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08/10/2011

(Pilote US) Homeland : un thriller autour d'une figure ambivalente, héros ou menace

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Dimanche dernier était diffusée aux Etats-Unis la première nouveauté de la saison américaine que j'avais vraiment cochée : Homeland. Si je l'attendais avec une relative impatience, j'avoue aussi que les noms à l'origine du projet (Howard Gordon, Alex Gansa) évoquaient trop 24 pour je ne l'aborde pas sans une certaine méfiance : le sujet envisagé implique une subtilité et une nuance dans l'écriture qui n'étaient pas forcément le point fort de cette dernière.

Adaptation de la série israélienne Hatufim, Homeland est diffusé sur Showtime. Je m'étais donc persuadée qu'elle pourrait plutôt s'orienter vers l'autre série abordant des thématiques terroristes sur cette chaîne, laquelle m'avait autrement plus marqué : Sleeper Cell. Au final, c'est avec un pilote efficace que s'ouvre Homeland. S'il n'a pas levé toutes mes réserves sur la série, il m'a cependant convaincue de revenir la semaine suivante, s'imposant pour le moment comme le meilleur pilote dramatique de cette rentrée US.

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Le sergent Nicholas Brody a été porté disparu en Irak au cours d'une opération, en 2003. Durant un raid dans un des bases terroristes ennemies du pays, des soldats américains le retrouvent, hirsute, dans une des geôles. Ce sauvetage inattendu - nul n'imaginait qu'il restait des prisonniers encore en vie - se transforme en grande opération de communication pour le gouvernement, propulsant Brody au rang de héros national et lui organisant un retour triomphal parmi les siens.

Cependant, Carrie Mathison, une analyste de la CIA, assiste à ce retour très perplexe et méfiante. Ancienne agent de terrain qui a passé du temps en Irak, elle a eu des informations de première main sur l'organisation qui détenait Brody, obsédée par son leader, un certain Abu Nazir. Est-il possible que ce dernier soit parvenu à retourner les loyautés de son prisonnier durant sa captivité ? Est-ce qu'il n'a pas permis à dessein à l'armée américaine de retrouver Brody ? Ce dernier ne pourrait pas être le fer de lance de la prochaine attaque terroriste majeure sur le territoire américain ?

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Bénéficiant d'une écriture dynamique et sans temps mort, Homeland démarre, dès ses premières minutes en Irak, sur quelques scènes nerveuses, très directes, qui donnent immédiatement le ton de la série. S'attachant ensuite à installer efficacement les grands enjeux de son histoire, le pilote ne tergiverse pas. Les cartes sont rapidement distribuées entre tous les personnages, de manière à ce que, à la fin de cette première heure, le puzzle de ce thriller, déjà bien dévoilé, retienne solidement l'attention d'un téléspectateur dont la curiosité est piquée. En ce sens, l'introduction est réussie.

Il apparaît vite que le grand atout de Homeland réside dans son concept, lui permettant opportunément de se démarquer des fictions traditionnelles ayant pour sujet des questions de terrorisme. En effet, à cette première problématique, vient se sur-ajouter celle du questionnement sur la loyauté d'un prisonnier de guerre, peut-être devenu une arme contre son propre camp. Le terroriste potentiel n'est pas ici un ennemi sans visage, il se cache derrière une figure amie, normalement hors de soupçon : celle d'un soldat, d'un héros de guerre. Les délimitations de chaque camp sont par conséquent remises en cause, dans une partie où tout le monde opère à visage découvert. La question principale va être de savoir, comment, et à quel prix, Brody a-t-il survécu ? Est-il devenu une menace pour son pays ou s'est-il seulement compromis au-delà de l'honorable, sur le moment, en s'accrochant à un instinct de survie ?

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Si le pilote de Homeland pose les bases d'un thriller efficace, le pilote n'a cependant pas écarté toutes les réserves que je pouvais avoir. Derrière l'originalité relative d'un concept de départ aux ramifications narratives très intéressantes, le scénario cède à certaines facilités pour introduire les enjeux précis, liés à une hypothétique trahison, qui l'intéressent. La construction de l'épisode contient des twists qui sont trop prévisibles pour être pleinement satisfaisants : toutes les pièces se mettent presque trop aisément en place, jusqu'à l'ultime indice - attendu - qui permet à Carrie de sauver sa place. Parallèlement, les thèmes connexes - retour en famille, traumatisme et réadaptation - ne sont pas oubliés, mais demeurent en arrière-plan.

Signe de la manière dont les scénaristes conçoivent leur sujet, l'épisode opte pour une volontaire surenchère dans la paranoïa. Cela s'avère à double tranchant. D'une part, l'envie de brouiller les lignes et de bousculer les repères du téléspectateur est appréciable, parce qu'elle renforce la spécificité et l'ambiance de la série : chacun semble avoir ses secrets, jusqu'à l'adultère de l'épouse. L'ambivalence de tous ces personnages est pesante. L'agent de la CIA la symbolise bien : certes intuitive, elle est très instable, soignant déjà des troubles psychologiques. On est loin d'une figure d'autorité solide et inébranlable. Mais d'autre part, la série ne fait pas dans un suggestif subtil qui aurait diffusé une sourde tension. Si on ignore les plans réels de Brody, il ne nous est pas caché qu'il passe beaucoup de choses sous silence, mentant sur ce qu'il s'est passé en captivité. Exploitant peu la nuance potentielle inhérente à son concept, le pilote semble plus ouvrir la voie d'une confrontation directe entre les deux protagonistes principaux. Un choix qui peut se justifier ; tout dépendra de la gestion de la suite.

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Sur la forme, Homeland bénéficie d'une réalisation très classique, assez nerveuse dans quelques passages. On pourrait peut-être lui reprocher un certain manque d'ambition, car le résultat reste honnête, mais très convenu. De même, la bande-son est efficace et calibrée, mais l'ensemble ne se démarque pas vraiment. C'est donc un pilote prudent sur la forme qui est proposé.

Enfin, un des grands atouts de Homeland réside indéniablement dans son casting. Ses acteurs pris séparement m'auraient déjà très motivée pour me lancer dans une série, par conséquent, je ne vous cache pas que les retrouver réunis m'a fait énormément plaisir. Claire Danes, égérie éternelle de mon adolescence dans Angela, 15 ans, incarne avec une énergie marquante, flirtant avec le névrotique, une agent de la CIA vraiment déstabilisante. Face à elle, moins employé dans ce pilote, Damian Lewis (Band of Brothers, Life) use de son flegme caractéristique pour composer cet ancien prisonnier de guerre aux loyautés potentiellement divisées. Par ailleurs, on retrouve à leurs côtés, la sublime Morena Baccarin (Firefly, V), le toujours très efficace Mandy Patinkin (Dead Like Me), aini que David Harewood (The Last Enemy, Robin Hood) ou encore Diego Klattenhoff (Whistler, Men in trees).

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Bilan : Parfaitement bien huilé pour introduire très efficacement les enjeux de la série, le pilote de Homeland est convaincant et rempli sa mission première : s'assurer de la fidélité du téléspectateur. Pour autant, il marche aussi sur une fine ligne : l'impression d'originalité, que laisse ce mélange entre fiction sur le terrorisme et questionnement sur ce prisonnier potentiellement retourné comme une arme contre son camp, ne pourra pas toujours compenser certaines facilités auxquelles cède la construction de l'épisode. Le sujet est ambitieux, il faudra donc un scénario à la hauteur pour exploiter pleinement tout le potentiel du concept. Au vu de ce pilote, je serais tentée de dire que, pour l'instant, Homeland investit mieux la partie "thriller" que la partie "psychologique" du genre dont elle se réclame. A suivre !


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série :