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28/04/2010

(K-Drama / Pilote) Prosecutor Princess : apprentissage de la vie pour héroïne pourrie-gâtée



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Dernière protagoniste de la confrontation des mercredi et jeudi soir en Corée du Sud, diffusée sur SBS depuis le 31 mars 2010, Prosecutor Princess est la série qui souffre le plus de la concurrence directe de Cinderella's Sister et de Personal Preference, peinant à dépasser les 10% de part d'audience (même si elle est en constante progression chaque semaine). Mais comme je vous l'avais confié il y a 15 jours, lorsque nous avions entamé la découverte de cette case horaire très concurrentielle en ce printemps, je suis, pour une fois, plutôt en accord avec les téléspectateurs coréens. Cinderella's Sister bénéficiait d'un début accrocheur, Personal Preference laissait entrevoir un certain potentiel, mais Prosecutor Princess démarre avec un pilote poussif, qui ne donne pas forcément envie de laisser une chance à la suite.

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Ne vous laissez pas abuser par l'intitulé de ce drama, en dépit d'une référence directe à l'univers judiciaire, le mot clé du nom anglais est incontestablement "princess", le "prosecutor" servant pour le moment avant tout de titre clinquant permettant de raccrocher l'héroïne à une parcelle de "vraie vie" dans son univers de mode déconnecté. En effet, Ma Hye Ri vient tout juste de finir son école et d'être nommée procureur. Cependant, la première chose qu'elle décide de faire, une fois la cérémonie terminée, est de s'éclipser, écourtant les formalités, pour foncer dans une station de ski où doit avoir lieu la vente aux enchères d'une ligne d'accessoires Grace Kelly, parmi lesquels elle rêve d'acheter une paire de chaussures. Si le pilote passe sans doute plus de temps qu'il est nécessaire dans cet hôtel de luxe, il ne pourrait en tout cas plus insister sur l'ordre des priorités dans l'univers de Ma Hye Ri. Obsédée de mode, frivole, la jeune femme accumule les clichés, tout en faisant preuve d'un caractère très têtu et d'une certaine ingéniosité lorsqu'il s'agit d'obtenir ce qu'elle veut.

Logiquement, le téléspectateur devine l'enjeu initiatique qui va probablement progressivement se mettre en place et sous-tendre la série. L'objectif de Prosecutor Princess sera de transformer cette héroïne pourrie-gâtée en procureur digne de sa fonction. Autant dire qu'il y a du travail. Le pilote s'attache surtut à nous présenter le personnage de Ma Hye Ri en forçant les traits. Superficielle jusqu'à l'excès, la jeune femme semble vivre dans un cocon, complètement déconnecté du monde réel. Et lorsqu'il s'agit de remplir la mission qui est attendue d'elle dans le cadre de son métier, sa conception de celui-ci se révèle également très personnelle. Tandis que la constitution lui sert à protéger son "droit fondamental" à porter des mini-jupes, elle fait prendre un tout nouveau sens au concept de "peines automatiques", ne songeant pas un instant à apprécier la situation personnelle du délinquant comparaissant devant elle et à individualiser la peine qu'elle va lui appliquer. Le contraire de l'idéal d'une justice humaine et proche des justiciables en somme.

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Pour bien souligner le caractère très atypique de Ma Hye Ri, le premier épisode de Prosecutor Princess n'est pas avare en détails présentant la jeune femme sous un jour assez peu flatteur. Même si ces excès sont mis en scène à dessein, les scénaristes coréens versant rarement dans la subtilité quand il s'agit de mettre en scène des stéréotypes aussi flagrants, le téléspectateur se crispe rapidement face à l'héroïne. C'est peu dire que les soucis rencontrés dans sa quête mouvementée à la fameuse paire de chaussures sont accueillis avec une certaine satisfaction. Et on rêve rapidement de l'évènement qui servira d'électrochoc pour lui remettre en place le sens des priorités. Il est donc très difficile de s'attacher au personnage principal, autour duquel se concentre pourtant tout le pilote. Ma Hye Ri ne s'inscrit pas dans un registre de comédie. Elle n'est pas drôle, juste exaspérante et crispante. Au final, les quelques rares passages où elle n'est pas présente sont accueillis comme des parenthèses offrant un bol d'air frais au téléspectateur. J'ai donc un peu le sentiment que les scénaristes en ont trop fait dans cette introduction.

Au-delà des personnages, parmi lesquels seule l'héroïne est proprement présentée dans cet épisode, c'est la narration-même qui serait à revoir. Le pilote traine en longueur. Même si elles posent un cadre et permettent aux différents protagonistes principaux de se croiser avec ce sens de la coïncidence dont les dramas coréens ont le secret, les mésaventures de Ma Hye Ri dans la station de ski manquent en effet foncièrement de rythme. Certes, les scénaristes distillent quelques pistes et posent les futurs twists et "toutéliés" qui règleront la suite du drama. Mais tout se déroule de façon très plate, comme si la superficialité excessive de l'univers de l'héroîne avait anesthésié l'atmosphère globale. Alors qu'on aurait pu s'attendre à des ruptures de tonalité, les accents de mélodrama restent anecdotiques (ce n'est qu'une paire de chaussures...!), et les quelques pointes de légèreté demeurent marginales (un côté comique plus assumé aurait peut-être été le bienvenu).

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Du côté du casting, il est difficile d'émettre le moindre jugement, tant ce premier épisode se focalise sur le personnage de Ma Hye Ri. Rapidement exaspérante, d'une superficialité quasi-revendicatrice, il est logique que Kim So Yeon n'hésite pas à en faire beaucoup - parfois, peut-être un peu trop, dans la lignée de l'écriture du scénario - pour incarner à l'écran cette jeune femme aux priorités bien étrangement agencées pour une juriste se destinant à une telle carrière. J'avais gardé de bons souvenirs de Kim So Yeon dans IRIS, mais pour le moment, j'avoue qu'elle joue, comme son personnage, dans un registre trop porté vers l'excès à mon goût.

A ses côtés, l'amateur de k-dramas retrouve plusieurs habitués du petit écran coréen, notamment deux figures masculines déjà bien éprouvées par leur rencontre avec Ma Hye Ri. Ca m'a fait plaisir de revoir Park Shi Hoo, que je n'avais plus recroisé depuis Iljimae. Et Han Jung Soo poursuit sa route, avec son jeu tout en réserve, après avoir incarné le Général Choi dans Chuno (Slave Hunters) en début d'année.

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Bilan : Prosecutor Princess délivre un premier épisode un peu poussif qui peine à accrocher immédiatement le téléspectateur. La maturation de l'héroïne, enjeu manifeste du drama, s'annonce comme un véritable parcours du combattant. Présentée avec beaucoup d'insistance comme un personnage pourri-gâté, la jeune femme crispe le téléspectateur, plus qu'elle ne lui permet de s'attacher à la série. Manquant de rythme, le pilote pose de façon un peu maladroite et guère subtile les bases futures de l'histoire. Après cette première heure servant surtout d'exposition, il est possible que Prosecutor Princess devienne plus attractif lorsque le drama rentrera véritablement dans le coeur de son sujet ; mais il est probable que la téléspectatrice que je suis ne fera pas preuve de la patience nécessaire pour découvrir la suite.


NOTE : 4/10


La chanson principale de la série, agrémentée d'images issues des premiers épisodes :

 

Le générique de la série:


07/04/2010

(K-Drama / Pilote) Oh! My Lady : la plongée d'une ahjumma dans le showbizz


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Cette première note inaugurant le "mercredi asiatique" offre l'occasion de poursuivre la découverte des dernières nouveautés sud-coréennes. J'avoue que pour le moment, je n'ai toujours pas croisé de séries printanières me donnant envie de m'investir dedans. Certes, vous me direz, ce n'est pas forcément une mauvaise chose : que je finisse déjà toutes les séries de janvier ! Même si je pense que je garderai une place parmi les pilotes, au cours des prochaines semaines, pour vous parler de Personal Taste et de Cinderella's Sister, deux dramas qui figurent sur ma liste de tests à venir, il sera aussi bientôt temps d'attaquer les bilans d'ensemble des Chuno et autres The Woman Who Still Wants To Marry (ainsi que des séries plus anciennes pour lesquelles j'arrive au bout comme City Hall).

En attendant de trouver un peu de place et d'énergie pour tous ces projets, la review du jour sera relativement modeste, à l'image de la nouveauté découverte : Oh! My Lady. Cette comédie romantique a débuté depuis le 22 mars 2010 sur la chaîne SBS.

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Oh! My Lady s'inscrit dans le schéma très classique de nombre de séries sud-coréennes, avec l'utilisation de la thématique de la rencontre entre deux personnes de milieux très différents. En l'occurrence, le clash ici mis en scène est celui des préoccupations d'une ahjumma sans emploi stable avec le monde des paillettes artificielles du showbizz.

Yoon Gae Hwa, une jeune mère divorcée, parvient difficilement à joindre les deux bouts, cumulant les petits jobs à la manière d'une intérimaire. Au cours du premier épisode, se faisant expulser de leur appartement, elle se voit d'ailleurs contrainte de confier sa fille au père de celle-ci. A l'opposé, Sung Min Woo est un jeune acteur/top-model qui est au sommet de sa popularité. Sans autre réel talent qu'une gueule d'ange et des pectoraux qu'il est prompt à exhiber, il fait le désespoir des réalisateurs de dramas dans lesquels il joue (ou du moins, "essaye" devant la caméra), mais le bonheur des hordes de midinettes fanatiques qui le suivent. Doté d'un mauvais caractère, arrogant mais aussi pas forcément très débrouillard, il va rencontrer l'héroïne lorsque celle-ci est engagée comme femme de ménage dans son bel appartement de luxe.

Si le premier contact entre les deux jeunes gens, ayant chacun leurs soucis et un tempérament un brin emporté, se passe évidemment de façon la plus explosive (et futile) qui soit, ce n'est que le début d'un enchaînement de circonstances qui ne va pas cesser de les faire se croiser. Yoon Gae Hwa va être engagée par une agence qui veut monter une production musicale avec Sung Min Woo à l'affiche, afin d'attirer les sponsors pour financer le projet. Dans le même temps, la vie égoïste de l'acteur va être bouleversée par l'arrivée d'une petite fille, dont il n'a jamais entendu parler, mais qui est présentée dans la note qui l'accompagne comme sa fille.

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Oh! My Lady opte rapidement pour un traitement très léger de ses intrigues, avec un recours important aux codes scénaristiques du soap. Les relations entre les personnages se situent au coeur de la série, les histoires apparaissant souvent plus comme un prétexte pour leur offrir l'occasion d'intéragir et de s'opposer. Les deux premiers épisodes jouent sur un registre très excessif, où la comédie tente d'imposer ses droits avec plus ou moins de succès. Il faut avouer que l'originalité n'est pas le maître mot des scénaristes qui restent prudemment sur un sentier trop balisé et se contentent de recourir à des comiques de situation ou à des pseudos gags tellement de fois déjà mis en scène par le passé, qu'ils prêtent difficilement à sourire. Ajoutons à cela un manque de subtilité et un art pour souligner l'évidence qui alourdit un peu l'ensemble ; et vous comprendrez pourquoi Oh! My Lady m'a laissé un peu de glace.

Pourtant, il serait injuste de dire que la série n'est pas plaisante à suivre à certains niveaux. Cela est du en grande partie à la fraîcheur et à l'énergie qui transcende son héroïne, juste parfaite pour trouver le savant mélange entre un caractère appliqué et droit, et ce petit soupçon de désespoir face à sa situation financière qui révèle une personnalité plus décidée et moins naïve que l'image qu'elle renvoie a priori. C'est de cette petite dualité piquante, qui se développe au fil des deux premiers épisodes et qui se couple au capital sympathie dont le personnage bénéficie rapidement auprès du téléspectateur, que peut venir le salut d'un drama qui reste trop timorée pour s'imposer véritablement dans ce registre de la comédie.

En dépit d'un visionnage pas déplaisant, il manque donc à Oh! My Lady un brin de folie, une réelle spontanéité dans l'écriture, qui aurait permis d'éviter l'écueil d'une narration trop plate pour être vraiment accrocheuse.

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Cette même impression de superficialité un peu vaine se retrouve également dans la forme. La bande-son avec ses musiques pseudo-entraînantes, censées souligner le côté clinquant de l'histoire, ne marque pas, révélant surtout une futilité oubliable. La réalisation se révèle aussi des plus classiques, sans la moindre prise de risque.

Enfin, du côté du casting, les acteurs semblent avoir pleinement intégrés leurs personnages, en bons comme en mauvais côtés. Si cela est sans doute en partie lié à l'écriture-même des individus qu'ils doivent interpréter, je pense que leurs prestations n'est pas étrangère non plus à l'image que renvoient les différents protagonistes. Ainsi, Chae Rim (Dal Ja's Spring) se révèle profondément attachante, parvenant à alterner les différentes attitudes avec beaucoup de spontanéité, tour à tour déterminée, effacée ou bien espiègle, elle insuffle une vie et un dynamisme à son personnage qui rend Yoon Gae Hwa très sympathique. J'oserai dire qu'elle supporte plus ou moins l'ensemble du drama sur ses épaules. A l'opposé, le jeu de Choi Si Won (croisé dans Spring Waltz) semble se réduire à une sorte de reflet des propres faiblesses de Sung Min Woo : une gueule d'ange, mais des expressions assez monolithiques qui ne laissent au personnage qu'un seul registre d'expression et lassent assez vite le téléspectateur. L'alchimie ne prend pas instantanément entre ce duo principal ; peut-être faut-il leur laisser plus de temps.

Mais pour le moment, cela donne un côté assez déséquilibré à l'ensemble, avec l'impression d'être devant une série un peu trop à sens unique en l'honneur d'un seul personnage qui tire vraiment son épingle du jeu. D'autant qu'au bout de seulement deux épisodes, les autres membres du casting n'ont pas encore eu trop le temps de s'installer, à l'image de Lee Hyun Woo (Dal Ja's Spring), le producteur qui souhaite engager Sung Min Woo pour une oeuvre musicale, et qui reste en retrait, un peu figé dans les décors.

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Bilan : Les débuts de Oh! My Lady ne sont pas déplaisants à suivre : plutôt rythmés, concentrant rapidement un petit capital sympathie intéressant, l'histoire s'installe sans perdre de temps. Seulement le drama ne propose rien de neuf : les ficelles scénaristiques utilisées, tellement usées, n'encouragent pas le téléspectateur à s'investir dans une série pourtant ni mal écrite, ni mal jouée (grâce à l'héroïne), mais qui, simplement, n'a aucune autre ambition que d'offrir une énième déclinaison de la comédie romantique sud-coréenne. Ce n'est pas mauvais, ni désagréable à suivre, même si cela manque singulièrement d'un brin de folie et de spontanéité qui auraient permis à la série d'exploiter pleinement sa volonté de faire dans le comique.

Un peu trop plate mais plutôt sympathique, elle reste cependant sans réelle ambition : voilà donc résumée mon impression des deux premiers épisodes de Oh! My Lady. Ce n'est sans doute pas suffisant pour que je poursuive plus loin ma découverte.


NOTE : 4,75/10


Une bande-annonce de la série :


31/01/2010

(K-Drama / Pilote) JeJoongWon : médecine, tradition et modernité dans une fin de XIXe siècle troublée


En ce dimanche consacré à mes explorations dans les contrées téléphagiques asiatiques, je vais vous parler d'une série qui constitue pour moi, de par l'originalité et le traitement de son sujet, une des très agréables surprises de cette rentrée hivernale : JeJoongWon. Diffusée depuis le 4 janvier 2010 sur SBS (Corée du Sud), elle devrait a priori compter 36 épisodes.

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A priori présenté comme un drama historique, JeJoongWon se révèle être bien plus que cela, mêlant médical et Histoire, en nous plongeant au coeur d'une période de profond bouleversement, celle de la fin du XIXe siècle. "JeJoongWon" renvoie au nom du premier hôpital moderne qui fut établi en Corée, par un missionnaire américain, en avril 1885. Il introduisit au pays du matin calme, la médecine occidentale ainsi que de nouvelles disciplines, telle la chirurgie, dans une société où les classes populaires avaient encore recours aux traditionnels shamans et aux exorcistes pour guérir certains malades. L'hôpital initia la formation d'une poignée de jeunes Coréens aux sciences médicales à partir de 1886.

Débutant en 1884, c'est la vie de plusieurs personnages qui vont fréquenter cet établissement que ce drama se propose de suivre. Ces différents protagonistes, provenant de milieux très divers, ont pour point commun de souhaiter apprendre les techniques occidentales de guérison. Parmi eux, figure Hwang Jung (Park Yong Woo) : issu d'un milieu pauvre,  fils d'un boucher, la maladie de sa mère va le conduire à s'intéresser à ce pan encore inconnu des sciences étrangères. A l'opposé, Baek Do Yang (Yeon Jung Hoon), de naissance noble, sera prêt à sacrifier son statut pour pouvoir apprendre cette nouvelle discipline. Tandis que la figure centrale féminine, Yoo Seok Ran (Han Hye Jin), a, elle, été élevée au contact de la culture occidentale par le biais de son père.

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Ce qui marque immédiatement dans ce premier épisode d'exposition, ce n'est pas tant les brefs aperçus de techniques de médecine "moderne" -offrant un double décalage historique et culturel au téléspectateur- que la confrontation sous-jacente et exacerbée entre tradition et modernité ; c'est l'éternel débat entre Anciens et Modernes. Cette thématique s'impose rapidement comme centrale, les histoires personnelles s'imbriquant en fait dans la dualité mise en scène, servant tant à expliquer qu'à souligner cette opposition. Car l'aspect médical prédominant du drama n'occulte pas le contexte particulièrement troublé de cette époque. Au contraire.

Le début de la série prend judicieusement le temps de bien exposer la situation ; de façon à ce que le téléspectateur comprenne quels sont les enjeux véritables posés par cette question, simple seulement en apparence, de la réception de la médecine moderne occidentale. En effet, sur fond de fortes tensions sociales et politiques, l'histoire se déroule dans les dernières années, difficiles, de la Corée du Choson (Joseon), alors écartelée par de profonds chocs culturels, entre le respect de ses traditions et la modernité des nouveaux modes de vie introduits par les étrangers. Le pays se fracture entre conservateurs, partisans d'une ligne dure intransigeante, et les tenants d'une certaine modernité qui délaissent peu à peu les anciens cloisonnements historiques de la société coréenne. De plus, à ces problèmes internes, s'ajoutent les luttes d'influences que se livrent, sur place, les puissances étrangères, à commencer par les pressions d"un Japon impérial de plus en plus pressant.

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Pour illustrer et humaniser ces bouleversements profonds, la série choisit de s'intéresser au destin de plusieurs personnages, dont la diversité des origines permet de souligner les changements en cours. Le pilote prend le temps d'exposer la situation de départ de chacun d'entre eux, permettant au téléspectateur de s'attacher rapidement aux trois figures principales.

La fascination de Hwang Jung pour la médecine s'explique par la maladie minant peu à peu sa mère. D'origine très modeste, fils de boucher dans une société où chacune des corporations professionnelles est encore régie de façon très stricte, il se retrouve coincé entre le poids des traditions et des codes que son père souhaite le voir perpétuer et la conscience de l'existence de nouvelles conceptions, apportant tant des techniques de guérison révolutionnaires qu'une vision très différente du monde qui l'entoure. Ces idées, sapant l'ordre établi, irriguent de plus en plus le pays, en dépit des mesures gouvernementales pour empêcher leur diffusion.

L'épisode regorge de nombreux parallèles symboliques permettant de souligner ces tensions. Au-delà des vêtements portés, entre costumes traditionnels et habits occidentaux, il propose également un contraste particulièrement marquant entre la mise à mort de la vache, ritualisée et empreinte d'une certaine forme de sacralité, par la corporation des bouchers et le banquet noble, tenu à la "mode occidentale", où des étrangers sont invités. Si Hwang Jun se démène pour fournir des médicaments à sa mère -son père faisant, lui, venir un shaman-, l'argent devient rapidement un obstacle insurmontable pour qui souhaite se voir prodiguer des soins modernes. En témoigne son passage dans l'hôpital japonais. Cela conduit le jeune homme sur des sentiers dangereux...

A l'opposé, Baek Do Yang est un jeune noble, fils d'un important dignitaire du régime. Il nourrit une véritable passion pour la science occidentale, n'hésitant pas à se procurer, pour les étudier, des livres d'anatomie humaine interdits. Un intérêt allant ouvertement à l'encontre de la volonté politique du gouvernement et pouvant apporter bien des ennuis, auxquels il échappe pour le moment en utilisant son rang et le nom de son père. Doté d'une soif d'apprendre jamais rassasiée, qui l'amène toujours plus loin dans ses explorations, sa situation d'équilibriste ne pourra probablement pas perdurer très longtemps...

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Le casting apparaît solide. J'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir Han Hye Jin, l'incontournable Sohsuhno de Jumong, en figure féminine centrale autour de laquelle s'esquisse déjà un triangle amoureux inévitable. Le personnage principal, Hwang Jung, fils de boucher initialement enfermé sous le poids de la rigidité sociale, est joué par Park Yong Woo (Terms of Endearment). Enfin, Yun Jung Hoom (East of Eden) incarne Baek Do Yang, un jeune noble, prêt à rompre avec les traditions de son statut, pour se consacrer à l'apprentissage de la médecine occidentale. Pour le moment, qu'il s'agisse du casting principal ou des acteurs secondaires, parmi lesquels on croise plusieurs têtes familières, telles Won Ki Joon (le prince Young Po dans Jumong), tous apparaissent convaincants.

Sur la forme, JeJoongWon se présente comme une série très classique. La reconstitution historique est soignée, tant concernant les décors que les costumes, servie par une réalisation appliquée. De ce point de vue-là, le drama n'offre pas d'innovation particulière, s'inscrivant dans la lignée des séries de ce genre. La bande-son ne m'a, pour le moment, pas marqué. A la différence, par exemple, de l'autre drama historique du moment, Chuno (Slave Hunters), JeJoongWon apparaît avant tout privilégier le fond ; ce qui est tout autant appréciable, si la solidité du scénario, entrevue dans ce premier épisode, se confirme par la suite.

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Bilan : Drama médical historique, JeJoongWoo mélange de façon originale et très intéressante les genres. Il nous offre une plongée dans une période troublée de la Corée, une époque de transition où la société est alors traversée par de violentes tensions et oppositions entre tradition et modernité. Cette thématique générale va servir de toile de fond à une série évoquant la médecine du XIXe siècle, en suivant l'apprentissage de plusieurs protagonistes au parcours très différent. Captant aisément l'attention du téléspectateur curieux, le pilote de JeJoongWoo pose efficacement les bases d'une fiction originale, intrigante et instructive à suivre.


NOTE : 7,5/10


La bande-annonce :

17/01/2010

(K-Drama) Bicheonmu (BiChunMoo / Fei Tian Wu) : des destinées tragiques en quête d'un art martial unique



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Un peu d'ouverture supplémentaire en ce dimanche asiatique, puisque le drama dont je vais vous parler aujourd'hui est une coproduction sino-coréenne, nous ouvrant donc à la Chine. Même si je dois vous prévenir que ce n'est pas un pays que vous retrouverez régulièrement dans ces colonnes, notamment en raison du fait que j'ai un peu de difficultés à me faire à la langue (cantonnais ? mandarin ? Je ne sais pas, mes compétences linguistiques en la matière sont proches du néant) -à la différence du japonais ou coréen- et que la longueur  de leurs dramas historiques (qui sont ceux qui m'intéressent le plus a priori) les rend assez imposant. Je n'en ai d'ailleurs vu qu'un seul jusqu'à présent, qui soit un pur c-drama (non une co-production) : il s'agissait d'une des versions du grand classique The Legend of the Condor Heroes, celle de 2003, je pense. De plus, en grande fresque historique, actuellement, je me suis promis de parvenir au bout de Jumong et de ses 81 épisodes (je vous annonce fièrement que j'approche la moitié -je crois que j'en ferais un bilan de mi-série, ou je risque d'oublier les 20 premiers épisodes d'ici que j'arrive à la fin). Une chose à la fois, donc, même si c'est un univers inexploré qu'il faudra que je prenne le temps de découvrir un jour. (D'autant qu'après, il faudra que j'enchaîne sur The Kingdom of the Wind.)

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Pour en revenir au drama qui fait l'objet de la note du jour, il va sans doute marquer une nouvelle étape dans mes découvertes en provenance de ce continent. Oh, il fallait bien que cela arrive un jour. Les dramas historiques sont rarement joyeux, se rapprochant plus d'une succession de tragédies placées sous le signe du destin. Vous savez aussi que j'ai la larme facile. Reste que, après trois ans de découvertes de séries asiatiques, si j'en ai vu des fins tragiques, si j'ai parfois eu les yeux humides, j'étais toujours restée stoïque devant mon petit écran. Jusqu'à Bicheonmu. Où toutes mes belles résolutions ont volé en éclat, tandis qu'une pyramide de mouchoirs se constituait progressivement sur la table basse de mon salon : j'étais déjà en larmes devant l'avant-dernier épisode...

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Bicheonmu fut diffusé en 2006 en Chine, et seulement en 2008 en Corée du Sud, suite à des problèmes de droits d'auteur. Les deux versions seraient différentes, mais je n'ai vu que celle coréenne. Adaptation d'un manhwa éponyme de Kim Hye Rin, cette histoire avait déjà fait l'objet d'un film, sorti en 2001 et disponible en DVD en France (sous le titre Bichunmoo). Contrairement à d'autres fresques historiques dont la longueur peut faire hésiter, il s'agit d'un drama relativement court pour les standards coréens, puisqu'il ne comporte que 14 épisodes (d'1 heure environ chacun).

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L'histoire est la suivante... Suite à l'assassinat, le jour de sa naissance, de ses parents dont il ignore tout, Jin-Ha a été élevé par un serviteur de son père qui s'est présenté comme son oncle. Il l'a initié aux techniques du BiChun, un art martial ancien et secret que l'on ne peut apprendre que grâce à un manuel unique, que son père a laissé en héritage à Jin-Ha, et dont la puissance attire toutes les convoitises. Coréens exilés du royaume de Goryeo, conquis par l'Empereur Mongol, les deux hommes ont vécu retiré dans la montagne chinoise, déménageant souvent. Jin-Ha croise un jour la belle Sul-Ri. Les deux jeunes gens tombent éperdument amoureux, tandis qu'ils se lient également d'amitié avec un héritier noble de passage, Namgong Jun Kwang. Mais Sul-Ri, fille d'une concubine d'un puissant général mongol, Tarooga, doit suivre son père, lorsqu'il rend une dernière visite à sa mère.

L'enchaînement tragique des évènements commence alors. Ayant passé trop de temps au même endroit, des hommes, qui n'ont jamais cessé de rechercher le précieux manuel d'art martial, surgissent et tuent l'oncle de Jin-Ha. Ce dernier, découvrant peu à peu ses origines, sent son désir de vengeance s'affirmer. D'autant que Namgong Jun Kwang, aveuglé par son amour inconditionnel sur Sul-Ri, profite de l'absence de Jin-Ha pour faire pression sur la jeune femme afin qu'elle l'épouse. Leurs parents s'étaient déjà combattus pour le manuel du BiChun ; le général Tarooga ayant décoché la flèche fatale au père de Jin-Ha, sur ordre du père de Namgong Jun Kwan. Les enfants vont devenir les dépositaires de haines qui ne vont que grandir, tandis que l'amour qui unit Jin-Ha à Sul-Ri ne va, lui, jamais flétrir. Autour d'eux, l'Empire Mongol de la dynastie Yuan se désagrège peu à peu, plongeant le pays dans l'anarchie, bouleversant un peu plus leur univers.

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Comme souvent dans les dramas historiques, la multiplicité des clans (et des peuples représenté ici : coréens, chinois et mongols), les alliances fluctuantes et les noms composés qu'un occidental ne retient pas forcément du premier coup, font que la complexité de la géopolitique mise en scène nous échappe parfois dans les premiers épisodes. Parce que, même s'il y a des indications pour situer chaque personnage, vous êtes peut-être aussi familier que moi avec l'histoire de la Chine (c'est-à-dire, je l'avoue, avec des connaissances proches du néant).

Comme cela m'a tracassé et amené à faire des recherches, autant les partager avec vous. Voici donc le cadre historique de ce drama : Bicheonmu se déroule au XIVe siècle, à la fin de la période de la dynastie mongole des Yuan. Le territoire chinois est alors sous la domination d'un peuple étranger, les Mongols, suite aux conquêtes initiées, un siècle et demi plus tôt, par Gengis Kahn, dont le petit-fils fut le premier empereur de la dynastie Yuan. Secoué de soubressauts et d'affrontements claniques internes, c'est un empire qui sert de champ de batailles, dans le cadre duquel se déroule ce drama. Le héros, Jin-Ha, est, lui, coréen. Son père, dignitaire militaire proche du roi coréen vaincu, était venu en Chine en tant qu'otage. Car, en effet, le royaume de Goryeo (équivalent à la Corée) a été conquis par les Mongols, par le biais de plusieurs invasions successives. Le père de Jin-Ha fut tué par des dignitaires mongols, qui souhaitaient s'approprier le fameux manuel du BiChun. Finalement, Jin-Ha finira par soutenir une famille chinoise, dont la bataille finale du drama va asseoir l'autorité. Cette dernière fera abdiquer la dynastie mongole déclinante et fondera ainsi une nouvelle dynastie : celle des Ming.

Si le drama n'est qu'une reconstitution romancée de l'Histoire, voici à peu près le cadre global à avoir en tête pour bien comprendre les enjeux qui sont posés dans la série.

*C'était la parenthèse culturelle de ce blog (qui a dit que la télévision ne permettait pas de se cultiver ?).*

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C'est donc avec, en toile de fond, cette agitation politique et militaire, que Bicheonmu va prendre toute sa dimension. Il s'agit d'un splendide et puissant drama historique, aux ressorts scénaristiques très classiques mais efficacement mis en scène. La durée relativement courte de la série permet d'éviter toute baisse de rythme : ainsi, l'intensité ne cesse de croître au fil des épisodes, captant le téléspectateur dans le souffle épique et tragique des destins qui se jouent sous ses yeux. En effet, bien plus qu'une simple série traitant de complots et de jeux de pouvoirs dans un cadre médiéval, ce qui frappe, lors de la découverte de cette fiction, c'est la force qui émane de ce récit.

Car Bicheonmu s'inscrit dans la tradition la plus pure de ces tragédies antiques, où les destinées paraissent, dès le départ, déjà écrites dans le sang. Pèse, sur les protagonistes, le poids amer d'une prédestination à laquelle ils ne peuvent échapper. Le téléspectateur assiste, à la fois impuissant et fasciné, à la naissance de sentiments, qui vont poser les germes des trahisons futures, et aux prises de décisions les plus irréversibles, scellant ainsi des désirs de vengeance insubmersibles qui les conduiront à leur perte. Les différents personnages se retrouvent happés, sans toujours en prendre conscience, par ce tourbillon du destin, au sein duquel ils se débattent, mais qu'ils vont toujours finir par accompagner et nourrir.

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Les thèmatiques abordées n'innovent en rien le genre, mais elles sont exposées de façon telle que l'on ne peut être que submergé par cette histoire poignante, sans aucune arrière-pensée. Tous les ingrédients d'une grande épopée tragique sont présents : des triangles amoureux, où les sentiments croisés ne sont pas réciproques, un peuple exilé et opprimé qui aspire à la liberté, un Empire en décrépitude où le pouvoir est en jeu entre les différentes factions qui s'affrontent et un art martial puissant au coeur de toutes les convoitises. Au milieu de tout cela, seule certitude immuable, l'amour, devenu impossible, qui unit Sul-Ri à Jin-Ha, en dépit des distances et des circonstances. Mêlant superbement sentiments et actions, se rapprochant par ce biais de la tradition des films Wu Xia Pian, la force de ce drama réside dans les émotions qu'il sait faire naître, tant auprès du téléspectateur que chez ses personnages.

Si ces derniers paraissent tous enfermés dans une prédestination tragique, dont ils ne peuvent se défaire, héritant de haines mortelles et de rivalités, gravées bien avant leur naissance, ils ne sont pour autant jamais unidimensionnels et vont tous progressivement évoluer au fil du drama. Emportés par leurs choix, le téléspectateur devine le moment où ils dépassent le point de non-retour, scellant définitivement le sort tragique qui les attend. Cette conscience accroît l'impression que tous se mouvent vers une destinée dont ils ne sont pas maîtres, sorte de fatalité chargée d'amertume, à laquelle, en tant qu'observateur extérieur, il est très difficile de rester insensible.

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Pour faire vivre cette histoire, le casting, bi-national comme le drama, se révèle globalement solide. Jin-Ha est interprété de façon assez convaincante par Joo Jin Mo (Dream), lequel parvenant efficacement à traduire l'évolution du personnage, de l'insouciance teintée de naïveté des débuts, jusqu'à la mélancolie douloureuse du chef de guerre endurci par les épreuves que la vie lui a réservées. Park Ji Yoon, même si elle est parfois un peu trop stoïque, incarne avec une grâce certaine l'amour de sa vie, la belle Sul-Ri. Dans le casting principal, le seul acteur avec lequel j'ai eu quelques difficultés est Wang Ya Nan, qui joue Namgong Jun Kwang, l'ancien ami de Jin-Ha qui le trahira pour obliger Sul-Ri à l'épouser. Sa performance ne m'a pas convaincu, trop statique, ses émotions donnaient l'impression d'être vraiment forcées lorsqu'il essayait de les exprimer. Enfin, du côté, des personnages plus secondaires, il faut saluer la présence de Niu Li, en jeune femme noble qui tombera fatalement amoureuse de Jin-Ha, et de son serviteur, dont la fidélité fluctuera, Shi Jun, interprété par Kim Kang Woo (qui jouait Chae Do Woo, dans Story of a Man / The Slingshot).

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Cependant, plus que l'histoire, efficace mais somme toute classique, plus que le casting, ce qui fait la réelle particularité et la force de Bicheonmu, y puisant son essence plus qu'aucun autre drama historique que j'ai eu l'occasion de voir, c'est l'ambiance que la série parvient à créer. Elle est en effet servie par une bande-son absolument magnifique, composées de petites mélodies récurrentes et, surtout, de très belles chansons, à la tonalité chargée de regrets non formulés, qui transportent le téléspectateur et le touchent en plein coeur à chaque fois qu'elles retentissent. J'ai eu des frissons, au cours de certains épisodes, en entendant ces superbes thèmes se superposer si justement aux scènes qu'ils soulignaient. Je pense d'ailleurs qu'une bonne partie de l'intensité émotionnelle générée par ce drama l'est grâce au soutien très bien inspiré de ces musiques. Le travail qui a été fait mérite vraiment d'être salué.

Par ailleurs, toujours sur un plan formel, ce drama bénéficie d'une réalisation travaillée et assez soignée, des beaux décors dans lesquels se déroule l'action jusque dans les chorégraphies des combats (car Bicheonmu est aussi une série d'art martial très efficacement mise en scène). Les images filmées sont parfois vraiment belles ; et les couleurs, presque un peu poussiéreuses en ce sens qu'elles sont moins chatoyantes que dans d'autres k-dramas historiques, confèrent une forme de légitimité supplémentaire, une impression presque légendaire, au récit.

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Bilan : Bicheonmu est une magnifique fresque épique, où les nécessités des luttes de pouvoir autour de la maîtrise d'un art martial supérieur, le Bi Chun, se mêlent à l'intensité des sentiments amoureux qui vont unir et désunir chaque camp. Bien loin d'être un simple drama d'intrigues de cour, il se déroule dans une Chine en proie à la guerre civile, avec en toile de fond la situation confuse et anarchique de la fin de la période de la dynastie Yuan. Mêlant épopée vengeresse, amours impossibles et destins de peuples entiers, l'intensité des émotions sur laquelle ce drama capitalise en fait une oeuvre à part, à mon sens incontournable et indispensable.


NOTE : 7,5/10


Un des aspects les plus marquants de ce drama réside dans sa bande-son. Voici deux morceaux de son OST qui ne peuvent vous laisser indifférents.

BiChunMoo, OST, 2. Nocturne (Park Ji Yoon) (Avec des images de la série) :


BiChunMoo, OST, 9. In a World without You (Han Ul) :


10/01/2010

(K-Drama) You're Beautiful : A.N.JELL dans le monde des Idols


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Si vous fréquentez un tant soit peu les communautés internautes appréciant les séries coréennes, vous n'avez sans doute pas pu échapper au cours des derniers mois au "raz-de-marée" You're Beautiful. En dépit d'audiences un peu décevantes (mais le drama était en confrontation directe avec la "série-blockbuster" IRIS de KBS), la popularité de You're Beautiful a en revanche dépassé toutes les attentes sur internet. Le dernier drama des soeurs Hong (les prolifiques scénaristes de My Girl, Fantasy Couple, Hong Gil Dong...), diffusé au cours de l'automne 2009, devenant ainsi un petit phénomène.

J'avoue avoir été initialement assez réticente à me lancer dans You're Beautiful, en dépit (ou à cause -je suis dotée d'un esprit de contradiction tenace) du buzz énorme entourant la série. De plus, les reviews lues la comparaient aux Boys Before Flowers du début d'année 2009 (adaptation coréenne de la célèbre série japonaise, Hana Yori Dango) ; ce qui ne constitue a priori pas du tout le style de drama qui m'attire et, surtout, que je recherche. Mais le prosélytisme insistant de certains, combiné à son casting (je venais de finir Beethoven Virus), a vaincu mes dernières résistances. N'ayant pas regretté l'expérience, cela me permet donc d'y consacrer le dimanche asiatique de la semaine !

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You're Beautiful nous plonge dans l'univers de l'entertainment coréen, et plus précisément celui des Idols, au sein d'un des groupes les plus célèbres du pays : A.N.JELL. S'ils s'apprêtent à sortir leur sixième album, leur responsable décide qu'ils ont besoin d'un deuxième chanteur, de façon à soulager un peu leur chanteur principal, qui est aussi le leader du groupe, Hwang Tae Kyung. Pour cela, après des sélections, un certain Go Mi Nam est choisi. Mais suite à une opération de chirurgie esthétique qui nécessite une correction, Go Mi Nam ne peut se présenter au siège du groupe pour signer son contrat. Son manager se tourne alors vers sa soeur jumelle, Go Mi Nyu, jeune fille qui n'est jamais allée au-delà du couvent, faisant office d'orphelinat, où elle a grandi, et qui s'apprête à devenir religieuse. Go Mi Nyu accepte, avec beaucoup de réticence, de prendre très provisoirement la place de son frère, afin d'éviter que ce dernier ne rate ce qui pourrait être la chance de sa vie.

Mais Mi Nyu va devoir progressivement s'impliquer de plus en plus dans la vie des A.N.JELL. Ce qui ne devait être à l'origine qu'une substitution pour une signature officielle, la conduit finalement à partager la maison des membres du groupe, à faire des conférences de presse officielles, puis même à réaliser une performance dans un premier concert et à enregistrer un album. En plus de ce difficile ajustement à une nouvelle vie dans un milieu qui lui était étranger, la tâche de Mi Nyu va se trouver compliquée par la méfiance de ses camarades. Cette première impression va d'ailleurs se changer, chez Tae Kyung, en une profonde hostilité, les maladresses de la jeune femme ne cessant de la mettre en porte-à-faux, voire en confrontation directe, par rapport au leader des A.N.JELL.

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Au-delà de ce concept, somme toute guère novateur, You're Beautiful va surtout se démarquer par son traitement de ces diverses situations. Elle va pratiquer, voire même abuser d'une mise en scène par l'absurde, jouant avec excès sur un registre burlesque, peu crédible, mais très divertissant, qui lui permet d'exploiter pleinement son potentiel comique... Une fois bien empreinte d'une légèreté contagieuse, pleine de bonne humeur, la série peut ensuite se tourner vers d'autres dynamiques plus émotionnelles. Car, derrière la comédie romantique, comme toute série coréenne qui se respecte, se cachent des histoires de famille, des amours impossibles et/ou condamnés et le complexe héritage de sentiments contradictoires que les enfants héritent de leur passé. You're Beautiful adopte un ton adéquat, empli d'une autodérision salvatrice et bienvenue, pour évoquer toutes ses complications. La série ne se prend jamais au sérieux, tout en parvenant parfois à miser de façon juste, sur quelques scènes où l'émotion va primer.

En somme, elle trouve un équilibre approprié, tout en conservant une certaine distance avec ses personnages et les situations qu'elle crée. La preuve la plus flagrante que la série ne recherche pas le réalisme, et encore moins le premier degré, se trouve probablement dans la transformation même de Go Mi Nyu. La jeune femme fait un garçon guère crédible, avouons-le, avec des traits physiques féminins qui restent bien trop marqués pour que l'on puisse croire que le changement abuse ceux qui l'entourent (qui, certes, la découvrent dans l'ensemble assez rapidement).

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Si les histoires sont divertissantes, l'aspect indéniablement très attachant de ce drama tient beaucoup à ses personnages. Certes, chacun incarne un stéréotype, offrant en fin de compte peu de surprises. Mais ils sont toujours présentés sous un jour très supportable, si bien que, même à travers les oppositions qui naissent, le téléspectateur n'ait jamais amené à prendre partie pour l'un ou l'autre, suivant simplement avec plaisir ces éclats d'humeur.

La distribution des rôles m'a un peu rappelé les dynamiques d'un classique comme Hana Yori Dango, ou son adaptation coréenne de début 2009, Boys Before Flowers. Leur diversité est une source constante de décalages et de clashs, génératrice d'un comique burlesque, souvent excessif, mais qui prête régulièrement à sourire (voire à éclater de rire). Go Mi Nam est une jeune femme qui ne connaît encore rien de la vie,  un brin fleur bleue, plutôt innocente, elle dispose d'un talent hors du commun pour faire exactement ce qu'il ne fallait pas, et bouleverser ainsi la vie du groupe. Pleine de bonne volonté, avenante, mais d'une maladresse qui confine au tragi-comique, elle s'attire rapidement les foudres du leader, Hwang Tae Kyung. Ce dernier incarne plus ou moins son opposé. D'un abord très abrasif, avec un caractère colérique, il ne supporte pas que le contrôle d'une situation lui échappe. D'un naturel autoritaire, il se révèle aussi très maniaque et perfectionniste. S'emportant régulièrement contre Go Mi Nam, il sera cependant le premier du groupe à lui révéler qu'il connaît son secret, qu'en dépit de ses vives objections initiales, il va par la suite protéger. L'apparent bad boy qui cache, derrière cette allure, un grand coeur et des blessures personnelles anciennes, voici un classique jamais démodé, toujours efficace.

Les deux autres membres du groupe s'inscrivent dans ce même schéma global. Kang Shin Woo symbolise en quelque sorte le compagnon idéal, toujours compréhensif et d'un calme à toute épreuve. Il va constituer un allié de l'ombre pour Go Mi Nam, ayant rapidement découvert, lui aussi, qui elle est, mais restant effacé et préférant nouer une relation plus subtile avec la jeune femme. Sans doute trop subtile pour elle, avec sa capacité unique à être aveugle aux évidences. Le dernier membre du groupe, Jeremy est probablement le plus immature, mais aussi le plus spontané. Tout d'abord peu diplomate, il va s'imposer rapidement comme un ami simple et joyeux, qui saura aussi être particulièrement touchant en quelques occasions.

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Ce mélange, désordonné en apparence, mais en réalité savamment dosé, entre burlesque absurde et émotions touchantes est une constante de la série. Car You're Beautiful est avant tout une comédie romantique. Go Mi Nyu, sous les traits de Go Mi Nam, ne va pas laisser indifférente ses compagnons, rapidement très confus devant ce nouveau venu, qui enchaîne les gaffes les plus incroyables et dont l'attitude et les réactions paraissent parfois entourées d'un étrange mystère. De son côté, restera-t-elle ancrée dans sa conviction initiale qu'elle doit devenir religieuse, ou verra-t-elle la vie différemment une fois ce passage dans les coulisses des Idols effectué ?

Chaque personnage va mûrir et évoluer au fil de la saison ; Tae Kyung étant peut-être celui chez qui ce changement est le plus flagrant. Cependant, l'évolution de Go Mi Nyu ne doit pas masquer les quelques réserves de fond que l'on peut adresser à la base-même de la série. Sans remettre en cause cette absence voulue de réalisme, il me semble dommage que les scénaristes n'aient pas exploré plus concrètement le vrai Go Mi Nam. Lequel est introduit comme une ombre fantomatique dans les derniers épisodes. Il ne constitue qu'un simple prétexte ayant permis de propulser sa soeur dans cet univers, mais n'est jamais reconnu comme un vrai personnage. Cela laisse un goût d'inachevé, car ces quelques images, presque volées, ne permettent pas de fonder de façon cohérente l'idée qui est pourtant à la base de la série. Cela accroît l'impression qu'il ne s'agit que d'un simple artifice scénaristique, une facilité ensuite mise de côté. Le téléspectateur reste ainsi quelque peu frustré, insuffisamment satisfait par les résolutions de fin.

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Reste que pour nous immerger dans cette ambiance, le casting se révèle globalement efficace. La série doit beaucoup à son acteur principal masculin, Jang Geun Suk (Hwang Tae Kyung), déjà croisé dans Hong Gil Dong ou Beethoven Virus. Parfaitement à l'aise pour s'identifier à son personnage, charismatique, intense et maniéré, il délivre une très solide performance, prouvant qu'il peut désormais assurer sans faillir le rôle majeur dans un drama, excellant dans un registre très expressif, à des lieues de cette impassibilité qui avait divisé les téléspectateurs dans Hong Gil Dong. A ses côtés, si Park Shin Hye (Go Mi Nam/Go Mi Nyu), vue notamment dans Goong S, ne fait pas un garçon très crédible, mais ce n'est pas l'objectif de la série. Au contraire, le plus invraisemblable cela paraît a priori, le plus drôle cela finira le plus souvent, grâce à des situations exploitant un ressort comique généralement des plus improbables. Par conséquent, avec son air constamment effarouché et ses grands yeux expressifs, Park Shin Hye s'impose, sans avoir l'air d'y toucher, de façon convaincante. Par ailleurs, pour son premier drama, Jung Yong Hwa reste prudemment cantonné au rôle du jeune homme mignon et très posé, finalement assez effacé. Cela convient tout à fait à son personnage de Shin Woo. Enfin, Lee Hong Ki apporte une touche de folie spontanée et bon enfant à son personnage de Jeremy. 

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Bilan : You're Beautiful est une série souvent drôle, maniant un humour par l'absurde qui lui permet d'enchaîner les situations les plus improbables sans faire sourciller le téléspectateur qui aura bien du mal à ne pas éclater de rire devant certaines scènes. L'ensemble se révèle attachant et plein de vie. Si bien que les ficelles scénaristiques exploitées, d'un classique confinant aux clichés, parfaitement assumé, ne l'empêchent pas d'être un agréable divertissement, misant sur une autodérision salvatrice et un second degré rafraîchissant.

Si je n'ai toujours pas trop compris la fascination que You're Beautiful a suscité lors de sa diffusion, en faisant abstraction du buzz qui l'a entourée, j'avoue que j'ai pris pas mal de plaisir à suivre, sans arrière-pensée, cette série.


NOTE : 7/10


La bande-annonce :


Une des chansons récurrentes du drama, les A.N.JELL interprétant "Promise" :