08/05/2014
(Pilote BR) FDP (Filhos da puta) : dura lex, sed lex
Outre ses quelques grands thèmes (épidémie, religion), le Festival Séries Mania, c'est aussi l'occasion d'effleurer un peu la diversité du petit écran mondial, et donc l'occasion de voir traités des sujets pour le moins originaux. (fdp) (abréviation en VO sans doute jugée insuffisamment explicite, puisque le sens de l'acronyme a été ajouté entre parenthèses dans le titre au festival) appartient sans conteste à cette catégorie. Cette "comédie grinçante" (qui relève plus de la dramédie) de HBO Latino (chaîne dont je vous ai déjà parlé avec la chilienne Profugos ou encore la brésilienne Filhos do Carnaval) nous plonge dans le milieu du football... du point de vue de l'arbitre.
La série compte en tout 13 épisodes qui ont été diffusés du 26 août au 18 novembre 2012. Elle sera proposée en France (sur France Ô) à partir du 3 juin prochain, à l'occasion du Mondial de football, lequel se déroule justement... au Brésil. Étant donné qu'il reste assez rare que des fictions sud-américaines nous parviennent en dehors des telenovelas, et que le thème traité nous plonge dans le sport roi de ce pays, (fdp) apparaît comme une curiosité doublement intéressante. Au vu de ses premiers épisodes, le concept sur lequel elle repose a des limites, mais elle dispose cependant d'atouts qui méritent un coup d’œil.
[La review qui suit a été rédigée après le visionnage des deux premiers épisodes.]
Lorsque débute (fdp), la vie personnelle de Juares Gomes (interprété par Eucir de Souza) est en pleine crise. Il lui faut en effet gérer une procédure de divorce houleuse, se battre pour la garde de son fils, mais aussi, au cours du deuxième épisode, revenir habiter un temps chez sa mère et découvrir que cette dernière ne mène pas la vie sage et rangée qu'il imaginait. En plus de jongler entre tous ces soucis, Juares Gomes exerce un métier pour le moins exposé : il est arbitre de football. Chaque semaine, des milliers de personnes le maudissent et l'insultent dans les stades où il officie, peu importe la qualité de son arbitrage et son respect des règlements. Il mène donc une carrière professionnelle sous haute tension, avec pour objectif d'arbitrer un jour une finale de Coupe du monde, dans le contexte extrêmement passionnel qui entoure ce sport au Brésil. (fdp) va nous faire vivre à ses côtés les péripéties qui rythment son quotidien.
Lorsqu'elle s'essaie à la dramédie familiale, il faut reconnaître que (fdp) paraît très (trop?) classique, un peu poussive même dans la mise en scène des problèmes que cumule Juares dans sa vie privée. La série ne cherche pas à innover. Tout son intérêt repose en fait sur la confrontation de ces schémas narratifs extrêmement ordinaires avec un cadre autrement plus original pour une fiction : celui du monde du football. En lui-même, le choix d'un récit réalisé du point de vue de l'arbitre, anti-héros de la dramaturgie sportive par excellence, est déjà intriguant. Mais (fdp) va plus loin en proposant une immersion d'ensemble du téléspectateur dans l'ambiance de ce milieu. Outre l'arbitrage, elle alterne en effet différents angles d'approche, des médias jusqu'aux supporters. Mieux encore, elle entreprend de capturer et de retranscrire à l'écran l'atmosphère survoltée d'un stade de foot brésilien, laissant entrevoir, comme son titre l'annonce, la violence qui s'exprime à l'encontre de l'arbitre, avant même le début du match. Elle relève même avec brio le défi (notamment technique) difficile que représente la reconstitution crédible de matchs (du moins pour mon regard de néophyte), ce qui permet de voir Juares directement dans le feu de l'action.
C'est d'ailleurs sur le terrain que (fdp) s'épanouit vraiment, capable alors d'imbriquer différents niveaux d'enjeux qui constituent le cœur de la série. Tout d'abord, elle n'a pas son pareil pour faire rentrer le téléspectateur (même habituellement indifférent à ce sport) dans le match mis en scène : par l'intermédiaire de quelques séquences, brèves et s'enchaînant rapidement (nul n'a le temps de s'ennuyer, ni de décrocher), elle transmet toute la ferveur qui entoure la partie, et parvient à faire comprendre les problématiques d'arbitrage à trancher (lesquelles sont classiques : siffler un penalty, décider une expulsion...). En plus de tout cela, la série intègre parfaitement ces bouts de matchs dans son histoire. C'est-à-dire qu'elle ne se contente pas d'une approche sportive, mais qu'elle transpose sur le terrain les tensions introduites auparavant dans la vie personnelle de Juares. Ainsi, dans le premier épisode, le personnage est en pleine bataille judiciaire pour la garde de son fils. Or le juge est un fan d'une des équipes disputant la finale dans laquelle il officie. Se greffe donc un dilemme éthique avec lequel débat en son for intérieur Juares durant tout le match. Dans le second épisode, c'est avec l'ami de sa mère qu'il doit composer, un ami qui retrouve au fil de la partie tous les réflexes des supporters face à l'arbitre lorsque leur équipe perd... et hurle ses sentiments dans le micro qu'on lui a tendu. Autant de confrontations qui sont pour le moment gérées avec aplomb par Juares et qui donnent un piquant appréciable à la série.
Bilan : Suivant des ressorts assez classiques, (fdp) est une dramédie dans laquelle le personnage central voit sa vie personnelle à problèmes s'entremêler avec sa vie professionnelle. S'il n'y a rien de neuf dans la gestion du versant privé, en revanche, c'est la particularité du métier de Juares qui confère à la série une originalité et un attrait indéniables. S'ouvrant au monde du football par le prisme de celui qui représente l'anti-héros par excellence de ce milieu, la série réalise un admirable travail d'immersion, permettant de faire prendre la mesure du contexte passionnel entourant ce sport au Brésil. La façon dont elle capture l'ambiance d'un match est notamment une réussite formelle à saluer. Grâce à leur brièveté (format d'une demi-heure), les épisodes évitent d'être étirés inutilement, même si c'est souvent dans la seconde moitié qu'ils prennent pleinement leur envol.
(fdp) saura-t-elle tenir la distance d'une saison ? Tout dépendra de sa capacité à continuer à faire se répondre le privé et le football. En tout cas, si elle intéressera sans doute plus les amateurs de ce sport, je suis la preuve qu'elle peut aussi être visionnée par des personnes à mille lieues de ce centre d'intérêt. Ce n'est certes pas une œuvre incontournable, mais c'est certainement une curiosité... à plus d'un titre !
NOTE : 6,5/10
Une bande-annonce de la série :
20:00 Publié dans (Séries Amérique Latine) | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : brésil, hbo latin america, hbo, fdp, filhos da puta, eucir de souza, paulo tiefenthaler, vitor moretti, maria cecilia audi, cynthia falabella, fernanda franceschetto, adrian verdaquer, walter breda, flavio tolezani, domingas person, chris couto, carlos meceni, gustavo machado, saulo vasconcelos | Facebook |
28/06/2012
(Pilote US) The Newsroom : une immersion dans les coulisses de l'information télévisée
Dimanche soir, débutait sur HBO une des séries les plus attendues de l'été : The Newsroom. Une collaboration entre la chaîne câblée américaine et Aaron Sorkin - qui a déjà démontré tout son intérêt pour les coulisses d'émissions télévisées de Sports Night à Studio 60, c'était un peu un des fantasmes de la sériephile que je suis. Puisqu'il ne semble pas possible aux médias, de séparer le produit créé du créateur quand il s'agit d'écrire sur cette série, il est sans doute honnête que je rappelle en préalable la place qu'occupe The West Wing (A la Maison Blanche) dans la construction de ma passion pour toutes les productions du petit écran. C'est à elle et à Aaron Sorkin que je dois ces dix dernières années plongée dans un univers des séries qui n'a cessé depuis de s'enrichir. Je suis et reste une grande fan de son style d'écriture : c'est le scénariste qui m'a le plus marqué à la télévision toute période et tous pays confondus.
Refermons cette parenthèse, et passons à The Newsroom qui est donc arrivée sur les écrans américains il y a quelques jours... précédée d'un vent de critiques négatives qui s'est abattu comme un raz-de-marée sur les réseaux sociaux et auquel nul n'a pu échapper. Ça a été particulièrement frustrant à supporter, parce que cela a rendu impossible un visionnage à peu près neutre du pilote (LadyTeruki a fait à ce sujet un billet très juste dont je conseille la lecture). Il est toujours mieux d'aborder une série en se demandant si elle va nous séduire, plutôt qu'en recherchant si oui ou non toutes ces réactions étaient fondées (même si ce sont les épisodes suivants qui ont fait l'objet du feu le plus nourri). Si on fait abstraction de ces considérations extérieures, je ne vais pas faire durer le suspense : j'ai pris beaucoup de plaisir devant le pilote de The Newsroom. Tout est loin d'être parfait. Il y a des reproches justifiés à formuler, mais tout est aussi là pour faire passer un très bon moment.
Le pilote de The Newsroom s'ouvre sur une "session vérité" au cours d'une conférence à laquelle participe Will McAvoy. Ce présentateur populaire, lisse et sans parti pris apparent, dont on murmure que la source du succès est justement cette neutralité et sa capacité à ne gêner personne, recadre une étudiante ayant posé une naïve question sur la grandeur du pays, en se fendant d'une longue tirade remettant en cause la conception que l'on peut avoir des États-Unis. Puis, une fois les vagues soulevées par cette sortie un peu apaisées, c'est après quelques semaines de vacances que Will McAvoy reprend le chemain de ses studios... pour découvrir que Charlie Skinner, le président de ACN, a provoqué en son absence une vaste redistribution des responsabilités au sein de son staff, sans même prendre la peine de l'informer.
Il a bien joué, pour mener à bien ses projets, sur l'ambition du producteur exécutif de l'émission, Don, lequel n'a écouté que son pragmatisme (et son ras-le-bol de Will) pour accepter de prendre en charge une nouvelle émission lancée dans une case horaire plus tardive. La plupart des membres de l'équipe accompagnent Don dans ce qui ressemble fort à une défection générale. Parmi les quelques fidèles faisant preuve d'une loyauté désuette, se trouve notamment Maggie Jordan, promue récemment par qui pro quo assistante personnelle de Will. Dans le même temps, Charlie a contacté pour remplacer Don une vieille connaissance, Mackenzie McHale : une nomination sensible, puisque cette professionnelle aguerrie et de caractère a eu une histoire passée avec Will. C'est peu dire que tous ces bouleversements ne plaisent guère à ce dernier qui va tenter de reprendre le main.
C'est dans ce contexte de transition et de changement que le pilote nous permet d'assister à la première émission de rentrée de la nouvelle équipe en gestation.
La construction du pilote de The Newsroom va suivre un schéma familier, mais qui n'en demeure pas moins d'une efficacité redoutable pour introduire les enjeux de la série. Afin de capter immédiatement l'attention du téléspectateur, l'épisode recourt à une scène d'ouverture dite "électro-choc" qui cherche (et parvient) à provoquer, voire marquer, en usant pour cela du mécanisme du discours-vérité déclamé sans pincettes. L'idée est d'aller à la confrontation directe d'idées assimilées sans recul, en énonçant des faits que tout le monde n'est pas prêt à entendre, en l'occurence sur l'Amérique et sa supposée grandeur. Il faut reconnaître à la série le mérite d'avancer ici à visage découvert : on pourra être ou non en accord avec les opinions qui seront affichées par la suite sur la question du rôle de la télévision et de son traitement de l'information, mais le discours tenu restera à la fois revendicatif et démonstratif, ne cherchant pas à faire dans le consensuel.
La limite de la démarche extrêmement didactique du pilote est que, si elle est parfaitement huilée et cadencée, elle apparaît aussi transparente et un brin forcée. Après la tirade introductive où l'arrogance du personnage principal contribue autant que ses propos à poser le ton d'ensemble, la deuxième étape est constituée par l'arrivée de Mackenzie. C'est alors l'occasion de débattre théoriquement sur la conception du journalisme : cette fois-ci, il s'agit d'être constructif. Ambitieuse, la productrice voudrait revoir l'approche de l'information dans les médias. Derrière la pointe d'idéalisme que permet la référence à Don Quixote, on a surtout ici un confus mélange de pessimisme dans le diagnostic qui est fait des attentes du public, mais aussi une volonté de changement à l'entrain communicatif. Enfin, troisième étape, le dernier tiers de l'épisode propose une sorte de mise en pratique accélérée de ces idées, en utilisant rien moins qu'un évènement réel dont le traitement médiatique est re-écrit idéalement. N'ayant que le temps d'aller à l'essentiel, le pilote cède à des facilités narratives - avec les sources parachutées grâce aux contacts du nouveau venu - qui accentuent le versant didactique, en amoindrissant le réalisme. Dans cette optique, le choix du sujet renforce d'ailleurs l'impression d'assister à une leçon, mais il faut reconnaître qu'il a le mérite de parler directement et immédiatement au téléspectateur.
The Newsroom ne tergiverse donc pas, affichant clairement ses partis pris et ses ambitions. Ce qui contribue grandement à la force du pilote et à l'adhésion rapide du téléspectateur, c'est que l'ensemble bénéficie d'un style d'écriture fluide et rythmé, caractéristique d'Aaron Sorkin, qui reste, pour moi, ce qui se fait de plus jubilatoire dans une fiction sur grand comme petit écran. Les dialogues sont extrêmement fournis, parfaitement ciselés. Les répliques et les tirades fusent sans temps mort, se confrontant, voire se superposant parfois au gré de conversations multiples menées de front. La tension entretenue par de simples échanges en est grisante. C'est ainsi que, plus que la démonstration-même qui a sa part de maladresses, c'est l'écriture qui est l'attrait principal de ce pilote. Le dynamisme d'ensemble est communicatif, et le téléspectateur se laisse emporter, passant un bon moment - en dépit d'un léger flottement de rythme vers la moitié de l'épisode.
De plus, l'introduction des personnages est aussi globalement réussie, usant de codes classiques, en entremêlant déjà vie professionnelle mais aussi vie privée, chez des figures que l'on devine de toute façon workaholic. Will avec son caractère désagréable, ses explosions de colère et son arrogance, n'en conserve pas moins une sacrée présence. Il ne laisse pas indifférent. Avec sa nouvelle productrice, mais aussi son patron, figure patriarcale dont l'influence sur tous ces bouleversements ne doit pas être sous-estimée, on obtient un trio avec de fortes personnalités dont les échanges sont prometteurs. A côté, les jeunes ambitieux qui composent le staff forment une équipe pas très soudée, mais professionnelle et efficace. Qu'il s'agisse de Maggie ou encore de Jim, on a des personnages auxquels s'attacher. C'est à travers eux qu'on s'immerge vraiment dans la dynamique des coulisses de l'émission.
Sur la forme, le pilote de The Newsroom est une sorte d'hybride, peut-être un peu surprenante à première vue, entre passé et modernité. En référence au passé, on a notamment une bande-son très traditionnelle. Cette impression est également renforcée par un générique qui, entre images d'archives et présentation successive des acteurs, apparaît comme un écho-(hommage ?) à une télévision datant de quelques années. Mais par ailleurs, on a également de la modernité avec un style de réalisation, assez nerveux, se rapprochant presque du mockumentary. Un instant déstabilisée, la nostalgique de Thomas Schalmme que je suis s'est cependant progressivement habituée au fil de l'épisode.
Enfin, The Newsroom bénéficie d'un casting solide et impeccable pour porter à l'écran les dialogues sur-rythmés proposés (ce qui est déjà un sacré défi à relever. Jeff Daniels trouve dans le personnage de Will une figure, à la fois charismatique mais tombée dans bien des travers, qui est un challenge appréciable, à la mesure de son talent : il apporte une présence déterminante à l'écran. Emily Mortimer met un peu plus de temps à bien trouver ses marques, son personnage étant introduit en plusieurs étapes. Mais elle sait peu à peu s'imposer, notamment à partir du moment où elle entre véritablement en action, durant l'émission. A leurs côtés, on retrouve des acteurs très convaincants, des grands anciens comme Sam Waterston, ou bien des jeunes tout aussi à l'aise comme John Gallagher Jr, Alison Pill, Dev Patel, Olivia Munn ou encore Thomas Sadoski.
Bilan : Parfaitement servi par une écriture fluide et enthousiasmante, le pilote de The Newsroom se livre à une démonstration introductive qui cède à certains excès didactiques et à des raccourcis, mais qui a le mérite d'aller à l'essentiel et d'afficher clairement le parti pris de la série. L'ensemble se révèle particulièrement efficace, notamment grâce à un style et à des dialogues qui font mouche et posent des personnages que l'on a envie d'accompagner dans ce qui marque un nouveau tournant pour l'émission. Le visionnage est très plaisant, parfois franchement jubilatoire, et il laisse une impression positive sans pour autant occulter les limites perceptibles dans la démarche adoptée. En résumé, ce n'est pas parfait, mais c'est solide. A suivre.
NOTE : 8/10
La bande-annonce de la série :
Le générique :
12:13 Publié dans (Pilotes US) | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : hbo, the newsroom, jeff daniels, emily mortimer, john gallagher jr., alison pill, thomas sadoski, dev patel, olivia munn, sam waterston | Facebook |
26/04/2012
(Pilote US) Veep : une satire politique aux piques encore mouchetées
Aux Etats-Unis, ce mois d'avril a été consacré au lancement de nouvelles comédies sur HBO. Girls est tout d'abord arrivée, avec son parfum un peu indépendant, son authenticité troublante, son réalisme aux frontières du pathos... Un véritable portrait générationnel sur lequel, après deux épisodes, je suis toujours incapable d'avoir un avis. Peut-être est-ce parce que la série me tend un miroir trop brut sur une génération à laquelle j'appartiens. En attendant donc d'être en mesure d'écrire quelque chose sur Girls, je vais m'arrêter sur celle qui a débuté dimanche dernier (le 22 avril) : Veep (histoire de continuer la programmation politique du blog).
Dire que Veep était très attendue dans les rangs sériephiles est un euphémisme. La série réunit en effet une équipe, tant devant que derrière la caméra, qui a de belles références, et laisse donc entrevoir un vrai potentiel. Le retour de Julia Louis-Dreyfus, mais aussi la présence de Tony Hale, retiennent forcément l'attention des amateurs de comédies d'outre-Atlantique. Quant à moi, c'est plus la perspective de retrouver derrière le projet Armando Iannucci qui m'intriguait (il a quand même signé quelques-unes des meilleures satires politiques de ces dernières années, sur le petit (The Thick of It) et le grand écran (In the loop)).
Veep nous introduit dans les coulisses politiques de Washington, nous invitant à suivre le quotidien de la vice-présidente, Selina Meyer, et de son staff. S'efforçant d'exister dans ce rôle secondaire quelque peu ingrat et avant tout protocolaire, subordonné aux directives de la Maison Blanche, Selina tente de prendre des initiatives pour marquer son passage à cette fonction. Ainsi, au cours de ce pilote, la verra-t-on d'abord essayer d'associer son nom à une politique écologique... pour finir ensuite par tenter de réparer les dommages collatéraux causés par un tweet trop enthousiaste sur le sujet d'un membre de son staff, ayant irrité le lobby pétrolier. L'objectif de la série est clairement affiché : elle va nous dépeindre sans complaisance les rouages de la vie politique fédérale américaine.
Adoptant le style caractéristique du mockumentary, se plaçant au plus près des échanges, capturant les hésitations comme les répliques assassines, la caméra se fait volontairement - et pour le plus grand bonheur du téléspectateur - intrusive. Doté d'une bonne dose de cynisme, l'épisode va être rythmé par les différents ratés internes qui parsèment ces premières journées types aux côtés de Selina. Il faut dire que l'on croise dans les bureaux de la vice-présidence, à des degrés divers, un certain nombre de véritables bras cassés : leur connaissance des moeurs de Washington et le pragmatisme ambitieux inhérent à leurs postes n'occultent pas une spontanéité gaffeuse qui va être le principal ressort comique du récit. En cela, l'épisode s'avère efficace pour introduire cette galerie de protagonistes aux personnalités et fonctions bien définis. Veep s'est en effet rappelée qu'un mockumentary n'est pas un simple one-man-show (ou ici, woman-show) : se reposer sur un lead fort peut être une bonne chose, à condition d'avoir un entourage bien présent pour intéragir avec le personnage central. Au vu de ce pilote, il semble bien que la dynamique qui s'esquisse soit prometteuse !
Mais si elle pose bien son cadre, c'est dans sa tonalité que Veep laisse une impression plus mitigée. Ce pilote propose en effet une introduction très hésitante (trop ?) dans l'univers politique, bien loin de la noirceur, du corrosif, et de l'irrévérence que l'on pouvait légitimement attendre d'un tel sujet, traité sous un tel format. Les dialogues sonnent presque timorés par moment. Certes, il y a bien quelques petites piques marquantes très réussies, comme lors de l'excellent dîner au cours duquel la vice-présidente doit improviser un discours - les différents incidents qui marquent la soirée, de l'intervention de l'employé de la Maison Blanche pour raturer le discours pré-écrit à la "gaffe" de Selina. Cependant, dans l'ensemble, j'ai eu le sentiment d'assister à une première prudente dans laquelle la série cherche encore son ton et son équilibre ; et les scénaristes sans doute une certaine assurance d'écriture.
Au-delà de ces ajustements à faire sur le fond, sur la forme, Veep est déjà au point : elle adopte les traits classiques et appropriés du faux documentaire, avec une caméra nerveuse au plus près de l'action et des conciliabules entre les membres du staff. Une approche brute qui convient parfaitement. Enfin, la série bénéficie d'un solide casting : c'est sur les épaules de Julia Louis-Dreyfus (Old Christine) que repose une bonne partie de la consistance du personnage de Selina Meyer. Au fil de l'épisode, elle se montre de plus en plus convaincante. A ses côtés, Tony Hale (Arrested Development) n'a pas son pareil pour jouer les assistants personnels un peu bênet - c'est d'ailleurs ce duo qui nous réserve quelques-uns des échanges les plus savoureux - ; et Anna Chlumsky, Matt Walsh, Timothy Simons, Reid Scott ou encore Sufe Bradshaw sont tous aussi convaincants.
Bilan : Peut-être en attendais-je trop. J'aurais tant aimé vous parler de coup de foudre, puisque tous les ingrédients paraissaient a priori réunis. Mais ça n'a pas été pas le cas. Ne vous méprenez cependant pas : le pilote de Veep pose indéniablement des bases solides - notamment sa galerie de personnages - et laisse entrevoir, par éclipse, d'intéressantes promesses pour traiter par l'absurde et avec un certain cynisme de l'envers du décor de la vice-présidence américaine. Reste que, pour le moment, la série cherche encore manifestement son équilibre. J'attends d'elle plus d'impertinence, de surprise, que les piques mouchetées qu'elle nous propose dans ce pilote. Elle doit plus oser.
En conclusion, il faut aussi rappeler que le mockumentary est un genre qui nécessite souvent quelques réglages. Et au vu des quelques étincelles entre-aperçues - et de l'équipe, je garde confiance pour la suite ! A surveiller.
NOTE : 7/10
La bande-annonce de la série :
19:32 Publié dans (Pilotes US) | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : veep, hbo, julia louis-dreyfus, anna chlumsky, tony hale, matt walsh, timothy simons, reid scott, sufe bradshaw | Facebook |
15/12/2011
(Pilote US) Luck : une immersion ambitieuse dans les coulisses des courses hippiques
Comme un cadeau de Noël avant l'heure, HBO a proposé ce dimanche, à la suite du season finale de Boardwalk Empire, le pilote d'une de ses nouveautés très attendues de 2012, dont la diffusion débutera le 29 janvier prochain : Luck. Sur le papier, le pedigree de cette série sonne particulièrement impressionnant : créée par David Milch (Deadwood, John from Cincinnati), avec un premier épisode réalisé par Michael Mann, elle rassemble également un casting cinq étoiles emmené par Dustin Hoffman.
En fait, Luck, c'est la série que David Milch, passionné de courses hippiques, a toujours voulu porter à l'écran. C'est donc un univers particulièrement complexe qu'elle dévoile en ce premier épisode. Mes seules connaissances de ce milieu remontant à mes visionnages d'antan de L'Etalon Noir, les dialogues, surtout ceux liés aux enjeux d'argent, m'ont paru parfois très cryptiques. Seulement, il y a aussi quelque chose dans l'ambiance de ce pilote qui vous scotche devant votre écran, et vous donne vraiment envie d'apprendre à comprendre la série.
Luck nous plonge dans le milieu des courses de chevaux, en s'intéressant plus particulièrement aux vies de tous ceux qui gravitent autour des intérêts financiers que brasse cet univers. Qu'ils soient simples amateurs de courses en quête de sensations, entraîneurs, propriétaires, jockeys ou encore parieurs à temps plein, ce pilote prend son temps pour esquisser les premiers traits et installer une riche galerie de protagonistes, transposant à l'écran, dans toute sa diversité, la population bigarrée fréquentant les hippodromes. L'argent aiguise logiquement les appétits de chacun, et l'épisode ne cache pas la part d'ombre de ce milieu.
C'est sur la sortie de prison de "Ace" Bernstein que le pilote s'ouvre ; cela va être l'occasion de le voir renouer avec ses anciennes connaissances pour lesquelles il a accepté sans les trahir sa sentence. Son chauffeur a déjà organisé les bases de son retour, prenant une licence de propriétaire de chevaux à son propre nom ; il servira de couverture pour son patron. Tout en suivant les premiers jours à l'air libre de Ace, l'épisode éclaire également tout le quotidien d'un hippodrome, se concentrant sur tous les participants à ce milieu, et notamment sur un groupe de parieurs qui mise très gros en ce jour de course, visant rien moins que le prix de 2 millions de dollars.
Le pilote de Luck marque tout d'abord par sa faculté à retranscrire l'atmosphère très particulière qui entoure les courses hippiques. Tout en introduisant une galerie de personnages vite identifiables, qu'il restera ensuite à développer, sa grande réussite est de savoir parfaitement capturer la fièvre et toutes les tensions qui règnent au sein d'un hippodrome. Car le monde des turfistes se résume à deux centres d'intérêt qui fusionnent, grâce aux paris, lorsque la course est lancée : les chevaux et l'argent. Si ce milieu a des codes et un langage qui lui sont propres, le pilote n'en transmet pas moins au téléspectateur leur fébrilité caractéristique. Et c'est ainsi qu'à travers le regard des protagonistes, on se laisse gagner par l'excitation de la course, se surprenant à vibrer ou à frémir devant ces scènes qui rythment la vie d'un hippodrome.
En filigrane cependant, un glissement plus sombre s'opère : le dollar finit par éclipser les animaux, et c'est vers l'envers des jeux d'argent que nous conduit la série. Car les enjeux financiers assouplissent la moralité de bien des ambitieux. Au-delà du groupe de parieurs qui entend rafler le gros lot lors de la prochaine journée de courses, le pilote esquisse en arrière-plan une toile plus complexe d'intérêts contradictoires. Au plus près du terrain, la sincérité même de la compétition est questionnée dès lors que des personnes qui connaissent intimement les animaux font eux-mêmes des paris. A l'autre extrêmité, il faut aussi évoquer tous les commanditaires et organisateurs de ce business lucratif qui brasse tant d'argent. L'épisode reste pour le moment évasif sur ce plan, mais suivre le personnage de Ace permet aux premières pièces de ce tableau plus global de se mettre en place. Et la bande-annonce qui conclut l'épisode laisse entendre que c'est vers ces sujets aux thématiques presque mafieuses que s'orientera la suite de la saison.
Si la curiosité du téléspectateur est piquée, il faut cependant reconnaître le second trait de ce pilote est assurément sa complexité. Les dialogues y sont souvent assez cryptiques, et les tenants et aboutissants des intrigues un peu abstraits. Luck est une série devant laquelle le téléspectateur, étranger à l'univers dépeint, a le sentiment d'être réduit au statut frustrant de simple profane. Cependant, paradoxalement, cette approche singulière n'amoindrit pas l'intérêt que va susciter le milieu des courses. Elle confère au contraire au récit une impression d'authenticité et une forme de légitimité qui donnent au téléspectateur une envie supplémentaire de s'investir dans cette fiction. Car si le sujet est d'approche compliquée, sa richesse apparaît évidente.
Plus généralement, il faut se souvenir que l'opacité des débuts des oeuvres de David Milch reste une de leurs caractéristiques, c'est pourquoi l'introduction un peu abrasive de Luck ne doit pas rebuter : si l'écriture du scénariste fonctionne comme il se doit, ce sera au fil de la saison, à mesure que les épisodes vont passer, que tout se connectera et que le plein potentiel de l'histoire sera complètement dévoilé et exploité. Pour le moment, on l'entrevoit dans certaines scènes, et on le perçoit bien présent en arrière-plan. Une fois ce pilote terminé, le téléspectateur n'a au fond qu'un seul souhait : ouvrir en grand cette porte d'entrée que l'épisode se contente de seulement entrouvrir, afin d'apprécier pleinement la découverte, incontestablement ambitieuse, d'un milieu hippique très prenant.
Si Luck réussit si bien l'installation de son atmosphère, il le doit aussi beaucoup à sa forme. L'esthétique d'ensemble est à la hauteur de la réputation de Michael Mann. La réalisation est superbe, et la photographie très soignée. La caméra, nerveuse, nous fait véritablement prendre le pouls de ce milieu et percevoir les dynamiques qui le traversent. Le terme "immersion" acquiert tout son sens. Après, peut-être est-ce l'amatrice d'équitation qui parle ici, mais je dois avouer que les reconstitutions sur l'hippodrome m'ont vraiment coupé le souffle ; au-delà des courses, la seule scène d'entraînement dont nous sommes le témoin, de ce cheval qui peu à peu accélère, capture à merveille l'osmose du cavalier et de sa monture, pour un spectacle presque magique. J'en ai eu des frissons devant mon écran. De plus, Luck dispose également d'une bande-son travaillée qui contribue à construire l'ambiance, avec notamment un superbe générique dont la musique permet de démarrer la série dans les meilleures dispositions.
Enfin, Luck bénéficie d'un impressionnant casting, et ses acteurs ne demandent qu'à pouvoir pleinement s'exprimer à partir de toutes les thématiques à explorer dont recèle la série. Outre Dustin Huffman, passant pour l'occasion du grand au petit écran, on retrouve également Dennis Farina (New York Police Judiciaire), John Ortiz, Richard Kind (Spin City), Kevin Dunn (Samantha Who), Michael Gambon, Ian Hart (Dirt), Richie Coster, Jason Gedrick (Windfall), Kerry Condon, Gary Stevens, Tom Payne (Waterloo Road), Jill Hennessy et Nick Nolte. Luck étant une série chorale, cette solidité est un important atout ; à elle de savoir bien l'exploiter.
Bilan : Projet original ambitionnant de plonger le téléspectateur dans le milieu des courses hippiques, ce pilote d'exposition capture à merveille la fébrilité et l'atmosphère qui règnent aussi bien dans les coulisses que sur la piste d'un hippodrome. Cette réussite s'explique par une écriture dense, mais aussi par la superbe réalisation, parfaitement maîtrisée, qui l'accompagne. L'impression d'authenticité est renforcée par la complexité de l'univers dans lequel le téléspectateur est introduit sans transition, ni effort d'explication. C'est un parachutage qui peut un instant dérouter, mais la richesse qui transparaît éveille la curiosité, en dépit du manque d'accessibilité immédiate.
Par conséquent, le reproche qui pourra être formulé à l'encontre de Luck sera sans doute qu'elle démarre en réclamant de la patience au téléspectateur. Mais si tout fonctionne, l'investissement sur les moyen et long termes méritera assurément le détour. C'est une série qui s'inscrit dans la durée. A découvrir en connaissance de cause ; mais comptez-moi dans le lot des curieux !
NOTE : 8/10
La bande-annonce de la série :
Le générique :
18:13 Publié dans (Pilotes US) | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : luck, hbo, david milch, dustin huffman, dennis farina, john ortiz, richard kind, kevin dunn, michael gambon, ian hart, richie coster, jason gedrick, kerry condon, gary stevens, tom payne, jill hennessy, nick nolte | Facebook |
25/07/2011
(Pilote CAN) The Yard : la cour de récré comme vous ne l'avez jamais vue
Contrairement aux idées reçues, l'été n'a rien d'une période creuse pour le sériephile. Au contraire. Peut-être est-ce d'ailleurs une des rares périodes où, sans risquer l'overdose, on peut prendre le temps de picorer de part et d'autre pour mieux apprécier toutes ces séries qui débutent ou redémarrent avec les beaux jours. C'est ainsi qu'en quête de détente, on se décide même à reprendre le chemin de l'école... ou plutôt de la récré, pour ce qui est incontestablement un de mes coups de coeur de ces dernières semaines.
Diffusée sur HBO Canada, depuis le 8 juillet 2011, The Yard est une série canadienne que j'ai découverte grâce au prosélytisme avisé et inspiré de LadyTeruki (qu'il faut remercier très fort). Mockumentary proche de la dramédie, il s'agit sans aucun doute d'une des séries les plus originales, rafraîchissantes et authentiques qu'il m'ait été donné de voir cette année. Je suis d'ailleurs tombée suffisamment sous le charme pour enchaîner les trois premiers épisodes, de 25 minutes environ, en une seule soirée.
The Yard a pour cadre principal la cour de récréation d'une école primaire. Nous narrant le quotidien de ces instants de détente en extérieur à travers la caméra d'un documentariste, la série nous immerge dans un microcosme avec ses codes et règles de vie, dont les seuls protagonistes sont les élèves. Cette cour de récréation rassemble tous les archétypes que l'on peut penser y croiser : les populaires, les marginaux, les geeks, les mauvais garçons cherchant à terroriser les plus faibles... et la bande qui "règne" actuellement sur ce petit monde, les "good guys", comme le présente leur chef, Nick, sur lesquels la série s'attarde plus particulièrement.
Il faut en effet, comme dans tout milieu social, des régulateurs pour assurer la cohésion de la communauté. Ayant en tête le bien commun de chacun, Nick prend ses responsabilités pour faire en sorte que la cour de récré reste un lieu de jeu où tout est pacifié. Il est entouré de ses deux frères, J.J., idéaliste croyant que tous les conflits peuvent se résoudre par la discussion, et Adam, gamin adorable, mais aussi de Johnny, meilleur ami persuadé d'avoir des pouvoirs magiques, et Suzi, qui règle tous les problèmes que les paroles ne peuvent solutionner. Chaque épisode les voit confrontés à une difficulté relative à une thématique particulière aux consonances plus adultes, qui met à mal le fragile équilibre de la cour de récré. Dans le premier épisode, l'enjeu est ainsi économique : les devises actuellement utilisées sont mises en danger par l'introduction d'une possible devise concurrente qui risque de bouleverser les rapports de force... Nick va-t-il réussir à empêcher l'effondrement du système économique en vigueur ?
Choisir de ne mettre en scène que des enfants, pour une série qui s'adresse à un public plus large, était en soi un pari osé. The Yard le relève brillamment. La série réussit en effet à parfaitement prendre la mesure du style mockumentary qu'elle adopte. Proposant une forme de métaphore de la société moderne qu'elle miniaturise à l'échelle de son école primaire, elle réduit ainsi, en les simplifiant, des problématiques sociales actuelles. Pour ce faire, elle trouve le juste équilibre entre une dose nécessaire de réalisme, crédibilisant les situations, et un soupçon de décalage dans leur mise en scène, propre à la comédie. Avec beaucoup d'assurance, de façon assez décomplexée, elle n'hésite pas à aborder des thèmes ayant une résonnance particulière, comme le système économique dans le premier épisode. Elle sait aussi dépasser son seul cadre pour recourir à des codes narratifs plus pesants, empruntés à d'autres genres ; la mise en scène de la "guerre" dans l'épisode 3 en étant une illustration. Le mélange est parfois assez audacieux et peut un temps déstabiliser, mais il fonctionne étonamment à l'écran.
C'est en conservant une ambivalence constante que la série va savoir s'affirmer. Car la magie de The Yard ne s'opère pas seulement au niveau des intrigues, ce sont les dialogues qu'elle permet qui forgent son identité. Le fait de retranscrire avec des mots d'enfants tous ces enjeux apporte non seulement une fraîcheur originale et inestimable à la mise en scène, mais il permet aussi une approche et des points de vue parfois inattendus. C'est dans ce décalage entre le sérieux de certains sujets et la manière dont ils sont exposés par les protagonistes que réside le principal ressort comique d'une série drôle - elle prête souvent à sourire franchement -, qui sait aussi se montrer extrêmement touchante à l'occasion. Car les personnages s'expriment avec l'aplomb et la franchise qui caractérisent les enfants de leur âge : certaines de ces scènes - notamment les face-à-faces avec le documentariste - capturent une authenticité aussi jubilatoire, que parfois troublante. Derrière une couche de cynisme moderne inévitable, transparaît un reste d'innocence à laquelle on ne peut rester insensible et que l'on va instinctivement chérir. C'est ainsi que le téléspectateur regarde The Yard avec beaucoup de tendresse, un attachement qui se renforce au fil des épisodes et un plaisir jamais démenti tant la série sait surprendre.
Pour accompagner la mise en scène de ce concept original, la réalisation respecte les codes du genre mockumentary : la caméra au poing, nerveuse, filme ces enfants, logiquement intenables, avec beaucoup de réactivité dans la cour de récré. Pour rythmer sa narration, The Yard a aussi la bonne idée d'insérer des parenthèses très réussies, sorte de "confessionnal", qui font office de passages explicatifs au cours desquels les personnages sont directement interrogés devant un tableau vert par le documentariste. Cela offre du recul, mais aussi une dynamique décalée aux évènements qui sont ainsi explicités. La bande-son suit le même esprit : rythmée, avec des thèmes récurrents qui collent de la plus adéquate des façons à cette ambiance de cour de récré, elle est parfaitement maîtrisée.
Enfin, The Yard n'atteindrait pas l'équilibre et l'authenticité qu'elle acquiert sans son casting. Il faut absolument souligner et saluer tous ces jeunes acteurs, qui se révèlent d'une justesse confondante. Avec un jeu solide et sérieux qui correspond à l'aspect faux-documentaire, ils rendent en plus possible et pleinement exploitable tous les décalages comiques recherchés. On retrouve parmi eux, Quintin Colantoni (fils de Enrico, bien connu des sériephiles de Veronica Mars à Flashpoint), Keena Bastidas, Sarah Cranmer, Daniel Lupetina, Alex Cardillo (Durham County), Shemar Charles, Devan Cohen ou encore John Fleming (The Listener). A noter que la voix off du documentariste est celle de Paul Gross (Slings & Arrows, Un tandem de choc).
Bilan : A la fois drôle et touchante, The Yard est un mockumentary qui surprend par sa fraîcheur. Semi-réaliste, elle séduit par l'authenticité de ses protagonistes, tout en profitant de son cadre de cour de récré pour offrir une métaphore étonnante de la société moderne. Sachant parfaitement jouer sur les ambivalences inhérentes à son concept, la série capitalise tant sur la diffuse innocence de protagonistes encore enfants, que sur la pointe de cynisme et le pragmatisme que nécessitent aussi bien la survie que le maintien de la paix dans ce milieu social mis en scène. Au final, c'est un cocktail assurément surprenant que propose The Yard. A découvrir !
NOTE : 8,5/10
La bande-annonce de la série :
Quelques courts extraits :
Cory on lunch :
Suzi on income :
19:46 Publié dans (Séries canadiennes) | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : the yard, hbo, quintin colantoni, keana bastidas, sarah crammer, alex cardillo, shemar charles, devan cohen, john fleming, daniel lupetina, siam yu, paul gross | Facebook |