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17/01/2010

(K-Drama) Bicheonmu (BiChunMoo / Fei Tian Wu) : des destinées tragiques en quête d'un art martial unique



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Un peu d'ouverture supplémentaire en ce dimanche asiatique, puisque le drama dont je vais vous parler aujourd'hui est une coproduction sino-coréenne, nous ouvrant donc à la Chine. Même si je dois vous prévenir que ce n'est pas un pays que vous retrouverez régulièrement dans ces colonnes, notamment en raison du fait que j'ai un peu de difficultés à me faire à la langue (cantonnais ? mandarin ? Je ne sais pas, mes compétences linguistiques en la matière sont proches du néant) -à la différence du japonais ou coréen- et que la longueur  de leurs dramas historiques (qui sont ceux qui m'intéressent le plus a priori) les rend assez imposant. Je n'en ai d'ailleurs vu qu'un seul jusqu'à présent, qui soit un pur c-drama (non une co-production) : il s'agissait d'une des versions du grand classique The Legend of the Condor Heroes, celle de 2003, je pense. De plus, en grande fresque historique, actuellement, je me suis promis de parvenir au bout de Jumong et de ses 81 épisodes (je vous annonce fièrement que j'approche la moitié -je crois que j'en ferais un bilan de mi-série, ou je risque d'oublier les 20 premiers épisodes d'ici que j'arrive à la fin). Une chose à la fois, donc, même si c'est un univers inexploré qu'il faudra que je prenne le temps de découvrir un jour. (D'autant qu'après, il faudra que j'enchaîne sur The Kingdom of the Wind.)

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Pour en revenir au drama qui fait l'objet de la note du jour, il va sans doute marquer une nouvelle étape dans mes découvertes en provenance de ce continent. Oh, il fallait bien que cela arrive un jour. Les dramas historiques sont rarement joyeux, se rapprochant plus d'une succession de tragédies placées sous le signe du destin. Vous savez aussi que j'ai la larme facile. Reste que, après trois ans de découvertes de séries asiatiques, si j'en ai vu des fins tragiques, si j'ai parfois eu les yeux humides, j'étais toujours restée stoïque devant mon petit écran. Jusqu'à Bicheonmu. Où toutes mes belles résolutions ont volé en éclat, tandis qu'une pyramide de mouchoirs se constituait progressivement sur la table basse de mon salon : j'étais déjà en larmes devant l'avant-dernier épisode...

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Bicheonmu fut diffusé en 2006 en Chine, et seulement en 2008 en Corée du Sud, suite à des problèmes de droits d'auteur. Les deux versions seraient différentes, mais je n'ai vu que celle coréenne. Adaptation d'un manhwa éponyme de Kim Hye Rin, cette histoire avait déjà fait l'objet d'un film, sorti en 2001 et disponible en DVD en France (sous le titre Bichunmoo). Contrairement à d'autres fresques historiques dont la longueur peut faire hésiter, il s'agit d'un drama relativement court pour les standards coréens, puisqu'il ne comporte que 14 épisodes (d'1 heure environ chacun).

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L'histoire est la suivante... Suite à l'assassinat, le jour de sa naissance, de ses parents dont il ignore tout, Jin-Ha a été élevé par un serviteur de son père qui s'est présenté comme son oncle. Il l'a initié aux techniques du BiChun, un art martial ancien et secret que l'on ne peut apprendre que grâce à un manuel unique, que son père a laissé en héritage à Jin-Ha, et dont la puissance attire toutes les convoitises. Coréens exilés du royaume de Goryeo, conquis par l'Empereur Mongol, les deux hommes ont vécu retiré dans la montagne chinoise, déménageant souvent. Jin-Ha croise un jour la belle Sul-Ri. Les deux jeunes gens tombent éperdument amoureux, tandis qu'ils se lient également d'amitié avec un héritier noble de passage, Namgong Jun Kwang. Mais Sul-Ri, fille d'une concubine d'un puissant général mongol, Tarooga, doit suivre son père, lorsqu'il rend une dernière visite à sa mère.

L'enchaînement tragique des évènements commence alors. Ayant passé trop de temps au même endroit, des hommes, qui n'ont jamais cessé de rechercher le précieux manuel d'art martial, surgissent et tuent l'oncle de Jin-Ha. Ce dernier, découvrant peu à peu ses origines, sent son désir de vengeance s'affirmer. D'autant que Namgong Jun Kwang, aveuglé par son amour inconditionnel sur Sul-Ri, profite de l'absence de Jin-Ha pour faire pression sur la jeune femme afin qu'elle l'épouse. Leurs parents s'étaient déjà combattus pour le manuel du BiChun ; le général Tarooga ayant décoché la flèche fatale au père de Jin-Ha, sur ordre du père de Namgong Jun Kwan. Les enfants vont devenir les dépositaires de haines qui ne vont que grandir, tandis que l'amour qui unit Jin-Ha à Sul-Ri ne va, lui, jamais flétrir. Autour d'eux, l'Empire Mongol de la dynastie Yuan se désagrège peu à peu, plongeant le pays dans l'anarchie, bouleversant un peu plus leur univers.

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Comme souvent dans les dramas historiques, la multiplicité des clans (et des peuples représenté ici : coréens, chinois et mongols), les alliances fluctuantes et les noms composés qu'un occidental ne retient pas forcément du premier coup, font que la complexité de la géopolitique mise en scène nous échappe parfois dans les premiers épisodes. Parce que, même s'il y a des indications pour situer chaque personnage, vous êtes peut-être aussi familier que moi avec l'histoire de la Chine (c'est-à-dire, je l'avoue, avec des connaissances proches du néant).

Comme cela m'a tracassé et amené à faire des recherches, autant les partager avec vous. Voici donc le cadre historique de ce drama : Bicheonmu se déroule au XIVe siècle, à la fin de la période de la dynastie mongole des Yuan. Le territoire chinois est alors sous la domination d'un peuple étranger, les Mongols, suite aux conquêtes initiées, un siècle et demi plus tôt, par Gengis Kahn, dont le petit-fils fut le premier empereur de la dynastie Yuan. Secoué de soubressauts et d'affrontements claniques internes, c'est un empire qui sert de champ de batailles, dans le cadre duquel se déroule ce drama. Le héros, Jin-Ha, est, lui, coréen. Son père, dignitaire militaire proche du roi coréen vaincu, était venu en Chine en tant qu'otage. Car, en effet, le royaume de Goryeo (équivalent à la Corée) a été conquis par les Mongols, par le biais de plusieurs invasions successives. Le père de Jin-Ha fut tué par des dignitaires mongols, qui souhaitaient s'approprier le fameux manuel du BiChun. Finalement, Jin-Ha finira par soutenir une famille chinoise, dont la bataille finale du drama va asseoir l'autorité. Cette dernière fera abdiquer la dynastie mongole déclinante et fondera ainsi une nouvelle dynastie : celle des Ming.

Si le drama n'est qu'une reconstitution romancée de l'Histoire, voici à peu près le cadre global à avoir en tête pour bien comprendre les enjeux qui sont posés dans la série.

*C'était la parenthèse culturelle de ce blog (qui a dit que la télévision ne permettait pas de se cultiver ?).*

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C'est donc avec, en toile de fond, cette agitation politique et militaire, que Bicheonmu va prendre toute sa dimension. Il s'agit d'un splendide et puissant drama historique, aux ressorts scénaristiques très classiques mais efficacement mis en scène. La durée relativement courte de la série permet d'éviter toute baisse de rythme : ainsi, l'intensité ne cesse de croître au fil des épisodes, captant le téléspectateur dans le souffle épique et tragique des destins qui se jouent sous ses yeux. En effet, bien plus qu'une simple série traitant de complots et de jeux de pouvoirs dans un cadre médiéval, ce qui frappe, lors de la découverte de cette fiction, c'est la force qui émane de ce récit.

Car Bicheonmu s'inscrit dans la tradition la plus pure de ces tragédies antiques, où les destinées paraissent, dès le départ, déjà écrites dans le sang. Pèse, sur les protagonistes, le poids amer d'une prédestination à laquelle ils ne peuvent échapper. Le téléspectateur assiste, à la fois impuissant et fasciné, à la naissance de sentiments, qui vont poser les germes des trahisons futures, et aux prises de décisions les plus irréversibles, scellant ainsi des désirs de vengeance insubmersibles qui les conduiront à leur perte. Les différents personnages se retrouvent happés, sans toujours en prendre conscience, par ce tourbillon du destin, au sein duquel ils se débattent, mais qu'ils vont toujours finir par accompagner et nourrir.

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Les thèmatiques abordées n'innovent en rien le genre, mais elles sont exposées de façon telle que l'on ne peut être que submergé par cette histoire poignante, sans aucune arrière-pensée. Tous les ingrédients d'une grande épopée tragique sont présents : des triangles amoureux, où les sentiments croisés ne sont pas réciproques, un peuple exilé et opprimé qui aspire à la liberté, un Empire en décrépitude où le pouvoir est en jeu entre les différentes factions qui s'affrontent et un art martial puissant au coeur de toutes les convoitises. Au milieu de tout cela, seule certitude immuable, l'amour, devenu impossible, qui unit Sul-Ri à Jin-Ha, en dépit des distances et des circonstances. Mêlant superbement sentiments et actions, se rapprochant par ce biais de la tradition des films Wu Xia Pian, la force de ce drama réside dans les émotions qu'il sait faire naître, tant auprès du téléspectateur que chez ses personnages.

Si ces derniers paraissent tous enfermés dans une prédestination tragique, dont ils ne peuvent se défaire, héritant de haines mortelles et de rivalités, gravées bien avant leur naissance, ils ne sont pour autant jamais unidimensionnels et vont tous progressivement évoluer au fil du drama. Emportés par leurs choix, le téléspectateur devine le moment où ils dépassent le point de non-retour, scellant définitivement le sort tragique qui les attend. Cette conscience accroît l'impression que tous se mouvent vers une destinée dont ils ne sont pas maîtres, sorte de fatalité chargée d'amertume, à laquelle, en tant qu'observateur extérieur, il est très difficile de rester insensible.

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Pour faire vivre cette histoire, le casting, bi-national comme le drama, se révèle globalement solide. Jin-Ha est interprété de façon assez convaincante par Joo Jin Mo (Dream), lequel parvenant efficacement à traduire l'évolution du personnage, de l'insouciance teintée de naïveté des débuts, jusqu'à la mélancolie douloureuse du chef de guerre endurci par les épreuves que la vie lui a réservées. Park Ji Yoon, même si elle est parfois un peu trop stoïque, incarne avec une grâce certaine l'amour de sa vie, la belle Sul-Ri. Dans le casting principal, le seul acteur avec lequel j'ai eu quelques difficultés est Wang Ya Nan, qui joue Namgong Jun Kwang, l'ancien ami de Jin-Ha qui le trahira pour obliger Sul-Ri à l'épouser. Sa performance ne m'a pas convaincu, trop statique, ses émotions donnaient l'impression d'être vraiment forcées lorsqu'il essayait de les exprimer. Enfin, du côté, des personnages plus secondaires, il faut saluer la présence de Niu Li, en jeune femme noble qui tombera fatalement amoureuse de Jin-Ha, et de son serviteur, dont la fidélité fluctuera, Shi Jun, interprété par Kim Kang Woo (qui jouait Chae Do Woo, dans Story of a Man / The Slingshot).

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Cependant, plus que l'histoire, efficace mais somme toute classique, plus que le casting, ce qui fait la réelle particularité et la force de Bicheonmu, y puisant son essence plus qu'aucun autre drama historique que j'ai eu l'occasion de voir, c'est l'ambiance que la série parvient à créer. Elle est en effet servie par une bande-son absolument magnifique, composées de petites mélodies récurrentes et, surtout, de très belles chansons, à la tonalité chargée de regrets non formulés, qui transportent le téléspectateur et le touchent en plein coeur à chaque fois qu'elles retentissent. J'ai eu des frissons, au cours de certains épisodes, en entendant ces superbes thèmes se superposer si justement aux scènes qu'ils soulignaient. Je pense d'ailleurs qu'une bonne partie de l'intensité émotionnelle générée par ce drama l'est grâce au soutien très bien inspiré de ces musiques. Le travail qui a été fait mérite vraiment d'être salué.

Par ailleurs, toujours sur un plan formel, ce drama bénéficie d'une réalisation travaillée et assez soignée, des beaux décors dans lesquels se déroule l'action jusque dans les chorégraphies des combats (car Bicheonmu est aussi une série d'art martial très efficacement mise en scène). Les images filmées sont parfois vraiment belles ; et les couleurs, presque un peu poussiéreuses en ce sens qu'elles sont moins chatoyantes que dans d'autres k-dramas historiques, confèrent une forme de légitimité supplémentaire, une impression presque légendaire, au récit.

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Bilan : Bicheonmu est une magnifique fresque épique, où les nécessités des luttes de pouvoir autour de la maîtrise d'un art martial supérieur, le Bi Chun, se mêlent à l'intensité des sentiments amoureux qui vont unir et désunir chaque camp. Bien loin d'être un simple drama d'intrigues de cour, il se déroule dans une Chine en proie à la guerre civile, avec en toile de fond la situation confuse et anarchique de la fin de la période de la dynastie Yuan. Mêlant épopée vengeresse, amours impossibles et destins de peuples entiers, l'intensité des émotions sur laquelle ce drama capitalise en fait une oeuvre à part, à mon sens incontournable et indispensable.


NOTE : 7,5/10


Un des aspects les plus marquants de ce drama réside dans sa bande-son. Voici deux morceaux de son OST qui ne peuvent vous laisser indifférents.

BiChunMoo, OST, 2. Nocturne (Park Ji Yoon) (Avec des images de la série) :


BiChunMoo, OST, 9. In a World without You (Han Ul) :


13/12/2009

(K-Drama) Story of a Man / A Man's Story / The Slingshot : un face-à-face prenant


Le rendez-vous dominical asiatique de ce blog : je poursuis d'ailleurs mes explorations sud-coréennes, grâce aux programmes allégés de cette période pour les séries des autres nationalités. Cette semaine, j'ai ainsi commencé deux nouveaux dramas, tout en finissant celui dont je vais vous parler aujourd'hui, entamé il y a une quinzaine de jours.

Essayant d'avoir l'esprit ouvert et d'être organisée, je m'efforce d'alterner les différents genres pour tenter d'acquérir une (très partielle) vision d'ensemble des productions sud-coréennes. Par conséquent, après la comédie romantique et l'historique, je reviens aux fictions contemporaines à suspense avec Story of a Man (aka A Man's Story ou The Slingshot).

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Story of a man est une série diffusée sur KBS2, au cours du printemps 2009. Si elle a retenu mon attention, c'est tout autant pour l'intérêt suscité par la lecture de son synopsis, qu'en raison des bonnes critiques lues sur internet. Composé de 20 épisodes, ce drama, initialement basé sur un concept classique de vengeance, se détache des limites figées de ce genre pour acquérir progressivement une dimension supplémentaire, plus ambitieuse et très prenante.

La série s'ouvre sur le récit des évènements qui vont provoquer cette vendetta. A l'époque, Kim Shin est un jeune homme immature, vaguement irresponsable, incapable de garder un job sur le long terme et qui profite de la vie, aux crochets de son frère aîné. Ce dernier a repris et agrandi l'entreprise familiale, spécialisée dans l'alimentaire. Il s'agit d'une société solide, bien implantée sur ce marché. Or, un jour, sous le prétexte de faire un reportage sur l'industrie, un journaliste monte un sujet diffamatoire, dans lequel il les accuse d'utiliser des produits impropres à la consommation dans leurs recettes. Si une analyse des services d'hygiène les exonèrera quelques semaines après, le mal irréparable est fait. Leurs fournisseurs renvoient leurs produits, plus personne ne les achète, tandis que les banques réclament un remboursement immédiat. Contraint d'emprunter à des organismes peu scrupuleux, acculé de toute part, le frère finit par se suicider, laissant femme et enfants, criblés de dettes. Emporté par sa rage, Kim Shin se rend à la station de télévision, où il menace le journaliste, à ses yeux coupable, avec une arbalette. Condamné à trois ans de prison pour cette "tentative de meurtre", il reçoit, peu après son incarcération, la visite d'une jeune femme, Chae Eun Soo, venue s'excuser au nom de sa famille pour le tort causé à Kim Shin et aux siens. Eun Soo, bonté incarnée, a en effet pris l'habitude au fil des ans d'essayer de réparer les dégâts causés par la puissante entreprise familiale, Chae Dong Construction, qui a en réalité tout orchestré, à l'origine des évènements. Par la suite, la visite méprisante et glaçante du frère d'Eun Soo, Do Woo, achève de fortifier les projets de Kim Shin : il fera tomber Chae Dong Construction, pour venger la mort de son frère. Et ce, même si à l'époque, il n'a pas vraiment conscience de la difficulté de la tâche qu'il vient de s'assigner. Il mettra à profit ses trois années derrière les barreaux pour se faire des relations, au sein du grand banditisme, mais aussi avec un compagnon de cellule, surdoué des marchés boursiers, "Mazinger Hunter", dont l'aide lui sera précieuse par la suite. A sa sortie de prison, commence alors la réalisation de son objectif.

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Cependant, Story of a Man, ce n'est pas seulement un récit de vengeance. A ce fil rouge, viennent se greffer de multiples histoires humaines qui se mêlent les unes  aux autres, enrichissant d'autant la narration et sa portée. L'opposition véritable ne commence d'ailleurs réellement qu'à la mi-saison, après une douloureuse, mais nécessaire, phase d'apprentissage, où Kim Shin et l'équipe qu'il a regroupée autour de lui doivent tout d'abord reconnaître qu'ils ne jouent pas dans la même catégorie que Chae Do Woo, à qui ils n'ont rien à apprendre en terme de machiavélisme et de manipulation. Ainsi, nous assistons progressivement à une lente maturation du "héros", qui tire les leçons de ses échecs et prend la mesure de son ennemi intime. A la naïveté, teintée d'amateurisme, des plans initiaux, succèdent des projets plus ciblés et plus assurés. Cependant, les scénaristes n'isolent pas leurs personnages dans leur guerre, choisissant astucieusement de faire évoluer le "lieu de la bataille" : initialement partie sur le terrain des petites escroqueries et de la spéculation boursière, la série nous conduit jusqu'au projet de construction de complexes immobiliers, dans lesquels se trouve le rêve d'une nouvelle ville de Chae Do Woo. Les armes changent. De nouveaux drames humains viennent se greffer à l'intrigue. Mais il y a également des victimes collatérales dans cet affrontement. Les enjeux se troublent donc peu à peu.

Story of a Man nous raconte donc le développement, et le progressif renversement, des rapports de forces entre les deux personnages principaux. Si, initialement, la haine de Kim Shin est unilatérale, Chae Do Woo le considérant tout au plus comme une vague nuisance pathétique, un changement s'opère peu à peu. La série atteint une intensité supérieure lorsqu'elle entre dans cette phrase d'opposition réelle, où chacun a reconnu en l'autre son ennemi personnel. Ce choc est bien décrit et happe vraiment le téléspectateur. La prise d'assurance de Kim Shin offre finalement à Chae Do Woo un adversaire (presque) de son envergure ; et au bout du compte, c'est ce fameux aspect humain trop négligé, c'est-à-dire les sentiments, qui va jouer un rôle déterminant de déstabilisation.

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Outre l'efficacité de ses intrigues, la richesse des personnages constitue un des atouts majeurs de la série. Leur caractérisation fouillée, se nourrissant d'ambivalences, confère au récit une dimension supplémentaire. L'ensemble est bien servi par un casting très solide, où les acteurs, restant sobres tout en jouant dans des registres très différents, permettent de souligner les spécificités de chacun des personnages.
Dans l'affrontement principal dont Story of a Man raconte l'histoire, les deux acteurs exploitent parfaitement leur opposition de styles. J'ai été impressionnée par la prestation de Kim Kang Woo (Bicheonmu) qui incarne de façon fascinante, et pleine de complexité, Chae Do Woo, l'adversaire du héros. Il parvient à dégager un détachement tel avec l'extérieur, accompagné d'une maîtrise de soi de tous les instants, qu'il en est glaçant, tout autant qu'étrangement magnétique. Au fur et à mesure que la vendetta, dont il est la cible, le déstabilise, de nouveaux aspects de sa personnalité, plus ambivalents, se révèlent, ajoutant au mystère que constitue ce personnage. Son opposant, Kim Shin (Park Yong Ha), joue quant à lui dans un registre plus feutré ; une sorte d'anti-héros que les circonstances vont pousser à mûrir et à prendre, enfin, les responsabilités qu'il avait toujours fuies. Park Yong Ha (Winter Sonata, On air) est convaincant (et craquant) dans ce registre du personnage tour à tour naïf, impulsif, mais toujours attaché à ses principes, qui va apprendre et acquérir la stature nécessaire pour affronter Chae Do Woo. L'opposition est d'autant plus exacerbée que ces deux protagonistes principaux constituent vraiment l'antithèse l'un de l'autre, dans leurs rapports aux autres comme dans leur conception de la vie.

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Du côté des deux rôles féminins majeurs, il y a une forme de passage de relais qui semble s'opérer à mi-saison. Nous avions commencé la série avec en lumière Seo Kyung Ah, belle femme au fort caractère, dont les ambitions d'ascension sociale étaient déjà clairement affichées. Alors qu'elle se mue progressivement en femme fatale, son association avec Chae Do Woo va peu à peu affaiblir le personnage, tout en lui permettant de toucher au but qu'elle s'était fixée. Elle était celle qui prenait, sans s'embarrasser des autres, elle finit par se retrouver dans la peau de la demanderesse, qui dépend de son riche amant, non plus financièrement, mais sentimentalement. Sa consécration apparente scelle aussi la fin de ses illusions ; ainsi qu'une re-évaluation de ses priorités. Tandis que, parallèlement, la douce Chae Eun Soo, la soeur de Do Woo, initialement infantilisée par un entourage qui l'instrumentalise, va elle suivre le chemin de l'émancipation de cette tutelle, pour découvrir de nouveaux horizons. Presque symboliquement, l'une perd sa liberté, au moment où l'autre l'acquière. Même si j'ai eu un peu de mal à me faire à Han Yeo Woon (Chae Eun Soo), elles vont se révéler, avec Park Si Yeon (My Girl), toutes les deux efficaces dans leur rôle.
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Une galerie de personnages plus secondaires, mais tout aussi nécessaires à l'équilibre de la série, complète ce casting. Kim Shin se découvre en effet des alliés de poids dans sa bataille contre Chae Do Woo, qui ne manque, au demeurant, pas d'ennemis. Du touchant Park Ki Woong, qui incarne Ahn Kyung Tae (aka Mazinger Hunter), un jeune surdoué des milieux boursiers souffrant d'une certaine forme d'autisme, jusqu'au déterminé et toujours très posé Do Jae Myung (Lee Philip, qui s'amuse à alterner entre anglais et coréen), un avocat élevé aux Etats-Unis, en passant par l'ancien escroc rangé, mais toujours pragmatique, Park Moon Ho (joué par Lee Moon Shik), les scénaristes prennent vraiment le temps de s'investir dans chacun d'eux. Leur personnalité s'affine, évolue au fil des épisode.
De façon générale, Story of a Man soigne particulièrement la construction des relations entre ses personnages, les approfondissant et les nuançant, ce qui apporte une dimension très humaine à la série, et qui, somme toute, lui confère une âme. Ce n'est pas un simple drama à suspense, qui miserait tout sur son intrigue principale, en négligeant de compléter cet univers. Ici, les liens d'amitié, d'amour ou de haine, qui unissent et désunissent les différents protagonistes, sont toujours intenses, mais sans excès. Ils ne sont pas non plus figés ; cela donne une vraie vitalité à l'ensemble.
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Bilan : Se déroulant dans une ambiance sombre, plutôt pessimiste, Story of a man est une série prenante et intelligente, qui exploite parfaitement les codes de son concept initial de vengeance, tout en étant en mesure d'atteindre une dimension supplémentaire, grâce à la richesse de ses personnages et aux ambiguïtés sur lesquelles joue son écriture. Une fois les deux-trois premiers épisodes de mise en place passés, il est difficile de décrocher d'un drama qui devient de plus en plus addictive, au fur et à mesure que les intrigues se complexifient et que les sentiments viennent se mêler à ces règlements de compte personnels.
Si bien que non seulement j'ai trouvé cette série bien écrite et efficace, mais je l'ai aussi beaucoup aimée, l'histoire comme le casting, ayant passé un très bon moment devant mon petit écran. Je conseille donc fortement cette découverte.


NOTE : 8,5/10

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Quelques images avec, en fond sonore, la chanson de clôture des épisodes :