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28/07/2010

(J-Drama / Pilote) Toubou Bengoshi : le Fugitif japonais est avocat.


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Dernier mercredi asiatique d'un mois qui aura été assez dense en la matière sur ce blog (le plus riche depuis sa création, avec 6 séries évoquées). Nous sommes fin juillet ; et qui dit été, dit nouvelle saison téléphagique au Japon, où les programmes télévisés se succèdent tous les trimestres. Je me suis engagée auprès de vous à être aventureuse, donc, cette semaine, je me suis risquée devant plusieurs pilotes déjà sous-titrés. Bon, pour le moment, je n'ai eu aucun coup de foudre. Si j'ai toujours plus éprouvé une curiosité réservée qu'une réelle passion pour le Japon (ce qui explique sans doute mon penchant moins naturel à explorer toutes ses fictions, ajouté au fait que nous sommes dans un paysage téléphagique que je fréquente moins et donc où il me manque certaines clés), ces derniers mois, je crois cependant avoir cerné mon idéal de séries japonaises : ce sont des Gaiji Keisatsu et autre Mother. Sauf que j'ai quand même un peu l'impression, sans vouloir trop m'avancer, qu'elles ne peuplent pas en majorité les grilles de programmes du pays du Soleil Levant.

En attendant la perle rare, je vadrouille donc. Je teste. Avec plus ou moins de succès. La démarche est d'autant plus difficile que j'ai beau vouloir me départir de mes réflexes de téléspectatrice occidentale, je dois avouer que certains dramas m'y font revenir instantanément. Franchement, est-ce qu'il est possible de regarder JOKER Yurusarezaru Sosakan sans dresser des parallèles avec Dexter ? Ou de découvrir Toubou Bengoshi sans penser au Fugitif ? Laissez-moi vous assurer que, si vous y parvenez, c'est que vous avez réussi à acquérir une indépendance culturelle que je n'ai manifestement pas. Pour couronner le tout, il y a certaines thématiques très prisées par les dramas japonais qui me laissent vraiment de marbre, notamment leurs rapports particuliers avec leurs professeurs de lycée ; quand on a pris la peine de regarder des Gokusen et autres DragonZakura, faut-il vraiment jeter un oeil sur Hammer Session! ?

Bref, notez bien que je fais des efforts, mais que le résultat n'est pas toujours à leur hauteur. Et si, aujourd'hui, je vais vous parler de Toubou Bengoshi, c'est en bonne partie dû au fait que j'ai toujours éprouvé une irrésistible attirance pour toute histoire de fugitif... Le fait que cela se passe au Japon est finalement l'occasion de renouveler le cadre géographique d'un thème pour lequel je signe toujours des deux mains.

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Toubou Bengoshi est donc un drama estival. Plus précisément, il s'agit d'une série diffusée sur Fuji TV, depuis le 6 juillet 2010. Comme son sous-titre anglais l'indique aux anglophones, "The Fugitive Lawyer", elle se propose de nous faire suivre la descente aux enfers d'un jeune avocat de Tokyo, Narita Makoto. Son patron, un juriste renommé, fervent protecteur des droits de la défense, est assassiné à son cabinet, tard un soir où il était resté travailler. Narita, venu rendre un dossier embarqué sans le vouloir, est assommé par le meurtrier qui prend la fuite. Or, en plus d'avoir été découvert sur place inanimé, la police met au jour, au cours de son enquête, des listing prouvant que Narita détournait de l'argent. Son patron l'aura découvert ; et il aurait donc tenté de se protéger par ce meurtre maladroit. Se retrouvant accusé d'un crime qu'il n'a pas commis, dans une affaire où toutes les preuves circonstancielles pointent vers lui, et où la peine encourue est la mort, Narita décide de s'enfuir pour essayer de prouver son innocence et découvrir le véritable coupable.

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Il réussit à s'échapper de l'hôpital où il se remettait, avant que la police ne procède à son arrestation. Commence alors une cavale mouvementée, où le fil conducteur va être la quête d'une vérité bien difficile à saisir, avec pour seul point de départ à son enquête, une secrétaire du cabinet qui a fait un faux témoignage à la police, brisant l'alibi du jeune homme pour l'heure du meurtre, et qui a ensuite disparu. En essayant d'élucider ce meurtre, Narita va croiser sur sa route différentes personnes, à l'existence brisée, qui ont, elles-aussi, connu leurs propres "accidents" de la vie. Parce qu'il n'a pas perdu cet idéalisme, rempli d'une certaine candeur, qui le caractérisait, Narita n'oublie pas ses chers textes de lois et délivre, au gré du hasard des rencontres, des consultations et conseils afin d'aider ces démunis rejetés hors du système.

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Présenter ainsi, vous devinez que nous sommes face à une série qui se rapproche par bien des aspects d'un formula show. A cela s'ajoute un fil rouge, formant une sorte de "mythologie" constituée par le premier meurtre et un ensemble de mystères, plus ou moins suggérés, qui viennent se greffer autour. Certes, il y a une certaine prévisibilité à suivre les avancées chaotiques, accompagnées de fuites toutes aussi mouvementées, de Narita. Pour autant, toute aussi calibrée qu'elle paraisse aux premiers abords, je dois dire que Toubou Bengoshi a aussi su me surprendre au cours de ses deux premiers épisodes.

Au-delà de ses apparences un peu manichéennes, les premières "affaires" du fugitif Narita se révèleront plus complexes et nuancées qu'attendues. L'ancien avocat ne fait pas de miracles et chaque cas a ses imprévus. Ainsi le premier se conclura d'une façon qui prend presque à contre-pied un téléspectateur qui l'avait déjà inconsciemment classé. Cela ne verse pas forcément dans une réelle originalité, mais les scénaristes démontrent des ressources pas inintéressantes. A voir s'ils sauront se renouveler et comment tout cela évolura.

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Parallèlement à ces "affaires du jour", l'enquête sur le meurtre du célèbre avocat progresse lentement (voire quasiment pas au cours des deux premiers épisodes). Lors du second, la police a depuis longtemps cessé de chercher d'autres suspects et, un an après les faits, Narita en est toujours au même point. S'il est devenu plus méfiant et prompt à se dissimuler lorsqu'il croise des forces de police, il recherche toujours l'ancienne secrétaire, s'accrochant au seul élément concret dont il dispose : ce faux témoignage qui a achevé de détruire sa crédibilité auprès des autorités.

Les scénaristes distillent bien quelques indices, dévoilant d'obscures conversations ou attitudes équivoques qui soulèvent des questions chez le téléspectateur, mais tout paraît encore bien trop flou pour oser dresser la moindre conjecture. Si bien que l'on reste, pour le moment, dans l'expectative, au même niveau que Narita, s'interrogeant sans avoir les moyens de commencer à entre-apercevoir ce qui se cache réellement derrière ce meurtre et le piège qui s'est refermé sur lui. Un peu de mystère, voilà de quoi aiguiser notre curiosité ! Si bien que le reste des intrigues se déroulant sans anicroches, au final, Toubou Benhgoshi n'est pas déplaisante à suivre.

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Enfin, au casting, on retrouve des figures familières du petit écran japonais. Si je n'avais pas gardé de souvenirs de notre précédente rencontre (qui a dû avoir lieu, d'après sa filmographie, il y a fort longtemps, dans quelques scènes de Gokusen), Kamiji Yusuke (plus récemment vu dans Gyne ou Scrap Teacher) s'en sort plutôt de façon globalement satisfaisante dans son rôle de juriste qui voit toute sa vie bouleversée. A ses côtés,  Ishihara Satomi (vue dans Voice l'année dernière et que j'ai dû croiser, du temps de ma première exploration des j-dramas, dans Kimi wa Petto) incarne la fille aînée de l'avocat assassiné. Enfin, Kitamura Kazuki (Bambino!) joue le policier originellement en charge de l'enquête qui aura trouvé en Narita, le coupable aussi parfait qu'idéal.

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Bilan : Toubou Bengoshi se suit sans difficulté, ni déplaisir, mais sans non plus marquer le téléspectateur. Elle est proprement calibrée, parfois un peu trop prévisible. Cependant, sans faire dans l'originalité, elle s'offre aussi quelques développements intéressants, notamment dans son quotidien qui la rapprocherait plus d'une déclinaison de formula show, qui se révèlent plus subtiles et nuancés qu'il n'y paraîtrait a priori. Si bien qu'il n'est pas difficile pour un téléspectateur appréciant le concept de départ de se laisser prendre au jeu du mystère ambiant. Investissant un registre particulier au sein de la thématique policière, celui d'un Fugitif, Tobo Bengoshi remplit donc honnêtement son rôle. On regrettera peut-être qu'elle ne fasse pas preuve de plus d'ambition, mais peut-être le drama saura-t-il s'affirmer progressivement.


NOTE : 5,75/10


Quelques images de la série (à la fin du monologue de Kamiji Yusuke) :

21/07/2010

(K-Drama / Pilote) Gumiho : Tale of the Fox's Child (Grudge : The Revolt of Gumiho) : immersion soignée dans les légendes des contes coréens

 

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En ce mercredi asiatique, changeons un peu de style. Vous songez à vous ménager une petite pause dans votre dégustation de comédies romantiques (comment ça, Coffee House ne vous a pas séduit ?!) ? Vous vous êtes montrés peu enclin à vous laisser entraîner dans des fictions de guerre (certes, Road Number One n'était pas la meilleure tentative d'incursion dans ce genre) ? Rassurez-vous, la télévision sud-coréenne a d'autres cordes à son arc. KBS2 a ainsi pensé à vous et propose une séduisante alternative qui, avec son esthétique ambitieuse, dévoile des atours chatoyants : Gumiho : Tale of the Fox's Child.

Diffusé les lundi et mardi soirs, depuis le 5 juillet 2010, c'est un drama qui n'hésite pas à mélanger différents genres, pour laisser entrevoir un potentiel des plus intéressants. Car au-delà du fantastique, définitivement à l'honneur cet été en Corée du Sud, à travers la fameuse légende des Gumihos - dont je vous avais déjà parlé il y a quelques semaines pour l'anthologie Hometown Legends (2008) -, il s'agit d'une série historique, où actions et sentiments viennent régenter une quête plus profonde, commune aux différents protagonistes : un récit de survie et de cohabitation.

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Le premier épisode de Gumiho : Tale of the Fox's Child pose une situation, plus qu'il ne donne d'indications concrètes sur la tonalité à venir de la série. Semblant naviguer entre plusieurs genres, c'est grâce à ce mélange original - et, en même temps, intrigant - qu'il retient l'attention d'un téléspectateur qui, s'il n'est pas encore conquis, voit son intérêt irrémédiablement piqué par la richesse des thématiques soulevées au cours d'une première heure laissant entrevoir bien des promesses.

L'histoire en elle-même mérite bien un épisode d'exposition pour que ses tenants et aboutissants soient compris. Derrière l'apparence de jeune femme réservée et séduisante qu'elle renvoie, Goo San Daek est en réalité une créature de légende, une Gumiho. Lorsqu'elle n'apparaît pas sous ses traits argentés, elle ressemble à une humaine normale. Il y a dix ans de cela, un homme s'était rendu jusqu'à son repère et l'avait vue sous sa véritable forme. Elle ne l'avait alors épargné qu'avec la promesse qu'il ne parlerait jamais de cette rencontre. Sur le chemin du retour qu'il emprunta, elle s'était ensuite présentée à lui sous des traits humains, le séduisant sans difficulté.

Pourquoi un tel subterfuge ? Si une Gumiho peut vivre, pendant dix années, comme une épouse modèle aux côtés d'un homme, elle pourra accéder à un trésor plus précieux que sa vie : embrasser cette humanité tant prisée, quasi-inaccessible, et se débarrasser de sa nature de Gumiho. Et, consécration la plus précieuse pour une mère préoccupée par l'avenir de sa descendance, l'enfant qu'elle aurait alors eu à l'occasion cette union deviendrait également humain, échappant à la "malédiction".

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Les années ont passé depuis la rencontre de San Daek avec celui qui est désormais devenu son époux. De leur mariage, est née Yeon Yi. Cette dernière, aujourd'hui âgée de 9 ans, est devenue une fillette éveillée et curieuse. Mais, un soir, peu de temps avant que le fameux cycle décennal ne se soit entièrement écoulé, l'alcool délie la langue du père, trop bavard, qui raconte la rencontre qu'il fit, presque dix ans auparavant, au fond d'une grotte, avec un gumiho. Cette parole inconséquente d'ivrogne brise la promesse faite jadis pour lui épargner la vie, et rompt du même coup le processus enclenché qui aurait permis à San Daek d'accéder à cette humanité qu'elle aura frôlé. En plus de perdre sa femme, c'est également sa fille que l'homme condamne. Yeon Yi ne pourra rester une petite fille comme les autres ; la puberté approchant, elle se transformera en gumiho. 

Le quotidien policé de la modeste famille prend fin cette nuit-là. Le choc de la découverte de la véritable nature de sa femme sera fatale à un mari à l'instabilité mentale accrue par l'absorption d'alcool. Il se suicidera dans la nuit mouvementée suivant la révélation. Laissant son épouse et leur fille, livrées à elles-mêmes, dans un royaume dévasté, en proie à une épidémie semant derrière elle une traînée de cadavres et des villages dépeuplés.

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Parallèlement, le pilote suit un autre fil rouge, qui rejoindra l'histoire principale avant la fin de l'épisode. Il nous introduit ainsi dans la demeure d'une famille noble locale. De santé fragile, l'état de la petite fille du maître de maison s'est aggravé, la laissant aveugle. A court de solution, son père consulte un shaman qui lui livre une solution prophétique particulièrement glaçante. Pour assurer une longue vie à l'enfant, il devra trouver l'enfant qui est née en même temps qu'elle... pour lui prendre son foie, seul remède qui garantirait la survie de sa fille. Le shaman prédit que l'enfant en question viendra naturellement à eux, entraînée par le destin.

Nul besoin de préciser, vous l'avez déjà deviné : la fin de l'épisode nous révèle que la fillette en question, visée par cette prophétie, est Yeon Yi. On retrouve ainsi ici une thématique classique à toute fiction sur les gumihos : la consommation d'organes ayant un effet revivifiant à part. Ici, de manière inversée par rapport au folklore local, qui assimile ces créatures à une parenté démoniaque, les scénaristes ont choisi de faire du gumiho la proie.

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Ainsi exposée, la situation de départ révèle déjà la complexité inhérente à ce drama, la condition de gumiho des deux héroïnes ne venant que précariser un peu plus un sort déjà peu enviable. Il s'agit d'un secret qu'elles ne doivent dévoiler sous aucun prétexte. Or, Yeon Yi ignore pour le moment tout de sa véritable nature, ses pouvoirs ne s'étant pas encore manifestés, puisqu'elle se situait dans un entre-deux, tendant à consacrer son humanité grâce au processus de transformation en cours de sa mère. Encore enfant, immature, innocente et spontanée comme peuvent l'être les fillettes de son âge, elle n'est pas en mesure de se protéger. Ce rôle va devoir être assuré par une mère, dont la méfiance des humains est viscérale.

L'intérêt de ce drama va être de ne pas hésiter à combiner plusieurs problématiques. Au poids de ce secret à préserver vient donc s'ajouter la prophétie du shaman : pour sauver la fille noble, Yeon Yi devra être sacrifiée, le jour de ses 10 ans, soit dans 3 mois. Une sorte de double épée de Damoclès pèse sur sa tête. Le pilote tire ici admirablement bien son épingle du jeu, en réussissant à mêler de façon plutôt habile et inspirée la diversité de ces enjeux, combinant efficacement ces thématiques fantastiques.

Cette originalité dans le paysage des kdramas de la saison 2010 se montre donc d'autant plus attractive, que ce qui frappe lors du visionnage de cet épisode, au-delà d'une homogénéité encore perfectible, c'est sa richesse.

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Cette richesse se manifeste à plusieurs niveaux, à commencer par la diversité de contenu que propose ce pilote.

Si Gumiho : Tale of the Fox's Child est une série dont les personnages principaux sont des héroïnes qui n'ont rien de guerrières, elle ne va pas hésiter à utiliser sa connotation fantastique pour impulser de l'action et mettre en scène des confrontations violentes. Exploitant opportunément le thème de la dualité entre l'animalité, à laquelle renvoie la nature de gumiho, et l'humanité, nous avons ainsi droit à plusieurs scènes de combat, se distinguant par de belles chorégraphies. Parmi ces passages marquants, il y en a notamment un qui symbolise parfaitement tout le potentiel de la série. Il est à la fois atypique - puisqu'il s'agit d'une attaque non par des humains, mais par des tigres - et traditionnel télévisuellement parlant, au sens noble du terme : c'est une course-poursuite à travers une forêt de bambous, digne exercice de voltige, dont le style n'est pas sans évoquer des dramas références comme Damo.

Au final, ce pilote propose un contenu dense, présenté avec beaucoup de rythme et qui alterne les tonalités, tantôt proche du drame personnel classique et intimiste, d'autre fois plus proche des codes scénaristiques de la série historique où viennent se mêler quelques combats. S'il n'y a semble-t-il aucune intrigue de cour à attendre, en revanche, le cadre de la société confucéenne, socialement si rigide et codifiée, de la Corée du Chosun (Joseon) devrait également offrir matière à réflexion sur les rapports entre les différents protagonistes.

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Au-delà de toutes les pistes potentielles qu'ouvre ce premier épisode, qui suffisent à retenir l'attention du téléspectateur, il est impossible d'en rédiger une review complète sans évoquer et louer Gumiho : Tale of the Fox's Child sur sa forme. Car la série se situe incontestablement dans la tranche haute des dramas sud-coréens, en terme de réalisation, sans non plus trop en faire, à la différnece d'un Chuno (Slave hunters). Bénéficiant d'une esthétique soignée, particulièrement aboutie, agrémentée de plans admirablement bien maîtrisés, et - surtout - d'une photo superbe, ce drama est un vrai plaisir pour les yeux du téléspectateur. Les couleurs à l'écran sont belles et chatoyantes, sans être racoleuses. Si bien qu'on ressent l'impression très agréable d'avoir devant soi une production pleinement travaillée jusque dans ses détails formels. Cette apparence est corroborée par le volet musical de la série : la bande-son s'inscrit dans une sobriété toute en retenue, très opportune. Elle joue sur l'ambiance plus ou moins dramatiques de certaines scènes, accentuant le trouble des tonalités et le mélange des genres, sans jamais verser dans la surenchère.

Enfin, le casting ne dépareille pas de ce bel ensemble. Se partagent la tête d'affiche, l'actrice accomplie, Han Eun Jung (Cinderella Man, The Lawyers of the Great Republic Korea), en mère Gumiho protectrice, et la jeune, et pourtant omni-présente dans le petit écran sud-coréen, Kim Yoo Jung (cette année, elle a joué la jeunesse des héroïnes de Dong Yi et de Road Number One). A leurs côtés, on retrouve notamment Jang Hyun Sung (croisé, un peu plus tôt cette saison 2010, dans JeJoongWon), la jeune Seo Shin Ae, Suh Joon Young, ainsi que quelques habitués des seconds rôles de dramas, tels Kim Jung Nan (Creating Destiny), Kim Gyu Chul (Merchant Kim Man Deok) ou encore Im Seo Yeon.

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Bilan : Aussi avare en indications sur l'avenir que soit le pilote de Gumiho : Tale of the Fox's Child, il remplit très efficacement sa première fonction, celle d'aiguiser la curiosité d'un téléspectateur rapidement séduit, tant par l'esthétique, qu'intrigué par ce mélange des genres.

Bénéficiant d'une écriture solide, ce premier épisode, riche en promesses, révèle un potentiel indéniable, en trouvant l'inspiration aussi bien auprès des codes des dramas historiques, sans renier les scènes d'action, qu'auprés de dramas familiaux plus intimistes. Le tout demeure assujetti à une dose de fantastique légendaire, qui permet de suivre une thématique centrale originale, et qui tranche avec les sujets traditionnels des kdramas : une quête de survie, une réflexion sur la différence... Sous-tendant et transcendant les storylines, une question demeure : quels rapports sont possibles entre humains et Gumiho ?

S'il est trop tôt pour émettre un jugement éclairé sur le drama en lui-même, ce pilote a assuré l'essentiel pour moi : il m'a donné envie de découvrir quel sort attend les personnages introduits. Et je suis d'autant plus enthousiaste que, par son sujet, il semble exploré un univers bien différent de ceux que j'ai eus l'occasion de suivre depuis le début de 2010.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :


Le générique de la série :


17/07/2010

(K-Drama / Mini-série) Running (Running, Gu) : une sobre et rafraîchissante histoire d'amitié et d'entrée dans l'âge adulte

 

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S'il est toujours attrayant de parler diversité culturelle et voyages téléphagiques exotiques, il est aussi assez amusant de constater combien certaines thématiques ont un caractère universel, aptes à servir de fondements à ces mini-séries de transition qu'aiment proposer les chaînes, sorte de parenthèse en adéquation avec cette période estivale où le téléspectateur sera plus prompt à rechercher l'alliance entre la fraîcheur et les retrouvailles avec les classiques, pour un retour aux sources regénérateur.

Prenons l'exemple d'un créneau entrant parfaitement dans cette optique, celui de la série où le sport, par sa pratique ou son renoncement, sera le reflet d'un parcours d'initiation à la vie, illustration de la maturation d'une jeunesse pleine d'ambition qui doit apprendre à faire la part des choses entre rêve et réalité. On a tous déjà vu au moins une demi-douzaine de fictions télévisées exploitant ce thème... Mais les vieilles recettes ont cette aptitude à conserver le charme déroutant d'une simplicité un peu désuette et d'une humilité touchante, qui leur permet d'attirer le téléspectateur en dépit de ses ingrédients trop bien connus.

C'est sans doute pour cela que, au cours de ces dernières semaines, le téléspectateur curieux (parce que je reconnais qu'elles occupent une place, qu'on qualifiera d'anecdotique, dans la sphère téléphagique - mais, en même temps, raison de plus pour prendre le temps d'en parler) a pu suivre, dans ce même créneau de la mini-série sportive/estivale, sur l'apprentissage de la vie, deux mini-séries très dissemblables, mais ayant un rapport au sport. Une anglaise, sur BBC2, intitulée Dive, et une sud-coréenne, sur MBC, intitulée Running (Running, Gu). Chacune à sa manière, traitant dans ce cadre de thématiques très différentes, par le biais d'une approche personnelle propre à son pays d'origine, elles ont apporté leur pierre à l'édifice déjà chargé de ce type de fiction.

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Diffusée sur MBC du 10 au 17 juin 2010, Running Gu est une mini-série composée de 4 épisodes d'une heure chacun. Servant surtout de transition dans la programmation de la chaîne, qui lui offrit une exposition quelque peu chaotique, elle s'inscrit dans un registre rafraîchissant, assez chaleureux, correspondant bien à la saison estivale. C'est pourquoi je pense qu'elle mérite bien un petit coup de projecteur.

Cette mini-série raconte l'histoire de trois amis d'enfance, dont l'amitié a été ébranlée par les choix de chacun et les épreuves de la vie. Le héros, Goo Dae Gu, s'était très tôt découvert une passion pour la course à pied. C'est dans ce cadre qu'il avait noué une relation teintée d'une saine compétitivité avec Heo Ji Man, le fils d'un gros entrepreneur de la région. Concurrence sportive, mais aussi sentimentale, pour le coeur de la belle Moon Haeng Joo, qui complètait ce trio.

Seulement, à l'époque, Dae Gu devait également s'occuper de son frère, jeune garçon un peu simple d'esprit dont son père lui confiait la garde au cours des courses auxquelles il inscrivait ses garçons. Un jour, l'appel de la victoire se fit trop fort pour un Dae Gu encore enfant, qui ne prit pas sur le moment conscience de la dangerosité de sa décision. Il gagna la course dans laquelle ils étaient engagés, en délaissant la surveillance de son frère. Ce dernier, dont la passion pour les trains surpassait tout, s'écarta du parcours balisé pour s'aventurer sur les rails d'un chemin de fer. Un train arriva. L'accident mortel fut inévitable, laissant sa famille traumatisée.

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Les années passèrent. Les blessures restèrent, les non-dits s'installèrent, chacun grandissant de son côté. Finalement, ce sont trois jeunes gens, presque adultes, mais toujours sous la coupe de leurs parents, que l'on découvre au début de la série. Dae Gu a abandonné la course à pied, sur l'insistance d'un père profondément marqué par ce drame d'avoir vécu la mort d'un de ses fils, révulsé par ce sport qui a pris un des trésors de sa vie. Dae Gu se ressent toujours d'une culpabilité diffuse, qu'il n'assume pas pleinement. Ayant grandi derrière cette ombre, en porte-à-faux d'un père excessivement émotionnel, facilement étouffant, il ne s'est jamais vraiment affirmé, s'efforçant de s'occuper de cette figure restée ancrée dans le passé, tout en laissant la vie s'écouler. Sans ambition, n'ayant jamais comblé ce vide intérieur qui s'est formé, il végète en travaillant au port de la ville.

Parallèlement, Ji Man a poursuivi une carrière sportive, sous l'impulsion d'un père qui a reporté sur lui toutes ses ambitions de gloire et qui rêve de le voir représenter la Corée du Sud, lors de l'épreuve de marathon des prochains Jeux Olympiques. Régissant la vie de son fils d'une main de fer, n'hésitant pas à embaucher tout un staff autoritaire, il étouffe peu à peu Ji Man. En grandissant sur des chemins très différents, ce dernier s'est éloigné de Dae Gu. La concurrence a pris le pas sur leur amitié ; d'autant que, désormais à l'âge des épanouissements amoureux, la douce Haeng Joo exacerbe les pointes de jalousie et les sentiments conflictuels de ses deux amis. Elle-aussi, pourtant, cherche toujours sa voie. Aspirante musicienne ayant subi échec sur échec à Séoul, elle s'est rabattue sur un poste de professeur intérimaire, qu'elle essaye de concilier avec les rêves de sa mère.

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Le retour au pays de Ji Man et Haeng Joo, ainsi que les problèmes financiers causés par les éclats d'humeur du père de Dae Gu, vont rapprocher à nouveau, presque naturellement, ces trois jeunes gens qui s'étaient perdus de vue. C'est dans cette dimension très humaine, dans ce registre où l'émotionnel, à fleur de peau, donne une épaisseur supplémentaire à une histoire somme toute excessivement classique, que réside l'un des charmes principaux de Running, Gu. La mini-série parvient à dépeindre, avec une écriture spontanée et naïve, exprimant une authenticité assez touchante, les creux et les vagues d'une amitié fragile, parfois paradoxale, mais dont les fondations sont finalement plus profondes que les tensions apparentes pourraient le laisser croire.

Le sport en toile de fond fait figure de métaphore traditionnelle, réflexion inévitable sur le dépassement de soi. Son intégration dans le récit se fait sans heurt, ni rupture de la narration. Pas besoin pour le téléspectateur d'avoir la moindre affinité à l'égard de cette activité pour ressentir, avec intensité, les émotions tourbillonnantes de jeunes gens qui se cherchent, entrant progressivement dans l'âge adulte. Le contexte sportif se justifie d'autant plus que Running, Gu fait preuve d'une approche plus subtile qu'il n'y paraît. Car si la course à pied est une passion savourée sans arrière-pensée par Dae Gu, pour qui elle s'analyse comme un vecteur d'émancipation, face à un père dont la vie s'est figée avec la mort de son autre garçon, elle est, au contraire, une activité aliénante, presque oppressante lorsqu'elle est poussée à son extrême, pour Ji Man, qui doit subir l'emprise d'un père omniprésent.

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A travers ces adversités personnelles qu'ils doivent affronter seuls, Running, Gu est une ode pleine de sobriété, dédiée à l'amitié. Au-delà du sport, c'est plutôt la thématique de jeunes adultes confrontés aux attentes de leurs parents qui se révèle centrale. Le lien qui les unit sera ce qu'il leur permettra de trouver leur voie et de s'épanouir. La mini-série met donc en avant tout un aspect humain. Cette morale portée à l'écran avec une certaine naïveté, mais pas déplaisante à suivre, est un refus obstiné de réduire l'épanouissement personnel à la seule question de la réussite quantifiable dans un domaine, qu'il s'agisse, ici, du sport ou de la musique.

Enfin, sur la forme, Running, Gu dispose d'une réalisation solide, accompagnée d'images relativement soignées, où abondent les couleurs chatoyantes. Son casting, composé de jeunes acteurs, ne déparaille pas dans cette atmosphère finalement pleine de fraîcheur qui est mise en avant. Le trio principal, homogène, remplit efficacement son office ; on y retrouve Baek Sung Hyun (That fool), Park Min Young (elle sera à l'affiche, à la rentrée de septembre, du drama qui s'annonce comme un mélange atypique des genres, Sungkyunkwan Scandal) et Yoo Yun Suk (croisé dans Soul).

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Bilan : Running, Gu est le genre de mini-série estivale qui se visionne sans conséquence. D'une simplicité rafraîchissante, portée par une dose d'émotionnel dépourvue d'artifice et des ressorts scénaristiques classiques, c'est une histoire sur la vie, ses réussites comme ses échecs... Au final, elle nous propose une fable sur l'amitié, mais aussi sur la maturité, avec la gestion difficile de cette arrivée à l'âge adulte où il faut apprendre à s'émanciper, à vivre par soi-même. Le tout garde en toile de fond la thématique du dépassement de soi propre à ces fictions "sportives"...

Ne vous attendez pas à y trouver quelque chose d'original, mais, paradoxalement, c'est justement cette sobriété, ce naturel sans artificialité, qui font que la mini-série sonne souvent juste. Parfois, ce registre suffit pour offrir un moment agréable au téléspectateur. C'est ce que réussit Running, Gu. Rien de plus, rien de moins.


NOTE : 6,25/10


La bande-annonce de la mini-série :

14/07/2010

(K-Drama / Pilote) Road Number One : mélodrame excessif entre Séoul et Pyongyang


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Ainsi que je l'avais mentionné dans le "mercredi asiatique" de la semaine passée, en vous présentant le nouveau drama de KBS, Comrades (Jeonwoo), l'anniversaire des 60 ans du début de la Guerre de Corée est commémoré par l'industrie de l'entertainment sud-coréen, tant sur le grand que sur le petit écran. Si bien qu'outre Comrades, un autre drama s'est également intéressé au sujet. Diffusé sur la chaîne MBC, depuis le 23 juin 2010, il s'agit de Road Number One.

Accompagné d'un important buzz médiatique, c'est peu dire que ce drama avait affiché des ambitions. La seule mention de son budget indiquait l'investissement réalisé. Mais, d'emblée, Road Number One a déçu sa chaîne par ses audiences ; la suite de la diffusion ayant confirmé cette tendance, la série tournant entre 7 et 8% de parts d'audience. Certes, diffusé le mercredi et le jeudi soir, Road Number One a eu la "malchance" de se trouver en concurrence directe avec un drama bien établi, lancé au début du mois de juin, Baker King Kim Tak-Gu, qui est le succès du moment en Corée du Sud et qui a franchi la barre symbolique des 30% de part d'audience, concomitamment aux débuts de Road Number One.

Mais cette forte concurrence n'explique pas tout. En effet, dans la "guerre" que se livrent KBS et MBC, il semble que les téléspectateurs aient choisi Comrades pour revivre ce pan de leur histoire. Doté de moyens financiers moindres, il est sans doute un drama moins abouti esthétiquement parlant, mais son scénario, plus dense et authentique, aura su éveiller un intérêt, que ne sera pas parvenu à générer le naufrage mélodramesque que s'offrit Road Number One dans ses premiers épisodes.

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A la différence de Comrades, qui faisait le choix de nous plonger directement dans un conflit déjà officiellement entamé, Road Number One prendra le temps du premier épisode pour poser les fondations des relations entre les personnages, rappelant au passage que les affrontements sporadiques entre le Nord et le Sud avaient lieu le long du 38° parallèle bien avant le déclenchement de l'offensive nord-coréenne du 25 juin 1950.

Si le contexte historique demeure dépeint en arrière-plan, il est immédiatement clair que Road Number One va faire le choix de nous raconter, avant tout, la destinée de protagonistes emportés par le tourbillon des évènements, et non de mettre en lumière les évènements eux-mêmes. Après une introduction assez pompeuse, pressée de souligner la tragédie d'une génération déchirée, la série opte pour un angle mélodramatique excessivement classique, reprenant les traditionnels codes scénaristiques des romances perturbées, si chères à la télévision sud-coréenne.

Fils du serviteur d'une famille aisée, Lee Jang Woo côtoie depuis son enfance la fille du maître des lieux, la jolie Kim Soo Yeon. Se tissent peu à peu entre eux des liens qui vont constituer la base d'un amour profond, qui se forge et se consolide à mesure que les deux jeunes gens grandissent. Promis l'un à l'autre, le chaos économique qui suit la défaite et la fin de l'occupation japonaise va venir bouleverser leurs plans. La famille de Soo Yeon n'est plus en mesure d'assurer le rêve de la jeune fille, en lui finançant des études de médecine. Jang Woo fait alors le choix de s'engager dans l'armée, espérant utiliser sa solde pour l'aider. Seulement, au cours d'un violent affrontement contre un commando nord-coréen infiltré sur le territoire, alors que toute son unité est décimée, Jang Woo est grièvement blessé. Admis dans un hôpital militaire pour une longue convalescence, la nouvelle de sa mort parvient jusqu'à son village d'enfance, laissant Soo Yeon dévastée.

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La dynamique de départ se révèle donc d'une prévisibilité poussive, que l'excès de dramatisation vient encore plus exacerber. Comme vous le devinez, Jang Woo retrouve finalement le chemin de son village, la tête pleine de projets d'avenir et envisageant son futur mariage avec enthousiasme... deux ans après que sa mort ait été annoncée. Soo Yeon ne l'a pas oublié, mais dans son désespoir - et devant l'escalade des tensions entre le Nord et le Sud -, elle a cherché du réconfort auprès d'un officier qui l'empêcha de commettre l'irréparable, un soir de détresse. Elle est donc désormais fiancée à Shin Tae Ho. Lorsque Jang Woo revient, le 24 juin 1950 (les coïncidences du calendrier !), leur mariage est prévu pour le lendemain... L'amour entre les deux jeunes gens n'a pas flêtri ; et Tae Ho comprend immédiatement qu'il a devant lui un rival, probablement intouchable. Mais les tensions sentimentales de nos trois tourtereaux vont être interrompues, à l'aube du 25 juin 1950, par l'offensive nord-coréenne, dont les chars d'assaut balaient sur leur passage, soldats sud-coréens et civils désarmés.

En présentant ces débuts, il est facile de percevoir quels écueils Road Number One n'a pas su éviter. Tirant à outrance sur la corde sensible et lacrymale du mélodrama, les deux premiers épisodes cumulent les excès. Trop rapides dans l'enchaînement des péripéties, comme s'ils étaient lancés dans une course au point de non-retour tragique. Trop superficiels pour approfondir des personnages tellement caricaturaux que les téléspectateurs n'ont ni l'envie, ni l'occasion de s'attacher à eux. Trop sur-chargés d'un émotionnel poussif et surjoué, qui place les protagonistes en porte-à-faux vis-à-vis du volet historique sensé être relaté dans ce drama, et nous laisse en observateur extérieur ne parvenant pas à s'impliquer, ni même à s'intéresser, aux enjeux artificiels mis en avant.

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Ces impressions négatives sont symptomatiques d'un problème plus structurel dans la construction narrative de la série. En effet, d'emblée, Road Number One souffre d'une scission dans son récit, qui la prive d'une nécessaire et vitale homogénéité. Car si le tourbillon de la guerre civile menace en arrière-plan, les préoccupations des personnages semblent toutes autres, microcosme apparent qui n'échappera pourtant pas à ce raz-de-marée. Comme aveuglés par un égoïsme émotionnel qui finit par être agaçant, les protagonistes de la série laissent de marbre le téléspectateur.

En fait, la série donne l'impression de vouloir jouer sur deux tableaux distincts, celui de la fiction de guerre et celui du mélodrame amoureux. Mais ce double objectif est trop lourd à porter, et cette tentative se solde par un double échec. Si les quelques scènes de combat sont probablement les plus réussies des deux premiers épisodes, tant du point de vue visuel, que pour la tension générée, elles souffrent du manque d'implication d'un téléspectateur qui ne rentrera jamais véritablement dans l'histoire. Parallèlement, la dimension de mélodrame, disproportionnée, prend des allures de caricature maladroite. Parce qu'il ne suffit pas de faire pleurer ses personnages, elle nous laisse, au mieux insensible, au pire exaspéré.

Au final, sans jamais générer la moindre empathie, ce sont toutes les fondations de Road Number One qui se révèlent trop instables, incapables de prendre la mesure des ambitions initialement affichées. Noyé dans le mélodrame indigeste, le téléspectateur sombre dans l'ennui, avec la série.

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C'est dans sa forme que l'on va retrouver le dernier vestige des ambitions défuntes de Road Number One (et de ses atouts budgétaires). Sa réalisation est bien loin de l'aspect cheap conservé par Comrades. D'un esthétique abouti, elle ne manque pas d'images bien cadrées et bénéficie d'une photo soignée, qui crédibilise notamment les scènes de combat (même si le réalisateur ne résiste pas toujours à la tentation dommageable de trop en faire, suivant par là l'élan d'ensemble de la série).

Malheureusement, enfin, il faut reconnaître que le casting n'arrange pas les choses, ou du moins deux des trois acteurs principaux qui souffrent des mêmes travers que leur drama, celui des excès. J'avais gardé un souvenir plutôt bon de So Ji Sub (Cain and Abel) dans What happened in Bali ; mais, dans Road Number One, ni lui, ni Kim Ha Neul (qui avait déjà cette tendance à trop en faire dans On Air) ne réussissent pas à porter la pseudo corde sensible dans laquelle le drama les enferme. Ils proposent une interprétation poussive, tout en sur-jeu, qui sonne faux. Ce manque d'authenticité ressenti est peut-être en partie dû à l'écriture même de la série, reste que cela n'aide pas Road Number One à échapper à ses dérives. Seul Yoon Kye Sang (Triple) tire un peu son épingle du jeu, avec une performance toute en sobriété, dont la retenue tranche agréablement avec l'ambiance globale.

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Bilan : La virulence de la critique est sans doute à la hauteur de la déception, suite à l'attente qu'avait pu générer Road Number One. Sur-exploitant une dramaturgie qui manque d'authenticité et qui ne parvient jamais à susciter la moindre empathie, la série échoue sur l'écueil du mélodrame excessif et poussif, surfant sans gloire, ni réussite, sur des poncifs surannés. Handicapée par la déconnexion entre ses enjeux sentimentaux exacerbés et son contexte de guerre civile, elle ne trouve pas le bon équilibre entre ces différents éléments.

Même si les dramas coréens ont l'habitude de s'inscrire dans la durée, j'ai du mal à imaginer que Road Number One puisse redresser la barre. Le tournage de la série s'étant déjà achevé - ce qui est rare à la télévision sud-coréenne, qui a plutôt tendance à fonctionner à flux tendu -, il est peu probable que les scénaristes puissent rectifier le tir par la suite.

En résumé, pour un drama sur la Guerre de Corée, il faudra sans doute vous contenter d'un Comrades, qui est loin d'être parfait, mais demeure intéressant.


NOTE : 3,75/10


La bande-annonce du drama :


Le générique de la série :

10/07/2010

(K-Drama) City Hall : une attachante série dans les coulisses de la politique, de la mairie à la Maison Bleue...



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Comme je vous l'annonçais dans l'édito de ce mois de juillet (cf. à gauche), le "mercredi asiatique" est une case bien étroite pour contenir toutes les séries asiatiques dont j'ai envie de vous parler actuellement. La semaine blanche causée par la triste nouvelle de la fin du mois de juin n'a pas arrangé les choses. Par conséquent, je vous propose de profiter du, certes tout relatif, calme estival et du fait que je ne critique aucune série épisode par épisode en ce moment, pour déborder un petit peu et glisser quelques reviews de dramas en provenance du pays du Matin Calme (voire au-delà), en dehors du planning traditionnellement suivi par ce blog.

Aujourd'hui, je vais ainsi vous parler d'un drama que j'ai fini il y a déjà quelques semaines. Avec lui, nous remontons  un peu le temps, car il ne date pas de cette année, mais du printemps 2009. Diffusé sur SBS et composé de 20 épisodes, il figure, à mes yeux, parmi les jolies réussites de la saison dernière en Corée du Sud et mérite pleinement qu'un article, sous forme de bilan global, lui soit consacré. Il s'agit de City Hall.

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City Hall est une série aussi rafraîchissante qu'enthousiasmante qui nous plonge dans les coulisses de la vie politique locale, et même nationale, à travers les destins croisés de plusieurs personnages aux parcours et aux motivations très différents. Nous y suivons le tourbillon rythmé des ambitions des uns et des autres, de la modeste mairie de la petite ville d'Inju aux rêves présidentiels les plus démeusurés, conduisant à la Maison Bleue (Parenthèse culturelle : La "Maison Bleue" est le nom utilisé pour désigner la résidence présidentielle, située à Séoul - de la même manière qu'on parle de Maison Blanche aux Etats-Unis. Elle doit son appelation aux tuiles bleues de son toit : cf. photo).

Tout débute avec la nomination d'un nouveau maire adjoint dans cette ville au parfum de ruralité qu'est Inju. C'est un jeune carriériste aux dents longues, Jo Gook, qui est désigné. Brillant et rompu aux manoeuvres politiques en tout genre, il est plein d'ambitions et parrainé par quelques puissantes figures politiques, dont l'emblématique "BB" (Big Brother). Le jeune homme débarque donc l'esprit déjà tourné vers des échéances nationales, prêt à actionner un agenda politique serré, sensé le conduire, à moyenne échéance, dans les plus hautes sphères du pouvoir, à destination du poste suprême de la vie politique sud-coréenne, la présidence.

Parallèlement, bien loin de ces rêves de grandeur abstraits, Shin Mi Rae mène la vie anonyme d'une secrétaire servant les cafés, dans les échelons les plus bas des employés de l'hôtel de ville d'Inju. D'une spontanéité parfois désarmante, elle se disperse entre services rendus à des amis et son quotidien familial, aux côtés de sa mère, stagnant sans véritable perspective de carrière dans sa branche professionnelle. Mais une initiative politique assez étonnante de la mairie, un concours de beauté ouvert aux habitantes de la ville, va l'entraîner dans un engrenage, où les évènements qui s'enchaînent vont prendre un tour des plus inattendus... A terme, s'ouvre devant elle une hypothétique carrière politique pour laquelle, en jeune novice encore mal aguerrie à ces usages, elle a tout à apprendre pour espérer remporter la mairie qu'elle va être encouragée à briguer. 

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Initié sur un ton dynamique de comédie romantique légère, le drama mûrit, au fil des épisodes, avec ses personnages, gagnant en sobriété, tout en conservant une authenticité émotionnelle touchante qui m'a véritablement conquise.

C'est en effet dans sa dimension humaine que se trouve l'attrait majeur de City Hall. La série bénéficie de  l'alchimie qui se crée entre ses personnages, en particulier - assez logiquement - au sein de son duo principal. Si elle débute de la plus classique des façons, en se réappropriant les ficelles scénaristiques des romances teintées d'humour qui ne manquent pas à la télévision sud-coréenne, agrémentant ses premiers épisodes de passages burlesques et de clash inévitables entre les deux personnages centraux, la série va toutefois éviter les excès. En parvenant rapidement à établir un équilibre dans les rapports entre ses deux personnages, elle va donner une épaisseur, mais aussi une certaine subtilité, à cette relation hésitante qui s'esquisse progressivement sous nos yeux.

Si Jo Gook, par son assurance jamais prise en défaut et sa maîtrise du jeu politique, semble toujours garder le contrôle de la situation, Mi Rae impose, face à lui, sa personnalité, mais aussi ses valeurs. Elle devient rapidement bien plus qu'une énième déclinaison de l'héroïne ingénue dont les dramas de ce genre raffolent. Obstinée et consciencieuse, elle apprend de ses erreurs et ajuste son attitude. Finalement, sans jamais renier ses principes, le téléspectateur la voit grandir au fil de la série. Son ascension professionnelle, initiée au départ presque par hasard, va se trouver justifiée grâce à la dimension que prend le personnage à mesure qu'elle devient, tout simplement, adulte.

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La force, mais aussi l'intérêt, de la relation qui s'établit peu à peu, presqu'à leur insu, entre Mi Rae et Jo Gook, est justement qu'elle n'est pas à sens unique. Cette réciprocité, de plus en plus affirmée au fil de la série, va leur permettre de s'épanouir et également de s'émanciper de mauvais réflexes du passé. Ils vont s'enrichir mutuellement, se fortifiant au contact de l'autre. Si cette maturation sonne si juste, c'est en partie en raison de la richesse de chacun des protagonistes. Loin d'être unidimensionnels, le drama n'hésite pas à mettre en valeur la complexité de leurs personnalité, soulignant les paradoxes qui peuvent les traverser et ces failles dont ils ont eux-mêmes conscience.

Derrière la simplicité de façade de Mi Rae se cache une jeune femme très sensible à l'intérêt général, qui comprend ce que signifie se mettre au service du collectif. Elle va trouver en elle la force de caractère nécessaire pour relever les défis qui jalonnent le lancement d'une carrière politique. L'aide Jo Gook sera nécessaire au départ, mais elle va progressivement s'émanciper, s'endurcissant à travers les épreuves et acquérant une saine indépendance des plus satisfaisantes. Elle s'impose pleinement comme une femme de poigne qui n'hésitera pas à aller à la confrontation pour faire triompher ses idées.

De façon similaire, les certitudes de Jo Gook vont être ébranlées par les nouvelles perspectives qui s'ouvrent dans sa vie. Rompu aux rouages de la politique, il découvre que l'ambition ne suffit pas pour donner l'étincelle qui fera la différence afin d'entamer son irrésistible ascension. Son arrogance ne peut éternellement masquer son absence de vision. Ce relativisme pragmatique dont il se fait le représentant le plus zélé - écho à bien des hommes politiques de nos sociétés modernes - n'est-il pas vain s'il ne peut distinguer le tableau plus vaste, que constitue un pays à gouverner ? S'il n'a d'autre guide que ses intérêts personnels, comment pourrait-il mener à bien un projet à l'échelle nationale ?

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Ainsi, au-delà de son apparence de comédie romantique, City Hall est aussi une série initiatique, qui voit ses personnages grandir avec elle. Cette évolution est d'autant plus appréciable pour le téléspectateur qu'elle permet au drama d'aborder, avec une certaine maturité, l'immersion proposée dans un univers assez particulier, le monde politique. Bien entendu, City Hall ne renie pas l'idéalisme, parfois touchant, qui reste l'apanage de ce genre de séries sud-coréennes, mais elle ouvre malgré tout les portes des coulisses de la vie politique, tant locale que nationale, de ce pays.

Or, je vous ai déjà confié, notamment lorsque j'ai fait le tour de toutes les séries britanniques traitant du sujet, mon penchant pour cette thématique. Ce drama ne faillit pas à la règle : ce cadre contribue, de belle manière, à la densité et à l'intérêt de cette série. Jusqu'à présent, IRIS avait été ma seule occasion de pénétrer dans les couloirs de la Maison Bleue. Si l'occupation de ce bureau constite l'objectif avoué, dans City Hall, il est encore inaccessible. Nous nous situons ici dans les échelons plus bas de la vie politique. Le drama s'attache à nous faire découvrir,  avec sa tonalité toujours légère et rafraîchissante, tous les aspects de ce monde. Et c'est ainsi qu'il est efficacement rythmé par toutes ces péripéties politiques. Nous y suivons les protagonistes au cours de leurs campagnes électorales, municipales mais aussi législatives, jusqu'à leur gestion du quotidien d'un élu, ayant à sa charge une ville ou bien une circonscription qu'il doit représenter au plan national.

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Sur un plan technique, City Hall bénéficie d'une réalisation chatoyante, agréable à suivre. Un peu à l'image du contenu du drama, on y retrouve cette petite impression sucrée, mais sans excès. Si, pour ma part, j'ai beaucoup apprécié la bande-son, qui est agrémentée de plusieurs chansons récurrentes vite entêtantes et cadrant bien avec l'ambiance globale, il faut quand même préciser qu'il y a sans doute une sur-exploitation de cet aspect formel. Les quasi "pauses" musicales, au sein des épisodes, sont en effet récurrentes. J'ai adhéré à cette façon de faire ressortir l'émotionnel, en partie en raison de mon attachement aux personnages, mais certains téléspectateurs pourraient sans doute juger que le réalisateur en fait parfois un peu trop.

Enfin, je n'ai que des compliments à adresser au casting de ce drama. Cha Seung Won (Bodyguard ; il sera aussi à l'affiche d'Athena en novembre prochain) est admirable d'ambivalence. Charmant les téléspectateurs avec le même aplomb que ses vis-à-vis dans la série, l'arrogance de son personnage n'en fait jamais quelqu'un d'antipathique ; au contraire. A ses côtés, Kim Sun Ah (My Name is Kim Sam Soon) s'affirme progressivement avec beaucoup de classe, partageant l'évolution suivie par son personnages. Lee Hyung Chul (On Air, Pasta), d'une sobriété toujours efficace, s'impose en conseiller avisé, tandis que Choo Sang Mi (Snow in August) s'amuse de son personnage invivable.

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Bilan : City Hall est une série aussi rafraîchissante qu'attachante, qui doit beaucoup à l'alchimie existant entre ses personnages et à l'ambiance qu'elle réussit à créer. Comédie légère à ses débuts, romance ambivalente qui évite de trop en faire par la suite, elle mûrit au fil de l'évolution de ses protagonistes. Tandis que le cadre politique permet d'enchaîner les nouveaux défis et de maintenir un rythme dynamique, sans temps mort, le téléspectateur ne peut qu'être touché par l'authenticité émotionnelle qui se dégage de l'histoire racontée.

City Hall est ainsi un beau drama que j'ai pris beaucoup de plaisir à suivre.


NOTE : 8,5/10


Une bande-annonce du drama :

Une des chansons de l'OST de la série (MV - contient des images "spoilers") :