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05/05/2012

(UK) The Sandbaggers : If you want ‘James Bond’ go to your library.

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Vous est-il déjà arrivé de rêver l'existence d'une série ? De fantasmer en imaginant tous les ingrédients que vous aimeriez voir réunis dans une fiction traitant de tel ou tel sujet ? Et puis un jour, vous découvrez que cette série que vous croyiez utopique existe bel et bien. Qu'elle vous attendait en fait depuis (avant) votre naissance. Et vous en êtes réduit à vous demander pourquoi personne n'avait pris soin de vous enjoindre à vous installer devant auparavant. C'est ce qui m'est arrivé au cours des dernières semaines durant lesquelles j'ai visionné les trois saisons d'un bijou d'espionnage d'une qualité rare : The Sandbaggers. La seule autre oeuvre du genre à avoir su me procurer de telles sensations est la mini-série Tinker, Tailor, Soldier, Spy. Vous imaginez donc mon enthousiasme. 

Ce n'est pas sans doute pas un hasard si je fais instinctivement le rapprochement entre ces deux oeuvres : l'ambiance et la complexité de The Sandbaggers sont très semblables à l'univers de John le Carré. C'est une de ces séries d'espionnage qui prend le contre-pied de l'autre voie clinquante ouverte par James Bond, préférant embrasser une forme de réalisme rigoureux aussi éprouvant que fascinant (le titre de ce billet est une réplique du premier épisode). Créée et écrite dans sa majeure partie par Ian Mackintosh, un ancien officier naval, The Sandbaggers a été diffusée sur ITV de 1978 à 1980. Elle compte trois saisons, pour un total de 20 épisodes. C'est la disparition de Ian Mackintosh (dans un accident d'avion dont les circonstances floues sont venues contribuer à l'"aura" de la série), au cours de la saison 3, qui a précipité sa fin. Les trois derniers épisodes, écrits par d'autres scénaristes, sont des ersatz qui prouvent sans doute que seul son créateur pouvait rendre justice à l'essence de la série. C'est sur un cliffhanger qu'elle s'achèvera. 

Mais ce que je retiens de ces dernières semaines, c'est qu'il y a quelque chose de vraiment réconfortant à trouver encore - après tout ce que j'ai pu lire ou voir dans le genre de l'espionnage - des oeuvres qui vous impressionnent. Et celle que le New York Times a qualifié de "best spy series in television history", trente ans après sa conclusion, m'a vraiment captivé.

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The Sandbaggers est le surnom des agents d'une unité spéciale au sein du Secret Intelligence Service (plus connu sous le nom de MI-6) dont la série suit les activités. Elle s'intéresse plus particulièrement à celui qui dirige ce département des Opérations Spéciales dans lequel sont inclus les sandbaggers, Neil Burnside. Ancien agent de terrain lui-même, ce dernier se dévoue entièrement à son travail. Considérant toujours l'intérêt de son service comme sa première priorité, il s'efforce de placer ses agents dans les meilleures conditions pour intervenir, tout en bataillant régulièrement avec ses supérieurs - sur des questions de coupes budgétaires comme d'ordres de mission - qu'il n'a pas son pareil pour manipuler. C'est un ambitieux solitaire qui n'a que peu d'amis, Willie Caine, aka "Sandbagger One", étant un des rares avec qui il partage une compréhension mutuelle, que les évènements vont souvent fragiliser.

Au sein du MI-6, au fil des deux premières saisons, Neil Burnside trouve progressivement un terrain d'entente avec "C" (James Greenley) en dépit des réflexes de diplomate de ce dernier, mais les choses se compliquent durant la dernière saison où le successeur de Greenley désapprouve catégoriquement les méthodes et le sens de l'initiative de Neil. Le directeur adjoint du MI-6, Peele, n'est guère plus conciliant, leurs vues s'opposant presque toujours. En dehors du service, dans le cadre de ses fonctions, Neil est régulièrement amené à fréquenter Sir Geoffrey Wellingham, secrétaire d'Etat permanent influent qui maîtrise lui aussi les arcanes du pouvoir et a de plus la particularité d'être son ex-beau-père (sa fille et Neil sont divorcés). Enfin, fervent partisan de la "special relationship" qu'entretiennent le MI-6 et la CIA, il consultera souvent le chef de station de l'agence à Londres, Jeff Ross, qui va plus d'une fois le tirer d'affaire.

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The Sandbaggers propose une immersion sobre et réaliste dans les hautes sphères du renseignement britannique, décrivant, dans un contexte tendu de guerre froide, les opérations en cours mais aussi les rapports de force qui se jouent en coulisses au sein d'un même camp. L'attrait de la série repose sur la complexité et la richesse de ses scénarios. L'espionnage est un genre qui a été tellement traité qu'il est très difficile de se démarquer, en évitant le convenu, pour réussir à surprendre et à tenir en haleine le téléspectateur. C'est pourtant ce à quoi parvient The Sandbaggers. A chaque épisode, en s'appropriant tous les thèmes classiques du genre (protection des intérêts britanniques à l'étranger, collecte de renseignement, enquête de contre-espionnage pour débusquer une taupe, retournement d'un agent ennemi), elle délivre une histoire toujours très dense, où règnent les faux-semblants. La nature des missions fluctue, les retournements de situation sont constants, souvent inattendus, et le suspense est de mise jusqu'à la dernière minute de l'épisode. 

The Sandbaggers n'est pas une série d'action. Elle repose entièrement sur des dialogues très denses. Pour autant, la tension y est palpable comme rarement. Cette dernière se manifeste par les échanges dans les couloirs des différents bâtiments officiels, mais aussi - et de manière très accrue - à chaque scène à l'étranger. Il faut dire que le taux de mortalité des personnages de la série ferait presque passer la section D de Spooks pour un lieu sûr. Le téléspectateur apprend rapidement que la mort peut survenir à tout moment sur le champ des opérations. Elle est brutale. Souvent d'une instantanéité cruelle, sans la moindre préparation : une simple détonation, fatale. L'impression de réalisme émanant de la série est également renforcée par les fins teintées d'amertume, avec leur lot de regrets, sur lesquelles se concluent les épisodes. Nous immergeant dans un univers grisâtre, détaché de toute considération manichéenne, la série fait vraiment preuve d'une maîtrise rare dans la mise en scène des codes des fictions d'espionnage. Comme le montre parfaitement sa figure centrale.

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En effet, Neil Burnside est l'archétype du maître espion, avec la part de fascination et de sentiments ambivalents que ces personnages suscitent auprès du téléspectateur. Vivant pour et par son job - une des causes de l'échec de son mariage -, il est prêt à tout dans l'intérêt de son service. Nourrissant de hautes ambitions de carrière, il n'en compromet pas pour autant les principes qu'il juge fondamentaux pour mener des opérations sur le terrain. Arrogant, souvent sarcastique, parfois très cassant, son sens de la répartie et son intransigeance lui font à plusieurs reprises franchir les limites de l'insolence et s'exposer à des conflits ouverts avec ses supérieurs. Ces derniers apprennent d'ailleurs très vite à se méfier de leur subordonné : maîtrisant l'art de la manipulation et de la compartimentalisation des informations, prenant rarement un refus comme une fin de non recevoir définitive, Neil use et abuse de toutes les ficelles pour parvenir à ses fins. Il n'hésite pas à désobéir à des ordres directs ou à oublier d'informer ses supérieurs de certaines des missions jugées essentielles qu'il orchestre en sous-main, en passant notamment par la CIA.

Pourtant, derrière cette apparence froide, la réussite de la série va être de ne jamais oublier qu'elle met en scène des êtres humains, avec leurs passions sincères, leurs égos, mais aussi leurs limites et leurs failles. Les évènements sont rarement cléments avec Neil. Sa vie, entièrement liée au service, subit les aléas et contre-coups de ce dernier, jusque dans ses relations amoureuses. Prêt à tous les sacrifices dans l'intérêt supérieur du pays, il ne se remettra jamais complètement du bouleversant final de la saison 1. Les fondations de son amitié avec Willie Caine en ressortiront également très ébranlées. Si Neil est le pivôt de la série, The Sandbaggers n'en néglige cependant pas sa galerie de personnages, proposant des protagonistes toujours nuancés et fouillés. Chacun à leur manière, ils tentent d'imposer leurs vues. Neil est loin de ressortir toujours vainqueur de ces joutes ; il verra ainsi plusieurs fois la ruse et le pragmatisme de Wellingham ou encore la médiocrité persévérante de Peele l'emporter et le réduire à l'impuissance.

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The Sandbaggers est toujours aussi brillant sur le fond, mais c'est logiquement sur la forme que la série a plus vieilli (sa première saison date de 1978). Si la réalisation est limitée (beaucoup de huis clos dans les bureaux de pouvoir à Londres), sans véritable prise risque, c'est cependant surtout durant les scènes d'action que la mise en scène apparaît datée. Cela n'amoindrit pas l'impact de la série car ces dernières n'ont jamais été l'assise déterminante d'une oeuvre qui repose avant tout sur son scénario, ses dialogues et ses acteurs. L'intensité et le suspense demeurent intacts et se savourent comme au premier jour. De plus, pour nous mettre dans l'ambiance, le générique joue admirablement son rôle (cf. la première vidéo ci-dessous) : son thème musical, entêtant et intrigant, offre un mélange qui correspond à la tonalité de la série, qu'illustrent aussi les images choisies, où aucun visage n'apparaît. 

Enfin, The Sandbaggers bénéficie d'un très solide casting qui n'est pas étranger à la fascination qu'exerce la série. L'interprète de Neil Burnside est Roy Marsden. Sa réussite va être de parvenir à toujours maintenir l'ambiguïté de son personnage, le téléspectateur conservant une empathie avec lui, partageant ses dilemmes, s'efforçant de le comprendre, alors même que certaines actions auraient pu le rendre antipathique. Neil Burnside est est un maître espion redoutable, mais il n'en reste pas moins toujours très humain, avec des failles perceptibles. A ses côtés, Ray Lonnen incarne un subordonné à la loyauté indéfectible, l'acteur faisant bien ressortir l'ironie que son personnage manie régulièrement. Alan MacNaughtan, Richard Vernon, Jerome Willis ou encore Dennis Burgess représentent tous les facettes de l'establishment des hautes sphères du pouvoir britannique, se montrant convaincants dans des registres très différents. Quant à Bob Sherman, il apporte une sacrée présence pour jouer l'américain Jeff Ross.

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Bilan : Série d'espionnage où la subtilité et la complexité du scénario l'emportent sur l'action, capable de ménager un suspense prenant jusqu'à l'ultime twist qui prendra fréquemment par surprise le téléspectateur, The Sandbaggers est une fiction à l'écriture brillante et au casting particulièrement solide. Sa noirceur et ses ambivalences captivent et fascinent. La sobriété et la rigueur avec laquelle elle dépeint et nous immerge dans ces jeux d'espions létaux laissent une rare impression d'authenticité et de réalisme qui n'est pas sans évoquer l'ambiance des romans de John le Carré. C'est indéniablement une très grande série d'espionnage, une des plus abouties qu'il m'ait été donné de voir. 

Une oeuvre incontournable que je conseille fortement à tous les amateurs de fictions d'espionnage, et même au-delà. Si l'annulation de Spooks ou de Rubicon vous a laissé orphelin au cours de ces dernières saisons, n'hésitez pas à remonter le temps !

NOTE : 9,25/10


Le générique de la série :

05/11/2011

(UK) Spooks (MI-5), saison 10 : une dernière saison fidèle à la série

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Le 23 octobre 2011 s'est achevée sur BBC1 une des séries qui aura le plus marqué ma sériephilie britannique : Spooks (MI-5). Après dix saisons de loyaux services, de morts brutales et de paranoïa intense, il était assurément temps de conclure. Non seulement la série n'avait plus la flamboyance sobre des débuts, mais ses recettes désormais trop bien connues avaient même fini par la rendre prévisible, un paradoxe pour une fiction qui avait pu s'enorgueillir d'avoir tant de fois donner le vertige à ses téléspectateur.

Comme un symbole parfaitement adéquat pour boucler un cycle, c'est avec la Russie que Spooks aura renoué pour sa dernière saison. Et si tout au long de ces six épisodes, elle se sera efforcée de proposer une redistribution des cartes, où la Russie ne serait plus ennemie, mais bien l'alliée, c'est pourtant sous le signe de la Guerre Froide, et d'un passé parfois douloureux qu'il faut assumer, qu'elle aura été placée.

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Devant cette toile de fond russe, la saison a emprunté un schéma narratif assez proche de celui des précédentes : la construction d'un fil rouge prédominant qui conditionne l'ensemble, auquel se greffent quelques intrigues plus pressantes le temps d'un épisode. La série aura été globalement efficace dans ces deux domaines. Du côté de ces storylines indépendantes, elle aura proposé des intrigues toujours prenantes, globalement solides, dont le principal bémol fut un certain syndrome de déjà-vu. En effet, le parti pris dit "réaliste" ou du moins pessimiste qui fait la marque de fabrique de Spooks donne souvent au téléspectateur toutes les clés pour connaître la voie vers laquelle chacune de ces histoires s'oriente. Cependant, l'arrière goût teinté d'amertume que laissent certaines des conclusions les plus poignantes - le dénouement à Trafalgar Square par exemple - demeure une signature indélibile qui perpétue l'identité de la série.

Parallèlement, marquée par ce turn-over constant de son personnel, cette saison aura également diversement permis de mettre en valeur les personnages entourant le duo principal que forment Harry et Ruth. Comme une sorte d'hommage - volontaire ou non -, leurs histoires ne vont pas être sans réveiller des souvenirs du passé. La nouvelle chef de la section D, Erin Watts, n'aura pas démérité, sans que les scénaristes puissent explorer avec une réelle subtilité la question du carriérisme et du lien avec sa fille ; cette problématique n'étant pas sans rappeler la saison 3 et l'arrivée du couple Adam et Fiona. De son côté, Dimitri aura aussi eu droit à son épisode, avec un dilemme moral qui apparaît comme le faible écho des thèmes du mensonge et du relationnel centraux dans les premières saisons, notamment avec Tom. Pourtant, assez paradoxalement, ce sont ceux que les scénaristes n'auront pas véritablement cherché à faire briller qui s'en tireront le mieux. Présenté de manière excessivement antipathique, Callum aura été un des personnages qui se sera le plus efficacement détaché du carcan de "déjà vu" pour imposer son style au sein de la section D. Mais logiquement, c'est aussi par ses fins tragiques que cette saison 10 aura marqué. Dans une telle série, n'est-ce pas une sorte de consécration que de connaître cette mort brutale, "spooksienne" pourrait-on dire, qui laisse le téléspectateur sans voix ? Avant même le final, Spooks m'aura, une dernière fois, bluffé et fait frémir devant mon petit écran, avec la mort soudaine de Tariq.

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Cependant, c'est l'exploration d'un autre personnage qui aura été au coeur de la saison : celle de Harry. La résurgence de lourds secrets de la Guerre Froide offre un nouvel éclairage sur cette figure de l'espion aux facettes multiples, qui est devenue au fil de la série l'âme de Spooks. Cette fois-ci, ce n'est pas aux secrets ou à la raison d'Etat que touche l'histoire, mais bien à l'intime du personnage. Plus que les sacrifices et la culpabilité inhérente qui y est rattachée, je dois avouer que c'est la résolution offerte par le dernier épisode, riche en révélations, qui permet à cette storyline d'acquérir sa vraie dimension. Abandonnant ses accents faussement soap pour révéler un jeu de manipulation insoupçonné, la chute finale est, en dépit d'une mise en scène un peu artificielle, celle qui a posteriori apporte une nouvelle perspective autrement plus intrigante à l'ensemble de la saison. C'est dans un pur parfum Spooks-ien que la série se referme donc, avec un ultime retournement digne de ses grandes heures.

Ce ressenti est d'autant plus fort que tout en concluant le fil rouge, ce dernier épisode nous offre également son lot de drame qui prend au dépourvu, paraissant à la fois évitable et presque logique. Je l'ai dit pour Tariq, et je le redis pour Ruth, mais il est des sorties qui, dans Spooks, sont presque inhérentes à l'esprit de la série. Tout au long de la saison, les scénaristes auront éclairé ce lien, particulier, qui existe entre Ruth et Harry. Entre jeux d'espion et échanges tout en retenue, absorbés par leur job, ils seront restés là l'un pour l'autre jusqu'au bout. Si la fidélité de Ruth à Harry, en dépit de son nouveau travail loin de la section D, lui aura été fatale, elle correspond pleinement au personnage. Le rêve d'une vie ensemble, à la campagne, loin de ces préoccupations géopolitiques, était inaccessible. Si inconsciemment, le téléspectateur pouvait espérer que cette porte de sortie ne se referme pas, alors que chacun semblait désormais prêt à l'emprunter, la relation de Ruth et de Harry était trop intimement liée à ce qu'ils sont, à leur travail, pour envisager cette utopie.

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Après quinze jours, il m'est toujours difficile d'apprécier cette dernière saison avec suffisamment de recul. Spooks aura vécu pleinement ses dix années au cours desquelles je ne regrette pas un seul instant de l'avoir accompagné. Elle a considérablement évolué et muté depuis ses débuts, en 2002, jusqu'à cette conclusion en 2011, suivant, en un sens, le cycle de ses protagonistes principaux. Il y a d'abord eu Tom, le mensonge et les rapports difficiles entre vie privée et vie professionnelle ; Adam, d'une arrivée à la James Bond jusqu'à l'abîme de la dépression ; Ros, son flegme, son humour froid, et cette volonté chevillée au corps ; enfin, Lucas et cette douloureuse réadaptation au quotidien après tant d'années dans les geôles russes. A posteriori, à mes yeux nostalgiques, Tom Quinn restera sans aucun doute celui qui personnifiera toujours cette série (son apparition cameo à la fin du dernier épisode étant à ce titre parfaite), et cela autant pour son interprète, que pour l'état d'esprit qui marqua ces premières saisons. Mais une des forces de Spooks aura été de savoir toujours nous impliquer au côté de personnages qu'elle n'aura jamais ménagés. 

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Bilan : C'est avec beaucoup de soulagement que je peux écrire que Spooks aura été fidèle à elle-même jusqu'au bout. C'est par un épisode de haute volée, concluant avec une justesse presque inattendue, la saison comme la série, qu'elle a tiré sa révérence. Il a offert tout ce que l'on pouvait légitimement attendre. Un ultime retournement de situation, avec une manipulation d'une ampleur insoupçonnée qui éclaire sous un nouveau jour tant de choses. Un drame dans la lignée de l'esprit de la série. Et, surtout des dernières minutes parfaites. Un au revoir d'une sobriété bienvenue qui représente parfaitement la série, tandis que s'égrène sous les yeux de Harry et du téléspectateur tous ces noms d'agents trop tôt disparus. Le quotidien de la section D se poursuit malgré tout, inébranlable...

Au terme de cette dernière review, j'ai juste envie de remercier Spooks, pour ce thriller prenant qu'elle nous aura proposé, pour toutes ces émotions si intenses qu'elle nous aura fait vivre. Chapeau donc pour l'ensemble de son oeuvre, elle restera pour moi, et pour longtemps je pense, l'incarnation de la série moderne d'espionnage !


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la saison :

18/09/2011

(UK) Spooks (MI-5), saison 10 : this is the end

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C'est durant le mois d'août dernier que la nouvelle est tombée : Kudos, la société de production de Spooks, annonçait que cette saison 10 serait la dernière de la série. On le pressentait : la saison 9 avait paru ne plus savoir se réinventer, arrivant au bout de l'inspiration des scénaristes ; mais il faut cependant noter que ce n'est donc pas la chaîne de diffusion (BBC1) qui aura pris la décision finale.

Ce soir, en Angleterre, débute donc à 21 heures le dernier acte, en six épisodes, d'une oeuvre qui aura marqué le petit écran anglais au cours de la décennie qui s'est écoulée. Une programmation, un dimanche soir sur BBC1, inhabituelle, avec un dernier objectif qui a tous les attributs de la mission impossible : affronter le retour pour une saison 2 du grand succès critique et public d'ITV, Downton Abbey. Mais qu'importe au fond, le jeu des audiences pour une conclusion qui devrait s'intéresser plus particulièrement au seul protagoniste qui demeure du casting d'origine : Harry Pearce, celui qui s'est peu à peu affirmé comme la véritable âme de la série. Je n'ai pas de désirs particuliers sur la manière dont la série doit finir. Qu'il s'agisse des secrets du personnage, ou de sa relation avec Ruth, tout ce que je souhaite c'est, une dernière fois, faire confiance aux scénaristes pour offrir une conclusion à la hauteur de la série.

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Avec la fin de Spooks, c'est un chapitre de la télévision anglaise des années 2000 qui se referme : celui qui a bénéficié du dynamisme inité par Kudos (une boîte de production qui nous aura offert ensuite Hustle, Life on Mars & Ashes to Ashes, ou encore cet été The Hour). Mais si, à l'aube de cette saison 10, il ne reste, dans la série d'aujourd'hui, que des vestiges de la qualité passée et des recettes anciennes de Spooks, les scénaristes ayant exploité toutes les ficelles narratives envisageables du concept de départ, c'est pourtant le coeur très serré que je m'apprête à quitter cet univers. Car, c'est aussi à titre personnel qu'une page se tourne.

En Angleterre, elles sont trois fictions à avoir façonné les bases de ma sériephilie, mais Spooks est la seule avec laquelle j'ai pu développer un réel lien de fidélité à travers les ans (les deux autres sont des mini-séries, Warriors et State of Play). Elle restera la première série anglaise que j'ai suivi en direct de sa diffusion. Et si je ne l'ai pas débutée en 2002, mais seulement quelques années plus tard, elle s'est rapidement imposée comme le repère incontournable de mon automne sériephile. Pour preuve, elle est à ce jour la plus ancienne série en production que je regarde, toutes nationalités confondues : un point fixe dans mes programmes.

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Si elle est si importante à mes yeux, c'est que Spooks a été une de mes clés d'entrée les plus prolifiques dans le petit écran britannique, un véritable fil d'Ariane grâce à laquelle j'ai exploré, au gré des filmographies, cette télévision d'outre-Manche à la fois si proche, mais pourtant si peu familière par rapport aux Etats-Unis. Spooks a sans doute contribué plus que toute autre fiction à ma connaissance des acteurs de la télévision anglaise, que ce soit grâce à son défilé de guest-stars ou par ses changements incessants de casting principal. C'est d'autant plus vrai que, assez paradoxalement pour une série qui n'a jamais été tendre avec ses personnages, elle est une de ces rares fictions vraiment capables de faire aimer du public ses acteurs.

C'est sans doute pour cela que Spooks reste dans ma mémoire rattachée à son casting. Initialement, il y a d'abord eu Matthew Macfadyen, le seul que je connaissais au préalable grâce à Warriors - et qui, soyons franc, avait été ma première raison de découvrir Spooks (outre mon amour démesuré pour les jeux d'espions) : le personnage de Tom Quinn aura définitivement scellé mon affection pour cet acteur, et il restera celui qui m'a le plus marqué. Mais j'ai aussi rencontré, les découvrant ou redécouvrant, toute une galerie d'acteurs dont je suis tombée sous le charme et dont je suis désormais d'un oeil attentif la filmographie : Keeley Hawes, une Zoey à la fraîcheur communicative, ou Rupert Penry-Jones dont le personnage d'Adam Carter aura connu tant d'évolutions, des premières missions à la James Bond jusqu'à la dépression... Et que dire du flegme de Peter Firth ou de la froide détermination de Hermione Norris... J'ai même apprécié Richard Armitage (si on omet la saison 9 dont il n'est pas responsable), en dépit de mes mauvais souvenirs de Robin Hood.

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Spooks demeurera également gravée dans mes souvenirs sériephiles pour toutes ses émotions fortes qu'elle m'aura fait vivre, pour ces ressentis intenses devant une fiction qui avait érigé en règle le fait qu'aucun de ses protagonistes, même les principaux, ne soient à l'abri. Rarement une oeuvre aura tant éprouvé ses personnages, refusant obstinément tout acquis. Rarement aussi aura-t-on démontré une faculté à se réinventer et à poursuivre de l'avant. Combien de séries peuvent se vanter d'avoir autant choqué, autant fait pleurer son public, face à des morts tellement marquantes. Le premier traumatisme, celui de la friteuse, hantera encore longtemps mon esprit, tandis que d'autres scènes auront véritablement déchiré mon coeur : comment oublier l'exécution de Danny, de Ben... ou encore ce dernier regard, tellement bouleversant, tellement parlant, échangé entre Jo et Ros ?

Reflet de son époque (2002 - 2011), Spooks est aussi une série d'espionnage qui, il faut le rappeler, est née après le 11 septembre. Elle a ainsi mêlé et vu se succéder toutes les dynamiques de ce genre : introduisant les problématiques les plus modernes, mais remontant aussi aux plus anciennes traditions héritées de la Guerre Froide, avec lesquelles elle va semble-t-il renouer cette saison. Elle a offert un cocktail efficace qui, sans conserver la sobriété des débuts, aura su satisfaire un public amateur de ce type de fiction. Comme dans toute relation téléphagique, il y aura eu des hauts et des bas : elle a eu de grands moments, elle a aussi fait subir d'importants ratés. Mais alors que nous sommes au début de la fin, espérons seulement qu'elle saura se conclure d'une manière réussie qu'elle mérite tant.

Un pan de l'histoire télévisuelle anglaise des années 2000 se referme ; un pan fondateur de mon histoire personnelle avec les séries britanniques également.

 

La bande-annonce de la saison 10 :

 

Le générique de la saison 9 (avec ce thème musical tellement Spooks) :

29/12/2010

(K-Drama / Pilote) Athena : Goddess of War : un thriller d'espionnage explosif

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Le premier mercredi asiatique de 2010 ayant été consacré à un bilan d'IRIS, c'est presque logiquement qu'Athena : Goddess of War va conclure l'année... Attendue comme le thriller de cette fin 2010 en Corée du Sud,  cette série (à noter que cette étrange fascination pour les mythologies antiques ne semble pas prête de s'arrêter, puisque Poseidon débarquera sur les écrans en 2011) avait bénéficié d'une importante promotion. Spin-off d'un des dramas marquants de 2009, IRIS qui, à défaut d'avoir fait l'unanimité de la critique, avait fédéré une bonne partie du public, se concluant tout juste sous la barre des 40% de part d'audience, la série devait assumer cet héritage, tout en sachant se renouveler suffisamment pour ne pas sembler se contenter d'exploiter un filon s'étant révélé rentable.

En un sens, Athena ne dépareille pas : si IRIS m'avait globalement plu, elle m'avait aussi laissé d'importantes frustrations et certaines insatisfactions jamais corrigées. Les débuts d'Athena aussi explosifs qu'excessivement brouillons semblent reprendre le flambeau des points positifs comme négatifs. Si la série gagne progressivement en intensité - il lui faut quand même trois épisodes pour s'installer -, ces débuts laissent un même arrière-goût d'inachevé qui me fait dire que ce n'est sans doute pas encore pour cette fois que l'on aura un Gaiji Keisatsu coréen pleinement maîtrisé dans sa globalité.  

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Athena s'inscrit dans le même univers qu'IRIS, se déroulant plusieurs années après cette dernière, mais elle constitue cependant une histoire indépendante, ne partageant pas les mêmes protagonistes à l'exception du président occupant la Maison Bleue et des apparitions prévues en guest-star de Kim So Yeon et de Kim Seung Woo. Il y a donc bien quelques références à sa grande soeur, mais rien qui puisse empêcher de découvrir Athena sans avoir préalablement vu IRIS. Poursuivant dans une relative continuité thématique, elle lui emprunte quand même un enjeu similaire sensible, celui du nucléaire, reprenant le cours du programme nucléaire sud-coréen et des tensions que ce projet peut potentiellement générer vis-à-vis de ses voisins du Nord comme d'autres acteurs de la communauté internationale.

Athena débute sur des évènements qui se sont déroulés au Japon trois ans plus tôt : l'extraction compliquée du professeur Kim, un physicien qui va être une des figures déterminantes de ce programme. Tournant au désastre, les membres de l'équipe officieuse chargée par le gouvernement sud-coréen de rapatrier le scientifique furent alors quasiment tous exterminés, à l'exception du leader, Kwon Yong Gwan, par un mystérieux commando mené par Son Hyuk. Cependant le scientifique put être installé en Corée du Sud. Quelques années plus tard, le programme nucléaire de ce pays est sur le point d'être achevé et le professeur demeure l'objet de toutes les convoitises. Le NTS, service spécialisé du NIS, emploie toutes ses ressources à sa protection. Tandis que Son Hyuk, désormais à la tête de la section Asie de la Homeland Security aux Etats-Unis, fait tout pour empêcher ce projet qui tient à coeur au président sud-coréen d'être finalisé. Il a la surprise de retrouver sur sa route Kwon Yong Gwan qu'il avait épargné lors de leur précédente confrontation. Ce dernier vient d'être récemment nommé chef du NTS et n'en référe désormais directement qu'au président.

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Parallèlement, Lee Jung Woo travaille comme agent de terrain au sein du NTS. Il fait par hasard la connaissance de Yoon Hye In lors d'une de ses missions, découvrant a posteriori qu'elle s'occupe de faire visiter le NIS à des classes d'enfants. Ce qu'il ignore, c'est que la jeune femme faisait également partie du commando étant intervenu au Japon, non sous les ordres de Kwon Yong Gwan, mais dans l'équipe de Son Hyuk. Cependant c'est un coup de foudre qu'éprouve Jung Woo en la rencontrant, décidé à mieux la connaître. Dans le même temps, les choses s'accélèrent sur le terrain autour du programme nucléaire sud-coréen. Les Russes, mais aussi les Nord-Coréens, se manifestent. Tandis que Jung Woo remonte la piste de terroristes en lien avec cette affaire, les supérieurs de Son Hyuk le pressent de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher les Sud-Coréens d'achever leur programme. Tout cela les conduit dans une petite ville d'Italie, Vincenza...

A ce titre, le cadre constitue peut-être le premier atout formel de ce drama, signe également de son budget. A défaut d'avoir vraiment compris où se situait Alger sur une carte de l'Afrique, les scénaristes ont cependant pu déplacer l'action en Italie où s'est déroulée une partie du tournage. La série profite donc pleinement de ce décor de carte postale. Elle dispose d'un budget conséquent et entend le démontrer à l'écran. Pour cela, elle n'hésite pas à faire étalage de ses moyens, même en sacrifiant à certains artifices narratifs un brin forcés. Les rêves JamesBondiens de Jung Woo offrent ainsi un exutoire parfait aux scénaristes. Sonnant un peu creux, ils ont quand même le mérite d'afficher la couleur mais aussi une certaine prise de distance vis-à-vis de cette image d'Epinal du monde l'espionnage. En fait, les scénaristes semblent un peu à la croisée des chemins, adoptant une certaine ambivalence pour jouer sur tous les tableaux : conscients des clichés que ces scènes véhiculent, ils souhaitent aussi profiter de l'attrait qu'elles exercent fatalement sur l'inconscient d'un téléspectateur facilement charmé par ces éléments d'action très classes.

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Le contenu même d'Athena reflète d'ailleurs sur certains points cette même ambiguïté, jonglant avec un cahier des charges aux exigences très diverses. En effet, tout en n'hésitant pas à mettre en scène des passages d'action musclée et à poser des enjeux géopolitiques majeurs, Athena n'entend pas non plus renier son identité de drama sud-coréen. Elle s'efforce donc de replacer à l'occasion ses personnages au coeur de son propos, n'oubliant pas que c'est cette marque de fabrique plus portée vers l'émotionnel qui conduit prioritairement les téléspectateurs devant les séries de ce pays. Des romances potentielles qui s'esquissent, marquant les débuts hésitant d'un triangle amoureux, sur fond de trahison programmée et d'agents aux loyautés variables, jusqu'aux vengeances de sang, prix à payer pour des actes passés, les ingrédients sont là. Mais l'introduction de cette dimension plus humaine dans cet apparent thriller d'espionnage policé s'opère de façon assez peu naturelle. Parachutés maladroitement entre des scènes aux enjeux autrement plus importants, ces moments se mêlent aussi parfois aux storylines en cours, aboutissant à un étrange toutélié où l'enchaînement des coïncidences apparaît finalement trop peu crédible pour que le téléspectateur puisse y croire et s'y impliquer.

C'est sans trop de succès que la série recherche un point d'équilibre entre ces deux sphères, au cours de ces premiers épisodes, ne parvenant d'ailleurs pas à capitaliser sur un éventuel développement de l'affectif vis-à-vis de personnages auxquels on ne s'attache pas vraiment pour le moment. Le temps et le démarrage véritable de l'histoire permettront peut-être de gommer ces problèmes de mise en place initiaux. Mais IRIS avait souffert d'un même problème narratif qui est sans doute plus structurel. Je pense que cela tient surtout au fait que ces séries empruntent volontairement à leurs consoeurs occidentales certains codes scénaristiques - y trouvant notamment leur inspiration pour tous les aspects relatifs à l'espionnage -, tout en essayant de préserver ce qui fait la particularité des dramas sud-coréens. Or la conciliation de ces deux priorités ne va pas forcément de soi et est plus difficile qu'il n'y paraît. Au final, la dimension sentimentale fragilise quelque peu la solidité d'une histoire où certaines grosses ficelles auraient été clairement dispensables.

Cela ne signifie pas pour autant qu'Athena ne mérite pas le détour et une chance de grandir, car son explosivité et les enjeux forts qui s'esquissent laissent entrevoir un potentiel indéniable qui ne demande qu'à être exploité. L'ensemble est perfectible et dispose à l'évidence d'une bonne marge de progression. D'ailleurs, il faut noter qu'à partir du moment où l'intrigue paraît véritablement lancée et les ingrédients mis en place, il se dégage de l'ensemble une intensité nouvelle incontestablement prenante qui sait retenir l'attention du téléspectateur.

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Sur la forme, la réalisation reprend les ingrédients qui avaient fait l'identité visuelle d'IRIS. La photographie se veut sobre, sans le côté chatoyant que l'on croise traditionnellement dans les comédies romantiques. Les scènes d'action, que ce soient les fusillades ou les combats, se partagent tant bien que mal entre le désir évident de démontrer toute l'explosivité inhérente à la série et celui, plus anecdotique, de paraître réaliste. La bande-son se compose de plusieurs chansons déjà bien en place. Si leur emploi ne s'avère pas toujours des plus adroits, cela est dû aux difficultés du scénario de jongler entre le genre action et la nécessaire dose de romance, qui l'amène à passer sans transition de l'un à l'autre, au moyen justement de la soundtrack, de façon pas toujours très équilibré.

Enfin, le casting apparaît incontestablement comme une des forces de ce drama, qui pourra amender quelques faiblesses narratives. Si IRIS mêlait des révélations coups de coeur et des acteurs que je ne supporte (vraiment) pas, le casting d'Athena est plus homogène. Venu du grand écran, surtout connu en France pour le film Le Bon, la Brute et le Cinglé, Jung Woo Sung est une valeur sûre qui s'installe peu à peu dans un personnage à l'écriture un peu trop hésitante au départ. Face à lui, on retrouve Cha Seung Won qui m'a plus que marquée dans ce drama coup de coeur que fut City Hall. Je serais tentée de dire que c'est celui qui s'en sort le mieux dès ses premières scènes, bénéficiant sans doute du fait qu'il entre immédiatement en action. Il prend pleinement la mesure d'un personnage déjà défini dès le départ. L'actrice Soo Ae (Love Letter) complète le triangle qui s'esquisse, plus à l'aise dans ses scènes d'action que dans son travail au NIS. A leurs côtés, on retrouve une autre actrice que j'apprécie beaucoup depuis The Legend, Lee Ji Ah (Beethoven Virus), mais aussi d'autres figures très familières du petit écran sud-coréen, comme Kim Min Jong (The Return of Iljimae, A man called God), Choi Si Won (Oh! My Lady), Lee Bo Young (Harvest Villa), Yoo Dong Geun (Dandelion) ou encore Lee Jung Gil (IRIS).  

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Bilan : Auteur de débuts poussifs et relativement brouillons, que viennent obscurcir certaines grosses ficelles narratives oubliables, Athena n'est probablement pas ce thriller d'espionnage qui aurait appris des erreurs d'IRIS que l'on aurait pu espérer. Pour autant, face à un ensemble rythmé efficacement porté par un casting des plus solides, le téléspectateur se surprend à vouloir laisser le temps à la série de s'installer, sentant le potentiel indéniable sous-jacent. Signe que l'introduction se termine, les enjeux commencent à se concrétiser au cours d'un troisième épisode plus prenant, qui est notablement le premier à se terminer sur un vrai cliffhanger.

Après cette entrée en matière pas forcément des plus convaincantes, il faut espérer que l'écriture s'affine et murisse à mesure que l'intrigue se développe. De toute façon, vous connaissez mon penchant pour les histoires d'espions... Je serais donc au rendez-vous.  


NOTE : 5,75/10


Une bande-annonce de la série :


Une chanson de l'OST :


12/11/2010

(UK) Spooks (MI-5) : series 9, episode 8 (Finale) - Bilan

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Cette semaine a vu se clôturer en Angleterre diverses séries qui auront accompagné, bon gré, mal gré, mon automne téléphagique. L'heure est au bilan, contrasté il faut bien le dire. Avant d'essayer de partager tout l'enthousiasme qu'a su générer en moi celle qui fut la meilleure nouveauté anglo-saxonne de la rentrée, Downton Abbey, commençons sans doute par le sujet qui fâche le plus. Parce qu'il est toujours triste d'assister au délitement d'une série que l'on aime sincèrement.

Lundi dernier s'est terminée la neuvième saison de Spooks sur BBC1. Ce dernier épisode n'aura rien sauvé, s'inscrivant dans la droite lignée des faiblesses qui auront lourdement handicapé la série cette année. Si je me suis presque demandée s'il n'existait pas une forme de malédiction pesant sur les saisons correspondant à un chiffre multiple de 3 (les saisons 3 et 6 avaient jusqu'à présent étaient celles que j'avais le moins appréciées), j'ai peur que le diagnostic ne soit plus grave que des signes numérologiques. Si j'aime et aimerai toujours profondément cette série, n'est-elle pas arrivée à un moment où il lui conviendrait de tirer dignement sa révérence, au risque sinon de se perdre définitivement ?

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Le fil rouge de la saison aura, cette fois-ci, été interne au MI-5. Pas de conspiration internationale à stopper, ni de vastes complots à mettre à jour. Seulement la lente et douloureuse implosion, rapidement inéluctable, de la section D. Car cette saison 9 aura été celle de la descente aux enfers pour un des personnages principaux : Lucas North. Ou du moins pour celui que l'on croyait être Lucas North. Le coup de maître des scénaristes de Spooks aura été de réussir à détruire en huit petits épisodes ce qu'ils étaient fragilement et méticuleusement parvenus à construire en introduisant ce personnage. Lorsque ce dernier était arrivé, il y a deux saisons, dire que j'étais sceptique était un euphémisme. Je n'ai jamais caché ne pas être la plus grande fan de Richard Armitage (contrairement à la croyance commune, non, je n'aime pas tous les acteurs britanniques que je croise dans le petit écran) ; et, à la manière de Rupert Penry-Jones en début de saison 3, il venait remplacer un personnage (et un acteur) que j'appréciais beaucoup. Il ne faut jamais sous-estimer le sentimentalisme du téléphage. Pourtant, la solidité de la saison 7 - une des plus abouties que la série nous ait offerte - et l'installation globale de Lucas North m'auront la première agréablement surprise et pleinement convaincue.

C'est donc avec une certaine amertume devant ce spectacle semblable à une trahison scénaristique à retardement, que j'ai assisté à la déconstruction proposée par cette saison 9. Car, paradoxalement, l'intrigue de cette année se sera développée en saccageant minutieusement tout le travail mené au cours des deux dernières saisons. Or, en sacrifiant ainsi volontairement toute cohérence narrative pour céder à l'attrait clinquant et dramaturgique de la construction artificielle d'une pseudo-intrigue détruisant l'image d'un de ses personnages centraux, c'est l'âme de Spooks que les scénaristes ont également égaré en cours de route. J'aurais aimé pouvoir dire avoir ressenti la moindre émotion lors de cette confrontation finale sur le toit. J'aurais souhaité pouvoir comprendre l'empathie de Ruth pour un homme qui s'est finalement révélé être un étranger. J'aurais eu envie d'être touchée, même légèrement, par le conflit interne, auto-destructeur, de Lucas. Il n'en a rien été. De cette sortie sans panache n'est restée que la désagréable impression d'artificialité d'une intrigue qui a toujours sonné trop fictive et creuse pour que l'on y adhère. Il était simplement impossible de s'investir émotionnellement dans une histoire qui n'avait pas de sens ; car, quoiqu'en pensent les scénaristes, ils ne sont pas omnipotents au point de pouvoir faire table rase du passé en entamant la saison 9 d'une série.

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Tout au long de ces huit épisodes, une question m'a taraudé l'esprit : pourquoi avoir pris le risque d'une telle redistribution des cartes a priori contre-nature ? Il ne s'agissait pas d'une trahison pour un idéal ou une somme d'argent. Non, il s'agissait de détruire toutes les fondations d'un personnage. Si on regarde l'évolution passée de Spooks, on constate que la saison 7 a constitué une apogée pour ce qui est de l'exploitation d'un fil rouge représentant une menace internationale. La saison 8 aura tenté, avec plus de maladresses et moins de succès, de reprendre les mêmes ingrédients. Les scénaristes se sont-ils dits que, finalement, l'élément à retenir de la saison 7 pouvait être plutôt l'implosion de la section D avec un de ses membres s'en dissociant ? Mais cette année, outre ce point de départ erroné, l'inconsistance de l'écriture de la série aura achevé de dénaturer l'ensemble. Prenons simplement un des exemples les plus révélateurs de la réflexion inachevée des scénaristes : le rappel de Malcolm, vaguement entrevu le temps d'une poignée de scènes dont je cherche encore l'utilité et la raison, autre que jouer sur une basse fibre nostalgique qui aveuglerait le téléspectateur.

Evoquer Malcolm, avec les souvenirs des "good old days" que cela implique, amène à soulever une autre faiblesse, qui n'est certes pas propre à cette saison spécifiquement : le manque d'esprit de groupe animant la section D. Spooks a toujours su renouveler ses effectifs avec un côté impitoyable qui a pu nous faire nous ronger les sangs plus d'une fois. Sans forcément aspirer à l'ambiance un peu utopique qui régnait aux débuts de la série, il manque désormais à à la série - c'était également le cas l'an passé - une véritable union en son sein qui permettrait d'humaniser ses personnages. En liquidant des figures clés, les saisons 7 et 8 auront atteint des intensités dramatiques fascinantes, mais auront privé Spooks d'une dimension humaine dont elle ne peut faire l'économie. Certes, il y a toujours Harry et Ruth qui auront sauvé bien des scènes cette année mais, même eux finissent par tourner en rond. Parmi les nouveaux introduits en début de saison, le personnage de Beth aura brillé par sa fadeur et son inconsistance. Dimitri aura montré plus de potentiel, mais n'aura pas été suffisamment exploité. Si bien qu'en plus de ne pas être parvenue à proposer une histoire solide sur le fond, cette saison 9 aura confirmé l'incapacité de Spooks à renouer avec l'atmosphère et l'esprit d'équipe qui ont pu constituer un des attraits, peut-être plus implicite, mais tout aussi important, de la section D.   

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Bilan : Cette saison 9 m'a considérablement déroutée et, quelque part, fâchée avec les scénaristes de Spooks. Si la plume de cette review a été trempée dans l'encre amer d'un dépit profond, c'est avant tout parce que j'aime cette série. Certes je reconnais qu'il serait excessif de tout rejeter en bloc dans les épisodes de cette année. Si l'arc d'ensemble est à oublier, certaines histoires auront bien eu ce parfum caractéristique, désormais un peu éventé, qui agit comme un rappel teinté de nostalgie. Cependant c'est désormais vers une conclusion que j'aimerai voir la série s'orienter. Une vraie fin qui renouerait avec l'esprit de Spooks, non cette caricature facile et forcée à laquelle les scénaristes ont trop souvent cédé cette année. Peut-être est-il temps de refermer un chapitre qui restera majeur dans la fiction britannique des années 2000.


NOTE : 5,5/10


Le générique de cette saison 9 :