Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/07/2010

(K-Drama / Pilote) Gumiho : Tale of the Fox's Child (Grudge : The Revolt of Gumiho) : immersion soignée dans les légendes des contes coréens

 

taleofthefoxchild.jpg

En ce mercredi asiatique, changeons un peu de style. Vous songez à vous ménager une petite pause dans votre dégustation de comédies romantiques (comment ça, Coffee House ne vous a pas séduit ?!) ? Vous vous êtes montrés peu enclin à vous laisser entraîner dans des fictions de guerre (certes, Road Number One n'était pas la meilleure tentative d'incursion dans ce genre) ? Rassurez-vous, la télévision sud-coréenne a d'autres cordes à son arc. KBS2 a ainsi pensé à vous et propose une séduisante alternative qui, avec son esthétique ambitieuse, dévoile des atours chatoyants : Gumiho : Tale of the Fox's Child.

Diffusé les lundi et mardi soirs, depuis le 5 juillet 2010, c'est un drama qui n'hésite pas à mélanger différents genres, pour laisser entrevoir un potentiel des plus intéressants. Car au-delà du fantastique, définitivement à l'honneur cet été en Corée du Sud, à travers la fameuse légende des Gumihos - dont je vous avais déjà parlé il y a quelques semaines pour l'anthologie Hometown Legends (2008) -, il s'agit d'une série historique, où actions et sentiments viennent régenter une quête plus profonde, commune aux différents protagonistes : un récit de survie et de cohabitation.

gumihob.jpg

Le premier épisode de Gumiho : Tale of the Fox's Child pose une situation, plus qu'il ne donne d'indications concrètes sur la tonalité à venir de la série. Semblant naviguer entre plusieurs genres, c'est grâce à ce mélange original - et, en même temps, intrigant - qu'il retient l'attention d'un téléspectateur qui, s'il n'est pas encore conquis, voit son intérêt irrémédiablement piqué par la richesse des thématiques soulevées au cours d'une première heure laissant entrevoir bien des promesses.

L'histoire en elle-même mérite bien un épisode d'exposition pour que ses tenants et aboutissants soient compris. Derrière l'apparence de jeune femme réservée et séduisante qu'elle renvoie, Goo San Daek est en réalité une créature de légende, une Gumiho. Lorsqu'elle n'apparaît pas sous ses traits argentés, elle ressemble à une humaine normale. Il y a dix ans de cela, un homme s'était rendu jusqu'à son repère et l'avait vue sous sa véritable forme. Elle ne l'avait alors épargné qu'avec la promesse qu'il ne parlerait jamais de cette rencontre. Sur le chemin du retour qu'il emprunta, elle s'était ensuite présentée à lui sous des traits humains, le séduisant sans difficulté.

Pourquoi un tel subterfuge ? Si une Gumiho peut vivre, pendant dix années, comme une épouse modèle aux côtés d'un homme, elle pourra accéder à un trésor plus précieux que sa vie : embrasser cette humanité tant prisée, quasi-inaccessible, et se débarrasser de sa nature de Gumiho. Et, consécration la plus précieuse pour une mère préoccupée par l'avenir de sa descendance, l'enfant qu'elle aurait alors eu à l'occasion cette union deviendrait également humain, échappant à la "malédiction".

gumihog.jpg

Les années ont passé depuis la rencontre de San Daek avec celui qui est désormais devenu son époux. De leur mariage, est née Yeon Yi. Cette dernière, aujourd'hui âgée de 9 ans, est devenue une fillette éveillée et curieuse. Mais, un soir, peu de temps avant que le fameux cycle décennal ne se soit entièrement écoulé, l'alcool délie la langue du père, trop bavard, qui raconte la rencontre qu'il fit, presque dix ans auparavant, au fond d'une grotte, avec un gumiho. Cette parole inconséquente d'ivrogne brise la promesse faite jadis pour lui épargner la vie, et rompt du même coup le processus enclenché qui aurait permis à San Daek d'accéder à cette humanité qu'elle aura frôlé. En plus de perdre sa femme, c'est également sa fille que l'homme condamne. Yeon Yi ne pourra rester une petite fille comme les autres ; la puberté approchant, elle se transformera en gumiho. 

Le quotidien policé de la modeste famille prend fin cette nuit-là. Le choc de la découverte de la véritable nature de sa femme sera fatale à un mari à l'instabilité mentale accrue par l'absorption d'alcool. Il se suicidera dans la nuit mouvementée suivant la révélation. Laissant son épouse et leur fille, livrées à elles-mêmes, dans un royaume dévasté, en proie à une épidémie semant derrière elle une traînée de cadavres et des villages dépeuplés.

gumihol.jpg

Parallèlement, le pilote suit un autre fil rouge, qui rejoindra l'histoire principale avant la fin de l'épisode. Il nous introduit ainsi dans la demeure d'une famille noble locale. De santé fragile, l'état de la petite fille du maître de maison s'est aggravé, la laissant aveugle. A court de solution, son père consulte un shaman qui lui livre une solution prophétique particulièrement glaçante. Pour assurer une longue vie à l'enfant, il devra trouver l'enfant qui est née en même temps qu'elle... pour lui prendre son foie, seul remède qui garantirait la survie de sa fille. Le shaman prédit que l'enfant en question viendra naturellement à eux, entraînée par le destin.

Nul besoin de préciser, vous l'avez déjà deviné : la fin de l'épisode nous révèle que la fillette en question, visée par cette prophétie, est Yeon Yi. On retrouve ainsi ici une thématique classique à toute fiction sur les gumihos : la consommation d'organes ayant un effet revivifiant à part. Ici, de manière inversée par rapport au folklore local, qui assimile ces créatures à une parenté démoniaque, les scénaristes ont choisi de faire du gumiho la proie.

gumihok.jpg

Ainsi exposée, la situation de départ révèle déjà la complexité inhérente à ce drama, la condition de gumiho des deux héroïnes ne venant que précariser un peu plus un sort déjà peu enviable. Il s'agit d'un secret qu'elles ne doivent dévoiler sous aucun prétexte. Or, Yeon Yi ignore pour le moment tout de sa véritable nature, ses pouvoirs ne s'étant pas encore manifestés, puisqu'elle se situait dans un entre-deux, tendant à consacrer son humanité grâce au processus de transformation en cours de sa mère. Encore enfant, immature, innocente et spontanée comme peuvent l'être les fillettes de son âge, elle n'est pas en mesure de se protéger. Ce rôle va devoir être assuré par une mère, dont la méfiance des humains est viscérale.

L'intérêt de ce drama va être de ne pas hésiter à combiner plusieurs problématiques. Au poids de ce secret à préserver vient donc s'ajouter la prophétie du shaman : pour sauver la fille noble, Yeon Yi devra être sacrifiée, le jour de ses 10 ans, soit dans 3 mois. Une sorte de double épée de Damoclès pèse sur sa tête. Le pilote tire ici admirablement bien son épingle du jeu, en réussissant à mêler de façon plutôt habile et inspirée la diversité de ces enjeux, combinant efficacement ces thématiques fantastiques.

Cette originalité dans le paysage des kdramas de la saison 2010 se montre donc d'autant plus attractive, que ce qui frappe lors du visionnage de cet épisode, au-delà d'une homogénéité encore perfectible, c'est sa richesse.

gumihoi.jpg

Cette richesse se manifeste à plusieurs niveaux, à commencer par la diversité de contenu que propose ce pilote.

Si Gumiho : Tale of the Fox's Child est une série dont les personnages principaux sont des héroïnes qui n'ont rien de guerrières, elle ne va pas hésiter à utiliser sa connotation fantastique pour impulser de l'action et mettre en scène des confrontations violentes. Exploitant opportunément le thème de la dualité entre l'animalité, à laquelle renvoie la nature de gumiho, et l'humanité, nous avons ainsi droit à plusieurs scènes de combat, se distinguant par de belles chorégraphies. Parmi ces passages marquants, il y en a notamment un qui symbolise parfaitement tout le potentiel de la série. Il est à la fois atypique - puisqu'il s'agit d'une attaque non par des humains, mais par des tigres - et traditionnel télévisuellement parlant, au sens noble du terme : c'est une course-poursuite à travers une forêt de bambous, digne exercice de voltige, dont le style n'est pas sans évoquer des dramas références comme Damo.

Au final, ce pilote propose un contenu dense, présenté avec beaucoup de rythme et qui alterne les tonalités, tantôt proche du drame personnel classique et intimiste, d'autre fois plus proche des codes scénaristiques de la série historique où viennent se mêler quelques combats. S'il n'y a semble-t-il aucune intrigue de cour à attendre, en revanche, le cadre de la société confucéenne, socialement si rigide et codifiée, de la Corée du Chosun (Joseon) devrait également offrir matière à réflexion sur les rapports entre les différents protagonistes.

gumihof.jpg

Au-delà de toutes les pistes potentielles qu'ouvre ce premier épisode, qui suffisent à retenir l'attention du téléspectateur, il est impossible d'en rédiger une review complète sans évoquer et louer Gumiho : Tale of the Fox's Child sur sa forme. Car la série se situe incontestablement dans la tranche haute des dramas sud-coréens, en terme de réalisation, sans non plus trop en faire, à la différnece d'un Chuno (Slave hunters). Bénéficiant d'une esthétique soignée, particulièrement aboutie, agrémentée de plans admirablement bien maîtrisés, et - surtout - d'une photo superbe, ce drama est un vrai plaisir pour les yeux du téléspectateur. Les couleurs à l'écran sont belles et chatoyantes, sans être racoleuses. Si bien qu'on ressent l'impression très agréable d'avoir devant soi une production pleinement travaillée jusque dans ses détails formels. Cette apparence est corroborée par le volet musical de la série : la bande-son s'inscrit dans une sobriété toute en retenue, très opportune. Elle joue sur l'ambiance plus ou moins dramatiques de certaines scènes, accentuant le trouble des tonalités et le mélange des genres, sans jamais verser dans la surenchère.

Enfin, le casting ne dépareille pas de ce bel ensemble. Se partagent la tête d'affiche, l'actrice accomplie, Han Eun Jung (Cinderella Man, The Lawyers of the Great Republic Korea), en mère Gumiho protectrice, et la jeune, et pourtant omni-présente dans le petit écran sud-coréen, Kim Yoo Jung (cette année, elle a joué la jeunesse des héroïnes de Dong Yi et de Road Number One). A leurs côtés, on retrouve notamment Jang Hyun Sung (croisé, un peu plus tôt cette saison 2010, dans JeJoongWon), la jeune Seo Shin Ae, Suh Joon Young, ainsi que quelques habitués des seconds rôles de dramas, tels Kim Jung Nan (Creating Destiny), Kim Gyu Chul (Merchant Kim Man Deok) ou encore Im Seo Yeon.

gumihoh.jpg

Bilan : Aussi avare en indications sur l'avenir que soit le pilote de Gumiho : Tale of the Fox's Child, il remplit très efficacement sa première fonction, celle d'aiguiser la curiosité d'un téléspectateur rapidement séduit, tant par l'esthétique, qu'intrigué par ce mélange des genres.

Bénéficiant d'une écriture solide, ce premier épisode, riche en promesses, révèle un potentiel indéniable, en trouvant l'inspiration aussi bien auprès des codes des dramas historiques, sans renier les scènes d'action, qu'auprés de dramas familiaux plus intimistes. Le tout demeure assujetti à une dose de fantastique légendaire, qui permet de suivre une thématique centrale originale, et qui tranche avec les sujets traditionnels des kdramas : une quête de survie, une réflexion sur la différence... Sous-tendant et transcendant les storylines, une question demeure : quels rapports sont possibles entre humains et Gumiho ?

S'il est trop tôt pour émettre un jugement éclairé sur le drama en lui-même, ce pilote a assuré l'essentiel pour moi : il m'a donné envie de découvrir quel sort attend les personnages introduits. Et je suis d'autant plus enthousiaste que, par son sujet, il semble exploré un univers bien différent de ceux que j'ai eus l'occasion de suivre depuis le début de 2010.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :


Le générique de la série :