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17/02/2012

(Pilote NOR/US) Lilyhammer : un gangster new-yorkais en Norvège

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Les séries s'affranchissent peu à peu de leur cadre traditionnel. De nouveaux modèles économiques sont à inventer ; et internet a sa place dans ces expérimentations. En ce mois de février, une nouvelle étape vient d'être franchie : Netflix et Hulu, deux grandes plates-formes de streaming, marchent sur les plate-bandes des chaînes de télévision classiques en lançant toutes deux leurs premières productions originales : Lilyhammer pour la première, Battleground pour la seconde. Et cela n'est que le début, puisque Netflix a d'autres projets en cours, comme House of Cards

Lilyhammer, la première du genre, est une série américano-norvégienne, qui a été diffusée tout d'abord en Norvège, sur NRK1, le 25 janvier 2012 (avec un score d'audience impressionnant). Depuis, depuis le 6 février 2012, la fiction est désormais disponible dans son intégralité sur Netflix. La saison 1 comporte 8 épisodes ; une saison 2 a d'ores et déjà été commandée. Si elle pose les premières bases d'une révolution de l'industrie par son origine et son mode de diffusion, Lilyhammer reste une comédie douce-amère très classique sur le clash des cultures. Cependant son pilote n'en est pas moins sympathique.

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Frank Tagliano, surnommé "the Fixer", appartient à la mafia new-yorkaise. Mais un conflit avec le nouveau boss de l'organisation le conduit à accepter l'offre des autorités américaines de témoigner dans un procès contre lui. Logiquement, il doit intégrer un programme de protection des témoins, sa vie étant désormais en danger. Or Frank veut quitter les Etats-Unis. Il avait été très marqué par la ville de Lillehammer lorsqu'il avait suivi les Jeux Olympiques de 1994 à la télévision : il demande donc à être envoyé en Norvège.

C'est ainsi qu'un gangster new-yorkais aguerri débarque dans la campagne enneigée scandinave, avec en poche de faux papiers fabriqués par le FBI et quelques économies qui devraient lui permettre de débuter une nouvelle existence. Evidemment, la vie à Lillehammer n'a pas grand chose à voir avec les habitudes quotidiennes qu'avait Frank ; il faut dire qu'on y craint plus le loup rôdeur que le potentiel délinquant. Il va falloir apprendre à s'intégrer, tandis que le rêve de l'Américain est d'ouvrir son propre bar.

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Au-delà de ses enjeux linguistiques omniprésents (l'anglais et le norvégien s'entremêlent constamment dans les dialogues) et des vieux réflexes de Frank, prêt à intimider ou à corrompre avec la même aisance qu'il respire, le charme du pilote de Lilyhammer tient beaucoup à la simplicité avec laquelle il entreprend de nous conter les aventures norvégiennes colorées d'un pur new-yorkais. Si l'épisode cède très vite à quelques clins d'oeil incontournables, il le fait avec une douce ironie à laquelle le téléspectateur ne reste pas insensible. Comment résister à cette scène du premier réveil de Frank à Lillehammer au cours de laquelle il découvre, abandonnée devant chez lui, une tête d'animal, écho à une autre tête mythique, celle du cheval du Parrain ? Tandis que le téléspectateur partage l'incrédulité passagère du personnage, la chute qui suit, en découvrant qu'il s'agit simplement de la voisine qui a égaré par mégarde son futur déjeuner, tombe parfaitement.

Cette anecdote est vraiment représentative de la tonalité d'ensemble de ce premier épisode. Sans chercher à innover, Lilyhammer propose un pilote, certes classique dans ses dynamiques, mais sympathique. La série investit pleinement - mais sans paraître pour autant forcée, ou artificielle - ce terrain si bien connu du choc des cultures, toujours prompt à susciter confrontation et décalages improbables. Restant très sobre, avec une retenue qu'on pourrait presque qualifier de scandinave, il s'agit d'une comédie noire, un peu douce-amère, qui dépayse et prête à sourire, et à laquelle on s'attache facilement. Certes, on pourra sans doute reprocher à ce pilote d'exposition son côté par trop convenu, mais il s'agit d'un épisode qui remplit sa mission d'introduction. Par la suite, il faudra donc voir si la série est capable de faire preuve de plus d'initiative (et peut-être d'ambition ?) pour exploiter toutes les facettes de son cadre. 

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Sur la forme, Lilyhammer bénéficie d'une réalisation très classique, capitalisant sur ce ressenti un peu old school. Si l'introduction new yorkaise est expédiée sans chercher à rendre particulièrement crédibles des passages comme la fusillade déterminante du bar, l'arrivée en Norvège permet ensuite à la série de trouver progressivement son style. Tout en restant très simple et sobre, la caméra n'en sait pas moins mettre en valeur le décor enneigé qui sert de cadre à la fiction, offrant un dépaysement garanti au téléspectateur.

Enfin, Lilyhammer rassemble un casting qui sonne très authentique, puisqu'entièrement norvégien à l'exception de l'acteur principal, une tête bien identifiable pour tout sériephile, puisqu'associé à jamais aux séries mafieuses, Steven Van Zandt (The Sopranos), qui est évidemment parfaitement taillé pour ce rôle (et, je l'avoue, sa présence n'a pas été sans éveiller en moi quelque nostalgie). A ses côtés, pour ma première (!) incursion en terres téléphagiques norvégiennes, nous croisons Trond Fausa Aurvåg, Marian Saastad Ottesen, Steinar Sagen, Fridtjov Såheim, Sven Nordin, Anne Krigsvoll, Mikael Aksnes-Pehrson, Kyrre Hellum, Tommy Karlsen Sandum, Greg Canestrari ou encore Tim Ahern.

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Bilan : Comédie sombre au parfum scandinave aussi dépaysant que rafraîchissant (dans tous les sens du terme), Lilyhammer propose un pilote de facture très classique, mais qui n'en est pas moins sympathique. Les dynamiques du clash culturel mis en scène fonctionnent, et, sans révolutionner ce terrain familier, on y retrouve toutes les recettes qui ont su faire leur preuve. Pour huit épisodes, on a donc envie de découvrir comment la série va grandir ! 


NOTE : 6,5/10


Une bande-annonce de la série :  

15/02/2012

(J-Drama / Pilote) Seinaru Kaibutsutachi : entre drama médical et thriller ambivalent

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Après trois semaines passées à s'intéresser à la saison actuelle en Corée du Sud, il est temps de repartir pour le Japon en ce mercredi asiatique. Je dois dire que cet hiver 2012 n'offre pas la programmation la plus enthousiasmante qui soit. A priori, peu de projets avaient retenu mon attention à la seule lecture des pitchs. Certains ne sont pas déplaisants, à l'image du pilote de Hungry, mais au-delà du concept de restaurant français, l'histoire est trop classique pour me convaincre de poursuivre plus avant. S'il faudra que je jette un oeil sur la comédie 13 say no hello work, je mise beaucoup sur Shokuzai, dont j'aurais sans doute l'occasion de vous parler la semaine prochaine. En attendant, je me suis permise une expérimentation, en tentant Seinaru Kaibutsutachi.

Il s'agit d'une expérience car, vous le savez,  je suis assez peu portée sur les séries médicales. Occidental ou asiatique, c'est un sujet que j'ai plutôt tendance à éviter. Mais ce drama semblait cependant avoir plus à offrir, avec un fil rouge assez sombre et quelques accents de thriller, qui ont aiguisé ma curiosité. Diffusé le jeudi soir sur TV Asahi depuis le mois de janvier 2012, Seinaru Kaibutsutachi est l'adaptation d'un roman de Len Kawahara. J'avoue rester pour le moment plutôt mitigée, mais j'ai quand même regardé sans trop de difficulté les trois premiers épisodes de la série.

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Seinaru Kaibutsutachi débute par le flashforward d'une tragédie se déroulant durant une nuit pluvieuse. Une jeune femme enceinte est laissée devant l'hôpital Okubo. Les médecins, parmi eux Shiba Kengo, interviennent rapidement, mais si l'enfant peut être sauvé, la mère s'enfonce inéxorablement. La voix off de Shiba Kengo nous explique alors que les évènements de ce soir-là ne doivent rien au hasard, et qu'ils font partie d'un plan... Le jeune chirurgien va alors nous ramèner un an plus tôt, pour nous expliquer les circonstances qui ont conduit à cette nuit-là.

A l'époque, il est un interne prometteur dans un hôpital universitaire prestigieux. Mais trop droit et n'arrivant pas à se faire une place dans ce milieu ambitieux et concurrentiel, il est "exilé" dans un hôpital excentré, celui d'Okubo, qui doit alors faire face à d'importantes difficultés financières. S'il y découvre un supérieur tyrannique, c'est l'infirmière en chef, Kasugai Yuka, qui retient son attention. La jeune femme, sur laquelle on sait très peu de choses à l'hôpital, fait preuve d'un sang froid et d'une détermination exemplaires. 

Dans le même temps, la soeur de cette dernière, Keiko, se marie avec Fuga Toshio, un responsable d'établissements scolaires issu d'une famille très aisée. Mais au cours de la cérémonie, la jeune femme, alors enceinte, fait une fausse couche. Pour sauver sa vie, elle doit subir une intervention chirurgicale qui la prive à jamais d'avoir un enfant. Profondément marquée, au contact permanent des enfants de par son travail, Keiko ne peut admettre d'oublier ses rêves de maternité. Elle se tourne vers sa soeur aînée pour lui demander de faire office de mère porteuse, une pratique interdite par la loi japonaise. Si Yuka refuse, les deux jeunes femmes vont finalement se tourner vers une connaissance de Keiko qui, elle, accepte. Mais les réelles motivations de chacun ne sont pas toujours celles que les apparences renvoient... 

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Seinaru Kaibutsutachi emprunte à plusieurs genres très différents : le thriller, le drama avec un héros redresseur de torts (ici dans le domaine médical), ou encore la tentative de portrait social en s'intéressant à toutes les classes, des plus aisées jusqu'aux plus pauvres qui viennent se faire soigner à l'hôpital. Sur le papier, l'ensemble s'annonce ambitieux, mais c'est peut-être là où se situe le premier problème de la série. A trop vouloir jouer sur tous les tableaux à la fois, elle finit par ne réussir à n'être totalement convaincante dans aucun de ses domaines.

En effet, au cours des premiers épisodes, on a un peu l'impression d'assister à plusieurs dramas construits en parallèle, passant de l'un à l'autre sans transition, mais dont la finalité et la tonalité sont presque sans rapport. Face à cette dispersion qui brouille la portée de l'histoire, une storyline parvient cependant à tirer son épingle du jeu : celle du suspense, introduit grâce au fil rouge central qui doit nous conduire à la nuit fatale. C'est elle qui peut permettre au drama de s'imposer à terme, et surtout de fidéliser le téléspectateur.

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Cependant, en attendant, le déséquilibre au sein des histoires des premiers épisodes se répercute également sur les personnages. Le versant le plus classiquement médical est exploré par Shiba Kengo, que l'on suit au sein de ce nouvel hôpital où il vient d'être affecté. Le jeune chirurgien conçoit son métier comme un quasi-sacerdoce. Appliqué, pleinement investi dans le sort de ses patients, il apparaît dans ce début de drama trop lisse par rapport à tout ce qui se joue autour de lui. Etant le narrateur de l'histoire, il nous annonce donc les dérapages/tragédies à venir, mais il souffre un peu du syndrome de l'observateur extérieur, trop fade par contraste avec les protagonistes de la trame principale. 

Ces derniers, par leurs ambivalences, certains non-dits ou incertitudes qui les entourent, interpellent et impliquent le téléspectateur. Car au-delà de l'enjeu représenté par la maternité, traitée comme un besoin tour à tour psychologique et social, Seinaru Kaibutsutachi semble s'orienter sur l'exploration de motivations plus sombres, sur ce que l'on peut être prêt à faire pour parvenir à ses fins. Dans ce registre, Kasugai Yuka, par le mystère qui l'entoure, s'impose progressivement comme la figure la plus intrigante, voire inquiétante. Et c'est grâce à eux que l'on finit par se laisser prendre à ce jeu des faux-semblants/fuyants, où chacun se cache et poursuit ses objectifs. 

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Sur la forme, Seinaru Kaibutsutachi  bénéficie d'une réalisation correcte, sans prendre de risque, ni faire preuve d'une réelle ambition. Le principal reproche que je lui adresserais serait lié à sa bande-son, qui, en se rappelant qu'il s'agit d'un thriller potentiellement tragique, dramatise certains passages à outrance, de manière grandiloquente et disproportionnée par rapport au reste de la tonalité du drama. Les Ave Maria de Schubert et autres morceaux de musique classique peuvent constituer une solide OST s'ils sont utilisés avec justesse, mais leur emploi dans Seinaru Kaibutsutachi  sonne souvent trop artificiel. Peut-être qu'au fur et à mesure que la tension s'accentuera, elles paraîtront plus opportunes.

Côté casting, enfin, chacun investit plutôt efficacement le registre dans lequel évolue son personnage. C'est sans doute Nakatani Miki (Keizoku, JIN) qui m'a fait la plus forte impression, mais elle dispose des atouts d'un rôle ambivalent à multiples facettes. Okada Masaki (Otomen) reste pour le moment dans un registre de jeune docteur entièrement dédié à son métier qui, sans surprise, lui va bien. Kato Ai (Best Friend) met un peu de temps à trouver ses marques, mais elle sait retranscrire la détresse et les illusions suite à la fausse couche. Sinon, ne levez pas les yeux au ciel, je vous promets que je n'avais pas fait attention au fait que Hasegawa Hiroki (Second Virgin, Suzuki Sensei, Kaseifu no Mita) figurait encore à l'affiche de ce drama ; à croire que le petit écran japonais est devenu trop petit (ou alors, il est vraiment partout). Parmi les autres rôles secondaires, on croise notamment Suzuki Anne, Omasa Aya, Katsumura Masanobu, Hirata Mitsuru, Kohinata Fumiyo ou encore Watanabe Ikkei. 

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Bilan : Seinaru Kaibutsutachi est un drama qui joue sur de multiples registres, de l'initatique au médical, en passant par le thriller. Le problème est que l'on passe les trois premiers épisodes à attendre impatiemment de voir se rejoindre l'ensemble, et à espérer que la tension monte d'un cran lorsque le récit sera devenu plus homogène. Car au-delà de son décor médical, du drame central qui l'occupe autour de la maternité, c'est avant tout pour ses accents de fiction à suspense qu'il retient l'attention. Il reste à espérer qu'au fil de la progression de l'intrigue, les différentes parties disjointes de Seinaru Kaibutsutachi ne formeront plus qu'une histoire. C'est qu'en dépit de ces inégalités - et d'un certain manque de subtilité dans l'écriture qui pénalise certains propos -, j'ai envie de connaître le fin mot de l'histoire !  


NOTE : 5,75/10 

12/02/2012

(Pilote SE) Äkta Människor : une intéressante série de science-fiction sur le thème des robots

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Mon exploration téléphagique en territoire scandinave se poursuit, avec encore une fois son lot de belles découvertes ! C'est ainsi que My Télé is Rich! s'ouvre officiellement aujourd'hui à un nouveau pays d'Europe du Nord : la Suède. Et ce n'est même pas pour ces fameux polars sombres qui font la renommée de ces contrées qu'elle est à l'honneur, mais pour une série actuellement en cours de diffusion d'un genre que l'on ne se serait pas forcément attendu à croiser dans son petit écran : de la science-fiction ! Un grand merci à Ladyteruki pour ses conseils avisés !

Äkta Människor (Real Humans) est une série qui a débuté sur la chaîne suédoise SVT1 le 22 janvier 2012. Écrite par Lars Lundström, et réalisé par Harald Hamrell et Levan Akin, sa première saison comptera 10 épisodes, d'une durée d'1 heure chacun environ. Nous rappelant que le thème des robots reste un classique indémodable et plein de potentiel, c'est une revisitation nordique de ce sujet qui nous est ici proposée. Dotée d'un univers travaillé, la série se révèle vraiment intéressante. Après avoir visionné quasiment d'une traite les trois premiers épisodes, j'attends impatiemment la suite !

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Äkta Människor se déroule dans une Suède située dans un monde parallèle, ou dans un futur proche, où sont désormais commercialisés à grande échelle des robots humanoïdes, appelés Hubots. Ces derniers se sont petit à petit imposés comme les substituts parfaits pour les tâches les plus diverses, allant de la gestion du quotidien ménager et culinaire de la maison familiale, jusqu'aux activités professionnelles pénibles/répétitives ou nécessitant une rigueur où la faillibilité humaine est parfois prise en défaut. Théoriquement, les hubots permettent donc de dégager du temps libre ou d'assister efficacement leurs propriétaires.

Cependant, leurs programmes devenant de plus en plus performants et évolutifs, leur utilisation soulève désormais de nouvelles problématiques et des questionnements qui divisent la population. Tandis que certains humains s'attachent à leur hubot plus que de raison, d'autres prennent peur en les voyant s'immiscer dans le quotidien et remplacer les humains du travail jusque dans leurs relations sociales. De plus, si les hubots sont juridiquement considérés comme des choses et peuvent être exploités sans la moindre considération, en simple outil fonctionnel dont il faut profiter, il y en a parmi eux qui s'affranchissent des limites de leur programmation pour revendiquer des droits. Quelle place donner aux hubots ? En filigrane, la question située en arrière-plan est tout simplement : qu'est-ce qui peut définir notre appartenance à l'humanité ?

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Les débuts d'Äkta Människor posent les bases d'une série très riche qui entend pleinement s'approprier son sujet. Exploitant son format télévisuel, elle adopte une narration feuilletonnante. Après une entrée en matière très sombre - digne d'un polar nordique, pourrait-on dire -, qui pose immédiatement les enjeux des rapports entre humains et hubots, la série prend ensuite le temps d'installer son univers. Le rythme est volontairement lent, mais la densité du récit compense les quelques petites longueurs. Car c'est une immersion aussi sobre qu'appliquée qui nous entraîne dans une Suède oscillant entre dépendance et rejet pour ses robots. Un soin particulier est accordé à la mise en scène et au moindre détail du quotidien : le décor très travaillé, comme l'illustre notamment un passage dans un magasin vendant les hubots ou encore la nécessité quotidienne qu'ont ces derniers de se recharger, nourrit la fascination du téléspectateur et apporte une réelle crédibilité au traitement du sujet.

Cette impression d'authenticité du cadre de science-fiction est renforcée par le fait qu'Äkta Människor soit une fiction chorale. Introduisant toute une galerie de protagonistes représentatifs des différentes situations personnelles auxquelles la commercialisation des hubots peut donner lieu, la série développe donc des storylines séparées, liées entre elles de telle façon qu'elles ont vocation à terme à s'entrelacer ; mais seul le téléspectateur, avec sa vision d'ensemble, en a conscience pour le moment. Cette approche, ambitieuse, permet de nous imprégner d'une atmosphère et surtout d'offrir une photographie générale de la société suédoise, des tensions qui la parcourent et des débats qui l'animent. Sans précipitation, ni surenchère, mais avec une maîtrise narrative qui permet de savoir dans quelle direction la série s'oriente, Äkta Människor laisse le téléspectateur comprendre et se familiariser avec son univers, tout en posant de solides fondations pour les développements à venir. 

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Bien sûr, les robots humanoïdes sont un sujet maintes fois traité, qui reste un grand classique de la science-fiction. Äkta Människor ne prétend pas renouveler ou révolutionner ce genre bien connu. Mais la série a le grand mérite d'en prendre rapidement la pleine mesure, entreprenant d'explorer toutes les facettes de cette thématique. Le questionnement central reste logiquement celui de la place et de la nature des hubots au sein d'une société quasi-schizophrène qui, tour à tour, les réifie - les séances de configuration après achat, l'entrepôt où les vieux modèles sont détruits, ou encore ces lieux underground de prostitution - ou les personnifie - la femme qui trouve dans son hubot le compagnon parfait et en quitte son mari. Éclairant bien les paradoxes, les malaises et les contradictions suscitées, la série propose un vaste kaléidoscope des différentes réactions, prenant soin aussi d'expliquer les motivations de chacun.

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Dès le pilote - confirmé et précisé dans les deux épisodes suivants -, Äkta Människor embrasse ainsi tous les thèmes légitimement attendus. Nous introduisant dans le quotidien d'une famille-type, on se familiarise à ses côtés à la présence et à l'utilité d'un hubot, comprenant pourquoi ces robots ont pu s'imposer chez la plupart des Suédois. Pour autant, la série n'oublie pas l'autre versant plus négatif de ce choix de société et le ressentiment qui peut en découler. Il y a tous ces métiers où désormais les hubots ont remplacé les humains, provoquant une cohabitation difficile avec ces derniers. Il y a aussi ces hubots qui, en s'adaptant si bien aux besoins de leurs propriétaires, deviennent le centre de leur vie sociale, voire sentimentale : n'est-ce pas nouer une relation "humaine", d'amitié ou d'amour, que de se lier ainsi à son hubot ?

Mais la confiance aveugle dans ces robots doit en plus être nuancée. Non seulement certains programmes se montrent très envahissants, faisant preuve d'une ingérence potentiellement dangereuse au nom du bien de leur maître. Mais il y a aussi, à mesure que les robots se perfectionnent et tendent de plus en plus vers des réactions humaines, une volonté d'autonomie qui risque de finir par transparaître. Pour le moment, la réglementation très stricte des hubots et leur programmation posent des limites à cette aspiration, mais un petit groupe indépendant a déjà brisé ce premier carcan. S'autosuffisant et ambitionnant de se libérer des humains, ils vivent à l'écart. Or les positions, dans chaque camp, se radicalisent progressivement...

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Le soin apporté au scénario en général se retrouve dans les qualités formelles de la série. La réalisation est solide, avec une belle photographie, contribuant grandement à l'atmosphère générale de la série. Pour nous donner vie à ce monde si proche mais qui, en même temps, n'est pas vraiment notre présent, Äkta Människor recourt fréquemment à une image saturée de lumière, extrêmement claire. La mise en scène conserve toujours une sobriété jamais remise en cause, jusqu'à la bande-son qui reste en arrière-plan, utilisée avec parcimonie et intervenant peu dans des images qui se suffisent presque par elles-mêmes.

Enfin, le casting s'impose naturellement à l'écran, bénéficiant de l'approche chorale choisie par la série. Même si ce n'est pas ma première incursion en Suède (les précédents essais n'avaient cependant pas été aussi concluants), Äkta Människor ne comporte que des nouvelles têtes pour moi. Pour interpréter les membres de la famille Engman, on retrouve Pia Halvorsen, Johan Paulsen, Natalie Minnevik, Kare Hedebrant et Aline Palmstierna. Lisette Pagler joue leur nouveau hubot, issue du marché noir sans qu'ils le sachent. Du côté de la faction dissidente, Andreas Wilson marche sur les pas de son père et du projet qu'il nourrissait pour les hubots, mais est prêt à tout pour retrouver Mimi/Anita, tandis qu'Eva Röse est l'inquiétante hubot qui mène le groupe. Enfin, Leif Andrée va être celui que les circonstances vont entraîner vers Äkta Människor (les "vrais gens") et le camp des opposants aux hubots.  

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Bilan : Exploitant pleinement et efficacement sa thématique robotique, Äkta Människor est une très intéressante série de science-fiction. Dotée d'une narration feuilletonnante, prenant son temps pour poser les bases de son univers, il s'agit d'une fiction chorale qui, sans révolutionner son genre, cerne bien ses enjeux et les atouts dont il dispose. Le soin apporté à la mise en scène et la précision avec laquelle nous est dépeint un véritable tableau social confèrent une assise dramatique très crédible au récit. Ces trois premiers épisodes laissent donc entrevoir un réel potentiel. La densité de l'histoire m'a beaucoup plu ; vivement la suite !

Äkta Människor est une série à découvrir pour un large public, allant des amateurs de science-fiction à tous ceux qui apprécient de solides dramas, avec un twist particulier apportant un réel plus.


NOTE : 8/10


Une bande-annonce longue (sous-titrée anglais) de la série :


Une publicité pour Hubot (qui en veut un ?) :

10/02/2012

(Pilote DAN) Lulu & Leon : une mère de famille se lance dans le crime

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Depuis l'année dernière, je me suis découvert un intérêt aussi inattendu que non démenti pour les fictions en provenance des territoires scandinaves. Et si j'ai bon espoir de pouvoir vous parler prochainement d'une série du pays d'Ikea, en attendant, poursuivons notre exploration du petit écran du moment, celui du Danemark. Il faut dire que, hier soir, ça parlait danois jusque sur Arte pour les débuts remarqués d'une des séries phares de DR, Borgen (pour les retardataires, il est toujours temps de rattraper (pendant 7 jours) les deux premiers épisodes).

Si DR est incontestablement celle qui dispose du plus de moyens au Danemark, les autres chaînes s'essaient également aux fictions. Et le résultat est parfois fort sympathique, comme semblent le montrer les débuts de Lulu & Leon (Lulu og Leon). Cette série a été diffusée sur TV3 de 2009 à 2010 (les audiences n'ont cependant pas été au rendez-vous). Elle a duré deux saisons, pour un total de 24 épisodes d'une quarantaine de minutes chacun. Si c'est de son pilote dont je vais vous parler aujourd'hui, c'est que la série sera prochainement diffusée en France, sur Eurochannel (disponible via les bouquets SFR, chaîne numéro 89), à partir du dimanche 26 février 2012, en prime-time à 21 heures.

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Lulu & Leon nous raconte l'histoire d'une mère de famille qui se retrouve entraînée par les circonstances dans le milieu du crime organisé. Elle va devoir apprendre à s'y débrouiller pour continuer à vivre. Pourtant, Lulu avait un quotidien en apparence bien rangé. Habitant en banlieue résidentielle et tenant un salon de coiffure, elle vit avec Leon, officiellement gérant d'un lavomatic, et élève ses deux enfants (l'aînée étant issue d'un précédent mariage). Jusqu'à présent, tout en aimant profondément son compagnon, elle avait posé une condition avant d'accepter de se laisser passer la bague au doigt : que Leon, avec son passé criminel qu'elle n'ignore pas, soit en mesure d'éviter les ennuis vis-à-vis de la police pendant cinq années d'affilée. La série débute le jour où ce challenge est justement réussi et rempli, c'est donc de mariage dont il va être question dans ce premier épisode.

Il faut dire que Leon a déjà tout prévu pour organiser la cérémonie, et cette journée démarre de la plus heureuse des façons pour Lulu. Seulement, au cours de la fête qui suit le passage à la mairie, deux inspecteurs de police débarquent : ils arrêtent Leon et embarquent même Lulu au commissariat dans sa robe de noces. Voyant tous leurs comptes en banque gelés (puisque désormais mariés, elle n'a plus de patrimoine propre), sans argent mis de côté pour parer à ce genre d'urgence, Leon ne peut transmettre à Lulu qu'une chose : l'appareil qui lui sert à faire des casses d'entrepôt en craquant les codes d'entrée... Or il a aussi des dettes qu'il va falloir rembourser...

C'est le début, pour la jeune femme, de la découverte d'un autre milieu, où elle va devoir faire preuve de ses capacités d'adaptation, tout restant une mère de famille présente pour ses deux enfants. 

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Si ce pilote se suit avec plaisir et sans voir le temps passer, c'est tout d'abord parce que Lulu & Leon se révèle être une fiction très rafraîchissante. On y trouve une spontanéité et une sobriété d'écriture qui insufflent un dynamisme communicatif à l'ensemble. A défaut de situations mises en scène particulièrement originales, les dialogues ne manquent pas de réparties. Rythmé et sans temps mort, l'épisode navigue à la lisière du drama et de la comédie, trouvant rapidement ses marques dans cet "entre-deux". L'approche orientée dramédie permet ainsi de traiter avec une tonalité jamais pesante et plutôt légère de thèmes sérieux - la vie d'une famille qui bascule avec l'arrestation du mari, les confrontations avec la police, etc. -, sans avoir à les esquiver ou que ces derniers perdent en tension ou en enjeu.

De plus, le pilote de Lulu & Leon sait éveiller la sympathie du téléspectateur. On s'attache en effet facilement à ses personnages. Tout en distillant quelques pointes de mystère (comme les motivations d'un des deux policiers qui semble essayer d'entraver l'enquête), la série opte dans l'ensemble pour une simplicité d'approche assumée, avec une caractérisation rapide de chacun, qui se révèle au final payante. Il faut dire que Lulu est un personnage principal solide, laissant entrevoir du potentiel. Si elle passe de la belle surprise d'une demande en mariage au saut du lit, à la descente de police qui soudain gèle sa vie, mais aussi ses affaires, elle a trop de caractère pour rester passive dans cette situation. L'escapade champêtre de fin d'épisode, pour récupérer ce qui est dû à son mari, est là pour nous prouver le pragmatisme, mais aussi tout l'aplomb de cette mère de famille qui fait preuve d'un sang froid admirable face à la police. Cela donne donc envie de l'accompagner sur ce chemin vers le monde du crime.

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C'est sans doute sur la forme que le contraste de moyens entre DR et TV3 se ressent le plus fortement, mais la réalisation reste très correcte, tout comme la qualité d'image, la photographie gardant une dominante plutôt froide. Par ailleurs, la bande-son apparaît sympathique, sans trop en faire. J'ai bien aimé l'intégration à plusieurs reprises de chansons rythmées : cela permet à moindre coût de donner de l'énergie au récit, et cela correspond bien à ce mélange des tons où les passages plus dramatiques gardent toujours une certaine légèreté.

Enfin Lulu & Leon dispose d'un casting au sein duquel Lene Maria Christensen (Deroute) s'impose comme la solide tête d'affiche, retranscrivant bien la dualité de Lulu. Derrière une apparence très ordinaire et douce, on devine dès le pilote qu'elle est capable de se révéler dans l'adversité pour prendre les choses en main. A ses côtés, Lars Brygmann (Forsvar, Borgen, Lykke) interprète son mari, désormais derrière les barreaux. On croise également Nicole Johansen, Jacob Ottensten, Lars Kaalund, Jacob Randrup ou encore Henning Valin Jakobsen (Pagten, Broen/Bron).

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Bilan : Fort d'un concept intéressant mêlant familial et fiction de gangster, le pilote de Lulu & Leon se révèle à la fois rafraîchissant et sympathique. On s'attache aux protagonistes de cette dramédie rythmée, au premier rang desquels figure une Lulu qui a tout pour être un personnage fort, ne manquant pas de potentiel. S'il faudra voir concrètement comment sera traité le glissement vers le milieu du crime annoncé par le pitch, la série semble cependant avoir les cartes en main pour proposer un divertissement plaisant à suivre sur une famille assez atypique.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série :

08/02/2012

(K-Drama) What's up (première partie) : au-delà du simple drama musical, un apprentissage de la vie

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Pour terminer avec le cycle "J'aurais voulu être un artiste" entamé sur ce blog vendredi dernier avec Smash, puis Forestillinger, le mercredi asiatique du jour se met au diapason avec What's up. J'ai commencé ce drama avec une curiosité mêlée d'appréhension. Pensez bien que l'enjeu était de taille : pouvait-il réussir là où Dream High, You've fallen for me (Heartstrings) ou encore The Musical avaient échoué ? C'était ma dernière chance d'apprécier un drama "musical". Et peut-être parce qu'il s'est avéré être plus que cela, c'est avec un réel plaisir que je me suis investie dans cette série.

Précisons tout d'abord que What's Up est un de ces rescapés qui aura profité de la révolution du câble, l'an passé, en Corée du Sud. Entièrement tourné avant sa diffusion, il aura longtemps cherché un créneau, pour finalement arriver sur MBN, où il a été diffusé à partir du 3 décembre 2011, les samedi et dimanche soirs. Il s'est achevé la semaine dernière, au terme de 20 épisodes. Initialement, ce billet était censé être une review de pilote. Mais une nuit de semi-insomnie plus tard, ayant vu les 12 premiers épisodes, on parlera donc plutôt de bilan de mi-saison. Ce qui en soit va me permettre d'éclairer les atouts d'un drama qui, s'il n'est pas sans maladresses, n'en demeure pas moins solide et touchant par son humanité.

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What's up nous introduit dans le quotidien d'étudiants du département spécialisé dans les comédies musicales d'une université à l'extérieur de Séoul. L'histoire adopte une approche relativement classique pour ce genre, puisqu'elle va offrir au téléspectateur l'occasion de suivre la nouvelle promotion, l'accompagnant des épreuves de sélection pour gagner le précieux ticket d'entrée, jusqu'à une représentation musicale en guise de show final qui permettra de montrer combien ils ont appris (du moins c'est que je déduis de l'état d'avancement de mon visionnage).

S'intéressant aux étudiants, mais aussi à certains des professeurs, What's up est un drama choral qui nous fait suivre toute une galerie de personnages qui vont mûrir et faire la paix avec eux-même et leur passé, au fil d'un récit qui prend régulièrement des accents un peu initiatiques. De l'ancien délinquant qui a commis l'irréparable et qui est en quête de rédemption à celui qui est complètement paralysé dès qu'il s'agit de faire une performance en public, de celle un peu ingénue qui embrasse une carrière artistique sur les pas de son défunt père jusqu'à celui qui tente d'arbitrer entre sa passion pour la musique et le nécessaire secret qu'il doit préserver sur ses origines... A défaut de réelle originalité, ce sont des personnages qui ne manquent pas de relief que l'on va accompagner.

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Pour comprendre le charme qui s'opère devant What's up, il faut tout d'abord souligner l'ambiance de la série. Loin du clinquant un peu vide qui est une dérive récurrente de nombre de fictions dites "musicales", ce drama investit immédiatement un registre plus dramatique et mâture. Dès la première scène, le ton est donné, avec une chanson surprenante qui retentit, Vois sur ton chemin, des Choristes. Passée la surprise initiale pour le téléspectateur français, puisque ce n'est pas vraiment le genre de chanson que l'on s'attend à trouver là, il faut reconnaître que cette dernière offre une introduction parfaite. En effet, au-delà du mélange des influences musicales, ce flashforward introduit des personnages endeuillés et attristés par un évènement (décès ?) qui ne nous est pas précisé. On devine donc que ce n'est pas devant un simple drama à paillettes que l'on s'installe, mais qu'au contraire, la série va suivre un cheminement plus émotionnel.

La suite du drama confirme les premières impressions laissées par le pilote : le background musical, qui reste toujours un réel atout car utilisé à bon escient et sans jamais se substituer au scénario, se superpose à une véritable leçon de vie. Ce double apprentissage, à la fois artistique, mais également sur soi-même, demeurera une composante centrale d'un scénario étoffé qui y gagne en épaisseur. Ce parti pris peut dans un premier temps dérouter : je me suis initialement demandée, en voyant dès le départ introduites des storylines très dramatiques n'ayant rien à voir avec la dimension musicale, s'il n'y avait pas un risque de trop se disperser. Cependant, sans que le scénario évite certains clichés-coïncidences dont les sud-coréens raffolent, ni quelques raccourcis un peu maladroits, à mesure que l'histoire progresse, la volonté de ne pas faire de What's up un simple drama musical se légitime pleinement. Car c'est par ce côté sombre inattendu que la série gagne une autre dimension, et impose ses personnages.

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En effet, What's up est un vrai drama choral, dont la force réside dans l'humanité, mais aussi une certaine authenticité émotionnelle, qui transparaissent de l'ensemble. Chaque protagoniste se cherche, en quête d'affirmation, de rédemption ou tout simplement souhaitant être en mesure de faire la paix avec soi-même ou avec son passé. La réussite de l'histoire tient à sa capacité à impliquer le téléspectateur dans le destin de tous ces personnages, aux multiples facettes. Ne s'intéressant pas uniquement aux figures principales, la série éclaire tour à tour chacun des protagonistes, fonctionnant pour cela par petits arcs narratifs. Dévoilant et complexifiant les différentes personnalités, tout en fournissant des clés de compréhension, cela a surtout pour avantage de les humaniser.

Ainsi, si cette construction scénaristique a ses limites, car elle peut sembler un peu artificiel par moment, créant des conflits pour ensuite les oublier (Oh Doo Ri et sa mère par exemple) ; dans le même temps, elle permet vraiment de s'attacher aisément à tous. Cela fonctionne d'autant mieux que, progressivement, eux-mêmes constituent peu à peu une bande d'amis qui va découvrir la solidarité entre étudiants. Il y a une justesse dans la manière dont sont caractérisés leurs rapports, qu'il est assez rare de voir mise en scène. Pourtant, assez paradoxalement si vous observez la présentation de l'affiche promo ci-dessus, je dois avouer que ce sont avant tout les personnages secondaires qui ont retenu mon attention. On peut même dire que je me suis rarement autant attaché à un drama dans lequel j'ai aussi peu aimé les personnages principaux.

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C'est bien simple, j'ai adoré la spontanéité et la grâce naturelle de Park Tae Hee, touchante dans sa façon de chérir encore le lien qu'elle a pu avoir avec son père décédé il y a un an. J'ai immédiatement aimé Oh Doo Ri, en observatrice cynique dans un premier temps, qui s'émancipe de la tutelle de sa mère pour peu à peu s'investir également dans le groupe. Les deux "stars" de la fac, une actrice qui fait partie de la promotion, et un compositeur au génie un peu déconnecté, offrent aussi un pendant plus professionnel, avec déjà une expérience de la scène qui tranche avec l'inconséquence de nombre des plus jeunes. J'ai même fini par prendre en pitié le manque de timing chronique de Kim Byung Gun et toutes ses maladresses à répétition. Quant aux professeurs, je ne vous cache pas que Sun Woo Young, avec son sens de la provocation et ses propres blessures passées, est rapidement devenu mon personnage préféré.

En revanche, sans être insensible à la situation difficile de Ha Do Sung ou à la quête de rédemption de Jang Jae Hun, je n'ai pas ressenti pour eux l'attachement spontané dont leurs camarades ont bénéficié. Je ne les déteste pas, je suis leur progression avec le même intérêt, mais je n'ai pas trouvé chez eux l'authenticité et la nuance des autres protagonistes. Peut-être est-ce parce qu'ils sont plus clairement introduits dès le départ, en forçant pas mal les traits, et qu'il n'y a donc pas eu ce charme de la découverte progressive. Cependant, cela ne m'a pas empêché d'apprécier l'ensemble ; ce qui montre bien que la force de ce drama est indéniablement la solidité de sa dimension chorale !

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Sur la forme, What's up dispose d'une réalisation maîtrisée. J'ai beaucoup aimé la photographie qui correspond bien à ce récit de vie qu'est finalement la série. De plus, le drama utilise assez efficacement le background musical. Non seulement les numéros de chant des étudiants sont bien exécutés, tout en conservant une part de spontanéité bienvenue, mais plus généralement la bande-son très diversifiée permet à la série de s'imposer dans ce registre musical sans se restreindre à un seul genre. Le premier épisode est assez révélateur de cette volonté d'échapper à tout classement : la série débute par les Choristes, pour plonger ensuite dans une tranche beaucoup plus hard rock avec le concert d'Hadès, puis c'est un passage du Fantôme de l'Opéra qui est utilisé... Il y a une vraie volonté de prendre en considération toute la musique qui apporte un plus et constitue une réelle richesse.

Enfin, il convient de conclure cette review en saluant le casting de What's up qui permet au drama d'asseoir son registre collectif. On retrouve en tête d'affiche Im Ju Hwan (Tamra, the Island) et Kang Dae Sung (il sait chanter ; pour jouer, ça viendra avec le temps). A leurs côtés, j'ai découvert et grandement apprécié Im Joo Eun (Soul, Wild Romance) et Kim Ji Won (High Kick! 3), les deux rôles féminins les plus convaincants du drama. J'ai aussi retrouvé avec (beaucoup) de plaisir Oh Man Suk (The Vineyard Man, The King and I, Wild Romance), dans ce rôle de professeur atypique. A noter également que, dans les personnages plus secondaires, Lee Soo Hyuk a confirmé tout le bien que je pensais de lui après White Christmas.

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Bilan : Surprenant par sa dimension dramatique, What's up est plus qu'un simple drama musical. Investissant une tonalité plutôt sombre, loin des paillettes auxquelles ce genre peut donner lieu, il s'agit d'une vraie série chorale qui, derrière l'apprentissage artistique, propose une réelle leçon de vie. Cultivant son humanité, elle saura toucher l'affectif d'un téléspectateur qui s'attache très rapidement à sa galerie de personnages. Sans éviter certains poncifs et raccourcis narratifs, il y a cependant une forme d'authenticité dans les relations qui y sont dépeintes, qui donne envie de s'impliquer. Et l'écriture est égale et homogène, la première moitié du drama ne souffrant d'aucun passage à vide.

En résumé, si vous ne deviez en choisir qu'un parmi les différents k-dramas musicaux de ces derniers mois, entre Dream High, Heartstrings, The Musical et What's Up, mon conseil sera : n'hésitez pas, optez pour le dernier !


NOTE : 7/10


La première scène de la série (avec la chanson Vois sur ton chemin, des Choristes) :


Une bande-annonce de la série :


Une chanson de l'OST (Lunatic, par Daesung) :