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05/05/2013

(US) The Americans, saison 1 : jeux de miroirs faussés entre soviétiques et américains

 
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Retour aux Etats-Unis en ce dimanche ! Il faut dire que cette première moitié d'année 2013 est assez positive dans le petit écran américain. Il y a les valeurs sûres pour me confirmer tout le bien que je pense d'elles, avec une saison 4 de Justified qui a été à la hauteur (et sur laquelle il faut vraiment que je prenne le temps de revenir prochainement). Côté nouveautés, j'ai été agréablement surprise par une nouvelle venue dans le monde des séries, Sundance Channel, qui m'a conquise avec Rectify. Et j'ai même replongé dans les grands networks US grâce à Hannibal (qui, au vu de ses audiences, risque de ne pas échapper à la malédiction frappant invariablement toute nouveauté de networks que j'aime...).

En attendant de revenir sur toutes ces fictions, le billet du jour est consacré à une série dont j'ai déjà parlé il y a plusieurs mois, et dont la première saison s'est achevée ce mercredi aux Etats-Unis : The Americans. Le pilote s'était révélé très convaincant, les 12 épisodes qui ont suivi ont-ils confirmé les promesses entrevues ? Si je me suis beaucoup attachée à cette série, que j'ai suivie sans jamais prendre le moindre retard (un signe qui ne trompe pas), il aura cependant manqué quelque chose à cette première saison pour faire d'elle une fiction incontournable. Elle n'en reste pas moins une bonne série, solide, enthousiasmante à l'occasion. Nul doute que je serai au rendez-vous pour la saison 2.

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Rappelons brièvement l'histoire : se déroulant dans les années 80, The Americans met en scène un couple d'Américains en apparence ordinaires, Phillip et Elizabeth Jennings, qui derrière leur vie de famille bien rangée sont en réalité des agents soviétiques infiltrés aux Etats-Unis. Ils accomplissent pour leurs supérieurs diverses missions - de la collecte de renseignements à la capture ou à l'assassinat d'individus -, tout en tentant de préserver une façade de normalité qui leur permet de donner le change face au monde extérieur. Ce concept de départ a pour conséquence de fusionner vie privée et responsabilités professionnelles, chacune étant emboîtée dans l'autre, et la première servant à mener à bien les secondes. Cela permet un intéressant mélange : derrière le récit d'espionnage aux codes narratifs classiques pour ce genre, The Americans est une fiction relationnelle. User des sentiments pour parvenir professionnellement à ses fins se généralise d'ailleurs au fil de la saison, une relation prenant même un tournant inattendu au cours duquel les rapports de force s'inversent.

Cependant, c'est le couple Jennings qui demeure le sujet principal. Si la série échoue à exploiter de manière convaincante le parallèle potentiel entre ces derniers et leurs voisins, le couple de l'agent du FBI restant trop superficiel et plat pour intéresser, la caractérisation des deux agents soviétiques est en revanche autrement plus soignée et inspirée. Il faut dire que les divergences existant entre Elizabeth et Phillip avaient clairement été établies dès le pilote : ils abordent différemment aussi bien leur mariage, que leur mission en général. A partir de là, cette première saison joue sur ces deux ressorts pour rendre leur relation très mouvante, chacun semblant s'accrocher à ses certitudes ou chercher des repères par trop vacillants. Ce qui explique que The Americans renvoie parfois l'impression d'avancer d'un pas, pour ensuite reculer de deux, et enfin en sauter trois. Cependant sa grande réussite est de parvenir à capturer les dilemmes et les dualités de ce couple atypique. Bénéficiant d'une écriture engageante, assez fine psychologiquement, la série surprend ainsi tout particulièrement par sa faculté à nous impliquer dans les retombées personnelles de ces jeux d'espions qui n'en demeurent pas moins létaux.

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The Americans aborde certes le thème du couple - avec une base de départ assez unique -, mais elle reste une série d'espionnage. Elle gère d'ailleurs plutôt bien le dosage entre ces deux éléments. Les missions mises en scène ont ce côté besogneux, parfois anecdotique ou inutile, des fictions d'espionnage qui refusent de glamouriser cette profession. Le spectaculaire n'est pas le quotidien des protagonistes, et c'est tant mieux. Ce qui est au coeur de The Americans, c'est l'idée de l'infiltration : opérer en sol étranger et s'y fondre. Il s'ensuit un véritable jeu de miroirs faussé entre russes et américains. Cet aspect est un des éléments les plus intéressants de la série - même si elle ne l'exploite pas toujours pleinement. Autour d'une trame commune, elle nous fait vivre en parallèle plusieurs visions subjectives distinctes, des divergences se faisant jour au sein même de chaque camp.

Un des épisodes les plus intéressants de la saison est le quatrième, In Control. Il traite de la manière dont les soviétiques reçoivent et analysent un fait historique bien réel, la tentative d'assassinat sur le président Reagan. L'épisode montre combien chacun extrapole alors sur le futur des Etats-Unis, à partir d'informations parcellaires, avec des outils d'analyse personnels biaisés par une culture et par une compréhension des fondations du pays qui lui est propre. Ce thème des différences de mentalités revient également dans la relation qui se noue entre l'agent du FBI, Stan, et sa taupe à la rezidentura, Nina : il est perceptible dans leurs échanges, mais aussi dans l'évolution que connaît leur rapport. Le concept choisi par la série l'oblige à éviter tout manichéisme dans la mise en scène des deux camps. Par ses incursions dans les différences de perception de chacun - mais aussi en montrant leurs similitudes (l'écho que trouvent les différentes morts auprès des protagonistes), The Americans tient un sujet fascinant d'ambivalence, qui mériterait vraiment d'être exploré jusqu'au bout.

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Si ce ne sont ni les bonnes idées, ni le potentiel d'ensemble, qui font défaut à The Americans, il manque quelque chose à la série pour faire d'elle une grande. En premier lieu, c'est l'intensité qui pose problème dans certains épisodes. La série suit des intrigues souvent bien construites et exécutées de façon fluide, mais tout y semble toujours très calibrée, avec une relative prévisibilité qui empêche la tension de monter. De plus, on a l'impression que la fiction, du fait de son concept, se voit contrainte de préserver un statu quo qu'elle n'ose remettre en cause : il ne peut être envisagé que les protagonistes principaux (les Jennings et Stan) soient en danger, du moins pour le moment. Peut-être rejoint-on aussi ici une limite de l'historique : faire revivre la Guerre froide est intéressant, mais tout ne peut pas arriver. Si la série a démontré sa capacité à intégrer grande et petites histoires, il lui reste à montrer qu'elle saura quand il le faudra redistribuer les cartes. L'épisode final est assez révélateur des forces et limites de The Americans : il amène remarquablement le danger sur le couple - avec deux premiers tiers assez magistraux -, pour ensuite déjouer le tout par une simple course poursuite, avec des conséquences limitées sur la situation de chacun.

Le choix d'une retenue qui peut s'interpréter comme de la sobriété se retrouve dans le visuel de la série : pour nous plonger dans une ambiance 80s', outre une bande sonore marquée par cette époque (mais dont les chansons emblématiques restent utilisées avec une parcimonie bienvenue), The Americans fait le choix d'un esthétique un peu terne qui, visuellement, se rattache à cette période, loin de toute reconstitution flamboyante. Enfin, la série a le mérite de pouvoir s'appuyer sur un casting convaincant. Keri Russell (Felicity) et Matthew Rhys (Brothers & Sisters, The Mystery of Edwin Drood, The Scapegoat) n'y sont pas pour rien dans l'attachement et l'implication que leurs personnages peuvent susciter. En soutien, Margo Martindale délivre une prestation comme toujours admirable de maîtrise dans un rôle très ambigu qui, jusqu'au bout, prendra le contre-pied de bien des attentes et saura révéler de nouvelles facettes. Face à eux, Noah Emmerich dispose d'un personnage moins attrayant qui, cependant, forme un pendant assez naturel aux agents du KGB qu'il traque.

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Bilan : The Americans signe une première saison très solide et intéressante. La série a réussi son premier objectif : celui d'impliquer le téléspectateur auprès de son couple central, agents du KGB qu'elle est parvenue à humaniser, entremêlant habilement problématiques relationnelles et jeux d'espions. Elle laisse cependant l'impression de ne pas avoir toujours su exploiter pleinement le potentiel extrêmement riche de son concept et de toutes les thématiques qu'il permet d'aborder. C'est une bonne série à laquelle je me suis beaucoup attachée, mais elle demeure certainement perfectible. J'attendrai la saison 2 avec impatience, en espérant que les scénaristes auront appris de leurs limites au cours de cette première saison pour que The Americans acquiert toute l'intensité et l'ampleur qu'elle mérite, et qui est certainement à sa portée.


NOTE : 7,75/10


Le générique de la série :

BONUS - La chanson sur laquelle cette saison se conclut (Games without frontiers) :


Commentaires

Je viens de finir la saison 1 et je te rejoins : c'est une bonne série mais son parti pris empêche qu'on est vraiment peur pour les protagonistes ! Même la fin où j'espère que leur fille découvre un indice, n'imoorte quoi, m'a déçue ! Il faut qu'il arrive à faire évoluer leur série de ce point de vue là !

Écrit par : JainaXF | 05/05/2013

Je n'ai vu que les 5 premiers épisodes et ne sais toujours pas quand, ni si, je vais regarder la suite.
Ce n'est pas une mauvaise série, mais le traitement est un peu fade et (car ?) terriblement balisé.
De fait il manque la tension (un comble vu le sujet abordé) nécessaire pour accrocher le téléspectateur.
Les acteurs sont bons et j'ai été plus que surpris par l'étendue du jeu de Matthew Rhys (en même temps, il n'avait pas grand chose à défendre dans la navrante BROTHERS & SISTERS...).
Une série à fort potentiel, malheureusement mal exploité.

Écrit par : Jérôme | 06/05/2013

Oyo,
j ai vraiment apprécie cette série déjà pour découvrir keri russell qui joue la femme forte pleine de convictions et la fragilité dans les sentiments.
bonne retranscription de l ambiance 80 entre le post 70 flower power et et la transition libérale de Reagan.
c est vrai aussi que les relations entre les couples sont mieux construites que les complots d espionnages qui sont sensés donnés du piment et du rythme à la série. moins subtile et crédible qu un Hatufim S2
Cela reste du tout bon, peut mieux faire plus de cliff hanger et une meilleur BO serait la bienvenue pour la saison 2
Ride

Écrit par : Dibs | 19/05/2013

Une bonne petite série distrayante.
En n'étant pas trop regardant, on pourrait même aller jusqu'à trouver ça bien.
Ceci dit, j'ai bien peur qu'il ne s'agisse une fois de plus que d'une série prisonnière de son pitch, tout intéressant et original qu'il puisse paraître à l'origine.
D'ailleurs, la deuxième partie de la saison pédale déjà pas mal dans la semoule en n'offrant rien de bien neuf et en tentant de masquer le surplace avec des procédés prévisibles et malheureusement un peu trop artificiels.
Bon, c'est peut-être le genre qui veut ça...
Pas certain que je serai au rendez-vous pour la deuxième saison.

"The Americans aborde certes le thème du couple - avec une base de départ assez unique -, mais elle reste une série d'espionnage. Elle gère d'ailleurs plutôt bien le dosage entre ces deux éléments. Les missions mises en scène ont ce côté besogneux, parfois anecdotique ou inutile, des fictions d'espionnage qui refusent de glamouriser cette profession. Le spectaculaire n'est pas le quotidien des protagonistes, et c'est tant mieux."

Je suis en gros d'accord avec l'ensemble de ta chronique mais pas avec cette partie.
Personnellement, je trouve au contraire que le spectaculaire est beaucoup trop présent. Dans le sens où l'accumulation de missions dangereuses et tutti quanti dans un si court laps de temps pour un couple d'agents infiltrés depuis si longtemps me parait vraiment peu crédible.
Je conçois que la série a besoin du schéma "un épisode - une mission" pour intéresser son public, mais cette option me parait être vraiment en contradiction avec la capacité de développer de manière crédible le côté banal qu'un couple infiltré doit absolument conserver s'il veut conserver la moindre chance de ne pas se faire prendre.
Ce truc, ça m'a régulièrement fait complètement sortir de la série.
Par exemple, jamais leur "vraie" vie professionnelle (ils sont quand même agents de voyage) ou leur vie de famille ne vient parasiter leurs activités d'espionnage. Genre, y a jamais un de leurs deux gosses qui tombe malade pendant la nuit et merde pas de chance, papa et maman sont pas là. Genre, le couple vagabonde à peu près toutes les nuits et personne ne s'en rend compte. Non, et en plus, ils continuent à travailler pendant la journée , à s'occuper des enfants, à faire à manger,... Purée, deux semaines à ce rythme-là et je suis sur les rotules hein... et je sais ce que c'est que de travailler et de s'occuper de deux gosses.
Bon, c'est vrai, je n'ai pas eu d'entraînement spécial du KGB... Ca doit être ça. :)

Écrit par : Fred | 22/05/2013

@ JainaXF : On va dire que la dernière scène, à défaut d'indices trouvées, est la preuve que les enfants sont rentrés dans un âge où les techniques de leurs parents pour s'absenter et mener leur vie d'espion ne vont peut-être plus suffire pour donner le change. Mais oui, c'est frustrant de préserver aussi rigidement le statu quo.

@ Jérôme : Si les 5 premiers épisodes ont eu du mal à t'accrocher, je pense que la suite ne te conviendra pas plus. Le problème de tension, ou prévisibilité, reste inchangé, la faute à ce calibrage que tu pointes. Le fait que cela soit bien exécuté permet pour moi de compenser cette limite, mais je comprends qu'on puisse avoir du mal à la dépasser.
Sinon pour le jeu de Matthew Rhys, il faut jeter un oeil à ses dernières fictions UK avant The Americans (The Mystery of Edwin Drood, ou surtout The Scapegoat, un téléfilm où il incarne deux personnages différents). Et puis prochainement sur la BBC, il va reprendre un rôle emblématique s'il en est, celui de Mr Darcy. Donc à suivre. ;)

@ Dibs : Il est grand temps que je me lance dans la s2 de Hatufim. J'hésite entre elle ou la s3 de Borgen. Trop de choses à regarder, pas assez de temps !

@ Fred : "Bon, c'est vrai, je n'ai pas eu d'entraînement spécial du KGB... Ca doit être ça. :)"
Tu es un naïf téléspectateur qui ignore tout des super-entraînements des super-agents O;-)

Plus sérieusement, je pense qu'il y a sans doute une part de "suspension of disbelief" requise du téléspectateur en s'installant devant pour permettre à la série de mener à bien un tel concept. Sur ce point, je me suis laissée divertir sans arrière-pensée par la série, et je ne lui en tiens pas rigueur.
Mais ce problème du surplace, de la difficulté à bouger certaines variables (comme les enfants) est en effet une limite ; et la saison 2 sera déterminante pour savoir si The Americans peut vraiment aller plus loin.

Écrit par : Livia | 28/05/2013

"Plus sérieusement, je pense qu'il y a sans doute une part de "suspension of disbelief" requise du téléspectateur en s'installant devant pour permettre à la série de mener à bien un tel concept. Sur ce point, je me suis laissée divertir sans arrière-pensée par la série, et je ne lui en tiens pas rigueur."

Oui, je suis bien d'accord.
Mais j'ai toujours quelques réticences par rapport à toutes ces séries qui prennent le parti de creuser la normalité à partir d'une situation qui en est aux antipodes. Elles se retrouvent malheureusement bien souvent le cul entre deux chaises sans pouvoir exceller ni dans un registre ni dans l'autre.
Pourtant, le feuilleton télévisée est vraiment l'endroit rêvé pour réussir ce type de projet.
Mais bon, il faut reconnaître que les Soprano, qui ont un peu initié le concept, ont d'emblée posé la barre très très haut.

Écrit par : Fred | 29/05/2013

La petite historienne en moi a surtout aimé de voir un côté de la guerre froide que l'on voit assez peu ou sinon sous un angle assez caricatural. C'est assez étrange de s'attacher à des personnages qui font partie d'un camp qui va perdre c'est sûr mais je trouve ça intéressant.

Écrit par : jessica | 30/06/2013

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