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23/05/2012

(J-Drama) Chase : entre thriller financier et drames humains

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Restons au Japon en ce mercredi asiatique. Je continue de finir les dramas que j'avais en cours depuis le début de l'année, histoire - pour une fois - de prendre le temps de rédiger un bilan pour chacun. Et puis, je me suis aussi replongée dans un drama coup de coeur que j'avais déjà vu, histoire de cette fois-ci écrire cette review que j'ai trop longtemps remise au lendemain (et en lien direct avec l'actualité sud-coréenne de cette fin du mois - je vous laisse deviner de quelle série il s'agit). En attendant, le drama du jour est tout autre ; un mélange des genres intriguant qui m'avait été conseillé par Lynda.

Chase a été diffusé sur NHK du 17 avril au 22 mai 2010, dans la case horaire du samedi soir. Scénarisé par Sakamoto Yuji (à qui l'on doit notamment le marquant Mother), il compte 6 épisodes de 55 minutes environ. Si j'ai eu du mal à écrire ce billet, c'est que j'ai rarement croisé une série dont la lecture de son synopsis laissait si peu entrevoir l'orientation à venir de la fiction. Ayant a priori imaginé une sorte de procedural classique, je me suis retrouvée face à un cocktail feuilletonnant, oscillant entre vengeance, drame personnel et thriller financier.

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Haruma Sosuke est inspecteur des impôts à Tokyo. Zélé et appliqué, il traque les fraudes fiscales, se consacrant corps et âme à son travail. Il est donc souvent absent d'un domicile familial où il néglige son épouse et sa fille adolescente, rentrant tard le soir et prenant rarement du temps pour passer un moment avec elles. Si sa femme ne se plaint pas, sa fille est en revanche plus entreprenante. Elle le convainc de planifier un voyage en couple, espérant permettre à ses parents de se retrouver. Mais du travail surgit au dernier moment, Sosuke ne peut partir ; sa femme décide malgré tout de prendre l'avion prévu. Malheureusement ce dernier s'écrase sans survivant.

Sosuke est anéanti par ce décès ; sa fille le considère en plus responsable. Mais en se replongeant dans ses enquêtes en cours, Sosuke découvre que l'avion avait peut-être été utilisé dans un stratagème permettant une évasion fiscale. Il discerne derrière la main de quelqu'un de suffisamment expert en finances pour orchestrer des fraudes à grande échelle. Par déduction, il vient en effet de déduire le rôle joué par un mystérieux homme d'affaires, Murakumo Shuji. Une confrontation à distance se construit peu à peu au fil du récit, tandis que Shuji entreprend la mise en place d'un plan bien particulier, aux motivations très troubles : quelles blessures se cachent derrière cette froideur apparente ?

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L'intérêt de Chase repose sur le mélange des genres très riche qu'il propose. On assiste à une constante mutation du drama tout au long de ses six épisodes ; et cette durée brève permet à l'histoire d'être concentrée et de se dérouler sans temps mort. La série débute par un premier épisode d'exposition, où le procédural - la particularité étant ici qu'il s'agit d'un inspecteur des impôts, non de la police - se mêle au thriller financier, nous introduisant dans le jargon et les montages complexes qui vont asseoir son propos. Cependant l'écriture feuilletonnante nous entraîne rapidement dans une dimension plus humaine et dramatique, reléguant les chiffres en arrière-plan. L'histoire relatée est en réalité celle de destins qui s'entre-choquent, avec des personnages liés par les circonstances. L'enjeu dépasse la simple volonté d'arrêter l'organisateur des fraudes : le drama se mue en une sorte de quête de rédemption, pour chacun de ces protagonistes qui se perdent et se cherchent sous nos yeux. Cet aspect, plus personnel et assez tragique, est certainement ce qui est le mieux réussi.

Malheureusement, Chase est aussi un drama qui ne va jamais réussir à dépasser une dualité inégale inhérente à son scénario. La série a en effet des ambitions, mais pas toujours les moyens pour les porter à l'écran de manière homogène. Sa faiblesse tient ici principalement à son volet thriller : les machinations financières, exposées de manière trop didactiques, peinent à générer une véritable tension (on est loin par exemple des jeux de bourse de Story of a man). Le récit manque de souffle, et l'ensemble est trop figé pour réussir à susciter un vrai suspense. Cela explique l'impression que le drama tend parfois à trop se disperser entre les genres, avec une écriture manquant de liant. Pour autant, l'évolution des enjeux au fil des épisodes apporte une profondeur et une intensité émotionnelles qui vont faire sa force. C'est par ces tragédies que Chase saura toucher le téléspectateur. La série gagne alors en complexité à mesure que les personnages se dévoilent, devenant alors beaucoup plus intéressante même si certaines maladresses demeurent.

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Sur la forme, Chase propose une réalisation classique, sans prise de risque, ni initiative notable. La seule spécificité de ce drama tient à sa bande-son, qui adopte une tonalité jazzy, déchirante à l'occasion, qui constitue ce que je qualifierais de "touche expérimentale" de la série. Si l'essai est à noter, j'avoue que j'ai été peu convaincue : même si parfois, on pourrait presque croire que la série souhaiterait exhumer une atmosphère de vieux polar, l'OST échoue à construire une ambiance, restant en décalage par rapport aux attentes et au ton du récit.

Enfin, Chase bénéfice d'un casting correct. Si Eguchi Yosuke campe efficacement cet inspecteur des impôts qui se bat du bon côté de la loi et tente de faire son deuil de son épouse, celui qui s'impose véritablement à l'écran est ARATA, sans doute parce que le rôle de ce dernier permet un jeu tout en ambivalence où il peut vraiment s'exprimer. C'est un acteur que je ne connaissais pas, mais il va bien prendre la mesure de la dimension torturée qui anime ce mystérieux financier de l'ombre qui se dévoile peu à peu sous nos yeux : ma révélation personnelle côté acteurs dans ce drama. A leurs côtés, on retrouve notamment Aso Kumiko, Mikura Tae, Saito Takumi, Nakamura Kazuo, Masuoka Toru, Okuda Eiji, Hirata Mitsuru ou encore Sato Jiro.

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Bilan : Intéressant par la richesse de ses thèmes,Chase est un drama qui ne va jamais réussir à dépasser une dualité structurelle handicapante. Peu convaincant dans le registre du thriller à suspense, il s'affirme immédiatement dès qu'il bascule dans l'intime de ses personnages et met en scène des storylines plus personnelles. Dans le registre dramatique, lorsqu'il s'agit de capturer des états d'âme, on perçoit le savoir-faire du scénariste. Mais au final, même si le drama expérimente des idées intéressantes, on reste sur sa faim devant cet ensemble certes ambitieux, mais trop dispersé et inégal, alors même que son sujet laissait entrevoir un potentiel certain qui ne demandait qu'à être exploité. 


NOTE : 6,5/10

15/02/2012

(J-Drama / Pilote) Seinaru Kaibutsutachi : entre drama médical et thriller ambivalent

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Après trois semaines passées à s'intéresser à la saison actuelle en Corée du Sud, il est temps de repartir pour le Japon en ce mercredi asiatique. Je dois dire que cet hiver 2012 n'offre pas la programmation la plus enthousiasmante qui soit. A priori, peu de projets avaient retenu mon attention à la seule lecture des pitchs. Certains ne sont pas déplaisants, à l'image du pilote de Hungry, mais au-delà du concept de restaurant français, l'histoire est trop classique pour me convaincre de poursuivre plus avant. S'il faudra que je jette un oeil sur la comédie 13 say no hello work, je mise beaucoup sur Shokuzai, dont j'aurais sans doute l'occasion de vous parler la semaine prochaine. En attendant, je me suis permise une expérimentation, en tentant Seinaru Kaibutsutachi.

Il s'agit d'une expérience car, vous le savez,  je suis assez peu portée sur les séries médicales. Occidental ou asiatique, c'est un sujet que j'ai plutôt tendance à éviter. Mais ce drama semblait cependant avoir plus à offrir, avec un fil rouge assez sombre et quelques accents de thriller, qui ont aiguisé ma curiosité. Diffusé le jeudi soir sur TV Asahi depuis le mois de janvier 2012, Seinaru Kaibutsutachi est l'adaptation d'un roman de Len Kawahara. J'avoue rester pour le moment plutôt mitigée, mais j'ai quand même regardé sans trop de difficulté les trois premiers épisodes de la série.

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Seinaru Kaibutsutachi débute par le flashforward d'une tragédie se déroulant durant une nuit pluvieuse. Une jeune femme enceinte est laissée devant l'hôpital Okubo. Les médecins, parmi eux Shiba Kengo, interviennent rapidement, mais si l'enfant peut être sauvé, la mère s'enfonce inéxorablement. La voix off de Shiba Kengo nous explique alors que les évènements de ce soir-là ne doivent rien au hasard, et qu'ils font partie d'un plan... Le jeune chirurgien va alors nous ramèner un an plus tôt, pour nous expliquer les circonstances qui ont conduit à cette nuit-là.

A l'époque, il est un interne prometteur dans un hôpital universitaire prestigieux. Mais trop droit et n'arrivant pas à se faire une place dans ce milieu ambitieux et concurrentiel, il est "exilé" dans un hôpital excentré, celui d'Okubo, qui doit alors faire face à d'importantes difficultés financières. S'il y découvre un supérieur tyrannique, c'est l'infirmière en chef, Kasugai Yuka, qui retient son attention. La jeune femme, sur laquelle on sait très peu de choses à l'hôpital, fait preuve d'un sang froid et d'une détermination exemplaires. 

Dans le même temps, la soeur de cette dernière, Keiko, se marie avec Fuga Toshio, un responsable d'établissements scolaires issu d'une famille très aisée. Mais au cours de la cérémonie, la jeune femme, alors enceinte, fait une fausse couche. Pour sauver sa vie, elle doit subir une intervention chirurgicale qui la prive à jamais d'avoir un enfant. Profondément marquée, au contact permanent des enfants de par son travail, Keiko ne peut admettre d'oublier ses rêves de maternité. Elle se tourne vers sa soeur aînée pour lui demander de faire office de mère porteuse, une pratique interdite par la loi japonaise. Si Yuka refuse, les deux jeunes femmes vont finalement se tourner vers une connaissance de Keiko qui, elle, accepte. Mais les réelles motivations de chacun ne sont pas toujours celles que les apparences renvoient... 

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Seinaru Kaibutsutachi emprunte à plusieurs genres très différents : le thriller, le drama avec un héros redresseur de torts (ici dans le domaine médical), ou encore la tentative de portrait social en s'intéressant à toutes les classes, des plus aisées jusqu'aux plus pauvres qui viennent se faire soigner à l'hôpital. Sur le papier, l'ensemble s'annonce ambitieux, mais c'est peut-être là où se situe le premier problème de la série. A trop vouloir jouer sur tous les tableaux à la fois, elle finit par ne réussir à n'être totalement convaincante dans aucun de ses domaines.

En effet, au cours des premiers épisodes, on a un peu l'impression d'assister à plusieurs dramas construits en parallèle, passant de l'un à l'autre sans transition, mais dont la finalité et la tonalité sont presque sans rapport. Face à cette dispersion qui brouille la portée de l'histoire, une storyline parvient cependant à tirer son épingle du jeu : celle du suspense, introduit grâce au fil rouge central qui doit nous conduire à la nuit fatale. C'est elle qui peut permettre au drama de s'imposer à terme, et surtout de fidéliser le téléspectateur.

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Cependant, en attendant, le déséquilibre au sein des histoires des premiers épisodes se répercute également sur les personnages. Le versant le plus classiquement médical est exploré par Shiba Kengo, que l'on suit au sein de ce nouvel hôpital où il vient d'être affecté. Le jeune chirurgien conçoit son métier comme un quasi-sacerdoce. Appliqué, pleinement investi dans le sort de ses patients, il apparaît dans ce début de drama trop lisse par rapport à tout ce qui se joue autour de lui. Etant le narrateur de l'histoire, il nous annonce donc les dérapages/tragédies à venir, mais il souffre un peu du syndrome de l'observateur extérieur, trop fade par contraste avec les protagonistes de la trame principale. 

Ces derniers, par leurs ambivalences, certains non-dits ou incertitudes qui les entourent, interpellent et impliquent le téléspectateur. Car au-delà de l'enjeu représenté par la maternité, traitée comme un besoin tour à tour psychologique et social, Seinaru Kaibutsutachi semble s'orienter sur l'exploration de motivations plus sombres, sur ce que l'on peut être prêt à faire pour parvenir à ses fins. Dans ce registre, Kasugai Yuka, par le mystère qui l'entoure, s'impose progressivement comme la figure la plus intrigante, voire inquiétante. Et c'est grâce à eux que l'on finit par se laisser prendre à ce jeu des faux-semblants/fuyants, où chacun se cache et poursuit ses objectifs. 

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Sur la forme, Seinaru Kaibutsutachi  bénéficie d'une réalisation correcte, sans prendre de risque, ni faire preuve d'une réelle ambition. Le principal reproche que je lui adresserais serait lié à sa bande-son, qui, en se rappelant qu'il s'agit d'un thriller potentiellement tragique, dramatise certains passages à outrance, de manière grandiloquente et disproportionnée par rapport au reste de la tonalité du drama. Les Ave Maria de Schubert et autres morceaux de musique classique peuvent constituer une solide OST s'ils sont utilisés avec justesse, mais leur emploi dans Seinaru Kaibutsutachi  sonne souvent trop artificiel. Peut-être qu'au fur et à mesure que la tension s'accentuera, elles paraîtront plus opportunes.

Côté casting, enfin, chacun investit plutôt efficacement le registre dans lequel évolue son personnage. C'est sans doute Nakatani Miki (Keizoku, JIN) qui m'a fait la plus forte impression, mais elle dispose des atouts d'un rôle ambivalent à multiples facettes. Okada Masaki (Otomen) reste pour le moment dans un registre de jeune docteur entièrement dédié à son métier qui, sans surprise, lui va bien. Kato Ai (Best Friend) met un peu de temps à trouver ses marques, mais elle sait retranscrire la détresse et les illusions suite à la fausse couche. Sinon, ne levez pas les yeux au ciel, je vous promets que je n'avais pas fait attention au fait que Hasegawa Hiroki (Second Virgin, Suzuki Sensei, Kaseifu no Mita) figurait encore à l'affiche de ce drama ; à croire que le petit écran japonais est devenu trop petit (ou alors, il est vraiment partout). Parmi les autres rôles secondaires, on croise notamment Suzuki Anne, Omasa Aya, Katsumura Masanobu, Hirata Mitsuru, Kohinata Fumiyo ou encore Watanabe Ikkei. 

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Bilan : Seinaru Kaibutsutachi est un drama qui joue sur de multiples registres, de l'initatique au médical, en passant par le thriller. Le problème est que l'on passe les trois premiers épisodes à attendre impatiemment de voir se rejoindre l'ensemble, et à espérer que la tension monte d'un cran lorsque le récit sera devenu plus homogène. Car au-delà de son décor médical, du drame central qui l'occupe autour de la maternité, c'est avant tout pour ses accents de fiction à suspense qu'il retient l'attention. Il reste à espérer qu'au fil de la progression de l'intrigue, les différentes parties disjointes de Seinaru Kaibutsutachi ne formeront plus qu'une histoire. C'est qu'en dépit de ces inégalités - et d'un certain manque de subtilité dans l'écriture qui pénalise certains propos -, j'ai envie de connaître le fin mot de l'histoire !  


NOTE : 5,75/10