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15/08/2012

(K-Drama / Pilote) Reply 1997 (Answer me 1997) : portrait nostalgique et authentique d'une adolescence à la fin des années 90


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En ce mercredi asiatique, remettons le cap au pays du Matin Calme pour ce qui semble devoir être rien moins que mon coup de coeur sud-coréen de l'été. Qui eut cru qu'un semi-high school drama, d'un abord nostalgique car nous plongeant dans les années 90 (certes, j'ai moi aussi été adolescente durant cette période), pourrait sonner si authentique et faire jaillir en moi tant d'émotions - du rire aux larmes - ? Le câble sud-coréen est bel et bien en train de grandir et de mûrir, en voici cette fois un bien bel exemple avec Reply 1997 !

Ce drama a débuté le 24 juillet dernier en Corée du Sud sur la chaîne tvN. Il est diffusé tous les mardis soir, à raison de deux épisodes à la suite, ce qui fait qu'il comptera en tout 16 épisodes d'une demi-heure environ (mais le rythme est donc d'1 heure par semaine). Après avoir visionné les 4 premiers, me voilà sous le charme d'un récit qui fait preuve d'une justesse émotionnelle à chérir. En tout cas, vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela fait plaisir de tomber sur cette petite bulle d'air frais en ce mois d'août.

[La review qui suit prend en compte les 4 premiers épisodes du drama.]

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Reply 1997 s'ouvre en 2012. Un couple un peu âgé chante des classiques dans un karaoke, leur fille, Sung Shin Won, la trentaine dynamique, les interrompt pour lancer sa propre chanson. Son père lui réclamant d'en choisir une sans paroles en anglais, elle lance ce qu'elle qualifie de "classique", une musique du groupe H.O.T, boysband de sa jeunesse. Une autre nuit, Shin Won se rend à un repas d'anciens élèves : elle retrouve connaissances et amis de sa promo de 1997, l'année de leur 18 ans. A trente-trois ans, ce n'est pas encore de la nostalgie que ces désormais adultes éprouvent pour leur adolescence, mais ce dîner ramène Shin Won, en pensées, à la fin des années 90 et à leur vie d'alors.

Si Reply 1997 revient ensuite périodiquement dans le présent, avec des commentaires en voix off des différents personnages commentant avec recul le passé, il se déroule donc en majeure partie en 1997, à Busan. Le drama nous donne l'occasion de suivre une bande de six amis, proches depuis presque toujours pour la plupart (seul Do Hak Chan arrive en cette fin de lycée en provenance de Seoul). Shin Won et sa meilleure amie, Yoon Jung, sont alors des fans inconditionnelles du groupe H.O.T., se jetant sur la moindre émission parlant de leurs idoles. Les garçons observent ce comportement avec plus de distance. Au sein de ce groupe d'amis, c'est logiquement une période où chacun change, se découvre et éprouve ses premiers amours. Comment leur amitié a-t-elle grandi avec eux sur ce chemin que l'on appelle la vie ?

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Il y a, dans Reply 1997, un parfum de nostalgie, beaucoup d'humain et une réelle authenticité qui ne peuvent laisser insensible le téléspectateur. L'écriture adopte une justesse de ton rare, globalement maîtrisée, pour relater une époque - la reconstitution de 1997 est très soignée - et les tranches de vie qui l'accompagnent. La série représente vraiment ce que l'on peut et doit attendre d'un human drama, laissant la part belle aux émotions - sans jamais en faire trop et tomber dans un mélodrama - mais aussi à ces petites anecdotes de vie qui prêtent à un rire spontané venant de bon coeur. Elle met en scène des personnages attachants, qu'elle prend le temps de dépeindre avec leurs qualités et leurs défauts, leurs certitudes et leurs doutes. Grâce à tout cela, on se sent instantanément proche d'eux. Certes, l'ambiance est parfois très orageuse, entre adultes et/ou entre adolescents, mais les liens qui les unissent demeurent solides et indéfectibles, qu'il s'agisse de liens du sang ou d'amitié. Aux turbulences succèdent des passages plein de chaleur, où transparaissent des joies communicatives, comme la communion trans-générationnelle que permet le visionnage d'un match de coupe du monde. 

Cette proximité, Reply 1997 la cultive aussi grâce au cadre bien délimité qu'elle pose, qui a l'avantage de devenir vite familier. Avec pour centre Shin Won, il se limite à deux lieux principaux : le lycée, où, si les classes de garçons et de filles ne sont pas mélangées, chacun se retrouve pour déjeuner à la cafétéria, et la maison des parents de Shin Won, dont le père est l'entraîneur de l'équipe locale de baseball. La réussite de Reply 1997 est de nous immerger dans ce quotidien de 1997 sans lourde introduction, ni s'apesantir inutilement sur les informations qu'elle distille. L'époque est bien recréée (programmes télévisés, technologie, musique). Et l'on prend en cours de route la vie des personnages sans disposer immédiatement de toutes les clés pour comprendre les situations. Ainsi, Yoon Jae déjeune quotidiennement chez Shin Won, mais la série ne s'étend pas sur le pourquoi de la situation. Pareillement, l'écriture fait toujours preuve de tact et de pudeur, à l'image des scènes, dans l'épisode 4, où elle nous apprend que Shin Won avait une soeur. C'est petit à petit que le tableau se complète, et sur ce point, le drama sait faire preuve d'une patience et d'une justesse qui méritent d'être salués. 

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Outre ce registre human drama, Reply 1997 reste un portrait d'adolescence, certes avec les particularités et modes de 1997, mais aussi avec tout ce qu'il y a d'universel à cet âge difficile de nos 18 ans par lequel chacun est passé. Pour le téléspectateur, l'identification fonctionne parce que le drama capture avec beaucoup de fraîcheur les amitiés fluctuantes d'alors, entre disputes et réconciliations, et ces moments de malaise où les gestes normaux d'hier paraissent soudain inconvenant vis-à-vis de l'autre. Car c'est un temps où les rapports garçons-filles changent, où des sentiments nouveaux, pas forcément compris, naissent. C'est le récit sonnant très authentique d'une entrée progressive, chacun à sa manière et en prenant le temps qui lui est nécessaire, dans un âge adulte, sans y être encore tout à fait. Et c'est donc aussi l'époque des premiers amours.

En 2012, Shin Won nous a annoncé que durant ce repas de retrouvailles deux personnes vont annoncer leur mariage, sans préciser l'identité des heureux élus. Vu de 1997, on devine qu'il reste encore à chacun une longue route à parcourir pour se trouver. Sans mettre en péril leur amitié, Reply 1997 esquisse par petites touches des triangles amoureux nourris de qui pro quo, de petites jalousies informulées, d'amitiés restaurées et de secrets hésitants échangés. Chacun semble destiné à n'avoir d'yeux que pour celui qui ne prend pas conscience ou ne souhaite pas cette attention. J'ai particulièrement aimé le fait que, dans ces premiers épisodes, la série brouille un peu plus les lignes grâce à un personnage qui se révèle être gay. Ainsi tandis que Yoon Jae aimerait tant que Shin Won remarque ses attentions, il s'irrite de la proximité grandissante qu'elle a avec Joon Hee... ce dernier étant en réalité secrètement amoureux de son meilleur ami... Yoon Jae (et ayant mis Shin Won dans la confidence). La réussite du drama, ici, c'est de savoir pour l'instant préserver une part d'innocence dans la manifestation de ces sentiments, mais aussi une sincérité touchante qui évite toute lourdeur.

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Soigné sur le fond, Reply 1997 l'est également sur la forme. La réalisation est appliquée, et, surtout, la photographie conforte l'impression de nostalgie sur laquelle surfe ce drama (que vous ayez ou non connu les années 90, en Corée ou ailleurs). Côté bande-son, les choix sont tout aussi recherchés : le drama sélectionne des tubes d'alors, nous faisant remonter le temps à travers les chansons de H.O.T., les émissions musicales et autres extraits de cette époque. Se perçoit bien tout le travail fait pour la reconstitution d'une époque pas si lointaine, mais où surveiller son tamagochi, tout en chatant tant bien que mal sur un écran ordinateur à l'horrible fond bleu, était normal.

Enfin, si le casting est jeune et assez inexpérimenté, il s'en sort bien, sans doute parce que la justesse et la simplicité d'écriture permet à chacun de trouver facilement sa place. Jung Eun Ji se révèle pétillante et pleine de vitalité dans ce rôle central d'adolescente encore dans cette phase monomaniaque de fan de boysband laissant ses résultats scolaires en berne, mais qui devra bien grandir un jour. En complice d'enfance dont la relation est désormais plus tumultueuse, Seo In Gook (Love Rain) est correct. On retrouve également pour composer cette bande d'amis Shin So Yool (Jungle Fish 2), Hoya, Eun Ji Won et Lee Shi Un. Parmi les adultes en 1997, Song Jong Ho (The Princess' Man) interprète le frère de Yoon Jae, tands que Sung Dong Il (Fugitive : Plan B, Can't Lose) et Lee Il Hwa jouent les parents de Shin Won.

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Bilan : Drama profondément humain, plein d'émotions, capable de faire passer, avec naturel, sans forcer, du rire aux larmes, Reply 1997 est un soupçon de nostalgie sur lequel s'ajoute un retour sur l'adolescence d'une justesse et d'une authenticité rares. Un portait à la spontanéité rafraîchissante. Bien écrits, correctement interprétés, soignés dans leur reconstitution de cette fin des années 90 tout en abordant des thématiques aux accents universels, ces débuts se révèlent être une belle surprise. Je suis sous le charme de cette série qui fait chaud au coeur, et j'espère donc voir le drama poursuivre sur cette voie très prometteuse ! tvN tient peut-être là une jolie perle. A surveiller.


NOTE : 7,5/10


Une bande-annonce de la série :

Parce qu'elle prend une telle place dans la vie des adolescentes d'alors, la k-pop en 1997 - H.O.T. :

04/07/2012

(K-Drama) Hero : en quête de héros dans un futur corrompu et ruiné

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Profitons de ce mercredi asiatique pour s'intéresser au câble sud-coréen. Il faut dire que les transformations qui s'opèrent dans le paysage audiovisuel du pays du Matin Calme sont intéressantes à suivre, avec des chaînes bien décidées à se faire une place dans l'industrie des dramas. Ce dynamisme a donné ces dernières années quelques essais notables, se démarquant des fictions du "Big Three" (SBS, MBC, KBS), comme par exemple Joseon X-Files. Et le mouvement s'est encore accéléré depuis un an. D'une part, il y a eu l'arrivée il y a quelques mois de nouvelles chaînes qui ont investi la production de séries avec des succès très divers, se brûlant parfois les ailes à trop vouloir sauter les étapes. Parmi elles, il faut cependant saluer l'effort de jTBC qui semble avoir su tirer son épingle du jeu. D'autre part, existent toujours les chaînes du câble plus anciennes qui sont, elles aussi, en train de définir leur image, comme tvN et ses rom-coms et autres séries légères...

C'est dans cette optique que OCN se positionne dans le registre de l'action et des fictions plutôt sombres. Cela peut se décliner dans de l'historique (Yaksha), du policier (Special Affairs Team TEN), du fantastique (Vampire Prosecutor)... Mais aussi de l'anticipation presque SF, lorgnant du côté de l'univers des comics, avec le récent Hero. Ce drama, dont je vais vous parler aujourd'hui, a été diffusé au cours du printemps, du 18 mars au 13 mai 2012, le dimanche soir. Il compte un total de 9 épisodes. Sur le papier, l'ambition est appréciable, avec des thèmes certes familiers, mais assez rarement exploités à la télévision sud-coréenne. L'initiative est intéressante, même si malheureusement le drama ne concrétise pas son potentiel de départ et peine devant d'importantes limites narratives. En résumé, OCN essaie, sans forcément toujours convaincre. Mais avec l'expérience et après les erreurs viendra peut-être à terme une meilleure maîtrise... Le câble peut en effet apporter une diversité qu'il faut encourager.

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Hero se déroule dans un futur proche, en 2020. La série nous plonge dans une grande métropole d'une Corée ruinée économiquement, où la corruption règne et où les inégalités n'ont jamais été aussi importantes. Le personnage central du récit, Kim Heuk Chul, est le fils cadet du maire de cette grande ville. Jeune homme issu d'un milieu donc privilégié, inconséquent et irresponsable, éloigné du pays pour éviter les scandales, il est contraint de rentrer en Corée, car ses dernières frasques lui valent une expulsion manu militari de Chine.

Il revient dans un contexte tendu par les élections locales prochaines, où sa famille joue son influence et son pouvoir : il s'agit de faire en sorte que le maire obtienne de la population un nouveau mandat. Une fusillade dans une église offre alors le fait divers parfait pour désigner des boucs émissaires et diviser pour mieux régner. Mais Heuk Chul, loin de rester inactif, se lie avec les officiers chargés de l'enquête. Il est grièvement blessé lors d'une descente de police. Prêt à tout pour le sauver, son père obtient que lui soit injecté un traitement expérimental qui lui confère - au moins pour un temps, car les effets à terme sont inconnus - un pouvoir de guérison presque illimité.

Déjà secoué d'avoir frôlé la mort, Heuk Chul découvre avec surprise ses nouvelles capacités. Dans le même temps, il est confronté directement à la violence et aux injustices de la société de son temps. Il prend alors la décision d'intervenir directement dans certains de ces problèmes. Sans forcément mesurer à quel point sa famille est impliquée dans ce système gangréné.

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En s'appropriant des thème assez classiques qui évoquent les comics, Hero dispose d'un certain nombre d'atouts intéressants. Il s'agit d'une série d'anticipation, résolument pessimiste, avec un soupçon de science-fiction qui permet de mettre en scène quelques gadgets technologiques. De plus, il faut reconnaître à la fiction la volonté de particulièrement soigner son ambiance : elle s'attache à souligner les tensions sociales - et cet inaccessible rêve chinois voisin pour trouver du travail -, mais aussi la violence et le fatalisme d'une population confrontée à une corruption généralisée qui sape la société jusqu'aux fondations d'une comédie de démocratie où les fraudes sont monnaie courante. Le drama fait d'ailleurs sien le thème récurrent de l'impunité des riches et de l'exploitation aliénante des plus défavorisés qui se contentent de tenter de survivre, subissant les soifs de pouvoir des privilégiés. Dans cette perspective, l'épisode le plus intéressant restera le pilote - d'une durée correspondant à un double épisode. Il pose en effet efficacement les bases très noires de cet univers, en s'ouvrant notamment sur une fusillade qui cumule volontairement les points choquants (assassinat d'un prêtre, dans une église, à Noël, avec des enfants...). Dans le même ordre d'idée, les développements ultérieurs cultiveront une amertume qui donne bien le ton d'ensemble recherché.

Mais en dépit de ce départ correct, Hero ne va pas réussir à concrétiser ses ambitions. Certes, la série conserve par la suite une narration globalement rythmée, mettant en exergue l'opposition entre les puissants et le reste d'une population sans espoir. On peut cependant regretter qu'elle garde toujours une versatilité de ton qui amoindrit les efforts faits pour asseoir sa tonalité : aux passages très sombres, succèdent invariablement des pointes d'humour évitables. Toutefois, le principal problème du drama est d'ordre narratif. Le défaut devient flagrant à mesure que le récit progresse : les inconsistances et les incohérences du scénario apparaissent de plus en plus pesantes, et les facilités narratives sont trop fréquentes pour crédibiliser l'histoire. Plus ennuyeux encore, la psychologie des personnages semble se re-écrire au gré des situations auxquelles ils font face, voire selon les épisodes. L'échec majeur restera les développements des derniers épisodes : qu'il s'agisse de la conclusion du semi-fil rouge avec la puissante société pharmaceutique, ou des choix ultimes et des révélations sur les personnages, rien ne convainc vraiment. La série finit par tomber dans les trous qui plombent son scénario.

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Hero est plus cohérent sur un plan formel. La réalisation s'efforce de contribuer à l'atmosphère noire de la série : cela donne donc des images à dominante sombre, où les scènes d'action sont plutôt efficacement menées. La photographie correspond dans l'ensemble assez bien à l'ambiance de ce futur proche, où la détresse de certains est palpables, et où les confrontations de classes sont exacerbées. Sans être toujours maîtrisé, le résultat sait donner envie au téléspectateur de se glisser dans cet univers. Je serais beaucoup plus réservée concernant la bande-son qui, si le style de musique reflète l'axe "action musclée", apporte peu, et n'est pas toujours exploitée à bon escient.

Enfin, Hero bénéficie d'un casting qui alterne le correct et le plus mitigé. Les problèmes d'écriture étant problématiques pour la force des personnages, il est parfois difficile pour les acteurs de se fixer sur un registre d'interprétation. C'est à Yang Dong Geun (I'm Sam) qu'est confié le rôle principal : du jeune homme irresponsable au redresseur de torts masqué, il s'en sort assez bien tant que son personnage conserve sa logique (les derniers épisodes étant plus problématiques sur ce point). Han Chae Ah (actuellement dans Bridal Mask) manque toujours un peu d'expressivité, mais elle donne convenablement la réplique à son vis-à-vis héritier/justicier. On croise également quelques têtes familières des rôles secondaires, comme Son Byung Ho (Yaksha), Choi Chul Ho (Partner), Park Won Sang (Yaksha, Warrior Baek Dong Soo), Kwon Min, Geum Dan Bi (Warrior Baek Dong Soo), Oh Soo Min (Queen of Reversals), Kim Sung Hoon ou encore Otani Ryohei (The Road Home).

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Bilan : Série d'anticipation à l'univers futuriste sombre, Hero est une série qui disposait d'une base d'idées intéressantes sur le papier, qu'elle n'aura pas su ou pu porter convenablement à l'écran, le scénario cédant à trop de raccourcis et de maladresses pour convaincre. Cependant, l'effort reste louable. Et avec son rythme de divertissement musclé, elle peut constituer une curiosité à tester pour les amateurs des redresseurs de torts masqués, avec un univers qui m'a rappelé celui des comics. Mais il faut dans ce cas accepter de ne pas trop se formaliser devant les limites manifestes de l'histoire, particulièrement criantes au cours des derniers épisodes. 


NOTE : 4,75/10


Une bande-annonce de la série :

Une chanson de l'OST :


[A noter : Suite à des problèmes techniques sur mon ordinateur, les screen-captures n'ont exceptionnellement pas été faites par moi, mais sont issues de Dramabeans.]

27/06/2012

(K-Drama / Pilote) Bridal Mask (Gaksital) : un justicier masqué durant l'occupation japonaise de la Corée


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Poursuivons l'exploration des séries en cours de diffusion du petit écran sud-coréen. Après Ghost, le deuxième drama à avoir retenu mon attention cette saison sur les grandes chaînes du pays du Matin Calme est une adaptation d'un manhwa de Huh Young Man, Bridal Mask (ou Gaksital). Sa particularité est de se dérouler dans les années 30 durant l'occupation japonaise, bénéficiant ainsi d'un contexte intéressant à exploiter. Une période sur laquelle j'ai assez peu vu de dramas, hormis le swinguant Capital Scandal (voire, mais dans un contexte de guerre du Pacifique autrement plus lourd, les débuts de Eyes of Dawn).

Débuté le 30 mai 2012 sur KBS2, Bridal Mask devrait compter 24 épisodes. Il s'est solidement installé auprès du public, avec des scores d'audience tournant actuellement autour des 15% de parts de marché, remportant pour le moment la bataille des cases horaires des mercredi et jeudi soir à 22h. Entremêlant différents genres, de la vengeance au conspirationnisme, en passant par des questions de destinée et d'amour impossible, ce drama se réapproprie des thématiques riches de façon parfois un peu brouillonne. Toutefois, en dépit de ces inégalités, il reste très divertissant. Il s'agit de mon deuxième choix pour ce début d'été.

[Cette critique a été rédigée après avoir visionné les six premiers épisodes, mais ne contient aucun spoiler.]

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Bridal Mask se déroule à Séoul dans les années 30. Durant cette période d'occupation japonaise, un justicier masqué, appelé Gaksital, sévit depuis quelques temps et intervient régulièrement lorsque des abus sont commis contre les habitants. Il inquiète tout particulièrement certains hauts dignitaires japonais, car il semble connaître l'existence d'un mystérieux groupe qui, en coulisse, tire bien des ficelles du pouvoir. Jusqu'à présent, la police japonaise est restée impuissante face à lui et a été incapable de le capturer.

C'est pourquoi le commandant confie la tâche à un officier de policier coréen, un ambitieux qui gravit à pas pressés les échelons de sa hiérarchie, Lee Kang To. Si ce dernier a choisi la voie de la collaboration, considéré comme un paria par les siens, c'est que sa famille a déjà payé un lourd tribut à celle de la contestation. En effet, son frère aîné, Kang San, ne s'est jamais remis d'un interrogatoire trop musclé. Désormais limité mentalement, c'est devenu un homme simplet et enfantin. Mais Kang San a un secret... et l'engrenage des évènements et des tragédies vont bientôt obliger Kang To à choisir un camp.

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Le premier atout de Bridal Mask réside dans son concept, celui d'un justicier, redresseur de torts dans un contexte particulier et difficile d'occupation. Dès le départ, il est clair que l'ambition du drama n'est pas d'être une rigoureuse reconstitution historique - loin s'en faut, nous sommes ici plus proche d'une forme de carte postale folklorique d'époque. Mais ce cadre offre et permet d'exploiter des ressorts dramatiques, mais aussi d'action, particuliers et intéressants. En fil rouge prometteur, s'impose l'agenda secret de la mystérieuse organisation, qui nourrira les confrontations à venir. De plus, se rappelant ses origines manhwa, il ne recule pas devant certains excès dans la mise en scène des combats, qui apportent un dynamisme appréciable à l'ensemble. De manière générale, transparaît un sens du tragique et de l'émotionnel certain qui retient l'attention.

La réussite des débuts de Bridal Mask tient aussi au fait que le drama repose sur un personnage principal à l'ambivalence exacerbée. Loin d'être une figure unidimensionnelle, il se révèle d'emblée intriguant. Rarement un k-drama aura aussi bien introduit, puis gérer, un héros aussi ambigü qui n'en devient pas pour autant antipathique, même s'il va à l'occasion nous révolter. Initialement, Kang To est en effet un policier, farouchement attaché à ses fonctions, qui ne recule devant aucun abus pour parvenir à ses fins - et, en l'occurence, capturer Gaksital. Pour autant, le drama prend le temps de dépeindre ses blessures, ses failles et d'expliquer ce qui l'a conduit sur cette voie discutable. C'est certainement dans la mise en scène des relations complexes qu'il entretient avec ce frère méconnaissable que le drama est ici le plus abouti et intéressant. Certains des excès de rage de Kang To dépeignent avec une intensité poignante, l'affection mais aussi la colère, que peut éprouver le jeune homme envers Kang San qui a tout sacrifié pour des idées en laissant derrière lui sa famille.

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Aux côtés de Kang To, personnage central se démarquant donc avec réussite, le trio de protagonistes principaux qui l'entoure s'inscrit lui dans des dynamiques très traditionnelles. Cependant chacun remplit efficacement le rôle qui lui est dévolu. Durant ces premiers épisodes, c'est surtout l'amitié unissant notre héros à Shunji, fils cadet d'un dignitaire japonais, qui retient l'attention. Les circonstances rendent a priori bien difficiles toute amitié entre un coréen et un japonais, mais surtout le téléspectateur devine, témoin privilégié des forces en mouvement et de l'irrémédiable opposition de leurs familles respectives, que se dessine déjà en filigrane une confrontation future. L'ensemble est construit de manière cohérente et, en dépit de quelques grosses ficelles, il est difficile de ne pas se laisser happer par la dimension fatale et tragique des storylines qui se rejoignent.

Malheureusement, sur ce dernier plan, l'écriture de Bridal Mask est parfois très inégale, peut-être parce qu'elle se disperse à l'occasion un peu dans tous les sens. La série perd par exemple de sa nuance dès qu'il s'agit de mettre en scène des personnages plus secondaires. Basculant alors dans des caricatures poussives - particulièrement du côté japonais -, cela amoindrit d'autant la force des enjeux mis en scène. Par ailleurs, du côté des triangles amoureux qui s'esquissent, elle joue et rejoue avec une insistance trop appuyée et parfois assez maladroite la carte des sempiternels amours d'enfance. Le manque de subtilité est particulièrement préjudiciable parce qu'il fait perdre à la série une partie de la magie émotionnelle qu'elle pourrait pourtant développer, nous laissant indifférent devant certains atermoiements bien trop mis en exergue pour convaincre.

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Prenant en dépit de ses limites sur le fond, Bridal Mask est sur la forme un drama plutôt enthousiasmant. La réalisation est dynamique, les combats - semi-volants - mêlent bien les attraits des confrontations classiques à l'épée et la modernité plus létale des armes à feu. La photographie bénéficie de couleurs dans l'ensemble assez chatoyantes, nous replongeant bien dans l'ambiance des années 30 (le drama ne résiste d'ailleurs pas à quelques brèves incursions dans les clubs de l'époque). Et pour parachever le tout, l'OST est très plaisante, avec des thèmes musicaux entraînant et des chansons, certes calibrées, mais efficaces et employées à bon escient suivant la tonalité des passages qu'elles accompagnent.

Enfin, Bridal Mask bénéficie d'un casting sympathique. Le léger sur-jeu apparaît un peu inhérent à la manière dont le drama aime à souligner et mettre en scène ses histores. Joo Won (Baker King Kim Tak Goo, Ojakgyo Brothers) investit avec conviction (et quelques excès volontaires) son rôle de héros complexe. Ni Jin Se Yeon (My Daughter the Flower), ni Park Gi Woong (The Musical) n'ont son intensité, mais les deux acteurs s'en tirent à peu près correctement dans leur rôle respectif. Quant à Han Chae Ah (Hero), elle n'a pas encore été trop sollicitée, mais elle campe parfaitement la froideur apparente de son personnage. A noter que c'est Shin Hyun Joon (Cain and Abel) qui incarne le grand frère de Kang To.

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Bilan : Se réappropriant des ressorts narratifs très classiques, qu'il s'agisse de relations sentimentales compliquées ou de vengeances inéluctablement marquées par le poids familial, Bridal Mask est un mélange des genres assez riche qui compense son manque de subtilité et certaines maladresses par un dynamisme global appréciable. Son contexte historique apporte une valeur ajoutée indéniable, avec une dimension historique qui, notamment dans les combats, rend aussi perceptible l'origine manhwa. Si on peut regretter que l'écriture de Bridal Mask manque parfois de discipline et de rigueur, cédant facilement à certains poncifs, c'est pour le moment une aventure prenante bien portée par un personnage principal qui ne laisse pas indifférent. A elle de savoir mieux se concentrer sur l'essentiel et de poursuivre sur le même rythme.


NOTE : 6,5/10


Une bande-annonce de la série (avec sous-titres anglais) :

Une chanson de l'OST :

20/06/2012

(K-Drama / Pilote) Ghost : un prenant thriller dans la cybercriminalité

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Mine de rien, cela faisait sept semaines que My Télé is Rich! n'avait plus mis le cap sur la Corée du Sud. Il était grand temps de repartir au pays du Matin Calme, où les nouveautés ont pris d'assaut les grandes chaînes au cours des dernières semaines. J'ai abordé cette saison avec sérieux : j'ai testé presque tous les dramas pour lesquels j'ai trouvé des sous-titres, de Big à Bridal Mask. Et, surprise (mais c'est le genre d'inattendu que le sériephile chérit), la série qui s'est détachée ne figurait pas sur ma liste à surveiller. C'est elle qui mérite d'ouvrir aujourd'hui notre incursion dans les programmes sud-coréens actuels.

Ghost est diffusé sur SBS depuis le 30 mai 2012, les mercredi et jeudi soir. La série devrait a priori compter 20 épisodes et se terminer début août. Si Bridal Mask semble se maintenir en tête des audiences sur ces cases horaires, Ghost ne démérite pas, avec des parts de marché à deux chiffres qui s'améliorent peu à peu. Sur le papier, j'avoue que je n'y croyais pas particulièrement, même si le scénario avait été confié à Kim Eun Hee à qui l'on doit Harvest Villa et Sign. Mais à l'écran, ce drama se révèle être un thriller rondement conduit et surtout très prenant. Une fiction donc efficace - et qui tient pour l'instant toutes ses promesses après 6 épisodes (le septième est diffusé ce soir en Corée du Sud - et oui, je suis exceptionnellement même à jour de la diffusion sud-coréenne, c'est vous dire si j'ai été happée !).

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Ghost met en scène une unité de la police spécialisée dans la cyber-criminalité, dirigée dans le premier épisode par Kim Woo Hyun, un officier plutôt froid mais d'une efficacité redoutable dès lors qu'un crime ou un délit est commis par informatique. Dans leur quotidien d'affaires, un hacker en particulier leur pose actuellement problème : le mystérieux Hadès, à cause duquel ils perdent d'importantes preuves au cours d'une enquête. Concentrant leurs efforts pour identifier cet opposant de valeur, ils vont se trouver confrontés à un drame qui émeut l'opinion publique par sa mise en scène : l'apparent suicide d'une actrice impliquée dans un scandale sexuel. Très vite, plusieurs indices troublants, puis une vidéo enregistrée par sa webcam durant la nuit fatale, révèlent qu'il s'agit en fait d'un meurtre.

A partir de là, les rebondissements s'enchaînent. Et parce qu'il vaut mieux laisser au téléspectateur le soin de savourer ces multiples twists, disons seulement que, si Hadès fait figure de coupable logique et idéal, la réalité est bien plus complexe et l'enquête dépasse le seul sort de l'actrice. La recherche d'un mystérieux fichier ghost trouble bien des lignes. Se cachent en arrière-plan d'autres machinations et secrets. Tandis que certains ont cédé à des compromissions fatales, d'autres vont tenter de démêler la vérité des faux-semblants, se précipitant alors dans un jeu létal au sein duquel ils ne connaissent pas leurs opposants. Or ces derniers ne reculeront devant rien pour assurer leur tranquilité.

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Série à suspense, Ghost se démarque par la manière très efficace dont elle se réapproprie les codes classiques du thriller et de ses variantes. Tout y est calibré, mais admirablement bien huilé. L'intrigue progresse vite, les rebondissements sont nombreux, proposant un rythme de narration qui ne laisse aucune place à l'ennui. Tout en s'inscrivant dans les grandes traditions des k-dramas (échange d'identité, confrontations personnelles, vengeance), les twists savent surprendre et interpeller un téléspectateur happé par l'ensemble. D'autant plus que le feuilletonnant domine, dévoilant une intrigue à tiroirs multiples qui gagne en complexité et en ramifications au fil des épisodes. Des enquêtes indépendantes viennent parfois se greffer, mais elles finissent toujours par avoir un impact sur la trame principale, directement ou bien indirectement (servant de révélateur pour les personnages). On est donc loin d'un simple procedural, et le format de série télévisée est pleinement exploité.

Si Ghost était présenté comme une incursion dans la cybercriminalité, la réussite du drama doit surtout beaucoup à sa faculté à générer du suspense sans avoir besoin d'être crédible sur le plan informatique. Elle propose principalement de la poudre aux yeux dans la mise en scène de hacking. Les adresses ip ont tendance à se révéler quasi-spontanément et les disques dur à se vider en un éclair. Et ce n'est pas l'introduction qu'elle fait d'un virus bien connu (mais d'origine étatique) comme Stuxnet qui lui permet de gagner en légitimité. Mais pourtant, si certains raccourcis prêtent à sourire (ou à lever les yeux au ciel), le scénariste maîtrise si bien ses partitions théoriques pour engendrer du supense, que tout fonctionne de manière convaincante. La capacité à créer une tension bien réelle l'emporte sur l'artificialité du cadre informatique.

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Outre le caractère extrêmement prenant de sa narration, Ghost retient aussi l'attention par la relative noirceur de son ambiance. D'une part, on y croise nombre de destins tragiques. D'autre part, l'éclairage sur l'institution policière n'est guère flatteur, arbitrage glissant entre des loyautés personnelles nourrissant des réseaux d'influence et une certaine éthique. A l'image des développements du fil rouge principal, la distribution des rôles apparaît riche en faux-semblants. Elle est très intéressante par les rebondissements et révélations qu'elle occasionne, mais aussi par l'ambiguïté qui lui est inhérente.

La frontière de la loi s'avère en effet toute relative, ne permettant pas de distinguer ceux qui cherchent la vérité de ceux qui veulent la masquer - ou de ceux qui font seulement leur travail, voire servent leurs intérêts personnels. Cela soulève beaucoup d'interrogations pour classer les protagonistes, et la curiosité du téléspectateur grandit parallèlement à son implication. Si Ghost n'a pas cédé à la facilité d'un flashback introductif dès le départ pour présenter chacun, elle sait prendre le temps d'explorer un peu plus ses personnages, mettant un instant en pause le tourbillon de ses intrigues. Ce faisant, elle pose les bases d'un équilibre prometteur sur le long terme, même si sa dimension humaine reste encore embryonnaire.

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Sur la forme, Ghost dispose d'une réalisation efficace, avec une photographie relativement sombre qui sied parfaitement à l'ambiance de thriller. La mise en image des enjeux informatiques (et des actions sur le réseau) parvient à capturer la tension qui domine ces scènes. L'OST recherche encore son juste ton, entre des passages grandiloquents qui en font trop et des parenthèses très anecdotiques. Mais dans l'ensemble, on y trouve quelques thèmes retenant l'attention, et la deuxième chanson proposée m'a plutôt plu (cf. deuxième vidéo ci-dessous).

Enfin, Ghost bénéficie d'un casting qui, sans être son point fort, donne globalement le change. La froideur mono-expressive de So Ji Sub correspond assez au registre sombre du rôle qui lui est confié. Je sais qu'il est critiqué (non sans fondement), mais c'est un acteur pour lequel je conserve de l'affection. Mine de rien, le voilà qui exauce un voeu que j'avais formulé en 2010 sans y croire vraiment : enfin choisir un projet intéressant pour interrompre une trop longue série de choix discutables (Cain & Abel, Road Number One). A ses côtés, Lee Yeon Hee n'est pas non plus des plus convaincantes en policière ; mais elle a un personnage pas inintéressant auquel le physique avantageux est souvent reproché. Cela légitimise en quelque sorte le fait de ne pas parvenir à se donner l'apparence d'une policière de choc crédible. Le reste du casting principal est autrement plus solide, avec Daniel Choi et Kwak Do Won qui trouvent tous deux vite leurs marques. Uhm Ki Joon n'a pas eu encore suffisamment de scènes pour s'imposer, mais ses premières confrontations promettent. Enfin, Song Ha Yoon investit le registre classique, en léger sur-jeu, de la reporter jeune et inexpérimentée.

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Bilan : Thriller policier feuilletonnant, modernisé artificiellement par une touche de cybercriminalité, Ghost se réapproprie efficacement les codes narratifs les plus classiques du suspense dans le petit écran sud-coréen. Toujours très rythmé, il multiplie les twists pour se construire une histoire intrigante et prenante, de laquelle il est difficile de décrocher une fois le téléspectateur rentré dans l'histoire. A la fois bien calibrée et bien huilée, sans révolutionner son genre, cette série fait preuve d'une efficacité redoutable. Si elle poursuit sur ces bases, on tient là une solide série à suspense.


NOTE : 7,25/10


Une bande-annonce :

Une chanson de l'OST :

25/04/2012

(K-Drama / Pilote) God of War (Soldier) : une fresque épique très prenante

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Aujourd'hui, restons dans les séries actuellement diffusées en Corée du Sud, en ce mercredi asiatique, pour revenir à un genre à l'égard duquel j'ai souvent eu l'occasion de déclarer mon amour : l'historique. Parce que, vous le savez bien, rien de tel qu'un solide sageuk pour introduire un parfum d'épopée dans vos programmes sériephiles et rythmer vos semaines. Très prise depuis le début de l'année, je n'avais pas encore choisi de drama de ce type en 2012 ; le mois d'avril touchant à son terme, il était grand temps de corriger cet oubli. Mon choix s'est finalement porté sur God of War (Soldier). Et quelle belle - ou, devrais-je dire, sacrément musclée - découverte ai-je fait là !

God of War (Soldier) est un drama actuellement diffusé sur MBC, les samedi et dimanche soirs, depuis le 11 février 2012. Scénarisé par Lee Hwan Kyung (un habitué des sageuk - Emperor Wang Gun, Dawn of the Empire, Yeon Gae So Mun), et réalisé par Kim Jin Min, il est annoncé comme devant être une imposante fresque, puisque 50 épisodes sont pour le moment prévus (le tout devrait ainsi se terminer en août prochain). Ses audiences semblent depuis une dizaine d'épisodes s'être stabilisées juste au-dessus de la barre des 10%. Si 20 épisodes ont été à ce jour diffusés, ce billet du jour a été rédigé après avoir visionné - avec beaucoup d'enthousiasme ! - les cinq premiers. C'est que, voyez-vous, God of War, c'est du sageuk à poigne, au souffle indéniable, qui vous prend aux tripes comme rarement !

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God of War se déroule à l'époque de Goryeo. Plus précisément, le drama s'ouvre au début du XIIIe siècle, en 1217. Même si nous sommes officiellement dans les premières années du règne du roi GoJong, le pouvoir réel est alors entre les mains de Choe Chung Heon, lequel exerce une dictature militaire maintenant difficilement un semblant d'ordre au sein d'une période troublée, notamment, par des invasions Mongoles. Dans ce contexte difficile, avec plusieurs fronts ouverts, l'insatisfaction monte au sein de certaines parties de la population. Le premier épisode s'ouvre ainsi sur une rébellion de plusieurs centaines de moines boudhistes, poussés à bout par les conditions dans lesquelles ils doivent combattre. La répression de ce mouvement est sanglante : un des deux fils de Chung Heon, Choe Hyang, y voit en effet l'occasion d'avancer ses pions pour isoler un peu plus son frère aîné, Choe Woo. Il obtiendra ainsi des aveux compromettants par tous moyens.

C'est à l'occasion de cette répression lancée contre les temples boudhistes ayant eu des membres impliqués dans la rebellion que la réalité géopolitique du pays va rattraper le jeune Kim Joon. Recueilli et élevé dans le temple, officiellement moine, son statut d'esclave de naissance réapparaît lors des vérifications d'identité opérées par les soldats les ayant arrêtés. Evitant de peu l'exécution grâce à l'intervention de la fille de Choe Woo, Song Yi, il va tomber au plus bas de la hiérarchie sociale, envoyé travailler comme esclave sur des chantiers de construction. God of War va nous relater sa lente ascension à partir de là, à commencer par la première voie qui va lui permettre de s'affranchir de ses réserves liées à son éducation boudhiste pour imposer sa valeur guerrière : un jeu létal venu de Perse, le gyeokgu.

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Le premier atout de God of War tient à l'impression de maîtrise narrative qui en émane, et ce, dès ses débuts particulièrement réussis. En effet, sans temps d'exposition, le drama nous plonge immédiatement dans l'histoire présente, avec des enjeux vite précisés. Il fait ainsi un intéressant choix scénaristique : celui de ne pas opter pour la fréquente -un peu artificielle- introduction par l'enfance de ses personnages, mais de préférer au contraire nous entraîner directement dans les évènements qui bouleversent la vie de Kim Joon. La série saura ensuite saisir diverses occasions pour présenter rapidement le background de chaque personnage, passant souvent par des dialogues, mais s'autorisant aussi à bon escient deux-trois flashbacks limités. Une fois posée cette mise en situation que représente la déchéance de Kim Joon rattrapé par son rang de naissance, God of War développe une première vraie storyline d'ampleur, représentative du mélange de jeux de pouvoir et d'action ambitionné par la série, centré autour du gyeokgu. Si ce jeu est proche du polo en théorie, il apparaît rapidement comme un combat mortel et l'arène dans laquelle il se déroule devant la population et les gouvernants l'assimilerait plutôt aux jeux du cirque romains.

Ce rythme, avec ces enchaînements sans temps mort qui annoncent les arcs narratifs rythmant les longs sageuk, rend l'histoire très prenante. La narration est dense et, surtout, on retrouve dans God of War un élément caractéristique des sageuk réussis : le drama est en effet traversé par un véritable souffle épique qui emporte le téléspectateur et permet à l'histoire d'acquérir une dimension supplémentaire. Il faut dire que la série s'impose avec force dans le registre de l'action. Musclée, je dirais même violente à l'occasion, il émane de ses images une forme de brutalité - aussi bien physique, presque graphique, que psychologique, voire émotionnelle - qui saisit et touche en plein coeur le téléspectateur. Qu'il s'agisse des scènes de combat, de torture ou de simples confrontations, grâce à ses mises en scène efficaces, la série atteint un niveau d'intensité rare, capable de marquer durablement. Grâce à cette approche très directe et presque sans concession, elle parvient ainsi à littéralement happer l'audience devant son petit écran.

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Outre une tonalité clairement définie, God of War va également trouver un juste équilibre entre ses différentes storylines. Le drama allie habilement - et de manière très classique - un récit à deux niveaux : d'une part, il s'intéresse à la destinée personnelle du protagoniste principal, d'autre part, il entreprend d'éclairer les enjeux de pouvoir au sein de la Cour. C'est sur le premier volet que repose l'empathie de la série : la déchéance sociale imposée à Kim Joon est cruelle, de même que sa séparation de Wol-Ah, aux côtés de laquelle il a grandi. Leurs destinées entremêlées constituent le ressort tragique central de ce début de récit ; et même si le drama a parfois tendance à en faire trop sur ce plan, manquant un peu de subtilité, il sait impliquer émotionnellement le télépectateur. Outre ce volet plus intime, la série nous propose d'assister à l'affirmation de ce jeune homme, brusquement arraché au confort du temple et propulsé dans un monde de violence où il faut tuer pour ne pas être tué. Le récit prend ici une dimension initiatique traditionnelle mais bien introduite, et l'on devine que Kim Joon devra surmonter son lot d'épreuves, dont le gyeokgu n'est qu'un premier aperçu.

Parallèlement, God of War nous plonge dans une situation géopolitique à la stabilité précaire, nous présentant un dirigeant vieillissant dont la succession commence à être envisagée, et dont les deux fils, héritiers potentiels, semblent promis à une confrontation certaine. En dépit de la complexité inhérente à ce type d'histoire - l'on met du temps à s'y retrouver au sein de la multitude des intervenants et de leurs allégeances respectives, la série parvient à rendre l'ensemble très prenant : cela tient au fait qu'elle transpose aux coulisses du pouvoir le même souffle qui l'anime pour les scènes d'action. Tout particulièrement, c'est la manière dont God of War dépeint un Choe Chung Heon vieillissant qui m'a fasciné. Alors même que ses fils anticipent la succession, il apparaît rapidement évident que le vieil homme n'est pas encore sénile, et qu'il lui reste suffisamment de facultés pour tirer bien des ficelles dans les oppositions qu'il encourage au sein de la Cour. Semblant favoriser son fils cadet, inquiet de la descendance de son aîné, il nous laisse constamment nous interroger sur le degré de connaissaance qu'il peut avoir des complots et manipulations dont la capitale bruisse. Dans ces luttes de pouvoir, God of War use ainsi efficacement de ficelles connues et ayant fait leurs preuves, démontrant un vrai sens de la mise en scène, avec des dialogues fournis qui participent à la tension ambiante.

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Solide sur le fond, God of War doit également beaucoup à ses atouts formels. Si sa réalisation est d'un classicisme assumé (jusqu'à certaines parenthèses pédagogiques pour permettre au téléspectateur de bien comprendre certaines situations), elle fait preuve d'une fluidité dans la manière d'ordonnancer les scènes qui est très plaisante. Tout apparaît parfaitement maîtrisé, et la caméra sait toujours trouver sa place pour retranscrire aussi bien les conciliabules secrets de palais, que les batailles rangées et les passages d'explosion de violence. Par ailleurs, le drama est accompagné d'une bande-son attrayante qui prend pleinement la mesure du souffle épique parcourant le récit. Aussi bien du côté de certains instrumentaux récurrents (notamment celui de la troisième vidéo ci-dessous, que j'apprécie tout particulièrement) que pour les ballades plus posées, la série soigne l'emploi de ces musiques pour les faire bien coïncider avec la tonalité particulière des scènes qu'elles sont censées souligner.

Enfin, God of War bénéficie d'un casting efficace et homogène. Plutôt bien dirigés, avec des dialogues relativement consistants, ils se montrent à la hauteur de la force du récit. C'est Kim Joo Hyuk (Terroir, Lovers in Prague, Life a Flowing River) qui interprète Kim Joon. Si j'aime modérément cet acteur, j'avoue que je me suis facilement laissée prendre par son jeu globalement solide. A ses côtés, on retrouve plusieurs valeurs sûres du petit écran sud-coréen. Outre Park Sang Min (Dae Wang Sejong), c'est Jung Bo Suk qui interprète le fils aîné de Choe Chung Heon. Du côté des personnages féminins, Kim Kyun Ri (Han River Ballad, Yong Jae Golden Days) se révèle très intéressante pour jouer la fille de Choe Woo, une jeune femme qui n'a certainement pas froid aux yeux. Hong Ah Reun (Rock Rock Rock) incarne quant à elle Wol-Ah, personnage à la dimension plus tragique dont le sort la lie au héros. La galerie d'acteurs est impressionnante au vu du nombre de protagonistes, et l'ensemble se révèle convaincant. De ces premiers épisodes, je retiendrais parmi eux la performance de Joo Hyun, qui incarne avec beaucoup de charisme ce vieux dirigeant qui joue des jeux de pouvoir avec toujours beaucoup de dextérité.

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Bilan : Sageuk musclé, récit particulièrement brut - violent même - et intense, God of War est parcouru de ce souffle épique caractéristique des dramas historiques réussis. Bénéficiant d'une construction narrative fluide et consciencieuse, avec des enjeux exposés de manière efficace, c'est une série qui se réapproprie pleinement un certain nombre de recettes très classiques du genre. Souvent prenante, elle captive le téléspectateur en renvoyant l'image d'une vaste et ambitieuse fresque historique. Parvenant à entremêler quête de pouvoir et épopée personnelle, ses débuts s'équilibrent bien entre les luttes au sein de la famille Choe et l'évocation de destinées plus modestes et humaines.

C'est donc un récit historique très dense, mettant en scène combats et complots, qui devrait plaire à tout amateur de sageuk ! N'hésitez donc pas !


NOTE : 7,75/10


Une bande-annonce :

Une chanson de l'OST :

Un instrumental de l'OST :