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31/08/2012

(UK) A Touch Of Cloth, saison 1 : une parodie policière qui connaît ses classiques

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S'il y a bien un genre qui caractérise et envahit le petit écran britannique comme aucun autre, c'est le policier. Comme bien des télévisions dans le monde, les chaînes anglaises ne manquent pas d'enquêtes criminelles, ni ne ratent une occasion de nous immerger au sein de l'institution policière. C'est en partant de ce postulat de départ que Charlie Brooker et Daniel Maier ont imaginé A Touch of Cloth. Le style propre à Charlie Brooker est bien connu, qu'il s'agisse de se réapproprier pleinement les codes d'un genre (horrifique pour Dead Set par exemple) ou de pointer des poncifs modernes (Black Mirror l'an dernier en fut l'exemple le plus poussé).

Avec A Touch of Cloth, la démarche est familière, mais le résultat donne cette fois une comédie-parodie de toutes ces séries policières qui pullulent. Composée de deux parties (de 45 minutes environ), cette première saison est basée sur une histoire de Boris Starling (à qui l'on doit la série Messiah). Le titre "A Touch of Cloth" est à la fois un jeu de mots anglais et un clin d'oeil à Touch of Frost... Voilà de quoi vous donner une idée de là où vous mettez les pieds : une parodie excessive, bourrée de clins d'oeil, et qui se visionne avec d'autant plus de plaisir que le téléspectateur connaît ses classiques policiers. Personnellement, je dois avouer que je me suis beaucoup amusée.

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Le DCI Jack Cloth est un brillant policier brisé par la mort de sa femme, dont il n'a jamais pu retrouver le meurtrier. Hanté (littéralement) par son souvenir, il noie son chagrin dans l'alcool, tandis que son supérieur souhaite le faire suspendre. Il se voit assigner une nouvelle coéquipière en la personne de Anne Oldman, jeune femme ambitieuse véritable workaholic pleinement investie dans son travail. Ils sont appelés à collaborer sur une enquête difficile : une série d'assassinats particulièrement sanglants, où les victimes sont tuées par une arme tranchante assez atypique, une épée. Pour traquer ce serial killer, Cloth et Oldman doivent mobiliser toutes leurs ressources.

A Touch of Cloth est une parodie policière, rafraîchissante dans ses décalages et dans la manière dont elle capture et se réapproprie tous les codes du genre. Sa richesse nécessiterait presque un second visionnage pour saisir tous les petits détails tant elle enchaîne les gags en tout genre sur un rythme enlevé. Ces derniers peuvent être visuels (tels des messages, normalement subliminaux, écrits en toute lettre pour retranscrire le ressenti de la scène ; ou des mannequins pour compléter les figurants), mais aussi sonores, qu'il s'agisse de lignes de dialogue caricaturales ou de la multiplication de jeux de mots (lesquels, pour s'apprécier pleinement, nécessitent sans doute un minimum de maîtrise de la langue anglaise.

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La gestion par l'absurde de tous les poncifs des fictions policières est particulièrement savoureuse, d'autant que A Touch of Cloth est tournée dans les conditions d'un drama en apparence parfaitement sérieux. La série multiplie aussi les références, y compris à des séries américaines : l'obsession pour The Wire est d'ailleurs mise en pleine lumière. En résumé, Charlie Brooker est encore une fois allé au bout et même au-delà de son concept de départ, avec les excès qui accompagnent logiquement cet enchaînement presque trop condensé d'humour. Si les running gags font généralement mouche, il y a quand même quelques longueurs. Cependant l'intrigue tient la route pour offrir un parfait prétexte à une parodie qui a parfaitement décrypté un genre dont elle décode toutes les ficelles sous nos yeux.

Sur la forme, A Touch of Cloth adopte la plus traditionnelle des réalisations policières, ne nous épargnant aucun classique incontournable, à commencer par des scènes nocturnes sous la pluie. C'est très appréciable de voir comment la série soigne vraiment les détails de ses détournements visuels des codes, jusque dans son générique. De plus, elle dispose d'un casting solide, parfaitement emmené par John Hannah (Spartacus, Damages) qui joue bien le jeu et trouve l'équilibre pour ne pas trop en faire. A ses côtés, Suranne Jones (Fives Days, Single Father, Scott & Bailey) offre un pendant très correct tandis que s'établit entre eux la dynamique la plus classique d'un duo de policiers homme/femme. On croise également Julian Rhind-Tutt, Navin Chowdhry, Adrian Bower, Daisy Beaumont ou encore Raquel Cassidy.

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Bilan : Parodie caustique des séries policières modernes, A Touch of Cloth capture à merveille tous les ingrédients de son genre, et met volontairement en lumière tous ses poncifs. Enchaînant les gags jusqu'à l'excès, l'humour se manifeste aussi bien dans les dialogues que dans la mise en scène et les effets visuels proposés. Caricature par l'absurde, avec quelques longueurs mais sans en faire trop, la série apporte finalement une touche rafraîchissante au petit écran. Elle offre un visionnage très amusant et divertissant qui plaira tout particulièrement au téléspectateur maîtrisant ses classiques et ayant vu trop de fictions policières. Sky One a déjà commandé la suite, à voir si l'essai peut être réédité !


NOTE : 7,25/10


La bande-annonce de la série :

29/08/2012

(K-Drama / Pilote) Arang and the Magistrate : la fantôme et le juge, un folklore fantastique à potentiel


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En ce retour du mercredi asiatique après une (brève) pause forcée, restons en Corée du Sud. Tandis que Reply 1997 demeure mon coup de coeur de l'été, mais ce mois d'août a vu arriver d'autres nouveautés dont certaines ont retenu mon attention. Parmi elles, ma préférée est Arang and the Magistrate. Elle est diffusée sur MBC depuis le 15 août 2012, à raison de deux épisodes par semaine chaque mercredi et jeudi soir.

Son histoire s'inspire d'une légende du folklore sud-coréen. Mélange d'historique et de fantastique, le tout entremêlant drame et comédie, la série n'a pas suscité chez moi un coup de foudre immédiat. Mais c'est progressivement, par le soin apporté à son univers mythologique et le développement de ses intrigues, que je peux dire, après 4 épisodes, qu'elle a bel et bien piqué ma curiosité et a su me fidéliser devant mon petit écran.

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Arang and the Magistrate se déroule dans une petite ville, durant l'époque de Joseon. Eun-Oh, fils d'un noble et d'une esclave, a pris la route en quête de sa mère ; c'est ainsi qu'il se retrouve à Miryang. Il dispose d'une faculté rare qu'il garde secrète : celle d'être capable de voir et de toucher les fantômes. Sur le chemin, puis dans la ville, il croise une jeune femme décédée depuis trois ans qui recherche désespérément ce qui lui est arrivé : elle ne sait plus qui elle est, se présentant sous le nom d'Arang. Pour essayer d'attirer l'attention des autorités sur son cas - et éventuellement l'élucider -, elle a pris l'habitude d'apparaître aux nouveaux magistrats nommés dans la ville, provoquant invariablement des frayeurs qui sont fatales aux respectables dignitaires. 

Découvrant que Eun-Oh peut la voir et n'a aucune peur d'elle, Arang intrigue pour qu'il soit nommé magistrat à son corps défendant - le poste n'étant guère recherché au vu des récents précédents mortels. Après avoir opposé un accueil glacial à la jeune fantôme, Eun-Oh s'aperçoit qu'elle porte dans ses cheveux un binyeo identique à celui qu'il avait donné à sa mère. Arang la connaît-elle ? L'a-t-elle croisée quelque part ? Seulement, pour espérer en apprendre plus, il faut l'aider à retrouver la mémoire : découvrir qui elle est et quelles ont été les circonstances de sa mort. Eun-Oh choisit donc de rester magistrat pour le moment... Mais les actions d'Arang, et son obstination à défier les faucheurs, ont attiré l'attention des divinités, et notamment de l'Empereur de Jade qui va lui proposer un surprenant marché.

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Rentrer dans l'univers de Arang and the Magistrate nécessite de lui accorder un peu de temps pour installer ses enjeux. Multi-genres par nature, le drama propose un mélange de comédie et de drame, dont les oscillations constantes peuvent de prime abord dérouter. Parfait symbole de cette difficulté, la scène où Arang raconte, sur un ton plutôt léger, comment elle a involontairement provoqué la mort des magistrats précédents, illustre le paradoxe de ces variations de tonalités, comme si les scénaristes hésitaient sur l'orientation à donner à leur série. Certains dramas s'égarent justement à cause d'une incapacité à trouver la bonne approche pour exploiter un sujet pourtant intéressant. Heureusement, cela ne semble pas être le cas de Arang and the Magistrate qui acquiert progressivement une vraie consistance au fil de ses épisodes.

Après un pilote qui, sans véritablement expliquer la situation, prend le temps de nous familiariser avec les différents protagonistes, les suivants recentrent le récit sur ses grands enjeux. L'intrigue progresse vite ; le mystère de la mort d'Arang et le tournant inattendu que prend sa quête retiennent l'attention du téléspectateur. Parallèlement, tout en donnant suffisamment d'informations pour intéresser, la série conserve aussi ses secrets, distille quelques indices nourrissant les spéculations et aiguise donc la curiosité. Les questions se bousculent. Qu'est-il vraiment arrivé à la jeune femme ? Quel est son lien avec Eun Oh, personnage qui conserve lui-aussi sa part de mystère ? A mesure que l'intrigue s'épaissit, Arang and the Magistrate se détache d'un burlesque limité pour investir une vraie dimension émotionnelle, plus propre à la tragédie, qui sait nous toucher. Les ingrédients sont rassemblés, et le potentiel est là : ne reste qu'à maintenir un souffle narratif conséquent pour emporter le téléspectateur dans le tourbillon des destinées de nos héros.

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Avec ces bases de départ, Arang and the Magistrate aurait pu être une histoire, peut-être efficace, mais relativement quelconque dans les canons sud-coréens. Cependant sa véritable valeur ajoutée, qui fait une bonne partie de l'attrait de ces débuts, tient à l'univers mythologique qu'elle prend la peine de construire pierre après pierre. Rapidement en effet, s'esquisse toute une riche mythologie fantastique. Le drama introduit ses fantômes, chassés par ses sombres faucheurs, et ses shamans qui font le lien avec le monde des vivants. Tous ces intervenants multiples apparaissent comme autant de pions pour des divinités jouant le destin des hommes au cours de leurs parties de jeu de go. Le monde de l'au-delà, et plus particulièrement l'univers de l'Empereur de Jade, adopte une symbolique, résolument féérique, où, si tout n'est pas toujours parfaitement bien exécuté, les idées ne manquent pas.

Réveillant l'imaginaire, la mythologie introduit ses créatures, mais aussi ses codes à respecter. Plus les scénaristes apportent de détails aux conditions de chacun, des fantômes essayant de se nourrir aux faucheurs non immortels, l'intérêt du téléspectateur pour cet univers grandit... Je dois dire que c'est à cet aspect que je suis le plus sensible : il y a dans Arang and the Magistrate une volonté d'exploiter et de façonner un vrai fantastique qui ne sert pas de simple prétexte à l'intrigue, mais qui est au contraire pleinement intégré au "monde réel", y compris dans la reconstitution historique à laquelle donne lieu le drama. L'intrigue se nourrit de ce fantastique : tout semble orchestré par l'Empereur de Jade dont l'ambivalence intrigue. En prenant peu à peu ses marques, l'histoire légitime dans le même temps tout ce background fantastique. De cette homogénéité se dégage une véritable ambiance et une identité propre à la série.

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Sur la forme, Arang and the Magistrate est un fusion sageuk soigné. Le drama profite de son registre historique pour offrir quelques belles reconstitutions en costumes aux couleurs chatoyantes. Comme souvent, la réalisation s'affine et gagne en maîtrise au fil des épisodes. L'esthétique correspond vraiment à ce que l'on peut attendre de nos jours de ce genre de série. Par ailleurs, j'ai aussi apprécié la bande-son, avec des thèmes instrumentaux qui mêlent résonnances traditionnels et un côté plus rythmé accompagnant efficacement le récit. Cela contribue à lui donner une atmosphère partculière.

Enfin, le drama réunit un casting solide. Il signe le retour de Lee Jun Ki (ou Lee Joon Gi, mais déjà que je ne m'en sors pas avec les noms des acteurs, si en plus il faut changer la romanisation de leur nom une fois que je l'ai retenue au milieu de leur carrière, je déclare forfait...) après son service militaire. Quand je pense que le dernier drama dans lequel je l'ai vu devait être Time between Dog and Wolf, il a bien changé ! Mais ça m'a fait plaisir de le retrouver, d'autant que c'est un acteur qui sait jouer sur les registres aussi bien comiques que dramatiques. Il n'a pas encore été trop sollicité, mais le duo qu'il forme avec Shin Min Ah (The Devil, My Girlfriend is a Gumiho) fonctionne très bien, les deux acteurs ayant le répondant et la présence nécessaire pour former un duo convaincant à l'écran. A leurs côtés, pour le moment, les autres restent en retrait. On retrouve notamment Yun Woo Jin, Hwang Bo Ra, Kwon Oh Joong, Han Jung Soo, Yoo Seung Ho ou encore Park Joon Gyu.

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Bilan : Plus que le potentiel indéniable de son concept et son mélange des tonalités qui n'amoindrit cependant pas la force du récit - même s'il faudra surveiller ses développements à moyen terme -, Arang and the Magistrate se démarque par la richesse de l'univers qui se construit sous nos yeux. La série bâtit une vraie mythologie, le fantastique étant imbriqué dans l'histoire, et non cantonné à un simple arrière-plan distant et dépaysant. Tout n'est pas exempt de reproches : le drama a ses maladresses et des scènes parfois un peu inutiles qui génèrent quelques longueurs. Mais il séduit par son imagination, ce qui est déjà un très bon point, et donne donc envie de découvrir la suite.


NOTE : 6,75/10


Une bande-annonce du drama :

Une chanson de l'OST :


28/08/2012

(Pilote US) Copper : un crime drama historique sur la police new yorkaise en 1864

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Il flotte comme un air de rentrée sur les grilles des programmes télé tandis que s'achève ce mois d'août. Parmi les premières séries de la nouvelle saison à arriver sur nos écrans, une de celles dont j'attendais le plus était Copper. Vous me connaissez : un crime drama historique, avec pour décor le New York des années 1860, et avec à la création Tom Fontana et Will Rokos, cela aiguise forcément la curiosité sur le papier. D'autant qu'il s'agit de la première série originale de BBC America.

Copper aurait pu être pour la police new yorkaise ce que City of Vice a été pour les bow street runners londoniens (c'était une mini-série de Channel 4 qui m'avait vraiment fasciné)... Malheureusement, après deux épisodes visionnés, elle s'oriente plutôt vers ma liste des déceptions. Il manque quelque chose au récit pour réussir l'immersion proposée. C'est très frustrant. Et je suppose que tous mes espoirs d'un crime drama du XIXe siècle à apprécier en 2012 reposent désormais sur l'anglaise Ripper Street annoncée d'ici la fin de l'année.

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Copper se déroule dans les années 1860, à New York, alors que la Guerre de Sécession fait rage depuis plusieurs années et est bientôt terminée. Son personnage central, Kevin Corcoran, est un détective de police d'origine irlandaise, officiant dans le quartier populaire de Five Points. Il a été mobilisé et s'est battu au sein de l'armée fédérée. Durant son absence, sa femme a disparu et sa petite fille a été tuée. Cherchant à découvrir ce qu'il s'est passé et ce qu'est devenue son épouse, il a repris ses fonctions de policier. Dans le tourbillon d'une société new yorkaise bigarrée, où les couches sociales s'entrecroisent et où les crimes sont nombreux, Corcoran enquête et apporte son concours au maintien de l'ordre. A une époque violente où la justice est aussi relative qu'inégalitaire, la fin justifie bien des moyens... Le tout étant d'y survivre.

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Dans son pilote, Copper part sur des bases très classiques pour une série policière. Si elle semble d'abord correspondre à un procedural traditionnel, le deuxième épisode apporte une continuité plus feuilletonnante, prouvant que la série entend construire des storylines dans la durée. En dépit d'une exécution très prévisible, l'atout principal de Copper réside avant tout dans la valeur ajoutée que constitue son cadre : elle l'a bien compris et s'efforce donc de capturer une ambiance new yorkaise marquée par la violence, tout particulièrement au sein du quartier pauvre dans lequel évolue notre héros où prospèrent crime et prostitution. Les incursions dans les coins plus riches, notamment cette maison close vers laquelle nous conduit la première enquête, montrent aussi que derrière des apparences plus policées, les excès et les dérives se rencontrent tout autant dès que l'on entrouvre les portes closes. Le choix d'évoquer d'emblée la prostitution et le meurtre d'enfant témoigne des intentions de Copper de nous glisser dans ce XIXe siècle. Mais la série peine à happer le téléspectateur dans ce tourbillon qui reste un arrière-plan distant, avec du potentiel, mais bien loin de la force qu'avait pu avoir l'installation du cadre dans Deadwood par exemple (pour rester dans une même époque).

Le problème de Copper tient à un certain manque d'ambition dans son écriture, laquelle reste dans une zone de confort trop convenue. Il y a pourtant nombre de passionnantes thématiques à exploiter : des enjeux raciaux avec le contexte de la guerre, mais aussi le caractère inégalitaire de la justice ou encore la manière dont les puissants restent ostensiblement impunis et intouchables. La conception du métier de policier à l'époque offre suffisamment de contraste avec l'idéal théorique moderne pour pouvoir proposer quelque chose de sombre, de percutant. Par intermittence, la série tente de s'aventurer de manière superficielle sur ce terrain... Mais elle souffre d'un manque de subtilité chronique, cédant à trop de facilités pour être convaincante. Conséquence immédiate, les personnages ne parviennent pas à s'imposer. Entouré d'une galerie de protagonistes unidimensionnels cantonnés à un rôle paresseux de faire-valoir, le héros apparaît comme le prototype calibré de l'époque mise en scène : un vétéran, avec sa part d'ombre et ses failles, et une histoire personnelle marquée de tragédie. Il démontre vite sa conception de la justice, fidèle à ce que l'on pouvait en attendre. Les scénaristes ont souhaité que la série repose sur les épaules de Corcoran, mais le personnage ne peut la soutenir à lui-seul...

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Sur la forme, Copper fait un travail honnête de reconstitution du New York des années 1860. Abusant parfois un peu d'une image très sombre (durant lesquelles on recherche la chandelle qui permettrait de distinguer les ombres), mais qui correspond bien à l'ambiance recherchée, la série sait poser ses décors. Pour provoquer l'immersion, plus que son visuel, c'est sa bande-son fournie qui est mise à contribution : elle est riche en musiques irlandaises qui donnent un certain rythme au récit. Le générique, très semblable visuellement à celui de Anno 1790 (un crime drama historique suédois se déroulant à la fin du XVIIIe siècle - les anachronismes en moins pour Copper), est soigné et bien représentatif de la tonalité d'ensemble. [Pour comparer, le générique de Copper est la 2e vidéo ci-dessous ; celui d'Anno 1790 est par là.]

Enfin la série rassemble un casting correct, mais qui ne fait pas de miracles au vu des limites qui pèsent sur la série. Tom Weston-Jones (Spooks), qui incarne Corcoran, ne m'a pas pleinement convaincu. Certes les scénaristes n'arrivent pas à faire de son personnage le point d'ancrage qu'il devrait être, mais lui-même échoue à apporter un petit plus en terme de présence qui aurait peut-être pu compenser en partie les déficits d'écriture. A ses côtés, on retrouve notamment Kyle Schmid (Blood Ties), Anastasia Griffith (Damages, Trauma, Royal Pains), Franka Potente (The Sinking of the Laconia), Ato Essandoh, Kevin Ryan, Dylan Taylor (, Tessa Thompson, Ron White, Kiara Glasco, David Keeley et Tanya Fischer.

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Bilan : Empruntant les ficelles classiques et rodées des séries policières pour les transposer dans le cadre dépaysant du New York de 1864, Copper avait du potentiel - même sans révolutionner son genre - mais elle ne parvient pas à l'exploiter, ne nous permettant que de l'entrevoir par intermittence. Trop convenue et calibrée, la série manque de souffle et de subtilité, ses personnages souffrant tout particulièrement d'une écriture pas assez ambitieuse pour marquer.

En résumé, je ressors de ces premiers épisodes avec des regrets : aussi passionnants que soient la période et les thèmes abordés, l'ensemble m'aura laissé malheureusement complètement indifférente. Si vous appréciez son sujet, je vous conseille malgré tout de la tester, mais en ayant des attentes moindres que celles que je pouvais avoir.


NOTE : 6/10


La bande-annonce de la série :

Le générique de la série :

25/08/2012

(Mini-série US) Political Animals : un essai de soap politique

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A l'heure des bilans, je dois avouer que cet été aura été quelque peu maussade, apportant, du côté des nouveautés, plus de déceptions que de satisfactions. Non que j'avais des espoirs fous pour toutes (vous connaissez mon optimisme chroniquement mesuré), mais il y avait quand même des séries qui aiguisaient ma curiosité plus que la moyenne : c'était le cas de Political Animals. Sur le papier, Greg Berlanti et Laurence Mark détenaient une fiction à potentiel - de la politique, du familial - porté par un casting cinq étoiles capable de porter un script. Au vu de ces promesses, la désillusion n'en a été que plus grande.

Présentée comme une mini-série, avec une option pour être renouvelée si elle marchait (les audiences n'ont cependant pas été au rendez-vous), Political Animals s'est révélée plutôt être une longe introduction à une suite qui ne viendra probablement pas. Elle compte 6 épisodes d'une quarantaine de minutes environ. Et si USA Network entendait dépasser grâce à elle le registre des buddy shows divertissants dans lequel elle s'est épanouie ces dernières années, ce n'est certainement pas avec Political Animals qu'elle marquera son arrivée dans un autre domaine.

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Elaine Barrish est une ancienne Première Dame des Etats-Unis. Après que son mari, Bud Hammond, ait quitté le bureau oval, dans les années 90, elle s'est lancée dans une carrière politique personnelle pour finalement échouer aux primaires démocrates face à Paul Garcetti. Suite à cette défaite, elle a divorcé et revu ses priorités. La série s'ouvre deux ans après cet échec, alors qu'elle est devenue secrétaire d'Etat pour Garcetti qui a été élu. Cependant ses ambitions n'ont pas disparu : elle a identifié les faiblesses qui lui ont été fatales la dernière fois et caresse le projet de se relancer dans la bataille électorale, quitte à lutter contre le président sortant pour obtenir la nomination démocrate.

Cependant, à côté de sa vie politique, Elaine doit aussi prendre en compte sa famille, et notamment ses fils. Habitués à vivre sous le feu des projecteurs depuis leur enfance, ils n'ont pas composer de la même manière avec la pression : si Doug apparaît a priori comme le gendre idéal, servant de chef de cabinet à sa mère, les choses sont plus difficiles pour TJ. Premier enfant de président des Etats-Unis à avoir fait son coming out durant son adolescence, il a traversé des périodes difficiles qui s'en ressentent toujours sur le fragile équilibre qu'est sa vie d'adulte. De plus, Bud Hammond n'a pas renoncé à retrouver les bonnes grâces de son ex-femme ; et Elaine, tout en ayant conscience qu'il constitue un point faible, personnel et professionnel, n'a pas non plus complètement tourné la page.

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Political Animals comporte deux volets distincts qu'elle tente d'entremêler avec plus ou moins de succès - généralement moins ; elle s'essaie en fait au soap politique. Son principal problème vient justement de ce versant politique. La série l'investit avec l'adresse d'un éléphant lâché dans un magasin de porcelaine : son écriture ferait presque passer Commander in Chief pour une fiction subtile. Dignes d'un vieux téléfilm baclé, les storylines délivrent une vision manichéenne à l'extrême, pas un instant crédible dans leurs développements, se plaçant dans un champ moralisateur qui, en 2012, n'a pas sa place pour aborder de tels enjeux internationaux. Les déclarations de principe dépassent allègrement le simple cadre de l'idéalisme, pour basculer dans un irréalisme maladroit, développant une vision géopolitique binaire extrêmement indigeste. Face à un tel désatre, il eut mieux fallu, pour la crédibilité de la série, qu'elle évite cette incursion politique dispensable - elle aurait pu l'évoquer seulement de loin, sans essayer de nous faire vivre des crises - et se concentre sur son autre aspect, la saga familiale.

Political Animals retrouve en effet quelques couleurs lorsqu'elle se recadre sur la famille Hammond et oublie ses ambitions de sauvetage du monde. Elle devient alors un soap aux grosses ficelles pleinements assumées, aux dynamiques familières vues et revues, mais qui demeure suffisamment efficacement emballé pour retenir l'attention du téléspectateur. Ce dernier se prend au jeu de cette famille, solidaire, mais menaçant aussi à tout moment d'imploser. Sans aller toujours au bout des idées esquissées, la série développe la problématique de la confrontation entre les ambitions professionnelles d'Elaine et une famille que les projecteurs n'ont déjà que trop meurtrie. Certes, les personnages ne sont jamais loin de la caricature. Mais dans ces registres plus émotionnels, la solidité du casting joue et contribue à imposer les différents protagonistes, à asseoir leurs caractères et leurs failles. Si l'intrigue politique reste inachevée au terme de ces six épisodes, le versant soap est lui plus abouti, amenant Elaine à la prise de conscience d'un autre équilibre à trouver, tout en laissant entrevoir suffisamment de blessures qui ne sauraient guérir.

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Déséquilibré et maladroit sur le fond, Political Animals pose également problème sur la forme. J'ai passé une bonne partie de la mini-série à m'interroger sur les intentions qui pouvaient se cacher derrière son montage hasardeux, parfois à la limite de la cohérence. La manie de recourir à des flashbacks constants dans certains épisodes rend la trame narrative, déjà pas toujours très convaincante a priori, assez confuse. A cela s'ajoute des limites formelles indéniables, avec un clinquant trop forcé qui sonne faux. Cependant notons que la série dispose d'un vrai générique, accompagné d'une chanson : c'est suffisamment rare pour être souligné, même s'il a la même absence de subtilité que le contenu de la fiction.

Par-delà tous ces défauts, le seul réel point fort de Political Animals sera resté son casting. Non qu'il ait été capable de miracles et d'empêcher de faire se lever quelques yeux au plafond devant certaines lignes de dialogue, mais il est certainement la raison pour laquelle je suis allée au bout de ces six épisodes. Il laisse cependant des regrets, devant un talent ainsi gâché. Pour son passage au petit écran dans un rôle de femme de pouvoir, Sigourney Weaver met de la conviction pour apporter la présence qu'il convient à l'écran. Son ex-mari est interprété par Ciaran Hinds (Rome) qui confère la démesure nécessaire à son personnage. Sebastian Stan m'a rappelé que j'étais toujours triste de l'annulation de Kings. J'ai été ravie de retrouver le toujours charmant James Wolk, qui m'a rappelé, lui, la trop éphémère Lone Star. Ellen Burstyn (Big Love) incarne quant à elle la mère d'Elaine. Enfin, à l'extérieur de ce clan, Carla Gugino (Treshold, Californication) est une journaliste en quête de scoop qui tente surtout de comprendre le fonctionnement de cette famille. A noter la présence d'Adrian Pasdar (Profit, Heroes), sous-employé, dans le rôle du président Garcetti.

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Bilan : Essai maladroit et inabouti de soap politique, Political Animals laisse le téléspectateur sur une impression de frustration intense au vu du potentiel présent sur le papier et gâché à l'écran. Indigeste, moralisatrice et manichéenne lorsqu'elle évolue dans un champ politique dans lequel elle n'aurait jamais dû se risquer, elle est plus légitime dans son volet soap, sans jamais réussir à échapper à une écriture aux ficelles trop grosses. Il reste au final un casting qui soutient tant bien que mal l'édifice, mais qui ne sauve pas une série tout simplement mauvaise...

NOTE : 4,75/10


Une bande-annonce de la série :

Le générique de la série :

23/08/2012

(ITA) Il Capo dei Capi (Corleone) : l'histoire d'un demi-siècle de Cosa Nostra

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La fin de l'été approchant, il est temps de rédiger quelques bilans des découvertes et nouveautés estivales. C'est de ma DVDthèque qu'est venue une des fictions qui m'a le plus marquée : Il Capo dei Capi. Pour tout vous dire, c'est une mini-série dont j'avais vu le premier épisode l'an dernier. A l'époque, je lui avais trouvé des accents de biopic qui démarrait sur des bases un peu trop scolaires. Je l'avais mise de côté en attendant un regain d'intérêt de ma part. Puis cet été, parmi mes lectures, je me suis notamment plongée dans Cosa Nostra : La mafia sicilienne de 1860 à nos jours de John Dickie. Assez naturellement, j'ai ressorti mes DVD, et cette fois-ci pris le temps de programmer six soirées à consacrer à cette production. Quelle bonne idée ai-je eu là ! Elle est peut-être plus traditionnelle sur certains aspects que Romanzo Criminale, mais elle s'est révélée être bien plus qu'un simple biopic.

Il Capo dei Capi est une mini-série italienne, diffusée sur Canale 5, d'octobre à novembre 2007. Elle compte six épisodes relativement longs, d'une durée de 1h30 à 1h45 chacun. Elle est sortie en France en DVD, avec version originale sous-titrée disponible, sous le titre de Corleone. Relatant un demi-siècle de l'histoire de la Cosa Nostra, elle avait fait quelques remous en Italie lors de sa diffusion. En janvier 2008, Canale 5 avait ensuite diffusé une mini-série qui peut en quelque sorte être considérée comme sa suite : L'ultimo padrino, s'intéressant, après 1993 et l'arrestation de Salvatore Riina, au dernier chef de la Cosa Nostra, jusqu'à son arrestation en 2006.

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Il Capo dei Capi débute dans la campagne sicilienne, à Corleone, au sortir de la Seconde Guerre Mondiale. Les temps y sont durs pour la population pauvre, à majorité paysanne. Le père de Salvatore (dit Toto) Riina se tue en tentant d'ouvrir une bombe américaine qui n'avait pas explosé. Décidé à faire son chemin et à ne plus avoir faim, Riina entraîne ses amis d'enfance, Bernardo Provenzano, Calogero Bagarella et Biagio Schirò, pour se mettre au service de Luciano Liggio, qui travaille pour le chef mafieux local, Michele Navarra. Un choix de vie dont Schirò se désolidarise vite. Tandis que Riina se prend au jeu et gagne en ambition, brûlant les étapes et finissant en prison pour meurtre, Schirò étudie et fait finalement le choix de rentrer dans la police.

Des années 60 jusqu'aux années 90, Il Capo dei Capi nous relate ensuite l'ascension des hommes originaires de Corleone, et plus particulièrement de Riina, au sein de l'organisation de la Cosa Nostra. Cette dernière, avec à sa tête une commission, a jusqu'alors toujours été gouvernée par des familles de Palerme. Contrôlant tous les trafics de l'île, véritable Etat dans l'Etat, la mafia voit se dresser contre elle quelques figures isolées de la justice italienne. Toute sa vie, Schirò traque Riina, pour, le plus souvent, se heurter à l'inertie générale des pouvoirs publics, entre compromission et peur, et à la perte d'amis proches sur le champ d'une bataille qui n'est pas encore reconnue comme telle. La multiplication des assassinats et les premiers témoignages de repentis permettent cependant la mise en branle du système judiciaire... Riina est condamné par contumace au maxi-procès de Palerme en 1987, initié par les juges Falcone et Borsellino, et est finalement capturé en 1993.

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Il Capo dei Capi est une mini-série aboutie, très riche, qui ne cesse de gagner en force tout au long de ses six épisodes. Sa réussite est de ne pas avoir voulu seulement raconter l'histoire de Salvatore 'Toto' Riina, mais d'avoir ambitionné de dresser un portrait d'un demi-siècle d'évolution de la Cosa Nostra. Pour cela, elle nous immerge dans la société sicilienne, partant des conditions de vie très dures de Corleone qui forgent les ambitions de Riina, et décrypte pour nous les rouages du système mafieux d'alors. L'ascension de Riina coïncide avec d'importants bouleversements au sein même de la Cosa Nostra, qui investit de nouvelles activités, comme la drogue, et étend son influence à de nouveaux territoires, notamment aux Etats-Unis. La mini-série ne nous épargne rien des explosions de violence, des assassinats sanglants et des trahisons préméditées qui jalonnent le chemin de celui qui parviendra à concentrer entre ses mains tous les pouvoirs au sein de l'organisation, devenant "il capo dei capi". Elle se fait sobre et abrasive, relatant sans les romancer ces exploits meurtriers, et ce que représente vraiment cette vie criminelle. Le portrait fait sonne ainsi très authentique, avec tous les excès liés aux égos et aux failles humaines de ses différents acteurs.

Série mafieuse travaillée, Il Capo dei Capi trouve aussi sa force dans le fait qu'elle adopte un double point de vue : en parallèle, elle s'arrête sur ceux qui vont tenter de lutter contre ce système et, pour beaucoup, y sacrifier leur vie. Pour suivre ce fil rouge, elle fait le choix judicieux d'introduire un personnage fictif, Schirò. Cet ami d'enfance de Riina, témoin privilégié des évènements depuis le début, est le pendant opposé du chef mafieux. Il Capo dei Capi est en quelque sorte le récit de leurs destins croisés, et d'un affrontement récurrent en filigranne. Par l'intermédiaire de Schirò, on assiste au développement de la lutte antimafieuse, de ses premiers balbutiements, fruits d'initiatives isolées (suicidaires) vouées à l'échec, jusqu'au maxi-procès de Palerme. La lutte semble pourtant toujours très inégale et la vie trop fragile, la violence ne les épargnant jamais. En s'installant dans les locaux du commissariat et du palais de justice, Schirò permet de montrer plusieurs décennies meurtrières qui appartiennent à l'Histoire. La mini-série fait preuve ici aussi de beaucoup de soin dans cette reconstitution, capturant l'atmosphère fiévreuse et pesante d'une époque.

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Appliquée, Il Capo dei Capi acquiert progressivement un véritable souffle, historique et dramatique, de plus en plus prenant, et qui ne va pas cesser de gagner en ampleur jusqu'à sa conclusion. La fiction peut schématiquement se distinguer en deux grandes périodes. Dans ses trois premiers épisodes - et en pointillés jusqu'au quatrième -, elle est une pure fiction de gangsters. La narration y est assez linéaire. Partant de la base, issu d'une campagne pauvre, Riina, stratège avisé, manoeuvre pour atteindre le sommet, se brûlant parfois, mais finissant toujours par parvenir à ses fins. Après avoir pris le contrôle de Corleone, il met ensuite le cap vers Palerme. Accueilli prudemment, il applique consciencieusement l'adage "diviser pour mieux régner" et sait frapper quand il le faut les autres familles. Les exécutions et les guerres rythment ce parcours. Si cette ascension au sein de la Cosa Nostra est racontée de manière efficace, c'est cependant la suite, dans sa seconde partie, qui permet à Il Capo dei Capi d'atteindre une autre dimension, encore plus passionnante : lorsqu'elle se tourne vers une confrontation directe avec l'Etat italien.

Après les premières escarmouches qui avaient été autant de coups d'épée dans l'eau pour Schirò, la mini-série rejoint le fil d'une Histoire plus familière au téléspectateur. Le récit de la lutte entre la Cosa Nostra et des agents de l'Etat voit les protagonistes défiler au rythme de leurs assassinats. La fiction ressort opportunément des images d'archives d'attentat ayant marqué la mémoire collective. Elle n'en souligne que trop l'isolement de ces personnalités qui, en conscience, endossent la responsabilité d'une lutte entremêlant trop d'intérêts contradictoires jusqu'au sommet de l'Etat pour que les camps puissent être clairement distingués. Si Schirò reste toujours présent, il repasse plus en arrière-plan dans les derniers épisodes, où face à Riina, se trouvent désormais Giovanni Falcone et Paolo Borsellino aux côtés desquels Il Capo dei Capi prend le temps de s'arrêter. Leurs succès (le maxi-procès de Palerme), les obstacles qu'ils se voient opposer au sein même de l'appareil judiciaire, et enfin les attentats qui leur coûteront la vie, en 1992, font partie des moments forts de la mini-série. Dans le même temps, le pouvoir et la vieillesse conduisent Riina sur une pente où sa paranoïa et sa démesure provoqueront sa perte.

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Sur la forme, Il Capo dei Capi bénéficie d'une réalisation classique, solide, qui se révèle particulièrement apte à construire une atmosphère particulière. Qu'il s'agisse de recréer le Corleone des années 50, ou encore de dépeindre les explosions de violence dont le récit est parsemé, elle immerge véritablement le téléspectateur dans ses décors. La Sicile reste de plus une belle région, qui est bien mise en valeur. Fiction s'inspirant de faits réels, elle a pleinement conscience que la dimension historique qui l'entoure est également un atout. La mise en scène n'échappe pas toujours à certains excès de dramaturgie, mais l'ensemble reste globalement sobre. Et surtout elle fait le choix d'utiliser des images de la télévision d'alors qui sont restés dans les souvenirs (comme la route défoncée suite à l'attentat à la bombe contre le juge Falcone), mais aussi des flashs d'informations télévisées d'époque. Elle vieillit même volontairement certaines images pour reconstituer des scènes avec ses acteurs (notamment les enterrements). C'est une reconstitution soignée qui est donc proposée.

Enfin, Il Capo dei Capi dispose d'un casting convaincant. Claudio Gioè interprète Salvatore Riina avec une vraie densité. A mesure que l'homme acquiert des responsabilités, il se fait de plus en plus inquiétant : l'acteur lui confère une aura particulière qui prend vraiment la mesure de la figure interprétée et de ce que représente cette ascension pour devenir "il capo dei capi". Face à lui, Daniele Liotti incarne Biagio Schirò avec également beaucoup de présence dans ce rôle frustrant où l'on tente tout, mais on se heurte à tant d'obstacles. Gioia Spaziani et Simona Cavallarie interprètent leurs épouses respectives. Salvatore Lazzaro est celui qui suivra toujours dans l'ombre de Riina, Bernardo Provenzano. Andrea Tidona incarne Giovanni Falcone, et Gaetano Aronica, Paolo Borsellino. On retrouve également Francesco Scianna, Paolo Ricca, Alfredo Pea, Imma Piro, Giuseppe Montana, ou encore Bruno Torrisi.  

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Bilan : Loin de se réduire à juste un biopic sur Salvatore Riina, figure dirigeante de la mafia sicilienne, Il Capo dei Capi est le récit d'un demi-siècle de Cosa Nostra, à travers ses bouleversements internes et l'ascension irrésistible de Riina, mais aussi dans sa confrontation avec l'Etat italien et face au développement de la lutte antimafia. Fiction de gangsters, violente et sanguinolente, elle relate un pan d'histoire criminelle et judiciaire, mais aussi d'Histoire tout court, de la Sicile. Toujours efficace, elle gagne en intensité au fil des épisodes, tout en restant une reconstitution soignée d'une époque.

En résumé, une mini-série recommandée à tous ceux qui s'intéressent à ce sujet, aux sériephiles appréciant les fictions mettant en scène des criminels, et enfin à tous ceux qui souhaitent s'immerger pendant plus de 9 heures dans la Sicile de la seconde moitié du XXe siècle. Et puis à tout téléphage curieux.


NOTE : 8,25/10


La bande-annonce de la série :