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14/10/2010

(Pilote UK) Thorne : récital efficace de classiques policiers

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Si j'écris souvent que le genre policier rencontre plus difficilement mes faveurs téléphagiques actuellement, il est nécessaire de nuancer cette affirmation. Car la lectrice assidue de polars que je suis demeure profondément attachée à ces récits. Dans la mesure où elles se situent à l'opposé des simples formula show calibrés à l'excès ou de la prévisibilité désincarnée et déshumanisée d'un cop-show CBS-ien, des fictions comme Wallander, Prime Suspect ou encore Wire in the blood (La Fureur dans le sang) ont pu être ou constituent toujours des valeurs téléphagiques sûres que j'apprécie tout particulièrement.

Or, cette semaine, la télévision anglaise proposait de quoi rassasier mon amour du policier. Non seulement lundi marquait le retour de Whitechapel sur ITV, poursuivant son chemin à travers l'histoire criminelle britannique en étant confrontée, après un copycat de Jack l'Eventreur, à l'ombre des jumeaux Kray ; mais de plus, la veille, par un dimanche soir très chargé sur les chaînes britanniques (Downton Abbey s'étant installée à un niveau d'audience si confortable que ITV a déjà commandé une saison 2 - pour mon plus grand plaisir -, et BBC1 lançant une mini-série dramatique attendue, Single Father), c'est sur Sky One qu'une autre série débutait : Thorne.

Adaptée des romans policiers de l'écrivain Mark Billingham, les six épisodes commandés couvrent deux enquêtes - les deux premiers romans, Sleepyhead (publié en 2001) et Scarety Cat (2002) - d'un personnage récurrent chez cet auteur, le DI Tom Thorne, interprété par David Morrissey.

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Ce premier épisode de l'arc constitué par l'enquête relatée dans Sleepyhead se réapproprie efficacement tous les codes narratifs du policier, posant le cadre d'une chasse toujours aussi prisée à l'écran, celle du serial killer. Si l'histoire s'inscrit dans la droite ligne du genre, elle le fait cependant avec une réelle habileté, sans lourdeur, ni excès, sachant profiter de l'effet glaçant procuré par les crimes mis en scène que l'état de la seule survivante du tueur ne fait qu'accentuer. C'est le hasard d'une course-poursuite qui va placer les policiers face à des crimes jusqu'alors commis impunément sans que ne soit jamais identifiée la vraie cause du décès : les morts de plusieurs jeunes femmes ont ainsi trop rapidement été classées comme naturelles. L'autopsie minutieuse du cadavre d'une nouvelle victime, que découvrent Thorne et ses collègues au début du pilote, va leur révéler un mode opératoire d'exécution des plus glaçants.

Remontant le fil des morts classées au cours des derniers mois, ce sont plusieurs affaires similaires qui sont exhumées des archives policières. Et, surtout, c'est à l'hôpital que s'achève leur recensement de victimes potentielles, auprès d'une jeune femme qui semble être la seule survivante du rituel létal suivi par le serial killer, la laissant, de manière peut-être encore plus cruelle, entièrement paralysée mais consciente, comme prisonnière dans sa propre enveloppe charnelle, son corps ne lui répondant plus hormis pour les muscles lui permettant de battre des cils. Le DI Tom Thorne prend cette affaire particulièrement à coeur, ayant du mal à se détacher de cet être désormais inerte, mais toujours vivant, qui occupe une des chambres de l'hôpital. Tout en nous glissant dans le quotidien de l'unité policière enquêtant sur ces meurtres, l'épisode esquisse peu à peu les contours de son personnage principal, une figure avec ses zones d'ombre et encore beaucoup de non-dits à l'écran, qui fonctionne principalement à l'instinct et par impulsion.

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Classique dans ses ressorts scénaristiques et la distribution des rôles qu'il opère entre les protagonistes policiers, ce premier épisode installe un cadre globalement convaincant. L'épisode opte pour une approche encore superficielle du relationnel entre ses différents personnages, tout en parsemant sa narration de suffisamment de références glissées au détour des conservations, pour orienter le téléspectateur ou aiguiser sa curiosité. De manière générale, il n'y a pas de difficulté pour identifier la dynamique des plus familières qui joue au sein de l'unité de police : du rookie ambitieux qui souhaite s'imposer, jusqu'au fragile équilibre installé entre le policier instinctif, un peu déconnecté, qu'est Thorne, et son partenaire rationnel rejetant le ressenti hors de ses analyses et déductions, c'est donc une distribution sans réelle surprise, mais efficace, qui se dévoile.

Si, en elle-même, l'enquête ne présente pas d'originalité particulière dans son traitement, l'approche va prendre une tournure plus ambitieuse et recherchée en choisissant de s'arrêter sur le destin de la seule victime encore vivante. Témoin paradoxalement réduit au silence par son infirmité, plongée dans une confusion quant aux faits s'étant produits qui ne l'empêche pas de comprendre son état et sa situation désspérée, Thorne n'hésite pas à nous placer de son point de vue. La caméra emprunte ainsi les yeux de la jeune femme, tandis que certaines scènes nous glissent directement dans ses pensées, troublantes de cohérence. Ce procédé narratif consistant à proposer au téléspectateur de s'identifier ainsi à la victime constitue sans doute l'originalité la plus marquée de cette enquête policière. C'est une façon efficace de renforcer le caractère glaçant des meurtres et d'accentuer finalement ce léger malaise qui se forme face à l'affaire.

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Tout en installant de manière convaincante et plutôt prenante ce premier acte, Thorne prend également le temps de trouver peu à peu ses marques esthétiquement parlant. Un réel effort a en effet était fait de la part du réalisateur, Stephen Hopkins. Outre une utilisation un brin confuse de flashbacks qui laisse pour le moment le téléspectateur quelque peu dans l'expectative, Thorne bénéficie surtout d'une photographie aux couleurs assez éteintes qui semble servir de reflet à cette forme de pessimisme ambiant un peu oppressant qui règne sur tout l'épisode. Cela accentue, avec une certaine classe, l'impression de polar sombre d'une enquête dont les crimes glaçants ne peuvent laisser insensible le téléspectateur.

Enfin, atout non négligeable, Thorne rassemble un casting appréciable, même si le scénario du premier épisode ne permet pas encore pleinement d'en prendre la mesure. Je ne vous cache pas que David Morrissey (State of Play, Meadowlands, Blackpool) fait partie de cette poignée d'acteurs britanniques que j'apprécie tout particulièrement et dont j'aime suivre les parcours téléphagiques. A ses côtés, nous retrouvons Eddie Marson (Little Dorrit, Criminal Justice), Natasha McElhone (Californication), mais également Aidan Gillen (The Wire, Identity).

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Bilan : Polar aussi classique qu'efficace, c'est autant une enquête qu'une ambiance que ce premier épisode de Thorne s'attache à installer avec conviction et sobriété. S'il reste encore à explorer plus avant une dimension humaine peut-être trop négligée, le téléspectateur n'a cependant aucun mal à rentrer dans cette histoire, une enquête somme toute fort prenante, servie par une narration sans temps mort, dont l'intensité culmine au cours des dernières minutes de l'épisode. La tournure que prennent les évènements dans ce cliffhanger qui est presque un cas d'école, à défaut de vraiment inquiéter, devrait assurer la fidélité de téléspectateurs désormais bien accrochés au récit. 

Reste donc à Thorne à confirmer dans la durée, à travers les deux arcs qui vont rythmer ses six épisodes, le potentiel indéniable que ce premier volet laisse entrevoir.

  
NOTE : 6,75/10


La bande-annonce :

13/10/2010

(K-Drama / Pilote) Doctor Champ : une partition classique étonnamment rafraîchissante

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Il devait être écrit que je ne quitterais pas immédiatement les rêves olympiques et les ambitions dorées londoniennes. Après GOLD la semaine dernière, c'est un drama, de facture plus classique mais assûrement attachant, qui va être le sujet du mercredi asiatique de la semaine. Qu'on se le dise, l'Asie prépare assidûment les prochains Jeux Olympiques. Télévisuellement du moins.

Ce que j'aime par dessus tout dans la téléphagie, ce sont les surprises. Les séries attendues qui nous plaisent, on se situe dans un certain ordre des choses. Les surprises qui nous font passer une agréable fin de soirée devant notre petit écran, alors que l'on ne l'avait pas prévu pas, en revanche, voilà un peu de piment fort attrayant. Car ce ne sont pas toujours les séries dont on parle le plus a priori qui vont retenir finalement notre attention à plus long terme. La dernière semaine de septembre en est une parfaite illustration. Le buzz médiatique conduisait logiquement à surveiller Fugitive : Plan B sur KBS2, série navigant (ou s'embrouillant) entre action et second degré comique. Or, deux jours plus tôt, c'est une série dont j'ai visionné le pilote un peu par hasard, sans attente particulière, Doctor Champ, qui présentait un premier épisode autrement plus convaincant.

Si ma conscience téléphagique m'avait conduit devant Doctor Champ, c'est sans doute en partie pour Kim So Yeon, qui avait été une de mes bonnes surprises d'IRIS, pour laquelle j'avoue garder une certaine affection, même si Prosecutor Princess eut du mal à me convaincre au printemps dernier. Ayant débuté le 27 septembre 2010 sur SBS, c'est sur des bases plus attrayantes et sympathiques qu'est parti Doctor Champ, dans un registre assez familier où se mêlent sport & relationnel.

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Tout débute logiquement par de grands bouleversements dans la vie de chacun des protagonistes, qui vont les conduire, pour des raisons et par des chemins divers, au fameux Taereung National Village, le centre d'entraînement olympique sud-coréen.

Ambitieuse et pleine de certitudes, Kim Yeon Woo avait une vie parfaite, épanouie professionnellement comme sur le plan personnel. Brillante interne qui venait de réussir l'examen la qualifiant et lui ouvrant les portes d'un prestigieux hôpital jusqu'à cet éventuel poste de professeur qu'elle convoitait. elle sortait également avec un de ses collègues dans une relation qui lui semblait sérieuse. Mais, du jour au lendemain, un choix difficile qu'elle va avoir le courage d'assumer jusqu'au bout va briser ce cadre idyllique. Son mentor, médecin respecté, commet une erreur dans la salle d'opération qui entraîne la paralysie de la patiente. Refusant l'omerta implicite, puis explicite, qui lui est suggérée, Yeon Woo ne falsifie pas son rapport officiel et formule des accusations. Du jour au lendemain, devenue "traître", elle perd travail, petit ami et toute réputation. Un suicide de carrière en bonne et due forme.

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Dans ce cycle sans fin des mauvaises nouvelles, à la suite de divers incidents, elle fait la rencontre d'un sportif s'entraînant en vue des sélections nationales, Park Ji Heon. Judoka qui s'est remis à la compétition à la suite de la mort de son frère - évènement tragique sur lequel peu de renseignements nous sont donnés -, le jeune homme s'est promis, ainsi qu'à son neveu, d'atteindre la médaille d'or aux prochaines Jeux Olympiques. Mais si sa motivation ne fait aucun doute, son intégration au sein de l'équipe nationale de judoka pourra-t-elle se faire sans remous, lui qui n'est plus un débutant, arrivant à un âge où beaucoup ont déjà leur carrière derrière eux ?

Parallèlement, toute la direction médicale du centre d'entraînement olympique est bouleversée suite à un drame en compétition qui remet en cause le suivi des athlètes. C'est vers un médecin réputé, qui a déjà eu des résultats très probants, mais à l'égo et au caractère difficilement gérables que les instances sportives se tournent, Lee Do Wook. Décidé à compléter son staff, il formule une offre d'emploi, qui intervient alors que Yeon Woo est à bout, atteinte moralement devant les rejets en cascades de toutes ses candidatures dans les hôpitaux où elle postule. Le centre d'entraînement pourra-t-il constituer un nouveau départ pour tous ?

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Derrière ses allures de comédie romantique & sportive, qui investit sans détour un créneau finalement très familier, ce qui prend le téléspectateur quelque peu au dépourvu, le surprenant agréablement, c'est cette impression diffuse de fraîcheur qui émane de la série. Un caractère rafraîchissant qui ne réside pas dans une quelconque originalité, mais plutôt dans une sobriété d'ensemble habilement mise en scène et une capacité certaine à s'approprier des ingrédients simples qui demeurent des valeurs sûres du genre. Car si l'histoire en elle-même reprend des thématiques connues, avec une gestion du relationnel typiquement sud-coréennes, elle a le mérite de parler instantanément au téléspectateur. Bénéficiant d'un rythme dynamique et consistant, sans temps mort, Doctor Champ ne sort aucunement des sentiers balisés, mais se rélève, par la manière dont elle se réapproprie ces codes, des plus agréables à suivre. "Sympathique" est ainsi le premier qualificatif qui vient à l'esprit pour l'évoquer.

Ce ressenti est conforté par la perception que ses personnages offrent. En effet, dans la droite lignée de la narration globale, c'est avec une certaine retenue, sans trop en faire, que la série installe ses protagonistes. Si les stéréotypes ne sont jamais loin, chacun s'avère rapidement attachant. Certes, Yeon Woo dispose d'un sacré caractère et son traitement des autres internes, au début, ne manque pas de cette pointe d'immaturité pleine d'énergie, propre aux débuts des héroïnes de k-dramas. Pour autant, ces quelques poncifs de départ sont vite balayés par les évènements, la jeune femme se heurtant à un principe de réalité des plus cruels pour tenter de faire rebondir sa carrière. Si bien qu'au final, c'est une intéressante homogénéité qui caractérise la dimension humaine de Doctor Champ, conférant à l'ensemble une attractivité indéniable. Si tout demeure à concrétiser, on sent poindre derrière ces premières esquisses un potentiel réel pour la mise en scène future de relations compliquées mais attendrissantes, chargées d'une vitalité communicative. Pourquoi ne pas se prendre au jeu ?  

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Classique sur le fond, la série reste également scolaire sur la forme qui s'avère sans prise de risque particulière. Elle délivre une réalisation qui remplit le cahier des charges, des couleurs chatoyantes, et, dès le premier épisode, une jolie scène de lâchés de lanternes dans la nuit qui permet quelques plans paysage-sques des plus agréables. Il n'y a donc, somme toute, guère à redire, ni à souligner, par rapport à cet aspect. La bande-son n'est pas déplaisante à suivre, d'autant que cela s'est traduit de mon côté par un gros coup de coeur pour une des chansons utilisées en fond sonore, des plus entraînantes (My way, de Wheesung). Un accompagnement musical donc plutôt réussi.

Enfin, du côté du casting, si aucun acteur ne se démarque vraiment par son jeu dès ces deux premiers épisodes, chacun remplit son rôle et aucun ne dépareille dans l'ensemble. Je vous ai déjà dit toute la tendresse que je conserve à l'égard de Kim So Yeon (IRIS) ; cela m'a donc fait plaisir de la retrouver dans un rôle plus posé et beaucoup moins crispant que les débuts éprouvants de Prosecutor Princess. A ses côtés, Jung Gyu Woon (Loving you a thousand times) a la carrure parfaite pour jouer les sportifs confirmés, le jeu d'acteur viendra en appoint s'il s'avère nécessaire. Uhm Tae Woon (Queen Seon Deok, The Devil) s'immisce sans peine dans le rôle de ce responsable médical caractériel, qui se remet toujours difficilement d'une blessure qui l'a laissé éclopé. Enfin, ce trio est complété par Cha Ye Ryun (Invicible Lee Pyung Kang) qu'on a peu l'occasion de croiser dès ces débuts.

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Bilan : Si Doctor Champ s'approprie des ingrédients des plus classiques, la série esquisse un mélange pas inintéressant, mais surtout étonnamment rafraîchissant, mêlant des thématiques traditionnelles d'accomplissement professionnel et personnel, avec le duo amour & sport qui sert de toile de fond. Dotée de personnages attachants, d'une narration rythmée et relativement sobre qui s'avère plaisante à suivre, le téléspectateur se surprend à passer un agréable moment devant son petit écran.

Ces deux premiers épisodes proposent donc une fiction sympathique, à laquelle il est facile de s'attacher. Sans s'imposer comme une indispensable, le potentiel semble là pour construire un relationnel des plus attendrissants ; ce qui n'est déjà pas si mal. Seul l'avenir nous dira si la série a été capable de concrétiser les promesses ainsi posées.


NOTE : 6,25/10


La bande-annonce de la série :


Une chanson de l'OST :

Fall in love with you, par Bobby Kim

10/10/2010

L'heure du premier bilan et du constat des tendances de la rentrée téléphagique


 Divorce américain, coups de coeur anglais & flirts sud-coréens

Le mois d'octobre est déjà bien entamé. Septembre et l'euphorie de rentrée sont derrière nous. Déjà, il est possible de faire un premier bilan de saison, de tirer quelques orientations pour la saison 2010-2011... Or, une fois n'est pas coutume, je vais vous épargner mes états d'âme et autre pseudo-crise, car je passe actuellement de bonnes semaines téléphagiques. A défaut d'une qualité constante, le potentiel est là et m'assure d'agréables moments devant la télévision. La sériephile qui est en moi est donc satisfaite de ce début de saison 2010-2011.

Pourtant, soyons franc, si on se penche un peu plus près dans mes visionnages des dernières semaines, c'est sans doute une vue plus nuancée qui va prévaloir...

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Bilan américain... +1 ?

La "rentrée de septembre" renvoie logiquement aux Etats-Unis, puisque ce sont les grands networks qui provoquent une orgie pour pilotovore insomniaque, lançant officiellement la saison téléphagique. En ce qui me concerne, j'ai vécu une rentrée américaine assez paradoxale. J'ai picoré à droite, à gauche, dans les nouveautés, sans réel agenda, me retrouvant parfois à regarder un pilote plus par le fait du hasard, ou d'une impulsion soudaine. Au fond, j'ai fait de la téléphagie en dilettante, si bien que je n'ai parfois même pas eu le temps de m'installer devant le pilote de telle série dans laquelle j'aurais bien voulu m'investir, que cette dernière était déjà annulée ou maintenue sous diffusion artificielle. De cette rentrée des plus désorganisées, qu'ai-je donc retenu ?

J'ai bien eu le temps de visionner le pilote de Lone Star avant que le drame Fox-ien, prévisible et annoncé, n'ait lieu. La "meilleure nouveauté de la rentrée" ? Faire de Lone Star le bijou téléphagique érigé en martyr sacrificiel du méchant network qui n'a pas compris quelle série il avait commandée avant qu'il ne soit trop tard (quel "Dallas" ?) est probablement trop caricatural. Son pilote laissait entrevoir un potentiel dont on ne saura jamais s'il aurait pu se concrétiser. Le héros arnaqueur avait son charme, tout semblait bien calibré dans le décor texan de carte postale qui avait été planté... Scindé entre relents de soap non digéré et échos actuels sur les difficultés économiques, le pilote n'indiquait pas quelle voie définitive la série pourrait prendre. Lone Star aurait pu... mais n'a eu le temps que de proposer des esquisses. C'est tout. Les réactions à son annulation furent disproportionnées au vu de ce que la série avait pu construire. Restera-t-il un regret ? Certainement. Mais qui ne fait que rejoindre des dizaines d'autres que seule la mémoire téléphagique conserve avec soin...

Pour le reste, la rentrée aura été une sorte d'énième répétition des rentrées américaines précédentes avec plus de lassitude et moins de patience de mon côté. The Event ? Sérieusement, avec tout le passif que les networks américains ont en la matière, au cours de ces dernières saisons, il y en a encore une pour se lancer dans du mystéro-conspirationnisme clinquant ? Et, en plus, elle s'imagine que je serais prête à m'investir, sachant qu'au mieux, cela accouchera d'une souris, au pire, ce sera exécuté sur l'autel de l'audience avant même d'avoir eu le temps de nous mettre de la poudre aux yeux ? Non merci, je passe mon tour. Du judiciaire ? L'excessivement pompeux Outlaw m'a juste donné temps de sentir mon coeur se serrer en me souvenant de Jimmy Smits dans La loi de Los Angeles, et j'ai bien vite oublié. The Defenders ? Je ne guérirais jamais de mon crush d'adolescence pour Jerry O'Connell, certes, mais je ne peux regarder une série sur ce seul argument (même si je veux bien reconnaître au pilote un certain potentiel). Le policier serait-il plus convaincant ? Michael Imperioli n'a pas réussi à ce jour à me motiver pour tester Detroit 1-8-7. En revanche, les cinq dernières minutes du pilote de Blue Bloods m'auraient presque convaincue de laisser une chance à l'épisode suivant. Presque. Parce que l'arrière-goût de déjà-vu lancinant qui l'a accompagnée tout le long de ses quarante minutes a été trop lourd à digérer pour que j'ose y remettre les pieds. Je me soupçonne d'avoir développé une certaine allergie au genre policier qui se soignera en prenant un peu de distance. Et un classique spy game, genre que j'apprécie tellement ? Par charité, je vais tâcher d'oublier que Undercovers a jamais été créé. Et du côté des comédies, me direz-vous ? Comme vous le savez, je ne regarde pas de comédie. Ou du moins, j'entretiens une relation compliquée avec elles. Dans mon cahier des charges, j'en suis encore à essayer de me motiver pour lancer la première saison de Community ou de Modern family, alors pour ce qui est des toutes dernières comédies... On a bien le temps. Enfin, un peu à part, My Generation était annulée avant que je puisse trouver le temps de m'y mettre.

Le bilan comptable de ce mois de septembre aux Etats-Unis est donc à +1 série dans mes programmes (Boardwalk Empire). Une rentrée nulle qui, j'espère, se corrigera avec le temps et les échos d'autres téléphages. L'an dernier, j'avais bien raté le démarrage (corrigé depuis) de The Good Wife.

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Un divorce consommé avec les grands networks US...

Si mes grilles américaines sont à ce point sinistrées, comment puis-je me déclarer satisfaite de ma rentrée téléphagique ? Ceci s'explique sans doute par ce fameux processus dont je vous parle depuis des mois et qui s'est probablement parachevé en septembre : désormais, les Etats-Unis occupent un peu le rôle du pays du fond de la classe téléphagique, que l'on va chercher en guise d'appoint, pour compléter les trous. Pensez que ma consommation de séries américaines est tombée en dessous de ma consommation de séries... japonaises ! Qui l'eut cru... Certainement pas moi lorsque j'ai commencé ce blog il y a presque un an.

De manière assez paradoxale, ce qui m'a le plus dérangée, voire énervée, en cette rentrée 2010, ce fut de suivre la destinée des séries liée aux chiffres d'audience tombant tel un couperêt le lendemain de leur diffusion. J'ai découvert que je n'avais plus envie de m'investir dans des fictions ayant une épée de Damoclès au-dessus de la tête, pouvant ainsi disparaître au bout de 2 épisodes. Me lancer dans telle ou telle série des grands networks US revenait à me donner la désagréable impression de jouer à la roulette russe... Vous allez m'objecter à juste titre que ce fonctionnement a toujours existé. Sauf qu'à présent, j'ai goûté à un autre traitement du téléspectateur sous d'autres latitudes. A qualité égale, pour suivre "en direct du pays original de diffusion" une série, je choisirais toujours celle dont je sais que sa saison - ou la série en elle-même - ira jusqu'à son terme. Pas de déprogrammation intempestive. Pas d'angoisse inutile à attendre les derniers chiffres tomber. Un contrat clair pré-établi, avec un minimum de certitudes : voilà ce dont j'ai besoin pour être prête à m'investir. Et si les séries des grands networks n'étaient désormais visionnables qu'en rattrapage a posteriori sur support DVD ?

Entre leurs saisons interminables, devenues trop longues à mon goût, et leur démarrage au futur trop incertain, auquel s'ajoute la faible qualité globale, il semble que le divorce soit donc consommé entre les grands networks US et moi. Cependant, je crois en la vertu des cycles téléphagiques. Même s'il est hors de question que, sous un prétexte de "culture sériephile" (parce que, oui, ma conscience râle et me titille un peu quand même), je me force à regarder (j'aurais trop peur de m'écoeurer), je continue donc de suivre normalement l'actualité, lire les opinions des uns et des autres... A mon avis, ce dont j'ai surtout besoin, c'est d'une bonne dés-overdose. Un vrai sevrage. Prendre un peu de recul pour ne plus avoir la désagréable impression de voir défiler le cahier des charges de la chaîne quand je regarde telle ou telle série des grands networks. Le charme et la magie opèreront à nouveau dans deux ou trois ans. Qui sait, d'ici là, peut-être que les scénaristes auront retrouvé une créativité.

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Mais un horizon téléphagique au beau fixe...

Si mon horizon téléphagique me paraît pourtant dégagé, c'est que dans les trois pays dont je suis également les productions et qui précédent désormais les Etats-Unis, en revanche, tout est beau fixe.

Tout d'abord, il y a les sirènes anglaises qui n'ont jamais aussi bien fonctionné. En nouveauté, Downton Abbey m'éblouit et me ravit, son seul défaut étant le sentiment de frustration qu'elle me laisse à la fin de ses trop brefs épisodes. Whites a un certain charme, me sert de caution humoristique ("oui, je suis une comédie actuellement"), et remplit un peu la case que Rev. occupa cet été dans mes programmes. Par ailleurs, les mini-séries se succèdent. Bouquet of Barbed Wire a joué efficacement sur un sentiment diffus de fascination/répulsion, sa brève durée lui permettant de maintenir jusqu'au bout cette ambivalence. Et pour ce qui est du programme à venir, il est alléchant : ce soir débutent Single Father sur BBC1 et Thorne sur Sky One... Et demain, c'est le retour attendu de Whitechapel sur ITV1 ! Bref, aucune disette à craindre en ce qui concerne l'Angleterre, puisque parallèlement, des valeurs sûres démarrent doucement. Je suis donc une téléphage anglophile heureuse !

De plus, ces dernières semaines ont été une période propice aux passages de relais en Corée du Sud. Il y a des nouveautés que j'attendais et dont les débuts sont un peu hésitants ou mitigés : Fugitive : Plan B est entre deux eaux, à la croisée des genres, mais je vais quand même poursuivre un peu pour en surveiller l'évolution, le cliffhanger et trailer de fin du pilote ayant éveillé mon intérêt. De manière plus marquante, il y a aussi les imprévus qui font plaisir : et si Doctor Champ était une des agréables surprises de cet automne ? Il faut dire que ce drama m'a prise un peu au dépourvu à me faire passer un moment si sympathique devant ma télévision, alors que je regardais son pilote plus par acquis de conscience. A défaut de faire dans l'originalité, il propose un mélange entre accomplissement personnel/professionnel, amour et sport, chargé de vitalité, qui s'avère rafraîchissant. Il y a du potentiel pour y bâtir de belles relations compliquées mais attendrissantes, pour obtenir un drama agréable à suivre. Ajoutons à cela que mercredi dernier a débuté un drama que j'attends avec beaucoup de curiosité, Daemul, car il se propose de nous conduire à la Maison Bleue - et vous connaissez mon attrait pour tout ce qui touche de près ou de loin à la politique. Et puis, God's Quiz a débuté ce vendredi soir sur OCN ; et chaque semaine à suivre comprendra sa petite nouveauté qui viendra essayer de se faire une place dans mes programmes. En somme, tout va également bien en Corée du Sud !

Enfin, ce mois d'octobre est celui du début du quatrième trimestre téléphagique japonais. De nombreuses nouveautés à l'horizon... A la différence du monde anglophone, évidemment, tout dépendra des sous-titres disponibles. Mais j'ai déjà quelques projets que j'espère avoir l'occasion de tester (Face Maker). Et puis, vous connaissez ma manie de cultiver un certain décalage avec le Japon. C'est ainsi que j'ai savouré Atami no Sousakan en septembre, et que j'entreprends toujours des découvertes dans les dramas de l'été (Mioka), ou suis en attente de sous-titres (Gold). De plus, comme je demeure une novice en la matière, j'essaye de me construire peu à peu une culture téléphagique dorama-esque, en regardant des séries un peu plus "anciennes". C'est ainsi qu'actuellement sont en cours de visionnage Karei Naru Ichizoku, Ashita no kita Yosho et Chase. Bref, le Japon ne s'est jamais aussi bien porté.

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Et voilà comment on se constitue des grilles de programmes sur-chargées et de qualité... en regardant de manière hebdomadaire seulement 2 ou 3 séries américaines (Rubicon me fait plaisir) ! Est-ce que ce désamour, qui reflète désormais une tendance de fond récurrente, remet en question l'essence même de ma téléphagie ? Honnêtement, je me suis un instant posée la question, cette semaine, après qu'une connaissance, à qui je tentais un peu naïvement d'exposer ma vision actuelle des séries, me l'affirme comme un reproche. Pourtant, ce n'est pas un avis que je partage. Certes, peut-être que le centre de ma sphère culturelle dérive un peu des tendances les plus communément rencontrées dans la communauté sériephile. Mais je ne pense pas renier mon sacerdoce de téléphage en faisant les choix que je fais.

En résumé, ce début d'automne est une période téléphagique riche et très agréable à suivre. La sériephile qui est en moi se déclare donc satisfaite : aucune crise à l'horizon, c'est bien ça le plus important !


Et vous, bonne rentrée (où qu'elle ait eu lieu) ou bilan un peu plus mitigé ?

09/10/2010

[TV Meme] Day 8. A show everyone should watch.

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Pushing Daisies 

(2007 - 2009, ABC)

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Parce que, comme ça, le monde aurait peut-être plus de couleurs.

Parce que Pushing Daisies, c'est une sucrerie téléphagique délicieuse et à part, un bonbon acidulé qui vous entraîne dans la découverte de saveurs inconnues dont vous ne soupçonniez pas l'existence.
Parce que vos yeux brillants dégusteront avec gourmandise les décors et la photographie d'ensemble de la série, qui propose un univers visuel vraiment travaillé et abouti.
Parce que c'est une série colorée, chatoyante et attachante comme rarement votre petit écran en aura rencontré et qu'il est impossible de rester insensible à cette magie indéfinissable, se rapprochant de celle des contes de fées, qui en émane.
Parce que les dialogues admirablement ciselés vous confirment que vous êtes face à un joyau téléphagique.
Parce que Ned et Chuck sauront toucher et faire vibrer une fibre inconnue au plus profond de votre coeur qui vous laissera avec un petit sourire, mi-béât, mi-attendri, devant votre télévision.
Parce que la série saura faire naître en vous, emportée par une naïveté enthousiaste, un tourbillon d'émotions à chérir.
Parce que Pushing Daisies manie adroitement un art du surréalisme revendiqué et recherché qui rend son univers aussi confortable que chaleureux.
Parce que désormais, vous ne pourrez vous empêcher de pousser un soupir de tendresse lorsque vos yeux s'arrêteront sur une tarte, en songeant au Pie Maker.

Parce que cette gourmandise téléphagique est un des meilleurs remèdes contre les idées noires : elle est à consommer sans modération.

 

Souvenez-vous :


06/10/2010

(J-Drama / Pilote) Gold : objectif Londres 2012

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Comme toujours, je cultive obstinément cette habitude de suivre la télévision japonaise à distance, maintenant un décalage entre les diffusions du pays du Soleil Levant et mes propres découvertes. Si bien que, généralement, c'est lorsque la nouvelle saison pointe le bout de ses programmes que je commence à me plonger sérieusement dans le trimestre téléphagique précédent. Cela a ses avantages, puisque j'ai tendance à suivre les conseils des uns et des autres, plus qu'à me fier à la seule lecture de synopsis souvent insuffisants.

C'est ainsi que la semaine passée, je vous avais présenté mon bilan de Atami no Sousakan, qui restera sans nul doute ma série japonaise préférée de cet été 2010. Poursuivant ma route, je me suis, ce week-end, penchée sur Gold, dont les sous-titres anglais sont moins avancés, mais qui était également chaudement recommandée (par ici). J'avoue avoir eu quelques réticences avant de tenter ce drama, comportant 11 épisodes et qui fut diffusé du 7 juillet au 16 septembre 2010 sur Fuji TV. La thématique sportive sous-tendant l'ensemble me semblait excessivement familière. Cependant, au-delà de cette seule thématique sur le sport, entrelacée avec celle de la famille, c'est face à une série, avec beaucoup de personnalité et une dimension humaine plus large que ce seul concept initial, que je me suis retrouvée. Les deux premiers épisodes visionnés m'ont intriguée ; en espérant poursuivre cette découverte.

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Le coeur de Gold réside dans la force, mais aussi l'attractivité, de sa figure centrale, dont le charisme supporte une bonne part des thématiques abordées dans ce drama. En effet, Saotome Yuri est une femme d'affaires à succés, surfant sur un empire mêlant sport, diététique et beauté. Héritière des ambitions sportives familiales, elle s'est construite toute une image médiatique façonnée autour de l'éducation de ses enfants, toute entière tournée vers des rêves de médaille d'or. Car Yuri est aussi restée la seule dépositaire des espoirs olympiques paternels, après la mort accidentelle de son frère aîné, qui était celui qui avait été programmé pour réaliser cette ambition.

Ayant épousé un ancien sportif, lui-même médaillé d'or, Yuri a eu quatre enfants. Si elle vit désormais séparée de fait de ce dernier - mais maintenant les apparences aux yeux du public -, c'est elle qui est restée en charge d'élever leurs enfants. Elle a suivi l'idéal rigoriste qu'elle prône jusque dans les livres qu'elle publie sur le sujet. Mère intransigeante, fidèle à ses principes, elle a fait des trois premiers des athlètes à la carrière en devenir, tous trois s'entraînant dur en vue des Jeux Olympiques de Londres. Le plus jeune, de santé plus fragile, bénéficie en revanche d'un traitement particullier, qui le protège tout en l'excluant implicitement de cette émulation collective. Habile psychologue et manipulatrice hors paire, Yuri ne laisse rien au hasard. Même quand elle engage comme secrétaire la si jeune et innocente Nikura Rika.

Mais quel est le prix à payer pour atteindre ces rêves olympiques de grandeur ? Tous les sacrifices se justifient-ils au nom de l'or ?

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Initialement, je craignais un peu de me retrouver face à l'archétype de la série sportive, avec tous les poncifs que cela impliquait entre dépassement de soi et course à la réussite par l'effort. Or, Gold va dévoiler bien plus que cette seule dimension. Si en toile de fond, l'aspect sportif demeure une constante qui conditionne la vie de tous les personnages, c'est en amont, dans les dynamiques relationnelles qui s'initient entre les personnages, mais aussi dans les questions qu'elles soulèvent, que se situe la richesse de la série. Le drama bénéficie en plus de sa tonalité extrêmement directe, n'hésitant pas à aborder frontalement des thématiques compliquées. Ces dernières se révèlent d'ailleurs plus complexes et ambivalentes que les apparences premières avaient pu le laisser penser, ce qui permet aussi de prendre une certaine distance avec les théories prêchées par le personnage principal.

Le pilote, ou du moins sa première demi-heure, s'apparente à un pamphlet sans concession contre les méthodes d'éducation modernes. Jetez votre vieil exemplaire de Françoise Dolto aux oubliettes, voici la vision des choses telle que prônée par Yuri. Inflexible et exigeantes elle a élevé ses enfants "à la spartiate", comme le qualifie métaphoriquement le présentateur tv dans la séquence d'ouverture. Rejetant tout compassionnel, le discours parfaitement rodé de Yuri sert d'entrée en matière musclée dans la série. Il est loin de faire l'unanimité, mais cette quête vers l'excellence, ancrée dès le plus jeune âge, séduit également par l'élitisme ainsi affiché, par ce relatif déterminisme qui semble entériné et écarter tout hasard. La thématique est potentiellement glissante ; inconsciemment au moins, lorsque l'on découvre que Yuri s'est mariée avec un sportif lui-même médaillé, le terme "eugénisme" pointe en arrière-plan.

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C'est dans ce cadre que, précisément, la série va faire preuve d'une maîtrise narrative admirable, ne tombant dans aucun des pièges potentiels. Prenons pour exemple l'excellente scène d'ouverture du drama, qui donne parfaitement le ton immédiatement. Sa vraie réussite, c'est d'avoir offert un contradicteur - qu'elle ridiculise - à Yuri. Les indignations désordonnées et instinctives de ce dernier sont semblables à celles qui viennent naturellement au téléspectateur, face à une femme qui vous expose, avec un réel aplomb, ses certitudes concernant la division des enfants en plusieurs catégories, les gagnants contre les loosers, les "b-child" contre les "poor child", produits de l'éducation laxiste de leurs parents. Or le contradicteur fait ici office d'exutoire pour le téléspectateur : cette opposition, aussi peu inspirée qu'elle soit, permet de crever l'abcès avant qu'il ne s'infecte. L'entrée en matière de la série ainsi dédramatisée, le téléspectateur peut se concentrer non sur son déni réflexe des théories avancées (le rôle ayant déjà occupé), mais sur la figure qui formule de telles idées.

C'est à partir de là que la magie de Gold opère. Car, sous la surface si policée, les choses se révèlent plus complexes et ambivalentes que l'idéal prôné par Yuri. Cette dernière symbolise d'ailleurs à elle-seule toute la part de lumière, mais aussi d'ombre, qui sous-tend la série. Une brève rencontre avec son père nous révèle combien elle s'inscrit dans un schéma de reproduction sociale stricte ; elle transfère sur ses enfants sa propre éducation. De même qu'elle leur a transmis l'héritage laissé par son frère décédé, celui de remporter cette fameuse médaille d'or, une véritable course à l'excellence familiale. Au-delà de cette rigoureuse reproduction, Yuri est elle-même consciente des coûts et des ambiguïtés inhérentes à cette voie. Quand elle éclate en sanglots dans la voiture, après avoir été placée devant les contradictions de sa vie amoureuse, n'est-ce pas le poids de son impuissance à s'épanouir en tant que femme, dans le schéma de vie forcée qu'elle suit, qui est soudain trop lourd à porter ? Au fil des scènes, c'est un fascinant portrait féminin qui est peu à peu dressé.

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Si Yuri est incontestablement la figure centrale de ce drama, les autres personnages n'en sont pas pour autant oubliés. Il y a une réelle homogénéité d'ensemble, une complémentarité de tous, qui permet à la série de développer toute une dimension très humaine - peut-être un peu inattendue au vu du seul synopsis - et qui est très intéressante à suivre, sans doute parce que la qualité de l'écriture permet de trouver rapidement le juste équilibre entre chacun. Les enfants de Yuri, dont les plus âgés entrent bientôt dans l'âge adulte, avec leurs personnalités propres, plus ou moins affirmées, sont le produit d'une éducation, mas c'est aussi leur propre identité qui achève de se construire (et donc de s'affirmer). Témoins privilégiés de leurs motivations secrètes, de la façon dont ils appréhendent finalement le statut que leur mère a choisi pour eux, la très grande diversité que proposent les trois adolescents permet une prise de distance. Leurs failles paraissent ainsi comme rassurantes, face au déterminisme excessif de certaines certitudes de Yuri. C'est avec un intérêt jamais démenti que l'on assiste à ces conflits constants, entre impulsions premières, éducation et sentiments.

Enfin, dernière preuve de la maîtrise narrative dont font preuve ces deux premiers épisodes de Gold, le téléspectateur dispose d'un repère pour s'inviter peu à peu dans le quotidien de Yuri et de son entourage, avec l'introduction d'une nouvelle secrétaire, innocente à l'excès, Rika. C'est à ses côtés que l'on va découvrir les craquelures sous la surface et la réalité nuancée de la vie de cette famille. C'est aussi grâce à Rika que la série se permet de jouer quelque fois sur une fibre plus légère et comique, détendant l'atmosphère globale et occasionnant quelques ruptures narratives salvatrices. Ce personnage se révèle d'autant plus intéressant qu'elle trouve rapidement ses marques aux côtés de Yuri ; les deux femmes forment un duo très complémentaire, parfaitement détonnant, qui occasionne vraiment d'excellents échanges, avec des réparties bien dosées.

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Enfin, Gold bénéficie d'un excellent casting, où resplendit surtout une Amami Yuki (Last Present, BOSS) impressionnante de charisme, qui parvient avec beaucoup de talent à retranscrire à l'écran les différentes facettes de son personnage. Elle est parfaitement au diapason de cette figure centrale qu'elle incarne. C'est par rapport à elle que les autres se positionnent et trouvent finalement leur pendant logique, justifiant la façon dont ils abordent leurs personnages. On retrouve notamment Nagasawa Masami (Last Friends), dans le rôle de la secrétaire, et Sorimachi Takashi (HOTMAN), dans celui de l'entraîneur. Je suis un peu moins convaincue, pour le moment, par les acteurs incarnant les enfants de Yuri (Mikami Kensei, Matsuzaka Tori, Takei Emi), mais ils s'insèrent dans le cadre général du drama.

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Bilan : Bien plus qu'une énième déclinaison de fiction dite "sportive", Gold s'impose comme une série dotée d'une profonde dimension humaine, à la fois troublante et fascinante. Toutes les théories sur l'éducation de Yuri soulèvent de lourdes questions, frôlant déterminisme, voire eugénisme, mais pour le moment, la série évite admirablement bien tous les pièges potentiels en éclairant et développant toute l'ambivalence qui les entoure. Ce positionnement entre ombre et lumière fait prendre au drama toute son ampleur. Car ce sont des tensions constantes que met à jour cette série, par le biais d'une écriture étonnamment mâture, maîtrisant admirablement toute sa narration.


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de la série :


Le générique de clôture :