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07/09/2012

(Mini-série UK) A Mother's Son : concevoir l'impensable pour une mère

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En ce début septembre, la rentrée télévisuelle bat son plein en Angleterre. Qu'il s'agisse de la BBC, d'ITV ou de Sky, l'amateur de séries britanniques n'a que l'embarras du choix (et manque de temps pour espérer tout suivre). A défaut de pouvoir être exhaustive, tâchons d'évoquer les fictions que j'ai eue l'occasion de regarder et qui ont retenu mon attention. Aujourd'hui, je veux revenir sur une mini-série d'ITV : A mother's son.

Créée par Chris Lang, comportant en tout 2 parties de 45 minutes chacune, elle a été diffusée dans le courant de la semaine qui s'achève, les lundi et mardi soirs ; le deuxième épisode battant même son concurrent direct sur BBC1, l'épisode 4 de la saison 2 d'Accused. A mother's son rassemblait une histoire et un casting qui avaient éveillé mon intérêt, et je n'ai pas été déçue.

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A mother's son s'ouvre sur un drame qui vient troubler le calme d'une petite ville du bord de mer anglais : une adolescente est retrouvée morte, le cadavre abandonné par son meurtrier dans la campagne environnante. Ce fait divers secoue toute la communauté, tandis que l'enquête policière avance difficilement, les officiers ayant peu d'indices à exploiter. C'est dans ce contexte pesant que la mini-série va s'intéresser plus particulièrement au quotidien d'une famille habitant dans la bourgade.

Rosie Haleton s'est récemment remariée, et s'efforce de construire une vie familiale épanouie au sein d'une cellule recomposée, avec quatre adolescents aux relations forcément compliquées. Si elle rencontre des difficultés d'autorité avec son beau-fils, c'est son fils, Jamie, qui suscite son inquiétude. Une série de petits détails sur le soir où le crime a eu lieu suscite une suspicion face à laquelle elle ne sait comme réagir. Lorsqu'elle met la main sur une paire de baskets apparemment ensanglantés, son imagination s'emballe : Jamie peut-il être mêlé, d'une façon ou d'une autre, à ce meurtre ? Aussi inconcevables que puissent être instinctivement ces suspicions pour une mère vis-à-vis de son enfant, Rosie essaie d'être rationnelle et objective. Tout en tentant de reconstituer l'emploi du temps de son fils, elle est consciente que, si elle fait une erreur, leur relation pourrait être irrémédiablement détruite.

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A mother's son, c'est tout d'abord un sujet fort, ambitieux, qui interpelle a priori. Il s'agit de voir comment une mère peut se résoudre à envisager l'impensable, à concevoir l'idée que son enfant, à qui elle a donné naissance et qu'elle a élevé, ait pu ôter la vie à quelqu'un. Un tel concept a le potentiel de vous prendre aux tripes et le dilemme ainsi posé ne peut laisser indifférent. Il y a deux versants dans les réactions mises en scène : d'une part, il faut faire face au déchirement que représente le fait qu'un être aimé commette un tel geste si condamnable, d'autre part, Rosie est amenée à s'interroger sur ses propres responsabilités : qu'a-t-elle fait, qu'aurait-elle pu faire, pour empêcher un tel acte, si son fils est effectivement lié au crime, voire s'il est le meurtrier ? Naviguant entre ces thèmes, le récit a le mérite de toujours conserver une relative incertitude, permettant de prendre la mesure du poids qui pèse sur cette mère et de tous ces éléments contradictoires qui l'assaillent. La conscience et la raison de Rosie semblent lutter en duel avec ce que son coeur souhaiterait lui dicter.

La tension est, tout au long de l'histoire, uniquement psychologique. Le soupçon fait son oeuvre, creuse des méfiances, aiguise des inquiétudes autour de points qui pourraient être de simples détails. C'est avant tout la stabilité familiale qui menace d'exploser. Suivant une narration linéaire, mais très bien menée, A mother's son est prenante de bout en bout. Après un premier épisode, très introspectif, où la solitude domine et où les silences et les actes cachés parlent plus que les mots, le second est celui des oppositions de vues entre adultes, parents et beau-parent ayant chacun leur perspective personnelle sur la situation. C'est très efficace. Il manque seulement à la série l'intensité de l'ultime confrontation, celle vers laquelle tend toute l'histoire. Cette dernière est certes correctement mise en scène, mais après toutes ces émotions contradictoires par lesquelles le téléspectateur est passé, sans doute attendait-il plus du parachèvement de toute cette construction pleine de tension. La sobriété finale aura au moins le mérite de sonner authentique : la retenue étant ici préférable aux excès.

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Sur la forme, A mother's son est un drama très soigné. La photographie y est froide, en parfait accord avec le ton d'ensemble. Y dominent des teintes où le gris est de circonstance (surtout pour les scènes en extérieur) : cela conforte l'ambiance inquiète et pourtant dans un cadre si ordinaire, tournant autour d'une sourde paranoïa, que cultive la mini-série. Pour accompagner ce visuel, la bande-son, fournie en instrumentaux musicaux, parachève très bien cette atmosphère.

Enfin, dernier argument - et non des moindres - pour vous convaincre de vous installer devant A mother's son : le casting délivre de superbes performances, renforçant la portée du scénario par l'intensité de leurs interprétations. C'est Hermione Norris (Wire in the blood, Spooks) qui est logiquement la plus sollicitée, en mère placée devant des responsabilités inconcevables : elle est plus qu'à la hauteur de ce rôle complexe, entre raison et émotion. A ses côtés, Martin Clunes (Doc Martin) incarne son mari - il est parfait pour nous faire partager les dilemmes de ce beau-père dont les loyautés s'entrecroisent. Alexander Arnold (Skins) joue avec ambiguïté ce fils dont on ne sait trop quoi penser, tandis que Paul McGann (Collision, Luther) est son père. Enfin, à noter la présence de Nicola Walker (Spooks) dans le rôle de l'officier de police en charge de l'investigation (ça fait toujours plaisir de la retrouver).

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Bilan : Thriller psychologique au sujet très difficile, A mother's son marque par l'histoire poignante proposée, obligeant une mère à concevoir l'impensable : considérer que son enfant peut être mêlé à ou avoir commis un crime. Dans l'ensemble, le récit, sans atteindre toute l'intensité que l'on perçoit en potentiel, est rondement mené, très efficace pour retranscrire la tension naissante. Parfaitement servie par un casting convaincant qui a pris la mesure du scénario, A mother's son mérite une découverte.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la mini-série :

05/11/2011

(UK) Spooks (MI-5), saison 10 : une dernière saison fidèle à la série

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Le 23 octobre 2011 s'est achevée sur BBC1 une des séries qui aura le plus marqué ma sériephilie britannique : Spooks (MI-5). Après dix saisons de loyaux services, de morts brutales et de paranoïa intense, il était assurément temps de conclure. Non seulement la série n'avait plus la flamboyance sobre des débuts, mais ses recettes désormais trop bien connues avaient même fini par la rendre prévisible, un paradoxe pour une fiction qui avait pu s'enorgueillir d'avoir tant de fois donner le vertige à ses téléspectateur.

Comme un symbole parfaitement adéquat pour boucler un cycle, c'est avec la Russie que Spooks aura renoué pour sa dernière saison. Et si tout au long de ces six épisodes, elle se sera efforcée de proposer une redistribution des cartes, où la Russie ne serait plus ennemie, mais bien l'alliée, c'est pourtant sous le signe de la Guerre Froide, et d'un passé parfois douloureux qu'il faut assumer, qu'elle aura été placée.

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Devant cette toile de fond russe, la saison a emprunté un schéma narratif assez proche de celui des précédentes : la construction d'un fil rouge prédominant qui conditionne l'ensemble, auquel se greffent quelques intrigues plus pressantes le temps d'un épisode. La série aura été globalement efficace dans ces deux domaines. Du côté de ces storylines indépendantes, elle aura proposé des intrigues toujours prenantes, globalement solides, dont le principal bémol fut un certain syndrome de déjà-vu. En effet, le parti pris dit "réaliste" ou du moins pessimiste qui fait la marque de fabrique de Spooks donne souvent au téléspectateur toutes les clés pour connaître la voie vers laquelle chacune de ces histoires s'oriente. Cependant, l'arrière goût teinté d'amertume que laissent certaines des conclusions les plus poignantes - le dénouement à Trafalgar Square par exemple - demeure une signature indélibile qui perpétue l'identité de la série.

Parallèlement, marquée par ce turn-over constant de son personnel, cette saison aura également diversement permis de mettre en valeur les personnages entourant le duo principal que forment Harry et Ruth. Comme une sorte d'hommage - volontaire ou non -, leurs histoires ne vont pas être sans réveiller des souvenirs du passé. La nouvelle chef de la section D, Erin Watts, n'aura pas démérité, sans que les scénaristes puissent explorer avec une réelle subtilité la question du carriérisme et du lien avec sa fille ; cette problématique n'étant pas sans rappeler la saison 3 et l'arrivée du couple Adam et Fiona. De son côté, Dimitri aura aussi eu droit à son épisode, avec un dilemme moral qui apparaît comme le faible écho des thèmes du mensonge et du relationnel centraux dans les premières saisons, notamment avec Tom. Pourtant, assez paradoxalement, ce sont ceux que les scénaristes n'auront pas véritablement cherché à faire briller qui s'en tireront le mieux. Présenté de manière excessivement antipathique, Callum aura été un des personnages qui se sera le plus efficacement détaché du carcan de "déjà vu" pour imposer son style au sein de la section D. Mais logiquement, c'est aussi par ses fins tragiques que cette saison 10 aura marqué. Dans une telle série, n'est-ce pas une sorte de consécration que de connaître cette mort brutale, "spooksienne" pourrait-on dire, qui laisse le téléspectateur sans voix ? Avant même le final, Spooks m'aura, une dernière fois, bluffé et fait frémir devant mon petit écran, avec la mort soudaine de Tariq.

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Cependant, c'est l'exploration d'un autre personnage qui aura été au coeur de la saison : celle de Harry. La résurgence de lourds secrets de la Guerre Froide offre un nouvel éclairage sur cette figure de l'espion aux facettes multiples, qui est devenue au fil de la série l'âme de Spooks. Cette fois-ci, ce n'est pas aux secrets ou à la raison d'Etat que touche l'histoire, mais bien à l'intime du personnage. Plus que les sacrifices et la culpabilité inhérente qui y est rattachée, je dois avouer que c'est la résolution offerte par le dernier épisode, riche en révélations, qui permet à cette storyline d'acquérir sa vraie dimension. Abandonnant ses accents faussement soap pour révéler un jeu de manipulation insoupçonné, la chute finale est, en dépit d'une mise en scène un peu artificielle, celle qui a posteriori apporte une nouvelle perspective autrement plus intrigante à l'ensemble de la saison. C'est dans un pur parfum Spooks-ien que la série se referme donc, avec un ultime retournement digne de ses grandes heures.

Ce ressenti est d'autant plus fort que tout en concluant le fil rouge, ce dernier épisode nous offre également son lot de drame qui prend au dépourvu, paraissant à la fois évitable et presque logique. Je l'ai dit pour Tariq, et je le redis pour Ruth, mais il est des sorties qui, dans Spooks, sont presque inhérentes à l'esprit de la série. Tout au long de la saison, les scénaristes auront éclairé ce lien, particulier, qui existe entre Ruth et Harry. Entre jeux d'espion et échanges tout en retenue, absorbés par leur job, ils seront restés là l'un pour l'autre jusqu'au bout. Si la fidélité de Ruth à Harry, en dépit de son nouveau travail loin de la section D, lui aura été fatale, elle correspond pleinement au personnage. Le rêve d'une vie ensemble, à la campagne, loin de ces préoccupations géopolitiques, était inaccessible. Si inconsciemment, le téléspectateur pouvait espérer que cette porte de sortie ne se referme pas, alors que chacun semblait désormais prêt à l'emprunter, la relation de Ruth et de Harry était trop intimement liée à ce qu'ils sont, à leur travail, pour envisager cette utopie.

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Après quinze jours, il m'est toujours difficile d'apprécier cette dernière saison avec suffisamment de recul. Spooks aura vécu pleinement ses dix années au cours desquelles je ne regrette pas un seul instant de l'avoir accompagné. Elle a considérablement évolué et muté depuis ses débuts, en 2002, jusqu'à cette conclusion en 2011, suivant, en un sens, le cycle de ses protagonistes principaux. Il y a d'abord eu Tom, le mensonge et les rapports difficiles entre vie privée et vie professionnelle ; Adam, d'une arrivée à la James Bond jusqu'à l'abîme de la dépression ; Ros, son flegme, son humour froid, et cette volonté chevillée au corps ; enfin, Lucas et cette douloureuse réadaptation au quotidien après tant d'années dans les geôles russes. A posteriori, à mes yeux nostalgiques, Tom Quinn restera sans aucun doute celui qui personnifiera toujours cette série (son apparition cameo à la fin du dernier épisode étant à ce titre parfaite), et cela autant pour son interprète, que pour l'état d'esprit qui marqua ces premières saisons. Mais une des forces de Spooks aura été de savoir toujours nous impliquer au côté de personnages qu'elle n'aura jamais ménagés. 

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Bilan : C'est avec beaucoup de soulagement que je peux écrire que Spooks aura été fidèle à elle-même jusqu'au bout. C'est par un épisode de haute volée, concluant avec une justesse presque inattendue, la saison comme la série, qu'elle a tiré sa révérence. Il a offert tout ce que l'on pouvait légitimement attendre. Un ultime retournement de situation, avec une manipulation d'une ampleur insoupçonnée qui éclaire sous un nouveau jour tant de choses. Un drame dans la lignée de l'esprit de la série. Et, surtout des dernières minutes parfaites. Un au revoir d'une sobriété bienvenue qui représente parfaitement la série, tandis que s'égrène sous les yeux de Harry et du téléspectateur tous ces noms d'agents trop tôt disparus. Le quotidien de la section D se poursuit malgré tout, inébranlable...

Au terme de cette dernière review, j'ai juste envie de remercier Spooks, pour ce thriller prenant qu'elle nous aura proposé, pour toutes ces émotions si intenses qu'elle nous aura fait vivre. Chapeau donc pour l'ensemble de son oeuvre, elle restera pour moi, et pour longtemps je pense, l'incarnation de la série moderne d'espionnage !


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la saison :

18/09/2011

(UK) Spooks (MI-5), saison 10 : this is the end

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C'est durant le mois d'août dernier que la nouvelle est tombée : Kudos, la société de production de Spooks, annonçait que cette saison 10 serait la dernière de la série. On le pressentait : la saison 9 avait paru ne plus savoir se réinventer, arrivant au bout de l'inspiration des scénaristes ; mais il faut cependant noter que ce n'est donc pas la chaîne de diffusion (BBC1) qui aura pris la décision finale.

Ce soir, en Angleterre, débute donc à 21 heures le dernier acte, en six épisodes, d'une oeuvre qui aura marqué le petit écran anglais au cours de la décennie qui s'est écoulée. Une programmation, un dimanche soir sur BBC1, inhabituelle, avec un dernier objectif qui a tous les attributs de la mission impossible : affronter le retour pour une saison 2 du grand succès critique et public d'ITV, Downton Abbey. Mais qu'importe au fond, le jeu des audiences pour une conclusion qui devrait s'intéresser plus particulièrement au seul protagoniste qui demeure du casting d'origine : Harry Pearce, celui qui s'est peu à peu affirmé comme la véritable âme de la série. Je n'ai pas de désirs particuliers sur la manière dont la série doit finir. Qu'il s'agisse des secrets du personnage, ou de sa relation avec Ruth, tout ce que je souhaite c'est, une dernière fois, faire confiance aux scénaristes pour offrir une conclusion à la hauteur de la série.

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Avec la fin de Spooks, c'est un chapitre de la télévision anglaise des années 2000 qui se referme : celui qui a bénéficié du dynamisme inité par Kudos (une boîte de production qui nous aura offert ensuite Hustle, Life on Mars & Ashes to Ashes, ou encore cet été The Hour). Mais si, à l'aube de cette saison 10, il ne reste, dans la série d'aujourd'hui, que des vestiges de la qualité passée et des recettes anciennes de Spooks, les scénaristes ayant exploité toutes les ficelles narratives envisageables du concept de départ, c'est pourtant le coeur très serré que je m'apprête à quitter cet univers. Car, c'est aussi à titre personnel qu'une page se tourne.

En Angleterre, elles sont trois fictions à avoir façonné les bases de ma sériephilie, mais Spooks est la seule avec laquelle j'ai pu développer un réel lien de fidélité à travers les ans (les deux autres sont des mini-séries, Warriors et State of Play). Elle restera la première série anglaise que j'ai suivi en direct de sa diffusion. Et si je ne l'ai pas débutée en 2002, mais seulement quelques années plus tard, elle s'est rapidement imposée comme le repère incontournable de mon automne sériephile. Pour preuve, elle est à ce jour la plus ancienne série en production que je regarde, toutes nationalités confondues : un point fixe dans mes programmes.

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Si elle est si importante à mes yeux, c'est que Spooks a été une de mes clés d'entrée les plus prolifiques dans le petit écran britannique, un véritable fil d'Ariane grâce à laquelle j'ai exploré, au gré des filmographies, cette télévision d'outre-Manche à la fois si proche, mais pourtant si peu familière par rapport aux Etats-Unis. Spooks a sans doute contribué plus que toute autre fiction à ma connaissance des acteurs de la télévision anglaise, que ce soit grâce à son défilé de guest-stars ou par ses changements incessants de casting principal. C'est d'autant plus vrai que, assez paradoxalement pour une série qui n'a jamais été tendre avec ses personnages, elle est une de ces rares fictions vraiment capables de faire aimer du public ses acteurs.

C'est sans doute pour cela que Spooks reste dans ma mémoire rattachée à son casting. Initialement, il y a d'abord eu Matthew Macfadyen, le seul que je connaissais au préalable grâce à Warriors - et qui, soyons franc, avait été ma première raison de découvrir Spooks (outre mon amour démesuré pour les jeux d'espions) : le personnage de Tom Quinn aura définitivement scellé mon affection pour cet acteur, et il restera celui qui m'a le plus marqué. Mais j'ai aussi rencontré, les découvrant ou redécouvrant, toute une galerie d'acteurs dont je suis tombée sous le charme et dont je suis désormais d'un oeil attentif la filmographie : Keeley Hawes, une Zoey à la fraîcheur communicative, ou Rupert Penry-Jones dont le personnage d'Adam Carter aura connu tant d'évolutions, des premières missions à la James Bond jusqu'à la dépression... Et que dire du flegme de Peter Firth ou de la froide détermination de Hermione Norris... J'ai même apprécié Richard Armitage (si on omet la saison 9 dont il n'est pas responsable), en dépit de mes mauvais souvenirs de Robin Hood.

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Spooks demeurera également gravée dans mes souvenirs sériephiles pour toutes ses émotions fortes qu'elle m'aura fait vivre, pour ces ressentis intenses devant une fiction qui avait érigé en règle le fait qu'aucun de ses protagonistes, même les principaux, ne soient à l'abri. Rarement une oeuvre aura tant éprouvé ses personnages, refusant obstinément tout acquis. Rarement aussi aura-t-on démontré une faculté à se réinventer et à poursuivre de l'avant. Combien de séries peuvent se vanter d'avoir autant choqué, autant fait pleurer son public, face à des morts tellement marquantes. Le premier traumatisme, celui de la friteuse, hantera encore longtemps mon esprit, tandis que d'autres scènes auront véritablement déchiré mon coeur : comment oublier l'exécution de Danny, de Ben... ou encore ce dernier regard, tellement bouleversant, tellement parlant, échangé entre Jo et Ros ?

Reflet de son époque (2002 - 2011), Spooks est aussi une série d'espionnage qui, il faut le rappeler, est née après le 11 septembre. Elle a ainsi mêlé et vu se succéder toutes les dynamiques de ce genre : introduisant les problématiques les plus modernes, mais remontant aussi aux plus anciennes traditions héritées de la Guerre Froide, avec lesquelles elle va semble-t-il renouer cette saison. Elle a offert un cocktail efficace qui, sans conserver la sobriété des débuts, aura su satisfaire un public amateur de ce type de fiction. Comme dans toute relation téléphagique, il y aura eu des hauts et des bas : elle a eu de grands moments, elle a aussi fait subir d'importants ratés. Mais alors que nous sommes au début de la fin, espérons seulement qu'elle saura se conclure d'une manière réussie qu'elle mérite tant.

Un pan de l'histoire télévisuelle anglaise des années 2000 se referme ; un pan fondateur de mon histoire personnelle avec les séries britanniques également.

 

La bande-annonce de la saison 10 :

 

Le générique de la saison 9 (avec ce thème musical tellement Spooks) :

27/09/2010

(Mini-série UK) Bouquet of Barbed Wire : le subversif ne suffit pas.

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En 1976, une mini-série, adaptée d'un roman des années 60 d'Andrea Newman, choquait l'Angleterre, tout en rencontrant un vrai succès. Amorale, subversive, repoussant et détruisant toutes les conventions, Bouquet of Barbed Wire a ainsi marqué la télévision britannique de son empreinte. Plus de trois décennies plus tard, ITV se ré-appropriait ce nom qui résonne toujours d'un écho particulier outre-Manche pour proposer une version modernisée de cette histoire, complexe à plus d'un titre, par le biais d'une mini-série qu'elle a diffusé au cours de ce mois de septembre 2010 (durant trois lundis soirs d'affilée).

Comme toute reprise de fiction aussi iconoclaste, l'exercice de modernisation s'est avéré délicat. Plus que certaines modifications visant à crédibiliser le cadre, il était facile de deviner que ce serait surtout la gestion de la frontière du choquant qui allait être difficile pour cette nouvelle adaptation. La télévision moderne a fait son oeuvre, désensibilisant considérablement un téléspectateur qui n'est plus choqué par grand chose venu de son petit écran.

Pourtant, plus que l'évolution des moeurs télévisuelles, c'est probablement la réduction conséquente de sa durée qui aura été dommageable à Bouquet of Barbed Wire. En effet, cette version de 2010 ne comprend plus que 3 épisodes, contre 7 pour l'originale. Ces contraintes expliquent sans doute en partie le résultat saccadé, très mitigé voire peu satisfaisant, auquel la mini-série est parvenu. Quelques étincelles ne pouvant faire oublier le déséquilibre narratif constant qui l'a caractérisée.

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Il était une fois une famille sans histoire. Cliché de la petite bourgeoisie britannique, avec enfants en école privée et belle demeure à la campagne. Une famille qui, pourtant, derrière ces apparences pseudo parfaites ,cache déjà des failles et des non-dits que le bonheur affiché masque plus ou moins. Mais ce fragile équilibre va être perturbé par un nouvel arrivant qui va méthodiquement entreprendre de détruire toutes ses fondations.

La si belle Prue Manson, prunelle des yeux de son père, va en effet entrer dans l'âge adulte plus rapidement que ce dernier n'aurait pu l'imaginer, séduite par son professeur de littérature, le mystérieux Gavin Sorenson. Prue sait si peu de choses à son sujet. Mais l'heure n'est plus aux interrogations, car la jeune femme est enceinte, abandonnant ainsi ses projets d'études. Or l'introduction de Gavin dans la famille ne va pas se faire sans heurt. D'une insolence travaillée, adoptant un comportement souvent odieux, il provoque constamment un beau-père déjà déstabilisé par la conscience dérangeante du fait que sa fille lui échappe et grandisse loin de lui. Mais chacun s'accroche à ses secrets, tandis que Gavin bouleverse chaque jour un peu plus les certitudes de tous les membres de cette famille autrefois ordinaire. Peu à peu les Manson se désagrègent tandis que les interdits sont transgressés les uns après les autres.

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Car s'il y a bien une constance dans ce tourbillon pas toujours maîtrisé que constitue Bouquet of Barbed Wire, c'est cette volonté presque revendiquée de repousser les limites. La mini-série entreprend de jouer avec les codes moraux afin de mieux s'en affranchir, opérant ainsi une redistribution des conventions. La dynamique qui s'installe entre les différents personnages principaux apparaît d'emblée viciée, un malaise se crée sans que l'on sache immédiatement en desceller l'origine et les aboutissants. Derrière ces rapports ambivalents, les frustrations des uns et des autres, face à des situations qui les troublent, vont se charger de ramener à la surface, les exposant au grand jour, des désirs et des pulsions jusqu'alors inavouées.

A ce petit jeu, il est évident que Bouquet of Barbed Wire peut difficilement retrouver le retentissement que l'histoire avait eu il y a trois décennies. La télévision moderne est passée par là. Mais la mini-série s'emploie cependant à mettre en scène avec conviction cette dérive humaine qui va conduire au drame et à la déchéance. Adultère, inceste, harcèlement, maltraitance... toutes les thématiques propres aux tragédies familiales seront exploitées. Avec plus ou moins d'envergure. Il faut cependant quand même reconnaître la force de certains passages. Parmi les moments marquants, je citerais notamment la scène finale du premier épisode, terriblement glaçante, qui est sans doute une des plus réussies de la mini-série. Prue, défigurée par son mari, y observe Gavin s'automutiler dans la pénombre, à la lueur d'une bougie. Au-delà du drame, c'est aussi l'ambiguïté de leurs rapports que le regard qu'elle lui jette transcrit parfaitement. Il est dommage que Bouquet of Barbed Wire ne soit parvenue que par brèves éclipses à cet indéfinissable équilibre.

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Car aussi ambitieuse qu'elle puisse être dans les thèmes traités, ce sont surtout ses problèmes de narration qui vont marquer et entraver la mini-série. Avoir réduit sur seulement 3 épisodes de 45 minutes, une histoire sans doute trop dense pour ce format, donne un résultat au fil narratif saccadé à l'excès, où c'est par sauts que l'intrigue progresse, sans donner la moindre impression d'homogénéité. Cela manque de cohésion et la force du récit en souffre considérablement, puisque la progression de l'histoire paraît trop souvent parachutée sans préavis. Plus qu'une simple maladresse d'écriture, on a comme le sentiment qu'il y a eu des coupes sombres dans le scénario.

Cette construction déséquilibrée empêche Bouquet of Barbed Wire de véritablement toucher le téléspectateur, alors même qu'elle met en scène une tragédie à l'issue fatale entre-aperçue dès la première scène qui s'ouvre sur un flashforward. Navigant entre un théâtralisme aux accents irréels et un drame humain dont la mini-série peine à véritablement imposer l'ambiance, c'est un peu de la même manière qu'avec les codes moraux qu'elle se joue de la logique des ficelles scénaristiques. Difficilement catégorisable, iconoclaste à l'excès, sans que tout cela soit forcément volontaire. 

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Sur la forme, il n'y a en revanche pas grand chose à redire. La réalisation est plutôt de bon standing, proposant quelques plans personnalisés assez inspirés. La musique, instrumentale, contribue à l'ambivalence de l'atmosphère mise en scène, accompagnant naturellement certaines scènes ou servant d'interludes. Elle se fond dans le décor narratif sans véritablement marquer.

Enfin, le casting souffre sans doute un peu de l'inconsistance du récit lui-même, les acteurs peinant à prendre la pleine mesure des ressentis insuffisamment approfondis de leurs personnages. On retrouve pourtant un certain nombre de têtes familières du petit écran britannique : Trevor Eve (Waking the Dead), Imogen Poot, Tom Riley (Lost in Austen), Hermione Norris (La Fureur dans le sang, Spooks (MI-5)), Jemima Rooper (Lost in Austen).

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Bilan : Donnant l'étrange impression de ne jamais véritablement démarrer ou de sauter des étapes du récit, Bouquet of Barbed Wire ne réussira pas à faire entrer le téléspectateur dans l'histoire qu'elle raconte. Certes, elle offrira bien quelques scènes de confrontations méritant clairement le détour dans cette autodrestruction familiale méthodique à laquelle on assiste. Cependant, ces quelques lignes de dialogues ciselés et piquants se noieront dans une masse mal maîtrisée, où le rythme saccadé ne fait que souligner un peu plus le manque de cohésion d'ensemble.

Je reste persuadée que la principale erreur est structurelle : ce fut celle de réduire la mini-série à seulement 3 épisodes, les évènements s'enchaînant trop vite, sans transition et sans qu'on puisse jamais en apprécier toute la portée. Il n'empêche que je serais curieuse de jeter un oeil sur la version de 1976 si j'en ai l'opportunité, ne serait-ce que pour constater les transformations du traitement de cette intrigue.


NOTE : 4,5/10


La bande-annonce de la mini-série :

26/12/2009

(UK) Spooks (MI-5) : series 8, episode 8 (Finale)

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Spooks termine sa huitième saison de la plus explosive et classique des manières, avec un épisode tendu et prenant qui laisse le téléspectateur en suspens, se clôturant sur un de ces cliffhangers insupportables dont la série a le secret.

L'épisode reprend où nous en étions restés précédemment : une tension extrême entre l'Inde et le Pakistan, deux puissances nucléaires sur le point de se déclarer la guerre, faisant peser sur le monde une menace que l'on n'avait plus ressentie de façon aussi aïgue depuis la fin de la guerre froide. Afin d'éviter l'escalade fatale, un sommet est organisé en Angleterre, sensé réunir les chefs des deux Etats potentiellement belligérants, le secrétaire d'Etat américain ainsi que des représentants du gouvernement britannique, dont le Home Secretary dont les relations personnelles pourraient être exploitées dans le cadre de ces négociations. Ces discussions font figure de dernière chance de solution pacifique, tandis que les premières frictions, pour le moment sans conséquence, ont lieu entre les deux flottes armées.

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Face à cette situation, le MI-5 s'efforce, plus isolé que jamais sur ses propres terres et en sous-effectif criant, de sauver ce qui peut encore l'être. Dans cette perspective, la question de la collaboration avec Andrew Lawrence, le nouveau Home Secretary, demeure centrale. S'il fait effectivement partie de la conspiration, sa mission sera bien évidemment de faire échouer cette rencontre et il deviendrait nécessaire de le court-circuiter avant qu'il n'entre en action. Mais si Harry respecte une traditionnelle ligne de conduite de méfiance, habituelle pour lui et souvent salvatrice, Ruth pointe avec justesse qu'ils ne peuvent étayer leurs soupçons. Si le MI-5 a déniché un certain nombre de coïncidences troublantes dans les activités du politicien, au cours des derniers mois, rien qui le désigne formellement comme un traître. Nightingale n'a-t-elle pas autant intérêt, si ce n'est plus, de se contenter de nourrir la suspicion ? Si bien que tandis que le Home Secretary passe, sans le savoir, tous les tests imaginés par le MI-5, Ros s'impose comme leur agent de liaison avec lui. Même en l'absence de certitude, Harry n'accorde pas le bénéfice du doute et garde ses distances.

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Cependant, si Nightingale dispose bien d'agents agissant dans les coulisses du sommet, c'est en priorité du côté américain qu'il faut chercher, cette saison 8 présentant décidément une CIA bien gangrénée. C'est en effet le responsable de l'agence en Europe qui coordonne l'opération, qu'une autre "ex-agent" de la CIA aide à mettre en place. En effet, Sarah est de retour en Angleterre, où elle a introduit une bombe sophistiquée que Nightingale entend utiliser dans un attentat qui servira de dernier catalyseur pour précipiter la guerre, et l'éventuel recours à des armes nucléaires. Les scénaristes ne rechignent pas à utiliser quelques facilités scénaristiques pour mettre le MI-5 sur la bonne voie. Mais si Sarah retombe un peu facilement dans les mains des services secrets britanniques (il faut dire qu'elle a reçu l'ordre de tuer Lucas, et n'y met pas beaucoup de bonne volonté), le téléspectateur a déjà compris que son personnage était en bout de parcours. J'avoue n'avoir jamais réussi à apprécier ce personnage unidimensionnel et fade, introduit cette saison ; ce qui fait que son assassinat prévisible m'a laissée profondément indifférente.

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Avant d'être éliminée, elle leur a cependant délivré quelques indices qui permettent au MI-5 d'identifier l'objectif immédiat de Nightingale : un attentat à la bombe dans un hôtel où se trouvent plusieurs officiels, dont Andrew Lawrence. Ces morts scelleraient la fin de tout espoir de trouver une solution pacifique au conflit. L'épisode s'accélère considérablement dans le final, faisant monter la tension autour de l'impossibilité de désamorcer les explosifs. Il va se conclure sur un cliffhanger classique pour Spooks : si Lucas peut sortir à temps, en portant le responsable pakistanais retrouvé dans une chambre, paralysé, Ros est restée avec Andrew Lawrence qui ne peut pas non plus bouger. Les soupçons du MI-5 l'auront peut-être conduit à moins protéger le Home Secretary et il est manifeste que Ros n'entend pas l'abandonner. La bombe explose et l'épisode se conclut sur cette image impressionnante d'hôtel en feu. Le MI-5 a-t-il perdu sa responsable des opérations ? Le téléspectateur peut commencer à prendre son mal en patience : réponse dans une dizaine de mois.

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Bilan : Un épisode qui regorge de tous les ingrédients classiques de Spooks, de la guerre nucléaire potentielle aux morts froidement abattus, en passant par des personnages encore une fois très éprouvés. C'est efficace et offre ainsi une explosion finale prenante pour une trame scénaristique qui n'aura pas rempli toutes les attentes du téléspectateur au cours de la saison. Rien à redire donc sur cette conclusion, qui nous laisse une fois encore dans l'attente et l'inquiétude : Ros a-t-elle survécu ?

NOTE : 9/10


Bilan global de la saison :

Après l'excellence de la saison 7, les scénaristes auront tenté avec moins de succès de reprendre la recette de l'année précédente. La faute à une intrigue fil rouge pas toujours maîtrisée, manquant singulièrement de subtilité et qui aura affaibli plus que renforcé certains épisodes. Cependant, Spooks reste solide et nous aura proposé une saison dans l'ensemble prenante, avec quelques épisodes magistralement mené, le septième étant sans doute mon préféré.

NOTE GLOBALE (de la saison) : 8,5/10