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01/01/2012

(Mini-série UK) Great Expectations : l'histoire d'une leçon de vie

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La période des fêtes de fin d'année est toujours riche outre-Manche. Au-delà des épisodes spéciaux de leurs séries habituelles (Doctor Who, Downton Abbey...), les chaînes ont aussi l'habitude de programmer quelques fictions de prestige s'inscrivant dans la tradition des adaptations littéraires qu'affectionnent les Anglais. A ce sujet, si vous en avez l'occasion (et comme je ne suis pas certaine d'avoir le temps de vous en parler), n'hésitez pas à jeter un oeil sur ce beau téléfilm, diffusé lundi dernier, qu'est The Borrowers (avec un casting de choix, Christopher Eccleston, Stephen Fry, Robert Sheehan...).

Puis, toujours la semaine dernière, de mardi à jeudi soir, BBC1 s'est attachée à revisiter un classique, en proposant une nouvelle version de Great Expectations, d'après un roman de Charles Dickens. Mini-série comportant trois épisodes d'une heure chacun, elle rassemble un solide casting, avec notamment une Gillian Anderson fort troublante en Miss Havisham. Si Great Expectations pèche sans doute par un certain excès d'académisme l'empêchant de prendre toute la mesure de l'histoire qu'elle relate, elle n'en demeure pas moins une adaptation plaisante à suivre, à l'esthétique fort soigné.

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Great Expectations se déroule au XIXe siècle. C'est l'histoire d'un jeune orphelin, Pip, recueilli par sa soeur et son mari, un forgeron. Un jour, il croise dans la campagne un prisonnier, Magwitch, qui s'est évadé et tente d'échapper aux soldats qui le poursuivent dans ces marés brumeux. Le fugitif effraie le garçon pour qu'il lui ramène un outil afin qu'il puisse se débarasser de ses fers. Si Pip s'exécute, faisant même du zèle en ramenant à l'affamé une part de tarte, le prisonnier sera malgré tout re-capturé peu après, ramené de force sur le bâteau qui le déporte vers l'Océanie.

Cette même journée est riche en émotions. En effet, leur oncle annonce peu de temps après que la mystérieuse et recluse Miss Havisham, une dame très fortunée, requiert la présence d'un garçon, sans en préciser la raison. La soeur de Pip, espérant une récompense, l'envoie rencontrer cette étrange dame, dont l'apparence tout de blanc vêtue, pieds nus, est presque semblable à un fantôme. L'orphelin fait à cette occasion connaissance avec l'entourage de Miss Havisham, et notamment sa fille, jeune adolescente adoptée par la richissime dame. Pip découvre aussi dans cette maison luxueuse, mais laissée à l'abandon, un autre milieu social et surtout... une certaine ambition : cela pourrait-il être la porte ouverte à une ascension sociale loin de la forge et de son quotidien actuel ? 

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Great Expectations relate la rencontre entre différentes classes sociales qui n'auraient pas dû normalement se croiser. C'est l'histoire d'un orphelin que rien ne prédisposait à s'imaginer au-delà de son coin de campagne, mais auquel les évènements vont offrir des opportunités aux apparences souvent trompeuses. En entrouvrant, pour la première fois sur l'invitation de Miss Havisham, la porte de ce milieu bourgeois favorisé, Pip va soudain se mettre à espérer dépasser sa condition sociale pour gagner un rang de véritable gentleman. D'abord longtemps rêve inaccessible, lorsque cette voie s'ouvre finalement devant lui, cette chance se révèle à double tranchant. Balloté au gré de bienfaiteurs qui taisent leurs motifs, mais aussi pour certains leur identité, Pip s'égare, perdant son sens des priorités. Great Expectations apparaît ainsi comme l'histoire d'une leçon de vie, avec sa part de désillusion et de cruauté face à un destin qui semble toujours finir par reprendre ce qu'il a offert.

Si la mini-série maîtrise globalement bien le thème du choc des milieux sociaux, elle reste inaboutie sur un second plan pourtant tout aussi déterminant à l'histoire : celui lié aux sentiments. En effet, l'ambition de Pip puise sa source dans son amour pour cette beauté glacée qu'est Estella. Great Expectations éclaire en effet à quel point les sentiments peuvent transporter, mais aussi égarer chacun. C'est la passion qui a détruit Miss Havisham, cette dernière hantant désormais sa propre maison, ayant cessé de vivre. En réaction, c'est dans l'absence de tout sentiment qu'a été élevée Estella, instrument d'une obsessionnelle vengeance entre les mains de Miss Havisham : faire souffrir, détruire les hommes sans se blesser soi-même, telle est la tâche pour laquelle sa mère adoptive l'a élevée. Et c'est donc aussi l'amour qui consumme Pip, obscurcit son jugement et, plus que l'attrait pour l'argent, le fait mûrir par les déceptions qu'il occasionne. C'est sans doute ici que Great Expectations fait preuve de ses plus grandes limites : elle reste trop rigide et en retrait, ne parvenant pas à susciter d'empathie, ni à capturer à l'écran les sentiments et contradictions que l'on devine pourtant dans ces personnages.

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Manquant de nuances et d'épaisseur sur le fond, Great Expectations est en revanche à la hauteur des attentes du téléspectateur sur un plan formel. La mini-série s'offre une reconstitution d'époque soignée, avec des décors souvent froids, comme glacés, bien mis en valeur par une esthétique travaillée. En parfait écho au contenu de l'histoire, la teinte dominante est le gris. Et si certains passages, notamment en intérieur, paraissent presque trop sombres, cette photographie contribue à donner une identité de la fiction. Les pièces de la maison de Miss Havisham, représentant un instantané suspendu dans le temps, représentent sans aucun doute une des mises en scène les plus marquantes de la mini-série.

Enfin, Great Expectations bénéficie d'un casting globalement solide. Les acteurs qui entourent Oscar Kennedy, puis Douglas Booth (Les Piliers de la Terre) dans leur rôle de Pip (enfant, puis jeune homme) parviennent vraiment à imposer leur présence à l'écran. Gillian Anderson (X-Files, Bleak House, The Crimson Petal and the White) notamment délivre une performance vraiment fascinante et troublante pour incarner cette femme brisée qui a développé une rancoeur obsessionnelle envers les hommes. Ray Winstone (Vincent) est également impressionnant en Abel Magwitch, figure ambivalente, à la fois inquiétant et bienfaiteur. A leurs côtés, on retrouve également David Suchet (Agatha Christie's Poirot), Mark Addy (Game of Thrones), Frances Barber, Tom Burke, Vanessa Kirby ou encore Shaun Dooley.

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Bilan : Adaptation presque trop académique d'un classique de la littérature anglaise, Great Expectations est fidèle, sur la forme, au savoir-faire de la BBC, offrant une reconstitution méticuleuse d'une époque et disposant d'une identité visuelle et d'une ambiance intrigantes. Cependant, la mini-série peine à introduire du relief dans son histoire et à impliquer le téléspectateur, ayant trop tendance à aller à l'essentiel sans prendre le temps de retranscrire émotions et nuances. Cette limite tient peut-être à son format trop condensé. En résumé, si elle se suit sans déplaisir, on ne peut s'empêcher de penser que le résultat laisse un arrière-goût d'inachevé et reste perfectible.


NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la mini-série :

06/05/2011

(Mini-série UK) Exile : un thriller plongeant dans un passé aux souvenirs égarés par la maladie


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En cette première semaine du mois de mai, le petit écran britannique s'est rempli de nouveautés. Outre une cohorte de fictions policières en provenance d'ITV, de Vera à Case Sensitive (comment ça "trop de séries policières à la télévision british ?"), le tout parachevé hier soir par le lancement sur BBC2 de The Shadow Line sur laquelle j'aurais l'occasion de revenir, c'est une mini-série diffusée chaque soir de dimanche à mardi sur BBC1 qui avait tout particulièrement retenu mon attention : Exile

Ceux qui me connaissent un peu le savent : parmi les quelques commandements téléphagiques que je suis religieusement depuis presque une décennie, figure la règle qui consiste à ne rien rater de la filmographie de John Simm (c'est ce que j'appelle le syndrome State of Play). Au-delà de son casting, naviguant entre thriller et drame familial, le synopsis de cette fiction, imaginée par Paul Abbott et écrite par Danny Brocklehurst qui ont notamment collaboré sur Shameless, avait assurément éveillé ma curiosité. Et je n'ai pas été déçue de la découverte.

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Exile nous raconte le retour dans sa ville natale d'un journaliste londonien, Tom Ronstadt, dont la vie aussi bien personnelle que professionnelle n'est plus que ruines, ayant subi de plein fouet les conséquences de son comportement autodestructeur. Loin de la capitale, Tom retrouve une maison familiale qui a bien changé et dont les occupants ne lui réservent pas le plus chaleureux des accueils. Sa soeur, Nancy, se dévoue entièrement à s'occuper de leur père, Sam, qui souffre de la maladie d'Alzheimer. Mais cela fait près de deux décennies que Tom s'est brouillé avec ce dernier, à la suite d'éclats de violence contre l'adolescent qu'il était alors, qui sont toujours demeurés inexpliqués.

Le retour de Tom ramène à la surface des souvenirs qui auraient sans doute dû restés enfouis. En pleine crise existentielle, le journaliste éprouve ce besoin irrépressible de comprendre un père dont il a fini par faire son contre-modèle. Cherchant à déterminer ce qui a pu se passer et briser ainsi l'homme que son père était (avant que la maladie ne le gagne), Tom se replonge dans un passé oublié et fuyant, au risque de réveiller les mêmes forces auxquels Sam s'était heurté des années auparavant. D'autant que si Tom perçoit rapidement qu'un scandale se cache derrière des indices troublants, il est loin d'imaginer la vérité qui s'est peu à peu diluée dans les souvenirs confus et effilochés de son père.

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Exile est une mini-série prenante qui mêle avec habileté les ingrédients du drame familial et du thriller psychologique. Elle commence sur un parfum de retrouvailles, vascillant entre flottement gêné et instant de complicité, qui confère à ce portrait une authenticité qui va être une des forces de cette fiction. En effet, il émane de l'ensemble une forme de sensibilité touchante, permettant au téléspectateur de ressentir une empathie immédiate pour ces différents protagonistes. Les rapports humains sont particulièrement bien traités. Qu'il s'agisse des relations frère/soeur sonnant très juste, ou bien la manière dont est présenté ce père, autrefois figure d'autorité, à l'esprit désormais rongé par la maladie. L'inversion des rôles entre le parent et les enfants, le poids que cela fait peser sur Nancy, puis sur Tom, toutes ces thématiques sont abordées sont détour, mais non sans pudeur.

C'est par son approche de la maladie d'Alzheimer que la mini-série va acquérir toute sa dimension, glissant progressivement dans la tonalité d'un thriller psychologique troublant. En effet, cette quête tardive qu'entreprend Tom pour essayer de comprendre son père se heurte justement aux souvenirs désormais égarés de ce dernier, dont l'esprit n'est là que par éclipse. De façon originale, dans cette histoire, il ne s'agit pas de mettre à jour un mystère extérieur, mais bien d'une enquête finalement très intime. Car démêler les zones d'ombre du passé, c'est reconstituer les bribes d'une mémoire que Sam a toujours, mais qui n'est plus accessible que par intermittence. Si l'intensité d'Exile vous prend à la gorge, elle reste uniquement psychologique : à mesure que l'intrigue progresse, ce passé au contenu inavouable déstabilise, les révélations sapent une à une bien des certitudes. On vit et ressent la violence des interrogations de Tom. Sans débauche d'action, avec une sobriété opportune, la mini-série trouve sa pleine mesure dans ce suspense particulier très efficace.

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Sur la forme, Exile bénéficie d'une réalisation soignée, classique de BBC1 si j'ose dire, mêlant fixité avec des cadres larges où ses personnages se perdent parfois sur l'écran et passages plus nerveux, sachant également jouer sur le suggestif pour orienter la perspective du téléspectateur. De plus, elle s'accompagne également d'une bande-son intéressante, ou plus précisément d'un thème instrumental nerveux qui va savoir refléter et encourager une atmosphère de tension qui capte l'attention du téléspectateur.

Enfin, Exile bénéficie d'un casting très solide, emmené par un John Simm (State of Play, Life on Mars, Mad Dogs) inspiré, juste parfait pour mettre en scène ce personnage aussi autodestructeur qu'obstiné, aux certitudes remises en causes. On éprouve une empathie instinctive pour lui, et l'interprétation aussi intense que nuancée de l'acteur y contribue grandement. Il est parfaitement épaulé par Jim Broadbent (Any human heart) qui trouve le ton juste pour interpréter ce père dont la rationnalité glisse dans les méandres de la maladie d'Alzheimer. Olivia Colman (Rev, Twenty Twelve) joue une soeur qui offre un contre-poid crédible, tout autant qu'une belle complicité avec le personnage de Tom. A leurs côtés, on retrouve également John Paul Hurley, Claire Goose, Timothy West, Shaun Dooley ou encore Daryl Fishwick.

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Bilan : Exile est une mini-série à la fois troublante et prenante. Derrière ses atours de drame familial marqué par la maladie dont l'écriture est pleine d'authenticité, se dessine peu à peu un thriller psychologique intense, d'une violence émotionnelle qui sonne juste. Le passé est à la fois le trait d'union et de division de cette fiction, sur fond de dillution de la conscience et des souvenirs dans la maladie. Une oeuvre poignante. A découvrir.


NOTE : 7,75/10


Des bande-annonces de la mini-série :



10/03/2011

(Mini-série UK) South Riding : chronique vivante et touchante d'une bourgade des années 30

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En ce début d'année 2011, les amoureux du petit écran britannique peuvent tout particulièrement savourer leur passion. Les mini-séries intéressantes, couvrant tous les goûts et tous les genres, se succèdent. Parmi elles, South Riding s'inscrit dans la tradition la plus classique du period drama que l'on croise outre-Manche : l'adaptation littéraire. Nous plongeant dans la campagne anglaise du milieu des années 30, il s'agit de la seconde transposition à l'écran du roman de Winifred Holtby, publié en 1936, après une première proposée par ITV en 1974.

Cette mini-série, composée de 3 épisodes d'1 heure chacun, a été diffusée trois dimanche soir successifs du 20 février dernier au 6 mars 2011, sur BBC1. On y retrouve tout le savoir-faire britannique en la matière, porté par un excellent casting, pour une photographie prenante de l'Angleterre changeante des années 30, loin de la capitale londonienne. Trois heures plaisantes à suivre qui méritent le détour.

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South Riding s'ouvre en 1934 dans une petite ville côtière éponyme du Yorkshire, située dans le nord de l'Angleterre. Sarah Burton rentre dans sa bourgade natale après des années à avoir mené une carrière d'enseignante tout en voyant le monde. Elle arrive de Londres pour postuler à la fonction de directrice de l'école municipale de filles, avec des idées de modernisation plein la tête et de hautes ambitions éducatives pour offrir à ces élèves les clés d'une société complexe, où la crise économique précipite les mutations. Si son enthousiasme déstabilise quelque peu le conseil d'administration, la jeune femme emporte cependant l'agrément de la majorité des directeurs, séduits par ce vent de modernité qui semble l'accompagner.

Très vite, Sarah trouve ses marques dans cette petite ville marquée par la Grande Dépression, apprenant à rester fidèle à ses convictions tout en sachant parfois verser dans l'art du compromis, pour assurer la bonne gestion de son école. Elle se découvre des alliés, comme le progressiste Mr Joe Astell, mais aussi des adversaires que ses idées dérangent à l'image de Mr Carne, un conservateur aux conceptions sans doute révolues, mais dont Sarah va peu à peu se rapprocher. Elle va aussi s'investir auprès de ses élèves, prenant sous son aile une boursière très douée, Lydia, ou encore Midge, la fille de Mr Carne.

Avec un quotidien rythmé par les difficultés sociales et les oppositions politiques, c'est dans une chronique ordinaire d'une petite bourgade, typique mais très attachante, que South Riding nous plonge.

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L'attrait de la mini-série  tient tout d'abord au cadre qu'elle investit : celui d'une chronique profondément humaine, mais aussi sociale, d'une époque difficile. Elle offre un instantané vivant et bigarré d'une bourgade anglaise et des préoccupations et autres enjeux très concrets qui agitent ce petit microcosme. Cette reconstitution de l'ambiance des années 30 se révèle particulièrement réussie. South Riding propose en effet un portrait nuancé d'une vie locale marquée par la récession économique, sur fond de tensions irréductibles entre tradition et modernité, tandis que les séquelles de la Première Guerre Mondiale hantent encore les esprits et que se profile à l'horizon le spectre d'autres bouleversements à venir. Ces mises en scène résonnent de manière authentique et juste à l'écran, leur retenue et leur sobriété trouvant un écho particulier auprès du téléspectateur.

De manière générale, il émane de South Riding un charme simple qui séduit et retient l'attention, la reconstitution historique se complétant d'une dimension humaine qui ne laisse pas indifférent. Car la mini-série dispose d'une galerie de personnages qui savent se fondre parfaitement dans le récit, tout en y apportant un relief et une nuance qui permettent de s'y attacher. Si tous n'échappent pas aux stéréotypes, la dynamique d'ensemble fonctionne. On se laisse ainsi emporter par le dynamisme communicatif de Sarah, par ses ambitions pour son école comme par son investissement envers ses élèves. De même, à mesure que l'on apprend à connaître Mr Barnes, ses tourments personnels tempèrent l'a priori excessivement rigoriste qu'avait laissé sa première scène. Ces personnalités s'imposent donc de manière convaincante.

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Cependant, l'atout - et l'originalité - de South Riding va sans doute résider dans sa capacité à chroniquer, de manière vivante et finalement étonnamment prenante, un quotidien qui, présenté autrement, paraîtrait vraiment anecdotique. Optant pour un réalisme sobre qui transcende tout son récit, c'est ainsi sans misérabilisme que la mini-série aborde les conséquences de la crise économique. De même, les personnages suivent des destinées toutes aussi nuancées, marquées par les blessures du passé, les tergiversations et incertitudes du présent, mais aussi une fidélité à des principes qu'ils ne pourront jamais renier. Ce sont des instantanés de vies ordinaires, sans romanesque excessif, ni réalisation démesurée, que propose South Riding. Et si on peut peut-être reprocher à la mini-série de ne pas avoir pleinement exploité certains personnages qui auraient mérité des développements plus conséquents, ses choix narratifs demeurent cohérents.

Sa spécificité restera sans doute la tonalité douce-amère qui s'en dégage, une atmosphère où la volonté de poursuivre, toujours tournée vers l'avenir, se mêle aux regrets sur lesquels on ne peut tirer un trait. Cette chronique quelque peu désillusionnée s'offrira ainsi une conclusion à son image parfaite, même si elle cède à certaines facilités et à quelques raccourcis. La vie est faite de choix, mais aussi 'd'aléas inattendus plus ou moins douloureux ; s'il n'est pas possible de s'immuniser contre les erreurs ou les blessures que le temps apporte, ce sont aussi ces expériences qui nous façonnent. A chacun, ensuite, de prendre sa destinée en main.

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Sur la forme, South Riding témoigne d'un savoir-faire que la BBC n'a plus à prouver. C'est un beau period drama, esthétiquement soigné et doté d'une réalisation qui sied particulièrement à l'ambiance qui y règne. L'image est travaillée, les teintes y sont plutôt sombres, en écho à cet instantané d'une époque troublée, où l'espoir se dispute à une douce amertume. Pour accompagner la narration, la mini-série dispose également d'une bande-son composée de quelques morceaux de musique classique bien choisis, avec une mention toute particulière aux morceaux utilisés dans le dernier épisode, poignants et forts comme il le fallait.

Enfin, South Riding bénéficie d'un dernier atout majeur, et non des moindres : un casting cinq étoiles savoureux et extrêmement solide, qui achève d'installer et de donner toute leur dimension aux différents protagonistes, comme au récit lui-même. Anna Maxwell Martin (Bleak House), avec un dynamisme communicatif et beaucoup d'authenticité, incarne à merveille cette institutrice pleine d'entrain, dont la sacerdoce éducatif lui permet d'oublier une vie bouleversée trop tôt par la perte d'un fiancé durant la Première Guerre Mondiale. Pour lui donner la réplique, David Morrissey (State of Play, Meadowlands, Blackpool, Thorne) est parfait pour jouer ce conservateur tourmenté par une vie personnelle bien compliquée qu'est Mr Carne. A leurs côtés, on retrouve notamment le toujours excellent Peter Firth (Spooks), Douglas Henshall (Primeval, The Silence) et son accent écossais incontournable, Penelope Wilton (Downton Abbey), toute aussi impeccable, mais encore John Henshaw, Shaun Dooley, Jennifer Hennessy ou Janine Mellor

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Bilan : Chronique ordinaire d'une bourgade anglaise des années 30, South Riding a le parfum doux-amer de l'instantané d'une époque troublée, où la reconstitution historique des enjeux politiques et sociaux représentatifs de leurs temps se mêle à l'incertitude des destins personnels. C'est un portrait vivant et nuancé, à la fois plein d'émotions et d'espoirs, mais aussi chargé de désillusions douloureuses et poignantes, qui est proposé. Si le téléspectateur s'attache presque instantanément à l'ambiance qui y règne , c'est que la mini-série parvient à séduire autant par sa simplicité maîtrisée que par l'authenticité des portraits qu'elle met en scène. En résumé, South Riding offre un retour aux fondamentaux de la fiction rafraîchissant et plaisant à suivre.


NOTE : 8/10


La bande-annonce de la mini-série :