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23/09/2012

(Mini-série UK) The Bletchley Circle : la traque d'un serial killer par les femmes de Bletchley Park

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C'est peu dire que ces dernières semaines ont été très chargées en fictions sur ITV. Ce n'est pas moi qui m'en plaindrais, au vu des plusieurs mini-séries intéressantes qui ont été proposées, et étant donné en plus que, depuis dimanche dernier, la chaîne est redevenue celle qui abrite la série qui sait actuellement le plus faire vibrer mon coeur de téléphage, Downton Abbey (et son season premiere était très réussi). Septembre est une période faste sur la chaîne privée anglaise depuis quelques années.

La mini-série dont je vais vous parler aujourd'hui, The Bletchley Circle, a été diffusée sur ITV1 du 6 au 20 septembre 2012 (elle était programmée face à Good Cop sur BBC1). Écrite par Guy Burt, elle comporte en tout 3 épisodes de 45 minutes environ chacun, et j'en suis réduite à espérer qu'une suite soit commandée. Period drama d'enquête se déroulant dans les années 50, elle est aussi une fiction féministe, s'intéressant à ces femmes qui ont eu des responsabilités importantes durant la guerre et à qui on demande de reprendre le rôle effacé qui était le leur auparavant. Un sujet qui avait donc tout pour me plaire pour une fiction... qui m'a plu.

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A Bletchley Park, durant la Seconde Guerre Mondiale, les Anglais ont craqué quelques-uns des codes de cryptage allemands les plus complexes. Parmi son personnel, se trouvaient majoritairement des femmes qui contribuaient ainsi à l'effort de guerre influant sur le déroulement des hostilités : un code de craqué, cela pouvait être des renseignements inestimables sur les stratégies allemandes transmis aux hautes sphères militaires Alliées. C'est durant ces années que se sont connues Susan, Millie, Lucy et Jean, toutes quatre employées dans ce département et ayant juré le secret absolu. Au sortir de la guerre, chacune a repris le cours de sa vie, se perdant un peu de vue, tandis que certaines se mariaient et que d'autres décidaient de suivre leurs rêves de voyage.

En 1952, Susan, devenue mère de deux enfants, essaie avec difficulté de jouer les épouses de maison modèles, trompant comme elle peut l'ennui de son quotidien. Elle suit à la radio les informations au sujet d'un serial killer qui s'en prend à plusieurs jeunes femmes, dont une qu'elle avait connue. Essayant d'appliquer les méthodes qu'elle utilisait à Bletchley Park pour comprendre le mode d'agissement du tueur, elle initie sa propre enquête. Ne pouvant cependant y parvenir seule, elle recontacte ses trois amies. Ensemble, les quatre femmes vont tenter, avec leur expérience et leur savoir-faire particuliers, de résoudre ces affaires devant lesquelles la police semble démunie.

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The Bletchley Circle est un period drama d'enquête prenant et efficace, dont la spécificité et l'attrait principal reposent sur une dimension féministe qui va toucher le téléspectateur. En effet, en nous immergeant dans cette Angleterre du début des 50s', qui se ressent toujours des effets de la guerre, la mini-série éclaire à travers ses protagonistes la condition féminine de l'époque, et toutes les frustrations que suscitent les limites sociales reléguant les femmes en arrière-plan. Leurs situations ne sont pourtant pas toutes difficiles : Susan a un mari impliqué et prévoyant, mais il n'en attend pas moins d'elle qu'elle assume et reste cantonnée à son rôle de mère et de soutien pour son époux. Pour Lucy, son mari est autrement plus autoritaire, et ira même jusqu'à la battre en toute impunité. Seulement, par contraste, ces femmes ont aussi goûté aux responsabilités. Tous ces mois d'émulation où leurs actions avaient un sens, une importance particulière, ne peuvent être effacés et oubliés en tirant simplement un trait. La tension entre ce qu'elles se savent capables de faire, et le rôle effacé que la société veut leur faire jouer transparaît de façon constante tout au long du récit, et ne cesse d'interpeller.

La déchirure née de leur passage par Bletchley Park rend ces figures féminines instantanément attachantes : confrontées au vide laissé par le désoeuvrement -notamment intellectuel- dans lequel elles se retrouvent depuis la fin de la guerre, trop habituées à relever des challenges où le sort de personnes était en jeu, elles vont donc se lancer dans cette enquête sur l'impulsion de Susan, cherchant à déjouer les plans et à exposer un serial killer qui s'en prend à des jeunes femmes. Si le danger existe, et qu'à l'occasion la mini-série introduit une tension palpable, l'intérêt de l'histoire repose avant tout sur la dynamique de groupe qui s'installe, marquée par la solidarité qui unit ces personnalités à la fois très différentes et complémentaires. En appliquant leur expérience dans le décryptage pour comprendre le comportement du tueur, certaines de leurs méthodes peuvent sonner peu vraisemblables, mais l'ensemble demeure prenant. La mini-série trouve le juste équilibre entre la dimension humaine des enquêtrices en herbe et la progression de leur investigation. Si, de manière assez classique, la traque du tueur est plus palpitante que la chute la clôturant, le téléspectateur ressort satisfait par l'ensemble.

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La volonté de The Bletchley Circle de soigner son atmosphère 50s' se retrouve dans l'application portée à la forme. La réalisation transpose à l'écran un period drama à la reconstitution sobre, capturant bien la rigidité sociale de ce début des années 50 où l'après-guerre est encore perceptible. Bonus appréciable, la mini-série dispose d'un bref générique qui rappelle bien le temps de Bletchley Park et tout l'héritage que ces quatre femmes ont de cette période ; il s'accompagne d'un thème instrumental un peu tendu qui correspond parfaitement à la tonalité de la série, et à cette tension sourde qui va crescendo à mesure que l'enquête se transforme en traque.

Enfin, un des grands atouts de The Bletchley Circle réside dans un casting absolument impeccable qui délivre une excellente et homogène performance. Au premier rang, c'est Anna Maxwell Martin (North & South, Bleak House, South Riding) qui, comme toujours, sait habiter son personnage et retranscrire sa détermination, comme ses vulnérabilités, avec une subtilité et une intensité remarquables. A ses côtés, Rachael Stirling (Boy Meet Girl), Sophie Rundle (Great Expectations) et Julie Graham (Between the sheets, Survivors, Mobile) proposent également des interprétations de choix, faisant regretter que la mini-série n'ait pas le temps de pleinement explorer chacun de ses quatre personnages féminins principaux. Les hommes sont plus en retrait dans The Bletchley Circle, même s'ils apportent un pendant, teinté d'incompréhension mais non d'hostilité, qui équilibre opportunément le récit. On croise ainsi Mark Dexter (Crusoe), qui incarne le mari de Susan, Ed Birch, Michael Gould (Coup), Simon Willams ou encore Steven Robertson (Tess of the D'Ubervilles).

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Bilan : Récit d'une enquête privée conduite de façon efficace, nous plongeant de manière convaincante dans l'ambiance des 50s', The Bletchley Circle est une mini-série qui explore l'héritage et le savoir-faire acquis par les femmes de Bletchley Park appliqué à une traque criminelle. Reposant sur la dynamique de groupe se créant entre ses protagonistes principales, elle est une oeuvre marquée par son époque, mettant en relief, telle une déchirure, la frustration et les aspirations que ces femmes pouvaient ressentir, du fait du contraste entre le rôle attendu d'elles par la société et ce qu'elles sont capables d'apporter.

Une fiction donc intéressante sur plus d'un registre : à découvrir !


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la mini-série :

07/09/2012

(Mini-série UK) A Mother's Son : concevoir l'impensable pour une mère

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En ce début septembre, la rentrée télévisuelle bat son plein en Angleterre. Qu'il s'agisse de la BBC, d'ITV ou de Sky, l'amateur de séries britanniques n'a que l'embarras du choix (et manque de temps pour espérer tout suivre). A défaut de pouvoir être exhaustive, tâchons d'évoquer les fictions que j'ai eue l'occasion de regarder et qui ont retenu mon attention. Aujourd'hui, je veux revenir sur une mini-série d'ITV : A mother's son.

Créée par Chris Lang, comportant en tout 2 parties de 45 minutes chacune, elle a été diffusée dans le courant de la semaine qui s'achève, les lundi et mardi soirs ; le deuxième épisode battant même son concurrent direct sur BBC1, l'épisode 4 de la saison 2 d'Accused. A mother's son rassemblait une histoire et un casting qui avaient éveillé mon intérêt, et je n'ai pas été déçue.

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A mother's son s'ouvre sur un drame qui vient troubler le calme d'une petite ville du bord de mer anglais : une adolescente est retrouvée morte, le cadavre abandonné par son meurtrier dans la campagne environnante. Ce fait divers secoue toute la communauté, tandis que l'enquête policière avance difficilement, les officiers ayant peu d'indices à exploiter. C'est dans ce contexte pesant que la mini-série va s'intéresser plus particulièrement au quotidien d'une famille habitant dans la bourgade.

Rosie Haleton s'est récemment remariée, et s'efforce de construire une vie familiale épanouie au sein d'une cellule recomposée, avec quatre adolescents aux relations forcément compliquées. Si elle rencontre des difficultés d'autorité avec son beau-fils, c'est son fils, Jamie, qui suscite son inquiétude. Une série de petits détails sur le soir où le crime a eu lieu suscite une suspicion face à laquelle elle ne sait comme réagir. Lorsqu'elle met la main sur une paire de baskets apparemment ensanglantés, son imagination s'emballe : Jamie peut-il être mêlé, d'une façon ou d'une autre, à ce meurtre ? Aussi inconcevables que puissent être instinctivement ces suspicions pour une mère vis-à-vis de son enfant, Rosie essaie d'être rationnelle et objective. Tout en tentant de reconstituer l'emploi du temps de son fils, elle est consciente que, si elle fait une erreur, leur relation pourrait être irrémédiablement détruite.

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A mother's son, c'est tout d'abord un sujet fort, ambitieux, qui interpelle a priori. Il s'agit de voir comment une mère peut se résoudre à envisager l'impensable, à concevoir l'idée que son enfant, à qui elle a donné naissance et qu'elle a élevé, ait pu ôter la vie à quelqu'un. Un tel concept a le potentiel de vous prendre aux tripes et le dilemme ainsi posé ne peut laisser indifférent. Il y a deux versants dans les réactions mises en scène : d'une part, il faut faire face au déchirement que représente le fait qu'un être aimé commette un tel geste si condamnable, d'autre part, Rosie est amenée à s'interroger sur ses propres responsabilités : qu'a-t-elle fait, qu'aurait-elle pu faire, pour empêcher un tel acte, si son fils est effectivement lié au crime, voire s'il est le meurtrier ? Naviguant entre ces thèmes, le récit a le mérite de toujours conserver une relative incertitude, permettant de prendre la mesure du poids qui pèse sur cette mère et de tous ces éléments contradictoires qui l'assaillent. La conscience et la raison de Rosie semblent lutter en duel avec ce que son coeur souhaiterait lui dicter.

La tension est, tout au long de l'histoire, uniquement psychologique. Le soupçon fait son oeuvre, creuse des méfiances, aiguise des inquiétudes autour de points qui pourraient être de simples détails. C'est avant tout la stabilité familiale qui menace d'exploser. Suivant une narration linéaire, mais très bien menée, A mother's son est prenante de bout en bout. Après un premier épisode, très introspectif, où la solitude domine et où les silences et les actes cachés parlent plus que les mots, le second est celui des oppositions de vues entre adultes, parents et beau-parent ayant chacun leur perspective personnelle sur la situation. C'est très efficace. Il manque seulement à la série l'intensité de l'ultime confrontation, celle vers laquelle tend toute l'histoire. Cette dernière est certes correctement mise en scène, mais après toutes ces émotions contradictoires par lesquelles le téléspectateur est passé, sans doute attendait-il plus du parachèvement de toute cette construction pleine de tension. La sobriété finale aura au moins le mérite de sonner authentique : la retenue étant ici préférable aux excès.

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Sur la forme, A mother's son est un drama très soigné. La photographie y est froide, en parfait accord avec le ton d'ensemble. Y dominent des teintes où le gris est de circonstance (surtout pour les scènes en extérieur) : cela conforte l'ambiance inquiète et pourtant dans un cadre si ordinaire, tournant autour d'une sourde paranoïa, que cultive la mini-série. Pour accompagner ce visuel, la bande-son, fournie en instrumentaux musicaux, parachève très bien cette atmosphère.

Enfin, dernier argument - et non des moindres - pour vous convaincre de vous installer devant A mother's son : le casting délivre de superbes performances, renforçant la portée du scénario par l'intensité de leurs interprétations. C'est Hermione Norris (Wire in the blood, Spooks) qui est logiquement la plus sollicitée, en mère placée devant des responsabilités inconcevables : elle est plus qu'à la hauteur de ce rôle complexe, entre raison et émotion. A ses côtés, Martin Clunes (Doc Martin) incarne son mari - il est parfait pour nous faire partager les dilemmes de ce beau-père dont les loyautés s'entrecroisent. Alexander Arnold (Skins) joue avec ambiguïté ce fils dont on ne sait trop quoi penser, tandis que Paul McGann (Collision, Luther) est son père. Enfin, à noter la présence de Nicola Walker (Spooks) dans le rôle de l'officier de police en charge de l'investigation (ça fait toujours plaisir de la retrouver).

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Bilan : Thriller psychologique au sujet très difficile, A mother's son marque par l'histoire poignante proposée, obligeant une mère à concevoir l'impensable : considérer que son enfant peut être mêlé à ou avoir commis un crime. Dans l'ensemble, le récit, sans atteindre toute l'intensité que l'on perçoit en potentiel, est rondement mené, très efficace pour retranscrire la tension naissante. Parfaitement servie par un casting convaincant qui a pris la mesure du scénario, A mother's son mérite une découverte.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la mini-série :

08/07/2012

(Mini-série UK) True Love : une suite d'instantanés amoureux doux-amers

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Fin juin, Dominic Savage s'est essayé à un exercice assez particulier sur BBC1. La chaîne a en effet proposé une mini-série, au format relativement court (cinq épisodes de moins d'une demi-heure), qui avait la particularité d'être semi-improvisée et d'adopter une format quasi-anthologique pour relater cinq histoires distinctes. La brièveté des développements rapproche l'ensemble du court métrage. Personnellement, cette ambiance m'a aussi beaucoup rappelé des séries japonaises au principe de départ assez proche, notamment certains ketai dramas (séries pour téléphone) comme Sweet Room par exemple que j'avais visionné en janvier dernier. Si la prise de risque était réelle et les moyens réunis avec un casting impressionant, le résultat a cependant été plus mitigé. Le public anglais lui-même n'a pas été convaincu : diffusée du 17 au 20 juin 2012, la mini-série n'a cessé de perdre des téléspectateurs, s'ouvrant avec 3,11 millions pour se conclure avec 1,49 millions.

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Se déroulant dans une bourgade du bord de mer, à Margate, True Love raconte en tout cinq histoires d'amour, caractérisées par les doutes et les remises en question qui les accompagnent, indépendantes entre elles, si ce n'est, exceptionnellement, par des personnages qui s'entre-croisent dans certaines épisodes. Sont mises en scène des situations très diverses. Le premier épisode explore l'impact du retour d'un premier amour sur un mariage jusqu'alors heureux. Le second parle de coup de foudre, peu importe les engagements que l'on a. Le troisième est celui d'une enseignante qui se cherche, et tombe amoureuse d'une élève. Le quatrième parle d'infidélité et d'un couple qui s'éloigne jusqu'à devenir étrangers. Enfin, le cinquième est celui d'une tentative de reconstruction d'un père de famille, alors même que la meilleure amie de sa fille commence à éprouver des sentiments pour lui.

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True Love aurait sans doute mérité un titre plus nuancé, moins affirmatif, qui aurait reflété les doutes qu'elle va surtout s'attacher à souligner tout au long de ses récits. Car elle propose autant d'histoires compliquées que d'épisodes : il s'agit d'instantanés fugaces de relations troublées, qui tendent plus vers un tragique potentiel pour ce "true love", que vers un bonheur simple et apaisé. A ce jeu souvent versatile des sentiments, se mêlent des questions de responsabilité et d'engagements préalables. Le principal attrait de la mini-série - mais aussi, peut-être, une de ses limites - tient au fait que les dialogues soient laissés à la semi-improvisation des acteurs. L'objectif est d'offrir un traitement naturel, avec une touche plus personnelle que l'on doit à la libre appréciation du casting. Cette idée, louable sur le papier, fonctionne d'ailleurs par intermittence : avec ses silences, ses regards échangés plus parlants que bien des mots et ses hésitations, True Love a quelques moments de grâce, délivrant plusieurs scènes à la sincérité aussi troublante que poignante.

Mais le format court - moins d'une demi-heure - conjugué à l'ambition narrative que présentent certains récits trop complexes, voire caricaturaux, et sources de bouleversements nombreux, pèse sur la démarche. Ne permettant qu'insuffisamment d'approfondir chaque personnage, cela donne souvent l'impression désagréable de survoler de manière superficielle, au pas de course, une histoire qui, parfois, s'éteint aussi vite qu'elle est née ou se forge une solidité surprenante après seulement quelques moments partagés. Plus problématique que le relatif manque de crédibilité de certains récits - les épisodes sont sur ce point inégaux -, la mise en scène accélérée empêche de véritablement s'attacher aux personnages. Conséquence inévitable, c'est l'empathie qui devrait émaner de l'ensemble qui en souffre. Finalement, à la place de l'authenticité voulue l'emporte une artificialité un peu pesante, et le sentiment d'un potentiel inexploité, inachevé...

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Pour accompagner ces tableaux amoureux, face à un fond aussi minimaliste, c'est la forme qui prend le dessus, plus particulièrement par le biais d'une bande-son très présente, qui souligne et expose encore plus formellement les différentes étapes des relations suivies. Ces excès musicaux - "clipesques" - accentuent l'impression d'un récit condensé à l'essentiel qui mise sur un ressenti plus que le contenu d'une histoire. Il manque le juste dosage, une certaine subtilité... Mais pour peu qu'on apprécie le genre, le choix des chansons n'est pas désagréable - une certaine mélancolie émane de l'ensemble, à l'image de la seule chanson qui retentit dans les 5 épisodes (cf. 2e vidéo ci-dessous). Reste que tout cela contribue à ralentir un peu plus un rythme narratif déjà lent. Parallèlement, il faut reconnaître que la réalisation propose une belle photographie. True Love met en avant son cadre du bord de mer, en offrant quelques superbes vues du large, la plage restant un lieu de rendez-vous incontournable.

Enfin, la mini-série rassemble un casting impressionnant. C'est sans doute là un argument qui pourrait convaincre plus d'un téléspectateur d'y jeter un oeil, en dépit des faiblesses rencontrées sur le fond. La plupart des acteurs n'apparaissent que le temps d'un épisode (sauf exception), et vont donc faire parler leur instinct/expérience pour mettre en scène ces histoires qui laissent une place à l'improvisation. Si certains se heurtent à des récits non adaptés au format court, dans l'ensemble, True Love permet quand même d'apprécier d'intéressantes prestations. On y croise, en figures centrales successives, David Tennant (épisode 1 - Blackpool, Doctor Who), Ashley Walters (épisode 2 - Top Boy), Billie Piper (épisode 3 - Doctor Who, Secret Diary of a call girl), Jane Horrocks (épisode 4 - Absolutely Fabulous) et David Morrissey (épisode 5 - State of play, Blackpool). A leurs côtés, on retrouve aussi Vicky McClure (épisode 1 - actuellement dans Line of Duty), Charlie Creed-Miles (épisodes 3/4 - Injustice), Jo Woodcock (épisodes 1, 3 et 5 - Collision, Land Girls), Alexander Siddig (épisode 4 - Star Trek - Deep Space Nine), Kaya Scodelario (épisode 3 et 5 - Skins), Jaime Winstone (épisode 2 - Dead Set), Joanne Froggatt (épisode 1 - Downton Abbey), Lacey Turner (épisode 1 et 2 - Bedlam) ou encore Genevieve Barr (épisode 4 - The Silence). Autant dire que cela fait un sacré casting réuni devant la caméra ; cela laisse quelques regrets que le résultat ne soit pas à la hauteur des ambitions.

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Bilan : Mini-série contemplative aux histoires d'amour douces-amères, True Love restera un essai de semi-improvisation intriguant, qui nous aura réservé quelques scènes émotionelles d'une rare justesse qu'il faut saluer, mais dont les ambitions narratives n'étaient sans doute pas adaptées au format choisi. Son fond minimaliste a été inégal et a toujours tâtonné difficilement pour trouver le juste dosage afin de relater des histoires à la fois crédibles et touchantes. A côté des performances d'acteurs, on retiendra de True Love aussi sa forme, notamment ses chansons, trop présentes mais entêtantes.

En résumé, une série pas déplaisante à suivre mais inachevée et vite oubliée.


NOTE : 6,25/10


La bande-annonce :

La chanson que l'on entend dans chacun des cinq épisodes :

25/02/2012

(Mini-série UK) Inside Men : trois individualités, un braquage

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En février, sur My Télé is Rich!, j'ai beaucoup parlé de télévision scandinave - un de ces cycles de téléphage monomaniaque -, au point de ne pas avoir encore consacré un seul billet au petit écran anglais. Il est grand temps d'y remédier, d'autant que ce début 2012 aura vu des fictions très intéressantes outre Manche. 

La belle surprise sera indéniablement venue de Call the Midwife, une série dont j'ai déjà eu l'occasion de vous parler et dont les scores d'audience (une moyenne de 8,7 millions de téléspectateurs) l'auront imposée comme le plus grand succès de ces dix dernières années (!) pour la BBC. Je n'aurais sans doute pas le temps de faire un bilan de cette première saison ; sachez donc qu'il s'agit d'un de ces period drama émotionnels et justes qui fait chaud au coeur, et que je conseille fortement ! Toujours pour les amateurs de séries historiques, notez aussi que Upstairs, Downstairs a repris dimanche dernier, pour une saison 2 que l'on espère plus maîtrisée et devant laquelle je me suis installée avec curiosité.

Parallèlement, du côté des fictions contemporaines, le bilan est un peu plus mitigé. J'émettrais des réserves à l'encontre de Prisoner's Wives qui ne m'a pas convaincue : toutes ces personnalités fortes n'auront jamais réussi à dépasser l'impression d'artificialité que j'ai éprouvée devant les trois premiers épisodes. Finalement, c'est dans le registre du thriller que BBC1 se sera démarquée, avec une mini-série composée de 4 épisodes, d'une heure chacun, diffusée du 2 au 23 février 2012 : Inside Men. Créée par Tony Basgallop, cette fiction se sera révélée très prenante et intrigante, mêlant introspection et suspense pour un cocktail détonnant.

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Inside Men entreprend de nous relater le braquage d'un centre de dépôt et de traitement de fonds. Le premier épisode s'ouvre sur l'attaque à main armée en elle-même, pour ensuite, remonter aux origines de cette idée et à la planification minutieuse qui l'a précédée. Au-delà du but poursuivi, la mini-série s'intéresse surtout aux motivations et aux préoccupations de ceux qui ont imaginé et mis cette opération en place. Car, comme le titre l'indique, la particularité de ce braquage tient au fait qu'il est commis, avec une aide extérieure, par des employés du centre, des hommes de l'intérieur sans qui rien n'aurait été possible.

Ce basculement de l'autre côté de la loi réunit, autour de ce projet, trois personnes qui n'avaient a priori rien en commun, ni vraiment de prédispositions pour organiser une telle opération. On y trouve un des responsables managers du site, connu pour son comportement rigide et effacé ; un garde de la sécurité, avec son lot de soucis familiaux ; et un agent chargé de transférer les caisses de fond, pas forcément très ambitieux et plutôt adepte des petites combines. Inside Men nous retrace une année d'hésitations et de choix, de l'idée de départ aux semaines qui suivront le braquage, pour tenter de nous expliquer tous les ressorts de l'évènement et les dérapages qui vont avoir lieu.

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La réussite de Inside Men tient qu'elle dépasse rapidement la simple série sur une attaque à main armée, pour proposer un récit centré sur ses personnages, et les choix qu'ils vont être amenés à faire. Elle se démarque donc par sa dimension humaine : chacun bénéficie d'une caractérisation travaillée, avec ses ambivalences et ses failles. Dès le départ, l'alliance de circonstances entre les trois hommes apparaît très fragile, les causes de défiance ne manquent pas. Les relations entre les futures complices ont cette volatilité extrême qui sied aux rapports humains et crédibilise l'ensemble.

La préparation du braquage se révèle être un travail de longue haleine. Or, à mesure que l'échéance se rapproche, que le plan se concrétise, chacun voit ses doutes ou ses certitudes se renforcer, et c'est l'occasion finalement d'en apprendre plus sur lui-même que ce qu'il aurait pu imaginer. Dans le souci qu'ont certains de s'affirmer, de rompre cet anonymat anecdotique qui les étouffe, dans la volonté qu'ont d'autres de s'installer et au contraire d'embrasser une normalité bienvenue, sont ainsi dépeints des portraits très humains de personnages proches, auprès desquels le téléspectateur a envie de s'impliquer.

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Si la priorité est donc donnée à l'humain sur l'opération en cours, Inside Men obéit cependant à tous les codes classiques - et efficaces - du thriller. La narration, solide, distille un suspense supplémentaire grâce aux mélanges des lignes temporelles, nous faisant d'abord vivre le braquage - et ses dérapages - pour ensuite repartir en arrière et expliquer ce qu'il s'est passé pour en arriver là. Le tableau d'ensemble se dévoile peu à peu, à mesure que l'on comprend les personnages et leurs motivations. Les loyautés changeantes des trois hommes restent toujours au coeur du récit, demeurant le fil rouge constant autour duquel la planification de l'opération se greffe.

Construite suivant un compte à rebours qui nous mène inéxorablement au jour du braquage, la mini-série rend vraiment palpable l'escalade des tensions. La gestion de l'après permettra de préciser le propos principal de la fiction : si la dernière scène peut dérouter, tant le choix de John semble a priori illogique après tout ce qui a été fait, elle s'inscrit pourtant parfaitement dans la logique d'une oeuvre qui n'était pas tant consacrée à un braquage, qu'à une véritable introspection personnelle où chacun aura beaucoup appris sur ses priorités et ses limites.

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Sur la forme, Inside Men se révèle très soignée. Son esthétique travaillée, comme son alternance de plans larges et serrés, correspondent aux standards visuels de qualité auxquels BBC1 a habitué ses téléspectateurs. A noter que les scènes plus nerveuses sont également bien réussies, capturant parfaitement l'ambiance qui règne notamment lors du déroulement du braquage : sans trop en faire, la caméra sait mettre en scène les explosions et excès de violence les plus marquants.

Enfin, la mini-série repose sur les épaules d'une galerie d'acteurs qui constituent des valeurs sûres du petit écran britannique, et qui sont - sans surprise - tous à la hauteur. Steven Mackintosh (Criminal Justice, Luther, The Jury II) retranscrit admirablement la dualité de son personnage, de patron effacé et passif, il s'affirme, dérivant progressivement en plannificateur impitoyable du braquage. J'ai aussi beaucoup aimé Ashley Walter (Five Days, Outcasts, Top Boy) et Warren Brown (Luther, Single Father), fidèles à eux-mêmes, avec un jeu tout en sobriété pour nous montrer les doutes et évolutions de leurs personnages. A leurs côtés, on retrouve aussi Kiertson Wareing (The Shadow Line, Top Boy), Paul Popplewell, Nicola Walker (Spooks ; c'est toujours un plaisir de la croiser), Hannah Merry, Ruth Gemmel, Tom Mannion, Rebekah Staton, Leila Mimmack, Irfan Hussein et Gregg Chillin (Kidnap and Ransom).

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Bilan : Construite comme un thriller tournant entièrement autour de la réalisation d'un braquage, Inside Men est une mini-série à suspense, très prenante et sans temps mort, qui sait utiliser à propos flashforward et flashback pour créer et cultiver une tension permanente. Cependant sa valeur ajoutée à ce sujet assez classique réside avant tout dans le soin apporté à sa dimension humaine, la mini-série proposant une très intéressante caractérisation des personnages, de leurs relations et (surtout) de leurs ambivalences. A découvrir.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série : 

21/01/2012

(Mini-série UK) The Mystery of Edwin Drood : un period drama sombre et troublant

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Il y a deux siècles naissait Charles Dickens. Pour cet anniversaire, il est donc logique de voir fleurir sur le petit écran des adaptations d'oeuvres du célèbre écrivain anglais. Après une revisitation de Great Expectations (Les Grandes Espérances) sur BBC1 durant la dernièrie semaine de décembre, en ce début de mois de janvier, c'était au tour de BBC2 de proposer sa contribution, avec une transposition à l'écran du dernier livre, laissé inachevé par l'auteur, The Mystery of Edwin Drood.

Comportant deux parties d'une heure environ, cette mini-série a été diffusée sur BBC2 les 10 et 11 janvier dernier. Scénarisée jusqu'à sa fin par Gwyneth Hughes, et avec une réalisation de Diarmuid Lawrence, elle rassemblait également un casting qui méritait le détour (Matthew Rhys, Rory Kinnear, Alun Armstrong...). Au croisement du period drama et du thriller, elle s'est révélée au final intéressante à suivre.

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John Jasper dirige les choeurs de la cathédrale de Cloisterham. Derrière une apparence lisse et respectable, se cache un homme bien plus tourmenté qui apaise son mal être dans l'opium. Il est le gardien légal de son jeune neveu, qui arrive à l'âge adulte, Edwin Drood. Si ce dernier voit en lui une figure paternelle en qui il peut avoir toute confiance, Jasper nourrit dans le même temps de très forts sentiments pour Rosa Bud, qui est promise à Edwin.

Cependant les deux fiancés se querellent régulièrement lors des visites d'Edwin, Rosa doutant de la nature de ses sentiments. Mais elle craint encore plus les attentions de Jasper qui lui donne des leçons de chants. L'arrivée en ville, en provenance des colonies, de Neville et Helena Landless, deux jumeaux orphelins au caractère trempé et qui n'hésitent pas à exprimer leurs vues et à bousculer certains conventions sociales, va exacerber les tensions et les passions autour de la belle Rosa.

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The Mystery of Edwin Drood va pleinement tirer parti de la dimension très sombre de son histoire pour se construire une atmosphère intrigante qui retient l'attention. Dans le registre du period drama, elle propose une reconstitution historique qui repose entièrement sur ses personnages. Ces derniers représentent, chacun à leur manière, des valeurs ou des préjugés de cette Angleterre du XIXe siècle, permettant de traiter des thématiques diverses, sociales mais aussi raciales, en proposant toute une palette de points de vue. Si la mini-série se contente de survoler, parfois de manière un peu frustrante car trop superficielle, cet intéressant potentiel, cela lui permet cependant d'humaniser son récit, et d'impliquer le téléspectateur dans la destinée de chacun de ces protagonistes.

De plus, The Mystery of Edwin Drood captive aussi par le parfum inquiétant qui en émane. Efficacement construite en deux parties, la première étant celle de l'exposition, la seconde celle du mystère à résoudre, l'oeuvre emprunte au thriller ses ingrédients les plus traditionnels. Si c'est la disparition d'Edwin qui précipite les évènements, la figure centrale demeurera toujours celle de Jasper. C'est à travers lui que le récit se trouble, empruntant des chemins maladifs et malsains. Entre la mise en scène d'hallucinations suscitées par la drogue et les non-dits d'une obsession amoureuse frustrée, le téléspectateur peine à dissocier le fantasme de la réalité. C'est à l'évidence le but recherché de ce récit qui ne se concentre pas tant sur le suspense d'un éventuel coupable à trouver, que sur la résolution de cette énigme tourmentée incarnée par Jasper. Si la résolution ne tiendra pas toutes les promesses esquissées, elle reste cependant une fin logique et justifiée.

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La tonalité quelque peu oppressante que sait très bien entretenir The Mystery of Edwin Drood se retrouve également dans l'esthétique de la mini-série. Si sa réalisation fait d'elle un period drama soigné mais classique, c'est dans sa photographie, à dominante sombre, et dans l'ambiance globale qui se dégage de ses plans que se situe sa valeur ajoutée. Elle aime ainsi jouer avec l'esprit du téléspectateur lorsqu'elle nous fait glisser - parfois de manière un peu confuse - dans les troubles de Jasper, ou lorsqu'elle nous entraîne dans les coins obscurs des cimetières... Dans l'ensemble, c'est une immersion efficace qui est proposée dans l'Angleterre du XIXe siècle.

Enfin, le dernier atout de choix de The Mystery of Edwin Drood réside incontestablement dans l'excellent casting qu'elle rassemble. Matthew Rhys (je vous avoue qu'avec Brothers & Sisters, j'en avais oublié que l'acteur était gallois) délivre une prestation torturée et ambivalente qui capture bien les tourments intérieurs de Jasper, et son obsession pour Rosa. Tamzin Merchant (The Tudors) et Freddie Fox (The Shadow Line) versent dans une luminosité qui offre un parfait contraste par rapport à l'obscurité de Jasper. A leurs côtés, des valeurs sûres du petit écran britannique, comme Alun Armstrong (Garrow's Law) ou encore Rory Kinnear (Five Days, Black Mirror) assurent de solides seconds rôles ; et Sacha Dhawan (Five Days, The Deep, Outsourced) et Amber Rose Revah (Borgia) complètent cette galerie de personnages au coeur du mystère de la disparition d'Edwin.

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Bilan : Period drama qui marque le téléspectateur par sa dimension très sombre, aussi bien dans les thématiques abordées (drogue, obsession) que dans l'histoire mise en scène, The Mystery of Edwin Drood est une fiction historique typiquement Dickensienne qui emprunte également au thriller. Sa galerie de personnages humanise et contrebalance la noirceur d'un récit qui s'égare parfois un peu dans les tourments de sa figure principale. L'ensemble demeure intéressant et mérite ces deux petites heures d'investissement.


NOTE : 7/10