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13/07/2010

(US) Justified, saison 1 : le charme atypique d'une série entre western et cop-show (Bilan)


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Si j'ai la critique facile envers les productions d'outre-Atlantique, il serait faux d'affirmer que je n'ai pas trouvé nouveautés téléphagiques à mon goût sur les ondes américaines depuis le début de l'année 2010. Je me suis considérablement attachée à plusieurs productions, à commencer par une série qui aura beaucoup navigué à vue, se construisant et s'affirmant progressivement au fil des 13 épisodes qui composèrent sa première saison : Justified.

Ce nouveau programme de FX, débuté sur un pilote aussi ambitieux qu'avare en indication sur la suite de la fiction (cf. ma critique publiée au mois de mars : Justified, héros anachronique d'un polar hors du temps), aura peu à peu atteint un rythme de croisière et une tonalité prenante et divertissante, pas forcément celle attendue, mais incontestablement accrocheuse ; suffisamment, en tout cas, pour que j'éprouve beaucoup de plaisir à la suivre.

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Si Justified a marqué les esprits, c'est tout d'abord grâce à l'atmosphère que les scénaristes sont parvenus à installer. Étrangement indéfinissable, entre dramaturgie théâtrale et second degré salvateur, elle se sera aisément détachée de la simple série policière, embrassant une originalité attrayante et assumée. Plus que ses protagonistes majeurs, c'est dans ses personnages secondaires et ses invités d'un jour, que la série aura trouvé cette tonalité un peu atypique. Par exemple, loin de faire de ses bad guy d'un épisode des prétextes unidimensionnels et sans âme, rapidement évacués, dont le seul objectif serait de mettre en valeur ses héros, Justified aura, au contraire, soigné sa dimension humaine de la plus intrigante des manières.

S'attachant à caractériser et individualiser toutes les figures croisées au cours d'une enquête, la série s'est révélée sans égale pour humaniser ses méchants, à travers deux ou trois petites scénes à la tonalité aussi décalée que détonnante, qui auraient été des détails anecdotiques dans n'importe quel autre show. Jouant sur cette ambiance versatile, essayant beaucoup sans toujours réussir, Justified a ainsi eu le mérite de rompre avec la tentation d'une énième déclinaison de série policière. Maniant avec habileté une autodérision revendiquée, exacerbant certains poncifs ou faisant preuve d'une surprenante subtilité à l'occasion, elle aura gagné, à travers ses expériences narratives, un style qui lui est propre et qui tranche singulièrement dans le paysage téléphagique apathique actuel.

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Au-delà de cette atmosphère qui aura souvent réservé des scènes jubilatoires au téléspectateur, la saison n'aura pas démenti mon qualificatif de "western anachronique" employé pour le pilote. La série aura conservé et exploité, avec un enthousiasme communicatif, quelques-uns de ses repères fondateurs. On y retrouvera, tout au long de la saison, des héros à la gâchette facile, une ambiance très redneck s'épanouissant dans le cadre d'un Kentucky profond qui n'aura sans doute jamais paru aussi sauvage et autonome. Elle sera ainsi parvenue à s'installer crânement dans un créneau, qui aura constitué une de ses attractions les plus solides, loin de tout environnement policé ; d'aucuns diraient "civilisé".

Pourtant, l'enjeu réel de cette première saison aura finalement été ailleurs. Justified aura en effet été parcourue d'une hésitation récurrente sur le format à adopter. Le pilote posait un ton, laissait entrevoir des potentialités, mais n'avait pas résolu une question fondamentale : formula show ou série feuilletonnante ? Une enquête par épisode, ou bien des fils rouges s'imbriquant dans le récit ? Cette problématique aura monopolisé les scénaristes tout au long d'une saison, qui aura été remplie d'hésitations et d'essais plus ou moins concluants sur le sujet. Débutée sur les bases d'un formula show traditionnel, où seule sa tonalité tranchait, la série délaissera progressivement ce schéma pour se tourner vers une approche plus feuilletonnante, où les fils rouges prirent le pas sur les "affaires d'un jour".

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Cette importante fluctuation narrative aura été l'occasion d'être le témoin privilégié d'une expérience scénaristique rare. Le téléspectateur aura en effet assisté à toutes les tergiversations d'écriture qu'aura connues une série dont le cadre n'était manifestement pas strictement fixé dès le départ. De tâtonnements hésitants en ajustements progressifs, Justified sera ainsi passée des stand-alones aux épisodes feuilletonnant. A travers cette évolution, l'enjeu était de savoir comment exploiter au mieux l'univers posé. L'option de facilité aurait consisté à simplement s'enfermer dans des stand-alones, saupoudré d'une pointe de fil rouge, prétexte à retenir l'attention des tééspectateurs sur le long terme, d'une façon très "CBS-like". Mais finalement - et heureusement ! -, les scénaristes auront su adopter une construction narrative plus ambitieuse, et, en cela, beaucoup plus satisfaisante pour le téléspectateur.

En effet, peu à peu, l'arc majeur, reprenant les thématiques notamment familiales déjà entre-aperçues dans le pilote, aura pris le pas sur tout le reste. Hautement symbolique, la boucle se referme superbement avec la conclusion de la saison, reflet de tous les évènements qui auront marqué les 12 épisodes précédents. L'explosion finale apparaît comme une conséquence, aussi directe que logique, des différents choix faits par les principaux protagonistes. Des alliances de circonstances aux étincelles des clashs, les rapports entre les personnages auront fluctué au fil de la saison. Cependant, par-delà cette volatilité humaine constante, avec les décisions prises par les uns et les autres, on se dit que Justified n'aurait pu terminer d'une autre manière sa première saison, tant finalement tout s'emboîte en une vaste confrontation inévitable, entérinant des désunions comme des retrouvailles qui coulent de source.

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Bilan : Cette première saison de Justified n'aura pas été parfaite, loin de là. Hésitante jusque dans les schémas narratifs à adopter, elle aura été le théâtre de nombreux essais et expériences de le part de scénaristes qui n'auront tranché que progressivement entre le formula show et le feuilletonnant, optant finalement opportunément pour la seconde option.

Pourtant, Justified aura séduit et m'aura procuré beaucoup de plaisir. Par sa richesse humaine et la dynamique rafraîchissante utilisée pour l'exploiter. Par sa tonalité décalée, naviguant entre une pointe de dramaturgie et une touche d'autodérision. Elle aura investi ce créneau indéfinissable du western anachronique avec classe et assurance, ne recherchant jamais un rigoureux réalisme. Tout ne fut pas pleinement maîtrisé, mais elle aura toujours mis un entrain communicatif à tenter des choses, réussissant à rendre certains passages jubilatoires.

S'il faudra voir comment la série recyclera ou progressera dans les thèmes abordés au cours de ces 13 premiers épisodes, les scénaristes pourront peut-être profiter de leur expérience pour faire que la saison 2, déjà commandée, soit plus aboutie et maîtrisée, pour permettre à la série de franchir un palier supplémentaire.


NOTE : 7,5/10


Le générique (classe !) de la série :


10/07/2010

(K-Drama) City Hall : une attachante série dans les coulisses de la politique, de la mairie à la Maison Bleue...



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Comme je vous l'annonçais dans l'édito de ce mois de juillet (cf. à gauche), le "mercredi asiatique" est une case bien étroite pour contenir toutes les séries asiatiques dont j'ai envie de vous parler actuellement. La semaine blanche causée par la triste nouvelle de la fin du mois de juin n'a pas arrangé les choses. Par conséquent, je vous propose de profiter du, certes tout relatif, calme estival et du fait que je ne critique aucune série épisode par épisode en ce moment, pour déborder un petit peu et glisser quelques reviews de dramas en provenance du pays du Matin Calme (voire au-delà), en dehors du planning traditionnellement suivi par ce blog.

Aujourd'hui, je vais ainsi vous parler d'un drama que j'ai fini il y a déjà quelques semaines. Avec lui, nous remontons  un peu le temps, car il ne date pas de cette année, mais du printemps 2009. Diffusé sur SBS et composé de 20 épisodes, il figure, à mes yeux, parmi les jolies réussites de la saison dernière en Corée du Sud et mérite pleinement qu'un article, sous forme de bilan global, lui soit consacré. Il s'agit de City Hall.

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City Hall est une série aussi rafraîchissante qu'enthousiasmante qui nous plonge dans les coulisses de la vie politique locale, et même nationale, à travers les destins croisés de plusieurs personnages aux parcours et aux motivations très différents. Nous y suivons le tourbillon rythmé des ambitions des uns et des autres, de la modeste mairie de la petite ville d'Inju aux rêves présidentiels les plus démeusurés, conduisant à la Maison Bleue (Parenthèse culturelle : La "Maison Bleue" est le nom utilisé pour désigner la résidence présidentielle, située à Séoul - de la même manière qu'on parle de Maison Blanche aux Etats-Unis. Elle doit son appelation aux tuiles bleues de son toit : cf. photo).

Tout débute avec la nomination d'un nouveau maire adjoint dans cette ville au parfum de ruralité qu'est Inju. C'est un jeune carriériste aux dents longues, Jo Gook, qui est désigné. Brillant et rompu aux manoeuvres politiques en tout genre, il est plein d'ambitions et parrainé par quelques puissantes figures politiques, dont l'emblématique "BB" (Big Brother). Le jeune homme débarque donc l'esprit déjà tourné vers des échéances nationales, prêt à actionner un agenda politique serré, sensé le conduire, à moyenne échéance, dans les plus hautes sphères du pouvoir, à destination du poste suprême de la vie politique sud-coréenne, la présidence.

Parallèlement, bien loin de ces rêves de grandeur abstraits, Shin Mi Rae mène la vie anonyme d'une secrétaire servant les cafés, dans les échelons les plus bas des employés de l'hôtel de ville d'Inju. D'une spontanéité parfois désarmante, elle se disperse entre services rendus à des amis et son quotidien familial, aux côtés de sa mère, stagnant sans véritable perspective de carrière dans sa branche professionnelle. Mais une initiative politique assez étonnante de la mairie, un concours de beauté ouvert aux habitantes de la ville, va l'entraîner dans un engrenage, où les évènements qui s'enchaînent vont prendre un tour des plus inattendus... A terme, s'ouvre devant elle une hypothétique carrière politique pour laquelle, en jeune novice encore mal aguerrie à ces usages, elle a tout à apprendre pour espérer remporter la mairie qu'elle va être encouragée à briguer. 

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Initié sur un ton dynamique de comédie romantique légère, le drama mûrit, au fil des épisodes, avec ses personnages, gagnant en sobriété, tout en conservant une authenticité émotionnelle touchante qui m'a véritablement conquise.

C'est en effet dans sa dimension humaine que se trouve l'attrait majeur de City Hall. La série bénéficie de  l'alchimie qui se crée entre ses personnages, en particulier - assez logiquement - au sein de son duo principal. Si elle débute de la plus classique des façons, en se réappropriant les ficelles scénaristiques des romances teintées d'humour qui ne manquent pas à la télévision sud-coréenne, agrémentant ses premiers épisodes de passages burlesques et de clash inévitables entre les deux personnages centraux, la série va toutefois éviter les excès. En parvenant rapidement à établir un équilibre dans les rapports entre ses deux personnages, elle va donner une épaisseur, mais aussi une certaine subtilité, à cette relation hésitante qui s'esquisse progressivement sous nos yeux.

Si Jo Gook, par son assurance jamais prise en défaut et sa maîtrise du jeu politique, semble toujours garder le contrôle de la situation, Mi Rae impose, face à lui, sa personnalité, mais aussi ses valeurs. Elle devient rapidement bien plus qu'une énième déclinaison de l'héroïne ingénue dont les dramas de ce genre raffolent. Obstinée et consciencieuse, elle apprend de ses erreurs et ajuste son attitude. Finalement, sans jamais renier ses principes, le téléspectateur la voit grandir au fil de la série. Son ascension professionnelle, initiée au départ presque par hasard, va se trouver justifiée grâce à la dimension que prend le personnage à mesure qu'elle devient, tout simplement, adulte.

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La force, mais aussi l'intérêt, de la relation qui s'établit peu à peu, presqu'à leur insu, entre Mi Rae et Jo Gook, est justement qu'elle n'est pas à sens unique. Cette réciprocité, de plus en plus affirmée au fil de la série, va leur permettre de s'épanouir et également de s'émanciper de mauvais réflexes du passé. Ils vont s'enrichir mutuellement, se fortifiant au contact de l'autre. Si cette maturation sonne si juste, c'est en partie en raison de la richesse de chacun des protagonistes. Loin d'être unidimensionnels, le drama n'hésite pas à mettre en valeur la complexité de leurs personnalité, soulignant les paradoxes qui peuvent les traverser et ces failles dont ils ont eux-mêmes conscience.

Derrière la simplicité de façade de Mi Rae se cache une jeune femme très sensible à l'intérêt général, qui comprend ce que signifie se mettre au service du collectif. Elle va trouver en elle la force de caractère nécessaire pour relever les défis qui jalonnent le lancement d'une carrière politique. L'aide Jo Gook sera nécessaire au départ, mais elle va progressivement s'émanciper, s'endurcissant à travers les épreuves et acquérant une saine indépendance des plus satisfaisantes. Elle s'impose pleinement comme une femme de poigne qui n'hésitera pas à aller à la confrontation pour faire triompher ses idées.

De façon similaire, les certitudes de Jo Gook vont être ébranlées par les nouvelles perspectives qui s'ouvrent dans sa vie. Rompu aux rouages de la politique, il découvre que l'ambition ne suffit pas pour donner l'étincelle qui fera la différence afin d'entamer son irrésistible ascension. Son arrogance ne peut éternellement masquer son absence de vision. Ce relativisme pragmatique dont il se fait le représentant le plus zélé - écho à bien des hommes politiques de nos sociétés modernes - n'est-il pas vain s'il ne peut distinguer le tableau plus vaste, que constitue un pays à gouverner ? S'il n'a d'autre guide que ses intérêts personnels, comment pourrait-il mener à bien un projet à l'échelle nationale ?

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Ainsi, au-delà de son apparence de comédie romantique, City Hall est aussi une série initiatique, qui voit ses personnages grandir avec elle. Cette évolution est d'autant plus appréciable pour le téléspectateur qu'elle permet au drama d'aborder, avec une certaine maturité, l'immersion proposée dans un univers assez particulier, le monde politique. Bien entendu, City Hall ne renie pas l'idéalisme, parfois touchant, qui reste l'apanage de ce genre de séries sud-coréennes, mais elle ouvre malgré tout les portes des coulisses de la vie politique, tant locale que nationale, de ce pays.

Or, je vous ai déjà confié, notamment lorsque j'ai fait le tour de toutes les séries britanniques traitant du sujet, mon penchant pour cette thématique. Ce drama ne faillit pas à la règle : ce cadre contribue, de belle manière, à la densité et à l'intérêt de cette série. Jusqu'à présent, IRIS avait été ma seule occasion de pénétrer dans les couloirs de la Maison Bleue. Si l'occupation de ce bureau constite l'objectif avoué, dans City Hall, il est encore inaccessible. Nous nous situons ici dans les échelons plus bas de la vie politique. Le drama s'attache à nous faire découvrir,  avec sa tonalité toujours légère et rafraîchissante, tous les aspects de ce monde. Et c'est ainsi qu'il est efficacement rythmé par toutes ces péripéties politiques. Nous y suivons les protagonistes au cours de leurs campagnes électorales, municipales mais aussi législatives, jusqu'à leur gestion du quotidien d'un élu, ayant à sa charge une ville ou bien une circonscription qu'il doit représenter au plan national.

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Sur un plan technique, City Hall bénéficie d'une réalisation chatoyante, agréable à suivre. Un peu à l'image du contenu du drama, on y retrouve cette petite impression sucrée, mais sans excès. Si, pour ma part, j'ai beaucoup apprécié la bande-son, qui est agrémentée de plusieurs chansons récurrentes vite entêtantes et cadrant bien avec l'ambiance globale, il faut quand même préciser qu'il y a sans doute une sur-exploitation de cet aspect formel. Les quasi "pauses" musicales, au sein des épisodes, sont en effet récurrentes. J'ai adhéré à cette façon de faire ressortir l'émotionnel, en partie en raison de mon attachement aux personnages, mais certains téléspectateurs pourraient sans doute juger que le réalisateur en fait parfois un peu trop.

Enfin, je n'ai que des compliments à adresser au casting de ce drama. Cha Seung Won (Bodyguard ; il sera aussi à l'affiche d'Athena en novembre prochain) est admirable d'ambivalence. Charmant les téléspectateurs avec le même aplomb que ses vis-à-vis dans la série, l'arrogance de son personnage n'en fait jamais quelqu'un d'antipathique ; au contraire. A ses côtés, Kim Sun Ah (My Name is Kim Sam Soon) s'affirme progressivement avec beaucoup de classe, partageant l'évolution suivie par son personnages. Lee Hyung Chul (On Air, Pasta), d'une sobriété toujours efficace, s'impose en conseiller avisé, tandis que Choo Sang Mi (Snow in August) s'amuse de son personnage invivable.

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Bilan : City Hall est une série aussi rafraîchissante qu'attachante, qui doit beaucoup à l'alchimie existant entre ses personnages et à l'ambiance qu'elle réussit à créer. Comédie légère à ses débuts, romance ambivalente qui évite de trop en faire par la suite, elle mûrit au fil de l'évolution de ses protagonistes. Tandis que le cadre politique permet d'enchaîner les nouveaux défis et de maintenir un rythme dynamique, sans temps mort, le téléspectateur ne peut qu'être touché par l'authenticité émotionnelle qui se dégage de l'histoire racontée.

City Hall est ainsi un beau drama que j'ai pris beaucoup de plaisir à suivre.


NOTE : 8,5/10


Une bande-annonce du drama :

Une des chansons de l'OST de la série (MV - contient des images "spoilers") :

08/07/2010

(Pilote UK) Identity : l'identité, au coeur du crime

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Identity confirme une  tendance initiée au cours du printemps : les acteurs britanniques de The Wire (Sur Ecoute) sont rentrés au bercail et investissent désormais les dernières nouveautés policières d'outre-Manche. De quoi nourrir cette fascination anglaise pour la série de HBO, laquelle s'impose en référence récurrente en Angleterre. Après Idris Elba, dans Luther sur BBC1 au printemps, c'est Aidan Gillen qui débarquait donc, ce lundi soir, sur ITV, dans Identity. Et comme la chaîne avait décidément voulu bien faire les choses question casting, elle s'est en  plus assurée les services de Keeley Hawes, encore fraîchement auréolée du final de Ashes to Ashes.

Je résume donc : Aidan Gillen et Keeley Hawes à l'affiche, pour mener quelques enquêtes au cours de l'été. Vous qui commencez à me connaître un tant soit peu, avec la seule présence de ce duo phare, vous devinez pourquoi il aurait été inconcevable que je ne regarde pas Identity, peu importe que les cop-shows soient un genre que j'ai un peu déserté au cours des dernières années.

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Pure série policière respectant avec une application quasi-scolaire tous les canons du genre, Identity s'est cependant efforcée en amont de trouver un angle d'attaque particulier pour ses enquêtes. C'est ainsi qu'elle a choisi de mettre en scène une unité très particulière au sein de la police, celle qui s'est spécialisée dans les crimes liés à l'identité. Dans une société moderne où règne la dématérialisation complète des informations, par le biais des nouvelles technologies, les détournements, voire les vols d'identité, sont des infractions en forte hausse.

Pour répondre à la spécificité d'un domaine pointu et très particulier, la police a créé une équipe spécialisée, chargée de lutter contre l'inflation de ces atteintes et placée sous le commandement de la DSI Martha Lawson. A ses côtés, elle a rassemblé une équipe hétéroclite de policiers aux compétences et aux modes de fonctionnement aussi différents que complémentaires, parmi lesquels figure le DI John Bloom. Après 15 ans d'infiltration dans les milieux de trafics internationaux en tout genre, notamment de drogue, le revoilà dans sa première affectation "normale", suivant directement cette longue mission très éprouvante qui a logiquement marqué l'homme.

A partir de ces ingrédients relativement classiques, la série va rapidement trouver ses marques pour s'inscrire dans le registre du cop-show le plus traditionnel qui soit.

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L'enquête de l'épisode, sans surprendre, se révèle plutôt prenante et surtout très dense, n'hésitant pas à multiplier les pistes, complexifiant d'autant l'affaire. Elle permet également au téléspectateur de se familiariser avec cette thématique particulière du détournement d'identité, à travers la descente aux enfers d'un homme qui semble être la cible d'un de ces voleurs d'un nouveau genre.

En effet, de l'utilisation de son nom pour le faire crouler sous les dettes jusqu'à des achats malencontreux provoquant des tensions au sein de son couple, depuis plusieurs mois, la vie de Justin Curtis est perturbée par une intervention extérieure malveillante qui l'a plongé dans une paranoïa désespérée. Jusqu'à présent, ses appels à l'aide ont été ignorés : de nos jours, la supposée fiabilité de toutes les données informatiques stockées l'emporte sur la versatilité du témoignage humain. Mais lorsque Curtis est accusé d'avoir renversé une jeune femme, avec une voiture louée à son nom, les choses dégénèrent. Ancien soldat, il accueille les policiers à l'arme à feu tout en clamant son innocence. Une fois l'individu arrêté, Martha est interpelée par sa version de l'histoire. Son équipe va alors devoir démêler le vrai du faux dans les allégations de l'accusé, et essayer de remonter une piste aussi trouble qu'insaisissable.

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Il faut reconnaître que l'enquête est bien huilée et le tout est efficacement conduit, bénéficiant de l'approche relativement originale d'un crimé lié à l'identité. Le téléspectateur suit ainsi sans déplaisir la progression de l'affaire, l'épisode maintenant son attention sans aucun temps mort, ni baisse de régime. Malheureusement, Identity se heurte rapidement à une limite structurelle, voire conceptuelle. Sa recette conserve un arrière-goût extrêmement familier : le fonctionnement de l'équipe de policiers dans son ensemble, comme le numéro de duettistes proposé par les deux personnages centraux, ne s'écarte jamais des conventions du genre. Si bien qu'elle n'apparaît être au final qu'une énième déclinaison de cop-show classique, sans réelle valeur ajoutée. Le cadre londonien est certes agréable, mais ne permet pas d'impulser une originalité suffisante qui donnerait l'occasion à la série d'imposer sa propre identité à l'écran (sans mauvais jeu de mots).

Cependant, la dernière scène de l'épisode, en plus d'introduire un potentiel fil rouge des plus intrigants, ouvre une voie pour dépasser le stade de la série trop policée que propose ce pilote. John Bloom a passé les 15 dernières années de sa carrière, sous un nom d'emprunt, à prétendre être quelqu'un qu'il n'est pas, infiltré au sein d'une organisation criminelle. S'il a fait tomber le chef trafiquant et s'il a réintégré le service normal, la fin de l'épisode nous montre qu'il n'a pas tourné complètement la page du personnage fictif qu'il jouait. Il renoue ainsi le temps d'une soirée avec ses anciennes connaissances. Dans cette ambiance festive, derrière certains regards échangés, lourds de sens, on devine des histoires pleines de non-dits, qui n'ont pas encore livré tous leurs secrets.

John Bloom n'est pas un simple policier pragmatique et très doué, comme nous l'avait démontré l'enquête du jour. Sa non-rupture avec son passé d'infiltré rejoint finalement la thématique globale de la série : les questionnements identitaires ne seront sans doute pas réservés aux seules enquêtes du jour. Ainsi, ce petit twist final apporte un nouvel éclairage au personnage de Bloom et laisse transparaître une autre voie de développement possible à Identity : celle d'explorer son thème au-delà de son lot quotidien d'affaires, en s'intéressant à la personnalité, que l'on devine complexe, de sa figure centrale. 

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Sur la forme, Identity est, à l'image de son contenu, parfaitement calibré. Si la réalisation reste d'une prudente neutralité, en revanche, j'ai assez bien apprécié le coloris et les teintes choisies. La photo de l'image est sobre, mais les couleurs, avec certaines accentuations les faisant ressortir, jouent sur une pointe d'ambiance nostalgique auprès du téléspectateur. C'est un aspect que j'ai bien apprécié, même si cela n'est qu'un détail technique assez diffus.

Enfin, côté casting, l'équipe est homogène et convaincante. Comme je l'ai déjà mentionné, la double présence de Keeley Hawes (Spooks, Ashes to Ashes) et d'Aidan Gillen (The Wire/Sur Ecoute) suffit à mon bonheur. A leurs côtés, on retrouve notamment Holly Aird (Monday Monday), Elyes Gabel (Dead Set), Shaun Parkes (Harley Street, Moses Jones), mais aussi Patrick Baladi (Party Animals, Mistresses) en supérieur très méfiant.

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Bilan : Identity propose un pilote efficace, de facture très classique, sans doute même, "trop" classique. La série apparaît comme une sorte d'énième variante du cop-show traditionnel, avec comme pointe d'originalité, le cadre global entourant ses enquêtes concernant des crimes avec, en leur centre, un enjeu à la sensibilité très moderne, celui de l'identité. Cela se suit sans déplaisir, mais sans réellement s'imposer auprès d'un téléspectateur qui aura peut-être tendance à être d'autant plus conciliant si, comme moi, il apprécie le casting. Cependant, l'entrée en matière est très correcte. Et, surtout, la fin de l'épisode ouvre un fil rouge des plus intrigants sur le personnage de Bloom. Qui sait, peut-être Identity a-t-elle les moyens d'aller au-delà du simple formula show proprement calibré, entrevu dans ce pilote. Dans tous les cas, les amateurs de séries policières devraient sans nul doute y trouver leur compte.


NOTE : 6/10


La bande-annonce de la série :

07/07/2010

(K-Drama / Pilote) Comrades (Jeonwoo / Legend of the Patriots) : le déchirement d'une nation


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Le 25 juin 1950, les forces nord-coréennes franchissaient le 38e parallèle, dans le cadre d'une vaste offensive qui allait marquer le début d'un conflit particulièrement meurtrier, la Guerre de Corée. C'était une guerre visant à la réunification, mais elle allait sceller la partition du pays du Matin Calme. En 1953, l'armistice signée consacrerait un retour au statu quo ante bellum maintenu depuis lors.

Ce mois de juin 2010 correspondait donc à la comémoration des soixante ans du déclenchement du conflit. La thématique demeurant évidemment centrale, l'industrie de l'entertainment n'est logiquement pas en reste, sur grand écran, comme sur petit écran. Ainsi, pas moins de deux chaînes sud-coréennes se sont attelées à des projets pour faire revivre cette tragédie. Si le buzz médiatique indiquait qu'il fallait plutôt surveiller avec attention Road No. One, sur MBC, c'est finalement Comrades (Jeonwoo), sur KBS1, qui a tiré son épingle du souvenir de cet évènement historique, s'installant au-dessus de la barre des 15% de part d'audience avec ses premiers épisodes.

Diffusée depuis le 19 juin 2010 (le samedi et le dimanche) et d'une durée prévue de 20 épisodes, Comrades est en fait le remake d'une série datant de 1975. Loin du mélodrama classique, tout en s'en réappropriant certains codes, elle s'inscrit dans un registre assez atypique à la télévision sud-coréenne, celui des fictions de guerre (je vous avoue que je n'en avais encore jamais vues avant cet été et cette double ration). Même si une pointe de relationnel et de sentiments amoureux percent inévitablement entre certains protagonistes, il s'agit donc d'un drama résolument  concentré sur les combattants et la tragédie en cours.

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Le premier atout majeur de Comrades résidait évidemment dans le sujet particulièrement fort que le drama se proposait de nous raconter. Pour ma part, non seulement j'étais très curieuse de découvrir la façon dont il allait être traité par les chaînes sud-coréennes, mais en plus, j'y trouvais également derrière un intérêt purement historique : rien de tel qu'une série sur tel ou tel évènement pour aller me faire ouvrir les livres d'Histoire et découvrir des rayonnages jusqu'à présent inconnus de la bibliothèque. D'autant que, soyons franc, si j'ai quelques souvenirs vagues d'un paragraphe consacré à ce conflit dans le cadre d'un cours sur la guerre froide, tout cela forme des connaissances bien parcellaires, qui se limitent à quelques repères chronologiques qui ne combleraient même pas une fiche wikipedia. En résumé, en avant pour une double découverte des plus intrigantes !

Dès son premier épisode, Comrades choisit de nous plonger directement au coeur d'un conflit déjà entamé, à une période charnière où les rapports de force s'inversent. En effet, après les grandes manoeuvres initiées par le Nord au cours de l'été 1950, la contre-offensive du Sud paraît inarrêtable. En octobre 1950, Pyongyang tombe. Comrades s'ouvre justement sur cette bataille, donnant d'emblée la tonalité de la série, alors que nous vivons l'assaut aux côtés d'une unité de combat sud-coréenne. L'armée nord-coréenne est alors en déroute. La fin semble proche, certains parlent ouvertement de l'hiver. Mais l'intervention chinoise, avec ses centaines de milliers de "volontaires", va redistribuer les cartes et signer le début d'une nouvelle reconquête venue du Nord, obligeant les forces sud-coréennes à se replier en catastrophe.

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Au milieu des ruines du champ de bataille qui constitue son cadre, Comrades justifie son titre alternatif, "Legend of the Patriots", et l'aspect comémoratif sous-jacent, en s'attachant surtout à la dimension humaine de la guerre. Derrière le rappel des idéaux sacrifiés dans la boue des tranchées, la série se place, certes, dans une perspective majoritairement sud-coréenne, mais elle fait cependant clairement le choix de mettre en scène des protagonistes combattant dans les deux camps, n'occultant ni leur diversité, ni leurs conceptions, parfois très personnelles, de ce conflit fratricide.

Ce soin dans la reconstitution se ressent d'ailleurs jusque dans l'effort fait pour bien poser le contexte global, que rend possible la galerie disparate des personnages mis en scène. Aucune des deux armées ne forme un bloc monolithique. Chaque soldat a son histoire et ses propres motivations. Certains obéissent à des logiques géographiques, le Sud contre le Nord. D'autres à des convictions politiques, qui peuvent aller de la volonté de gagner son indépendance face à "l'impérialisme" américain à la lutte idéologique contre le communisme, en passant par ceux qui, simplement, souhaiteraient survivre ; nul n'obéit aux mêmes raisons.

Au-delà de ce tableau très hétérogène d'un pays déchiré, en arrière-plan, Comrades capte aussi une amertume que tous, sud comme nord-coréen, partagent à des degrés divers et qui les rapprochent d'autant : la désillusion commune d'une nation aspirant à se retrouver après plusieurs décennies d'occupation japonaise, et qui voit ses espoirs sombrer alors qu'elle se transforme en champ de bataille d'une lutte qui dépasse son seul cadre. Du soutien apporté au Nord par les "volontaires" chinois aux bombardements constants des avions de l'armée américaine assistant le Sud, c'est une guerre civile aux couleurs très internationales qui se déroule sur leur sol et dans laquelle se noie la souveraineté coréenne.

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Si les thèmes forts du drama sont rapidement et efficacement posés, en revanche, la série va mettre plus de temps à bien installer ses protagonistes. Le premier épisode, condensé de scènes de batailles tout juste entrecoupées de fugitifs passages de détente, se déroule presque sans temps mort, mais sans, non plus, réellement prendre le temps d'individualiser les personnages et d'humaniser ces soldats qui nous semblent tous interchangeables derrière leurs équipements militaires et la saleté qui recouvre leur visage. Certes, c'est un souci commun dans toutes les séries de guerre (les débuts de The Pacific au printemps avaient bien confirmé cette règle), cependant, j'avoue être restée plutôt réservée à la fin du pilote, un peu dans l'expectative concernant les fils rouges qu'allait suivre Comrades pour nous relater cette guerre. Heureusement, j'ai été vite rassurée par la tournure prise par les deux épisodes suivants, au cours desquels la série s'affirme et l'intérêt du téléspectateur grandit.

S'intéressant aux petites histoires au sein de la grande Histoire, Comrades s'attache aux destins d'une poignée de combattants de tous bords. Si la reconstitution des grandes batailles laisse un peu sur sa faim (pour des raisons techniques surtout), en revanche, la description du chaos suivant la contre-offensive nord-coréenne s'avère beaucoup plus piquante et permet du même coup à chacun des personnages de trouver une place. L'armée sud-coréenne en déroute laisse en effet, en territoire ennemi, des unités dispersées, tandis que des déserteurs, des deux camps, tentent, souvent vainement, de s'éloigner des hostilités. Un chaos ambiant très bien reconstitué.

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L'ensemble est certes considérablement romancé, en adaptant les codes scénaristiques classiques de la télévision sud-coréenne à la situation. Ainsi Lee Soo Kyung, femme officier engagée volontaire dans l'armée nord-coréenne, connaît intimement le sergent de l'unité sud-coréenne que nous suivons depuis le début, Lee Hyun Joong. Leurs routes vont se croiser quand le sort d'un général du Sud va être en jeu. Mais qu'importe les coïncidences, puisque, au contraire, cela permet non seulement de déchirer ce voile d'anonymat recouvrant les soldats des deux camps, mais c'est aussi l'occasion de mettre en exergue, de la plus symbolique des manières, le déchirement interne provoqué par cette guerre civile. Un fossé s'est creusé au nom de convictions politiques, mais la différence entre les combattants des deux camps n'est pas si profonde.

Un dialogue, chargé de regrets, entre Soo Kyung et le général du Sud, témoigne à la fois de la distance existant entre eux, mais aussi de cet amour commun pour un pays qu'ils ne conçoivent simplement pas de la même façon. Assujetti aux russes et aux chinois, ou bien aux américains, où se trouve la réelle indépendance ? Chacun aspire pourtant à une unification du territoire sous sa bannière, ne cherchant pas la scission, mais bel et bien une assimilation. Autre signe de cette paradoxale promiscuité, en dressant ce tableau d'une nation scindée en deux, Comrades n'occulte pas la perméabilité de la frontière délimitant chaque camp. Tous les soldats mis en scène ne sont pas bercés d'idéaux, et les failles de la nature humaine et son instinct de survie reprennent parfois le dessus sur la géopolitique.

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En lui laissant le temps de s'installer et de nous intéresser aux destinées de ses personnages principaux, Comrades gagne progressivement en intensité comme en densité. Les trois premiers épisodes que j'ai eu l'occasion de visionner jusqu'à présent m'ont paru aller crescendo ; au fur et à mesure que le drama avance, l'intérêt qu'il suscite croît. J'ai aussi eu le sentiment qu'à partir du moment où la série choisit de rester, plus modestement peut-être, à une échelle humaine, en s'arrêtant principalement sur le sort de sa poignée de protagonistes, elle réussit à acquérir une épaisseur autrement plus convaincante que lors de ses reconstitutions trop ambitieuses.

Mais on touche ici à un registre sans doute purement formel. Recréer de grandes batailles où s'affrontent des centaines de soldats implique d'importants moyens techniques. Certes, Comrades s'en sort très honorablement. Mais sa réalisation demeure aussi prudente qu'extrêmement classique. Elle parvient à générer une atmosphère guerrières des plus tendues. Cependant, au milieu des explosions et des échanges de coups de feu, il est également très difficile de ne pas dresser des parallèles, somme toute naturels, avec d'autres productions de guerre récemment visionnées. Je reconnais que c'est sans doute un réflexe injuste et surtout très subjectif. S'il est évident que ce drama n'a pas vocation à essayer de rivaliser avec une série aussi esthétiquement aboutie que The Pacific (pour parler d'exemples encore frais), j'ai quand même fortement ressenti la différence de moyens budgétaires. Cet aspect plus "cheap" ne remet pas du tout en cause la série sur le fond, mais il laisse au téléspectateur une impression un peu nuancée au cours de certains grands chantiers de reconstitution. 

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Toujours sur un plan formel, en digne fiction comémorative, Comrades aime logiquement la symbolique et les jolis effets de style. Quoi de plus survoltant que la pleine exploitation d'une bande-son assez ambitieuse ? L'utilisation de musiques aux accents volontairement épiques s'inscrit dans la tonalité globale de reconstitution recherchée par la série. D'ailleurs certains morceaux sont très beaux. Finalement, même si leurs recours sonnent parfois un brin excessif, on se laisse facilement emporter par le souffle qui traverse alors le drama.

Enfin, du côté du casting, à la manière de la série elle-même, les acteurs s'imposent progressivement derrière les figures des soldats. La tête d'affiche est composé d'un solide trio, comprenant les acteurs Choi Soo Jong (Emperor of the Sea), Lee Tae Ran (The Woman Who Wants to Marry) et l'impeccable Lee Duk Hwa (Empress Chun Choo), en général de l'armée sud-coréenne dont l'expérience au combat impose le respect dans chaque camp. Ils sont épaulés par une galerie de personnages plus secondaires tout aussi importants pour donner le ton de la série et contribuer à sa richesse et à sa diversité. Parmi eux, on retrouve notamment Kim Roe Ha, Hong Kyung In, Im Won Hee, Nam Sung Jin, Ryy San Wook, Lee Seung Hyo, Park Sang Woo, Ahn Yong Joon, Jung Tae Woo ou encore Lee Joo Suk.

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Bilan : Série de guerre nous plongeant au coeur du conflit, aux côtés des combattants, Comrades ne se départit pas pour autant des codes scénaristiques classiques de la télévision sud-coréenne, afin d'exploiter pleinement une dimension humaine lui permettant de relater les petites histoires au sein de la grande Histoire. Si les moyens techniques limitent la portée de certaines des reconstitutions les plus ambitieuses, le drama gagne progressivement en intensité et en épaisseur, à mesure que ses protagonistes s'affirment et que des fils rouges plus personnels apparaissent derrière le vaste tableau de la guerre. Comémorative, Comrades s'attache également à son contexte. Elle dresse le portrait teinté d'amertume d'une nation qui assiste à son implosion, sous la pression conjuguée des convictions politiques internes et des interventions internationales.

Ainsi, en dépit d'une certaine inégalité, suivant les storylines, et d'une homogénéité d'ensemble encore à travailler, les débuts de Comrades entretiennent la curiosité du téléspectateur. Si la série poursuit sur la voie suivie par les trois premiers épisodes qui vont crescendo, le résultat final peut se révéler très intéressant. Sinon, voici quand même un drama atypique qui mérite le détour, sur un sujet historique et contemporain qui mérite à lui-seul une attention toute particulière.


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce :


Une chanson de l'OST de la série, avec des photos promos défilant à l'écran :

04/07/2010

(Téléphagie) Consommation en séries et culture en général : une crise, quelle crise ?


Les questions téléphagiques existentielles de Livia, le retour... Cela faisait quelques mois que je ne vous avais plus ennuyés avec elles ! Cependant, ma tentative de rédiger l'édito de ce mois de juillet m'a plongée dans une nouvelle introspection sur le sujet. Rappelez-vous, en décembre, je vous parlais de "crise téléphagique". Je me lamentais à l'époque sur la pauvreté des nouveautés de la saison 2009-2010 aux Etats-Unis. Depuis, j'ai l'impression d'avoir atteint un nouveau stade dans ma téléphagie mais, peut-être aussi, d'y voir un peu plus clair.

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Ce mois de juin a été propice, aux Etats-Unis, au lancement de multiples séries de mi-saison, qu'il s'agisse des fonds de tiroirs des grands networks ou des dernières nées de chaînes câblées. Persons Unknown, Scoundrels, Pretty Little Liars, Huge, etc... je les ai bien vues passer, j'ai même parcouru quelques critiques sur ces diverses nouveautés. L'offre était donc bien là. Pourtant, je n'ai regardé, en tout et pour tout, qu'un seul pilote américain au cours du mois de juin : il s'agissait de Rubicon. Parallèlement, si on fait les comptes, dans la même période, j'ai visionné 5 pilotes de séries ou mini-séries britanniques, y compris les "essais" de BBC3, 5 pilotes de séries sud-coréennes et 1 pilote de série japonaise (qui a dit que je n'étais pas pilotovore ?). Vous comprenez ma préoccupation : ma consommation américaine a chuté au niveau de la japonaise. Et pour que vous cerniez bien l'étendue de cette désaffection, il faut préciser que je ne regarde, actuellement diffusée, qu'une seule série américaine par semaine (merci True Blood). Et la seule reprise que j'attends, en ce mois de juillet, venue d'outre-Atlantique, c'est White Collar. Pourtant, si on prend mon visionnage de séries dans sa globalité, le niveau se maintient.

Bref, les Etats-Unis et moi, nous sommes un peu en train de voir nos routes téléphagiques s'éloigner de plus en plus. Que se passe-t-il ? Où est passée cette hégémonie qui a construit ma sériephilie au cours des quinze dernières années ? Est-ce une question de goûts qui évoluent, d'attentes désormais différentes ? Les séries américaines seraient-elles devenues "nulles" ? Pourtant, dans la blogosphère et sur les forums dédiés au sujet, j'ai l'impression que mon cri retentit dans un vide sidéral, comme si j'étais seule confrontée à ces doutes, tout le monde poursuivant son quotidien téléphagique sans le moindre grain de sable pour ébranler ses certitudes (même si certains n'ont pas été tendres avec les dernières nouveautés). Le problème viendrait-il donc de moi, non de l'offre téléphagique proposée ?

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Alors je me pose des questions : pourquoi n'ai-je même pas eu envie de tester tel ou tel pilote américain en ce mois de juin ? Ce n'est pas un souci de qualité, puisque je n'ai même pas souhaité visionner les pilotes. En y repensant, il y a tout un tas de raisons qui me viennent à l'esprit, très différentes suivant les cas. Par exemple, il y a ces séries des grands networks que l'on devine, avant même leur programmation, déjà condamnées. Prenons Persons Unknown. Honnêtement, l'histoire aurait potentiellement pu me plaire, le casting également. Mais pourquoi aurais-je envie d'aller m'investir dans une série déjà virtuellement abandonnée, en laquelle personne ne parait croire ? Cela ne me donne aucune motivation pour tenter l'aventure, peu importe que les scénaristes aient prévu de boucler l'ensemble en 13 épisodes réglementaires. Ne vous moquez pas, non, je ne suis pas devenue allergique au fonctionnement de la télévision américaine, j'ai juste maintenant un peu de mal à cautionner certaines pratiques. Je deviens peut-être conservatrice, mais j'ai l'impression d'avoir désormais besoin d'une part de certitude. Une mini-série britannique (ou une saison de 6 épisodes), ou bien une série asiatique, vous savez généralement d'avance où vous mettez les pieds et dans quoi vous allez vous s'investir. Il y a un contrat pré-établi et univoque avec la chaîne de diffusion.

Sauf que, si ce besoin de sécurité agit effectivement à la marge chez moi, vous allez m'objecter à juste titre que j'ai pourtant testé les pilotes de séries "potentielles" de BBC3, pour lesquelles aucune certitude n'existe. Et à partir de là, je crois qu'on touche à un second problème, structurel celui-là, que je suis en train de percevoir de plus en plus clairement. J'ai longtemps été plus que fascinée par ce vaste pays que sont les Etats-Unis, par sa diversité, ses paradoxes, sa culture et son histoire. Or, désormais, il faut le reconnaître : cet intérêt a faibli. Ne vous méprenez pas, il y a des aspects qui exercent toujours chez moi une véritable fascination : le Sud profond, l'histoire passée ou certains milieux plus atypiques. En revanche, les surannés New York ou Los Angeles me laissent à présent presque de marbre.

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On aurait tort de voir en la "sériephilie" une passion indépendante et de vouloir cloisonner ses diverses activités culturelles. Mon attrait pour les séries a toujours été conçu comme partie intégrante d'une vie culturelle plus globale. Finalement, est-ce un hasard si, au cours des quinze dernières années, les romans que j'ai le plus lus étaient écrits par des auteurs américains, si les films que j'allais le plus voir au cinéma étaient américains ? Il ne faut pas y voir là qu'une simple question d'offre dominante. Or, aujourd'hui, si je fais un bilan plus général de ce début d'année 2010, quels livres ai-je lus dernièrement (histoire de faire quelques parallèles) ? L'ombre des armes, de Hwang Sok Yong, Là-bas, sans bruit, tombe un pétale de Ch'oe Yun, L'éternel Empire de Yi In Hwa, Le pendule de Foucault d'Umberto Ecco... Pour tout vous dire, le dernier auteur américain que j'ai lu en 2010, c'était Cormac McCarthy, vous visualisez donc le genre.

J'ai souvent l'habitude de dire que la téléphagie fonctionne par cycle, avec un mouvement de balancier incessant, mais je pense aussi qu'elle s'inscrit dans une curiosité culturelle globale, avec laquelle elle intéragit. Elle est un reflet de centres d'intérêts plus profonds. J'avoue avoir longtemps pensé qu'il y avait quelque chose de déterminant dans le seul format télévisuel. Le postulat de base, moteur de tout, serait l'affirmation suivante : "j'aime les séries". Naïvement, j'imaginais que, au-delà des frontières, le label "série" serait ce dénominateur commun qui expliquerait, seul, cette volonté constamment renouvelée de toujours faire de nouvelles découvertes. C'est une vision des choses à laquelle je ne crois plus vraiment ; ou, du moins, je pense que c'est très réducteur d'apprécier ainsi son identité téléphagique.

Chacun a un rapport propre au petit écran, qui lui est personnel, par conséquent, mes vues sont très subjectives. Mais, de façon plus prononcée qu'auparavant, j'ai l'impression que ce qui me motive à pousser toujours plus loin la découverte de nouveaux horizons téléphagiques, ce n'est pas seulement la sériephilie en tant que telle, c'est un mouvement plus vaste. Ce n'est probablement pas un hasard si ma baisse d'intérêt pour les productions américaines coïncide avec ma baisse d'intérêt pour l'Amérique en général. Pour moi, les séries ont toujours constitué un vecteur d'ouverture vers une culture, vers une société. Leur visionnage a pu être la conséquence d'un intérêt pré-existent pour tel ou tel pays, ou bien il a pu aussi générer une fascination pour de nouvelles destinations. Je ne me serais sans doute jamais véritablement arrêtée sur la culture asiatique si je n'avais pas eu le prisme des séries pour m'y introduire. Pourtant, désormais, mon attrait dépasse de loin ce seul média télévisuel. Il existe une intéraction entre tous les aspects de cette vie culturelle que je n'avais jamais perçue aussi clairement qu'actuellement.

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Certes, à trop essayer de comprendre le pourquoi du comment, j'en viens peut-être à tirer des conclusions excessives, mais je pense avoir mis à jour certaines dynamiques téléphagiques, dont je n'avais jusqu'à présent jamais pleinement pris conscience.

Au fond, peut-être que mon problème avec les séries américaines, surtout celles des grands networks, ce n'est pas un souci de qualité, de style ou même de politique de diffusion... Peut-être que mon réel problème vient surtout du fait qu'elles racontent une Amérique, ou du moins une facette de celle-ci, qui ne m'intéresse plus désormais ?

J'avoue que c'est plus une hypothèse qu'une certitude, mais c'est un peu comme cela que je comprends ma sériephile actuellement. Mon amour des séries ne semble pas remis en cause, j'en veux pour preuve le temps que je passe toujours devant elles... Alors, serait-ce une forme de maturation d'une passion qui, elle, demeure intacte ? Est-ce grave, docteur ?


Et vous, chers lecteurs, rassurez-moi, avez-vous déjà expérimenté ce type de "crise téléphagique" ? Les nouvelles productions des grands networks US vous fascinent-elles toujours autant ?

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PS : Tout cela ne veut pas dire que je ne parlerai plus de séries américaines sur ce blog, mais il fallait que je vous confie un peu mes doutes et essaye de vous expliquer pourquoi je parle de ces fictions proportionnellement assez peu, par comparaison à la place prise par les séries britanniques ou coréennes.