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16/11/2009

(UK) Spooks (MI-5), series 8, épisode 3

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Ce troisième épisode continue sur la lancée du précédent : pas de réelle originalité, mais une efficacité jamais démentie, d'où se dégage une sourde tension qui laissera le téléspectateur happé par l'histoire, jusqu'au dénouement et au dernier choc final. En résumé, Spooks fait du Spooks dans ce que la séria a de plus éprouvant : tout y est, de la situation de crise à la mort d'un des personnages principaux, nous abandonnant essouflés et le coeur serré en fin d'épisode.

It feels like old times, non seulement en raison du scénario, mais aussi parce que Ruth est officiellement de retour au MI-5. Quasi-instantanément, c'est la reconstitution du duo qu'elle formait avec Harry, qui s'empresse de lui confier déjà des secrets qu'il n'a pas encore partagé avec le reste de son équipe. Leur relation a toujours été particulière ; et, avec cet épisode, on revient un peu à son fondement. J'aime beaucoup la façon dont cette complicité se recrée presque naturellement à l'écran. Et vu toutes les épreuves que l'équipe doit traverser depuis quelques épisodes, j'avoue que retrouver Ruth apporter une certaine stabilité qui n'est pas pour me déplaire. S'adapter aux nouveaux personnages est toujours un processus plus long que de reconnecter avec des anciens, auxquels on s'était déjà attaché. Bref, au sein d'un MI-5 un peu déshumanisé par ses pertes, cela apporte une touche appréciable pour le téléspectateur.

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Mais le retour de Ruth va pourtant se dérouler dans, sans doute, les pires conditions que l'on pouvait imaginer. Harry, décidé à enquêter discrètement sur les bruits entendus par le ministre britannique concernant des réunions secrètes entre gens importants souhaitant apporter un changement radical à l'ordre mondial tel qu'il existe actuellement, a envoyé Ros surveiller la rencontre, à Londres, d'un groupe non-officiel, le Bendorf group, composé des plus puissants industriels. Mais, sans avertissement de menace préalable, la situation échappe rapidement à tout contrôle : des assaillants armés prennent tous les participants en otage. Ils s'enferment alors dans la panic room construite par le propriétaire des lieux, dans le but de tenir une série de simulacres de procès, censés juger les actions répréhensibles et immorales de ces hommes d'affaires peu scrupuleux, prêts à sacrifier la stabilité politique d'un pays et le sort de ses populations pour mener à bien leur business.

Si le concept de la prise d'otage a déjà été traité dans Spooks (les épisodes 5.06 et 5.07 reviennent notamment très vite à l'esprit), l'originalité réside ici dans les moyens d'exécution du plan des kidnappeurs. Non contents de prétendre s'ériger en tribunal de l'opinion, ils diffusent les séquences du procès à charge grâce aux technologies modernes et appellent les internautes à voter sur la culpabilité ou l'innocence de l'homme dont ils exposent les torts, produisant des documents particulièrement compromettants qui vont rapidement inquiéter d'autres gouvernements, à commencer par les Etats-Unis. Les scénaristes jouent sur les codes de la télé-réalité, exacerbant le voyeurisme malsain du public en ligne, qui non seulement assiste aux évènements par la vidéo, mais en plus y participe activement en "votant" pour le verdict. Coupable ou Innocent. Taper 1, taper 2. Le tout sous le regard impuissant des autorités.

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Mais plus, que cette tension prenante, ce que l'on retiendra de l'épisode, ce sont des histoires humaines ; celles de nos héros, encore une fois touchés de plein fouet par la tragédie. Les agents du MI-5 réussissent en effet de justesse à empêcher un bain de sang et à sauver une partie des otages. Le chef des kidnappeurs, le plus déterminé d'entre eux, n'entendait cependant pas permettre une issue heureuse. Il avait fait poser des bombes dans le sous-sol, de façon à conclure tout cela dans le sang, si jamais cela tournait mal. Lorsque son entreprise bien huilée se désagrège, grâce au travail de sape de Ros et à l'intervention posée de Jo, il se saisit de la commande de contrôle des explosifs. La scène qui suit paraît alors durer une éternité, comme si le temps s'était arrêté. Devant son poste, on oublie de respirer. Ros n'a d'autre choix que d'abattre l'extrémiste à bout portant, tandis que ce dernier est immobilisé par une Jo intuitive, qui a eu une réaction réflexe pour essayer de le neutraliser, mais qui n'a pu lui enlever la commande. La balle tuant le criminel transperce également Jo qui s'effondre, elle-aussi, morte sur le coup. Le dernier regard échangé entre Ros et Jo, qui ont fait la même analyse de la situation, est d'une telle intensité, qu'il bouleverse le téléspectateur avant même que le choc de la brutalité de la scène ne nous atteigne et vienne nous briser le coeur. Une mort violente, nous prenant au dépourvu, dans la  plus pure tradition de la série. Et donc encore une perte pour le MI-5, au sein d'une équipe qui se dissout sous nos yeux.

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Bilan : Un épisode nerveux et tendu, qui recycle la situation déjà connue de la prise d'otage, en ajoutant un élément dramatique supplémentaire avec ce jugement via internet dont la sentence est immédiatement exécutée. Mais ce que l'on retiendra surtout de l'ensemble, ce sont ces dernières minutes et cette scène où tout s'est arrêté une seconde, tandis que Jo et Ros échangeaient un dernier regard. Spooks fait du Spooks, avec beaucoup de sérieux. Sans être exceptionnel, l'épisode est solide et très éprouvant. Les dernières minutes, d'une intensité rare, qui resteront gravées dans nos mémoires, suffisent à nous laisser choqués et interdits devant le petit écran.


NOTE : 8/10

10/11/2009

(UK) Spooks (MI-5), series 8, épisode 2

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La nouvelle saison de Spooks démarre vraiment avec ce deuxième épisode qui, tout en restant en terrain (très, voire trop ?) connu, exploite efficacement une intrigue solide, somme toute assez classique, où toutes les parties se livrent à un jeu d'échecs mortel, où chaque camp manipule l'autre et où les Britanniques sont, pour une fois, assez peu inspirés, un brin dépassés par les évènements, marionnettes indirectes d'une partie où CIA (Etats-Unis) et FSB (Russie) mènent la danse en coulisses.

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Les ennuis Britanniques débutent avec l'explosion d'une importante usine de gaz. Cette catastrophe remet en cause tout l'approvisionnement gazier du pays, menaçant de le plonger dans une crise énergétique sans précédent. Il est donc nécessaire et urgent de signer un nouveau contrat d'acheminement de cette matière première avec un des gros exportateurs de gaz. Malheureusement, seuls deux pays sont en mesure de répondre à la demande Anglaise : les Russes, qui réclament un prix déraisonnable, décidés à exploiter la précarité de leur situation ; et les... Tazbeks. Régime de fer, le Tazbekstan est une dictature où les droits de l'homme ne sont que chimère et où les pires excès ont lieu. Laissant de côté toute considération humanitaire, se voulant "pragmatiques", c'est donc vers les officiels Tazbeks que les Britanniques se tournent, espérant conclure un accord rapide avec un régime qui a besoin d'appuis internationaux. Mais les choses vont rapidement évoluer hors de contrôle.
 
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En effet, complexifiant la situation, un des membres de la délégation Tazbek, Urazov, une caricature du "méchant" (meurtrier et violeur), joue sur de multiples tableaux, venant considérablement compliquer la tâche du MI-5. D'une part, il profite de son passage à Londres pour tenter d'achever une vendetta contre une famille dont il a exterminé les membres dans son pays, à l'exception d'une jeune femme, Bibi. D'autre part, il mise sur son propre agenda et vise à assouvir ses ambitions de pouvoir. Face à une unité du MI-5 pas encore pleinement remis des derniers évènements, avec notamment un Harry qui repousse les limites de la morale bien plus loin qu'à l'habitude, tout devient rapidement confus. Sacrifiant tout principe dans le but d'obtenir le contrat de gaz, le MI-5 semble plus ou moins décider à laisser une marge d'action, normalement inacceptable, à Urazov. Un journaliste est tué. Bibi échappe de justesse à une tentative d'enlèvement.
 
Mais derrière les ambitions d'un seul homme, l'enjeu du gaz Tazbek est en réalité bien plus complexe qu'une simple question d'énergie. Derrière les Britanniques, les grandes puissances Américaines et Russes font pression pour maintenir le régime dictatorial dans l'isolement et éviter qu'il ne trouve un point d'appui en Europe. Les Etats-Unis, à travers leur nouvelle agent de la CIA, Sarah, font un travail de sape silencieux. Ils distillent des informations sur les négociations en cours à la presse. Ayant peu apprécié la petite manipulation du premier épisode, Sarah profite de ce conflit d'intérêts entre les deux pays pour remettre les points sur les "i" et s'imposer comme une source d'ennuis, tout autant qu'une alliée indispensable. A ce jeu de poker menteur, les Britanniques, omnubilés par le gaz, se laissent manipuler, réagissant sans jamais retrouver l'initiative. Le MI-5 finit par orchestrer le meurtre d'Urazov, devenu trop gênant, instrumentalisant Bibi, pour se retrouver finalement exposé par une opération du FSB qui force les Tazbeks à rompre les relations. En fin de compte, il faudra adresser une supplique aux "amis" Américains, pour s'adresser aux "amis" Russes, et passer l'accord gazier avec eux, aux conditions de prix Tazbek et, au passage, en échange du plan de vol du président Tazbek quittant l'Angleterre...
 
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Cette clôture sur un étrange pseudo "gagnant-gagnant" laisse un arrière-goût un peu amer, mais permet à l'Angleterre, aux Etats-Unis et à la Russie d'obtenir chacun ce qu'il désirait, au terme d'un jeu d'échecs passionnant aux multiples rebondissements. Cette intrigue est rondement menée et se révèle très plaisante à suivre, à défaut d'être bien originale. C'est du pur Spooks, de ces manipulations obscures jusqu'à cette fin qui nous brise le coeur pour Jo, la jeune femme assistant impuissante au suicide de Bibi après la mort d'Urazov. Par vraiment de happy end donc, comme d'habitude, simplement la mise en place d'un nouvel équilibre entre grandes puissances, avec des pions sacrifiés pour l'atteindre.
 
L'aspect le plus réussi de l'épisode réside sans doute dans le traitement des conséquences de l'épisode précédent. Ruth n'est pas repartie ; elle a laissé son beau-fils retourner en famille. A travers quelques scènes, l'ambiguïté de sa relation avec Harry est particulièrement bien dépeinte : de la colère froide, cet impossible pardon pour avoir pris la décision ayant conduit à l'exécution de son mari ; mais aussi du réalisme, une analyse de situation où Ruth est bien consciente de l'alternative qui s'offrait à Harry. Pas de pardon, mais pas de haine ouverte non plus. Ils sont tous les deux très secoués ; Harry se montrant jusqu'au-boutiste comme jamais pour décider du sort de Bibi, qu'il est d'abord prêt à sacrifier sur l'autel énergétique du gaz. Les plaies ne se guériront pas en quelques jours. Et finalement, les scénaristes réussissent ici, bien mieux que pour les retrouvailles de la semaine passée, à introduire une subtilité et une valse d'hésitation qui sonnent justes à l'écran.
 
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Du côté des personnages, justement, l'équipe apparaît désunie comme jamais. Il manque un esprit d'équipe, la cohésion passée, le tout ayant été rompu par tous ces bouleversements de personnel. Face à ce besoin de main d'oeuvre, c'est un remplacement pour Malcolm qui est introduit, Tariq (Shazad Latif). La trentaine, et un visage plutôt frais, pas encore marqué par toutes les tragédies que l'on peut lire dans les regards lourds des autres agents, on retrouve en lui une innocence et un enthousiasme que l'on n'avait plus vu depuis pas mal de temps au QG du MI-5. Ce n'est pas un mal.
 
Mais c'est une autre rapide évolution qui m'a fait lever les yeux au ciel d'exaspération. Une histoire sentimentale que l'on sentait venir avec la subtilité et la délicatesse d'un éléphant évoluant dans un magasin de porcelaine, mais que je n'osais pas imaginer se concrétiser si vite. Les scénaristes profitent en effet de la fin de l'épisode pour nous parachuter l'officialisation d'une relation plus seulement professionnelle entre Lucas et Christine 2.0 Sarah. Quelques brèves rencontres, agrémentées d'un flirt anodin, auront donc rapidement conduit à l'hôtel. A mes yeux, le duo manque pour l'instant d'alchimie ; ajoutons à cela l'antipathie à l'égard de Sarah, nourrie tout au long de l'épisode, accentuée par cet air d'arrogance dont elle semble ne jamais se départir, et j'ai pour le moment beaucoup de mal à trouver une crédibilité à cette histoire. Les scénaristes ont précipité une situation qui ressemble surtout à une romance sur papier glacé, complètement déshumanisée. On est loin des errements amoureux, mais aux implications sentimentales toujours très fortes, d'un Tom des premières saisons, par exemple. Cet aspect reste peut-être corrigible, mais, pour le moment, je suis sceptique.
 
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Bilan : Un épisode à la fois solide et très classique, du pur Spooks comme la série sait si bien le faire, sans réelle originalité, mais avec une trame forte, à rebondissements multiples et sans manichéisme. Un petit coktail prenant qui nous skotche devant notre petit écran pour tout l'épisode, grâce à des jeux d'espions à leur apogée, dans une partie d'échecs mortelle où les Britanniques sont, cette fois-ci, assez peu réactifs, subissant les évènements, plutôt que les influençant.
Sans être exceptionnel, l'épisode remplit donc son contrat sans pour autant que le téléspectateur ne parvienne à se départir de cette impression lancinante de "déjà vu". Si on ajoute en plus à cela cette petite dose de flirt inter-agences, on se promène vraiment sur des sentiers connus. Cependant, plus enthousiasmant que le précédent, il ne faut pas bouder notre plaisir !


NOTE : 8,5/10

09/11/2009

(UK) Being human, saison 1 : en quête d'identité et d'humanité


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Ce samedi soir a débuté, en France, sur Orange Cine novo (sérieusement, c'est une vraie chaîne ?), la saison 1 de Being Human. Tandis qu'aux Etats-Unis, SyFy, faisant une fois encore preuve d'innovation, a commandé 13 épisodes d'une version américanisée de Being Human, souhaitant sans doute surfer sur la nouvelle vague de fantastique qui envahit le petit écran. Pourtant, la genèse quelque peu chaotique de cette série britannique ne laissait pas entrevoir la pérennité que le concept aurait. En effet, après un pilote "test" qui permit à la série de se constituer une petite base de fans, mais dont la diffusion esseulée en février 2008 ne remporta pas la bataille de l'audience, ce n'est qu'après tergiversations et suite à une campagne de mobilisation pour sauver la série que BBC3 commanda finalement une saison complète de six épisodes. Ce délai avait laissé le temps aux acteurs originaux de s'engager sur d'autres projets, ce qui nécessita le changement d'une partie du casting, d'où l'existence d'un "deuxième" pilote qui ouvrit cette saison 1 en janvier 2009. La chaîne, satisfaite de l'écho de Being Human, commanda une saison 2, de huit épisodes. Elle devrait être diffusée en début d'année 2010 en Angleterre.

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Being human se propose de nous conter le quotidien de trois amis "colocataires". Mitchell, un vampire de plus de 100 ans, et George, un récent loup-garou, unis par leurs insécurités et leurs interrogations, emménagent au cours du premier épisode dans une maison, où une jeune femme est morte il y a peu, tombée dans les escaliers. Annie n'est pourtant pas partie, elle hante les lieux sans vraiment comprendre sa situation. A la différence des humains "normaux", les autres créatures surnaturelles ont toujours la capacité de voir un fantôme. Si bien que Annie se retrouve vite adoptée par l'étrange duo qui prend possession de la maison. Nous allons suivre ensemble le quotidien et le lot d'épreuves que ce dernier peut réserver à un vampire, un loup-garou et un fantôme. Plus que l'amitié qui se forge peu à peu, ce qui les unit en premier lieu, cela va être leur interrogation commune sur leur étrange nature, voire leur quête vers l'humanité. Chacun se situe à différents stades. George est en plein déni, transformé en loup-garou il y a peu, il se considère comme un monstre et refuse d'être confronté à cette évolution qui s'est produite en lui. Ne s'acceptant pas tel qu'il est, il aspire ouvertement à la normalité, tout en nourrissant la hantise de blesser quelqu'un lors de ses transformations, préférant fuir. Annie, également nouvelle dans son état fantômatique, est plus détachée de ces réflexions matérielles en raison de sa mort. Seulement, progressivement, c'est toute sa vie (et sa fin) qui va apparaître sous un angle nouveau, à des lieues de l'apparence légère et heureuse qu'elle mettait en scène. Dans la mort, c'est, étrangement, sa propre vie qu'elle va devoir reprendre en main pour trouver la paix. Enfin, pour Mitchell, la situation est quelque peu différente, car il a déjà pleinement accepté sa nature de vampire du fait de son expérience. C'est son état d'esprit qui a changé au fil des ans ; après des années où il s'était dégagé de toute considération morale, "humaine" pourrait-on dire, il a de lui-même rompu avec ses congénères et refuse désormais de se nourrir de sang directement sur un être vivant. On retrouve alors la même ambiguïté que chez George : l'interrogation sur le contrôle (et son manque par moment) et une vie qui tourne autour de ces moments dangereux où la nature surnaturelle prend le dessus, au cours desquels Mitchell peut tuer, bien plus sûrement et souvent que George.

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Being human est donc une série sur une quête impossible de normalité par des êtres surnaturels. Cela se ressent dans le traitement des personnages, comme des storylines. En effet, c'est avec une sobriété surprenante, pour ce type de thématique, qu'est mis en scène le caractère particulier de chacun. Pas de surenchère fantastique, ni même d'effets spéciaux hormis le strict minimum. C'est un quotidien d'une banalité irréelle qui est mis artificiellement en place, propre à nous faire oublier par moment la spécificité de nos protagonistes. Mais, soudain, arrive le dérapage incontrôlé. Quelque chose vient griper ce bel agencement et toute cette apparence s'effondre aussi sûrement qu'un château de cartes. C'est un souci rencontré lors d'une nuit de pleine lune pour enfermer George et éviter qu'il ne blesse quelqu'un quand il est transformé ; c'est Mitchell qui cède à sa tentation constante du sang frais et tue la dernière fille avec laquelle il était sorti flirter ; c'est Annie qui, soudain, prend conscience que sa mort n'avait rien d'un accident... L'illusion de normalité se brise brusquement, parfois sans prévenir, laissant les personnages exsangues, confrontés à leurs démons intérieurs. Being human ne pousse pas la réflexion jusqu'à s'interroger sur cet idéal d'humanité et sa pertinence, même si cela est parfois esquissé à travers certaines réactions si humaines (et horrifiées) auxquelles se heurtent les héros. Cependant, cette interrogation identitaire, quasi initiatique, offre un angle scénaristique intéressant et plutôt original. Faire la paix avec eux-même. Accepter ce qu'ils sont. Tout un programme qui permet une approche très introspective et qui constitue un des attraits majeurs de la série.

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Cependant, Being human n'exploite pas pleinement, et aussi efficacement qu'on aurait pu l'attendre, les thématiques de son concept, au cours de cette première saison. Si elle joue volontairement sur une ambiance inhabituelle de "normalité" qui constitue sa particularité (et dont la sobriété peut peut-être dérouter de prime abord), les intrigues des différents personnages prennent invariablement un tour très classique, traitées à de nombreuses reprises dans d'autres fictions. Elles sont de plus assez éclatées, chacun ayant droit à une ou deux épisodes vraiment consacrés à ses propres problèmes. Mais il manque un fil rouge reliant l'ensemble. L'unité de la série se maintient grâce aux liens qui se tissent entre les protagonistes et à ce refuge que constitue la maison dans laquelle ils cohabitent. Mais, au-delà de la force de cette amitié, les différentes intrigues n'ont pas ce petit plus qui aurait permis à la série de gagner en cohésion et en équilibre d'ensemble. Cette saison 1 est placée sous le signe de la recherche de soi. Chaque personnage va suivre une évolution personnelle ; plus marquée et marquante chez George et Annie que chez Mitchell qui stagne un peu dans un cercle vicieux dont il ne parvient pas à sortir, se heurtant constamment à la communauté vampirique de la ville (qu'il finit par s'aliéner définitivement). C'est d'ailleurs peut-être ici que réside le micro-fil rouge le plus constant de la saison. Si les épreuves de George et les découvertes de Annie contribuent à construire les liens d'amitié entre les trois colocataires, les ennuis de Mitchell, qui les mettent réellement en danger, achèvent de sceller leur amitié dans l'adversité et dans la tragédie.

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En fin de compte, si les idées de Being Human sont dans l'ensemble intéressantes, quoique guère originales, elles donnent parfois l'impression de ne pas être suffisamment abouties, donnant un ensemble quelque peu brouillon. L'autre conséquence est un rythme de narration inégal, les épisodes passant parfois un peu trop lentement au goût du téléspectateur. Pour autant, ces défauts narratifs n'occultent pas l'attachement que l'on éprouve rapidement pour les personnages et pour la série en générale. C'est en jouant sur l'affectif que cette fiction comble en partie ses faiblesses scénaristiques. Je pense qu'avec un fort fil rouge, plus évident que celui de la saison 1, l'introspection des personnages gagnerait en force et la série en cohésion, permettant d'aiguiser plus directement l'intérêt du téléspectateur. C'est d'ailleurs ce que parvient à faire le final de la saison, qui se conclut sur l'ouverture d'une nouvelle piste de réflexion, où toutes ces interrogations identitaires s'inscriraient dans une toute autre perspective. Cela renforce a posteriori les évolutions de cette saison et crée une attente importante pour la saison 2, avec un nouveau mystère qui pourrait potentiellement servir de trame principale solide.

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Du côté des acteurs, il faut souligner la performance de Russel Tovey (George), très convaincant en loup-garou privé de tout repère et assailli de doutes. Les deux autres acteurs, qui ne figuraient pas dans le pilote original, ont conduit leurs personnages dans des directions très différentes de la façon dont je les avais perçus lors du premier visionnage en 2008. Si bien que la comparaison automatique que mon cerveau opère m'amène à nuancer mon jugement. Disons que cela tient beaucoup à l'affectif ; et que cela n'a sans doute aucune incidence si vous n'avez pas vu le premier pilote. Mais Lenora Crichlow (Annie), que j'aimais beaucoup dans Sugar Rush, ne peut pas rivaliser à mes yeux avec la troublante Andrea Riseborough, je n'y peux rien. Quant à Aidan Turner (Mitchell), il fait le boulot, plus sobre que dans la première version du vampire, mais il reste parfaitement crédible.

 

Bilan : S'il fallait décrire Being Human en un seul adjectif, cela serait "sympathique". Assurément, la série capitalise sur l'affectif du téléspectateur qui s'attache à ces personnages, créatures surnaturelles mais aux introspections et aux attentes si humaines. D'un rythme quelque peu inégal, cette première saison se suit pourtant avec un réel intérêt. On peut sans doute regretter que les scénaristes n'aient pas mis à profit le concept, notamment cette vaine quête d'humanité, pour s'interroger beaucoup sur la nature humaine et la question de l'identité. Mais sans être pleinement aboutie, elle offre un divertissement efficace et simple, mêlant des thèmes existentiels aux fins potentiellement tragiques et l'ambiance détendue et confiante d'une amitié qui se forme.


NOTE : 6,5/10

05/11/2009

(Mini-série UK) The Project (Les Années Tony Blair) : l'histoire d'une désillusion

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The Project (Les Années Tony Blair) est un drama en deux parties, durant au total 4 heures, créé par le toujours très inspiré Peter Kosminsky. Jamais sorti en DVD, il a été diffusé sur la BBC en 2002, puis, en France, sur Arte, pour la première fois en septembre 2003. Porté par un casting solide, à commencer par l'excellent Matthew Macfadyen (Spooks, Little Dorrit...), on y retrouve également Naomie Harris, Paloma Baeza...

Ce drama constitue un modèle de fiction politique qui amène le téléspectateur à réfléchir sur le fonctionnement de nos démocraties modernes. et sur la gestion du pouvoir. Mais il fait, de plus, office de quasi-documentaire : c'est la lente métamorphose du Parti Travailliste (Labour) au cours des années 90 qui nous est décrite, à partir d'anecdotes réelles recueillies par les scénaristes grâce à des interviews auprès de membres du parti. Un travail de journaliste en amont qui assoit la crédibilité de la fiction, tout en accroissant la force de ses propos. La morale de l'histoire n'est pas optimiste : le constat dressé est celui d'un désanchantement. Dans la première partie, c'est le temps de l'opposition, de l'abstraction à travers ses idéaux. Une réflexion s'opère progressivement sur les moyens d'accéder au pouvoir. L'apogée arrive : c'est évidemment 1997, la victoire de Tony Blair, la concrétisation des rêves tout autant que le fruit d'un intense travail. Puis, vient la seconde partie, mettant cette fois en scène l'exercice du pouvoir par la nouvelle majorité. De 1992 à 2002, ce sont les mutations d'un parti qui va peu à peu perdre son âme, sous la férule de son chef, auxquelles on assiste. Peter Kosminsky dépeint un portrait sans concession, au vitriol, de l'évolution de cette génération blairiste. Une lente perte des illusions face à laquelle chacun des protagonistes va réagir différemment.

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The Project chronique la vie de quatre amis qui se sont connus sur les bancs de l'université : ardents militants du temps de l'opposition, ils accèderont ensuite aux responsabilités avec le succès électoral. Au coeur de l'histoire, on suit le destin croisé de deux jeunes gens, passionés par la politique : Paul (Matthew Macfadyen), qui s'investit dans la communication, et Maggie (Naomie Harris), jeune représentante élue dans l'euphorie de 1997. Tandis que Paul se retrouve orienté vers l'orchestration des basses manoeuvres, de manipulations en traîtrises, Maggie se voit tiraillée entre la discipline de parti et ses propres idéaux. Confrontés à ces choix difficiles, chacun réagit différemment et évolue. The Project se révèle particulièrement dur, car ce à quoi le téléspectateur assiste, ce sont les cruelles désillusions de personnes initialement sincères dans leur intérêt dans la politique. Ce n'était pas une question d'ambition. Mais le remodelage du parti autour de Tony Blair a bouleversé la donne. La pratique du pouvoir achèvera les derniers idéaux.

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A la différence d'une série comme The West Wing (A la Maison Blanche) qui, tout en nous immergeant dans les coulisses du pouvoir, cultive un certain idéalisme qui tend à réconcilier le téléspectateur avec la politique, The Project offre une vision brutale et désabusée de ce milieu. Il raconte une disparition progressive des repères, au cours de laquelle les personnages principaux perdent leurs illusions, mais surtout leur sincérité initiale. Cette chronique du désanchantement politique est d'autant plus forte que, même s'il s'agit d'un récit réel, se voulant un aperçu de l'évolution du Parti Travailliste au cours d'une décennie (de 1992 à 2002), il est aisé de généraliser le propos. Car, de manière générale, c'est une fable sur la perversion qu'entraîne la course au pouvoir : c'est le creuset des démocraties modernes.

Bilan : The Project est un passionnant drama politique qui, sous ses allures de fiction à la rigueur documentaire, raconte une décennie de vie politique britannique ; tout en engageant une réflexion sur les enjeux du pouvoir et sur ce que l'on est prêt à lui sacrifier.
Si jamais vous parvenez à mettre la main dessus (ce qui n'est pas chose aisé), cela mérite vraiment une découverte.


NOTE : 9/10

04/11/2009

(Mini-série UK) Garrow's Law, épisode 1

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Après avoir pu combler mes penchants pour le XVIIIe siècle grâce à Nicolas le Floch sur France 2, voici que BBC One a débuté ce dimanche soir la diffusion d'une nouvelle mini-série de 4 épisodes d'1 heure chacun, Garrow's Law, qui se déroule à cette même époque. Avant de regarder l'introduction du premier épisode, j'ignorais qu'il s'agissait de l'adaptation de faits réels, le personnage principal ayant bel et bien existé, ce qui ajoute une touche de réalisme à l'ensemble.

Cette fiction se présente comme une chronique judiciaire du système britannique de la fin du XVIIIe siècle, à travers le parcours d'un  fougueux "barrister" ("avocat", traduira-t-on, même si l'équivalence avec le système français n'existe pas, le terme restant donc intraduisible), William Garrow. A une époque où les droits de la défense relevaient d'une chimère, où il est exceptionnel pour les accusés les plus modestes d'être défendus par un barrister au cours du procès, nous suivons les balbutiements du système judiciaire moderne (technique des contre-interrogatoires, etc...). La mini-série dispose d'une certaine crédibilité historique, car, sur fond de corruption et de misère sociale, dans le Londres géorgien, ce sont des affaires dont les compte-rendus ont été retrouvés dans des archives qui sont transposées à l'écran.

Le casting se révèle globalement solide. D'ailleurs, s'il y a bien un acteur britannique qui n'a apparemment aucun problème pour décrocher des rôles-titres dans les séries outre-Manche, en ce moment, c'est bien Andrew Buchan. Je me demande comment il parvient à gérer son emploi du temps, car j'ai l'impression de le croiser dès que j'allume mon petit écran. Il faut dire que je suis aussi en train de finir de regarder la saison 2 de The Fixer. Il m'a en tout cas plutôt impressionné, dans un rôle très énergique, incarnant parfaitement l'idéalisme de la jeunesse.

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Dans l'ensemble, l'heure passe sans qu'on y prenne garde. C'est le choix du divertissement qu'ont fait les scénaristes. En effet, même si l'épisode n'hésite pas à souligner toute la misère sociale du Londres de l'époque, on reste dans le cadre d'un costume drama très propret. Cherchant à trouver un équilibre précaire entre un certain réalisme et un refus d'apparaître trop sombre. Si bien qu'on reste un peu sur sa faim dans la reconstitution de la ville de l'époque. Il faut dire que je garde à l'esprit, comme référence, la noirceur si prenante de l'excellente mini-série, City of Vice (de Channel 4, sur Henry Fielding et la formation de Bow Street Runers), qui demeure pour moi ce que la télévision britannique a fait de mieux en terme de série historique judiciaire/policière (parmi ce que j'ai pu voir sur le sujet).

Si le portrait social garde donc une saveur d'inachevé, en revanche, il en va différemment de la reconstitution des procès, où l'ambiance du tribunal est très bien retranscrite. Ce sont des scènes que j'ai adorées. S'immerger dans un système judiciaire d'une autre époque, qui nous semble si frustrant et dont les imperfections et les vices sont criants, a quelque chose passionnant, sans même que l'on soit un adepte des legal dramas. L'audience devant jury se transforme souvent en pièce de théâtre. Le défendeur est bien seul, confronté à ses accusateurs, comme à un public qui transforme la salle en une forme d'arène. L'arbitraire règne. La recherche de la vérité n'est pas l'objectif premier, tandis que l'on exhibe, avec un voyeurisme assumé, l'envers du décor de la cité londonienne. L'ensemble est traité de façon dynamique : la pratique de la loi se situe à mille lieues des exigences modernes, et pourtant les problématiques restent familières.

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La figure du héros est représentée par William Garrow, barrister énergique qui "n'a pas fait les bonnes écoles, etc...", mais qui a des idéaux pleins la tête et une certaine conception de la justice qui paraît bien utopique à ses contemporains. Ses rêves se heurtent à la réalité d'un système dévoyé. Cependant, car c'est cela l'enjeu principal de la mini-série, il décide de s'attaquer à ces dérives en les combattant avec ses propres armes, c'est-à-dire en venant défendre à l'audience des clients. Ce premier épisode traite des débuts de Garrow. Suivant un parcours initiatique classique, il se déroule sans surprise, de façon assez cliché. L'échec amer auque succède l'euphorie de la réussite. Si le scénario apparaît sans surprise, il en va de même pour les personnages : plutôt bien écrit, mais sans réelle originalité et globalement -pour le moment du moins- unidimensionnels. Le duo formé par Garrow et son "mentor"/"associé" fonctionne bien. Ajoutons à cela une pincée de touche féminine, et le cahier des charges est rempli.

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Bilan : Au final, j'ai passé une heure divertissante et rythmée. La mini-série trouve aisément un équilibre entre petites pointes plus légères et moments sérieux. Le coktail se révèle agréable à suivre. Ce que j'ai le plus apprécié, c'est la reconstitution des procès, apportant une perspective historique intéressante et un décalage par rapport aux préoccupations modernes qui laisse songeur.
Cependant, ce premier épisode déroule sa partition d'une façon trop convenue pour prétendre à un autre statut que celui de simple divertissement très honnête. Il y a du souffle, mais il manque une réelle valeur ajoutée, une profondeur dans le scénario et les personnages. Peut-être est-ce un manque d'ambition, cela laisse en tout cas l'impression que les scénaristes ont choisi la facilité.

Reste, en fin de compte, un moment sympathique à passer devant son petit écran.


NOTE : 6,5/10

 

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