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23/11/2009

(UK) Spooks (MI-5), series 8, épisode 4

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Si la bande-annonce avait laissé penser que l'on aurait droit à un épisode d'action, il se concentra en réalité sur ses personnages et leurs relations. Ce qui n'est pas plus mal après un éprouvant début de saison. La question de la confiance -ou de son absence- est au coeur des enjeux, tandis que le fil rouge relatif au complot mondial pour bouleverser l'ordre actuel prend peu à peu de l'ampleur dans la narration, et que ses ramifications se dévoilent.
 
Alors que Ros est occupée à regagner un équilibre précaire, ressassant sans fin les évènements tragiques de l'épisode précédent, ce sont les nerfs de Lucas qui sont mis à rude épreuve dans l'intrigue du jour. Le responsable des interrogatoires (comprendre : tortures) du FSB est arrivé en Angleterre. Il prend contact avec Lucas, qu'il a passé quatre années à torturer durant son passage dans les prisons russes ; mais avec lequel il a surtout lié une étrange relation, déclinaison nuancée du syndrome de Stockholm. Le Russe a récemment interrogé un extrémiste soudanais qui l'a informé d'une attaque terroriste en préparation, dans Londres. Y voyant une possibilité de monnayer cette information, l'officier propose un marché à Lucas : le lieu prévu de l'attaque contre un passeport britannique et un million de livres.
 
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Comme je l'ai dit, l'enjeu de l'épisode ne réside pas dans le nouveau sauvetage in-extremis de Londres par le MI-5, mais plutôt dans la psychologie des personnages.

L'épisode s'intéresse tout d'abord aux rapports entre Lucas et son ancien tortionnaire, soulignant les séquelles psychologiques et le traumatisme qui demeurent chez l'agent du MI-5. Nous en avions déjà eu des aperçus ; mais cela permet aux scénaristes d'humaniser à nouveau Lucas, qui était apparu très froid depuis le début de la saison. Au-delà de ces recherches de domination réciproque, la force de cette storyline est symbolisée par le moment où les rapports de force s'inversent. Lorsque Lucas le convainc de lui donner les informations pour empêcher l'attentat, sur la seule foi d'une hypothétique "confiance" établie entre eux. Confiance chimérique, puisque Lucas l'abandonne juste après au FSB, venu rechercher son renégat. Certes, le Russe avait appuyé l'attaque terroriste une fois qu'il l'avait apprise, dans le but d'obtenir de l'argent du gouvernement britannique, mais il reste que ce fragile lien entre les deux officiers se rompt sur une étrange ambiguité.

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Par ailleurs, nous sommes encore une fois témoin, avec la scène d'ouverture, de la complicité rapidement reconstruite entre Harry et Ruth, les deux personnages interagissant comme si Ruth n'était jamais partie. Dans la même perspective, les scénaristes ré-introduisent un léger flirt entre le duo le plus emblématique du MI-5. Ils auront probablement besoin de ce lien pour survivre aux évènements qu'ils vont devoir affronter. Car Harry continue de creuser la question de la réunion qui a eu lieu en Suisse, entre notamment divers officiers de renseignements de l'Ouest, mais aussi Chinois. Il en informe même son vis-à-vis de la CIA. Mais qui dit membres des services secrets présents à cette réunion, implique logiquement l'existence de traîtres infiltrés au sein des différents services. Harry se montre d'une prudence à toute épreuve, n'informant personne hormis Ruth. Il va même jusqu'à mentir à Lucas en le regardant droit dans les yeux, lorsque ce dernier évoque ce complot mondial dont lui a parlé l'interrogateur du FSB. Signe supplémentaire de la confiance limitée de Harry en son subordonné, quelque chose de brisé qui n'a jamais été vraiment réparé depuis la saison dernière. Mais si Harry fait preuve d'une sage paranoïa, raison de sa longévité à son poste, son confrère américain se montre moins mesuré, prompt à nourrir des soupçons contre les agents britanniques, mais en oubliant ses propres services. Ce qui lui sera fatal.

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Car la confiance est un vain mot. Surtout dans le milieu du renseignement. Voici la morale de l'épisode. Sarah aura passé l'épisode à osciller entre les rôles de petite amie compréhensive, agent de la CIA obéissant et... finalement... sa vraie nature : un traître infiltré qui est impliqué dans ce vaste complot pour bouleverser l'ordre mondial. La scène de fin, où elle tue brutalement son supérieur qui a eu l'inconscience de l'informer qu'il tenait une piste, vient comme une surprise. Du pur Spooks. Sobre et violent. Voilà qui rehausse mon intérêt pour cette blonde Américaine, nous promettant d'intéressants doubles jeux à l'avenir. Les manipulations sont toujours plus attractives à l'écran que les romances caricaturales.

Enfin, au milieu de tout cela, traversant l'épisode vaillamment et avec professionnalisme, il y a Ros, encore profondément marquée par la tragédie de l'épisode précédent. Elle n'en dort plus, tandis que l'image de Jo la hante. Entre elle et Lucas, le MI-5 dispose de deux agents de terrain quand même relativement brisés psychologiquement. A voir s'ils pourront tenir toute la saison dans cet équilibre précaire.

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Bilan : Un épisode plus posé que les précédents, où le fil rouge de la saison commence à apparaître et à venir nourrir la paranoïa du téléspectateur, comme aux plus grandes heures de la série. La méfiance instinctive de nos espions se renforce ; même entre collègues, la confiance n'est pas automatiquement de mise. Il faudra choisir ses confidents avec beaucoup de prudence. Sinon, l'intrigue de l'épisode est efficace. S'intéressant plus aux réactions des personnages et à la façon dont ils intéragissent qu'à l'enjeu de l'attentat en lui-même, dont on ne doute jamais vraiment qu'ils parviendront à le stopper.

Cet épisode pose en tout cas de solides jalons pour la suite de la saison. Spooks est définitivement reparti sur de bons rails. A suivre !


NOTE : 8,5/10

22/11/2009

(K-Drama) IRIS : mortels jeux d'espions

Encore un dimanche coréen. Toujours une histoire d'espionnage. Cela résume bien la semaine téléphagique anglo-coréenne, plutôt agréable, que j'ai passée.

Souvenez-vous, sériephile varie, ses envies fonctionnent souvent en cycle. Attendez-vous donc à ce que, pendant quelques semaines au moins, je vous parle de découvertes coréennes plus ou moins régulièrement, ayant pris le temps de mettre de côté un petit échantillon de séries potentiellement intéressantes que je me sens d'humeur à tester prochainement.

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Initialement, si je me suis intéressée à IRIS, c'est en raison du billet enthousiaste consacré au pilote, chez Ladytelephagy, lundi dernier. La curiosité piquée, The Legend à peine terminée, je me suis dit que c'était le moment ou jamais de m'ouvrir à de nouveaux horizons et de changer un peu de genre. En provenance de Corée, j'ai surtout "l'habitude" (enfin, tout est relatif, ce sont plus des excursions en Asie qu'une téléphagie asiatique que je développe) des dramas historiques, et je garde des souvenirs assez mitigés des quelques dramas contemporains que j'ai pu suivre. Cependant, IRIS offrait non seulement un pitch de départ attractif, mais elle apparaissait aussi comme une série aux ambitions hautement affichées et dotée d'un budget important. Elle rencontre d'ailleurs actuellement un joli succès en Corée, où sa diffusion sur KBS2 est en cours depuis octobre 2009, et bénéficie d'un beau buzz internaute.

L'ensemble des épisodes n'ayant pas été encore diffusé, c'est une note sous forme d'impressions au premier quart de la saison que je vous propose, puisque j'ai visionné les cinq premiers épisodes (sur les 20 qu'elle comptera au total).

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IRIS nous plonge dans les coulisses de l'espionnage international, avec en toile de fond, comme sources de tensions et de méfiances continuelles, la division persistante des deux Corées et la question, classiquement et universellement problématique, de l'armement nucléaire. Deux amis des forces spéciales sud-coréennes, Kim Hyun Joon et Jin Sa Woo, sont recrutés par une organisation secrète, branche à part des services de renseignements du pays, le NSS. Ils vont opérer sous les ordres d'une jeune femme, Choi Seung Hee, qui les avait déjà rencontrés dans les jours précédents, sous un prétexte quelconque, afin d'évaluer leur potentiel, et, du même coup, leur faire tourner la tête. Un triangle amoureux s'esquisse, avec une présentation typiquement coréenne.

Mais, si la réalité du terrain prouve rapidement la valeur des deux nouvelles recrues, la partie d'échecs réelle se joue à un autre niveau, dans un univers où les agents sont des pions sacrifiables, où la confiance est un luxe que l'on ne peut se permettre d'accorder et où les apparences sont trompeuses. Les personnages principaux se retrouvent ainsi happés dans un enchaînement d'évènements qui échappe à leur contrôle. Tour à tour assassin puis cible, chasseur puis chasssé, officiel puis fugitif, les loyautés se brisent et les alliances fluctuent, dans une ambiance sombre et réaliste.

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En effet, la série va progressivement se complexifier, se concentrant autour d'une intrigue principale solide qui s'emballe rapidement. Car IRIS n'adopte pas le format classique d'autres fictions d'espionnage, consistant en une mission par épisode. Au contraire, le fil rouge devient rapidement prépondérant. Elle se présente alors sous le format d'un vaste thriller prenant, dominés par les faux-semblants, les trahisons et les agendas personnels cachés. Résolument orientée à l'international, elle nous donne l'occasion de voyager en Asie comme en Europe. Petit à petit, les pièces se révèlent, sans que le téléspectateur puisse pleinement apprécier quel est le tableau final. Entre concurrence entre diverses organisations, assassinats politiques et sacrifices de la main d'oeuvre, nos héros vont devoir essayer de survivre et de démêler les mystères, face à ces vastes conspirations, dont ils ne connaissent pas toujours les réels enjeux.

Les scénaristes se révèlent particulièrement efficaces dans l'art d'esquisser des réponses qui génèrent surtout de nouvelles interrogations et de générer un suspense prenant et nerveux. Pour le moment, la gestion de cette intrigue principale est intelligemment et subtilement menée. Le téléspectateur est attentif et ne décroche pas. Tout cela est parfaitement servi par une réalisation impeccable, où les scènes d'action notamment sont magistralement exécutées. A l'image des dix premières minutes de la série, conduites tambour battant avec une maîtrise qui n'a rien à envier aux fictions occidentales, la caméra dynamique nous plonge très bien dans l'ambiance et la tension des moments-clés.

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Le petit bémol que l'on pourrait cependant adresser à IRIS réside dans sa tentative de conciliation entre le thriller et une certaine romance qu'elle prend le temps de développer. Certes, les passages plus calmes, qui sont l'occasion de développer les personnalités nuancées des personnages, permettent de poser les jalons des futures alliances et trahisons. Cependant, sans remettre en cause leur utilité dans la narration globale, certaines scènes dites "romantiques" s'éternisent, rompant un peu le rythme du récit. Cependant, cela n'est pas préjudiciable à l'intérêt porté à la série dans son ensemble. Dès que le rythme s'accélère, ces parenthèses nous paraissent bien loin ; et, comme je l'ai dit plus tôt, IRIS devient alors redoutablement efficace pour capter notre pleine attention.

Le scénario est aussi bien servi par un casting solide. Qu'il s'agisse de Lee Byun Hun (Kim Hyun Joon) ou Jung Jun Ho (Jin Sa Woo), ils sont très crédibles. Idem pour les deux agents nords-coréens, Kim Seung Woo et la ravissante Kim So Yun. En fait, ma seule réserve concerne Kim Tae Hee. qui fait encore tourner des têtes à son insu, un peu comme dans Gumiho (Nine Tailed Fox), le dernier k-drama où j'avais eu l'occasion de la croiser. Je l'avais assez peu appréciée à l'époque, pas pleinement convaincue par son sourire figé. Cependant, sans doute aidée par un rôle plus consistant, elle est un peu plus convaincante dans IRIS. Mais j'ai toujours du mal avec cette actrice.

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Bilan : Après cinq épisodes, me voici fébrilement skotchée devant mon petit écran, frustrée par le cliffhanger efficace du dernier épisode (autant qu'alléchée par la bande-annonce du suivant) et complètement rentrée dans une intrigue qui se complexifie considérablement au fil des épisodes. IRIS dépasse rapidement les simples enjeux de froide géopolitique, arbitrés par les services d'espionnage, pour y mêler les destinées humaines des personnages, broyés par cette partie d'échecs qui constitue la trame principale de la série. Une forme de fil rouge qui étend progressivement ses ramifications sur la fiction et fait enchaîner les épisodes sans s'en rendre compte. C'est d'autant plus intriguant que nous ne disposons pas de tous les éléments, ne pouvant que constater les manipulations et les forces en présence. Une impression de "toutélié" s'impose, sans que l'on connaisse le tableau d'ensemble. Très prenant.

Sombre et diablement efficace, en dépit de quelques longueurs amoureuses, IRIS devrait ravir tous les amateurs d'espionnage, et plus généralement de bon thriller. Je dresserai un bilan d'ensemble lorsque j'aurai eu l'occasion de regarder tous les épisodes ; mais, en attendant, n'hésitez pas à céder à la curiosité !


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce de la série :


21/11/2009

(UK) Doctor Who, 2009 Special : 'The End of Time' preview

Hier, était diffusée sur la BBC la traditionnelle soirée caritative consacrée aux Children in Need.
Comme l'an passé, elle fut l'occasion pour la chaîne de dévoiler un extrait de la première partie de l'épisode de Noël de Doctor Who, The end of Time (épisode très attendu pour lequel les fans constituent déjà consciencieusement leur stock de mouchoirs).

Les premières minutes de l'épisode ont ainsi été proposées aux téléspectateurs de la chaîne anglaise. Les voici en session de rattrapage (à savourer, car il reste devant nous un interminable mois d'attente) :


20/11/2009

(Mini-série UK) Tinker, Tailor, Soldier, Spy : looking for the mole


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Je vous ai déjà confié mon petit penchant pour les histoires d'espionnage. Je ne pouvais donc pas ne pas vous parler des célèbres adaptations faites par la BBC, à partir d'une suite de romans du maître de ce genre, John Le Carré. Elles font partie des grands classiques qui méritent d'être vus au moins une fois dans une vie de téléphage, surtout si on apprécie ces thématiques. Certes, je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, car elles commencent à dater un peu. Mais, si l'image et la réalisation sont d'époque, la force du récit et de la narration est proprement intemporelle. Tinker, Tailor, Soldier, Spy, la première de ces mini-séries, remonte à 1979. Puis, en 1982, la BBC diffusera Smiley's People (dont je vous reparlerai ultérieurement sans doute). Les deux font partie des Smiley novels, un ensemble de livres mettant en scène le célèbre personnage de George Smiley, officier du MI-6 et anti-James Bond par excellence, qu'il concurrence au panthéon des espions britanniques de fiction.

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Tinker, Tailor, Soldier, Spy, c'est une histoire classique, somme toute indémodable : en pleine Guerre Froide, la recherche d'un agent soviétique infiltré dans les instances dirigeantes du MI-6 britannique. Au sein d'un Circus déstabilisé (nom donné au MI-6), la mission d'identifier cet individu qui menace les fondations des services de renseignements de Sa Majesté échoit à un officier mis en retraite forcée quelques mois plus tôt, George Smiley. Le téléspectateur plonge rapidement avec lui dans une ambiance de paranoïa, tandis que l'on suit la partie d'échecs très complexe qui se déroule sous nos yeux. Pour écrire ce roman publié en 1974, John Le Carré, lui-même ancien agent du MI-6, s'est basé sur ses propres souvenirs et des faits réels, s'attachant à retranscrire l'atmosphère qui régnait dans les années 50 et au début des années 60 au sein de l'organisation, et faisant référence, derrière cette chasse à la taupe, à la figure d'un traître bien réel, Philby (Mais si, souvenez-vous, je vous en ai déjà parlé, il était le plus célèbre des Cambridge Five. Pour vous rafraîchir la mémoire, cf. mon billet sur la mini-série Cambridge Spies).

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Tinker, Tailor, Soldier, Spy comporte sept épisodes, que le téléspectateur enchaîne avec une fébrilité croissante, au fil de la complexification des intrigues. Pourtant, ne vous y trompez pas, ce n'est pas une mini-série d'action. A l'exception de quelques rares scènes de course-poursuites ou de fusillades, la plupart des moments-clés se joue entre quatre murs, dans des endroits souvent clairs-obscurs, versant dans le sombre, en diverses entrevues et autres réunions informelles. Des discussions déterminantes, parfois longues, parfois à plusieurs niveaux de compréhension, mais desquelles on ne décroche pourtant pas. Le ciselage des dialogues entretient la curiosité du téléspectateur, dont l'intérêt pour la façon dont l'intrigue globale se construit et se dénoue ne se dément jamais. La compréhension n'est pas toujours aisée, mais c'est la conséquence de la richesse du scénario, à laquelle les flashbacks pavant cette enquête méthodique contribuent. Car la fiction est à l'image de son générique, un jeu d'apparence où des poupées russes se dévoilent les unes après les autres...

La force de Tinker, Tailor, Soldier, Spy réside aussi dans le fait de réussir à jouer sur plusieurs tableaux. En effet, il s'agit, d'une part, d'une mini-série d'investigation qui trempe avec finesse, et surtout beaucoup de réalisme, dans les rouages de l'espionnage international. Mais c'est aussi une fiction teintée de nostalgie, à dimension très humaine. A travers son personnage principal, elle jette un regard désabusé sur la vie et la nature des hommes. Au-delà de son intrigue, elle traite à mots couverts des idéaux oubliés, des certitudes brisées. Vies personnelles et vies publiques s'entremêlent. La simple question "How is Ann ?" posée de façon récurrente à George Smiley n'est pas une formule de politesse pour s'enquérir de la santé de sa femme, mais une façon cruelle pour son interlocuteur de pointer ses faiblesses en tant qu'époux, les infidélités de Ann étant de notoriété publique. Finalement, cette mini-série constitue un étrange mélange des genres parfaitement équilibré, un drame humain, suscitant un suspense intense, tout en étant capable de développer des interrogations plus subtiles sur les ressorts de ce théâtre qu'il met en scène.

Les ambivalences de la mini-série se trouvent personnifiées dans le personnage de George Smiley. La performance d'Alec Guinness (que vous connaissez forcément sous les traits d'Obi-Wan Kenobi dans une célèbre trilogie fondatrice de la même époque) y est pour beaucoup. Absolument magistral, il n'incarne pas seulement Smiley : il est ce personnage toute en nuances, désenchanté et désillusionné, sur la vie en général comme sur le monde de l'espionnage, ne se départissant jamais d'un flegme tout britannique qui lui permet de conserver une certaine réserve vis-à-vis des évènements et une contenance quasiment jamais prise en défaut. Dans l'ensemble, c'est d'ailleurs tout le casting qui vaut plusieurs étoiles : Michael Jayston, Anthony Bate, George Sewell, Ian Richardson... tous délivrent des prestations très solides.

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Bilan : Tinker, Tailor, Soldier, Spy est un grand classique britannique des fictions d'espionnage. Dotée d'un scénario complexe et très dense, cette mini-série se révèle rapidement passionnante. Peu importe que les images apparaissent quelque peu datées (1979) pour notre regard de moderne, les ressorts de l'histoire sont indémodables et la force des dialogues fait toujours mouche.
C'est sans aucun doute un must-seen de la télévision britannique, et probablement la plus convaincante adaptation télévisée d'un des romans les plus aboutis de John Le Carré.


NOTE : 8,5/10


Petit bonus nostalgique, la superbe chanson de fin :


19/11/2009

(Pilote UK) Misfits : la nouvelle génération dotée de super-pouvoirs


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A priori cataloguée en "teen-drama fantastique", Misfits est une nouvelle série diffusée depuis le 12 novembre dernier, sur la chaîne britannique E4. En fait, la série met en scène de jeunes délinquants, plus vraiment adolescents, mais pas encore totalement adultes. Reste qu'elle présente surtout plusieurs particularités potentiellement intéressantes. D'une part, il y a le fait que les personnages principaux sont justement des "misfits" (échecs), puisqu'ils se retrouvent ensemble pour effectuer leur condamnation à un certain nombre d'heures de travaux d'intérêt général. Ce qui offre donc un cadre original pour le déroulement de l'action, et évite ainsi tout environnement pseudo-scolaire, case qu'ils ont déjà dépassée (exclus ou trop âgés). D'autre part, la série joue sur un double tableau, puisqu'elle verse également dans le fantastique : en effet, dans le premier épisode, nos héros récupèrent des... supers-pouvoirs. Certes, la compréhension du concept de super-héros version british, je m'en méfiais quand même un peu, le souvenir de No Heroics, encore vif d'incompréhension, flottant dans un coin de ma tête.

Mais, sans attendre a priori grand chose de cette petite série, je me suis finalement retrouvée devant un pilote assez sympathique, à l'écriture plutôt accrocheuse et au rythme dynamique, réussissant en fin de compte à me donner envie de revenir la semaine suivante, juste histoire d'observer vers quelle direction la série va s'orienter.

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Le premier épisode s'ouvre sur la rencontre de notre groupe d'apprentis délinquants avec le travailleur social qui va les encadrer au cours de leurs heures de travaux d'intérêt général. Les échanges et les piques insolentes fusent ; la série trouve rapidement ses marques auprès de ces protagonistes dissipés, dont certaines remarques prêtent aisément à sourire. Mais ce premier jour va être troublé par un violent orage assez étrange, qui voit des blocs de glace tomber sur la route et surtout nos cinq héros foudroyés. La suite de l'épisode va être l'occasion de suivre leur découverte des conséquences de cet éclair : l'apparition de pouvoirs qui se révèlent dans un contexte de remake cheap de film d'horreur. Le surveillant a en effet été, lui-aussi, frappé par la foudre, mais il se transforme en meurtrier monstrueux. Incapable de contrôler ses pulsions, il entreprend de décimer les délinquants placés sous son autorité. Quelques utilisations involontaires de pouvoir et une capacité d'initiative brouillonne mais efficace permettent à nos héros de sauver leur vie. Cependant, l'enjeu de l'épisode permet de donner rapidement une ambiance assez sombre, utilisant efficacement les clichés et les codes du film d'horreur de série B. Ainsi, la série ne se cantonne pas à une déclinaison légère de ses thèmes. Elle témoigne plutôt  d'une recherche de réalisme, où les touches plus comiques se mêlent sans distinction avec ces éléments plus brutaux.

Ayant dû tuer leur travailleur social - après que celui-ci ait massacré à la hache un sixième membre du groupe qui avait fait cavalier seul -,  nos cinq héros se retrouvent ainsi alliés par la force de circonstances. Contraints de s'unir pour inventer une version cohérente ne les impliquant pas, ils disposent des deux cadavres en les enterrant sous un pont. Effrayés et horrifiés par les facultés anormales qu'ils ont développées, ils se promettent également de garder le silence sur cet incident. En fait, seul quatre d'entre eux ont pour le moment développé un pouvoir, se considérant déjà comme des freaks : Curtis peut remonter dans le passé immédiat ; Kelly peut entendre les pensées des autres (humains et animaux) : Alisha exerce une attirance irrésistible (mais aussi un peu dangereuse) sur tout homme qu'elle touche ; et Simon peut se rendre invisible. Seul Nathan, pourtant également touché, ne révèle aucune habilité particulière, si ce n'est celle de manier un débit de paroles irréfléchies surhumain.

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Entre l'utilisation des codes bruts du teen-drama britannique moderne, retrouvant l'authenticité de séries comme Skins ou Shameless, son exploitation de thématiques de films d'horreur et enfin un soupçon de fantastique pour assaisonner le tout, Misfits se révèle être un habile mélange des genres, dans l'ensemble accrocheuse. La thématique fantastique des super-pouvoirs est exploitée avec une sobriété toute britannique, avare en effets spéciaux, refusant de tomber dans la moindre surenchère, mais n'ayant pas son pareil pour jouer sur son ambiance et ses limitations afin de s'offrir quelques scènes cheap qui s'insèrent parfaitement. Le traitement minimaliste du fantastique permet au show de conserver une désarmante normalité, à peine troublée par le bouleversement que connaissent nos jeunes héros. Il se dégage de cet ensemble une impression d'authenticité, sans la moindre prétention, qui permet de s'immerger rapidement dans la série. L'autre aspect attrayant de ce pilote réside dans ses dialogues. En effet, on retrouve dans ces vifs échanges, bruts et décomplexés, toute la spontanéité rafraîchissante des débuts de Skins. Cela sonne juste et fait mouche auprès du téléspectateur, agréablement par surpris par cette franchise non calibrée, inhabituelle dans le petit écran.

Les différents protagonistes, encore étrangers au début du pilote, sont rapidement introduits, même si on prend le temps de s'intéresser plus précisément au background de deux d'entre eux. Kelly, pour nous présenter l'éclosion de sa télépathie, premier pouvoir utile au groupe ; et Nathan, afin de nous le présenter sous un jour plus humain et friable, pour un personnage qui pourrait rapidement devenir un brin agaçant en raison de son incessant débit de paroles. Il sera toujours temps de découvrir chacun un peu plus ultérieurement. Ce qui importe pour le moment, c'est qu'ils ont tous des caractères assez trempés et des personnalités très différentes. Cela donne ainsi un étrange assemblage hétéroclyte d'anti-héros dont l'association forcée par les circonstances devrait logiquement être pimentée et mouvementée.

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Bilan : Teen-drama fantastique, maniant parfaitement les codes britanniques de ce double genre, entre dialogues incisifs et sobriété du surnaturel, Misfits est une petite série sans prétention à la spontanéité rafraîchissante. Sans autre ambition, elle remplit assez efficacement une fonction de pur divertissement. Ne recherchant pas l'originalité, elle exploite avec un réel savoir-faire son concept.
Il s'agit d'une curiosité pouvant se découvrir sans arrière-pensée. A voir ensuite quel type de storylines la série va mettre en scène.


NOTE : 7/10


Le trailer de lancement de la série sur E4 :