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09/01/2013

(J-Drama) Double Face : un Infernal affairs japonais

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Restons au Japon en ce deuxième mercredi asiatique de l'année, pour revenir sur une mini-série diffusée à l'automne dernier que je m'étais promise de vite rattraper. Composée de deux parties d'1h30 chacune, Double Face présente tout d'abord une particularité dans sa conception : il s'agit d'une collaboration entre deux chaînes différentes, TBS et la câblée WOWOW. TBS a diffusé la première partie, intitulée Double Face - Sennyu Sosa-hen le 15 octobre 2012. Puis, le 27 octobre, la seconde et dernière partie, Double Face - Giso Keisatsu-hen, a été proposée sur WOWOW. C'est pour le moins inhabituel de voir ainsi deux chaînes collaborer de cette manière complémentaire.

Le résultat intriguait d'autant plus que Double Face est le remake du célèbre film de Hong Kong (qui a donné toute une trilogie, Infernal Affairs). Succès de 2002, il a déjà fait l'objet d'un remake américain au cinéma, The Departed (Les Infiltrés). Le Japon a donc proposé à son tour une version, télévisée cette fois, de l'histoire d'origine. L'ayant en DVD, j'ai hésité à réactiver mes souvenirs en revoyant Infernal Affairs avant de me plonger dans ce drama, mais c'est finalement seulement avec une mémoire floue et ma bonne impression générale que je me suis lancée dans Double Face. Je n'ai pas regretté l'expérience, car il s'agit là d'un drama special très solide.

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Double Face met en scène les destins croisés de deux hommes infiltrés chacun dans des camps opposés qu'ils sont censés, soit contribuer à détruire, soit rendre inoffensif. Ainsi Miriya Jun est un policier qui, depuis 6 ans, évolue en couverture auprès d'un groupe criminel local, l'Oda-gumi. La mission aurait dû se terminer il y a déjà plusieurs années, mais son supérieur hiérarchique, le seul qui connaît et peut prouver sa véritable identité, le presse de poursuivre la tâche jusqu'à ce que le boss du gang, Oda Hironari, soit inculpé. L'idéal serait une arrestation en flagrant délit lors d'un échange de marchandises, permettant de lier le criminel au trafic de drogue qu'il organise.

Mais les plans de la police sont fragilisés par le fait qu'Oda Hironari semble toujours particulièrement bien informé des opérations menées contre lui. En effet, il a envoyé un de ses propres hommes en couverture : Takayama Ryosuke. L'ayant connu adolescent, il a financé ses études et l'a encouragé à entrer dans la police pour lui servir d'informateur. Au sein des forces de l'ordre, la carrière de Ryosuke décolle pourtant rapidement, car il apparaît comme un officier de confiance et surtout très efficace. Au point de se voir chargé de débusquer la taupe opérant au sein de la police...

Arrive un moment où les mensonges permanents et le stress de l'infiltration commencent à lourdement affecter Miriya Jun et Takayama Ryosuke. Chacun s'interroge sur ce qu'il est devenu : existe-t-il encore une porte de sortie pour eux ?

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Double Face exploite efficacement les recettes classiques des fictions policières et de gangsters, tout en y intégrant une dualité intriguante et ambivalente liée à la double infiltration relatée. Si elle reste proche de l'original (d'après les souvenirs flous qu'il m'en reste), elle sait bien exploiter et se réapproprier le matériel de base. Chaque épisode met ainsi l'accent spécifiquement sur un des deux infiltrés, d'abord le policier, puis le yakuza, sans que l'homogénéité d'ensemble du récit n'en souffre. Par rapport à la durée du film original, ce sont 3 heures de fiction que le drama propose. Cela lui permet de développer plus avant certains éléments, en se reposant sur un construction narrative cohérente et solide, rondement menée jusqu'à son terme. Si elle s'offre des incursions dans le registre du thriller, avec plusieurs scènes très tendues ou marquées par d'explosion de violence, la fiction manque ici un peu d'éclat. Cependant ces limites sont compensées par un développement psychologique des personnages qui retient tout autant l'attention du téléspectateur.

Double Face prend en effet le temps de s'intéresser à ces deux personnages principaux, pressurés de part et d'autre. La mini-série insiste sur le thème de la perte d'identité, mettant en exergue les doutes, et plus généralement la solitude qui assaille les deux infiltrés. Sont particulièrement bien mises en scène les difficultés quotidiennes de l'exercice de double jeu auquel ils sont astreints et des mensonges qui finissent par troubler leurs repères. Figures ambivalentes par nature, ils ne sont pas moins humanisés : le drama éclaire leurs aspirations au changement, qu'il s'agisse d'un retour à une vie plus stable en fondant une famille pour le policier sous couverture, ou d'une émancipation de celui à qui il doit tout pour le yakuza. Après avoir vécu la vie d'un autre, instrumentalisés et sur-utilisés, chacun souhaiterait enfin vivre sa propre vie. Mais l'engrenage dans lequel ils évoluent n'offre pas d'issues satisfaisantes, et jusqu'au bout, la fiction sera cohérente avec elle-même, avec ses ambiguïtés, et avec le milieu mis en scène.

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Sur la forme, Double Face bénéficie d'une réalisation de bonne facture. Elle a en plus quelques vrais instants de grâce : Eiichiro Hasumi s'offre en effet plusieurs plans marquants et très inspirés, qu'il s'agisse de jouer sur la symbolique de certaines mises en scène ou sur la photographie et l'esthétique de divers passages, comme la scène de la première rencontre dans le passé entre Ryosuke et le boss yakuza (dont vous avez une screen-capture ci-dessous). La bande-son, sans prendre le pas sur le récit, parfois même très en retrait, l'accompagne cependant sobrement.

Enfin, côté casting, Double Face rassemble plusieurs têtes très familières du petit écran japonais. S'il manque peut-être une petite étincelle au duo principal, les deux acteurs, Nishijima Hidetoshi (Boku to Star no 99 Nichi, Strawberry Night), qui joue l'officier de police infiltré, et Kagawa Teruyuki (Nankyoku Tairiku, Ryomaden), font plus que correctement ce travail d'interprétation marqué par l'ambivalence et les dilemmes. C'est Kohinata Fumiyo (Ashita no Kita Yoshio, Marks no Yama, Jin) qui interprète efficacement le chef yakuza dont la chute représente l'enjeu de tout le drama. A noter que l'on retrouve également Wakui Emi (Bitter Sugar), Ito Atsushi (Densha Otoko) et Kadono Takuzo (Engine).

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Bilan : Double Face est un drama special solide qui entremêle les codes des fictions policières et celles de gangsters en s'intéressant à deux individus écartelés entre ces deux mondes opposés. La mise en scène de l'infiltration et de ses conséquences sur les infiltrés (la perte de repères et la volonté de sortir de cet engrenage) est particulièrement intéressante. Face aux deux portraits ambigus ainsi dépeints, le téléspectateur s'investit naturelement dans le sort de ces personnages déchirés. Double Face se montre un peu moins habile dans le registre du thriller, où il lui manque une dose de nervosité qui aurait permis à ce drama special d'acquérir une dimension supplémentaire. Mais il reste un remake sérieux et appliqué qui apporte une intéressante expérience à la télévision japonaise. J'espère la voir poursuivre sur cette voie !


NOTE : 7,75/10

08/01/2013

(DAN) Forbrydelsen, saison 3 : l'ultime enquête de Sarah Lund

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Un chapitre s'est refermé cet automne 2012. Forbrydelsen (The Killing, en version internationale) s'est en effet achevée fin novembre au Danemark, sur une troisième et dernière saison composée de dix épisodes. C'est une fiction qui gardera toujours une place particulière dans mon panthéon personnel des séries. Ma rencontre avec elle remonte à il y a deux ans, en janvier 2011, quand BBC4 s'était lancée dans sa diffusion. Etant donné ma fréquentation assidue du petit écran anglais, il était assez logique que je succombe à la "vague nordique" lorsqu'elle est arrivée outre-Manche. La première fois que je vous en ai parlé, c'était pour la désigner comme mon obsession du moment.

Il faut dire que Forbrydelsen a été mon déclic danois. Un coup de coeur qui m'a encouragé à explorer de nouvelles terres téléphagiques inconnues, notamment en Europe. Indirectement, elle a eu d'autres conséquences, comme celles de renouveler ma curiosité pour les polars scandinaves et de m'entraîner vers bien d'autres découvertes nordiques, littéraires notamment. Elle fut aussi l'occasion d'une rencontre avec une héroïne de fiction marquante, Sarah Lund, et un sens du fashion qui restera symbolisé par son éternel pull. Cette troisième saison, à côté d'une intrigue policière classique, avec ses cliffhangers toujours très efficaces, aura avant tout été une ultime enquête dédiée à ce personnage.

[La review qui suit contient des spoilers sur l'évolution générale de la saison. A lire à vos risques et périls.]

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Les débuts de la saison 3 de Forbrydelsen permettent de retrouver Sarah Lund avec de nouveaux projets : elle espère une promotion dans un département de police moins contraignant, tout en essayant tant bien que mal de renouer des liens avec son fils, Mark, devenu un jeune adulte et qui tend à l'éviter. Lorsqu'un corps non identifié est retrouvé dans le port, elle se voit confier l'affaire, en apparence destinée à être vite classée, sans imaginer l'ampleur que cette dernière s'apprête à prendre. D'autres marins sont en effet retrouvés morts sur le navire qu'ils étaient sensés garder. Ils étaient employés par Zeeland, une importante entreprise danoise notamment spécialisée dans le commerce maritime.

Or Zeeland fait l'objet d'une attention toute particulière dans un contexte politique électrique, puisque des élections législatives sont prévues très prochainement. La société doit notamment rendre possible le plan de redressement économique, visant à faire face à la crise, que le Premier Ministre sortant soumet aux votes des électeurs. Son PDG, Robert Zeuthen, entend bien apporter son soutien à cette politique, en dépit de certaines dissensions en interne. C'est alors que sa fille, Emilie, est kidnappée. Quels liens existent entre le meurtre des trois marins étrangers et l'enlèvement de l'enfant d'un millionnaire ? Sarah Lund enquête, collaborant pour cela avec la Special Branch chargée de la sécurité du Premier Ministre, où elle retrouve une ancienne connaissance, Mathias Borch.

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Dans la continuité directe des précédentes saisons, la grande force de Forbrydelsen demeure sa capacité à se réapproprier avec assurance et un réel savoir-faire les recettes classiques de son genre. Poursuivant l'exploration des diverses facettes du polar, cette troisième saison s'intéresse au cas du kidnapping d'un enfant. L'affaire est traitée comme un thriller policier, Sarah Lund se lançant sur les traces du ravisseur tout en essayant de comprendre ce dernier, mais elle recouvre aussi des thématiques plus larges qui rappellent un des attraits majeurs de la série : sa richesse. Car cet enlèvement est l'occasion d'une exploration plus intime et personnelle de l'expérience traumatisante vécue par les parents de la disparue, tout en développant un dimension plus politique dès lors que la campagne électorale en cours se saisit du kidnapping pour l'instrumentaliser, notamment pour critiquer la gestion par les autorités - et donc par le gouvernement - de la situation.

La construction de l'intrigue obéit à des règles éprouvées qui démontrent une nouvelle fois leur efficacité. Le téléspectateur étant désormais familiarisé avec l'univers de Forbrydelsen, il faut reconnaître que le feuilletonnant bien huilé tend parfois à rebondir sur des retournements attendus, voire prévisibles. Pourtant la recette fonctionne toujours, bien aidée par une durée ni trop longue, ni trop courte (10 épisodes), et surtout par l'art du cliffhanger dans lequel la série excelle. Elle n'a pas son pareil en effet pour conclure chaque épisode sur un ensemble d'intrigues laissées en suspens. La tension qui sous-tend l'ensemble connaît alors des piques en mesure de s'assurer de la fidélité imperturbable d'un téléspectateur qui n'a qu'une seule envie : se précipiter sur la suite.

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Dans le même temps, Forbrydelsen est une série qui renvoie un miroir à la société au sein de laquelle elle se déroule. Sa force a toujours été de profiter des faits divers relatés pour permettre des éclairages plus larges. En arrière-plan, dans cette saison 3, on parle donc crise économique, délocalisation, et, peu à peu, tout un pan politique se greffe directement ou non à l'enquête en cours. Poursuivant la progression dans les échelons du pouvoir initiée au cours de la première saison, la série se propose de nous faire suivre cette fois le Premier Ministre du Danemark. Elle nous plonge dans une lutte électorale dans laquelle tous les coups sont permis. Cependant, si ses ambitions de polar aux ramifications plus vastes demeurent intactes, la saison ne convainc pas entièrement sur ce plan.

En effet, les protagonistes de ces jeux politiques manquent d'ampleur. Développés de manière trop superficielle, ils prennent place dans des scènes qui résonnent un peu artificiellement (un ressenti peut-être accru par les parallèles inconscients du téléspectateur avec Borgen). Pourtant ces réserves doivent être mises entre parenthèses en raison de la force et de la réussite de la conclusion. La résolution de l'intrigue ne déçoit pas, car on y retrouve le pessimisme ambiant qui a toujours été une part intégrante et la marque de fabrique de la série. Si l'ultime revirement du Premier Ministre peut sembler un peu rapide et précipité, l'impact des dernières scènes rappelant combien un être ordinaire pèse peu face aux intérêts du pouvoir est lui parfaitement réussi.

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Au fil d'une saison qui culmine avec ce troublant dernier épisode, l'élément important est l'évolution suivie par le personnage de Sarah Lund. Si on la retrouve fidèle à elle-même dans ses obstinations policières au cours de l'enquête, elle traverse cependant une période de doutes et de remise en cause. Ces développements psychologiques constituent l'apport le plus intéressant de ces dix épisodes. Blessée de voir son fils Mark couper les ponts alors même qu'il s'apprête à fonder une famille, elle s'interroge sur les décisions du passé qu'elle a prises, et sur ce qu'elle peut faire pour reprendre sa vie en main. Le retour de Borch intervient dans ces conditions, alors qu'elle souhaiterait reconstruire quelque chose sans répéter les mêmes erreurs.

Mais Sarah Lund échoue dans son projet de ne pas se laisser aspirer à nouveau par les horreurs de son quotidien, une volonté qui allait contre son tempérament et contre tout ce qui fait d'elle ce qu'elle est. Elle arrivait à saturation, mais son inlassable obsession et persévérance pour la vérité et la justice l'auront finalement précipitée sur une autre pente. Alors que tout aurait pu être réuni pour permettre une sorte de happy end teintée d'amertume par rapport à l'enquête, mais réconfortant pour sa vie personnelle, il n'en sera rien. Les dernières minutes laissent en réalité tout en suspens. Elles frustrent sur le moment intensément, et pourtant, l'acte de Sarah Lund apparaît dans la continuité logique de sa crise existentielle. Car, suivant la tonalité particulière de Forbrydelsen, trouver la paix était impossible.

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Sur la forme, Forbrydelsen bénéficie d'une réalisation toujours parfaitement maîtrisée. Ses images conservent cette photographie aux teintes grisâtres qui sied si bien à l'ambiance de polar sombre de la série. D'ailleurs, quand elle nous immerge dans les coulisses du quotidien du Premier Ministre, le contraste est alors particulièrement frappant avec Borgen, dont les partis pris esthétiques sont diamétralement opposés. De plus, les thèmes musicaux, caractéristiques, sont bien employés, notamment ce morceau qui conclut les épisodes contribuant à l'efficacité redoutable des cliffhangers de la série.

Enfin, Forbrydelsen rassemble un casting, parfaitement dans le ton, au sein duquel Sofie Grabol resplendit. L'actrice maîtrise à merveille les ambivalances et les paradoxes de son personnage, trouvant cet équilibre unique entre une force persévérante inarrêtable et cette touche de vulnérabilité face à certaines situations. Ses rapports avec son supérieur hiérarchique, Morten Suurballe, sont inchangés, conservant cette froide distance où s'ajoute une certaine compréhension. C'est Nikolaj Lie Kaas qui va cette fois incarner son partenaire pour l'enquête, l'entraînant dans des recoins personnels de son passé. Les parents de l'enfant kidnapé sont respectivement interprétés par Anders W. Berthelsen et Helle Fagralid. On retrouve également à l'affiche Sigurd Holmen le Dous, Stig Hoffmayer, Olaf Johannessen, Jonatan Spang, Trine Pallesen, Tammi Ost ou encore Peter Mygind.

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Bilan : Dans cette saison 3, Forbrydelsen conserve les recettes traditionnelles du polar, thriller tendu, parfois prévisible, mais rythmé par des cliffhangers parfaitement maîtrisés. Cependant son véritable apport tient au développement réservé à Sarah Lund. Ces dix épisodes sont l'histoire d'une tentative d'évasion impossible, d'une remise en cause - pour reprendre sa vie en main sans reproduire les mêmes erreurs - qui échoue, d'une saturation dont les signes étaient présents et qui explose finalement de la plus irrémédiable des manières. Jusqu'au bout, Forbrydelsen aura été fidèle à elle-même, marquée par ce parfum d'amertume désillusionnée qui caractérise cette sombre série.

Sarah Lund a donc définitivement raccroché ses pulls. L'avion s'est perdu dans la nuit. Reste à lui rendre une dernière fois hommage : merci pour toutes ces heures de tension vécues fébrilement devant le petit écran et pour m'avoir réconcilié avec un versant du polar que j'avais délaissé. Ces trois saisons furent une belle expérience sériephile. Une découverte qui reste hautement recommandée (si ce n'est pas déjà fait) !


NOTE : 8,5/10


Une bande-annonce de la saison :

05/01/2013

(Mini-série UK) Restless : un beau portrait de femme sur fond de jeux d'espions paranoïaques

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Au cours de la période des fêtes en Angleterre, outre des épisodes spéciaux de diverses séries, on retrouve aussi des fictions originales prévues pour l'occasion. Une réussite notable est à signaler pour cette fin 2012, venant conclure de belle manière une année qui aura été assez mitigée. BBC1 a en effet proposé à ses téléspectateurs Restless, une mini-série, en deux parties d'1h30, diffusée les 27 et 28 décembre 2012. Il s'agit de l'adaptation d'un livre de William Boyd (publié en France sous le titre La vie aux aguets), écrivain dont on se souvient que Channel 4 avait diffusé l'adaptation d'un autre de ses romans fin 2010, Any Human Heart. Bénéficiant d'une belle mise en scène, Restless dresse un prenant portrait de femme, tout en renouant avec les codes les plus efficaces des fictions d'espionnage (oui, ce début d'année est placé sous le signe de l'espionnage !). Un bien plaisant visionnage pour commencer 2013 !

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Restless débute dans les années 1970. Ruth Gilmartin, une doctorante de Cambridge, est en route pour rendre visite à sa mère, Sally. Mais cette dernière est particulièrement nerveuse et fébrile lorsque Ruth arrive avec son fils. Paranoïaque, elle est persuadée que, depuis que sa photo a été publiée dans un journal local, elle a été placée sous surveillance. Elle pense même sa vie en danger. Ruth balaie ces inquiétudes d'un revers de main sans les comprendre. Pour justifier ses craintes, Sally décide qu'il est temps de confier à sa fille des secrets issus d'un passé qu'elle a laissé depuis longtemps derrière elle. Elle lui remet un dossier dont le récit commence en 1939, à Paris. Elle s'appelait alors Eva Delectorskaya...

Réfugiée russe en France à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, elle est recrutée, après le meurtre de son frère par des fascistes, par Lucas Romer qui lui propose de rejoindre les services de renseignements britanniques. Un entraînement en Ecosse plus tard, elle est affectée à une compagnie du nom de AAS Ltd qui s'occupe de désinformation sur le continent européen. Que s'est-il donc passé pour Eva durant la Seconde Guerre Mondiale qui lui fait craindre pour sa vie trois décennies après ? Au fil de sa lecture, Ruth découvre une facette de sa mère dont elle ignorait tout, tout en essayant de l'aider à apaiser ses inquiétudes dans le présent. Le temps semble venu de solder le passé, à moins de risquer de rester à jamais aux aguets en attendant que le couperet tombe.

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Restless est un thriller qu'entoure un parfum de sourde paranoïa. C'est une fiction qui prend le temps de construire son ambiance, ne dévoilant ses cartes et les dessous de ses intrigues que progressivement. On aurait pu craindre que les constants aller-retours entre les années 40 et les années 70 portent atteinte à l'homogénéité du récit, il n'en est rien : dans l'ensemble, la mini-série parvient à bien gérer cette double construction en parallèle. Même si, en terme d'intensité et d'intérêt suscité, il faut reconnaître que les évènements qui se déroulent durant la Seconde Guerre Mondiale l'emportent du fait de leur force dramatique.

Ils sont l'occasion pour Restless de se réapproprier efficacement les codes classiques des fictions d'espionnage, en éclairant un enjeu particulier : celui de la maîtrise de l'information, ou plutôt de la désinformation. Partant de Belgique, sa mission entraînera Eva jusqu'aux Etats-Unis, durant les mois qui précèdent Pearl Harbor, pour tenter de rallier l'opinion publique américaine à l'idée d'entrer en guerre. Si cet éclairage est assez original, les développements suivent, eux, une approche autrement plus classique, jusqu'à l'ultime twist. Sans être exempt de reproche dans la manière dont l'intrigue se met en place, l'histoire reste rondement menée, ponctuée de passages de forte tension particulièrement réussis. Elle se révèle ainsi des plus prenantes.

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Au-delà du thriller, l'attrait de Restless doit aussi beaucoup à ses personnages. La partie se déroulant dans les années 40 permet d'apprécier le développement d'Eva : c'est un portrait assez fascinant qui s'esquisse sous les yeux du téléspectateur. Celui d'une jeune femme ordinaire qui se transforme et mûrit face à l'extraordinaire : de l'innocente réfugiée endeuillée, hésitante, manquant de confiance, elle devient peu à peu une espionne aguerrie. Son entraînement lui fait prendre conscience de ses capacités, tandis que les épreuves qu'elle devra ensuite affronter achèvent de l'endurcir. Des jeux d'espion aux jeux des sentiments, elle fait ses choix et les assument, gagnant en ampleur au fil de ces trois heures. Pleine de ressources, volontaire, mais avec aussi ses points vulnérables, notamment face à son supérieur hiérarchique, elle est une belle figure de fiction auprès de laquelle le téléspectateur va s'investir.

Dans les années 70, la paranoïa est également là, mais la tension se fait plus psychologique. Les craintes de Sally/Eva mettent du temps à être explicitées. Si bien que ce versant de la mini-série vaut surtout pour son traitement des rapports mère/fille, évoquant notamment l'impact des révélations relatives à la véritable identité de sa mère sur Ruth. Restless offre sans doute ici un récit plus limité, mais elle s'en sort pourtant relativement bien dans un registre plus intimiste. C'est à nouveau dans sa manière d'éclairer les fortes personnalités de ces deux femmes que la mini-série se démarque, d'autant qu'elles développent une dynamique très intéressante. Leur histoire offre un fil rouge complémentaire aux évènements des années 40, culminant dans une confrontation finale vers laquelle toute la mini-série est construite.

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Si le récit est efficace et retient l'attention de bout en bout, c'est aussi parce qu'il se dégage une atmosphère particulière de Restless qui sait parfaitement happer le téléspectateur : la mini-série doit ici beaucoup à une mise en scène très soignée. Le récit est globalement superbement porté à l'écran, renforçant l'implication du téléspectateur dans la destinée d'Eva. Non seulement la réalisation est appliquée, offrant quelques plans très inspirés, mais c'est aussi toute la reconstitution, des années 40 comme des années 70, qui est particulièrement belle. La photographie trouve les bonnes teintes ; les tenues des personnages sont très bien choisies. Et la bande-son parachève de poser l'ambiance de la plus convaincante des manières.

Enfin, Restless bénéficie d'un très solide casting. Pour ses passages se déroulant dans les années 40, la mini-série réunit dans ces jeux d'espion létaux une Hayley Atwell (The Prisoner, Les Piliers de la Terre, Any Human Heart) tout simplement rayonnante et un Rufus Sewell (Eleventh Hour, Les Piliers de la Terre) intriguant et mystérieux à souhait, tous deux ayant trouvé immédiatement le ton juste pour leurs personnages respectifs. Quant aux années 70, si elles tiennent malgré tout très bien, elles le doivent beaucoup à l'assurance de Michelle Dockery (Downton Abbey) et à la sobriété de Charlotte Rampling, interprétant Eva plus âgée, qui apportent une vraie classe à leurs personnages. Michael Gambon (Perfect Strangers, Wives & Daughters) joue alors Lucas Romer devenu un Lord anglais. Chacun de ces acteurs délivre une prestation impeccable, qui contribue à la force du récit. Parmi les rôles plus secondaires, notez également la présence notamment d'Adrian Scarborough (Cranford, Upstairs Downstairs) ou encore de Thekla Reuten (Sleeper Cell, Hidden).
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Bilan : Restless est une mini-série efficacement construite, à l'esthétique soignée et aboutie. Elle nous plonge dans une diffuse ambiance paranoïaque, retranscrivant des jeux d'espion qui gagnent en ampleur et en force au fil du récit. Portée par un très solide casting, elle fait preuve d'une intéressante maîtrise pour conduire le double récit mis en scène entre les années 40 et les années 70. Cependant elle reste aussi un superbe portrait de femme, évoquant une héroïne, marquée par les bouleversements européens du XXe siècle, que l'on voit s'affirmer sous nos yeux. Sans être exempt de tout reproche dans certains des choix narratifs faits, Restless offre 3 heures prenantes qui devraient plaire à plus d'un téléspectateur, amateur d'espionnage et au-delà.


NOTE : 7,75/10


La bande-annonce de la série :


02/01/2013

(Bilan) Mon année sériephile 2012 au Japon

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Après un bilan global annuel, il est de coutume sur ce blog de s'arrêter un peu plus sur certains pays, notamment en Asie (en effet, c'est mercredi). Ces dernières années, ces billets me permettaient surtout de consolider et de mesurer l'évolution de ma consommation dans ces pays "nouveaux". Ils ne sont plus vraiment nouveaux, mais c'est toujours l'occasion de faire le point utilement. D'autant qu'en 2012, je suis pour la première fois parvenue à un relatif équilibre entre la Corée du Sud et le Japon. Si j'insiste là-dessus, c'est que, les lecteurs les plus anciens s'en souviennent peut-être, j'ai longtemps eu de difficiles relations avec le petit écran japonais. Les doutes se sont depuis effacés.

Je n'ai jamais vécu une année aussi pleine que 2012 au pays du Soleil Levant. Certes, toutes les saisons (hiver, printemps, été, automne) n'ont pas été égales. Je garde en tête le relatif désert estival, alors que l'automne s'est au contraire révélé autrement plus riche. A défaut de jouer au teste-tout (par manque de temps), je réussis désormais plutôt bien mes sélections. On peut presque dire que mon éducation téléphagique japonaise est en place (il n'aura fallu que... quasiment six ans?) ! Revenons donc un peu sur l'année qui s'est écoulée.

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Ils m'ont marqué : le top 3 incontournable

2012 avait commencé de la plus marquante des manières devant Shokuzai. Prouvant une nouvelle fois qu'il faut surveiller les dramas de WOWOW (même si la chaîne aura aussi connu ses ratés cette année), ce drama troublant et éprouvant aura traité avec une approche très particulière du thème de l'expiation. Décrivant le cheminement auto-destructeur vers lequel différentes protagonistes sont conduites par une tragédie passée, c'est une série qui aura marqué par son sujet, mais aussi par sa mise en scène - avec une réalisation magnifique contribuant grandement à la construction de l'ambiance. Une oeuvre très aboutie, signée Kurosawa Kiyoshi, qui mérite le détour.

La deuxième grande claque téléphagique est venue d'un autre drama hivernal, mais dont les sous-titres ont été traduits un peu plus tardivement au cours de l'année : Unmei no Hito. Dans la lignée des Fumou Chitai et autre Karei Naru Ichizoku (et du même calibre que ces derniers), ce drama parle du Japon, de l'histoire de ce pays en revenant sur des conséquences de l'après Seconde Guerre Mondiale. Il s'intéresse à des destinées personnelles bouleversées par des enjeux autrement plus grands. Inspiré de faits réels, il traite plus précisément de la rétrocession d'Okinawa. C'est une occasion d'éclairer le fonctionnement de la démocratie japonaise des années 70, et notamment les rapports de la presse et du pouvoir. Un sujet fort pour un drama extrêmement prenant et bien mis en scène. 

Le dernier drama sélectionné relève plus de l'expérience télévisuelle, mais quelle magnifique expérience que celle-là ! Sur bien des points, Going My Home ne ressemble pas à ce que l'on attend canoniquement d'une fiction télévisée à diffusion hebdomadaire. C'est une oeuvre d'ambiance, où le soin porté aux détails, l'authenticité de scènes ou d'échanges qui pourraient être anecdotiques ou encore la construction d'une atmosphère à part sont des éléments qui l'emportent sur une intrigue semblant comme en retrait. C'est un drama à part, d'une subtilité qui lui est propre et profondément humain. Une belle série, originale, qui mérite assurément le détour.

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Petit état des lieux du reste de mes visionnages... et des bons souvenirs que je garde.

Les dramas relationnels

Un de mes réflexes les plus anciens, depuis plus d'une demie décennie que je regarde des séries japonaises, a été d'éviter les séries relationnelles. J'ai toujours eu tendance à sélectionner certains genres : Histoire, politique, policier, question de société au sens large... au détriment des autres. Cette année pourtant, je me suis investie avec succès dans plusieurs dramas où les jeux des sentiments, mais aussi les réflexions qui les entourent, étaient déterminants. J'en retiends deux fictions extrêmement différentes. D'une part, rattrapée en début d'année, il y a eu Second Virgin, un drama qui met à jour, de façon prenante mais aussi tragique, les croisements des sentiments, des ambitions et des codes sociaux. D'autre part, diffusée cet automne, il y a eu Kekkon Shinai qui, avec sa façon rafraîchissante, aura proposé une intéressante réflexion sur l'engagement, le mariage et l'amour. Deux approches très diverses, mais qui m'auront convaincu de continuer l'exploration de ces thèmes à l'avenir.

L'humour

L'humour et moi, sur tous les continents, nous entretenons des relations difficiles. Non pas que je sois allergique aux comédies, mais j'ai toujours des difficultés à m'investir avec régularité dans ce genre. 2012 aura cependant été l'occasion de confirmer mon affection pour Yuusha Yoshihiko. Pour sa seconde saison, Yuusha Yoshihiko to Akuryou no Kagi se sera inscrite dans la fidèle continuité de la première. De savoureuses (et décalées) aventures parodiques dans un univers de fantasy reprenant les codes des jeux de rôle, devant lesquelles on prend décidément beaucoup de plaisir ! Dans un registre proche, j'ai également visionné les premiers épisodes de Dragon seinendan, avec cette fois-ci une transposition dans le monde "réel" des codes des jeux de rôle. Sans être déplaisant, et plutôt drôle à ses heures, je n'y ai pas retrouvé le dynamisme de Yuusha Yoshihiko et je me suis finalement lassée sans aller au bout... Ma malédiction des comédies.

Les dramas de société

Jusqu'à présent, mon genre de prédilection au Japon a été des dramas traitant de sujets de société, mettant en lumière ce pays et les problématiques qui l'animent. 2011 avait été une année très riche, avec de nombreux rattrapages effectués, et des découvertes magistrales comme Soratobu Taiya. 2012 a été plus mitigée. Mes rattrapages m'ont laissé réservé, à l'image de Chase. WOWOW n'a pas complètement rempli les attentes que l'on pouvait avoir : après des débuts plutôt prometteurs, ni Magma (sur la question énergétique post-11 mars), ni Suitei Yûzai (sur une erreur judiciaire) n'auront su se montrer pleinement convaincants. Il faut sans doute que j'admette que tous les dramas ne peuvent avoir le niveau qualitatif de Soratobu Taiya. Mais concernant WOWOW, plusieurs dramas de l'automne non encore visionnés me rappelleront probablement pourquoi je fais confiance à cette chaîne (Hitori Shizuka, Double Face).

Une autre approche pour traiter de problématiques parcourant la société japonaise est l'éducation : les fameux high school dramas. Il est devenu rare qu'ils parviennent à me convaincre. Suzuki Sensei a été l'exception notable à saluer. J'en avais déjà parlé l'an dernier, puisqu'il a été diffusé en 2011. Mais ses sous-titres anglais ont été achevés au printemps 2012, d'où cette nouvelle évocation. Loin de toute moralisation ou de tout manichéisme, c'est une fiction qui, en suivant les méthodes atypiques d'un enseignant, propose une approche des questionnements d'adolescence qui sonne extrêmement authentique. Le tout porté par une figure centrale très charismatique mais ne manquant pas d'ambivalence. Un must-seen

Les policiers

Peu ou pas de pur policier suivi cette année au Japon. Il faut cependant noter un rattrapage effectué : celui de Ningen no Shoumei. Une découverte d'autant plus intéressant qu'il ne s'agit pas d'un simple procédural. Au contraire, c'est un polar feuilletonnant qui met en scène divers protagonistes dont les destins s'entrecroisent. Cette fiction très dense et chorale, teintée d'ambiguïtés, expose le poids que peut faire peser notre passé. Et dans son rôle de policier torturé et efficace, Takenouchi Yutaka aura fait des merveilles (oui, je poursuis aussi mon exploration intéressée de certaines filmographies... histoire d'allier, plaisir et... plaisir !).

Les OTNI

Quand on parle à un profane, qui n'en a jamais visionné, de j-dramas, un de ses premiers réflexes est souvent d'imaginer cette télévision peuplée d'une surenchère de concepts les plus improbables et/ou surprenants. S'il faut nuancer cela, la richesse du petit écran japonais tient à sa diversité, et aussi à sa capacité à justement réussir des oeuvres qu'on retrouverait plus difficilement dans un autre pays. Cette année, mon rattrapage de The Quiz Show me l'a encore confirmé. Mettant en scène une émission de télévision particulièrement déstabilisante, ce drama s'est caractérisé par une maîtrise narrative d'ensemble remarquable. Une superbe expérimentation télévisuelle qui vous rappelle la nécessité de toujours revenir poser ses bagages au Japon de temps à autre, pour profiter de tout ce que peut offrir le format série !

Les tanpatsus

A côté des renzoku, existent aussi les tanpatsus, que j'ai longtemps délaissés avant de commencer à m'y mettre depuis deux ans. Ils ont l'avantage d'un format court (souvent seulement deux heures). Ma fortune y a été très diverse cette année, avec nombre de semi-déceptions. J'en retiens cependant trois fictions très différentes, mais toutes intéressantes à leur façon. Tout d'abord, l'attachant Hoshi Hitotsu no Yoru qui met en scène une histoire d'amitié simple et sincère, portée par un casting de rêve (Watanabe Ken, Tamaki Hiroshi). Puis, l'intriguant Shikei Kijun, drame judiciaire évoquant le sujet de la peine de mort au Japon. Enfin, une comédie enlevée et sympathique : Suteki na Kakushidori, qui aura bien su jouer sur le huis clos hôtelier dans lequel elle se déroule.

L'historique

J'avais beaucoup de projets dans le domaine des fictions historiques, mais je ne les ai pas tous menés à bien. J'ai pris le temps de revisionner les deux saisons de JIN, ce fantastique drama qui plonge un chirurgien du présent dans le Japon de l'ère Edo. Entre reconstitution historique, drame médical, intrigue politique et exploration de la mythologie du voyage dans le temps, cela reste pour moi une des grandes références de la télévision japonaise de ces dernières années. Deux saisons remarquables, qui méritaient deux reviews pour chacune d'elles (La saison 1 / La saison 2). Dans le même temps, j'ai aussi visionné mon premier vrai jidaigeki : une mini-série, Tsukahara Bokuden. L'expérience n'a pas été la plus concluante qui soit, mais elle a eu le mérite de me confirmer que j'apprécierai beaucoup une immersion historique au Japon, à travers les grandes fresques que sont les taigas. Jusqu'à présent, Ryomaden figurait en tête de liste parmi ces derniers ; mais la récente superbe review de Kerydwen sur Fûrin Kazan a fait plus qu'aiguiser ma curiosité. J'hésite donc, mais ma résolution japonaise pour 2013 est indéniablement celle-ci : regarder un taiga.

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L'instantané musical. Ma sélection de trois génériques :

Suzuki Sensei (2011)

Parmi les mille et une choses qui ont fait que je sois tombée sous le charme de ce high school drama, le générique figure en bonne place. Qu'il s'agisse de la chanson rythmée, de la photographie ou de la mise en scène, tout y est très bien pensé, simplement mais efficacement. La symbolique des lunettes que chaque élève se passe pour finalement attérir sur le nez du professeur auquel elles appartiennent reflètent à merveille l'état d'esprit de la série qui est justement de changer les perspectives et de susciter discussions et échanges de points de vue.


Yuusha Yoshihiko to Akuryou no Kagi (2012)

Pour retrouver de l'énergie, rien de tel que ce générique punchy à souhait. Doté d'un visuel travaillé qui multiplie les références aux jeux de rôle pour notre plus grand plaisir, il retranscrit parfaitement l'essence de ce drama qui est reste une réjouissante parodie de fantasy, à la fois pleine de dynamisme et de décalage.


Kekkon Shinai (2012)

Enfin, j'ai longtemps hésité sur la sélection de ce dernier générique. Celui de Kekkon Shinai n'a pas été un coup de coeur instantané, pourtant, au fil du drama, je me suis progressivement profondément attachée à la fraîcheur qui en émane, à cette mélodie qui semble être comme une balade de la vie, ou encore à cette mise en scène faussement insouciante. Ce n'est pas le générique le plus recherché ou original, mais il réussit à évoquer quelque chose chez le téléspectateur qui s'installe devant cette série, et c'est bien le principal.


Au final, cette année sériephile 2012 au Japon aura été riche, diverse et intéressante. Plus important, l'enthousiasme pour la première fois vraiment perceptible en 2011 est toujours là. Je compte donc bien y poursuivre mes explorations téléphagiques. Et, encore une fois, un grand merci à certains commentateurs ou encore aux différents blogs comme celui de Kerydwen, de Katzina ou de LadyTeruki, pour leurs précieux conseils.

01/01/2013

(Pilote UK) Ripper Street : un crime period drama dans un quartier encore marqué par les meurtres de Jack l'Eventreur


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Les crime period dramas aiguisent toujours ma curiosité. Pourtant, en s'installant devant Ripper Street, il était difficile de ne pas naturellement se rappeler la relative déception qu'a été pour moi Copper, lancée par BBC America en août dernier. On se souvient aussi que même les Suédois, en s'essayant au genre avec Anno 1790, n'avaient pas réussi à trouver l'équilibre pleinement satisfaisant entre reconstitution historique et policier. J'attends donc toujours un nouveau City of Vice, mini-série qui avait si bien su me plonger dans l'envers glaçant du décor londonien.

Débutée ce dimanche 30 décembre 2012 (le pilote a rassemblé environ 6 millions de téléspectateurs), Ripper Street ne manquait cependant pas d'atouts : outre un solide casting (Matthew Macfadyen, Jerome Flynn), elle se propose de nous faire suivre des enquêtes dans le tristement célèbre quartier de Whitechapel, où a sévi Jack l'Eventreur à la fin du XIXe siècle. Ce premier épisode pose d'ailleurs de manière convaincante l'ambiance sombre attendue, avec tout un arrière-plan social et criminel qui a incontestablement du potentiel. Reste à vérifier si le fond policier suivra ; je reste pour l'instant sur la réserve. 

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Ripper Street débute à Londres en 1889. Le dernier meurtre de Jack l'Eventreur remonte à quelques mois déjà. L'identité du serial killer demeure toujours une énigme irrésolue dont la police n'a pu venir à bout. A défaut d'arrestation, ce qui contribue à une défiance exacerbée à l'encontre des forces de l'ordre, la population du quartier de Whitechapel en est réduit à s'interroger : a-t-il définitivement cessé sa série morbide ? Quand la série comment, ses habitants réapprennent tout juste à vivre sans la peur qu'a fait peser sur eux l'ombre du serial killer, tandis que les premiers Ripper Tours voient déjà le jour.

Mais, dans ce premier épisode, un nouveau meurtre de femme a lieu, relançant les spéculations sur un possible retour de Jack l'Eventreur. La division de police en charge de Whitechapel, minée par son insuccès à capturer le tueur, mène donc l'enquête dans des conditions difficiles. Navigant dans les bas-fonds londoniens, le DI Edmund Reid, assisté du DS Bennett Drake, conduit l'investigation. Ils sont aidés d'un ancien chirurgien de l'armée américaine, qui a été un temps un Pinkerton, Homer Jackson. Si le souvenir de Jack l'Eventreur est dans tous les esprits, ils vont pouvoir mesurer que la ville renferme bien des horreurs criminelles au-delà du serial killer...

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Le premier atout de Ripper Street tient à son exploitation particulière de Jack l'Eventreur : il ne s'agit pas de le mettre en scène, mais de raconter comment la vie - et la criminalité - reprennent leur cours après le passage du serial killer. En proposant la reconstitution appliquée d'un quartier encore traumatisé par les meurtres, le pilote capture à merveille une atmosphère lourde, où le sordide et la débauche côtoient une violence omni-présente. Evoquer les dessous de ce quartier populaire où toutes sortes d'activités illégales prospèrent permet aussi à la série d'éclairer de manière particulière le rôle de la police : non seulement il lui est difficile, voire impossible, de réguler ces lieux, mais en plus - cela nous est rappelé de façon constante tout au long de l'épisode - les forces de l'ordre ont failli dans cette seule enquête que tous auraient voulu voir résolue, celle de Jack l'Eventreur. Tout l'enjeu va être de voir comment les policiers vont poursuivre leur mission, vis-à-vis du quartier, mais aussi par rapport à eux-mêmes et aux doutes, voire aux obsessions, que réveille désormais instinctivement en chacun l'évocation du serial killer.

Cette ambiance particulière et ces enjeux propres au Whitechapel de 1889 contribuent à forger pour la série une identité qui lui est propre et une tonalité, qui sont les meilleurs arguments de ce pilote pour fidéliser le téléspectateur. Car, dans son versant policier, Ripper Street présente des ingrédients extrêmement familiers, souffrant ici sans doute de passer après un certain nombre de crime period dramas. C'est-à-dire que, comme toute série de ce genre, elle développe quelques thèmes bien connus : les premiers pas d'une forme de médecine légale, les moeurs policières particulières propres à l'époque... Autant de ressorts narratifs qui apparaissent inévitables pour une reconstitution historique. De même, la distribution des rôles au sein du trio d'enquêteurs sonne très classique. Cependant, au cours du pilote, se perçoit une dynamique naissante entre les trois personnages qui ne manque pas d'attrait. A côté des deux figures policières, c'est peut-être le chirurgien américain qui offre la variable la plus intriguante, avec un passé qui s'esquisse chargé. Tout cela donne envie d'en savoir plus sur eux, ce qui est l'essentiel dans un pilote.

La principale limite de ce premier épisode tient à la manière dont est construite l'enquête du jour. Pas toujours très inspirée dans ses développements, empruntant allègrement quelques raccourcis un peu artificiels, la gestion de cette investigation ne convainc pas totalement. Or la solidité des intrigues policières est d'autant plus importante que Ripper Street semble s'orienter vers un format procédural. A la décharge des scénaristes, il faut reconnaître que cette première enquête est avant tout nécessaire pour faire le lien avec Jack l'Eventreur. Le meurtre d'une femme, et tous les démons qu'elle réveille dans le quartier, permet de dépeindre tout le background particulier dans lequel la série va évoluer. En cela, l'enquête sert avant tout d'introduction, justifiant pour le moment la relative indulgence du téléspectateur. La bande-annonce du deuxième épisode laisse de plus entrevoir une diversité des intrigues criminelles qui est à surveiller.

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Sur la forme, Ripper Street est une série soignée. Dotée d'une photographie qui sied particulièrement à l'atmosphère des bas-fonds londoniens, avec son lot de misère humaine, de dérives et d'excès, elle est un period drama appliqué qui sait happer le téléspectateur dans le tourbillon de noirceur qu'est la vie du quartier de Whitechapel. Il faut noter également une omni-présence musicale, avec une bande-son portée par des airs rythmés, qui contribue bien à construire l'ambiance, même si la série gagnerait aussi à être capable parfois de pauses et de silences. Côté générique, celui de Copper était sans doute ce que la série avait le mieux réussi ; celui de Ripper Street se défend, et se révèle plutôt efficace, sans autant marquer que sa consoeur américaine (cf. la 2e vidéo ci-dessous).

En revanche, s'il est un aspect que Ripper Street pourra exploiter à son avantage, c'est la solidité d'ensemble de son casting. Le rôle d'Edmund Reid est confié à Matthew Macfadyen (Warriors, Spooks, Les piliers de la Terre, Any Human Heart) qui, égal à lui-même, s'en sort de manière convaincante. A ses côtés, on retrouve Jerome Flynn (Game of Thrones) qui, dans ce premier épisode, reste un peu en retrait, mais on peut lui faire confiance pour s'imposer dès que le script le lui permettra. Pour compléter le trio d'enquêteurs, Adam Rothenberg (The Ex List) incarne l'esprit d'initiative américain, avec un personnage déjà nuancé qui est celui qui intrigue le plus au terme du pilote. Quant aux présences féminines, elles doivent encore s'affirmer. On devra pour cela compter sur MyAnna Buring (White Heat), Charlene McKenna (Raw) ou encore Amanda Hale (The Crimson Petal and the White).

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Bilan : Au final, le pilote de Ripper Street mérite le détour pour l'ambiance des bas-fonds londoniens qu'il parvient bien à recréer, posant une tonalité sombre qui lui est propre. Il pourra aussi compter sur un casting convaincant, avec un trio d'enquêteurs qui laissent entrevoir du potentiel. Son versant policier apparaît cependant pour le moment plus faible - notamment dans l'enquête de l'épisode. L'enjeu d'un crime period drama est de trouver l'équilibre entre reconstitution historique et policier. La balance penche plutôt vers le premier élément pour le moment. Mais la fonction introductive du pilote peut expliquer cela. La série ne manque cependant pas d'atouts. Son orientation future est donc à surveiller. Pour ma part, je compte poursuivre la saison.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :


Le générique de la série :