24/12/2009
(US) Men in Trees (Une fille en Alaska) : une série attachante et rafraîchissante
Avec une semaine hivernale froide et enneigée, coïncidant avec la période des fêtes, l'envie prend soudain au sériephile de se montrer faussement nostalgique, de mettre à profit la fameuse "trêve hivernale" pour se replonger dans des atmosphères chaleureuses et rafraîchissantes, afin d'échapper au temps morose et aux longues soirées d'hiver. En quête de ce précieux moment d'échappatoire, c'est ainsi que mes pas m'ont de nouveau conduite à Elmo (Alaska), devant les premiers épisodes de Men in Trees.
Série trop tôt annulée par ABC, au bout de seulement deux saisons (2006-2008), Men in Trees fut un de ces petits rayons de soleil inattendus des grands networks américains au cours de ces dernières années. Une série simple, absolument pas prétentieuse et profondément attachante. Une série ressuscitant, sans arrières pensées, en forme d'hommage, les vraies comédies romantiques, au sens noble du terme, à des lieues des pompeuses pseudo-aventures citadines artificielles et superficielles des ratées Lipstick Jungle ou Cashmere Mafia. Une série devant laquelle le téléspectateur s'installait pour passer un moment de détente, et finissait l'épisode attendri et surpris par l'atmosphère qui se dégageait d'une production qui semblait avoir oublié le tournant scénaristique moderne, si loin des exigences formatées et sans âme de la plupart des fictions actuelles des grandes chaînes américaines.
Diffusée en France, sous le titre Une fille en Alaska, cette série nous narre les aventures d'une trentenaire new yorkaise, écrivain à succès, qui débarque un jour dans une petite ville perdue d'Alaska, Elmo, à l'invitation d'un des habitants, un de ses plus fans les plus fervents. Le pilote sert de fondation aux bouleversements que va connaître la vie de Marin : alors que la date de son mariage est déjà prévue, elle découvre que son fiancé l'a trompée. Jusqu'alors experte autoproclamée et reconnue en relations amoureuses, à travers ses ouvrages de conseils sur le sujet, la voilà qui voit toutes ses certitudes s'effondrer. Sentant qu'elle a besoin de changements dans sa vie, elle décide de rester quelques temps à Elmo, afin de faire le point, mais aussi d'écrire son nouveau livre.
En effet, quelle ville pourrait être plus adéquate qu'Elmo pour se reconstruire ? Le charme de la série tient beaucoup à son cadre si particulier, d'où elle dégage une atmosphère unique, d'une façon pas si éloignée, par exemple, d'un Stars Hollow de Gilmore Girls. Dans une région à démographie majoritairement masculine, où le ratio hommes/femmes est de 10 pour 1 et où il tombe même des Roméos potentiels des arbres (cf. le titre), Marin découvre un mode de vie très différent de l'agitation new yorkaise. Un lieu également parfait pour poursuivre ses observations et dissertations sur les représentants du sexe opposé et leur psychologie, pour écrire son prochain livre.
Le charme de Men in Trees réside d'abord dans la richesse des personnages mis en scène. Les habitants d'Elmo ont tous de fortes personnalités, très différentes mais, en un sens, complémentaires. Ils représentent une galerie éclectique de personnages attachants, incarnant des stéréotypes, mais sans tomber dans une simple caricature sans imagination. Le barman riche à millions, le pilote d'avion chevronné qui permet de désenclaver un peu la bourgade, la femme shérif au besoin maladif de tout contrôler, à commencer par son fils, Patrick, qui est resté un grand enfant, l'épouse asiatique débarquée grâce à un site internet, la mère célibataire obligée de se prostituer... Et le biologiste charmant (après un début mouvementé), Jack, qui va très vite s'imposer comme le pendant parfait de Marin, image de l'homme idéal compréhensif et posé, avec lequel une complicité tendant vers le flirt va naître. Chacun d'eux est une petite pierre incontournable à l'équilibre de la série, une individualité à explorer, qui nous surprendra plus d'une fois. Logiquement, la city girl sophistiquée que constitue Marin détonne d'entrée dans cette galerie de personnages. Elle va pourtant peu à peu s'intégrer et reconsidérer ses priorités.
Exploitant parfaitement cette solide base, la série parvient à créer une ambiance chaleureuse et décalée. Agrémentée de situations cocasses, de gags spontanés qui font naître chez le téléspectateur plus d'un sourire, elle se propose de suivre, avec une bonne humeur contagieuse, la vie quotidienne de cette bourgade, rythmée par les matchs de hockey télévisés et par les romances qui s'esquissent entre les personnages. Le centre névralgique de la ville est un bar où est parfaitement restituée l'atmosphère de la ville, une communauté aux membres si différents, mais profondément soudée au milieu de ces grands espaces de nature. Ce qui fait la force de la série, c'est d'être avant tout profondément et sincèrement humaine, s'intéressant réellement à ses personnages, à leurs histoires passées, comme à leurs craintes du futur, et se concentrant sur leurs sentiments et ce qui les anime.
Mais, Men in Trees, ce sont aussi des situations uniques auxquelles vous ne vous trouverez confronté dans aucune autre série. Vous découvrirez comment faire sauter tout le courant d'une bourgade en utilisant votre sèche-cheveux à la pointe de la modernité, quelle attitude adopter lorsque vous tombez nez-à-nez avec un ours, ou encore comment prendre votre bain de soupe de tomate après une rencontre a priori innocente avec un putois...
Ce sont également des protagonistes inattendus, amateurs de vêtements de mode new yorkais, croisés dans les recoins de l'unique auberge de la ville... dont le plus digne représentant est :
Ce sont des paysages uniques, revigorants, qui offrent aux caméras un décor magnifique qui laisse le téléspectateur rêveur...
Bilan : Rafraîchissant, dépaysant, attachant, sont en fin de compte les adjectifs qui permettent le mieux de décrire Men in Trees. C'est une dramédie simple et rythmée, au bien-être communicatif ; une petite dissertation savoureuse sur les relations humaines, tour à tour émouvante et drôle. Elle prend le téléspectateur par surprise : le touchant comme rarement, à partir d'un concept de départ pourtant si classique. Men in Trees ne se démarque pas des autres fictions par son originalité, mais par son ton, par l'atmosphère chaleureuse qu'elle parvient à créer, et par le fait qu'elle assume parfaitement être une héritière des comédies romantiques légères et divertissantes du petit, comme du grand écran, en reprenant les recettes qui ont fait les succès passés.
Une série revenant aux fondamentaux, comme la télévision n'en fait plus assez... A savourer.
NOTE : 7,5/10
(Source des screen-captures : La Sorcière)
10:16 Publié dans (Séries américaines) | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : men in trees, abc, anne heche, james tupper, abraham benrubi, john amos, sarah strange | Facebook |
22/12/2009
(UK) The Thick of It : une satire politique moderne incontournable
Ce billet du jour pourrait faire office de suite à la note consacrée, il y a quelques semaines, à l'excellente Yes Minister / Yes Prime Minister. En effet, si la politique a toujours exercé un attrait certain chez les scénaristes britanniques, The Thick of It est le digne héritier spirituel de ce savoir-faire, illustration de la continuité de cette source d'inspiration. Cette série propose ainsi une vision (et un ton) moderne de ces mêmes coulisses ministérielles.
The Thick of It fait partie de ma dernière fournée (pour limiter les frais de port) de coffrets DVD achetés "en aveugle" sur un site UK. Je connaissais vaguement la fiction de réputation, mais un billet, qui y avait été consacré sur Critictoo fin octobre, m'avait décidée à l'ajouter sur ma pile de séries à découvrir et donc à budgétiser l'investissement. Cette expérience (modérément aventureuse, a priori, le sujet comme le style pouvant difficilement me déplaire, au vu de mes antécédents) s'est révélée très concluante.
Si la saison 3 a été diffusée au cours de cet automne sur BBC2, les débuts de The Thick of It remontent à 2005. Son profil de diffusion pour le moins curieux mérite une brève explication. Cette comédie s'est ouverte avec deux saisons, composées de trois épisodes chacune, diffusées sur BBC4 à six mois d'intervalle au cours de cette année-là. Il y eut ensuite un hiatus de plus d'une année, pour un retour sous forme d'épisodes spéciaux lors du premier semestre de l'année 2007. En avril 2009, un film In the loop, que l'on pourrait qualifier de sorte de spin-off, est sorti au cinéma (on y retrouve Peter Capaldi qui reprend son rôle emblématique de Malcolm ; mais aussi d'autres figures bien connues des sériephiles, tel James Gandolfini (The Sopranos) - bref, un must-seen du grand écran). Enfin, cet automne a vu la diffusion d'une troisième saison sur BBC2, composée de 8 épisodes. Vous suivez toujours ?
Cette installation saccadée n'a en rien perturbé la qualité de The Thick of It qui se révèle être une brillante satire politique. Elle nous plonge avec talent dans les coulisses ministérielles des hautes sphères de la politique britannique. Au cours des deux premières saisons, nous suivons plus spécifiquement le ministère des Affaires sociales. A sa tête, Hugh Abbot, caricature pathétique du politicien sans envergure, s'efforce de gérer les secousses médiatiques avec pour seule ambition, la conservation de son poste. Il est entouré d'une équipe de conseillers, cyniques pragmatiques aux capacités d'adaptation à toutes situations sur-développées, mais qui créent souvent plus de crises qu'ils n'en résolvent. Dans cette gestion de leur médiocrité quotidienne, ils doivent régulièrement subir les foudres et assauts verbaux du tout puissant directeur de la communication du 10 Downing Street, Malcolm Tucker. Directement inspiré d'une figure bien réelle, Alastair Campbell, spin-doctor controversé du gouvernement travailliste pendant un temps, Malcolm est le coeur de The Thick of It. Souvent déchaîné, évacuant par des explosions de colère et autres excès un trop plein d'énergie constant, Malcolm gère les diverses situations d'une main de fer, effrayant journalistes comme ministres. Cette satire politique, à travers son exposé de petites tranches de vie quotidienne, prend véritablement toute son ampleur lorsque Malcolm débarque, devenant jubilatoire pour le téléspectateur.
La richesse de The Thick of It réside dans la noirceur de l'humour dans laquelle elle se complaît. Nous immergeant dans des coulisses où règnent une hypocrisie assumée, servie par des personnages aux compétences discutables parmi lesquels Malcolm surnage, cette satire excelle dans son utilisation d'un ton corrosif à souhait, offrant un visage guère reluisant de ce milieu où la médiocrité semble être maîtresse. C'est une série pleine, qui maintient une forme d'équilibre faussement précaire dans sa narration, exploitant parfaitement son aspect mockumentary. Ses dialogues très vifs, ciselés avec soin et toujours directs, ne sont jamais enjolivés et sonnent ainsi très authentiques ; au milieu des petites piques qui fusent et autres traîtrises, les personnages usent et abusent d'un langage fleuri, où le f* word est intégré à la langue commune comme simple mot de liaison qui permet de traduire tous les sentiments possibles.
Bilan : Brillamment corrosive, maniant un humour noir savoureux pour le téléspectateur, The Thick of It est une comédie dans la droite ligne des excellents mockumentary britanniques de ces dernières années. Digne héritière d'une tradition ayant réalisé une synthèse admirable entre Yes Minister et The Office (UK), cette série se démarque par une quête constante de réalisme, des dialogues ciselés à l'authenticité éprouvée et une réalisation nerveuse mettant efficacement en scène ce côté pseudo-documentaire.
Certes, j'ai conscience que, aussi enthousiaste que je puisse être à son égard, The Thick of It n'est sans doute pas à mettre en toutes les mains. Il y a peu de chance que ceux qui n'ont pas apprécié le ton de la version originale de The Office (très différente de ce qu'est devenue sa consoeur américaine plus connue) soient conquis par le style de cette comédie extra. Mais, s'il y a parmi vous quelques curieux chez qui cette présentation a éveillé un intérêt, n'hésitez pas ! Ce que j'appelle "saison 1" (techniquement les series 1 et 2, soit les 6 premiers épisodes) est disponible en DVD en Angleterre, avec bonus et VOSTA.
NOTE : 8,5/10
Un petit extrait représentatif, avec Malcolm dans tous ses états et le ministre Abbot, une nouvelle fois dans une situation difficile :
17:01 Publié dans (Comédies britanniques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : the thick of it, bbc, peter capaldi, james smith, chris addison | Facebook |
20/12/2009
(K-Drama) On Air : le making-of d'une série télévisée
De nouveau un drama coréen pour le rendez-vous dominical asiatique ! Cependant, sachez que, suite à un intense lobbying de la part de ma soeur, un drama japonais est venu s'ajouter à ma pile des séries à voir au cours des fêtes de fin d'année. Par conséquent, il est possible qu'au cours des prochaines semaines, le monopole sud-coréen s'effrite pour laisser la place à (au moins) une série du pays du Soleil Levant... Il faut dire que cela fait plusieurs mois que je n'en ai plus regardée !
Mais, pour aujourd'hui, nous allons rester en terrain connu. Il faut dire que je vous parle séries sud-coréennes depuis quelques semaines ; mais voilà, nous n'avons pas encore répondu à une question existentielle majeure : comment fait-on lesdites séries ? C'est l'objectif que s'est fixé On Air, un drama composé de 21 épisodes, diffusé au printemps 2008 sur la chaîne SBS. Il entreprend de nous plonger dans les coulisses de la conception d'une série télévisée : du projet initial jusqu'à sa diffusion. Pour être honnête (tant pis pour ma crédibilité), je vous avoue être arrivée devant ce drama, non pas en étudiant son synopsis, mais, dans la foulée de Story of a Man (dont je vous ai parlé dimanche dernier), en épluchant la filmographie de Park Hong Ya. Procédé que je trouve profondément inquiétant : si je commence à choisir mes fictions asiatiques en prenant en considération les acteurs (enfin, pas n'importe lesquels non plus), c'est que mon degré de dépendance a largement dépassé le stade auquel il s'était jusqu'à présent cantonné ! Dois-je commencer à m'en inquiéter ?
L'intérêt majeur de On Air réside dans cette immersion proposée dans les coulisses de l'industrie télévisée coréenne. On y retrouve certes des thématiques quasi-universelles, entre coups tordus, concurrences exacerbées et autre difficile gestion d'égos des stars. Mais, directement inspiré de faits plus ou moins réels, ce drama offre une version édulcorée et romancée de l'envers du décor. Mêlant vérité et fiction, pour peu que vous soyez un brin familier avec le monde de l'entertainment sud-coréen, vous retrouverez mille et une références à des évènements passés, à des réputations d'acteurs et à d'autres sujets récurrents dans cette industrie. Si je dois avouer ma relative ignorance de profane en la matière, j'ai lu plusieurs articles très instructifs sur le sujet, en parcourant les critiques sur ce drama. Ainsi, l'actrice star, toujours prompte à faire sa diva, dont l'attitude est un tel cauchemar pour ceux avec qui elle travaille que la presse la désigne sous le nom de "National Devil", est un personnage créé sur la base de la réputation comparable dont jouit l'actrice Kim Hee Sun. Autre exemple, plus général : est aussi évoquée la question de la palette de compétence des acteurs, récurrente en Corée, c'est-à-dire le difficile passage de l'image de beauté faisant la joie de grandes marques dans des publicités en tout genre, à une crédibilité assise en tant qu'acteur au sein d'un drama (référence à une critique classique, "très belle, mais aucune qualité d'actrice"). La série offre ainsi un miroir intéressant à qui apprécie les dramas de cette nationalité. (Pour plus de renseignements sur tous ces parallèles, je vous conseille notamment de lire cet article très instructif : 'On Air' draws comparisons with reality).
Outre ces thématiques directement inspirés de la réalité, c'est également tout le processus de création d'une telle fiction qui est exposé. Évidemment enrichie d'un soupçon de comédie romantique et d'une bonne dose de dramatisation, la série prend le temps d'exposer les différentes étapes qui conduiront un drama jusqu'à notre petit écran : la production, l'écriture, le casting, la gestion de la logistique du tournage et la direction des acteurs, jusqu'à l'attente angoissée des chiffres d'audience fluctuants, tout y est. Ayant choisi quatre protagonistes principaux aux fonctions très différentes, mais à la collaboration nécessaire, elle permet de s'intéresser à tous les aspects possibles : nous retrouvons, en effet, la star adulée autant que décriée, Oh Seung Ah, dont les intérêts sont défendus avec ferveur par son nouvel agent protecteur, Jang Ki Joon. La conception de l'histoire est confiée à Seo Young Eun, scénariste à succès au fort caractère, qui reçoit la commande du drama ; et enfin, le directeur, Lee Kyung Min, se retrouve, pour la première fois, aux commandes de la réalisation d'une telle série. Ces quatre perspectives de personnages aux tempéraments très divers nous offre l'opportunité d'étudier toutes les dynamiques, de l'opposition au travail d'équipe, qui peuvent exister au sein d'un tel projet. C'est surtout l'occasion de voir s'exprimer au grand jour les divergences manifestes d'intérêts, entre enjeux d'audience, rentabilité financière ou sauvegarde de réputation. Les scénaristes se sont d'ailleurs amusés à placer mille et un obstacles sur la route de cette équipe qui doit surmonter un véritable parcours du combattant ; et le téléspectateur suit avec attention ce processus chaotique, à multiples rebondissements, soupoudré d'une touche d'autodérision.
Pour autant, aussi intéressante que soit cette immersion dans les coulisses d'une série, On Air souffre d'un certain manque de rythme qui plombe quelque peu certains épisodes, avec une tendance à trop s'étirer en longueur. Sur le ton de la comédie romantique plutôt légère, les relations entre les quatre personnages principaux fluctuent, les liens se consolidant ou se distendant très rapidement, si bien que l'on tourne assez vite en rond, réutilisant à plusieurs reprises les mêmes dynamiques. De plus, j'ai eu un peu de mal à rentrer dans ce drama, devant attendre d'avoir passé 3-4 épisodes. Ce problème avait une origine plus formelle : le sur-jeu un brin excessif et fatiguant des acteurs, surtout dans les premiers épisodes, où cela crie et explose beaucoup (le tout avec des dialogues très rapides, ce qui ne facilite pas la compréhension des sous-titres qui défilent). Cet aspect est une difficulté récurrente que je rencontre face à certaines productions asiatiques, et pour laquelle mon seuil de tolérance reste toujours très bas, en dépit de l'expérience que j'acquière en la matière. Cependant, par la suite, le ton se calme un peu, comme les acteurs, ce qui permet d'apprécier mieux l'histoire. Il ne faut donc pas se laisser intimider par l'introduction en rafale, un peu brouillonne, du début. Le drama se bonifie et se consolide par la suite !
En effet, une fois la série installée, les fortes individualités des personnages mis en scène pimentent de façon assez plaisante leur vie, professionnelle comme personnelle. J'ai beaucoup apprécié l'association, initialement si opposée, entre l'actrice et son agent. Oh Seung Ag est incarnée par une Kim Ha Neul superbement hautaine, dont l'insensibilité apparente est surtout une carapace protectrice et dont l'ambivalence et les craintes se révèlent peu à peu. Tandis que Lee Bum Soo joue parfaitement un personnage impliqué, un brin paternaliste, dont les valeurs très différentes provoquent des clashs constants avec son actrice. La série va progressivement évoluer vers une compréhension réciproque de ces deux personnes a priori si étrangères l'une de l'autre. Dans l'autre équipe de travail, Park Yong Ha (Story of Man) est très crédible dans son rôle de producteur, très terre-à-terre et quelque peu idéaliste. Et, finalement, la seule avec laquelle j'ai eu beaucoup de difficulté est Song Yoon Ah, dont le constant sur-jeu et les mimiques, même si elles peuvent prêter à sourire, étaient parfois difficilement supportables. Si bien que, je ne sais pas si le problème venait du personnage ou de l'actrice, mais j'ai eu beaucoup de mal à m'attacher à elle, étant plus souvent un brin agacée.
Bilan : On Air est un drama assez plaisant à suivre, demeurant constamment intéressant même s'il ne passionne pas. Son atout majeur réside dans cette introduction au sein des coulisses de la conception d'une série, tout autant que dans celles de l'industrie d'entertainment sud-coréenne ; sujet qui, a priori, attire l'attention du téléphage curieux qui est en nous. En dépit d'un rythme fluctuant, l'ensemble demeure agréable à suivre, en offrant également une comédie romantique amusante, qui évite l'écueil d'un réel romantisme affiché en se concentrant plutôt sur des relations qui se nouent ou se distendent, au fil des collaborations professionnelles.
Si bien que sans être une série indispensable, On Air offre un divertissement honnête, que l'on découvre avec curiosité et sans déplaisir.
NOTE : 6/10
Une brève bande-annonce (avec en fond sonore, la chanson récurrente de la série) :
08:10 Publié dans (Séries asiatiques) | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : on air, sbs, lee bum soo, kim ha neul, park yong ha, song yoon ah | Facebook |
19/12/2009
(Mini-série US) The Corner : plongée dans l'envers du rêve américain
Une immersion dans l'enfer de la drogue au sein d'un quartier paumé de Baltimore ? Instinctivement, vous répondez The Wire (Sur Ecoute). Mais nous nous situons ici en amont. Avant de signer ce chef d'oeuvre qui sera diffusé confidentiellement durant 5 saisons sur HBO (et se verra affubler de la désignation creuse de "la meilleure série du moment que personne ne regarde"), David Simon et Ed Burns avaient déjà posé l'ambiance et les bases futures de leur somptueuse chronique urbaine sur l'envers du rêve américain, à travers une première mini-série fondatrice, The Corner. D'une durée globale de six heures (pour autant d'épisodes), elle avait finalement ouvert la voie à la décennie puisqu'elle fut diffusée sur HBO au cours du printemps 2000.
Le coffret DVD étant arrivé dans ma boîte aux lettres il y a quelques semaines, il ne m'aura pas fallu longtemps pour (enfin) découvrir une fiction que je souhaitais voir depuis plusieurs années. A noter que, s'il y a parmi vous, chers lecteurs, des allergiques à la langue de Shakespeare (réaction d'autant plus compréhensible quand ladite langue est mêlée à l'argot des rues de Baltimore), le coffret DVD disponible en Angleterre (la mini-série n'est pas sortie en France) comporte non seulement une piste de sous-titres anglais, mais également une piste de sous-titres français. Par conséquent, aucune excuse linguistique pour se priver de cette mini-série fondatrice qui mérite le détour !
D'un point de vue narratif, The Corner s'inscrit dans la même optique que The Wire (Sur Ecoute). On retrouve ce style inimitable que ses créateurs continuent de perfectionner (cf. Generation Kill). Il y a tout d'abord l'utilisation du journaliste, figure de l'observateur extérieur, qui est le prétexte et l'élément déclenchant permettant d'introduire le téléspectateur dans le récit qu'il se propose de suivre : une tranche de vie de quartier, à un croisement de plusieurs rues (d'où le titre de la mini-série). Cette approche renforce le ton de documentaire de la fiction. La caméra s'efface devant les faits : elle accompagne des scènes de vie brutes. Le fil narratif se réduit ainsi au minimum, comme si on craignait de bousculer le quotidien dans lequel on est convié. Les personnages dominent un récit d'où les scénaristes paraissent -de manière seulement apparente- s'effacer. C'est la caractéristique de ces séries citées plus haut, ce qui fait leur originalité, ainsi que leur force. Dans The Corner, ce style est déjà bien en place et renforce la portée d'une chronique qui ne saurait laisser insensible.
Si The Corner délivre une fiction dure et réaliste, elle marque surtout le téléspectateur par son pessimisme. Car c'est une descente progressive dans la drogue qui nous est contée, à travers le destin, finalement tragique, d'une famille qui va s'enfoncer dans cet enfer. Au-delà de ce récit, la mini-série ne semble offrir aucune touche d'espoir, seulement une réalité sombre et tentaculaire, où les étincelles sont si vite étouffées et à laquelle il paraît impossible d'échapper. En effet, c'est tout un quartier qui sombre autour, et avec, la famille McCullough. A l'aide de flash-backs savamment distillés, la mini-série expose les changements de Lafayette Street : de l'atmosphère résidentielle et bien tenue des années 70 jusqu'à la crise et l'arrivée de la drogue. Ce processus-là connaît également une gradation, des quelques joints dealés négligemment au raz-de-marée de la cocaïne et de toutes ces drogues dures qui vont transformer ces personnes en figures dépendantes et maladives, épaves humaines dont le seul but quotidien semble être de trouver les quelques dollars qui permettront de s'acheter une dose.
Pour illustrer cette réalité, la mini-série nous propose de suivre l'évolution d'une famille sur les pentes de cette déchéance amère. Initialement issu de famille modeste, mais travailleuse, Gary McCullough avait des projets plein la tête et se donnait les moyens de ses ambitions. Il mena d'ailleurs pendant quelques temps une vie plutôt confortable, avec une belle réussite professionnelle. Mais la machine se grippa, comme le bonheur familial. En six épisodes, la fiction va dresser des parallèles entre passé et présent, amenant en quelque sorte à répéter ce schéma, avec un nouveau cycle au sein de cette famille. Car si les deux parents, Gary et Fran, ont plongé dans la dépendance, leur fils, DeAndre, a jusqu'à présent éviter la consommation de drogue. Cependant, du fait du quartier dans lequel il vit, rythmé entre arrivée de nouvelles doses et descentes de police, il la vend à un de ces fameux "corner", intersections entre deux rues, familières aux téléspectateurs de The Wire. Aucun des personnages n'est figé dans un rôle précis. Chacun tente de mener sa vie et de se reprendre. Pourtant, la morale de l'histoire s'abat de façon cruelle : telle une fatalité, il paraît impossible d'échapper à cet environnement, à cette misère qui broie ceux qui la côtoient, aussi volontaires qu'ils soient.
Inspirée d'une histoire vraie, The Corner est une fiction choc. Le téléspectateur ne peut rester indifférent émotionnellement au sort de ces personnages, si riches en contradictions, mais aussi en humanité, auxquels il s'attache sans s'en rendre compte. Magistral récit, à la fois fascinant, incitant à la réflexion et bouleversant, c'est un témoignage sans concession sur une Amérique oubliée, dont l'existence est le plus souvent passée sous silence. Les amateurs de The Wire (Sur Ecoute) retrouveront, loin de toute ambiance de série policière, cette dimension sociale et sociologique unique, inégalée dans le petit écran. Le tout est servi par un casting parfait, chacun des acteurs ne jouant pas seulement un rôle, mais incarnant bel et bien ces individus égarés qui tentent de survivre. On recroisera d'ailleurs un certain nombre d'acteurs ensuite dans The Wire (Sur Ecoute).
Bilan : The Corner est une chronique sociale où règne un pessimisme d'où ne perce durablement aucune éclaircie. C'est l'envers du rêve américain, à travers le portrait sombre et méticuleux des ravages de la drogue et du chômage, dans les quartiers déshérités de certaines grandes villes américaines, Baltimore étant un des exemples les plus frappants.
Filmée à la manière d'un documentaire, avec cette impression caractéristique d'être à peine scénarisée, cette mini-série nous raconte simplement la descente aux enfers, et la survie, d'une famille vivant sur Lafayette Street. Avec un style si particulier, la caméra paraît capter les scènes, non les provoquer. Cette mise en retrait d'une narration romancée accroît la portée, tout autant que le froid réalisme, de ce récit sur la misère, qui ne tombe jamais dans un voyeurisme creux ou moralisateur. C'est un simple témoignage brut qui appelle à une prise de conscience.
Le style pourra sans doute sembler abrupte à des téléspectateurs qui n'en ont jamais fait l'expérience, mais cela ne doit pas vous faire hésiter : non seulement on s'y ajuste très rapidement, mais, en plus, c'est une expérience télévisuelle incontournable et indispensable.
En cette époque de bilan de fin de "décennie", The Corner, diffusée en 2000, a ouvert la voie à un style narratif qui, il faut l'admettre, justifiait pleinement à l'époque le fameux slogan publicitaire : "It's not TV, it's HBO." Si on ne ressort pas indemne d'un tel visionnage, c'est une production dont on ne peut faire l'économie de la découverte.
NOTE : 9,5/10
La bande-annonce :
11:15 Publié dans (Mini-séries US) | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : the corner, the wire, hbo, david simon, ed burns | Facebook |
17/12/2009
(Mini-série UK) Le retour de Jack l'Eventreur : les mystères de Whitechapel
Si je ne prends pas toujours le temps de m'installer devant, j'avoue que j'aime beaucoup Arte et sa politique de diffusion des fictions, offrant un pied-à-terre continental à quelques productions britanniques qui méritent le détour. C'est ainsi que ce vendredi soir, la chaîne diffusera l'intégralité des 3 épisodes composant la mini-série Whitechapel, du nom du quartier londonien théâtre des meurtres du plus célèbre serial killer de l'histoire, à la fin du XIXe siècle. Pour l'occasion, la fiction a été sobrement rebaptisée pour le téléspectateur distrait, aux connaissances géographiques confuses, Le retour de Jack l'Eventreur, de façon à attirer l'attention de quelques curieux.
Diffusée en février dernier sur ITV1, Whitechapel se déroule de nos jours, alors qu'un tueur semble reproduire, avec un réel sens du détail, les assassinats commis plus d'un siècle auparavant. L'enquête va conduire des policiers déstabilisés sur les chemins déjà empruntés par la police londonienne à l'époque. C'est finalement une version de l'histoire originale qu'il leur faudra choisir, pour espérer résoudre leur propre enquête ; s'intéresser au passé, pour comprendre le présent. Auront-ils plus de succès que leurs prédécesseurs ?
L'incontestable atout de Whitechapel réside dans son concept. La mini-série entreprend de ressusciter Jack l'Eventreur, un mythe criminel instantanément intriguant, en suivant un assassin méticuleux qui adopte les mêmes schémas et méthodes que ceux de son inspirateur. Abondante en détails morbides, cherchant (sans toujours y parvenir) à créer une ambiance sombre, presque inquiétante par moment, Whitechapel se révèle être une fiction policière efficace. A partir de fondations très riches, le fait de marcher sur des traces, datant d'il y a 120 ans, va exercer un attrait historique, tout en générant une certaine frustration auprès du téléspectateur, surtout s'il est familier avec cette affaire. En effet, si les meurtres sont des reproductions des victimes de Jack l'Eventreur, la police semble, suivant le même mimétisme, reproduire ses erreurs d'autrefois. Si bien que le rapport entre le présent et le passé donne finalement l'impression de quelque peu tourner en rond ; on en vient à se demander si les scénaristes ne rêvaient pas secrètement de transposer le mythe de ce serial killer dans notre présent. Car, pendant une bonne partie de la mini-série, la police contribue à la reproduction de l'histoire, avec les mêmes errances, plus qu'elle ne s'aide du passé pour empêcher les drames futurs. Pourtant, lorsque la nécessité de comprendre la première enquête, pour résoudre celle à laquelle ils sont confrontés, s'impose enfin, la mini-série va se révèler habile à manier les sources dont on dispose sur cette époque, avec le recours à un ripperologist.
Si Whitechapel manque parfois un peu de consistance sur le fond, elle n'en demeure pas moins attachante, grâce à un duo principal d'enquêteurs, opposés et caricaturaux, mais très humains et dont l'association fonctionne bien. Le policier blasé et expérimenté et le jeune commissaire arriviste, maniéré et manquant de confiance en lui (Rupert Penry-Jones, à des lieues de Spooks), c'est une recette des plus classiques, mais elle est mise en scène efficacement ici. La galerie des personnages secondaires offre finalement un ensemble homogène et équilibré. Si bien que même si l'histoire se situe sur des sentiers très connus, on a envie d'y accompagner cette équipe d'enquêteurs, sans tenir compte du manque récurrent d'originalité.
Reste que, sur la forme, la série souffre des mêmes défauts que sur le fond. En effet, sans toujours éviter l'écueil de la caricature, la mini-série met beaucoup d'application, souvant maladroite, à essayer de se créer une identité qui lui est propre. Ce constat peut être fait aussi bien concernant les choix de réalisation et de traitement de l'image (quelques flashs maladroits de l'assassin, par exemple), que pour la bande-son, avec un thème récurrent au piano. Tout cela constitue des efforts louables, mais pas toujours bien dosés, ils apparaissent parfois excessifs ou inopportuns. Mais, s'ils n'atteignent pas vraiment leur but, ils ont le mérite d'exister.
Bilan : Non exempte de défauts parfois frustrants, Whitechapel n'en demeure pas moins une honnête et efficace fiction policière qui se suit avec un intérêt jamais démenti, grâce à son fort concept de départ et à ses divers protagonistes. La diffusion des trois épisodes à la suite permet d'ailleurs à la mini-série de gagner en homogénéité dans la construction de l'enquête, le choix de diffusion de Arte étant donc à souligner. Si tout cela reste très classique et ne marquera pas la télévision, n'exploitant pas pleinement le potentiel initial, il est facile de se laisser happer par l'ambiance qui s'en dégage.
A découvrir avec curiosité !
NOTE : 7/10
Les trois premières minutes de la série : Disponibles sur le site officiel d'Arte
13:36 Publié dans (Mini-séries UK) | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : le retour de jack l'éventreur, whitechapel, itv, arte, rupert penry-jones | Facebook |