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12/11/2011

(Pilote US) Hell on wheels : à la conquête ferroviaire de l'Ouest

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Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous l'expliquer en ressortant mes indémodables épisodes d'Au nom de la loi, le western est un des rares genres gravés dans mon patrimoine génétique culturel. Il m'est très difficile d'y résister, même s'il s'agit d'un divertissement inégal dans la bush australienne comme peut l'être Wild Boys depuis cet été. C'était donc logiquement avec une certaine attente (tempérée par les échos mitigés glanés dans la presse américaine) et beaucoup de curiosité que j'attendais les débuts de Hell on Wheels.

Cette nouveauté a été lancée dimanche dernier, 6 novembre 2011, sur AMC. Sa première saison comportera sept épisodes. En investissant le genre classique du western, la chaîne américaine poursuit sa volonté de diversifier son offre de séries, l'étoffant désormais du fantastique au policier et renouant donc ici avec de l'historique. Le pilote de Hell on Wheels ne permet pas encore de déterminer si la série s'inscrira parmi les valeurs sûres ou les approximations de la chaîne. Mais s'il n'est pas exempt de défauts, il a cependant piqué ma curiosité.

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Hell on Wheels s'ouvre en 1865 sur des Etats-Unis toujours marqués par une guerre de Sécession qui a laissé des traces. Pour relancer le développement, notamment économique du pays, et dépasser le clivage entre le Nord et le Sud, c'est vers l'Ouest que l'on se tourne. L'idée de relier, par le chemin de fer, les Etats de l'Est aux terres de l'Ouest attise les convoitises d'hommes d'affaires, comme Thomas Durant, qui y voient le moyen d'y bâtir leur fortune, mais attire également tous ceux qui ont besoin de reconstruire une vie balayée par la guerre et partent vers de nouveaux horizons.

C'est notamment le cas de Cullen Bohannon, un ancien soldat confédéré. Son épouse est décédée suite à des exactions perpétrées par des soldats de l'union. Depuis, il traque sans relâche et implacablement le petit groupe responsable. Cette quête de vengeance le conduit sur ce projet ferroviaire ambitieux en cours de réalisation. Il trouve du travail comme contre-maître au sein du village mobile qui suit l'avancée des travaux. On croise dans ce lieu nombre d'individus en quête d'une vie nouvelle : d'anciens esclaves désormais libres ou encore des jeunes gens répondant à l'appel de l'ouest et espérant faire fortune.

Mais dans ces régions avancées, sans lois, situées entre les deux côtes et où les tribus indiennes protèrent encore leurs terres, la progression du chemin de fer reste une entreprise risquée, où les gains demeurent très aléatoires.  

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Avec pour cadre le contexte historique mouvant et passionnant de l'après Guerre de Sécession, Hell on Wheels bénéficie d'un potentiel indéniable que son pilote effleure sans en prendre pleinement la mesure. Afin d'impliquer le téléspectateur dans son récit, l'épisode fait le choix de mettre prioritairement en avant les projets de vengeance du personnage principal. Tout en créant ainsi un lien avec ce dernier, cela permet d'explorer plus avant les motivations et les ambivalences d'une figure intrigante qui s'impose, entre ombre et lumière, comme notre clé d'entrée dans l'univers. Pour autant, en dépit de l'ultime révélation de fin d'épisode, ce premier fil rouge apparaît avant tout comme l'accroche narrative parfaite pour faire découvrir, aux côtés de Bohannon, la toile de fond autrement plus vaste et ambitieuse qui va servir de décor à la série.

En effet, accordant un soin tout particulier à la reconstitution historique, le pilote de Hell on Wheels nous plonge dans un pays en pleine mutation qui peine à cicatriser de sa guerre fratricide, pansant encore ses douloureuses plaies. Se contentant de séquences d'exposition minimalistes pour tous ses autres protagonistes, le pilote papillonne d'un thème à l'autre entre des personnages pour le moment très secondaires. Son mérite est de parvenir à capturer une atmosphère riche et tourmentée qui porte le parfum caractéristique de cette époque. En effet, la conquête ferroviaire vers l'Ouest est une opportunité pour bâtir ou reconstruire des vies sans futures sur la côte. C'est aussi l'occasion de réunir symboliquement chacun, avec et en dépit de son passé, vers un but commun. La métaphore géographique du début, sur l'union de l'Est et l'Ouest, en réponse à la scission du Nord et du Sud, résonne dans la perception que l'on peut avoir de tous ces enjeux et de l'univers qui est peu à peu posé.

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Forte de la richesse inhérente à son concept, Hell on Wheels dispose d'un important potentiel. Pour autant, si ce pilote retient l'attention et sait piquer la curiosité du téléspectateur, il laisse aussi un arrière-goût d'inachevé. Attachée à capter une ambiance, la série opte pour une exposition chorale qui reste trop en surface, sans doute pressée par la durée trop brève d'un épisode au cours duquel il y aurait tant à raconter. Il s'agit donc d'aller à l'essentiel et de définir chacun en un minimum de scènes. Ainsi, à l'exception du protagoniste principal, repère du téléspectateur, mais aussi figure la plus creusée de l'épisode, tout ce qui gravite autour de lui souffre d'une présentation excessivement sommaire. La série ne recule devant aucun cliché pour définir immédiatement des protagonistes pour le moment très unidimensionnels, qui peinent donc à retenir l'attention du téléspectateur.

Pour autant, ces problèmes ne semblent pas insurmontables. En effet, ce déséquilibre important entre le personnage principal et les autres résulte du choix d'avoir fait de Bohannon la clé d'entrée dans la série. Par conséquent, c'est une inégalité qui devrait se corriger au fil des épisodes, la seule thématique de la vengeance ayant déjà montré ses limites. De manière générale, Hell on Wheels devra apprendre à nuancer son propos, afin de gagner aussi bien en épaisseur qu'en consistance. Il faut cependant reconnaître à la série le confort et la solidité de son approche classique, mêlant au sujet particulier de la conquête ferroviaire des thèmes traditionnels du western : le téléspectateur est en terrain connu et ne demande qu'à se laisser convaincre.

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Sur la forme, Hell on Wheels dispose d'une très belle réalisation. Un soin particulier a été apporté à la photographie, le choix des différentes teintes renvoyant parfaitement à l'imaginaire de l'Ouest. Si les images peuvent paraître parfois un peu froides, manquant quelque peu de naturel, elles demeurent dans l'ensemble d'une esthétique vraiment très belle à regarder. Quant à la bande-son, elle s'insère sans difficulté dans le récit, outil d'ambiance peu envahissant.

Enfin, le casting n'a pas encore eu pleinement l'occasion de s'affirmer au cours de ce presque trop bref pilote, à l'exception d'Anson Mount (Conviction), qui interprète cette figure très classique du vétéran sudiste au monde bouleversé par la guerre. Il propose une prestation équilibrée, entre sobriété et intensité lorsque les passages touchent à des sujets plus intimes, qui convainc le téléspectateur. A ses côtés, les sériephiles reconnaîtront avec plaisir Colm Menaey (Star Trek : Deep Space Nince), en homme d'affaire sans scrupules. On retrouve également Common, Dominique McElligott (Raw), Ben Esler, Phil Burke, ou encore Eddie Spears (Into the West).

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Bilan : Bénéficiant d'une toile de fond historique extrêmement intéressante et tourmentée, le pilote de Hell on Wheels propose une introduction efficace qui se réapproprie des recettes traditionnelles du genre ne laissant pas insensible. Cependant l'épisode ne prend pas pleinement la mesure de cette richesse, avec une exposition inaboutie qui reste trop en surface. Cédant à la facilité et à la rapidité d'une introduction où le classique confine parfois au cliché, la série devra nuancer son écriture et gagner en subtilité pour s'assurer de la fidélité durable du téléspectateur. Cependant, ce sont les fondations d'un honnête - à défaut d'original - western qui sont posées. A surveiller.

NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la série :

29/10/2011

(Pilote US) Boss : Chicago, son maire, le pouvoir et la maladie

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Au sein de cette rentrée américaine un peu morne en nouveautés, j'attendais avec beaucoup de curiosité le lancement de Boss. Il faut dire que la série affichait haut des ambitions très intéressantes : en ayant opté pour la ville emblématique de Chicago en toile de fond, elle se proposait de nous plonger dans les coulisses du pouvoir. La politique locale, c'est-à-dire parvenir à prendre le pouls d'une ville, peut être un sujet passionnant. A des niveaux différents, The Wire ou Brotherhood ont bien su prouver tout le potentiel de ce thème.

Illustrant la volonté de Starz d'investir tous les genres, en multipliant des projets très différents, tout en essayant d'asseoir sa légitimité dans le domaine des fictions, Boss a débuté ce vendredi 21 octobre 2011. D'ores et déjà renouvelée pour une seconde saison, sa première comportera pour le moment 8 épisodes. Et son pilote, esquissant un certain nombre de promesses, a su aiguiser mon intérêt pour la suite.

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Le Boss auquel fait référence le titre de la série s'appelle Tom Kane. Il est l'actuel maire de Chicago. Habile politicien, manipulateur hors pair, il gère sa ville et contrôle les groupes qui la composent avec une main de fer, sachant parfaitement manier la carotte et le bâton pour parvenir à ses fins. N'hésitant ni à proférer et à mettre à exécution des menaces explicites, ni à organiser des opérations de communication savamment mises en scène, il exerce une influence déterminante sur toute la vie politique locale, jusqu'aux élections au poste convoité de gouverneur de l'Etat.

Mais Tom Kane se voit diagnostiquer, au tout début de la série, une rare maladie neurodégénérative, la démence à corps de Lewy. Malheureusement incurable et mortelle, cette dernière signifie qu'il va progressivement devenir incapable de remplir correctement ses fonctions. Elle se traduit d'abord par un certain nombre de symptômes (tremblements, hallucinations, perte des facultés de raisonnement...) qui sont autant de failles qu'un homme politique, exposé au regard du public, ne doit pas laisser transparaître. Pourtant, décidé à rester autant que possible à son poste, Tom Kane fait le choix du secret : n'en parlant à personne, pas même à sa famille pour le moment, il tente de poursuivre comme si de rien n'était, en se soignant par des voies clandestines.

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L'aspect le mieux maîtrisé de ce pilote, et sa vraie réussite, c'est indéniablement sa capacité à nous immerger dans les moeurs politiques locales de Chicago. Dressant un tableau désabusé, sans la moindre complaisance, l'épisode nous plonge sans préambule dans les rouages du système de gouvernance en vigueur qui permet d'assurer la gestion de la ville. Entre réseaux personnels et égos, communautarisme et corruption, émerge la figure centrale, imposante et écrasante, du maire de la ville. Il est celui qui centralise tout, tirant les ficelles afin d'assurer la bonne gestion du quotidien des habitants, comme de la régulation du système tout entier. Il est pour cela entouré par une équipe toute aussi pragmatique. Restant volontairement impersonnel à l'égard de l'entourage professionnel de Tom Kane, l'épisode soigne une impression de milieu aussi froid qu'impitoyable. 

A l'évidence, la confiance n'est ici pas une option ; chacun semble avancer pour protéger et servir ses intérêts propres. En filigrane, il y a une véritable violence, à peine contenue, qui ressort de ce portrait volontairement désillusionné et sombre. Elle peut se manifester de manière sous-entendue, impliquant de savoir lire entre certaines lignes de dialogues, mais elle va aussi s'incarner à l'occasion dans de brusques éclats venant soudain briser l'illusion d'apparence policée renvoyée par ces notables locaux. Le pilote se contente d'un aperçu, sans aller dans le détail des sujets qui sont rapidement traités : l'essentiel est de prendre la température, et il le fait admirablement bien. Le téléspectateur se retrouve happé par cette façon si peu enjolivée dont le cadre est posé : évitant toute introduction qui aurait personnalisé ce tableau, l'instantané apparaît très réel et abrasif, comme une porte d'entrée parfaite vers ce milieu.

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Si ces enjeux politiques auraient suffi à légitimer une série qui leur soit entièrement consacrée, Boss fait preuve d'une autre ambition, puisqu'elle entend y mêler une autre thématique, plus intime : la maladie de celui qui règne sur tout ce système. Simplement esquissées dans ce pilote, les questions soulevées par le diagnostic délivré à Tom Kane, en début d'épisode, sont multiples, intervenant à plusieurs niveaux. Elles promettent beaucoup si elles sont traitées avec habileté. En effet, comment et pendant combien de temps un homme de pouvoir tel que lui va-t-il réussir à gérer, par le semi-déni, sa maladie ? Non seulement, cela pose le problème de sa capacité à assumer ses fonctions, ainsi que celui de sa survie dans ce milieu où la moindre faiblesse est fatale, mais cela conduit aussi à se demander comment, en tant qu'individu, va-t-il faire face à cette lente dégénérescence qui l'attend...

L'épisode ne donne que quelques pistes sur ce dernier point, mais elles sont très révélatrices de ce personnage central. Sa vie a toujours été entièrement tournée vers ses ambitions. Pour arriver au sommet, les sacrifices sont nombreux, au rang desquels figure sa cellule familiale, aujourd'hui excessivement distendue. Le seul point commun qu'il lui reste avec son épouse, issue de la haute société, est leur intérêt pour le pouvoir et leurs facultés à s'y maintenir. Il a également une fille, fâchée avec lui, à laquelle le pilote greffe une storyline quelque peu parachutée qui est sans doute le point le moins convaincant de tout l'épisode. En résumé, on est donc loin du soutien nécessaire dans ces situations difficiles de la vie. D'ailleurs, de manière générale, ce qui frappe dans Boss, c'est l'extrême solitude dans laquelle se trouve renfermé un homme public tel que Tom Kane. L'isolement du pouvoir a rarement été aussi palpable, à tous les niveaux, aussi bien vis-à-vis de sa famille que de ses proches collaborateurs. Dans cette perspective, laissant désormais apparaître des failles dans l'armure du maire, la question de la maladie représente donc un enjeu au potentiel indéniable.

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Prometteur sur le fond, Boss se démarque également sur la forme. La réalisation du pilote, confiée à à Gus Van Sant, est de très bonne facture. Privilégiant les plans serrés, accentuant ainsi une forme de proximité, elle est aussi très nerveuse, comme pour renforcer la sensation de réalisme qui émane du récit. La photographie, dans laquelle prédomine une déclinaison de teintes grises, écho parfait à l'ambiance de la série, est également très soignée. Pour couronner le tout, Boss bénéficie d'un très intéressant générique qui semble bien réussir à capturer l'essence-même de cette ville pleine de paradoxes que la série entend mettre à jour.  

Enfin, côté casting, l'ensemble est très solide. Il ne fallait pas moins que Kelsey Grammer (Frasier) pour incarner le maire de Chicago. Avec un pilote qui repose en grande partie sur ses épaules, il s'avère à la hauteur de la tâche, imposant sa présence à l'écran avec une intensité et une maîtrise impressionnantes. A ses côtés, on retrouve Connie Nielsen, Jeff Hephner (The Jury, Hellcats), Hannah Ware, Kathleen Robertson (Beverly Hills) et Martin Donovan (Wonderland, Weeds).

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Bilan : Nous plongeant, sans rien enjoliver, dans les eaux troubles des moeurs politiques de Chicago, Boss propose un pilote ambitieux et prometteur. Tout en maîtrisant admirablement bien le portrait très sombre et impitoyable du milieu dans lequel la série se déroule, l'épisode pose les bases pour aller au-delà de cette seule retranscription de la solitude du pouvoir, en introduisant la thématique de la maladie et des choix qui s'ouvrent désormais à Tom Kane. Le sujet a un potentiel certain ; il reste aux scénaristes à l'exploiter avec justesse.


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de la série :

24/10/2011

(Pilotes US) Mini-reviews : Grimm, Once upon a time

Un peu en décalage avec la rentrée, les grands networks US s'offrent en cette fin de mois d'octobre une incursion dans le fantastique en s'appropriant l'univers des contes de fées, par le biais de deux séries : Grimm, qui débutera le vendredi 28 sur NBC, et Once upon a time qui a débuté hier soir sur ABC. S'il était logique que leurs pilotes soient reviewés dans un même billet, leur approche de la fantasy urbaine est cependant très différente.

Dans Grimm, ce sont des cauchemars tout droit sortis des contes qui viennent hanter notre monde moderne qu'il faut défendre ; tandis que dans Once upon a time, c'est un monde féérique qui est projeté malgré lui et devient comme prisonnier de notre présent. Deux façons de concevoir ces éléments issus des livres de notre enfance, et également deux ambitions sans rapport : Grimm est un procedural show où le fantastique est prétexte à se mêler au policier ; Once upon a time, au contraire, offre un univers feuilletonnant, certainement plus ambitieux, mais aussi plus difficile à exploiter avec justesse. Ce sera la seconde qui aura ma préférence.

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Grimm (NBC)

Un détective de police, Nick Burkhardt, voit sa vie bouleversée lorsqu'il hérite de sa tante, mourante, l'étrange don familial. Il apprend qu'il est un des derniers Grimm ; les créatures et histoires décrites par ses ancêtres dans les célèbres contes sont bien réelles. Nick va devoir reprendre le flambeau de sa tante et protéger son monde contre ces mythes fantastiques qui le menaceraient.

S'il emprunte au fantastique ces figures effrayantes des contes qui ont peuplé notre enfance, le pilote de Grimm propose une introduction dans l'univers de son héros, certes correcte mais qui souffre d'un classicisme excessif. Nous sommes face à un épisode à finalité initiatique : le personnage principal, par héritage familial, se découvre soudain une destinée qui va bouleverser son quotidien et lui faire entrevoir des aspects ignorés de son monde. Le pilote impose ainsi Nick dans la figure de "l'élu" qui, seul, peut combattre une menace potentielle particulière. N'oubliant pas qu'un fil rouge aide à fidéliser le téléspectateur, la fin de l'épisode pense à battre en brèche l'idée qu'il s'agirait seulement de croiser des créatures mythologiques isolées, désignant un ennemi plus personnel à Nick.

Si l'on peut s'attendre à revisiter avec Grimm certains mythes, à l'image, dans ce premier épisode, du petit Chaperon rouge, le pilote laisse une impression mitigée. La greffe ne prend pas vraiment entre les codes narratifs convenus d'une série policière qu'on ne pourrait faire plus traditionnelle et cette dimension fantastique, seule réelle tentative de valeur ajoutée. Souhaitant rationaliser le merveilleux au point de le dépouiller de son charme, Grimm propose finalement un hybride trop proche du simple cop show, dans lequel les éléments fantastiques saupoudrés demeurent des ajouts insuffisamment mis en valeur. Plus généralement, le pilote souffre d'une écriture trop formatée qui pèse également sur des personnages, cantonnés à des figures unidimensionnelles et monolithiques si aisément catégorisées. Le téléspectateur peine ainsi à s'investir dans le sort de ce héros.

Procedural show policier calibré, ce pilote de Grimm décline de manière très prévisible une recette de fantasy urbaine où prédomine le parfum d'un cop show suranné. Probablement trop timoré, il atteste surtout du manque d'ambition des scénaristes pour s'approprier leur concept et apporter vraiment quelque chose à ce genre...

Note : 4,75/10

Verdict : Ne poursuivra pas.

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Once upon a time (ABC)

Et si la reine machiavélique avait jeté une dernière malédiction lors du mariage de Blanche Neige et du Prince Charmant pour s'assurer qu'ils soient privés de leur happy end ? C'est ainsi que tous les êtres légendaires peuplant no contes se retrouvent projetés dans notre monde, sans la moindre idée de qui ils sont réellement, contraints de vivre une vie moderne et ses tracas dans une petite ville du nom de Storybrooke. Mais une prophétie affirme que la fille de Blanche Neige et du Prince Charmant, à ses 28 ans, sauvée in extremis lorsque la malédiction s'est abattue, reviendra mener la dernière bataille. Emma Swan, abandonnée à la naissance et ayant vécu une vie peu facile jusqu'à présent, est entraînée en ville par le retour inattendu d'un fils qu'elle a abandonné il y a 10 ans... Pour permettre le vrai happy end ?

A la différence du pilote de Grimm qui semble déjà avoir fait le tour de son idée, celui de Once upon a time est un pur épisode d'exposition se contentant de donner les clés de l'univers, sans permettre de précisément entrevoir à quoi ressemblera la suite de la série. S'attachant à rassembler tout un chacun à Storybrooke pour permettre à l'histoire de véritablement commencer, il n'hésite pas à prendre certains raccourcis narratifs, voire à céder à la facilité. Mais tout en alternant entre les évènements qui se sont produits dans le monde féérique - lequel souffre d'une mise en scène artificielle - et le présent de notre société, le pilote va cependant réussir une synthèse intrigante une fois parvenu à Storybrooke. Car l'idée que notre monde soit comme une prison pour ces personnages féériques, qui perdent à son contact cette magie merveilleuse qui les illuminaient, séduit.

Le téléspectateur se prend au jeu de retrouver transposées en ville toutes ces figures familières de nos histoires d'enfance. Si tout reste encore à développer au niveau des personnages qui ne sont pour le moment qu'esquissés, le potentiel semble là. Once upon a time bénéficie de figures féminines antagonistes qui ont vraiment les moyens de s'imposer par leurs différences. Elles sont en plus incarnées de manière par des actrices que je retrouve toujours avec plaisir. Si Jennifer Morrison (House MD) se révèle très énergique dans le rôle d'Emma, j'aurais une mention toute particulière pour Ginnifer Goodwin (Big Love), avec son portrait d'une Blanche neige comme éteinte à la fin. Le seul bémol viendra sans doute du fils d'Emma, prétexte utile pour précipiter le retour de la fille prodigue, mais dont la place dans les évènements à venir interroge.

En dépit d'une certaine précipitation un peu maladroite dans la manière d'introduire l'histoire et de poser ses enjeux, ce premier épisode réussit à intriguer et à attiser la curiosité d'un téléspectateur qui ne reste pas insensible à l'appel sous-jacent d'un retour au merveilleux dont le monde moderne semble tristement dépouillé. Il y a sans doute plus de promesses, que de réelles concrétisations dans ce pilote, c'est toute la difficulté d'en faire la critique ; mais c'est maintenant aux scénaristes d'exploiter leur concept (si les téléspectateurs leur en laissent le temps).

Note : 6/10

Verdict : J'ai envie de lui laisser une chance.

08/10/2011

(Pilote US) Homeland : un thriller autour d'une figure ambivalente, héros ou menace

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Dimanche dernier était diffusée aux Etats-Unis la première nouveauté de la saison américaine que j'avais vraiment cochée : Homeland. Si je l'attendais avec une relative impatience, j'avoue aussi que les noms à l'origine du projet (Howard Gordon, Alex Gansa) évoquaient trop 24 pour je ne l'aborde pas sans une certaine méfiance : le sujet envisagé implique une subtilité et une nuance dans l'écriture qui n'étaient pas forcément le point fort de cette dernière.

Adaptation de la série israélienne Hatufim, Homeland est diffusé sur Showtime. Je m'étais donc persuadée qu'elle pourrait plutôt s'orienter vers l'autre série abordant des thématiques terroristes sur cette chaîne, laquelle m'avait autrement plus marqué : Sleeper Cell. Au final, c'est avec un pilote efficace que s'ouvre Homeland. S'il n'a pas levé toutes mes réserves sur la série, il m'a cependant convaincue de revenir la semaine suivante, s'imposant pour le moment comme le meilleur pilote dramatique de cette rentrée US.

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Le sergent Nicholas Brody a été porté disparu en Irak au cours d'une opération, en 2003. Durant un raid dans un des bases terroristes ennemies du pays, des soldats américains le retrouvent, hirsute, dans une des geôles. Ce sauvetage inattendu - nul n'imaginait qu'il restait des prisonniers encore en vie - se transforme en grande opération de communication pour le gouvernement, propulsant Brody au rang de héros national et lui organisant un retour triomphal parmi les siens.

Cependant, Carrie Mathison, une analyste de la CIA, assiste à ce retour très perplexe et méfiante. Ancienne agent de terrain qui a passé du temps en Irak, elle a eu des informations de première main sur l'organisation qui détenait Brody, obsédée par son leader, un certain Abu Nazir. Est-il possible que ce dernier soit parvenu à retourner les loyautés de son prisonnier durant sa captivité ? Est-ce qu'il n'a pas permis à dessein à l'armée américaine de retrouver Brody ? Ce dernier ne pourrait pas être le fer de lance de la prochaine attaque terroriste majeure sur le territoire américain ?

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Bénéficiant d'une écriture dynamique et sans temps mort, Homeland démarre, dès ses premières minutes en Irak, sur quelques scènes nerveuses, très directes, qui donnent immédiatement le ton de la série. S'attachant ensuite à installer efficacement les grands enjeux de son histoire, le pilote ne tergiverse pas. Les cartes sont rapidement distribuées entre tous les personnages, de manière à ce que, à la fin de cette première heure, le puzzle de ce thriller, déjà bien dévoilé, retienne solidement l'attention d'un téléspectateur dont la curiosité est piquée. En ce sens, l'introduction est réussie.

Il apparaît vite que le grand atout de Homeland réside dans son concept, lui permettant opportunément de se démarquer des fictions traditionnelles ayant pour sujet des questions de terrorisme. En effet, à cette première problématique, vient se sur-ajouter celle du questionnement sur la loyauté d'un prisonnier de guerre, peut-être devenu une arme contre son propre camp. Le terroriste potentiel n'est pas ici un ennemi sans visage, il se cache derrière une figure amie, normalement hors de soupçon : celle d'un soldat, d'un héros de guerre. Les délimitations de chaque camp sont par conséquent remises en cause, dans une partie où tout le monde opère à visage découvert. La question principale va être de savoir, comment, et à quel prix, Brody a-t-il survécu ? Est-il devenu une menace pour son pays ou s'est-il seulement compromis au-delà de l'honorable, sur le moment, en s'accrochant à un instinct de survie ?

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Si le pilote de Homeland pose les bases d'un thriller efficace, le pilote n'a cependant pas écarté toutes les réserves que je pouvais avoir. Derrière l'originalité relative d'un concept de départ aux ramifications narratives très intéressantes, le scénario cède à certaines facilités pour introduire les enjeux précis, liés à une hypothétique trahison, qui l'intéressent. La construction de l'épisode contient des twists qui sont trop prévisibles pour être pleinement satisfaisants : toutes les pièces se mettent presque trop aisément en place, jusqu'à l'ultime indice - attendu - qui permet à Carrie de sauver sa place. Parallèlement, les thèmes connexes - retour en famille, traumatisme et réadaptation - ne sont pas oubliés, mais demeurent en arrière-plan.

Signe de la manière dont les scénaristes conçoivent leur sujet, l'épisode opte pour une volontaire surenchère dans la paranoïa. Cela s'avère à double tranchant. D'une part, l'envie de brouiller les lignes et de bousculer les repères du téléspectateur est appréciable, parce qu'elle renforce la spécificité et l'ambiance de la série : chacun semble avoir ses secrets, jusqu'à l'adultère de l'épouse. L'ambivalence de tous ces personnages est pesante. L'agent de la CIA la symbolise bien : certes intuitive, elle est très instable, soignant déjà des troubles psychologiques. On est loin d'une figure d'autorité solide et inébranlable. Mais d'autre part, la série ne fait pas dans un suggestif subtil qui aurait diffusé une sourde tension. Si on ignore les plans réels de Brody, il ne nous est pas caché qu'il passe beaucoup de choses sous silence, mentant sur ce qu'il s'est passé en captivité. Exploitant peu la nuance potentielle inhérente à son concept, le pilote semble plus ouvrir la voie d'une confrontation directe entre les deux protagonistes principaux. Un choix qui peut se justifier ; tout dépendra de la gestion de la suite.

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Sur la forme, Homeland bénéficie d'une réalisation très classique, assez nerveuse dans quelques passages. On pourrait peut-être lui reprocher un certain manque d'ambition, car le résultat reste honnête, mais très convenu. De même, la bande-son est efficace et calibrée, mais l'ensemble ne se démarque pas vraiment. C'est donc un pilote prudent sur la forme qui est proposé.

Enfin, un des grands atouts de Homeland réside indéniablement dans son casting. Ses acteurs pris séparement m'auraient déjà très motivée pour me lancer dans une série, par conséquent, je ne vous cache pas que les retrouver réunis m'a fait énormément plaisir. Claire Danes, égérie éternelle de mon adolescence dans Angela, 15 ans, incarne avec une énergie marquante, flirtant avec le névrotique, une agent de la CIA vraiment déstabilisante. Face à elle, moins employé dans ce pilote, Damian Lewis (Band of Brothers, Life) use de son flegme caractéristique pour composer cet ancien prisonnier de guerre aux loyautés potentiellement divisées. Par ailleurs, on retrouve à leurs côtés, la sublime Morena Baccarin (Firefly, V), le toujours très efficace Mandy Patinkin (Dead Like Me), aini que David Harewood (The Last Enemy, Robin Hood) ou encore Diego Klattenhoff (Whistler, Men in trees).

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Bilan : Parfaitement bien huilé pour introduire très efficacement les enjeux de la série, le pilote de Homeland est convaincant et rempli sa mission première : s'assurer de la fidélité du téléspectateur. Pour autant, il marche aussi sur une fine ligne : l'impression d'originalité, que laisse ce mélange entre fiction sur le terrorisme et questionnement sur ce prisonnier potentiellement retourné comme une arme contre son camp, ne pourra pas toujours compenser certaines facilités auxquelles cède la construction de l'épisode. Le sujet est ambitieux, il faudra donc un scénario à la hauteur pour exploiter pleinement tout le potentiel du concept. Au vu de ce pilote, je serais tentée de dire que, pour l'instant, Homeland investit mieux la partie "thriller" que la partie "psychologique" du genre dont elle se réclame. A suivre !


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série :

30/09/2011

(Pilotes US) Mini-reviews : Pan Am, Terra Nova

Après une première semaine de rentrée US ratée, pour cette deuxième édition des mini-reviews de pilotes, celle qui s'achève aura un peu nuancé la tendance. Un peu seulement, car si certains pilotes ont pu me donner envie de revenir, soyons franc : ce visionnage de tant de séries des grands networks US en si peu de temps - après une année où je n'en avais regardé aucune - n'aura fait que souligner les maux et confirmer les griefs que j'adresse à ces productions depuis plusieurs saisons. Certes, il y a toujours de fugitives étincelles, mais dans l'ensemble, ce n'est plus une télévision qui éveille mon intérêt.

Des étincelles, justement, avec la première nouveauté de la saison à m'avoir séduite :

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Pan Am (ABC)

Prenez place dans le cockpit, attachez vos ceintures, et accompagnez la série dans le quotidien de la compagnie aérienne Pan Am, leader dans son domaine durant les sixties. Au programme, voyages à travers le monde en suivant la vie de son personnel, hôtesses de l'air glamour perpétuellement entre deux aéoroports de grandes capitales mondiales.

Au jeu de l'immersion dans les années 60, proposé en cette rentrée par les grands networks, entre The Playboy Club et Pan Am, c'est indéniablement la seconde qui aura su tirer son épingle du jeu. Ce pilote a été ma bonne surprise de la semaine, sans doute aussi par contraste avec le reste indigeste des pilotes testés. Proposant un premier épisode dynamique, à l'ambiance sacrément jazzy, la série pose d'emblée sa tonalité, entre légèreté et drama, en investissant le registre du divertissement-carte postale de son époque. Elle assume et joue sur le côté parfois un peu artificiel de sa reconstitution historique, avec des images tout droit sorties d'un papier glacé publicitaire. C'est rythmé, plaisant à suivre, avec une réalisation maîtrisée qui accompagne efficacement le tout.

Profitant du cadre aéroportuaire qui est le sien, le pilote navigue entre incontournables peines de coeur et des enjeux plus typiques en pleine période de Guerre Froide. L'introduction des protagonistes est efficace, pas forcément toujours nuancée, mais l'important est qu'elle se révèle attachante. Car Pan Am est une des rares nouveautés de la rentrée US qui a compris que pour fidéliser le téléspectateur, le seul concept de départ ne suffit pas : c'est sur les personnages que va reposer une bonne partie de l'attrait de la série. Aucune originalité particulière dans les portraits des quatre hôtesses et des deux pilotes que l'on suit, mais quelques grandes lignes qui permettent d'envisager les intrigues futures. Et puis, certains se démarquent déjà : la dynamique entre les deux soeurs, si différentes l'une de l'autre, se nuance agréablement au fil de l'épisode. Et l'aînée, recrutée en tant qu'espionne, est celle qui s'impose le plus au cours de ces quarante minutes.

Sympathique surprise, Pan Am propose un pilote rafraîchissant et dépaysant, dont l'ambiance donne envie de revenir. A voir si la série saura se construire à partir de son cadre aérien, sans nous rendre claustrophobe dans son avion, ni abuser des flashbacks.

NOTE : 6,5/10

Verdict : Embarquement à bord de cette première saison.

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Terra Nova (Fox)

En 2149, la planète Terre arrive au bout de ses ressources, au bord du cataclysme écologique. La pollution hypothèque tout futur pour une race humaine qui peine à entrevoir un futur. C'est peut-être dans le passé que celui-ci se trouvera : une faille temporelle et dimensionelle ouvre la possibilité de coloniser une Terre encore luxuriante quelques 85 millions d'années en arrière, au temps des dinosaures... Le salut pour l'humanité ?

Série de divertissement familial, mêlant action et science-fiction, Terra Nova avait logiquement attiré l'attention dans une période où les séries de SF se sont trop raréfiées. En dépit du retard accumulé et des échos mitigés qui l'accompagnaient, elle disposait d'un concept attrayant, au potentiel certain : l'abandon d'un monde devenu presque inhabitable, et la colonisation sur une Terre qui n'est pas adaptée à la vie humaine, à l'ère où dominent les dinosaures. Derrière des allures de fable écologique assumé, qui reflète bien l'air du temps, la série touchait à des thématiques qui ouvraient de nombreuses possibilités et de quoi être ambitieux : le traumatisme de tout quitter pour reconstruire une nouvelle civilisation... avec la dimension exotique du cadre (des dinosaures !). Pour autant, dire que je fondais de grands espoirs sur Terra Nova serait bien excessif : j'avais surtout beaucoup de craintes, que ce pilote aura en grande partie malheureusement confirmé.

Le pilote de Terra Nova fait preuve, au cours de ses 1h30, d'une incapacité constante et frustrante à prendre la mesure de son potentiel. Tout d'abord, il rate l'introduction des enjeux : un passage exprès dans le futur dont on ne saura que quelques grandes lignes, prenant le parti de limiter l'histoire aux seuls éléments qui préoccupent la famille principale que l'on va suivre. Puis, c'est le débarquement 85 millions d'années dans le passé, sans réelle solennité, se concentrant non sur le poids symbolique du passage dans la faille, mais sur un suspense artificiel pour savoir si tout le monde passera (ce qu'aucun téléspectateur ne doute une seule seconde). Le fonctionnement de Terra Nova, menée par un leader charismatique, avec ses rebelles mystérieux, permettant de saupoudrer l'ensemble d'une vague mythologie, parachève cette impression dominante de prévisibilité (avec un arrière-goût lancinant de déjà vu). Mais le pire, ce n'est pas tant ce cadre classique que le choix des protagonistes principaux : une famille inintéressante et sans relief, où la distribution des rôles est encore plus caricaturale, de l'ancien flic avec ses instincts à l'adolescent tête à claque à sauver... Ce ne sont certainement pas eux qui donneront envie au téléspectateur de revenir.

Pour autant, ce serait excessif de dire que j'ai détesté Terra Nova. Ce pilote est incontestablement du pain béni pour les critiques qui peuvent lui adresser bien des reproches... Reste que l'attraction du concept demeure, et l'illusion d'un potentiel entre-aperçu aussi. Ca se passe toujours 85 millions d'années en arrière, et il y a des dinosaures - du gentil herbivore au méchant carnivore - (l'adolescente que j'étais, fascinée par Jurassic Park, sommeille toujours en moi)... C'est atypique dans le paysage télévisuel actuel. Juste pour ces raisons, j'ai envie de donner une brève chance à la suite.

NOTE : 5/10

Verdict : Laissera (peut-être) à la série quelques épisodes pour voir comment elle va se développer.