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19/12/2012

(K-Drama / Pilote) Cheongdamdong Alice : Se Kyung au pays du luxe et de la mode

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En ce mercredi asiatique, reprenons quelques bonnes habitudes et penchons-nous donc sur les nouveautés de ces dernières semaines en Corée du Sud. J'ai été à deux doigts de traiter à nouveau d'un drama special de KBS, à l'image de l'enthousiasmant Art de la semaine dernière, car j'avoue que les séries actuellement diffusées sur les grandes chaînes m'enthousiasment pour le moment assez peu. Aucun de mes visionnages-tests des premiers épisodes n'a été pleinement concluants. J'ai cependant sélectionné celui qui m'a semblé avoir le plus de potentiel, avec certaines réserves : Cheongdamdong Alice.

Ce drama est diffusé sur SBS depuis le 1er décembre 2012, les samedi et dimanche soirs. Il est pour l'instant envisagé pour une durée de 16 épisodes. Cette fiction, dont l'écriture a été confiée à Kim Jo Woon et Kim Jin Hee, et la réalisation à Jo Soo Won, apparaissait sur le papier extrêmement classique dans ses thèmes comme dans la situation mise en scène. Son attrait principal réside en fait dans sa capacité à dépasser le manichéisme avec lequel sont présentés les antagonismes de classe habituellement, pour proposer une héroïne consistante auprès de laquelle il est possible de s'investir.

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Han Se Kyung est une jeune femme ambitieuse qui souhaiterait faire carrière comme designer dans le milieu de la mode. Issue d'une famille avec peu de moyens, sa maxime est la suivante "l'effort est ma force" (en français dans le texte !). Elle est persuadée que si elle s'en donne les moyens, elle pourra réussir ses objectifs, et ce, en dépit des difficultés quotidiennes qu'elle connaît bien, voyant combien ses parents peinent pour joindre les deux bouts. Elle pense son heure enfin arrivée lorsqu'elle décroche un travail dans une société de mode. Cependant, très vite, elle doit déchanter : elle est confinée dans un rôle d'employée à tout faire, devant s'occuper des courses de la femme de l'héritier à qui reviendra la direction de la compagnie.

Se Kyung découvre vite que cette dernière est en réalité une ancienne connaissance de lycée avec laquelle elle avait eu plus d'une altercation, du fait de leurs divergences de vues sur la manière de faire carrière. Yoon Joo est une opportuniste qui a toujours fait en sorte d'utiliser les talents des autres et ses charmes pour parvenir à ses fins : on peut dire qu'elle a réussi puisqu'elle est désormais l'épouse richissime d'un important homme d'affaires. Se Kyung accepte dans un premier temps comme elle peut la situation difficile dans laquelle elle se trouve, peinant à trouver sa place au sein cette compagnie. Finalement, elle comprend que pour réussir, c'est elle-même qui doit changer et s'adapter à ce milieu. Il est trop simpliste de croire que la seule persévérance peut lui permettre d'atteindre ses rêves.

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Si Cheongdamdong Alice peut retenir l'attention du téléspectateur, c'est qu'il semble bien que ce drama ne soit pas un énième simili-conte de fée trop bien huilé, où une innocente pauvre accède au clinquant à paillettes et conquiert l'héritier. Le personnage de Se Kyung est le grand atout de ce drama : c'est une jeune femme ordinaire, qui, si sa famille a en effet peu d'argent, a toujours mené une existence classique, sans avoir subi aucun drame particulier. Elle vit chez ses parents, a un petit ami depuis 6 ans, et cherche sa voie côté professionnel. De plus, elle n'a rien de l'innocente insouciante et/ou ingénue par laquelle démarrent trop de fictions sud-coréennes : au contraire, elle connaît les galères financières et elle a expérimenté le fossé creusé par les différences de conditions sociales. En résumé, c'est une femme moderne, au caractère entier, qui va revoir ses certitudes sur la manière dont elle peut réussir : elle parle donc naturellement au public.

Un des premiers moments clés de la série pour comprendre ce personnage est l'incident autour de la parure en diamants dont elle perd la garantie : cela ne peut que signifier qu'elle a ouvert le sac et a essayé le collier qui n'était pas pour elle. Mais Se Kyung le nie avec innocence à son supérieur. Ce n'est qu'ensuite qu'on découvre qu'elle n'a en effet pas résisté. Le drama quitte ici les éternels clichés du conte de fée : la jeune femme n'est pas une simple employée modèle qui va persévérer obstinément dans son approche besogneuse. En découvrant la position occupée par son ancienne ennemie du lycée qui, partie elle aussi du bas de l'échelle sociale, a, à sa façon, réussi l'ascension et l'accession à ce milieu que les deux femmes ambitionnaient dans leur jeunesse, elle comprend qu'elle doit évoluer. L'amère désillusion qui frappe Se Kyung au cours de ces premiers épisodes, devant rafaler sa fierté et encaisser humiliations et critiques, est un prétexte cohérent à son changement d'approche. Lorsqu'elle confronte son ancienne ennemie sur les ressorts derrière sa réussite, elle entrevoit pour la première fois une façon de véritablement intégrer ce milieu : il faut commencer par le comprendre.

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L'éventuel talent ne fait pas tout. Telle Alice, Se Kyung découvre que un nouvel univers avec des règles qui lui sont propres. Cheongdamdong Alice est assez pessimiste dans sa mise en scène des rapports sociaux, chacun gardant jalousement sa place dans ce monde argenté. Derrière les luxueuses apparences policées, les jalousies et les concurrences sont une réalité permanente : il est nécessaire de se battre constamment. On pourrait y voir une énième déclinaison autour de la thématique de l'argent, chère à nombre de k-dramas, cependant le discours tenu est un décryptage assez cynique qui permet à la fiction de trouver un ton qui lui est propre. Ainsi, comme l'explique le PDG d'Artemis, "Jean Thierry" Cha", en matière de mode, l'apparence est fondamentale. Mais ce n'est pas tant le produit affiché, que son prix qui est déterminant : il est le référent qui fait exhiber fièrement tel sac à main, tel bijou... Les firmes exploitent à leur profit cette surenchère à la consommation qu'elles orchestrent. Derrière cet exposé, on sent que la série essaye de démontrer, sans toujours y parvenir, que l'éclat du luxe mis en scène à outrance n'est pas juste un prétexte narratif, mais qu'elle a quelque chose à dire sur cette démesure. 

Cependant, si son thème peut être intéressant, le démarrage de Cheongdamdong Alice est poussif, notamment en raison d'une écriture qui fait quelques choix discutables. Parmi les problèmes gênants, il y a tout d'abord une tendance à la surenchère émotionnelle, et à une sur-dramatisation de certains enjeux, qui deviennent pesantes, à l'image des tirades larmoyantes qui accompagnent la fragilisation de la relation entre Se Kyung et son petit ami, criblé de dettes. Mettre un terme à une histoire pour une question d'argent, cela est cohérent avec les codes de l'univers posé, mais la façon dont tout cela est amené, avec une telle sur-dose émotionnelle, rend l'ensembe très forcé et artificiel. Ce qui m'inquiète sur la capacité du drama à gérer ensuite le relationnel sans trop de mélo. La deuxième réserve que je formulerais tient plus généralement à la personnalité du PDG d'Artemis : oscillant entre le professionnel doué et aguéri, et l'homme puéril et revanchard derrière le masque, il échappe à tout classement. Cette imprévisibilité pourrait être un atout si les différentes facettes de son caractère avaient plus de liant et de cohésion. Là, on frôle tout simplement la schizophrénie. Et puis, avec de telles bases, il est difficile d'envisager comment pourront évoluer avec cohérence ses rapports avec Se Kyung.

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Cheongdamdong Alice ne compense pas ces limites de fond par des atouts formels. La réalisation est assez quelconque, ne parvenant pas vraiment à souligner les scènes les plus importantes. Sa bande-son est correcte, mais assez vite oubliable, qu'il s'agisse de son thème musical récurrent ou des chansons rythmées qui retentissent. L'ensemble est donc de facture très classique, et le drama ne pourra s'appuyer que sur son scénario pour espérer retenir l'attention du téléspectateur.

Cependant, il dispose d'un autre atout de choix : son actrice principale. Moon Geun Young (The Painter of the wind, Cinderella's Sister) revient au petit écran après un Marry me, Mary! que l'on préfèrera oublier, et elle revient en grande forme. Elle capture à merveille l'ambivalence de son personnage, jouant sur une part d'innocence, mais aussi une détermination sans faille, pour laisser entrevoir, progressivement, toute l'ampleur de Se Kyung. Face à elle, Park Shi Hoo (Prosecutor Princess, The Princess' Man) s'en donne à coeur joie dans le rôle difficilement cernable du PDG d'Artemis ; mais ce côté schizophrénique mal maîtrisé lui en faire un peu trop pour être totalement convaincant. A leurs côtés, on retrouve notamment So Yi Hyun (Swallow the sun, Gloria), Kim Ji Suk (Personal Preference) ou encore Kim Yoo Ri.

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Bilan : Les premiers épisodes de Cheongdamdong Alice laissent une impression mitigée. La grande force du drama est une héroïne au potentiel certain, et un traitement de ses enjeux avec un accent social plus cynique et réaliste que la moyenne. Cela lui permet de dépasser les éternels clichés inhérents aux ascensions sociales relatées comme des contes de fée modernes. Cependant, l'écriture a ses excès et ses maladresses, notamment dans le traitement des relations amoureuses (soit celle passée mal digérée de Jean Thierry Cha, soit celle actuelle de Se Kyung). Si bien qu'on ressort de ces débuts avec une prudente réserve...


NOTE : 5,75/10


Une bande-annonce de la série :

Une chanson de l'OST :


17/11/2010

(K-Drama / Pilote) Queen of Reversals : arbitrage compliqué entre carrière professionnelle et vie personnelle


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Après une escapade japonaise des plus intéressantes, il était temps de retourner en Corée du Sud en ce troisième mercredi asiatique du mois de novembre, afin de s'intéresser aux dernières séries du pays du Matin Calme que j'avais un peu délaissées dernièrement. Ce week-end, je me suis donc arrêtée sur les diverses nouveautés sorties depuis la mi-octobre, en quête d'un petit coup de coeur, ou du moins d'un drama dont les débuts parviendraient plus particulièrement à aiguiser ma curiosité.

Seriez-vous surpris d'apprendre que, tout compte fait, défiant quelque peu mes attentes (mais je suis coutumière du fait), ce n'est ni Daemul, ni Mary Stayed Out All Night (dont la légèreté volatile a fini par faire évaporer mon attention) qui auront retenu mon intérêt téléphagique, mais les premiers épisodes d'une nouvelle série, diffusée depuis le 18 octobre 2010 sur MBC : Queen of Reversals ? Alors même que ce drama avait l'obstacle d'avoir pour lead-in masculin un acteur que j'aime fort peu, finalement, par l'énergie et l'efficacité d'une narration qui ne tergiverse pas, j'ai lancé le second épisode sans hésiter et ait fini la soirée (quasi) conquise. Sans être une suite directe de Queen of Housewives, les deux séries restent quand même liées dans leur inspiration ; cependant, n'ayant pas eu l'occasion de regarder la première l'an dernier, je vais m'abstenir de la moindre référence. 

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Dans le domaine très (voire excessivement) riche des comédies romantiques sud-coréennes, Queen of Reversals investit la thématique de la difficile conciliation - et du choix peut-être nécessaire - entre vie personnelle épanouie et carrière professionnelle rondement menée. Sa spécificité tient à ce que la série va choisir de se concentrer non sur une énième progressive construction d'une relation en amont de toute concrétisation relationnelle, mais, au contraire, sur les conséquences ultérieures causées par la vie de couple, avec les difficultés et ajustements nécessaires pour s'adapter aux exigences du travail. Pour en arriver à ce stade, le premier épisode de Queen of Reversals condense, en une petite heure, toutes les étapes qui requièrent habituellement, au terme de mille et un rebondissements, au moins 20 épisodes dans un k-drama classique pour obtenir une belle concrétisation : à savoir le passage de la première rencontre, petit flirt innocent, jusqu'à l'autel où est célébré le mariage. Pour la série, l'enjeu est ailleurs : la vie après cette union se résume-t-elle bien à la sacro-sainte conclusion "et ils vécurent heureux..." ? Pas si sûr.

Directrice d'un département marketing dans une entreprise importante, Hwang Tae Hee est une professionnelle accomplie. Carriériste assumée, elle s'élève aux responsabilités grâce au soutien de sa mentor et supérieure hiérarchique, Han Song Yi, qui voit en Tae Hee une plus jeune version d'elle-même, qu'elle pourra conduire vers les sommets tant que la jeune femme saura placer ses priorités dans le bon ordre : pourquoi s'embêter du poids d'une famille alors que par l'indépendance financière que permet ce job, elle peut profiter pleinement de la vie sans avoir à faire de compromis constants. Seulement Tae Hee, qui règne en "Mishil" (cf. Queen SeonDeok) sur son département, n'est pas aussi réfractaire à l'idée de partager sa vie avec quelqu'un. La pression parentale et sociale (ciel, 32 ans déjà !), mais aussi les circonstances et cette peur d'une vie solitaire où elle finirait aussi aigrie que sa Song Yi, vont conduire à Tae Hee à rêver de pouvoir cumuler les deux, vie privée et professionnelle pleinement remplie. C'est sur son lieu de travail qu'elle va finalement rencontrer Bong Jun Soo. Si ce dernier a eu une relation passée avec une autre de ses collègues (avec laquelle Tae Hee est déjà à couteaux tirés), leur histoire - un amour qui n'a rien de passionnelle, mais apparaît plus comme une relation saine et confortable - les conduit en moins d'un épisode devant l'autel.

Seulement, loin d'être un achèvement, les problèmes ne font que commencer... Au travail, comme à la maison. Ne se sont-ils pas mariés trop vite, préoccupés qu'ils étaient par une situation stable ? Chacun pourra-t-il réellement faire les compromis nécessaires pour s'adapter à l'autre ?

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Si j'avais initialement été intriguée par la lecture du synopsis, c'est pourtant un autre aspect de Queen of Reversals qui m'a d'abord séduite dès les premières minutes, et littéralement happée dans un récit pourtant encore balbutiant : il s'agit de l'extrême énergie dégagée par son écriture. Bénéficiant d'un style très direct, qui ne laisse pas de place à des tergiversations inutiles, la série se réapproprie tous les codes scénaristiques classiques de la romance sud-coréenne, tout en y distillant une sacrée vitalité et une dynamique communicative. Certes, ce rythme effréné se justifie particulièrement pour le premier épisode qui nous expédie en une petite heure ce que tout drama coréen normalement constitué mettrait une série entière à concrétiser. Mais dans les manières et les propos très directs des uns et des autres, plus qu'une simple commodité narrative, c'est surtout un style propre que Queen of Reversals se découvre. Envisageant ses intrigues avec une étonnante franchise décomplexée, n'hésitant pas à verser dans la comédie, elle s'impose comme une fiction très rafraîchissante, non en jouant sur la corde habituelle de l'innocence diffuse et touchante, si chère aux k-dramas, mais plus dans sa façon sans artifice de mettre en scène des relations, certes compliquées, mais absolument pas alambiquées.

Adoptant une approche finalement plus pragmatique que romantique, le téléspectateur se découvre une proximité presque instinctive avec les situations décrites et les problématiques posées. Ce qui tranche et fait finalement une part de l'originalité de la série, c'est qu'à la différence des comédies romantiques sud-coréennes traditionnelles, qui vont pleinement jouer et capitaliser sur l'affectif du téléspectateur, dans Queen of Reversals, c'est plutôt sur la situation en elle-même que se concentre l'intérêt du téléspectateur. Peut-être est-ce dû à une écriture qui, tout en étant très aiguisée et aimant cultiver un certain décalage, semble dans le même temps assez mature. Ce n'est pas un de ces dramas qui permettra au téléspectateur de fondre devant tel ou tel personnage. Car, finalement, le couple principal, tout en ne provoquant aucune aversion, ne nous prend pas non plus particulièrement par les sentiments. Mais à défaut de nous aveugler dans un émotionnel de circonstances (registre où une série comme Coffee House aura excellé cette année), Queen of Reversals va finalement nous gagner par son histoire. Et c'est déjà en soi une victoire.

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En effet, outre ce style dont la spontanéité permet à la série de bénéficier d'une plaisante sobriété, son second atout réside tout simplement dans son concept. Certes, l'originalité du traitement du thème principal ou la subtilité des mises de scène ne sont pas les priorités de Queen of Reversals. Elle n'hésitera pas non plus à céder à quelques facilités scénaristiques pour le bien de l'avancement de son intrigue. Mais si l'évolution de Tae Hee, passant de la carriériste pré-formatée à la femme qui prend soudain conscience qu'elle ne veut pas finir seule, peut sembler au premier abord assez abrupte, l'ensemble jouit d'une telle dynamique que le téléspectateur n'a aucune peine à la suivre. Se concentrant plutôt sur cette crainte lancinante et communément partagée de la solitude - qui peut d'ailleurs expliquer cette précipitation initiale du couple principal - , la série joue pleinement sur la dualité de sa figure centrale. Après avoir volontairement forcé jusqu'à la caricature les traits des deux extrêmes de ces comportements - entre travail et couple -, le second épisode permet à la série de dépasser ce cadre presque manichéen de départ pour esquisser ce qui va finalement constituer la problématique principale : la conciliation des deux est-elle possible ?

De manière plus subtile et dosée qu'il n'y paraîtrait a prori, c'est une réflexion sur les ambivalences de nos rapports entre ces idéaux, possiblement antagonistes, du professionnel et du personnel, qui s'esquisse à travers la figure centrale. Le premier épisode constitue une étape narrative nécessaire : après avoir souligné à l'excès combien chaque choix de vie semble se rattacher à des comportements opposés, Queen of Reversals opère une synthèse en mettant en exergue les conflits internes de Tae Hee, qui prouve qu'elle n'entend aucunement abandonner l'un ou l'autre. La fausse impression initiale d'un possible cloisonnement entre ces deux vies est rapidement dépassée. Le principe de réalité rattrape le couple. C'est un nouvel équilibre que Tae Hee doit trouver, et ce, en dépit d'une assise professionnelle qui se dérobe. Car au-delà du plan personnel, c'est le cadre social, et ses préconceptions, qui vient complexifier l'ensemble. La série dresse en effet le portrait sans complaisance d'un milieu professionnel machiste, où celles qui veulent réussir doivent faire un choix.

A la question du cumul de ces deux objectifs, se rajoute en plus un autre aspect que l'on pressent déjà dès le second épisode : l'union presque excessivement pragmatique de deux êtres, sans doute plus poussés par la crainte de la solitude que par leur amour réciproque, peut-elle survivre à tous ces obstacles ? Reprenant le processus relationnel à l'envers, c'est peut-être après le mariage que les deux jeunes vont finalement apprendre à se connaître... et à tester la solidité de leurs sentiments.   

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Sur la forme, Queen of Reversals bénéficie d'une réalisation assez traditionnelle, sans valeur ajoutée particulière. Cependant, elle n'hésite pas non plus à dynamiser certaines mises en scène, jouant sur de petits effets de style cartoonesques pour accentuer l'émotionnel de certains moments-clés ou introduire des décalages plus humoristiques et léger dans une tonalité d'ensemble assez sérieuse. Ce minimalisme agrémenté de passages plus proches des comédies romantiques classiques permet au drama de pleinement s'inscrire dans les deux tableaux qu'il s'est fixé : son allure plus mature ne signifie pas qu'il doive sacrifier le registre déluré et faussement ingénu de ce genre télévisuel, satisfaisant ainsi tous ses téléspectateurs.

Enfin, concernant le casting, comme je l'ai dit, Queen of Reversals a la particularité - et le mérite - de parvenir à passer outre les réserves que je pourrais a priori formuler à son sujet. Si Kim Nam Joo (Queen of Housewives) rentre rapidement dans la peau d'un personnage peut-être plus à l'aise et naturel dans le côté autoritaire et maîtrisé de la carriériste que dans le volet fleur bleue de l'amoureuse, je ne pense pas arriver à jamais véritablement adhérer au jeu de Jung Joon Ho (Last Scandal, IRIS), qui incarne son mari. Je n'ai pas été séduite, mais il ne m'a cependant pas non plus dérangé. Tant que l'intérêt du téléspectateur pour l'intrigue n'en pâtit pas, cela reste donc anecdotique. A leurs côtés, Chae Jung Ahn (Coffee Prince, Cain and Abel, Emperor of the Sea) joue le rôle de la rivale, dont la concurrence très personnelle avec Hae Tee s'exerce sur tous les plans, professionnel comme privé. Ha Yoo Mi (Cain And Abel) incarne la froide personnalité de l'ancienne mentor. Enfin, Park Shi Hoo (Iljimae, Prosecutor Princess) est introduit au cours du second épisode, en incarnation d'une des figures les plus classiques de ce genre de drama sud-coréen : le fils prodigue d'une riche famille qui a encore beaucoup à apprendre pour mettre de l'ordre dans son sens des priorités.

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Bilan : Construite autour d'une thématique des rapports entre professionnel et personnel somme toute classique, mais qui trouve toujours un écho actuel particulier, Queen of Reversals séduit l'attention du téléspectateur par son style direct et une tonalité d'ensemble finalement très décomplexée, entre drama et humour. Bénéficiant d'un rythme de narration rapide, qui ne laisse pas place à des tergiversations inutiles, l'écriture de la série se joue des clichés du genre pour se révéler plus mature et réfléchie qu'il n'y paraitrait au premier abord. Insistant sur l'ambivalence et la difficulté des arbitrages de son personnage principal, en filigrane, par petites touches, s'esquisse le portrait d'une génération active moderne qui n'estime plus que ces deux idéaux doivent automatiquement s'exclure l'un, l'autre. Des jeunes adultes qui sont désormais le produit d'une société qui leur a appris à vouloir tendre aux deux ; même si cette dernière ne semble pas toujours prête à dépasser ses préjugés et valeurs traditionnelles.

Plaisante à suivre, faisant preuve d'un dynamisme contagieux et communicatif, Queen of Reversals débute donc sur de solides bases qu'il lui reste donc à faire fructifier. A suivre !


NOTE : 6,75/10


La bande-annonce de la série :

 


La chanson principale de l'OST :


28/04/2010

(K-Drama / Pilote) Prosecutor Princess : apprentissage de la vie pour héroïne pourrie-gâtée



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Dernière protagoniste de la confrontation des mercredi et jeudi soir en Corée du Sud, diffusée sur SBS depuis le 31 mars 2010, Prosecutor Princess est la série qui souffre le plus de la concurrence directe de Cinderella's Sister et de Personal Preference, peinant à dépasser les 10% de part d'audience (même si elle est en constante progression chaque semaine). Mais comme je vous l'avais confié il y a 15 jours, lorsque nous avions entamé la découverte de cette case horaire très concurrentielle en ce printemps, je suis, pour une fois, plutôt en accord avec les téléspectateurs coréens. Cinderella's Sister bénéficiait d'un début accrocheur, Personal Preference laissait entrevoir un certain potentiel, mais Prosecutor Princess démarre avec un pilote poussif, qui ne donne pas forcément envie de laisser une chance à la suite.

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Ne vous laissez pas abuser par l'intitulé de ce drama, en dépit d'une référence directe à l'univers judiciaire, le mot clé du nom anglais est incontestablement "princess", le "prosecutor" servant pour le moment avant tout de titre clinquant permettant de raccrocher l'héroïne à une parcelle de "vraie vie" dans son univers de mode déconnecté. En effet, Ma Hye Ri vient tout juste de finir son école et d'être nommée procureur. Cependant, la première chose qu'elle décide de faire, une fois la cérémonie terminée, est de s'éclipser, écourtant les formalités, pour foncer dans une station de ski où doit avoir lieu la vente aux enchères d'une ligne d'accessoires Grace Kelly, parmi lesquels elle rêve d'acheter une paire de chaussures. Si le pilote passe sans doute plus de temps qu'il est nécessaire dans cet hôtel de luxe, il ne pourrait en tout cas plus insister sur l'ordre des priorités dans l'univers de Ma Hye Ri. Obsédée de mode, frivole, la jeune femme accumule les clichés, tout en faisant preuve d'un caractère très têtu et d'une certaine ingéniosité lorsqu'il s'agit d'obtenir ce qu'elle veut.

Logiquement, le téléspectateur devine l'enjeu initiatique qui va probablement progressivement se mettre en place et sous-tendre la série. L'objectif de Prosecutor Princess sera de transformer cette héroïne pourrie-gâtée en procureur digne de sa fonction. Autant dire qu'il y a du travail. Le pilote s'attache surtut à nous présenter le personnage de Ma Hye Ri en forçant les traits. Superficielle jusqu'à l'excès, la jeune femme semble vivre dans un cocon, complètement déconnecté du monde réel. Et lorsqu'il s'agit de remplir la mission qui est attendue d'elle dans le cadre de son métier, sa conception de celui-ci se révèle également très personnelle. Tandis que la constitution lui sert à protéger son "droit fondamental" à porter des mini-jupes, elle fait prendre un tout nouveau sens au concept de "peines automatiques", ne songeant pas un instant à apprécier la situation personnelle du délinquant comparaissant devant elle et à individualiser la peine qu'elle va lui appliquer. Le contraire de l'idéal d'une justice humaine et proche des justiciables en somme.

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Pour bien souligner le caractère très atypique de Ma Hye Ri, le premier épisode de Prosecutor Princess n'est pas avare en détails présentant la jeune femme sous un jour assez peu flatteur. Même si ces excès sont mis en scène à dessein, les scénaristes coréens versant rarement dans la subtilité quand il s'agit de mettre en scène des stéréotypes aussi flagrants, le téléspectateur se crispe rapidement face à l'héroïne. C'est peu dire que les soucis rencontrés dans sa quête mouvementée à la fameuse paire de chaussures sont accueillis avec une certaine satisfaction. Et on rêve rapidement de l'évènement qui servira d'électrochoc pour lui remettre en place le sens des priorités. Il est donc très difficile de s'attacher au personnage principal, autour duquel se concentre pourtant tout le pilote. Ma Hye Ri ne s'inscrit pas dans un registre de comédie. Elle n'est pas drôle, juste exaspérante et crispante. Au final, les quelques rares passages où elle n'est pas présente sont accueillis comme des parenthèses offrant un bol d'air frais au téléspectateur. J'ai donc un peu le sentiment que les scénaristes en ont trop fait dans cette introduction.

Au-delà des personnages, parmi lesquels seule l'héroïne est proprement présentée dans cet épisode, c'est la narration-même qui serait à revoir. Le pilote traine en longueur. Même si elles posent un cadre et permettent aux différents protagonistes principaux de se croiser avec ce sens de la coïncidence dont les dramas coréens ont le secret, les mésaventures de Ma Hye Ri dans la station de ski manquent en effet foncièrement de rythme. Certes, les scénaristes distillent quelques pistes et posent les futurs twists et "toutéliés" qui règleront la suite du drama. Mais tout se déroule de façon très plate, comme si la superficialité excessive de l'univers de l'héroîne avait anesthésié l'atmosphère globale. Alors qu'on aurait pu s'attendre à des ruptures de tonalité, les accents de mélodrama restent anecdotiques (ce n'est qu'une paire de chaussures...!), et les quelques pointes de légèreté demeurent marginales (un côté comique plus assumé aurait peut-être été le bienvenu).

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Du côté du casting, il est difficile d'émettre le moindre jugement, tant ce premier épisode se focalise sur le personnage de Ma Hye Ri. Rapidement exaspérante, d'une superficialité quasi-revendicatrice, il est logique que Kim So Yeon n'hésite pas à en faire beaucoup - parfois, peut-être un peu trop, dans la lignée de l'écriture du scénario - pour incarner à l'écran cette jeune femme aux priorités bien étrangement agencées pour une juriste se destinant à une telle carrière. J'avais gardé de bons souvenirs de Kim So Yeon dans IRIS, mais pour le moment, j'avoue qu'elle joue, comme son personnage, dans un registre trop porté vers l'excès à mon goût.

A ses côtés, l'amateur de k-dramas retrouve plusieurs habitués du petit écran coréen, notamment deux figures masculines déjà bien éprouvées par leur rencontre avec Ma Hye Ri. Ca m'a fait plaisir de revoir Park Shi Hoo, que je n'avais plus recroisé depuis Iljimae. Et Han Jung Soo poursuit sa route, avec son jeu tout en réserve, après avoir incarné le Général Choi dans Chuno (Slave Hunters) en début d'année.

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Bilan : Prosecutor Princess délivre un premier épisode un peu poussif qui peine à accrocher immédiatement le téléspectateur. La maturation de l'héroïne, enjeu manifeste du drama, s'annonce comme un véritable parcours du combattant. Présentée avec beaucoup d'insistance comme un personnage pourri-gâté, la jeune femme crispe le téléspectateur, plus qu'elle ne lui permet de s'attacher à la série. Manquant de rythme, le pilote pose de façon un peu maladroite et guère subtile les bases futures de l'histoire. Après cette première heure servant surtout d'exposition, il est possible que Prosecutor Princess devienne plus attractif lorsque le drama rentrera véritablement dans le coeur de son sujet ; mais il est probable que la téléspectatrice que je suis ne fera pas preuve de la patience nécessaire pour découvrir la suite.


NOTE : 4/10


La chanson principale de la série, agrémentée d'images issues des premiers épisodes :

 

Le générique de la série: