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17/07/2013

(K-Drama / Pilote) Empire of Gold : ton univers impitoyable

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En ce mercredi asiatique, je vous propose de rester en Corée du Sud. Il est en effet temps de jeter un oeil aux nouveautés de ces dernières semaines, et plus précisément, sur celle qui, comme je vous l'avais annoncée, aiguisait le plus ma curiosité : Empire of Gold et ses promesses de confrontations implacables, parsemées de twists.

Ce drama est diffusé sur SBS, les lundi et mardi soirs, depuis le 1er juillet 2013. Côté coulisses, on retrouve à l'écriture Park Kyung Soo, à la réalisation Jo Nam Kook, et à la production Lee Hyun Jik. Ces derniers n'en sont pas à leur coup d'essai ensemble, puisqu'il s'agit de l'équipe à qui l'on doit The Chaser, un drama diffusé l'an dernier également sur SBS. L'occasion de me rappeler que je n'ai toujours pas vu The Chaser... Mais il figure en bonne place parmi ma liste sud-coréenne à visionner ! Une envie de rattrapage d'autant plus accentuée par les débuts très prometteurs que signe Empire of Gold : c'est aussi sombre et impitoyable qu'attendu, mais c'est aussi très prenant en dépit de l'aridité du monde des affaires dans lequel le téléspectateur est entraîné.

[La review qui suit a été rédigée après le visionnage des 4 premiers épisodes de la série.]

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Empire of Gold s'ouvre au début des années 90. Jang Tae Joo est alors un simple étudiant, issu d'un milieu modeste. Son père, travailleur infatigable, espérait pouvoir ouvrir un petit restaurant, objectif pour lequel il a travaillé toute sa vie. Malheureusement, un mauvais investissement immobilier le laisse ruiné, pion impuissant dans une bataille d'enjeux financiers autour de la reconstruction de quartiers. Dans les incidents qui émaillent les protestations qui suivent, il est mortellement brûlé. Tae Joo sacrifiera vainement son avenir pour quelques liquidités qui devaient permettre de lui offrir un traitement nécessaire à sa survie. Avec une mère et une soeur endeuillées et devant se débrouiller seules, Tae Joo se retrouve en prison. Cet enchaînement d'évènements va le conduire à redéfinir ses priorités et à reconsidérer les opportunités qui méritent d'être saisies...

Le puissant groupe Sungjin qui a broyé la famille de Tae Joo dans ces affaires immobilières appartient à la famille Choi, mais, dévorée par les ambitions et les égos de chacun, l'entente est loin d'y régner en interne. Tandis que le patriarche décline et doit affronter la maladie, tous les coups sont permis entre cousins, voire même entre frères et soeurs, pour prévaloir, avec des décisions prises qui seront fatales à certains. Fille de l'actuel président, Choi Seo Yoon l'assiste armée d'une détermination sans faille. Son principal rival est son cousin, Choi Min Jae : les deux perpétuent la relation conflictuelle de leurs pères respectifs. Min Jae est justement celui qui était responsable du projet immobilier qui a brisé la famille de Tae Joo.

Lorsqu'il sort de prison en exploitant un drame dans la famille Choi, Tae Joo décide de se glisser à son tour dans le monde des affaires immobilières, se montrant aussi audacieux que résolu. Il bâtit une entreprise qui le conduit à se heurter aux différents représentants de la famille Choi...

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Empire of Gold démarre sur un ressort narratif le plus classique qui soit dans le petit écran sud-coréen : celui de l'antagonisme social entre riches et pauvres, puissants et faibles. Mais à partir de cette base de départ, il se démarque vite en ne s'enfermant pas dans une approche manichéenne. C'est un drama résolument sombre, impitoyable dans tous les sens du terme, dans lequel aucun personnage n'incarnera une figure de chevalier blanc. Tandis que les Choi s'affrontent pour les commandes du groupe dans une lutte où tous les coups sont permis, Tae Joo intègre vite les codes de ce milieu qu'il abhorre. Mieux, il se prend au jeu de l'adrénaline et des confrontations. Il lui aurait été possible de se retirer après un premier coup réussi, ayant offert à sa mère le restaurant dont elle rêvait tant. Mais il ne peut se résoudre à se détourner de cette voie qui a le potentiel de lui ouvrir les sommets. Poussant le parallèle jusqu'au bout, les affaires immobilières sont ici assimilées aux jeux d'argent : les projets sont autant de paris où on peut, à chaque fois, perdre entièrement sa mise initiale, voire bien plus.

Décidé à prendre sa destinée en main, Tae Joo évolue à partir du moment où il goûte au parfum de la force et du pouvoir. Il peut certes un temps opposer à ses détracteurs qu'il a, lui, conscience du mal qu'il est capable de faire aux plus faibles pour avoir été dans leur situation, seulement il dérive rapidement vers la même gestion brutale que celle de ses adversaires. De manière générale, Empire of Gold est en effet une fiction dure qui présente la vie comme un rapport de forces permanent : il s'agit d'écraser ou d'être écrasé. Dès le quatrième épisode, la compromission définitive de Tae Joo semble actée par une confrontation symbolique avec une jeune femme dont il vient de briser la vie du père : il est renvoyé dos à dos avec les Choi. La noirceur ambiante domine donc véritablement l'ensemble du drama. Chaque protagoniste agit par calcul, selon ses intérêts et sans le moindre scrupule même familial, avec un apparent détachement émotionnel qui n'est remis en cause que lors d'une poignée de situations exceptionnelles.

Fiction presque désensibilisée par le décor ainsi posé, Empire of Gold doit en plus composer avec l'aridité du monde des affaires dépeint. Les jeux immobiliers, entre spéculations et manipulations, sont des problématiques peu accessibles à l'observateur extérieur. La réussite du drama est de savoir les intégrer à la tension ambiante, avec des enjeux et des confrontations qui sont, eux, clairement identifiés. Le téléspectateur s'implique donc, happé par un rythme de narration très vif, qui ne laisse aucun temps mort. Il faut vraiment saluer une écriture qui fait preuve d'une intensité jamais prise en défaut. Les numéros de duettistes et autres confrontations s'enchaînent, parfaitement orchestrés. C'est d'ailleurs dès les premières scènes de l'épisode 1 que la série avait frappé fort et placé la barre très haut. Le contrat est par conséquent parfaitement rempli pour ce qui est de retenir l'attention. Un seul bémol sur ces développements, ou plutôt un avertissement : Empire of Gold doit se méfier du sur-régime et de la tentation d'une surenchère que ces 4 épisodes, solides, frôlent parfois. A elle de savoir s'inscrire dans la durée.

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Si l'écriture est homogène et convaincante, avec plusieurs passages mêmes franchement enthousiasmants, Empire of Gold reste extrêmement académique sur la forme. La réalisation a tendance à privilégier les plans serrés, et il y a peu d'initiatives de la part de la caméra. Le drama retrouve cependant du souffle et une ampleur grâce à son ambiance musicale : il bénéficie d'une bande-son riche en instrumentaux, avec quelques envolées de musique classique qui accompagnent parfaitement la montée des tensions. En résumé, c'est un drama musicalement happant, mais visuellement un peu plat.

Enfin, côté casting, au sein du trio principal, on retrouve tout d'abord Go Soo (My Fair Lady, Will it snow for Christmas ?), à qui est confié le rôle de Tae Joo. Il a la présence qu'il faut à l'écran pour imposer son personnage - et il le prouve dès la marquante scène d'ouverture avec la confrontation face au politicien et puis sa gestion des conséquences. Je vous avoue en plus que c'est un acteur que j'ai tendance à apprécier : cela me fait donc plaisir de le retrouver ! Face à lui, Son Hyun Joo (The Chaser) est impeccable : glaçant en adversaire imperturbable et machiavélique, mais aussi capable de souligner les déchirements auxquels il se résout, notamment dans sa vie maritale. Lee Yo Won (Queen Seon Deok, 49 days) reprend, elle, le rôle de l'héritière, pour l'instant froide et déterminée, pour lequel elle délivre une interprétation honnête qu'il faudra juger dans la durée. Parmi les rôles plus secondaires, on croise également notamment Ryu Seung Soo (Sirius), ou encore Jang Shin Young (The Empress), en associée de Tae Joo, deux acteurs qui figuraient également dans The Chaser

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Bilan : Plongeant le téléspectateur dans une atmosphère aussi sombre que prenante, Empire of Gold signe des débuts convaincants. L'écriture est assurée, et le rythme narratif rapide, avec une bonne exploitation des diverses rivalités. L'intensité du récit et la noirceur ambiante contrebalancent efficacement l'aridité certaine des affaires immobilières mises en scène. Dans ce milieu calculateur où les émotions semblent comme proscrites et où les sentiments ne sont pas une donnée prise en considération, le flashforward du début du premier épisode annonce un développement (un mariage) qui aiguise la curiosité sur ses motivations réelles, d'autant que pour le moment Tae Joo et Seo Yoon sont au mieux indifférents l'un l'autre, au pire adversaires. En résumé, ce sont là des débuts prometteurs qui savent retenir l'attention du téléspectateur. A surveiller... en espérant que le drama assure dans la durée !


NOTE : 7,25/10


Une bande-annonce de la série :

03/07/2013

(K-Drama) The End of the World : un magistral thriller pandémique

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Du point de vue du téléspectateur occidental, le fonctionnement du petit écran sud-coréen semblerait avoir au moins un avantage, celui de proposer des séries complètes, sans risquer de voir une fiction s'échouer tristement sur l'écueil de son non-renouvellement nous abandonnant devant un cliffhanger frustrant. Cependant la logique économique et le règne des audiences y sont tout aussi tranchants. Passons les cas des allongements impromptus où l'on va ajouter quelques épisodes à un drama en cours de diffusion, en raison de son succès, voire parce que la production de celui censé lui succéder a pris du retard. Il arrive aussi que les chiffres soient trop bas pour laisser à la série le nombre d'épisodes initialement commandés. C'est ce qui est arrivé ce printemps à The End of the World. Sauf que ce drama mériterait d'être connu pour bien d'autres raisons que la relative indifférence du public sud-coréen.

The End of the World a été diffusé sur la chaîne jTBC, du 16 mars au 5 mai 2013. Il devait initialement compter 20 épisodes, nombre qui a été ramené à 12 du fait de la faiblesse de ses audiences. S'inscrivant dans le genre classique du thriller pandémique, comme une autre série de ce printemps, The Virus, il s'agit d'une adaptation d'un roman de Bae Young Ik (au titre anglophone "Infectious Disease"). On retrouve à la réalisation, Ahn Pan Seok, qui a fait les beaux jours de jTBC l'an dernier avec la superbe A Wife's Credentials, tandis que le scénario a été confié à Park Hye Ryeon. Malgré son brutal raccourcissement, The End of the World reste une série vraiment intéressante : déjouant consciencieusement les mille et un clichés qui parsèment le petit écran sud-coréen, elle délivre une histoire solide et intense, sobre et cohérente, qui est à saluer.

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The End of the World débute sur des bases très proches de l'autre drama printanier du genre, The Virus. Un virus inconnu fait plusieurs victimes, alertant le centre de lutte épidémiologique du pays. Ne figurant sur aucune des bases de données internationales et ne répondant à aucun des traitements existants, cette maladie atteint un taux de mortalité de 100% : aucun des patients n'en réchappe une fois que les symptômes se sont manifestés. Pire, si elle n'affecte que les êtres humains, elle est extrêmement contagieuse. Le risque de pandémie est d'autant plus important que la source de cette épidémie semble être un homme porteur du virus, mais dont le système immunitaire est parvenu à lui résister. Or, toujours contagieux et bouleversé par ce qui lui arrive, il fuit les autorités, refusant l'isolement qui lui est promis.

The End of the World, c'est donc l'histoire de plusieurs courses contre-la-montre. Les enjeux mis en scène sont d'envergure : il s'agit d'éviter que ne se propage une terrible pandémie. Non seulement il importe d'organiser l'isolement de tous les malades et d'établir des zones de quarantaine, mais c'est aussi sur le plan de la recherche d'un traitement que la course est engagée. Pour nous faire vivre ces storylines qui s'entrecroisent, le drama met en scène différents protagonistes, des membres d'une équipe d'intervention sur le terrain jusqu'aux dirigeants du centre de lutte épidémiologique, en passant par les scientifiques qui tentent de mettre au point un médicament. Les évènements mettront à rude épreuve l'éthique professionnelle, les loyautés et les principes de chacun.

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Sur le papier, The End of the World a tout du traditionnel et familier thriller pandémique, avec la double tension sous-jacente reposant d'une part sur la propagation du virus, et d'autre part sur la mise au point d'un traitement médical. Ce qui permet au drama de se démarquer, ce n'est pas une originalité, mais le style choisi pour aborder un tel sujet. On y retrouve un souci de réalisme pointilleux et rigoureux : nulle surenchère, nulle hystérie, le scénario déjoue méticuleusement toute tentation d'artifice (le contraste avec The Virus est saisissant). L'objectif est de dérouler une histoire solide et cohérente. Le rythme est volontairement lent, faisant preuve d'un sens du détail très appréciable. La tension se construit peu à peu, permettant d'entrapercevoir une gestion de crise qui se veut authentique : cette dernière ne passe pas seulement par des interventions sur le terrain, c'est aussi tout un appareil administratif qu'il faut mobiliser. Ce sont donc des conciliabules, des compromis de hiérarchie, mais aussi de personnes... Il faut du temps pour que ces officiels prennent pleinement la mesure de ce qui est en train d'échapper à leur contrôle, et la série décrit avec rigueur tout le processus suivi.

Car la situation est bel et bien très grave : le titre du drama ("la fin du monde") n'est pas usurpé. Seulement, avant d'arriver à ce pic annoncé de la crise pandémique, The End of the World fait preuve d'une belle maîtrise d'ensemble pour poser un à un ses jalons narratifs. C'est sur ce plan que la réduction de 20 à 12 épisodes laisse bien des regrets. En entrant dans le dernier quart (au moment où le raccourcissement a été connu), le rythme se fait soudain plus rapide, avec un temps d'exposition et de mise en contexte réduit au minimum. Cependant, l'équipe créative parvient à préserver la cohérence de l'histoire. Elle est aussi capable de rester fidèle à l'arc prévu, en extrayant les éléments les plus importants. Le drama atteint dans ses derniers épisodes une intensité durablement marquante. Non seulement la pandémie entre dans un seuil critique, mais surtout la mutation du virus rend les malades doublement dangereux : la maladie agit sur leur personnalité, et la contamination de ceux qui sont censés les soigner devient un de leurs buts. Les raisonnements se font alors de plus en plus glaçants, les plans envisagés de plus en plus désespérés... Les déchirements et les deuils s'enchaînent, au cours d'une apothéose dramatique au souffle extrêmement puissant.

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Série donc rigoureuse, donnant la priorité à un traitement réaliste de ses storylines, The End of the World paraît au premier abord assez froide. Pourtant, ce n'est pas un drama déshumanisé par ses enjeux. C'est même l'inverse, car, au fil du récit, il devient en plus en plus évident que par-delà le cadre de la lutte pandémique, le coeur de son sujet est en fait l'humanité. Une humanité qui n'est certainement pas placée sous son meilleur jour : elle est justement dépeinte humaine, donc faillible. Elle se fait souvent égoïste, établissant ses priorités en fonction des intérêts et attachements personnels de chacun. L'humanité, c'est cet individu infecté et contagieux qui refuse de se rendre, incapable de digérer le sort injuste qui s'acharne sur lui et d'admettre que ses efforts pour payer ses études ont été vains, tout comme les sacrifices faits sur ce bâteau de malheur. Ce sont aussi ces dirigeants du centre de lutte épidémiologique qui naviguent dans les eaux troubles des jeux politiques et carriéristes, cherchant des compromis pour préserver l'intérêt collectif sans nuire à leurs intérêts propres. De même, ce sont encore ces scienfiques qui cèdent aux querelles des égos et aux machinations alors que la survie de la société est en jeu...

Plus généralement, ce sont tous ces êtres humains frappés personnellement par la maladie, ou bien marqués par celle d'un être cher, et qui se retrouvent capables d'actes que leur raison aurait combattu en toutes autres circonstances. Cela peut les conduire aux pires extrêmités : être prêt à sacrifier les autres pour se donner une chance, ou tout simplement pour se venger de n'avoir déjà plus cette chance. Mais derrière ce tableau sombre, The End of the World éclaire aussi ce que cette humanité a de précieux : la faculté de se dépasser en temps de crise, à l'image du plongeon dans le fleuve de Kang Joo Hun pour sauver celui qui peut être la clé vers un éventuel traitement, et par ricochet pour peut-être sauver la jeune femme dont il s'est pris d'affection. Le développement de la relation entre Joo Hun et Na Hyun est d'ailleurs traité avec beaucoup de justesse, sans jamais compromettre la progression de l'intrigue, tout en offrant une accroche émotionnelle au téléspectateur. Le choix de l'authenticité au niveau du développement de la pandémie se retrouve ainsi dans les portraits dressés, ne négligeant rien des pires ressorts de la nature humaine, mais montrant aussi comment l'assemblage de ces individus, portés par des motivations très différentes, peut permettre de continuer à aller de l'avant et, à terme, préserver l'essentiel malgré tout.

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En plus d'un scénario solide et abouti, c'est aussi grâce au soin porté à la forme que The End of the World se démarque : le drama a une identité visuelle très travaillée. La réalisation est superbe, avec une caméra capable de jouer dans le registre de l'intime, comme dans celui des scènes de crise. Du fait du rythme de narration relativement lent, ce sont les images qui prennent le relais pour immerger le téléspectateur dans l'histoire. Le drama se signale également par sa très bonne gestion de son ambiance musicale. Sur ce point, j'ai tendance à penser que l'on reconnaît un bon k-drama dans ce registre à sa capacité à conserver des plages de silence, à l'inverse de ces (trop nombreuses) fictions où la musique est constamment envahissante. Or The End of the World sait utiliser le silence, alternant également des instrumentaux plus rythmés et des morceaux de musique classique. Signe de cette maîtrise, un des moments presque magiques est celui où Kang Joo Hun entraîne une Lee Na Hyun malade au bord du fleuve et se met à entonner une chanson : c'est juste, touchant comme il faut. Un éphémère instant de grâce, tout simplement.

Enfin, The End of the World a le mérite de pouvoir s'appuyer sur un solide casting qui a parfaitement pris la mesure de la tonalité particulière de la série : le maître-mot du jeu d'acteur est donc la sobriété, misant sur cette proximité naturelle qui s'établit avec des figures qui régissent si normalement jusque dans leurs défauts à la situation extraordinaire à laquelle elles sont confrontées. Le duo de l'équipe d'intervention qui se rapproche au fil du drama, composé de Yoon Je Moon (Tree with Deep Roots) - qui interprète le responsable de l'équipe - et de Jang Kyung Ah (Rock Rock Rock) - une nouvelle arrivante -, est parfaitement représentatif de cette approche. La complicité qui s'établit, et le glissement vers la prise de conscience de sentiments, sont superbement retranscrits, avec une fraîcheur qui va droit au coeur du téléspectateur. Et à leur côté, nul ne dépareille. On croise notamment Jang Hyun Sung (Jejoongwon, A Wife's Credentials), Kim Chang Wan (White Tower), Park Hyuk Kwon (Tree with Deep Roots, A Wife's Credentials) - qui a peut-être le rôle le moins dosé -, Yoon Bok In, Gil Hae Yun, Lee Hwa Ryong, Song Sam Dong, Kim Yong Min ou encore Park In Young.

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Bilan : Parti sur les bases classiques du thriller pandémique, The End of the World est un drama d'ambiance qui fait preuve d'une rigueur et d'une authenticité remarquables tout au long de ses 12 épisodes. Privilégiant cohérence et sobriété à toute dérive artificielle, la série propose un récit soigné et appliqué, jamais précipité, où la tension monte progressivement, à mesure que la situation empire. Au fil de cette gestion de crise ainsi dépeinte, il apparaît vite que l'objet central du drama, ce sont avant tout les hommes. Dans le portrait nuancé mais sans complaisance qu'il dresse, il éclaire leur faillibilité, leur égoïsme, mais aussi cette persévérance et cette force qui leur permettent, malgré tout, de réaliser des miracles.

Par ses thèmes et la manière dont ils sont traités, The End of the World reste indéniablement une rareté dans le petit écran sud-coréen. Comme A Wife's Credentials dans un autre registre, elle est une de ces pépites dont on aimerait qu'elles ouvrent une voie dans laquelle poursuivre pour la création télévisuelle du pays du Matin Calme. En attendant, voici 12 épisodes qui méritent assurément l'investissement.


NOTE : 8,25/10


Une bande-annonce de la série :

26/06/2013

(J-Drama) Tsumi to Batsu : est-il possible de s'arroger le droit de tuer ?

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En ce mercredi asiatique, restons au Japon. Je vous propose de revenir sur ce qui semble devoir être le thème marquant de mon printemps sériephile : se glisser dans la tête d'un tueur. C'est-à-dire qu'il ne s'agit pas seulement d'être témoin de crimes ou de suivre une enquête, mais bien d'apprendre à connaître au quotidien, tout au long d'une série, un personnage principal ayant commis ou s'apprêtant à commettre un (ou des) meurtre(s). Dexter est passé par là, mais il y aurait sans doute tout un article à écrire (c'est d'ailleurs un de mes projets qui verra peut-être le jour) sur la façon de jouer sur cette intimité pour susciter le malaise. The Fall en Angleterre et Hannibal aux Etats-Unis ont décliné ce thème d'une façon qui leur est propre, c'est également le cas de la série japonaise sur laquelle je vais revenir aujourd'hui.

Tsumi to Batsu : A Falsified Romance est un renzoku de 6 épisodes qui a été diffusé du 29 avril au 3 juin 2012 sur la chaîne câblée WOWOW. 'Tsumi to Batsu' signifie littéralement 'Crime et Châtiment'. Il s'agit d'une adaptation d'un manga éponyme d'Ochiai Naoyuki, lui-même se réappropriant les thèmes d'un classique de la littérature russe, 'Crime et Châtiment' de Fiodor Dostoïevski. Par la noirceur des sujets mis en scène, Tsumi to Batsu s'inscrit dans la droite lignée d'une autre série proposée l'an passé sur WOWOW, Shokuzai (sortie au cinéma en France il y a quelques semaines). Marquante par l'approche directe avec laquelle elle traite ces thématiques, Tsumi to Batsu n'atteint cependant pas le rang d'incontournable de sa prédécesseur. Elle n'en reste pas moins un visionnage recommandé pour plusieurs raisons.

[La critique qui suit contient des spoilers sur le déroulement de l'intrigue.]

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Tachi Miroku est un jeune homme, asocial et renfermé, qui rêve de devenir écrivain. Il a été profondément marqué par le suicide de son père dans sa jeunesse. Sa mère et sa soeur l'ont toujours couvé depuis, nourrissant d'importantes ambitions pour son futur. Mais après avoir été envoyé poursuivre ses études en ville, Miroku cesse rapidement d'assister aux cours de l'université. Il réussit à faire publier une première nouvelle, dont il reste insatisfait : en transposant à l'écrit les principes fantasmés d'un tueur dans son bon droit, c'est une oeuvre déconnectée de la réalité, formellement irréprochable, mais trop artificielle sur le fond pour toucher.

Un jour, Miroku est accosté par une jeune lycéenne, Risa, qui fait du racolage dans la rue. Un peu plus tard, il la recroise à un café. Il découvre alors qu'elle appartient à un groupe de lycéennes se prostituant, géré d'une main de fer par l'une d'entre elles, Baba Hikaru. Cette dernière a des liens avec un groupe de yakuza, leur remettant une partie des sommes gagnées par ces activités. Face à cette adolescente glaçante, Miroku songe à son livre, à l'idéal de tueur qu'il y avait décrit. Il décide de plannifier le meurtre de Hikaru. Mais les évènements ne vont pas se dérouler comme prévu... D'autant qu'une fois l'irréversible commis, le jeune homme peut-il vraiment rester ce tueur détaché qu'il fantasme ?

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La première chose qui marque devant Tsumi to Batsu est l'extrême noirceur ambiante, à la fois troublante et malsaine. La série entraîne le téléspectateur dans les pires recoins de la nature humaine, avec un récit empreint d'un pessimisme pesant dont les manifestations vont être parfois très éprouvantes à visionner. Si l'histoire tourne autour de l'évolution de Miroku et des choix qu'il va faire, le meurtre n'est pas le seul thème glaçant de l'intrigue, puisque seront abordés et mis en scène, au cours des six épisodes, la prostitution, le proxénétisme, le viol ou encore le suicide... Le drama est d'autant plus marquant qu'il ne se limite à du simple suggestif, profitant de sa diffusion sur une chaîne câblée : outre les violences sexuelles filmées, c'est la mise en scène des meurtres de Miroku qui hante durablement le téléspectateur. L'inexpérience et la tension du moment troublent ses actes : la maladresse pleine de détermination avec laquelle le couteau s'abat, méthodiquement, par trois fois, sur l'adolescente qu'est Hikaru, avant qu'elle ne perde conscience, sont des images d'une force brute presque insoutenable. L'irréversible se réalise soudain, difficilement, et la réalité se change en horreur très concrète quittant le champ des seules idées.

Cependant, ce n'est pas juste par ces faits que Tsumi to Batsu marque, c'est aussi par l'approche psychologique  que le drama propose de son personnage central. Il nous glisse dans l'esprit troublé de Miroku, tentant (vainement) d'expliquer l'inexplicable raisonnement qui le conduit à tuer. Emmuré dans une colère irrationnelle face à des proches trop présents qui se sont obstinés à dépeindre en modèle un père qui a pourtant failli en tout auprès de sa famille, le jeune homme est animé d'une rage et d'une volonté d'émancipation qui l'entraînent dans des fantasmes dangereux. Se rêver écrivain, cela lui permet d'apposer sur le papier ses réflexions, de mettre en mots ses obsessions qui sont les reflets de ses propres ambitions : l'idée de séparer les faibles, les nuisibles, des supérieurs qui sont capables de prendre et d'assumer de légitimes décisions qui impliquent prendre une vie. Si bien que, quand il rencontre Hikaru, jeune femme à la cruauté froide et inaccessible, il veut la réduire au silence. Tuer cette lycéenne proxénète, c'est prendre le dessus sur elle, l'écraser et se prouver quelque chose à lui-même dans la logique tourmentée et paradoxale qui est la sienne : Miroku souffre d'un complexe d'infériorité, tout en aspirant à une supériorité, notamment morale, grâce à laquelle il entend se détacher du commun des mortels.

Or, le plan de Miroku dérape quand une autre adolescente surgit sur les lieux où il vient de tuer Hikaru : Risa, innocente égarée et trop confiante, méprend ses motivations et en paiera le prix de sa vie. Suite à ces actes, Tsumi to Batsu s'intéresse à la manière dont ils vont affecter le jeune tueur. Car Miroku découvre après coup qu'il n'est pas ce prédateur fantasmé vers lequel il souhaitait tendre, et la mort de Risa le hante. L'introduction d'un nouveau personnage, Echika, une autre âme écorchée et brisée mais qui s'accroche, va provoquer une évolution. L'étrange relation qui se développe entre les deux est assurément inclassable. Elle aboutit à des échanges contradictoires, ambivalents, d'une rare intensité, esquissant des réflexions sur la dépendance et la solitude, sur le bonheur et le sacrifice fait en conscience pour blesser, sur l'amour et la violence légitime... Dans cette dernière partie, le drama sonne toujours aussi désespéré, mais après la dérive, vient le temps pour Miroku de faire face. La repentance implique d'expier ce qui a été commis. Poussé par Echika, il substitue, à son ancien idéal de supériorité détachée, une quête vers cette humanité qui lui fait tant défaut dans l'esprit troublé qui est le sien. Mesurer cette absence sera sa prise de conscience personnelle des actes qu'il a commis, venant ainsi conclure six épisodes de progressions et d'interrogations très éprouvants.

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Sur la forme, Tsumi to Batsu est un drama au-dessus de la moyenne dans le petit écran japonais : on y retrouve le soin généralement apporté aux séries proposées par WOWOW. La photographie reste dans l'ensemble volontairement froide, avec une réalisation qui est de très correcte facture. La bande-son n'est pas trop envahissante, avec certains passages dans lesquels transparaît musicalement la solennité propre au sujet. Cette ambiance musicale reflète assez bien la tonalité du récit, à l'image de la chanson qui vient conclure les épisodes est 'Mabushii Asa' du groupe Merengue (cf. la vidéo ci-dessous pour une écoute).

Enfin, Tsumi to Batsu bénéficie d'un casting qui saura trouver le ton juste pour porter à l'écran ces personnages et ces thèmes durs et complexes. Le rôle de Tachi Miroku est confié à Kora Kengo (Shotenin Michiru no Mi no Uebanashi), qui semble destiné à devoir incarner ces figures de tueur poussé à bout : souvenez-vous de son rôle dans Marks no Yama également sur WOWOW, dans Tsumi to Batsu, il reste dans un registre finalement pas si éloigné. A ses côtés, on retrouve Mizukawa Asami (Nodame Cantabile, Last Friends, Gou), une jeune femme qui va, par ses propres tragédies, réussir à atteindre Miroku. Baba Hikaru est interprétée par Hashimoto Ai (Hatsukoi). On retrouve également Ibu Masato (Koshonin, Rinjo, Last Money ~Ai no Nedan~), Sometani Shota (Hei no Naka no Chuugakkou, Gou, xxxHOLiC) ou encore Tanaka Tetsushi (Yakou Kanransha).

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Bilan : Fiction extrêmement sombre, Tsumi to Batsu est un drama très dense et éprouvant à visionner, dont la façon brute et directe d'aborder des thèmes difficiles marque durablement. C'est un récit entièrement dédié à son personnage central : il ne s'agit pas seulement d'en suivre les actions, mais aussi de nous glisser dans son esprit. Au fil de ses réflexions et de la progression que Miroku connaît, une confusion ambiante difficile à appréhender ressort, pouvant dérouter le téléspectateur : elle n'est que le reflet des propres troubles du jeune tueur. Faire le choix de privilégier une telle approche psychologique était en soi un défi complexe, et Tsumi to Batsu n'évite pas quelques écueils. La narration manque aussi parfois de consistance dans sa façon de relier ses diverses storylines éclatées autour de sa figure principale. L'ambition n'en reste pas moins manifeste : cette expérience, même si elle n'est pas exempte de limites, mérite le coup d'oeil, et se démarque dans le petit écran japonais.


NOTE : 7,5/10


Le clip de la chanson qui conclut chaque épisode (
'Mabushii Asa', par Merengue) :

19/06/2013

(J-Drama) Tsugunai (The Unforgiven) : l'histoire d'une reconstruction personnelle

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Retour au Japon en ce mercredi asiatique ! L'occasion de nous intéresser à un court renzoku diffusé à la fin de l'année dernière (du 17 novembre au 1er décembre 2012) sur NHK BS Premium : Tsugunai (The Unforgiven). Comptant en tout 3 épisodes d'une cinquantaine de minutes chacun, il s'agit de l'adaptation à l'écran d'un roman portant le même titre de Yaguchi Atsuko, publié en 2001. C'est une review de Kerydwen il y a quelques mois qui avait attiré mon attention sur cette fiction, son sujet paraissant prometteur : on y retrouve ce thème du retour à la vie (réussi ou non) qui reste prisé dans le petit écran japonais (pas plus tard qu'il y a trois semaines, souvenez-vous de Haitatsu Saretai Watashitachi par exemple). Mêlant un parcours introspectif personnel et des enquêtes criminelles, Tsugunai s'est révélée être une oeuvre intéressante à plus d'un titre, même si son approche n'est pas exempte de limites.

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Autrefois brillant neurochirurgien promis à une belle carrière, Hidaka Eisuke privilégiait son métier à sa famille. Mais un jour, tout a déraillé dans cette vie parfaitement ordonnancée : alors que ses ambitions professionnelles se sont assombries, se retrouvant réduit à un rôle de bouc-émissaire pour l'hôpital suite à une plainte, Eisuke est incapable d'empêcher le brusque décès de son fils. Sa femme ne se le pardonnera pas : elle se suicidera sous ses yeux quelques temps plus tard. Eisuke s'enfonce alors dans une spirale de désespoir. S'estimant responsable de ces tragédies, ayant perdu goût à tout, il devient un marginal. N'ayant plus de domicile, il erre désormais sans but apparent, perdu dans sa propre douleur et persuadé qu'il mérite tout ce qui lui arrive.

Lorsque le drama débute, ses pas le ramènent pourtant, malgré lui, dans sa ville de départ. Un soir, il est témoin du début d'un incendie dans un immeuble. Ayant donné l'alerte, il est vite suspecté par les policiers lorsque l'autopsie des victimes du feu révèle une agression antérieure. L'interrogatoire au commissariat fait ressurgir son identité, et le renvoie à un passé qu'il aurait aimé laisser derrière lui. Il est contraint de renouer avec une connaissance d'autrefois qui souhaite l'aider à sortir de l'enfer personnel dans lequel il s'est enfermé. Forcé de rester sur place sur ordre des autorités, Eisuke se retrouve en plus confronté à de nouveaux meutres dans le même quartier où a lieu l'incendie.

Impliqué dans l'enquête sur l'insistance des policiers, Eisuke voit ses soupçons se porter vers une personne qu'il a sauvée il y a 12 ans. A-t-il aussi sa part de responsabilité dans ces drames qui frappent la ville ?

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Tsugunai est un drama bâti autour de deux volets : il met en avant une approche intime qui va être l'histoire d'une reconstruction, tout en l'imbriquant dans une suite d'enquêtes criminelles. Ces dernières font office de fil rouge, mais restent pourtant en arrière-plan dans les enjeux, car il ne s'agit pas d'une fiction policière classique. L'intérêt de ce versant d'investigation tient à la collaboration exigée de la part d'Eisuke, laquelle va servir de catalyseur, d'électrochoc pour provoquer des rencontres et remobiliser l'ancien chirurgien. Ce qui est au coeur du récit, ce sont avant tout ses personnages ; les enquêtes n'ont d'intérêt que pour l'impact qu'elles ont sur ces derniers. Cela explique certaines limites : elles progressent à leur rythme, sans vraiment chercher ni tension, ni suspense. Si Tsugunai s'en tire au final assez honorablement pour proposer une résolution cohérente les différents crimes - connectés ou non -, le téléspectateur doit cependant passer outre un certain nombre de raccourcis ou de facilités auxquels cède le scénario, que les quelques twists attendus ne parviennent pas à masquer. Outre cette fonction de fil conducteur déclencheur, ce versant policier a aussi le mérite d'apporter au récit un duo d'enquêteurs à la dynamique intéressante,  dont les rapports avec Eisuke vont s'avérer déterminants.

Cependant, c'est dans son thème central, celui de la quête expiatoire, que Tsugunai forge son ambiance particulière. Un questionnement sous-tend l'ensemble du récit : une personne brisée peut-elle guérir ? Ceux dont l'âme même a été atteinte peuvent-ils retrouver, d'une façon ou d'une autre, grâce au temps ou à des évènements, ce goût à la vie perdu ? Le drama propose un récit très humain et personnel en suivant les pas d'Eisuke. Les circonstances lui offrent, pour ce retour dans la ville où tout a commencé, une voie possible vers la reconstruction. Entraîné dans les enquêtes policières malgré lui, il est contraint de sortir de sa léthargie. Des réflexes oubliés ressurgissent alors, et il s'implique à nouveau dans la vie de personnes qu'il croise, et il va même agir, à son niveau, sur leur existence. Dans ce cadre, la série ne ménage pas le recours à des parallèles symboliques pour caractériser le parcours d'Eisuke, lui faisant renouer avec son passé, mais aussi faire face aux conséquences d'anciennes actions. Cela permet la mise en scène d'une évolution progressive d'Eisuke (il n'y a pas de miracle du jour au lendemain), rendue touchante par le partage de ses états d'âme. Le téléspectateur s'implique ainsi à ses côtés. De plus, l'expiation et la guérison seront des thèmes qui toucheront au-delà du protagoniste principal : en lui offrant la possibilité d'aider certains, c'est lui-même qu'il va aider.

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Sur la forme, Tsugunai bénéficie d'une mise en scène relativement soignée, avec une photographie bien dosée aux couleurs souvent épurées. Le temps caniculaire dans lequel se déroule le drama se traduit par quelques effets à l'écran illustrant la vague de chaleur et qui renforcent un ressenti d'atmosphère poisseuse et lourde. De manière générale, il se dégage de l'ensemble une sobriété et un ton posé, renforcés par une bande-son qui reste sur la réserve, accompagnant l'histoire sans jamais se faire envahissante.

Enfin, côté casting, Tsugunai offre avant tout une belle occasion à Tanihara Shosuke (Love Shuffle, Mop Girl, Magma) de s'exprimer pleinement dans un rôle qui ne laisse pas insensible. L'acteur se révèle capable d'apporter ce qu'il faut de nuance à la douleur et à la prostration dans laquelle son personnage semble s'être noyé, apportant progressivement à ce portrait des touches de ce retour à la vie qu'il connaît. A ses côtés, on retrouve notamment Kimura Tae (LADY~Saigo no Hanzai Profile~), Ashina Sei (Cleopatra na Onnatachi, Yae no Sakura), Imai Yuki (Shima no Sensei), Komoto Masahiro (Marks no Yama, Magma) ou encore Nakahara Takeo (Hagetaka, Zettai Reido).

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Bilan : Récit empreint d'humanité, Tsugunai est une déclinaison particulière, engageante et assez convaincante, de ce thème fort qui est celui de la guérison, d'un retour à la vie aux accents de reconstruction. L'histoire retient l'attention avant tout pour le parcours personnel mis en scène, le volet policier étant un fil rouge provoquant ces évolutions, sans prendre le pas sur elles. Si le drama se concentre sur Eisuke, il faut cependant saluer le fait qu'il sait créer différentes dynamiques relationnelles intéressantes, même si le format court ne permet pas de toutes les explorer pleinement. La narration se heurte à certaines limites et cède à des facilités, mais Tsugunai reste une histoire simple et touchante, sur la manière de clôturer les tragédies du passé afin de pouvoir envisager un futur, qui se visionne avec plaisir.


NOTE : 7/10

12/06/2013

(K-Drama / Pilote) Cruel City (Heartless City) : un polar noir musclé qui s'assume

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Restons en Corée du Sud en ce mercredi asiatique, pour nous intéresser à une autre nouveauté de ces dernières semaines : Cruel City (Heartless City). Le premier intérêt de cette série tient au genre investi, celui du polar noir aux accents de thriller et sur lequel flotte un parfum diffus d'Infernal Affairs revendiqué dès sa scène d'ouverture qui voit un policier infiltré se faire balancer du toit d'un immeuble. Outre mon inclinaison pour ce type d'histoire, Cruel City signe aussi le retour (post-service militaire) d'un acteur que j'apprécie, Jung Kyung Ho.

J'étais donc doublement impatiente de découvrir cette série qui, sur le papier, avait plus d'une raison de susciter quelques parallèles, dans l'esprit du téléspectateur, avec Time between Dog and Wolf, fiction prenante malgré ses défauts. Proposé par la chaîne jTBC depuis le 27 mai 2013, les lundi et mardi soirs, Cruel City signe des débuts intéressants. Leur efficacité tient à la manière dont la série assume et s'approprie pleinement son genre sombre, laissant entrevoir un potentiel indéniable (mais aussi des limites).

[Cette review a été rédigée après le visionnage des quatre premiers épisodes.]

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Suite à la mort d'un agent infiltré à laquelle on assiste en ouverture, la police décide d'intensifier sa lutte contre le crime organisé et les trafics de drogue dont ce dernier tire d'importants bénéfices. Cela conduit à la création d'une unité spécialisée. L'objectif posé initialement est clair : il s'agit de faire tomber celui que leurs informations placent tout en haut de l'organigramme mafieux, un gangster surnommé Scale. La direction de l'enquête est confiée à Ji Hyung Min. Ce fils de bonne famille (son père est procureur) choisit de délaisser le barreau pour mener une croisade contre les trafiquants de drogue, une décision prise après l'overdose de son frère. Hyung Min retrouve dans l'unité Lee Kyung Mi, jeune policière dont il est amoureux et qu'il souhaite demander en mariage.

Cependant, l'objectif des policiers va vite évoluer du fait des bouleversements que connaît l'organisation de Scale. En effet, Jung Shi Hyun, un lieutenant de Scale surnommé le Doctor's Son, fomente un véritable coup d'Etat pour renverser son patron et prendre le contrôle de la drogue. En faisant cela, il provoque un engrenage létal d'affrontements qui va avoir des conséquences sur les gangsters comme sur les policiers. Shi Hyun se retrouve soudain dans la peau de l'homme à faire tomber, quitte à instrumentaliser la police pour y arriver. Or, envoyée sous couverture pour essayer de le localiser, Kyung Mi n'a que le temps de découvrir que derrière ce pseudonyme du Doctor's Son se trouve un ami d'enfance : elle est froidement abattue par un tireur inconnu. Suite à ce drame, Soo Min, une aspirante policière dont elle était proche, accepte de prendre la relève.

Entre quêtes de vengeance, manipulations et trahisons, c'est un jeu létal entre policiers et gangsters qui va prendre place. Mais les lignes séparant les camps sont bien plus troubles que d'aucuns le soupçonnent.

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Cruel City assume et revendique son inscription dans une certaine tradition du polar noir. Ses premiers épisodes posent ainsi efficacement un univers qui échappe à toute approche manichéenne : tout y est résolument gris et sombre. Dans un cadre où toutes les allégeances sont fluctuantes, la série prend vite un malin plaisir à troubler les lignes de démarcations entre les camps. Elle réalise un travail appliqué pour construire son atmosphère, marquée par des éclats de violence, des passages de détresse, des confrontations inégales, des injustices... Par contraste, cela souligne avec plus de force les rares moments d'insouciance, issus du passé ou de projets futurs, qui sont autant de petites bouffées d'oxygène humanisant les froides figures qui s'affrontent sous les yeux du téléspectateur.

Chacun agit suivant des intérêts qui lui sont propres. Les motivations restent parfois à éclaircir, faisant intervenir pêle-mêle, ambitions, sentiments, loyauté, revanche et vengeance. Le traitement du personnage de Shi Hyun représente bien cette approche. Il est le plus intéressant car, en quatre épisodes, ce sont des facettes extrêmement différentes, pour ne pas dire contradictoires, qu'il laisse entrevoir. L'image de l'assassin produite en ouverture se nuance progressivement. L'humanisation s'opère certes par des ressorts classiques dans un k-drama, utilisant son passé entre l'orphelinat et la rue, puis sa douleur de perdre un être cher. Mais à défaut d'être original, cela fonctionne, parvenant à créer un personnage fort, dont l'ambivalence intrigue et fascine.

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L'ambiguïté, c'est d'ailleurs le maître-mot des débuts de Cruel City. Non seulement les camps sont mal définis, mais en plus, nul n'est épargné par la noirceur ambiante. Outre la corruption et autres querelles d'égos qui parsèment la police, même les potentiels "chevaliers blancs" dévoilent des versants peu reluisants, à l'image de Hyung Min. Les enquêtes qu'il poursuit sont en effet fondées sur des motivations purement personnelles qui le conduisent à facilement s'affranchir de certains interdits, qu'il s'agisse d'interrogatoires musclés de suspects... ou bien de l'envoi d'une jeune recrue inexpérimentée en infiltration. Cette dernière proposition, s'apparentant plus à du chantage qu'à un acte responsable de policier, montre à quel point chacun suit son agenda. La morale est celle-ci : la fin justifie les moyens, qu'importe les sacrifices.

Ces premiers épisodes posent donc un univers dense. Pour bien prendre la mesure des confrontations en jeu, ils insistent sur le relationnel, présentant les liens passés ou présents qui unissent les différents protagonistes et transcendent les camps. S'annonçant comme une suite de manipulations et de trahisons, la série bénéficie d'une narration rythmée, riche en twists et en rebondissements qui lui permettent d'atteindre un niveau de complexité appréciable, même si cette surenchère se fait parfois au détriment de sa crédibilité (le destin de Soo Min étant assez emblématique). Cruel City a le mérite d'annoncer franchement ses ambitions en se réappropriant sans nuance les codes du genre gangsters, n'hésitant pas à l'occasion à se complaire à l'excès dans un récital d'actions et de violence. L'ensemble est prenant, c'est le principal. Il ne faut cependant pas s'illusionner sur les limites évidentes d'une approche qui peut à tout moment perdre l'équilibre précaire dans lequel elle s'est installée.

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Côté réalisation, Cruel City joue pleinement la carte du polar, avec une photographie assez sombre. La perspective gangster explique les efforts faits pour mettre en scène la violence du milieu : la série assume tellement ce genre que même les scènes où elle en fait trop, comme par exemple lorsque Shi Hyun élimine dans un corridor une bonne dizaine d'hommes de main, fonctionnent crânement à l'écran. Côté floutage, on pourra peut-être discuter des lames floutées tandis que l'on peut montrer sans souci un homme massacré à coup de club de golf (ne pas sous-estimer les golfeurs, ces dangereux criminels en puissance !), mais ce qui est clairement à retenir, c'est la tonalité d'ensemble que les choix formels effectués parviennent à dégager. Quant à la bande-son, elle n'est pas toujours dosée avec toute la justesse que l'on pourrait espérer, mais l'accompagnement musical reste correct.

Enfin, Cruel City rassemble un casting au sein duquel il va pouvoir s'appuyer sur Jung Kyung Ho (Time Between Dog and Wolf, Smile, You). Ce dernier se révèle convaincant dans un rôle qui implique de multiples facettes, tour à tour impitoyable puis déchiré. Son jeu a l'intensité et la présence requises pour un tel personnage. Côté policier, Lee Jae Yoon (Ghost) s'en tire assez honorablement dans ce rôle de détective qui mène ses croisades personnelles contre le crime organisé, au risque de le conduire à des extrêmités inattendues. Là où les choses deviennent plus glissantes, c'est pour la suite du drama qui va notamment reposer sur Nam Gyu Ri (Life is Beautiful, 49 Days), peu présente dans les premiers épisodes, et que l'on découvre à partir de la mort de son amie policière (Go Na Eun). Il y a deux façons d'analyser son casting : en premier lieu, on peut se dire que son personnage étant lui-même difficilement crédible, le fait qu'elle ait ce rôle suivrait une certaine logique..? Plus pragmatiquement, son personnage ayant une introduction laborieuse, le défi à relever est d'autant plus difficile. Il faudra également compter avec Son Chang Min (Horse Doctor) et Kim Yoo Mi.

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Bilan : Cruel City a pour lui d'être un polar noir qui s'assume : c'est très plaisant à retrouver dans le petit écran sud-coréen. La densité de ses intrigues, la manière dont il s'investit pleinement dans ce registre de "fiction de genre" - au risque de tomber dans certains excès -, retiennent indéniablement l'attention. Cependant, cela ne masque pas la fragilité de l'édifice : outre certains raccourcis narratifs, le drama a une tendance dangereuse à sacrifier la crédibilité de ses histoires pour atteindre le résultat souhaité, lequel devant permettre de poursuivre le développement des dynamiques ambivalentes. Cruel City doit aussi se méfier des surenchères, aussi revendiquées soient-elles. Reste que l'ensemble fonctionne pour le moment. Il ne tient qu'à la suite de prouver qu'un polar engageant peut se bâtir sur cette base prenante, mais quelque peu branlante. En tout cas, le potentiel est là : à suivre !


NOTE : 6,75/10


Un teaser de la série :