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16/11/2011

(J-Drama / Pilote) Kaseifu no Mita : une gouvernante mystérieuse et un déchirement familial poignant

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En ce mercredi asiatique, je vous propose de rester au Japon afin de poursuivre l'exploration de la saison automnale actuellement en cours de diffusion. Signe de mon regain d'intérêt pour le petit écran du pays du Soleil Levant, il s'agit de la deuxième nouveauté testée cette saison, après Last Money ~Ai no Nedan~. C'est également mon coup de coeur toutes nationalités confondues de la semaine.

Kaseifu no Mita est diffusée sur NTV depuis le 12 octobre 2011, tous les mercredis soirs à partir de 22h. Elle comportera un total de 10 épisodes de 45 minutes environ (sauf le premier un peu plus long). Avec son approche atypique et intrigante, mêlant mystère et drame familial, ce drama m'aura très vite conquis. C'est donc à nouveau un "faux test de pilote" que je vous propose (après Gye Baek), puisque la critique qui suit a été rédigée après visionnage des cinq premiers épisodes (à jour de la diffusion japonaise). De quoi déclamer avec une certaine assurance l'enthousiasme que ce drama a su susciter chez moi.

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Mita Akari est une gouvernante particulièrement appliquée et compétente dans son travail, donnant souvent entièrement satisfaction à ses employeurs. Cependant, elle ne sourit jamais, ne manifeste aucune émotion et ne donne jamais le fond de sa pensée, restant souvent sans réaction. Cette insensibilité et cette stoïcité apparentes font d'elle une exécutante mécanique de toutes les tâches qui lui sont ordonnées. Elle est en effet prête à remplir un ordre, quelqu'il soit, dans la mesure où celui-ci reste dans ses possibilités. Au point que sa supérieure conseille à ses employeurs de faire attention : si l'ordre était donné de tuer quelqu'un, il se pourrait fort que Mita Akari le fasse...

Kaseifu no Mita s'ouvre sur son arrivée dans une famille sans repères, au bord de la rupture. La mère est en effet décédée il y a moins de deux mois, laissant derrière elle quatre enfants choqués - une petite fille, deux garçons et une adolescente en passe de basculer dans l'âge adulte - ainsi qu'un mari dépassé qui ne sait comment réagir. En gouvernante omniprésente, figure extérieure qui ne juge jamais, Mita Akari va s'insérer dans le quotidien de cette famille, sa présence et ses actions permettant de révéler bien des non-dits et de soulager des tensions. Mais la vérité qui se cache derrière le drame qui a tout bouleversé risque bien de provoquer l'implosion définitive de cette famille sous le poids des responsabilités qui en découlent...

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La réussite de Kaseifu no Mita tient à l'habile mélange des genres qu'elle met en scène. La série emprunte en effet à deux tonalités a priori très différentes, pour se révéler à la croisée du suspense et du mélodrame. Trouvant immédiatement le juste équilibre entre ces deux versants, le résultat s'avère à la fois intrigant et surprenant. D'une part, va être entretenu et exploré le mystère autour de cette figure atypique qu'est la gouvernante, le drama restant ici dans un registre purement suggestif qui n'en demeure pas moins inquiétant. D'autre part, nous sommes plongés, avec une justesse rare et beaucoup d'empathie, dans l'intensité dramatique d'une implosion familiale poignante.

C'est donc par sa faculté à développer de manière consistante ces deux facettes, à la fois parallèles et irrémédiablement liées entre elles, que ce drama assure non seulement son originalité et sa richesse, mais aussi la fidélité d'un téléspectateur rapidement captivé.

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L'attrait de Kaseifu no Mita réside tout d'abord dans le personnage de Mita Akari. Le drama distille autour d'elle un parfum de mystère, empruntant à cette fin des codes narratifs qui ne sont pas sans évoquer ceux d'un thriller. Car Mita Akari n'a rien de l'employée dévouée ordinaire. Si elle pourrait a priori paraître idéale par sa faculté à exaucer presque tous les voeux, ses employeurs prennent vite conscience qu'elle exécute les ordres qui lui sont donnés sans le moindre recul. Tragiquement déshumanisée, comme déconnectée de toute émotion, elle apparaît semblable à une automate. Cherchant vainement un vestige d'humanité derrière cette figure impassible, le téléspectateur s'interroge : qui est-elle vraiment ? Quelle expérience a-t-elle vécue pour en arriver à ce stade de détachement, non seulement extrême, mais aussi dangereux ?

Au-delà du mystère qu'il dévoile peu à peu, le drama va également exploiter toutes les problématiques que peut soulever ce personnage si déroutant. Car Mita Akari ne s'embarrasse ni d'enjeux moraux, ni d'interdits légaux : elle fait ce qu'on lui demande dans la mesure de ses capacités, peu importe qu'il lui soit ordonné de nettoyer la salle de bain ou de tuer la voisine qui propage les rumeurs les plus infamantes sur la famille... Elle apparaît donc d'abord comme une figure inquiétante : sa seule présence rend soudain possible les souhaits les plus excessifs émis sous le coup de l'émotion, révélant ainsi la part d'ombre en chacun de ses employeurs. Cependant, au fil du drama, la perception du téléspectateur se nuance : en l'observant cantonnée dans un rôle de simple exécutante dont elle peut elle-même être la victime, on prend conscience que le réel enjeu n'est pas ce qui naîtra de sa propre initiative. Elle est le reflet de ses employeurs ; et ce qu'elle fait, c'est tout simplement placer ces derniers devant leurs responsabilités. C'est là le thème transversal, récurrent de ce drama.

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Si le rôle de catalyseur de Mita Akari a une telle importance, c'est parce que Kaseifu no Mita nous raconte avant tout l'histoire de la famille Asuda, chez laquelle la gouvernante va être employée. Cette famille traverse une dure épreuve, celle du décès d'une mère qui faisait le lien entre tous ses membres. Le drama débute en empruntant une approche très classique du thème du deuil, traitant avec justesse et sans excès de la difficulté de chacun de faire face à cette perte. Mais très vite, et c'est là que réside la valeur ajoutée de la série, un tournant plus douloureux est pris : cette mort, présentée initialement comme accidentelle, est en réalité un suicide. Or, le jour précédent, son mari, ayant une aventure qu'il pensait sérieuse, avait annoncé à sa femme son intention de divorcer. Par une ironie amère que le drama met pleinement en lumière, le père s'apprêtait donc à abandonner sa famille, mais c'est finalement son épouse qui l'a devancé, d'une bien plus tragique et irrémédiable façon.

C'est lorsque la vérité éclate, à travers les scènes de confrontation qui en résultent, que Kaseifu no Mita acquiert véritablement une autre dimension, tant humaine qu'émotionnelle. Inversant soudain les rôles au sein de la famille, bouleversant toutes les certitudes, les implications de cette révélation sont abordées frontalement. Les réactions des divers enfants à la loyauté désormais écartelée sont décrites avec beaucoup de réalisme. Cependant c'est la figure du mari, par ses ambivalences, qui m'a le plus fasciné. Conscient de sa faillite dans un rôle de père qu'il n'a jamais souhaité, ayant toujours eu l'impression de subir cette vie, tout cela lui sert d'électrochoc pour soudain cesser de prétendre. Son honnêteté est à la fois désarmante et pathétique. Face à un dilemme où il n'y a aucune échappatoire, l'expression de ses doutes achève d'ébranler sa famille.Un père incapable d'affirmer son amour à son propre enfant peut-il se prétendre "père" ?

Nous présentant alors les ruines de la famille Asuda, Kaseifu no Mita n'hésite pas à employer une violence émotionnelle marquante qui pose en filigrane une question plus troublante : qu'est-ce qui fait et fonde une famille ? La série oblige chacun à s'interroger sur la nature de ce lien que l'on considère trop souvent comme un acquis et un dû. Après tout ce passif, les Asuda pourront-ils retrouver le sens du mot "famille" et en reformer une ?

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Sur la forme, Kaseifu no Mita se présente de manière très classique. La caméra sait parfaitement jouer sur l'aura mystérieuse qui émane de Mita Akari, n'ayant pas son pareil pour la faire surgir dans un angle de porte ou imposant tout simplement sa présence stoïque et impassible dans un coin de la pièce où se déroule la scène. La réalisation emploie ainsi ce même mélange, entre drame familial et une touche plus inquiétante, qui fait tout l'attrait de ce drama. C'est ainsi que la petite musique qui retentit lors du début de chaque épisode tient beaucoup plus du thriller mystérieux. Dans l'ensemble, la bande-son de ce drama est réussie, avec notamment une superbe chanson qui accompagne toujours les dernières minutes de chaque épisode, dans un style rock un peu mélancolique, interprétée par Saito Kazuyoshi (cf. la deuxième vidéo à la fin de la note).

Enfin, Kaseifu no Mita bénéficie d'un casting homogène, dans lequel nul ne dénote. Logiquement, c'est sans doute Matsushima Nanako (GTO) qui retient prioritairement l'attention : dans un registre d'une impassibilité impressionante, c'est un rôle au minimalisme calculé qu'elle investit avec beaucoup sobriété. A ses côtés, par contraste avec ce détachement appliqué, on retrouve une famille en train de s'entre-déchirer. Le père est interprété avec beaucoup de nuances par Hasegawa Hiroki. Ce qui est assez amusant le concernant, c'est qu'il se retrouve simultanément dans les deux j-dramas que je visionne actuellement, puisqu'il est également l'acteur principal de Suzuki Sensei. Et si jusqu'à présent je le connaissais peu (voire pas), dans ce registre de personnage en proie au doute, j'avoue que je le trouve vraiment très convaincant ! Composent également cette petite famille : Kutsuna Shiori, Nakagawa Taishi, Ayabe Shuto et Honda Miyu. Signalons enfin la présence de Aibu Saki (Karei Naru Ichizoku, Perfect Report, Rebound).

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Bilan : Aux confins du suspense et du mélodrame familial, Kaseifu no Mita est un intrigant drama qui trouve le juste équilibre entre ces différents genres et tonalités. Détaché de tout schéma manichéen, il sait aussi bien nous plonger dans un déchirement familial poignant, écrit avec beaucoup de justesse, que cultiver une aura de mystère prenant autour de cette figure presque inquiétante qu'est la gouvernante. En filigrane, s'esquisse une intéressante réflexion sur la famille et ses fondements. Parvenant à surprendre et à dépasser les attentes du téléspectateur, il devrait être capable de toucher tous les publics.

La solidité et la consistance de ces cinq premiers épisodes m'incitent à l'optimisme pour la seconde moitié de la série. A découvrir !


NOTE : 8/10


Les premières minutes de la série :


La chanson récurrente de l'OST (
Yasashiku Naritai par Saito Kazuyoshi) :

12/11/2011

(Pilote US) Hell on wheels : à la conquête ferroviaire de l'Ouest

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Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous l'expliquer en ressortant mes indémodables épisodes d'Au nom de la loi, le western est un des rares genres gravés dans mon patrimoine génétique culturel. Il m'est très difficile d'y résister, même s'il s'agit d'un divertissement inégal dans la bush australienne comme peut l'être Wild Boys depuis cet été. C'était donc logiquement avec une certaine attente (tempérée par les échos mitigés glanés dans la presse américaine) et beaucoup de curiosité que j'attendais les débuts de Hell on Wheels.

Cette nouveauté a été lancée dimanche dernier, 6 novembre 2011, sur AMC. Sa première saison comportera sept épisodes. En investissant le genre classique du western, la chaîne américaine poursuit sa volonté de diversifier son offre de séries, l'étoffant désormais du fantastique au policier et renouant donc ici avec de l'historique. Le pilote de Hell on Wheels ne permet pas encore de déterminer si la série s'inscrira parmi les valeurs sûres ou les approximations de la chaîne. Mais s'il n'est pas exempt de défauts, il a cependant piqué ma curiosité.

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Hell on Wheels s'ouvre en 1865 sur des Etats-Unis toujours marqués par une guerre de Sécession qui a laissé des traces. Pour relancer le développement, notamment économique du pays, et dépasser le clivage entre le Nord et le Sud, c'est vers l'Ouest que l'on se tourne. L'idée de relier, par le chemin de fer, les Etats de l'Est aux terres de l'Ouest attise les convoitises d'hommes d'affaires, comme Thomas Durant, qui y voient le moyen d'y bâtir leur fortune, mais attire également tous ceux qui ont besoin de reconstruire une vie balayée par la guerre et partent vers de nouveaux horizons.

C'est notamment le cas de Cullen Bohannon, un ancien soldat confédéré. Son épouse est décédée suite à des exactions perpétrées par des soldats de l'union. Depuis, il traque sans relâche et implacablement le petit groupe responsable. Cette quête de vengeance le conduit sur ce projet ferroviaire ambitieux en cours de réalisation. Il trouve du travail comme contre-maître au sein du village mobile qui suit l'avancée des travaux. On croise dans ce lieu nombre d'individus en quête d'une vie nouvelle : d'anciens esclaves désormais libres ou encore des jeunes gens répondant à l'appel de l'ouest et espérant faire fortune.

Mais dans ces régions avancées, sans lois, situées entre les deux côtes et où les tribus indiennes protèrent encore leurs terres, la progression du chemin de fer reste une entreprise risquée, où les gains demeurent très aléatoires.  

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Avec pour cadre le contexte historique mouvant et passionnant de l'après Guerre de Sécession, Hell on Wheels bénéficie d'un potentiel indéniable que son pilote effleure sans en prendre pleinement la mesure. Afin d'impliquer le téléspectateur dans son récit, l'épisode fait le choix de mettre prioritairement en avant les projets de vengeance du personnage principal. Tout en créant ainsi un lien avec ce dernier, cela permet d'explorer plus avant les motivations et les ambivalences d'une figure intrigante qui s'impose, entre ombre et lumière, comme notre clé d'entrée dans l'univers. Pour autant, en dépit de l'ultime révélation de fin d'épisode, ce premier fil rouge apparaît avant tout comme l'accroche narrative parfaite pour faire découvrir, aux côtés de Bohannon, la toile de fond autrement plus vaste et ambitieuse qui va servir de décor à la série.

En effet, accordant un soin tout particulier à la reconstitution historique, le pilote de Hell on Wheels nous plonge dans un pays en pleine mutation qui peine à cicatriser de sa guerre fratricide, pansant encore ses douloureuses plaies. Se contentant de séquences d'exposition minimalistes pour tous ses autres protagonistes, le pilote papillonne d'un thème à l'autre entre des personnages pour le moment très secondaires. Son mérite est de parvenir à capturer une atmosphère riche et tourmentée qui porte le parfum caractéristique de cette époque. En effet, la conquête ferroviaire vers l'Ouest est une opportunité pour bâtir ou reconstruire des vies sans futures sur la côte. C'est aussi l'occasion de réunir symboliquement chacun, avec et en dépit de son passé, vers un but commun. La métaphore géographique du début, sur l'union de l'Est et l'Ouest, en réponse à la scission du Nord et du Sud, résonne dans la perception que l'on peut avoir de tous ces enjeux et de l'univers qui est peu à peu posé.

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Forte de la richesse inhérente à son concept, Hell on Wheels dispose d'un important potentiel. Pour autant, si ce pilote retient l'attention et sait piquer la curiosité du téléspectateur, il laisse aussi un arrière-goût d'inachevé. Attachée à capter une ambiance, la série opte pour une exposition chorale qui reste trop en surface, sans doute pressée par la durée trop brève d'un épisode au cours duquel il y aurait tant à raconter. Il s'agit donc d'aller à l'essentiel et de définir chacun en un minimum de scènes. Ainsi, à l'exception du protagoniste principal, repère du téléspectateur, mais aussi figure la plus creusée de l'épisode, tout ce qui gravite autour de lui souffre d'une présentation excessivement sommaire. La série ne recule devant aucun cliché pour définir immédiatement des protagonistes pour le moment très unidimensionnels, qui peinent donc à retenir l'attention du téléspectateur.

Pour autant, ces problèmes ne semblent pas insurmontables. En effet, ce déséquilibre important entre le personnage principal et les autres résulte du choix d'avoir fait de Bohannon la clé d'entrée dans la série. Par conséquent, c'est une inégalité qui devrait se corriger au fil des épisodes, la seule thématique de la vengeance ayant déjà montré ses limites. De manière générale, Hell on Wheels devra apprendre à nuancer son propos, afin de gagner aussi bien en épaisseur qu'en consistance. Il faut cependant reconnaître à la série le confort et la solidité de son approche classique, mêlant au sujet particulier de la conquête ferroviaire des thèmes traditionnels du western : le téléspectateur est en terrain connu et ne demande qu'à se laisser convaincre.

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Sur la forme, Hell on Wheels dispose d'une très belle réalisation. Un soin particulier a été apporté à la photographie, le choix des différentes teintes renvoyant parfaitement à l'imaginaire de l'Ouest. Si les images peuvent paraître parfois un peu froides, manquant quelque peu de naturel, elles demeurent dans l'ensemble d'une esthétique vraiment très belle à regarder. Quant à la bande-son, elle s'insère sans difficulté dans le récit, outil d'ambiance peu envahissant.

Enfin, le casting n'a pas encore eu pleinement l'occasion de s'affirmer au cours de ce presque trop bref pilote, à l'exception d'Anson Mount (Conviction), qui interprète cette figure très classique du vétéran sudiste au monde bouleversé par la guerre. Il propose une prestation équilibrée, entre sobriété et intensité lorsque les passages touchent à des sujets plus intimes, qui convainc le téléspectateur. A ses côtés, les sériephiles reconnaîtront avec plaisir Colm Menaey (Star Trek : Deep Space Nince), en homme d'affaire sans scrupules. On retrouve également Common, Dominique McElligott (Raw), Ben Esler, Phil Burke, ou encore Eddie Spears (Into the West).

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Bilan : Bénéficiant d'une toile de fond historique extrêmement intéressante et tourmentée, le pilote de Hell on Wheels propose une introduction efficace qui se réapproprie des recettes traditionnelles du genre ne laissant pas insensible. Cependant l'épisode ne prend pas pleinement la mesure de cette richesse, avec une exposition inaboutie qui reste trop en surface. Cédant à la facilité et à la rapidité d'une introduction où le classique confine parfois au cliché, la série devra nuancer son écriture et gagner en subtilité pour s'assurer de la fidélité durable du téléspectateur. Cependant, ce sont les fondations d'un honnête - à défaut d'original - western qui sont posées. A surveiller.

NOTE : 6,5/10


La bande-annonce de la série :

09/11/2011

(J-Drama) Meitantei no Okite : une atypique parodie policière très sympathique

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Après deux semaines passées en Corée du Sud, c'est au Japon que My Télé is Rich! pose ses valises en ce mercredi asiatique. Non pour la review du pilote d'une des dernières nouveautés de la saison automnale, mais pour le bilan d'une série un peu plus ancienne. Si vous savez que je ne suis pas particulièrement versée dans le genre policier, quelques agréables surprises me prouvent qu'il ne faut jamais fermer la porte à la curiosité. Après BOSS, voici donc Meitantei no Okite.

Composée de 10 épisodes de 45 minutes chacun (sauf le premier qui est un peu plus long), Meitantei no Okite a été diffusée sur TV Asahi du 17 avril au 19 juin 2009. C'est sur les conseils avisés de Kerydwen que j'ai visionné cette série qui s'est révélée être une comédie savoureuse, très plaisante à suivre. Il s'agit d'une vraie parodie décalée et rafraîchissante dans la tradition des fictions policières, mêlant références japonaises et occidentales.

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Saviez-vous que dans toute fiction policière réussie, roman comme série, il existe à travers le monde un certain nombre de règles qui, combinées, sont destinées à rendre l'histoire prenante et efficace ? C'est ainsi que chaque personnage doit se comporter et agir suivant des conditions liées à son rôle.

Le personnage principal, le Grand Détective Tenkaichi Daigoro, se doit de résoudre brillamment chaque mystère, identifiant le coupable au terme d'une séance de révélations considérée comme le climax de l'épisode et l'apothéose de l'enquête. A ses côtés, il est assisté par le capitaine de police, personnage secondaire expérimenté qui va lui servir de faire-valoir dans cette tâche. Ce dernier a vocation à soulever toutes les hypothèses les plus farfelues sauf la bonne, permettant par contraste au jeune détective de briller. Enfin, est également introduit un personnage féminin indispensable : la nouvelle inspectrice qui doit apprendre les bases du métier et qui pourra tomber sous le charme du héros.

S'appliquant à faire méticuleusement mettre en oeuvre ces codes narratifs par des protagonistes qui ont conscience du cahier des charges pesant sur eux, Meitantei no Okite investit la fiction policière avec une approche très décalée. Le drama va ainsi nous relater les enquêtes de ce trio dont la mission est de solutionner des crimes, tout en se conformant à toutes ces conditions prérequises.

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Plus qu'une énième comédie policière, Meitantei no Okite est une parodie qui s'approprie, mais aussi détourne à sa manière, tous les ingrédients les plus classiques de ce genre si familier au téléspectateur. Adoptant le format d'un procedural show traditionnel, avec une enquête par épisode, chaque histoire est placée sous un thème particulier : le mystère du meurtre ayant eu lieu dans un huis clos, celui du dernier message énigmatique laissé par la victime juste avant sa mort, etc... Habilement, le drama mêle des sources d'inspiration diverses et variées, avec des références qui vont de classiques japonais (notamment certains dramas) jusqu'aux séries américaines (Les Experts, Prison Break).

Pour autant, l'enjeu ne réside pas tant dans la résolution du meurtre - en dépit de tous les efforts faits par Tenkaichi pour en faire le point d'orgue de l'épisode - que dans la façon dont l'enquête va se dérouler. Plus précisément, ce sont tous les soubressauts narratifs qui parsèment les épisodes, toutes les intéractions, au sein du trio principal comme avec certains suspects, qui vont faire l'originalité de la série. Ils posent son ambiance à part, dan laquelle un sens de l'absurde assumé et une forme de dérision forment un cocktail détonant.

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Car la raison pour laquelle Meitantei no Okite m'a véritablement conquise, c'est qu'elle dépasse la simple parodie, en prenant du recul par rapport à ce qu'elle nous raconte. En effet, sa particularité tient au fait que ses personnages ont pleinement conscience qu'ils ne sont que... des personnages. Par conséquent, ils connaissent le cahier des charges attenant au rôle qui leur est théoriquement assigné et sont censés s'y conformer volontairement. Sous le prétexte qu'il faut respecter ces exigences, c'est l'occasion pour les protagonistes eux-mêmes d'exposer les recettes employées pour construire chaque scénario, mais aussi d'en exploiter les rouages et leur prévisibilité.

Dès lors, chaque déviation de la feuille de route, chaque non respect des comportements canoniquement attendus, apparaît comme un obstacle au bon déroulement de l'épisode qu'il convient de corriger en aparté dans une salle de debriefing, summum du décalage, où se retrouve notre trio. Multipliant ainsi les ruptures de rythme aux causes improbables et impossible dans une fiction classique, la série investit une dimension comique supplémentaire. Si cela introduit logiquement une distance par rapport à l'enquête, cette approche a le mérite d'accentuer la proximité avec les différents protagonistes. Il émane en effet du trio principal une dynamique de groupe, volontairement chaotique, qui rend chacun très sympathique. Des caprices de Tenkaichi, au sens du sacrifice du capitaine dans sa mission de personnage secondaire, jusqu'à la réticence perpétuelle de Fuji Mana qui refuse d'assimiler les règles et de se cantonner au rôle qui lui est dévolu... toutes ces réactions se transforment en autant de running-gag permanents dont le téléspectateur ne se lasse pas. 

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Sur la forme, Meitantei no Okite exploite admirablement sa tonalité décalée. Dotée d'une réalisation dynamique, la caméra n'hésite pas à accompagner, voire à précipiter, les ruptures de rythme et les brusques changements de perspective dans la narration. Parmi les effets de style permettant d'accentuer l'humour de certains passages, l'utilisation de la pièce de "mise au point", située artificiellement en dehors de l'histoire, ou encore le recours à des sous-titres directement incrustés à l'écran, sont autant d'éléments qui ne font qu'encourager un humour omniprésent, aussi bien sur le fond de l'histoire et que dans la manière de la raconter. A noter également une chanson de fin très agréable à l'écoute, interprétée par Baba Toshihide (et qui s'intitule Fighting Pose no Uta).

Enfin, Meitantei no Okite bénéficie d'un casting au parfait diapason de son atmosphère atypique. La parodie légitime le sur-jeu et beaucoup d'excès, mais l'ensemble reste dans la continuité logique : le rire à la fois arrogant et forcé de Tenkaishi ou encore la surprise perplexe de Fuji Mana deviennent en soi des éléments humoristiques à part entière. Le téléspectateur s'attache ainsi aisément à tout ces acteurs, conduits par Matsudo Shota (Liar Game, Love Shuffle). A ses côtés, on retrouve Kashii Yu (Mori no Asagao), Kimura Yuichi (Shinzanmono), Chisun et Irie Jingi.

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Bilan : Parodie attachante, comédie policière qui assume et cultive une atmosphère décalée, Meitantei no Okite est un drama très sympathique, reposant sur un trio de personnages dont la dynamique est épicée par la conscience que chacun a du rôle qui lui est dévolu. Empruntant à des références multiples, japonaises comme occidentales, la série prend un malin plaisir à se jouer des codes narratifs classiques dont elle souligne l'existence. Elle apparaît à la fois comme une forme d'hommage au genre, tout y apportant une distance humoristique particulièrement rafraîchissante. C'est en somme un divertissement policier parfait pour se détendre et passer un bon moment devant son petit écran.


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la série :

06/11/2011

(UK) Garrow's Law, saison 2 : un enthousiasmant legal drama historique

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Dans une semaine, le dimanche 13 novembre signera le retour de la série que j'attends le plus durant ce mois de novembre : la troisième saison de Garrow's Law. Sitôt la nouvelle officialisée, il y a quelques jours, j'ai été prise d'une brusque envie de revoir la précédente saison. C'était une de ces pulsions sériephiles qui vous happe en dépit du bon sens, alors que vous avez bien trop de choses en retard à regarder, et à laquelle il est impossible de résister.

Quatre épisodes plus tard (l'avantage des pulsions sériephiles anglaises est qu'elles restent souvent "raisonnables" par leur brièveté), la bonne impression que j'en avais gardée n'a été que confirmée par ce nouveau visionnage. En novembre de l'année dernière, j'avais rédigé un article après le premier épisode de la saison 2 sous forme de quasi-playdoyer, mais je n'avais pas pris le temps d'y revenir en fin de saison. Comme tout vient à point qui sait attendre, c'est donc pour introduire la nouvelle saison que je rappelle à votre bon souvenir cette saison 2.

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Après une première saison qui avait permis à Garrow's Law de trouver progressivement ses marques dans l'entre-deux genres que la série ambitionnait d'investir, mêlant legal drama et period drama, cette deuxième saison lui a permis de pleinement exploiter le potentiel entrevu. Non seulement, elle a su faire preuve d'une maîtrise égale pour mettre en scène son volet judiciaire, mais elle l'a complété d'un volet humain souvent touchant, en explorant plus avant les personnages. Elle a ainsi proposé une suite de quatre épisodes particulièrement aboutie, où aux affaires jugées à Old Bailey s'est greffé un fil rouge plus personnel impliquant les principaux protagonistes. De qualité constante, elle a su profiter de son format court qui, non seulement lui permet d'éviter l'écueil de toute répétition ou lassitude, mais justifie aussi le soin particulier accordé à chacune des histoires traitées.

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Dans la continuité de ce qui faisait la force de sa première saison, il est tout d'abord un point sur lequel Garrow's Law est restée fidèle à elle-même : c'est la rigueur avec laquelle elle traite de ses affaires judiciaires. S'inspirant des archives du tribunal de Old Bailey, elle a toujours apporté un réel soin à la reconstitution historique des procès dans lesquels William Garrow intervient. Nous plongeant dans cette cour, où la publicité des instances les transforment souvent en un théâtre d'expression de l'opinion publique, la série capture à merveille l'atmosphère fébrile et tendue qui y règne. Les cas évoqués sont toujours très diversifiés, comme le montre une nouvelle la saison 2 (vol, qualité de l'esclave, corruption au sein de la marine, adultère, sodomie), ce qui permet de balayer de manière complète le droit de l'époque, mais aussi d'apporter un éclairage passionnant sur les moeurs sociales et judiciaires.

Ces jugements restent en effet le reflet de la société londonienne du XVIIIe siècle. Non seulement, ils soulèvent des questions propres à l'époque, notamment l'inégalité d'une justice prompte à juger en fonction du statut social, mais ils éclairent également les rouages d'un système judiciaire encore bien éloigné des principes aujourd'hui consacrés - au moins théoriquement. Comment ne pas être frappé par la disproportion ou par l'absence d'individualisation de certaines peines infligées, qui ne prennent en compte ni les circonstances, ni la personne de l'accusé ? Garrow's Law est une rareté au sein des séries judiciaires actuelles : elle a le mérite de revenir à une époque de genèse de notre droit - notamment pénal - moderne, permettant de prendre conscience du chemin parcouru. Le combat de William Garrow, notamment pour affirmer les droits de la défense avec son utilisation du contre-interrogatoire, représente des balbutiements qui tendent vers un changement plus profond. En formulant distinctement des problématiques judiciaires fondamentales, la série rappelle que ce système reste le fruit d'un constant mouvement de balancier, arbitrage fragile entre les droits individuels des parties, mais aussi l'intérêt collectif de la société, et replace ainsi au coeur des enjeux les acteurs mêmes du procès.

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Au-delà de cette approche propre à un legal drama se déroulant au XVIIIe siècle qui fait la particularité de Garrow's Law, la réelle valeur ajoutée de cette deuxième saison aura été le développement de la dimension humaine de la série. Si la première avait su par intermittence amorcer l'exploration de certains des personnages, ces quatre épisodes auront permis un approfondissement des relations qu'ils ont nouées. Les portraits des différents protagonistes y gagnent en nuances, et en épaisseur. Ainsi, au sein même du tribunal, les rapports professionnels, conflictuels ou concurrentiels, que William Garrow peut entretenir avec son rival de toujours, Silvester, ou encore avec le juge Buller, laisseront place, lorsque cela sera nécessaire, à une forme de solidarité, mue par le respect réciproque que peuvent nourrir ces juristes qui n'en demeurent pas moins des hommes avec des principes, derrière le masque qu'ils arborent durant les procès.

Cependant la relation au centre de cette saison, celle qui va constituer le fil rouge à la fois personnel et judiciaire, reste bien entendu celle de Lady Sarah et de William Garrow. Si la storyline se développe au détriment de Sir Arthur, lequel s'enferme dans une jalousie paranoïaque excessive, elle a l'indéniable mérite de permettre d'éclairer la nature, mais aussi la force, des sentiments qui unissent les deux jeunes gens. Les épreuves que ces derniers doivent affronter au fil de la saison, devant faire face à une menace de ruine morale et financière, servent de révélateur pour chacun d'eux. Le refus de transiger de Sarah, qui n'acceptera pas de sacrifier William pour la possibilité de revoir son fils, sera une décision particulièrement forte. Quant à la lente descente aux enfers de l'avocat, prenant peu à peu conscience de la fragilité de sa situation et de ce qu'il risque, elle jette un autre éclairage sur un personnage jusqu'alors redresseur de torts inflexible et souvent trop sûr de son bon droit. La remise en cause qu'entraîne le procès atypique qui conclut la saison humanise considérablement William Garrow, et fortifie l'attachement que peut éprouver le téléspectateur à l'égard de la série.  

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Bilan : De qualité constante, construite de manière plus ambitieuse et aboutie, la saison 2 de Garrow's Law aura été une double réussite. Non seulement la série a su confirmer son admirable maîtrise dans son volet judiciaire et historique toujours particulièrement passionnant, mais elle a également pris le temps d'approfondir une assise humaine permettant d'impliquer émotionnellement le téléspectateur aux côtés des différents protagonistes, et plus particulièrement de William Garrow. Cette saison 2 a donc été un ensemble très consistant que j'ai suivi avec beaucoup de plaisir.

Rendez-vous la semaine prochaine pour la saison 3 !


NOTE : 8/10


Le générique de la série :


Une des scènes marquantes de la saison (épisode 4) :

05/11/2011

(UK) Spooks (MI-5), saison 10 : une dernière saison fidèle à la série

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Le 23 octobre 2011 s'est achevée sur BBC1 une des séries qui aura le plus marqué ma sériephilie britannique : Spooks (MI-5). Après dix saisons de loyaux services, de morts brutales et de paranoïa intense, il était assurément temps de conclure. Non seulement la série n'avait plus la flamboyance sobre des débuts, mais ses recettes désormais trop bien connues avaient même fini par la rendre prévisible, un paradoxe pour une fiction qui avait pu s'enorgueillir d'avoir tant de fois donner le vertige à ses téléspectateur.

Comme un symbole parfaitement adéquat pour boucler un cycle, c'est avec la Russie que Spooks aura renoué pour sa dernière saison. Et si tout au long de ces six épisodes, elle se sera efforcée de proposer une redistribution des cartes, où la Russie ne serait plus ennemie, mais bien l'alliée, c'est pourtant sous le signe de la Guerre Froide, et d'un passé parfois douloureux qu'il faut assumer, qu'elle aura été placée.

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Devant cette toile de fond russe, la saison a emprunté un schéma narratif assez proche de celui des précédentes : la construction d'un fil rouge prédominant qui conditionne l'ensemble, auquel se greffent quelques intrigues plus pressantes le temps d'un épisode. La série aura été globalement efficace dans ces deux domaines. Du côté de ces storylines indépendantes, elle aura proposé des intrigues toujours prenantes, globalement solides, dont le principal bémol fut un certain syndrome de déjà-vu. En effet, le parti pris dit "réaliste" ou du moins pessimiste qui fait la marque de fabrique de Spooks donne souvent au téléspectateur toutes les clés pour connaître la voie vers laquelle chacune de ces histoires s'oriente. Cependant, l'arrière goût teinté d'amertume que laissent certaines des conclusions les plus poignantes - le dénouement à Trafalgar Square par exemple - demeure une signature indélibile qui perpétue l'identité de la série.

Parallèlement, marquée par ce turn-over constant de son personnel, cette saison aura également diversement permis de mettre en valeur les personnages entourant le duo principal que forment Harry et Ruth. Comme une sorte d'hommage - volontaire ou non -, leurs histoires ne vont pas être sans réveiller des souvenirs du passé. La nouvelle chef de la section D, Erin Watts, n'aura pas démérité, sans que les scénaristes puissent explorer avec une réelle subtilité la question du carriérisme et du lien avec sa fille ; cette problématique n'étant pas sans rappeler la saison 3 et l'arrivée du couple Adam et Fiona. De son côté, Dimitri aura aussi eu droit à son épisode, avec un dilemme moral qui apparaît comme le faible écho des thèmes du mensonge et du relationnel centraux dans les premières saisons, notamment avec Tom. Pourtant, assez paradoxalement, ce sont ceux que les scénaristes n'auront pas véritablement cherché à faire briller qui s'en tireront le mieux. Présenté de manière excessivement antipathique, Callum aura été un des personnages qui se sera le plus efficacement détaché du carcan de "déjà vu" pour imposer son style au sein de la section D. Mais logiquement, c'est aussi par ses fins tragiques que cette saison 10 aura marqué. Dans une telle série, n'est-ce pas une sorte de consécration que de connaître cette mort brutale, "spooksienne" pourrait-on dire, qui laisse le téléspectateur sans voix ? Avant même le final, Spooks m'aura, une dernière fois, bluffé et fait frémir devant mon petit écran, avec la mort soudaine de Tariq.

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Cependant, c'est l'exploration d'un autre personnage qui aura été au coeur de la saison : celle de Harry. La résurgence de lourds secrets de la Guerre Froide offre un nouvel éclairage sur cette figure de l'espion aux facettes multiples, qui est devenue au fil de la série l'âme de Spooks. Cette fois-ci, ce n'est pas aux secrets ou à la raison d'Etat que touche l'histoire, mais bien à l'intime du personnage. Plus que les sacrifices et la culpabilité inhérente qui y est rattachée, je dois avouer que c'est la résolution offerte par le dernier épisode, riche en révélations, qui permet à cette storyline d'acquérir sa vraie dimension. Abandonnant ses accents faussement soap pour révéler un jeu de manipulation insoupçonné, la chute finale est, en dépit d'une mise en scène un peu artificielle, celle qui a posteriori apporte une nouvelle perspective autrement plus intrigante à l'ensemble de la saison. C'est dans un pur parfum Spooks-ien que la série se referme donc, avec un ultime retournement digne de ses grandes heures.

Ce ressenti est d'autant plus fort que tout en concluant le fil rouge, ce dernier épisode nous offre également son lot de drame qui prend au dépourvu, paraissant à la fois évitable et presque logique. Je l'ai dit pour Tariq, et je le redis pour Ruth, mais il est des sorties qui, dans Spooks, sont presque inhérentes à l'esprit de la série. Tout au long de la saison, les scénaristes auront éclairé ce lien, particulier, qui existe entre Ruth et Harry. Entre jeux d'espion et échanges tout en retenue, absorbés par leur job, ils seront restés là l'un pour l'autre jusqu'au bout. Si la fidélité de Ruth à Harry, en dépit de son nouveau travail loin de la section D, lui aura été fatale, elle correspond pleinement au personnage. Le rêve d'une vie ensemble, à la campagne, loin de ces préoccupations géopolitiques, était inaccessible. Si inconsciemment, le téléspectateur pouvait espérer que cette porte de sortie ne se referme pas, alors que chacun semblait désormais prêt à l'emprunter, la relation de Ruth et de Harry était trop intimement liée à ce qu'ils sont, à leur travail, pour envisager cette utopie.

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Après quinze jours, il m'est toujours difficile d'apprécier cette dernière saison avec suffisamment de recul. Spooks aura vécu pleinement ses dix années au cours desquelles je ne regrette pas un seul instant de l'avoir accompagné. Elle a considérablement évolué et muté depuis ses débuts, en 2002, jusqu'à cette conclusion en 2011, suivant, en un sens, le cycle de ses protagonistes principaux. Il y a d'abord eu Tom, le mensonge et les rapports difficiles entre vie privée et vie professionnelle ; Adam, d'une arrivée à la James Bond jusqu'à l'abîme de la dépression ; Ros, son flegme, son humour froid, et cette volonté chevillée au corps ; enfin, Lucas et cette douloureuse réadaptation au quotidien après tant d'années dans les geôles russes. A posteriori, à mes yeux nostalgiques, Tom Quinn restera sans aucun doute celui qui personnifiera toujours cette série (son apparition cameo à la fin du dernier épisode étant à ce titre parfaite), et cela autant pour son interprète, que pour l'état d'esprit qui marqua ces premières saisons. Mais une des forces de Spooks aura été de savoir toujours nous impliquer au côté de personnages qu'elle n'aura jamais ménagés. 

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Bilan : C'est avec beaucoup de soulagement que je peux écrire que Spooks aura été fidèle à elle-même jusqu'au bout. C'est par un épisode de haute volée, concluant avec une justesse presque inattendue, la saison comme la série, qu'elle a tiré sa révérence. Il a offert tout ce que l'on pouvait légitimement attendre. Un ultime retournement de situation, avec une manipulation d'une ampleur insoupçonnée qui éclaire sous un nouveau jour tant de choses. Un drame dans la lignée de l'esprit de la série. Et, surtout des dernières minutes parfaites. Un au revoir d'une sobriété bienvenue qui représente parfaitement la série, tandis que s'égrène sous les yeux de Harry et du téléspectateur tous ces noms d'agents trop tôt disparus. Le quotidien de la section D se poursuit malgré tout, inébranlable...

Au terme de cette dernière review, j'ai juste envie de remercier Spooks, pour ce thriller prenant qu'elle nous aura proposé, pour toutes ces émotions si intenses qu'elle nous aura fait vivre. Chapeau donc pour l'ensemble de son oeuvre, elle restera pour moi, et pour longtemps je pense, l'incarnation de la série moderne d'espionnage !


NOTE : 7/10


La bande-annonce de la saison :