement. Il est sans doute temps de se renouveler et de passer vraiment de l'ère RTD à SM ;)

Après, avec notre téléphagie geek-esque, comme vous, j'aime les séries mythologiques qui défient notre imagination et posent tant de question ; c'est grisant et l'ambition est appréciée. Reste à espérer que les résolutions d'ensemble soient à la hauteur des attentes générées (même si souvent, dans la mythologie, c'est l'attente qui est le moment le plus agréable - Babylon 5 étant l'exception qui confirme la règle, vu que c'est sans aucun doute la série avec la mythologie la plus aboutie et maîtrisée de ces dernières décennies).

A suivre en tout cas avec attention !
Je crois que j'apprécierai pleinement ce début de saison en le revoyant tête reposée, un carnet pour tout noter à la main ^_^

Écrit par : Livia | 04/05/2011

Voici une saison qui s'annonce tout de même fort bien somme toute, en particuliers pour les overfans :-)

Écrit par : yueyin | 08/05/2011

Je me demande bien quel est le crétin qui a décidé d'appliquer de manière aussi incongrue le terme "mythologie" pour signifier ce qu'il pouvait y avoir de feuilletonnant dans une série télévisée?
Quoi de plus normal qu'une série se mette à feuilletonner? Est-il vraiment nécessaire d'emballer tout ça avec un terme comme "mythologie"?
Bien évidemment que non.
Enfin bon, cela semble entré définitivement dans le jargon des sériephiles autoproclamés... Grand bien leur fasse. Pour ma part, j'entends continuer à proscrire ce terme de mon vocabulaire, dans cette acception tout au moins.

Bon sinon, ce brillant premier épisode lance super bien la saison.

Ah oui, pour finir, personnellement, je me contrefiche de savoir si Doctor Who "doit" plutôt s'adresser à tel ou tel public (je ne fais ni partie du public familial ni des geeks accros au décorticage), doit être comme ceci ou comme cela.
J'aimais bien Davies en tant que showrunner, maintenant j'apprécie au-moins autant Moffat.
Avec Moffatt, on a échangé le sense of wonder de la science-fiction épique pour celui, plus sombre, de la poésie des contes de fées.
C'est surtout ça la différence marquante, avec l'utilisation beaucoup plus fondamentale (et déstabilisante) du voyage dans le temps, plutôt uniquement décoratif chez Davies.¨
Pas qu'il y ait plus ou moins de "mythologie".
Une chose que je regrette quand même de l'époque Davies, et qui est complètement absente de la vision de Moffatt, c'est le côté working class.

Ah ouais, sinon, là, on a quand même le best Doctor et la best assistante, hein...
Ahhh, Amy Pond et son délicieux accent écossais !!!

Écrit par : Fred | 03/10/2011

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